« Ahasvérus (RDDM) » : différence entre les versions

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Les fragmens qui vont suivre, pour être compris, exigent quelques observations dont je voudrais à tout prix me dispenser, et qui du moins en un autre endroit me tiendront lieu de préface. A peine commencées, j’ai hâte d’en finir ; car, s’il est quelque chose d’insupportable, c’est de ruminer à vide une seconde fois une œuvre que l’on a crue d’inspiration ; et la seule façon de s’y résoudre, est de faire soi-même sa critique, comme s’il s’agissait de la conception d’autrui.
 
L’ouvrage auquel ces fragmens appartiennent est le résumé de dix ans de vie : poursuivi à travers maints voyages et maintes peines, tant d’esprit que de corps, je peux presque dire que chaque partie a été écrite en présence de son objet, à pied, à cheval, en gondole, sur mer, souvent à l’auberge, dans les cathédrales d’Allemagne, dans les basiliques de Rome, dans les villas de Naples, dans les spitia de Morée. Avec tout cela, à présent que je l’examine froidement, je ne lui trouve nulle chance de succès, et je me rends cette justice, que je n’ai rien fait pour qu’il en eût aucune : son moindre vice est de n’avoir rien de ce qui peut plaire à son é
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poqueépoque. Affirmer qu’en l’écrivant je n’aie songé qu’à l’avenir, c’est un langage qui n’appartient qu’à un petit nombre d’hommes de notre temps, lesquels en auront bientôt fini, j’espère, de nos vides générations d’aujourd’hui ; et cependant il est certain qu’il n’est pas fait non plus pour le moment actuel : il a méprisé le présent, le présent le lui rendra bien.
 
Son sujet est de tous les temps et de ceux qui courent les rues : c’est le dialogue de la vie et de la mort, du bien et du mal, de la matière et de l’esprit, de l’orient et de l’occident, de l’éternité et du temps ; enfin, le lieu commun de l’infini et du fini. Dans ce drame, il y a trois personnages, Dieu, l’homme et l’univers ; mais l’action et la péripétie ne se passent, à véritablement parler, qu’entre les deux derniers.
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L’Orient est le péristyle du grand édifice d’art que le monde construit incessamment ; c’est, si l’on veut, le chœur ou le prologue de la tragédie que l’humanité doit jouer. Son rôle, à lui, est d’évoquer les dieux, d’appeler par la voix de ses peuples les monts, les mers et les cieux encore endormis, pour assister au spectacle qui commence. Tout est encore pacifique et sacré : pas un fil n’est embrouillé dans la vie universelle ; les empires s’asseyent sur leurs gradins, en silence ; sans tourner la tête, comme les sphinx, en chantant leur liturgie, ils attendent que l’énigme se noue. C’est là
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le premier acte, dans l’idée delade la Providence ; il est tout lyrique : INCIPIT OPUS.
 
Le second, le voici : le Christ arrive ; il apporte le glaive, et encore quelque chose ; il apporte la lutte, il apporte l’individualité. Levez-vous, peuples et royaumes ; l’action commence ! Il est venu pour détacher le monde de l’Orient et le précipiter dans l’Occident. La personnalité des nations s’engage, plus tard ce sera celle de l’individu. Arrivez donc, Barbares de toutes races ! A côté du tombeau du Christ, mettez le tombeau de Rome : un Dieu mort ! un monde mort ! deux tombeaux jumeaux ! Il les faut l’un et l’autre pour le berceau d’un double avenir : SIC FINIT ACTUS SECUNDUS.
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Ce type une fois achevé, la question d’art reste encore tout entière. Pour ne pas se briser, quel est le moule assez élastique où cette figure sera jetée ? Sera-ce l’épopée ? Sera-ce l’ode ? Sera-ce le drame ? Aucune de ces formes, on plutôt toutes ensemble. Qu’une seule soit ôtée, et voilà votre géant à la question dans le brodequin de fer. Or le mystère, tel que le monde chrétien l’a conçu, est seul doué d’une telle universalité. Que l’on y pense, et l’on verra que l’idée d’Ahasvérus entraîne inévitablement avec elle ce genre d’expression, et qu’il y a entre ces deux choses une corrélation nécessaire. Le mystère est du peuple comme Ahasvérus. Il est né dans les esprits en même temps que lui ; il enjambe, comme lui, les vallées, les mers et les siècles ; en un mot il est vaste et infini comme lui. Toute autre combinaison s’épuise en vain à se mettre à son pas ; avant la fin de son voyage, hors d’haleine, elle l’abandonne en chemin.
 
J’ajouterai que le mystère est une de ces formes que le moyen âge a laissées inachevées et qu’il appartient aux époques modernes de clôre et de peupler.
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de clôre et de peupler. Il y a mis, lui, sa religion toute nue et sa foi. Pour ne pas les laisser vides, il nous reste, a nous, a y introduire la beauté et le génie ; si nous pouvons, qui n’y furent jamais. Car une société n’est pas plus maîtresse de quitter à son gré les élémens primitifs de son art, que d’extirper les racines de sa langue ; et ces formes indigènes, toujours anciennes, toujours nouvelles, sont des coupes de vermeil dans lesquelles circulent, à la ronde, les idées de chaque siècle à la table des peuples, et qui ne s’usent que lorsqu’elles ont été dûment remplies. L’avenir du drame est dans le mystère.
 
Il est inutile de dire que l’on ne doit chercher ici rien qui ressemble à la vérité locale, ni à la couleur historique, telles qu’elles ont été toutes deux entendues de nos jours. En général, rien ne serait plus facile que d’aligner avec méthode les siècles au bout les uns des autres, avec leurs rois et leurs royaumes, comme on aligne des alexandrins. Dans le poème classique du passé, chaque empire tomberait régulièrement à sa place, comme une rime plate. Il y a des nations qui se gonflent naturellement comme des épithètes sonores. Il y en a qui se traînent invisibles et muettes comme des conjonctions ; et nous savons de bonne source que les générations, qui pourraient au besoin servir d’adverbes parasites et de chevilles ne manquent pas non plus. Mais la vie n’en agit pas ainsi. Elle parcourt à la fois tout l’organisme du passé. La poésie de l’histoire, la vraie, est son anachronisme. Comme l’éternité, elle mêle tous les temps, parce qu’elle les voit, parce qu’elle les sent vivre tous ensemble ; et facilement, mon Dieu ! cette poussière tient, sans tant de façons, dans le creux de sa main.
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SAINTE BERTHE : Seront-ce point, Seigneur, des enfans tout endormis que vous bercerez sans fin, dans vos bras, au-dessus des nuages ? Seront-ce pas des ames dans des villes d’ivoire et qui vivront cent ans des larmes d’une rose ?
 
LE PÈRE ÉTERNEL : Je vous l’ai dit déjà ; avant de créer seulement une étoile de plus, je veux vous expliquer et vous faire connaître le mystère du monde d’où vous sortez. Vous y avez passé sans savoir ce qu’il est. Les uns l’ont vu en Terre-Sainte, les autres en Brabant, les uns dix ans, les autres cent ; mais pas un de vous tous n’a tenu dans sa main ce fruit
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ce fruit tombé de mon rameau pour y chercher le ver rongeur ; pas un n’a soulevé le sceau des mers et des villes ruinées et des tombeaux des peuples que j’entassais toujours pour cacher mes trésors ; pas un ne s’est baissé pour voir verdoyer, dans l’abîme, le germe de mes moissons nouvelles, sous le nuage de la terre.
 
SAINT HUBERT : Seigneur, long-temps j’ai voyagé dans l’Europe et l’Afrique ; j’ai vu des orangers plus hauts que de grands chênes, autour des monastères, des flots plus bleus que la tunique de votre fils unique, sur le chemin de Jéricho, des paillettes et des sables d’argent, aux arbres du désert, la gomme et L’encens de Noël, et dans des roses de Joppé, des larmes de cristal. Serait-il bien possible, mon divin Créateur, que sous ces bois de myrtes, sous ces rivières et ruisseaux transparens, sous ces rochers et murs écroulés, vous eussiez mis encore des merveilles et des trésors magiques qu’aucun homme n’a vus ni touchés de ses doigts ?
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L’OCÉAN :
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L’OCÉAN : J’y cours. A la cime du monde, il ne reste plus déjà que la tour d’un roi où il fait son banquet dans des plats de vermeil. Mon déluge entrera avant une heure dans la salle.
 
LE ROI, à table, au milieu de ses princes : Le déluge, comme un lac, noie les lieux bas, il remplit l’auge des esclaves. Que l’Océan gronde, s’il veut, il ne viendra pas jusqu’ici ; mes gardes l’arréteront à l’endroit de mon royaume.
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LE ROI : Que veux-tu donc ?
 
L’OCÉAN : M’asseoir là, à votre table, à votre place. Allez régner sur mes grains de sable. Encore un pas, et je suis sur votre trône. M’y voici ; qu’on y est à son aise ! Là où était un monde, là est un flocon d’écume ; à mon tour, je suis donc roi. Avec le sceptre je veux jouer, avec la tiare odorante, avec les vases du banquet ; je lèche les coupes des convives jusqu’au fond ; ce vin de roi m’enivre ; mes vagues, qui chancellent, sont mes sujets. Çà, qu’on se courbe jusqu’à terre. A présent qu’on soupire ; à présent qu’on se taise ; à présent qu’on sanglotte. Mes fleuves, en foulant, comme des vendangeurs, les pampres de leurs rives, sont mes échansons qui m’apportent à
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à boire. Ce flot est trop amer ; qu’il retourne à sa source ! Un autre, un autre, et puis cent, et puis mille. A mon caprice que tout se ploie ! D’un souffle, je fais, je défais mes villes mugissantes ; mes murailles, pour me défendre des larrons, ne me coûtent à bâtir jusqu’aux nues, qu’une haleine. Mon royaume n’a point de bords ni de portes pour sortir. La flèche empanachée ne me peut rien ; l’épée qui me frappe se rouille dans mon sein. Au loin, auprès, il n’est pas un voisin qui me pense détrôner. Si je me souille, j’ai de quoi laver ma tache, et rien ne laisse de trace derrière moi que mon manteau, quand le soleil l’empourpre.
 
LE PÈRE ÉTERNEL : Assez, majesté d’écume, goutte d’eau à ton tour, déjà trop enivrée. Voilà, pour ta peine, une herbe déracinée, avec un peu de mousse, à ronger sur mon rivage.
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===TROISIÈME JOURNÉE===
 
 
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V.
 
Des rois et des papes trônent dans mes vallées, ils ont pour château une niche ciselée par un bon ouvrier. Si la pluie en tombant les découronne goutte à goutte, après mille ans, ils ont sur leurs têtes un dais de rochers festonné en trois jours par l’aiguille d’une
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d’une fée. Le rayon du soleil les salue dès qu’il luit ; l’épervier fait son nid sur leurs diadèmes ; le lierre leur refait leur manteau chaque automne. Jour et nuit, depuis mille ans, ils tiennent leurs sceptres levés sur les frimas et sur les orages entassés qui s’agenouillent à leurs pieds.
 
VI.
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IX.
 
Quand les jeunes ouvriers avec leurs truelles furent montés en chantant jusqu’au pied de ma tour, ils dirent au maître : Maître, aurons-nous bientôt fini ? l’ouvrage est long, la vie est courte. Le maître ne répondit rien. Quand les jeunes ouvriers devenus hommes furent montés avec leurs truelles jusqu’à la fenêtre de ma tour, ils dirent
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dirent au maître : Maître, aurons-nous bientôt fini ? voyez ! nos cheveux blanchissent, nos mains sont trop vieilles, nous allons mourir demain. Le maître répondit : Demain, vos fils viendront, puis vos petits-fils, après eux dans cent ans, avec des truelles toutes neuves ; puis, vos petits-neveux ; et personne, ni maître ni ouvrier, ne verra jamais la tour se clore sous le ciel, ni sa dernière pierre. C’est le secret de Dieu.
 
X.
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LE ROI ARTHUS, à sa cour : Non pas, non pas, Lancelot, Tristan, Parceval, mes prud’hommes, ne dites pas que voici la forêt de Brocéliande. Depuis plus de cent ans, j’écoute l’oreille contre terre le cor enchanté de Clingsor. Depuis plus de cent ans, je n’ai pas entendu seulement le char d’une fée heurter de son essieu ma couronne. Pourquoi avons-nous laissé nos coupes à demi pleines sur notre table ronde ? Les nains de Bretagne, si nous étions restés chacun à notre place, nous les auraient remplies jusqu’à la fin du monde. Mais le Christ n’a rien à nous donner. Il n’a ni pain, ni vin, ni panetier, ni échanson, ni écuyer courtois. Regardez ! sa table est vide et creuse. Il n’y tient qu’un convive à la fois. Sa coupe n’est jamais pleine que des gouttes de pluie qui suintent des dalles, une à une, tous les ans.
 
L’EMPEREUR CHARLEMAGNE : Arthus, parlez bas. Si vous faites un pas de plus sur mes dalles, avec vos éperons résonnans, ma barbe blanche, qui reluit, ma bulle impériale, mon pourpoint d’écarlate, mes douze pairs à mes côtés, mon cœur d’aigle des Alpes, mon sceptre à fleur de lis coupé dans une futaie de Roncevaux, s’en vont choir en poussière sur un pan de votre manteau royal ; et vous direz en secouant à
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à terre le pan de votre manteau terni : Mes gendres, où donc est Charlemagne ? Par où est-il passé, sans héraults ni pages, notre empereur, qui tenait tout à l’heure son globe dans sa main, comme un faucon qui dort ? (En se mêlant à la ronde.). Christ ! Christ ! puisque vous m’avez trompé, rendez-moi mes cent monastères cachés dans les Ardennes ; rendez-moi mes cloches dorées, baptisées de mon nom, mes châsses et mes chapelles, mes bannières filées par le rouet de Berthe, mes ciboires de vermeil, et mes peuples agenouillés de Roncevaux jusqu’à la Forêt-Noire !
 
LA CATHÉDRALE : Dans la vallée ombreuse qui mène en Italie, je connais une grotte plus cachée que tes cent monastères ; je connais sur les monts un pic plus haut que tes clochers ; les nuages, en été, flottent mieux que tes bannières filées par le rouet de Berthe ; la rosée est plus fraîche sur une marguerite de Linange que dans tes ciboires de vermeil, et les flots de l’Océan sont mieux courbés vers terre que tes peuples de Roncevaux jusqu’à la Forêt-Noire.
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LE PAPE GRÉGOIRE VII : Et moi, qu’ai-je à faire à présent de ma double croix et de ma triple couronne ? Les morts s’assemblent autour de moi pour que je donne à chacun la portion de néant qui lui revient… Malheur ! le paradis, l’enfer, le purgatoire n’étaient que dans mon ame ; la
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poignée et la lame del’épéede l’épée des archanges ne flamboyaient que dans mon sein ; il n’y avait de cieux infinis que ceux que mon génie pliait et dépliait lui-même pour s’abriter dans son désert… Mais peut-être l’heure va-t-elle sonner où la porte du Christ roulera sur ses gonds… Non, non ! Grégoire de Soana, tu as assez attendu ! Tes pieds se sont séchés à frapper les dalles ; tes yeux se sont fondus dans leurs orbites à regarder dans la poussière de ton caveau ; ta langue s’est usée dans ta bouche à appeler : Christ ! Christ ! et tes mains sont restées vides ; oui, elles sont encore vides, toujours vides comme tout à l’heure ! Regardez, regardez, mes bons seigneurs ; c’est la vérité : voyez ! que tous les morts me cachent leur blessure ! que tous les martyrs mettent leur plaie dans l’ombre ! je n’en peux guérir aucune. J’apporte en retour une toile filée par l’araignée à ceux qui ont donné leur couronne au Christ ; j’apporte, dans le creux de ma main, une pincée de cendres à ceux qui attendaient un royaume d’étoiles dans l’océan du firmament.
 
CHŒUR DE TOUS LES ROIS MORTS : Malheur ! malheur ! Qu’allons-nous devenir ?
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ROSA MYSTICA : J’ai mis tous vos parfums dans ma cassolette ; n’ayez pas peur, ils ne sont pas perdus ; je vous les rendrai pour l’éternité.
 
 
CHŒUR
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CHŒUR DES FLEURS : Sans jamais nous lasser, nous avons grimpé par les sentiers des chamois jusqu’au sommet des Alpes, pour voir notre Seigneur de plus près. Sans jamais plier sur nos genoux, nous sommes descendues fraîches et matinales jusqu’au fond des grottes, pour demander si notre maître ne s’y était point endormi. De nos sommets nous avons vu, sans avoir peur, la lave des volcans frapper à la porte des villes et s’asseoir, comme une foule, au seuil des maisons et sur le banc des théâtres. Du bord de nos cavernes, nous avons vu en souriant les armées, les chariots de guerre, les chevaux à la croupe bondissante, se baigner dans leur rosée de sang, les cimiers se dresser, les écus flamboyer et les épées cueillir leurs fruits mûrs sur la branche de l’arbre des batailles. Quand les sceptres des rois se desséchaient entre leurs mains, quand les peuples, l’un après l’autre, se fanaient dans leur automne, nous venions à leur place germer dans leurs vallées et oindre nos couronnes dans la pluie de leurs caveaux. De notre passé nous ne regrettons pas une heure ; à présent qu’allons-nous devenir ?
 
MATER SANCTISSIMA : Ne craignez rien, je vous cueillerai dans votre haie pour me faire une guirlande, comme une jeune jardinière.
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Le lecteur a pu prendre une première idée d’Alzasvérus par les réflexions dont l’auteur a fait lui-même précéder ces fragmens. Peut-être serait-ce chose bonne à introduire dans nos habitudes littéraires que de pareilles expositions, qui serviraient à initier plus intimement à la pensée de l’écrivain. II arrive trop souvent que l’on se place, à son insu, dans un point de vue tout autre que celui de l’auteur, et cette méprise empêche toute relation de se former entre l’œuvre et la critique. ''Ahasverus'' surtout soulève dans l’art une foule de questions nouvelles, qui ne peuvent se résoudre qu’en le suivant sur son propre terrain. Cet ouvrage important, de quelque manière qu’on le juge, paraîtra vers la fin d’octobre, et il sera alors de notre part l’objet d’un examen particulier. (N. du D.)
 
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