« Esquisse d’une psychologie comparée de l’homme » : différence entre les versions

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''Variabilité.'' — Dire d’une nature mentale que ses actes sont extrêmement inconstants, et dire en même temps que cette na­ture mentale n’est relativement pas sujette aux changements, semble impliquer une contradiction. Mais cette prétendue contradic­tion disparaît si le terme inconstant s’applique aux manifestations qui se succèdent de minute en minute, et si le peu de tendance à se modifier se rapporté aux manifestations moyennes qui s’étendent sur de longues périodes ; on comprend alors que ces deux carac­tères puissent coexister et coexistent même ordinairement. On trouve chez l’enfant, qui se fatigue bientôt de chaque sorte de perception, qui désire toujours un nouvel objet qu’il abandonne bientôt pour autre chose, qui, vingt fois par jour, passe du rire aux larmes, la preuve d’une persistance bien faible de chaque sorte d’action men­tale : en un mot, au point de vue de l’intelligence et de l’émotion, l’enfant est toujours dans un état transitoire. Mais, en même temps, le caractère de son esprit ne se modifie pas facilement. Il se modifie, il est vrai, dans le cours du temps, mais, pendant longtemps, il est incapable de percevoir des idées et des émotions, si ce n’est celles de l’ordre le plus simple. On trouve chez l’enfant dés variations moins rapides, au point de vue de l’intelligence et de l’émotion, tant que sa faculté d’être dressé est plus considérable. Les races humaines inférieures nous montrent une combinaison de cette na­ture : à savoir une grande rigidité de caractère avec une grande irrégularité dans ses manifestations. Généralement parlant, tout en résistant aux modifications permanentes, ces races n’ont ni la conti­nuité de l’intelligence ni celle de l’émotion. Nous lisons dans les récits des voyageurs que les sauvages ne peuvent fixer leur attention pendant plus de quelques minutes sur un sujet quel qu’il soit, qui nécessite un effort de pensée même le plus simple. Il eri’est de même de leurs sentiments qui persistent moins longtemps que ceux des hommes civilisés,
 
Il y a cependant quelques restrictions à faire à ce sujet, et il est indispensable de comparer pour comprendre la nature de ces res­trictions. Le sauvage a beaucoup de continuité, quand il s’agit des actes provoqués par les facultés intellectuelles les plus simples. Il ne se fatigue jamais par exemple des observations les plus minu­tieuses. Il ne se fatigue jamais non plus, quand il s’agit de cette sorte de perception que met en jeu la fabrication de ses armes et de ses ornements ; il reste souvent pendant des périodes fort longues à sculpter une pierre, etc. Au point de vue de l’émotion, il montre aussi une grande continuité, non-seulement dans les motifs qui le poussent à se livrer à ces petites industries, mais aussi pour cer­taines de ses passions et surtout pour la vengeance. ICnEn consé­quence, quand nous étudions le degré de variabilité mentale qu’im­plique la vie quotidienne des différentes races, nous devons nous demander jusqu’à quel point la variabilité est un caractère qui affecte l’intelligence entière ou une partie seulement de l’intelligence.
 
''Impulsion.'' — Ce caractère est très-voisin de celui que nous ve­nons d’examiner : les émotions sans durée sont en effet des émotions qui poussent tantôt dans une direction tantôt dans une autre, sans aucune espèce de suite. Cependant on peut étudier séparément le caractère de l’impulsion, car il implique autre chose qu’un simple défaut de persistance. La comparaison des races humaines inférieures avec les races supérieures semble démontrer qu’en règle générale la violence accompagne les passions peu durables. Les emportements soudains auxquels se laissent aller les hommes de race inférieure sont d’autant plus excessifs qu’ils sont plus courts. Il y a donc pro­bablement quelque affinité entre ces deux caractères : l’intensité pro­duisant un épuisement plus rapide.