« Aurore (Nietzsche)/Livre deuxième » : différence entre les versions
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''L’égoïsme apparent''. – La plupart des gens, quoi qu’ils puissent penser et dire de leur « égoïsme », ne font rien, leur vie durant, pour leur ego, mais seulement pour le fantôme d’ego qui s’est formé d’eux dans l’esprit de leur entourage avant de se communiquer à eux ; – par conséquent, ils vivent tous dans une nuée d’opinions impersonnelles, d’appréciations fortuites et fictives, l’un à l’égard de l’autre, et ainsi de suite toujours l’un dans l’esprit de l’autre. Singulier monde de fantasmes qui sait se donner une apparence si raisonnable ! Cette brume d’opinions et d’habitudes grandit et vit presque indépendamment des hommes qu’elle entoure ; d’elle dépend la prodigieuse influence des jugements d’ordre général que l’on porte sur « l’homme » – tous ces hommes inconnus l’un à l’autre croient à cette chose abstraite qui s’appelle « l’homme », c’est-à-dire à une fiction ; et tout changement tenté sur cette chose abstraite par les jugements d’individualités puissantes (telles que les princes et les philosophes) fait un effet extraordinaire et insensé sur le grand nombre. – Tout cela parce que chaque individu ne sait pas opposer, dans ce grand nombre, un ego véritable, qui lui est propre et qu’il a approfondi, à la pâle fiction universelle qu’il détruirait par là même.
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