« Aurore (Nietzsche)/Livre deuxième » : différence entre les versions

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''Regard vers le lointain''. – Si seules sont appelées morales, ainsi que le veut une définition, les actions que l’on fait à cause du prochain et rien qu’à cause du prochain, alors il n’y a pas d’actions morales ! Si seules sont appelées morales, ainsi que le veut une autre définition, les actions faites sous l’influence de la volonté libre, alors il n’y a encore pas d’actions morales ! – Qu’est-ce donc que l’on nomme ainsi, et qui pourtant existe certainement et veut par conséquent être expliqué ? Ce sont les effets de quelques méprises intellectuelles. – Et, en admettant que l’on se délivrât de ces erreurs, que deviendraient les « actions morales » ? – Au moyen de ces erreurs, nous avons jusqu’à présent prêté à quelques actions une valeur supérieure à celle qu’elles ont en réalité : nous les avons séparées des actions « égoïstes » et des actions « non libres ». Si maintenant nous les adjoignons de nouveau à celles-ci, comme nous devons faire, nous en diminuons certainement la valeur (le sentiment de leur valeur), et cela au-dessous de la mesure raisonnable, puisque les actions « égoïstes » et « non libres » ont été évaluées trop bas jusqu’à présent, à cause de cette prétendue différence intime et profonde. – Seront-elles donc, dès lors, exécutées moins souvent, puisque, dès lors on les estimera de moindre valeur ? – Inévitablement ! Du moins pour un certain temps, aussi longtemps que la balance du sentiment de valeur subira la réaction des fautes anciennes ! Mais en contrepartie nous rendons aux hommes le bon courage pour les actions décriées comme égoïstes et nous en rétablissons ainsi la valeur, – nous leur enlevons la mauvaise conscience ! Et puisque, jusqu’à présent, les actions égoïstes furent les plus fréquentes et qu’elles le seront encore pour toute éternité, nous enlevons à l’image des actions et de la vie son apparence mauvaise.
''Les plus anciens jugements moraux''. - Quelle est donc notre attitude vis-à-vis des actes de notre prochain ? – Tout d’abord, nous regardons ce qui en résulte pour nous, – nous ne les jugeons qu’à ce point de vue. C’est cet effet causé sur nous que nous considérons comme l’intention de l’acte – et enfin les intentions attribuées à notre prochain deviennent chez lui des qualités permanentes, en sorte que nous en faisons, par exemple, « un homme dangereux ». Triple erreur ! Triple méprise, vieille comme le monde ! Peut-être cet héritage nous vient-il des animaux et de leur faculté de jugement. Ne faut-il pas chercher l’origine de toute morale dans ces horribles petites conclusions : « Ce qui me nuit est quelque chose de mauvais (qui porte préjudice par soi-même) ; ce qui m’est utile est bon (bienfaisant et profitable en soi) ; ce qui me nuit une ou plusieurs fois m’est hostile en soi et foncièrement ; ce qui m’est utile une ou plusieurs fois m’est favorable en soi et foncièrement. » O pudenda origo ! Cela ne veut-il pas dire : interpréter les relations pitoyables, occasionnelles et accidentelles qu’un autre peut avoir avec nous comme si ces relations étaient l’essence et le fond de son être, et prétendre qu’envers tout le monde et envers soi-même il n’est capable que de rapports semblables aux rapports que nous avons eus avec lui une ou plusieurs fois ? Et derrière cette véritable folie n’y a-t-il pas la plus immodeste de toutes les arrière-pensées : croire qu’il faut que nous soyons nous-mêmes le principe du bien puisque le bien et le mal se déterminent d’après nous ?
 
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