« Aurore (Nietzsche)/Livre premier » : différence entre les versions

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''Autre crainte, autre certitude''. — Le christianisme avait fait planer sur la vie une menace illimitée et toute nouvelle, et créé, de même, des certitudes, des jouissances, des récréations toutes nouvelles et de nouvelles évaluations des choses. Notre siècle nie l’existence de cette menace, et en bonne conscience : et pourtant il traîne encore après lui les vieilles habitudes de la certitude chrétienne, de la jouissance, de la récréation, de l’évaluation chrétiennes ! Et jusque dans ses arts et ses philosophies les plus nobles ! Comme tout cela doit paraître faible et usé, boiteux et gauche, arbitrairement fanatique et, avant tout, combien incertain tout cela doit paraître, maintenant que le terrible vis-à-vis de tout cela s’est perdu : l’omniprésente crainte du chrétien pour son salut éternel !
''La disposition d’esprit comme argument''. — D’où vient la joyeuse résolution qui s’empare de nous devant l’action ? — C’est là une question qui a beaucoup préoccupé les hommes. La réponse la plus ancienne, qui demeure toujours courante, c’est qu’il faut en faire remonter la cause à Dieu qui nous donne à entendre par là qu’il approuve notre décision. Lorsque l’on interrogeait autrefois les oracles on voulait rentrer chez soi en rapportant cette joyeuse résolution ; et chacun répondait aux doutes qui lui venaient, lorsque se présentaient à son âme plusieurs actions possibles : « Je ferai la chose qui sera accompagnée d’un pareil sentiment. » On ne se décidait donc pas pour ce qu’il y avait de plus raisonnable, mais pour le projet dont l’image rendait l’âme courageuse et pleine d’espérance. La bonne disposition pesait dans la balance comme un argument plus lourd que la raison : puisque la disposition d’esprit était interprétée d’une façon superstitieuse, comme l’effet d’un dieu qui promet la réussite et qui veut ainsi faire parler, à sa raison, le langage de la sagesse supérieure. Or, considérez les conséquences d’un pareil préjugé, lorsque des hommes rusés et avides de puissance s’en servaient — lorsqu’ils s’en servent encore ! « Disposer favorablement les esprits ! » — avec cela on peut remplacer tous les arguments et vaincre toutes les objections !
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