« Aurore (Nietzsche)/Livre deuxième » : différence entre les versions

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''Pour l’histoire naturelle du devoir et du droit''. – Nos devoirs – ce sont les droits que les autres ont sur nous. Comment les ont-ils acquis ? Par le fait qu’ils nous considérèrent comme capables de conclure des engagements et de les tenir, qu’ils nous tinrent pour leurs égaux et leurs semblables, qu’en conséquence ils nous ont fait confiance, ils nous ont éduqués, instruits et soutenus. Nous remplissons notre devoir – c’est-à-dire que nous justifions cette idée de notre puissance qui nous a valu tout le bien que l’on nous fait, nous rendons dans la mesure où l’on nous a donné. C’est donc notre fierté qui nous ordonne de faire notre devoir, – nous voulons rétablir notre autonomie, en opposant à ce que d’autres firent pour nous quelque chose que nous faisons pour eux, – car les autres ont empiété sur l’étendue de notre puissance et y laisseraient la main d’une façon durable, si par le « devoir » nous n’usions de représailles, c’est-à-dire si nous n’empiétions sur leur puissance à eux. Les droits des autres ne peuvent se rapporter qu’à ce qui est en notre puissance : il serait déraisonnable de leur part de nous demander quelque chose qui ne nous appartînt pas. Il faudrait dire plus exactement : seulement sur ce qu’ils croient être en notre puissance, en admettant que ce soit la même chose que ce que nous considérons nous-mêmes comme étant en notre puissance. La même erreur pourrait facilement se produire des deux côtés. Le sentiment du devoir exige que nous ayons sur l’étendue de notre puissance la même croyance que les autres ; c’est-à-dire que nous puissions promettre certaines choses, nous engager à les faire (« libre arbitre »). – Mes droits : c’est là cette partie de ma puissance que les autres m’ont non seulement concédée, mais qu’ils veulent aussi maintenir pour moi. Comment y arrivent-ils ? D’une part, par leur sagesse, leur crainte et leur circonspection : soit qu’ils attendent de nous quelque chose d’équivalent (la protection de leurs droits), soit qu’ils considèrent une lutte avec nous comme dangereuse et inopportune, soit qu’ils voient dans chaque amoindrissement de notre force un désavantage pour eux-mêmes, puisque dans ce cas nous serions inaptes à une alliance avec eux contre une troisième puissance ennemie. D’autre part, par des donations et des cessions. Dans ce cas les autres ont suffisamment de puissance pour être à même d’en abandonner et pour pouvoir se porter garants de cette donation : cas où il faut admettre un faible sentiment de puissance chez celui qui se laisse gratifier. C’est ainsi que se forment les droits : des degrés de puissance reconnus et garantis. Si les rapports de puissance se déplacent d’une façon importante, des droits disparaissent et il s’en forme d’autres, – c’est ce que démontre le droit des peuples dans son va-et-vient incessant. Si notre puissance diminue beaucoup, le sentiment de ceux qui garantissaient jusqu’à présent notre droit se transforme : ils pèsent les raisons qu’ils avaient de nous accorder notre ancienne possession. Si cet examen n’est pas en notre faveur, ils nient dorénavant « nos droits ». De même, si notre puissance augmente d’une façon considérable, le sentiment de ceux qui la reconnaissaient jusqu’à présent et dont nous n’avons plus besoin se transforme : ils essayeront bien de réduire cette puissance à sa dimension première, ils voudront s’occuper de nos affaires en s’appuyant sur leur devoir, – mais ce ne sont là que paroles inutiles. Partout où règne le droit on maintient un état et un certain degré de puissance, on repousse toute augmentation et toute diminution. Le droit des autres est une concession de notre sentiment de puissance à celui des autres. Quand notre puissance se montre profondément ébranlée et brisée, nos droits cessent : par contre, quand nous sommes devenus beaucoup plus puissants, les droits des autres cessent pour nous d’être ce qu’ils ont été jusqu’alors. – L’« homme équitable » a donc besoin sans cesse du toucher subtil d’une balance pour évaluer les degrés de puissance et de droit qui, avec la vanité des choses humaines, ne resteront en équilibre que très peu de temps et ne feront que descendre ou monter: – être équitable est donc difficile et exige beaucoup d’expérience, de la bonne volonté et énormément d’esprit.
''« Non égoïste ! »''. – Celui-ci est vide et voudrait être plein, et celui-là est comblé et voudrait se vider, – tous deux se sentent poussés à chercher un individu qui puisse les y aider. Et ce phénomène, interprété dans un sens supérieur, porte dans les deux cas le même nom : Amour. – Comment ? l’amour serait-il quelque chose de non égoïste ?
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