« Description du château de Pierrefonds » : différence entre les versions

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Au XII<sup>e</sup> siècle le château de Pierrefonds, ou plutôt de Pierrefonts, était déjà un poste militaire d'une grande importance, possédé par un comte de Soissons, nommé Conon. Il avait été, à la mort de ce seigneur qui ne laissait pas d'héritiers, acquis par Philippe-Auguste, et ce prince avait confié l'administration des terres à un bailli et à un prévôt, abandonnant la jouissance des bâtiments seigneuriaux aux religieux de Saint-Sulpice. En vertu de cette acquisition, les ''hommes coutumiers'' du bourg avaient obtenu du roi une « charte de commune qui proscrivait l'exercice des droits de servitude, de mainmorte, et de formariage... ; et, en reconnaissance de cette immunité, les bourgeois de Pierrefonds devaient fournir au roi soixante sergents, avec une voiture attelée de quatre chevaux.<sup>[[#1|(1)]]</sup>»
 
Par suite de ce démembrement de l'ancien domaine, le château n'était guère plus qu'une habitation rurale ; mais, sous le règne de Charles VI, Louis d'Orléans, premier duc de Valois, jugea bon d'augmenter ses places de sûreté, et se mit en devoir, en 1390, de faire reconstruire le château de Pierrefonds sur un point plus fort et mieux choisi, c'est-à-dire à l'extrémité du promontoire qui domine une des plus riches vallées des environs de Compiègne, en profitant des escarpements naturels pour protéger les défenses sur trois côtés, tandis que l'ancien château était assis sur le plateau même, à cinq cents mètres environ de l'escarpement.
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Monstrelet en parle comme d’une place de premier ordre et un lieu admirable.
 
Pendant sa construction, le château de Pierrefonds, défendu par Bosquiaux, capitaine du parti des Armagnacs, fut attaqué par le comte de Saint-Pol, envoyé par Charles VI pour réduire les places occupées par son frère. Bosquiaux, plutôt que de risquer de laisser assiéger ce beau château encore inachevé, sur l'avis du duc d'Orléans, rendit la place, qui plus tard lui fut restituée. Le comte de Saint-Pol ne la quitta qu'en y mettant le feu. Louis d'Orléans répara le dommage et acheva son oeuvreœuvre.
 
En 1420, le château de Pierrefonds, dont la garnison était dépourvue de vivres et de munitions, ouvrit ses portes aux Anglais. Charles d'Orléans et Louis XII complétèrent cette résidence ; toutefois, il est à croire que ces derniers travaux ne consistaient guère qu'en ouvrages intérieurs, en distribution d'appartements, car la masse imposante des constructions appartient tout entière au commencement du XVeXV<sup>e</sup> siècle.
 
Le château de Pierrefonds, dont on voit le plan, figure 1re1<sup>re</sup>, au niveau du rez-de-chaussée de la cour, est à la fois une forteresse du premier ordre et une résidence renfermant tous les services destinés à pourvoir à l'existence d'un grand seigneur et d'une nombreuse réunion d'hommes d'armes. Séparé du plateau à l'extrémité duquel il est assis par un fossé A, creusé de main d'homme dans le roc , et dallé avec soin, son entrée principale, G, est précédée d'une vaste basse-cour C, autour de laquelle s'élevaient les écuries, étables et logements des serviteurs. On voit, encore en C' l'abreuvoir circulaire destiné au bétail et aux chevaux. La porte d'entrée de la basse-cour était percée dans le mur de clôture de l'est, F; on retrouve encore sur ce point un des pieds-droits de cette porte. Les trois côtés nord, est et ouest du château dominent des escarpements très-prononcés, au bas desquels s'étend le bourg de Pierrefonds.
 
Pour pénétrer dans le château, il fallait franchir une porte ouverte à l'extrémité du mur des lices, vers le point D, suivre sous les remparts les terrasses E E'E’ E''E’’ entrer par la porte orientale de la basse-cour vers F, traverser diagonalement cette basse-cour, et se présenter devant l'entrée G, percée d'une porte charretière et d'une poterne en équerre s'ouvrant de flanc avec corps de garde. Cette première défense franchie, sous l'énorme tour I du donjon qui la commande verticalement, on se trouvait sur un pont de bois soutenu par deux piles isolées, et on arrivait aux ponts-levis H et K de la porte et de la poterne.
 
Outre les ponts-levis, le couloir d'entrée L était muni de deux portes et d'une herse tombant en arrière de la petite porte du corps de garde M.
 
Ce corps de garde occupait le rez-de-chaussée d'une tour de guet carrée, munie de son petit escalier particulier et de ses latrines N à tous les étages ; car la partie inférieure encore existante de ces latrines, dont la fosse est conservée, montre encore les languettes séparatives de plusieurs chutes. Par elle-même, cette entrée est bien défendue ; et, la porte charretière de la défense extérieure étant ouverte, il était impossible à des gens placés dans la basse-cour de voir ce qui se passait dans la cour intérieure du château. Mais ce qui vient surtout rendre cette entrée difficile à forcer, c'est la grosse tour I du donjon, dont les murs, d'une épaisseur considérable (4m4<sup>m</sup> 60c60<sup>c</sup>), ne sont au rez-de-chaussée percés d'aucune ouverture, et dont les mâchicoulis supérieurs devaient permettre d'écraser les assaillants qui se seraient emparés, soit du pont, soit du fossé. La tour I se relie au donjon proprement dit, de forme carrée, divisé en plusieurs salles, et qui par sa position commande au loin les deux seuls points accessibles du château, c'est-à-dire ses faces sud et sud-est. Mais la construction du donjon mérite d'être examinée avec soin, d'autant mieux que ce logis diffère de ceux des XIIeXII<sup>e</sup> et XIIIeXIII<sup>e</sup> siècles.
 
A Pierrefonds, le donjon est non-seulement le point principal de la défense, c'est encore l'habitation seigneuriale, construite avec recherche et contenant un grand nombre de services propres à rendre ses appartements agréables. Il se compose d'un étage de caves, d'un rez-de-chaussée voûté dont nous donnons le plan, qui ne pouvait servir que de magasins, de dépôts de provisions , et de trois étages de salles munies de cheminées. A chaque étage, la disposition était pareille à celle du rez-de-chaussée ; mais les salles, séparées par des planchers, ne possédaient probablement plus les colonnes que nous voyons sur le plan. De la salle principale des étages supérieurs, à laquelle on arrivait par le grand escalier P, on communiquait à la tour carrée O, par un passage pratiqué dans l'angle de jonction, et ces salles principales étaient éclairées chacune par deux larges et hautes fenêtres percées dans le mur oriental de chaque côté des cheminées. Ce donjon était couvert par deux combles, avec chéneau intermédiaire sur le mur de refend, qui le coupe de l'est à l'ouest. Deux pignons à l'est et deux pignons à l'ouest fermaient ces deux combles.
 
Entre le donjon et la tour sud-est étaient de grandes latrines J, auxquelles on arrivait par un passage détourné ; entre ces latrines et la petite salle sud-est du donjon est, à l'entresol, un retrait prenant jour sur la cour Q. De cette même salle sud-est, au niveau des caves, on communiquait à une petite poterne R donnant sur le fossé et à l'escalier de la tour d'angle. Un gros contre-fort S, à angle du donjon sur la cour principale, était probablement terminé par un échauguette, et formait comme un petit redan qui commandait le couloir de l'entrée L. Le grand escalier P était précédé, du côté le plus en vue de la cour, par un large perron et une loge ou portique qui permettaient au seigneur et à ses principaux officiers de réunir la garnison dans la cour et de lui donner des ordres d'un point élevé. La disposition de ce perron dut être modifiée ; nous avons lieu de croire qu'il n'était dans l'origine qu'une terrasse avec un petit escalier posé sur le côté. Une annexe importante du donjon de Pierrefonds, c'est la tour carrée O. Posée à l'angle nord-est, elle est flanquée de contre-forts portant à leur sommet des échauguettes qui permettaient de voir ce qui se passait dans la campagne par-dessus la courtine T, la seule qui ne soit pas doublée par des bâtiments, car l'espace Q est une cour. En V la courtine T est percée d'une large poterne, munie de vantaux et d'un pont-levis ; le seuil de cette poterne est placé à 8 mètres au-dessus de la base extérieure de la muraille. A partir de cette base, l'escarpement du plateau étant assez abrupt, il n'est guère possible d'admettre qu'un pont à niveau donnât accès à lela poterne ; quoiqu'en face , à 50 mètres environ du rempart, il existe un mamelon qui paraît élevé en partie de main d'homme et qui semble avoir été surmonté d'un châtelet. Nous serions disposé à croire que la poterne V était munie d'une de ces trémies assez fréquemment employées dans les châteaux pour faire entrer, au moyen d'un treuil, les approvisionnements de toute nature sans être obligé d'admettre des personnes étrangères à la garnison dans l'enceinte intérieure; dans ce cas, le châtelet placé sur le mamelon en dehors aurait été destiné à masquer et à protéger l'introduction des approvisionnements. Comme surcroît de précaution, le contre-fort nord-est de la tour O, relié à la chapelle Y, est percé d'une porte garnie de vantaux et d'une herse. Si donc il était nécessaire d'admettre des étrangers dans la cour Q pour l'approvisionnement du château, ceux-ci ne pouvaient pénétrer dans la cour intérieure, ni même voir ce qui s'y passait. Nous verrons tout à l'heure quelle était l'utilité double de cette portéporte X. La tour carrée O possède cinq étages au-dessus du rez-de-chaussée, se démanchant avec les planchers du donjon, et ne communiquant, comme nous l'avons dit, avec ceux-ci que par des passages détournés et des bouts de rampes. C'était un ouvrage qui au besoin pouvait s'isoler, commandait les dehors par son élévation, donnait des signaux aux défenses supérieures de la grosse tour I et en pouvait recevoir. Les deux entrées principales du château, G et V, étaient ainsi fortement protégées par des ouvrages très-élevés et puissants, les deux angles sud-ouest et nord-est du donjon, bien appuyés, bien flanqués, couvraient sa masse. Quant à l'angle sud-est, le plus exposé, il était devancé par une tour très-haute Z, possédant une guette et cinq étages de défense. Ce n'était donc pas par sa propre construction que le donjon de Pierrefonds, l'habitation seigneuriale, se défendait, mais par les appendices considérables dont il était entouré.
 
Les autres parties du château de Pierrefonds ne sont pas moins intéressantes à observer. La grand'salle était en a couverte par une charpente lambrissée avec entraits apparents, suivant l'usage; une large cheminée la chauffait; elle était éclairée par de grandes lucarnes s'ouvrant du côté extérieur, dans le comble lambrissé, et du côté de la cour, probablement par des fenêtres percées dans le mur à quelques mètres au-dessus du sol. La grand'salle était en communication avec une seconde salle b, également chauffée par une cheminée. De cette salle b on parvenait à la tour du coin <<e>>. La construction de cette tour est exceptionnelle, et nous pensons qu'on peut la regarder comme destinée aux oubliettes.