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pendant un temps, entendre nommer cet être qu’il adorait de tout son cœur, sans lâcher contre lui quelques traits de blasphème, sans que ses cheveux se dressassent d’horreur. Il m’avait souvent dit qu’il était tenté de croire qu’il y avait deux âmes en lui, l’une bénissant Dieu pendant que l’autre le blasphémait ; car il ne pouvait comprendre comment le même être pouvait faire à la fois deux choses aussi distinctement opposées l’une à l’autre. » (Mémoires de l’Académie de Berlin, 1759.)

Rien, en effet, de plus incompréhensible, de plus inexplicable que cette force du mal dans une âme d’ailleurs bien disposée, si l’on n’y reconnait pas la possession surnaturelle de l’éternel ennemi du genre humain.


Si le lecteur a lu attentivement les pages qui précèdent, il aura pu se convaincre que, dans toutes les théories inventées par nos physiologistes modernes au nom de l’hallucination, la seule chose claire ou sérieuse qu’on puisse y découvrir, c’est qu’elles sont uniquement faites pour saper la foi au surnaturel, et opposer une vaine apparence de science à l’enseignement si clair et si précis de l’Église catholique sur ce point.

Il n’est pas un fait dans l’histoire de l’Église qui ait échappé à cette tentative insensée de tout ramener aux proportions de l’humain, de tout soumettre aux analyses du scalpel physiologique, depuis les miracles de l’Évangile jusqu’aux phénomènes diaboliques qui se multiplient d’une si étonnante façon dans notre siècle. Tous les prodiges relatés dans les Écritures, « dont le nombre, dit le docteur Calweil, un des plus acharnés adversaires du surnaturel, est presque effrayant pour l’imagination », tous les faits merveilleux rapportés par les historiens les plus graves ou consignés dans les écrits des Pères, dans les légendes des saints martyrs et des solitaires, dans les chroniques des abbayes et des monastères, tout cela ne serait que le produit de cette maladie inventée au xixe siècle, l’hallucination !… Moïse, Abraham, Jacob, Tobie, Samuel, Jésus-Christ, les apôtres et les saintes femmes, les Pères de l’Église, saint Antoine et son historien saint Athanase, sans Cyprien et saint Jean Chrysostome, Eusèbe, Tertullien et saint Augustin, des fous, des hallucinés ! car ces deux mots sont devenus synonymes… Toute perception du merveilleux, du miraculeux, fausse sensation, hallucination, théomanie ou démonopathie !…

Il serait infini de poursuivre les applications de la théorie de l’hallucination à tous les personnages historiques mis en cause ; je dois me borner. Je choisirai donc, parmi les personnages saillants accusés d’hallucination par nos modernes philosophes, un des plus fameux et particulièrement en honneur chez les palladistes, un de ces révoltés qui ont tant fait de mal à l’Église, celui en qui éclate de la façon la plus frappante et la plus irrécusable l’intervention des puissances surnaturelles du royaume infernal : Luther.