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l’ange de Dieu, préposé à notre garde, et le démon particulier, émissaire de Satan, acharné à nous perdre.

Celle lutte assurément peut n’être qu’intérieure et toute spirituelle, la lutte dont parle saint Paul entre les deux Hommes qui sont en nous ; mais il est arrivé maintes fois qu’elle a pris des formes visibles, et que le drame de Faust tiraillé entre les deux influences, céleste et diabolique, s’est sensiblement réalisé.

C’est précisément un de ces cas que Michéa a emprunté à l’histoire du surnaturel, pour essayer d’expliquer ce qu’il appelle les hallucinations discordantes (invention de génie à mettre à côté des hallucinations collectives), non par un état moral où la lutte du bon et du mauvais principes, de Dieu et du démon, est à l’état violent et s’objective extérieurement par la volonté ou la permission de Dieu, mais par une théorie psychologique sur les idées claires et les idées confuses, en lutte dans notre âme. « De cette lutte, dit-il, résulte un fractionnement de l’hallucination, un dualisme très singulier qui semble réaliser le symbole d’Ormuzd et d’Ahriman, le mythe des anges de lumière et des anges de ténèbres, et qui peut-être ne se trouve pas étranger à la création de ces vieux dogmes de l’Orient. »

Or, il allègue à l’appui de cette belle théorie un fait qu’il emprunte à saint Grégoire de Tours, mais où il a bien soin de faire disparaitre tout ce qui, dans la version du saint, enlève au récit le caractère de mythe et le revêt aux yeux d’un lecteur de bonne foi de tous les caractères de la réalité.

Je cite le récit, tel qu’il est dans saint Grégoire de Tours, en ayant soin d’indiquer par des italiques les passages omis par Michéa :

« Parmi tout ce que nous avons appris des vertus de l’apôtre Paul, nous ne signalerons qu’un seul miracle. Il arriva quelque part qu’un homme, poussé par le diable, prépara un nœud coulant pour s’ôter la vie. Dans cette vue, ayant gagné un lieu secret de sa maison, il attacha sa corde à une poutre et se mit à y fixer le nœud coulant. Il ne cessait cependant d’invoquer l’apôtre Paul, en disant : « Aide-moi, saint Paul. » Et voici qu’une figure sale et hideuse, dont les traits ressemblaient à ceux du diable, lui apparut et l’exhortait en lui disant : « Courage ! hâte-toi ! achève promptement ce que tu as commencé ! » Quant à lui, tout en continuant son œuvre, c’est-à-dire tout en s’apprêtant à s’arracher la vie, il persistait à dire : « Ô bienheureux saint Paul ! viens à mon aide ! » Quand le nœud coulant fut prêt, comme le fantôme pressait plus fortement l’homme d’y mettre son cou, tout à coup apparut une autre figure pareille à la première, qui dit à celle-ci : « Fuis, malheureux ! l’apôtre Paul arrive. Il a été invoqué par cet homme, et le voici. » À ces mots, les deux ombres s’évanouirent, et l’homme, revenu à lui-même, faisant sur sa poitrine haletante le signe de la croix, et les joues baignées de larmes, se repentit de sa tentative. Il est