« Le Roman réaliste en Angleterre avec Jane Austen » : différence entre les versions

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— Mon ami, vous me flattez. J’ai certainement eu ma part
 
 
de beauté dans mon temps, mais je n’ai plus maintenant
aucune prétention. Quand une femme a cinq filles à marier,
elle fait mieux de ne plus penser à ses propres charmes.
 
Quand une femme a cinq filles à marier, elle n’a pas
souvent beaucoup de charmes à quoi penser.
 
Non, mais sérieusement, mon ami, il faut que vous alliez
voir Mr. Bingley dès son arrivée dans le pays.
 
Je ne peux pas vous promettre cela, je vous assure.
 
Mais enfin, pensez à vos enfants et au parti que ce serait
pour l’une d’elles. Sir William et Lady Lucas sont décidés à y
aller et pour celtecette seule raison, car en général ils ne font pas
de visites ; vous comprenez bien que si vous n’y allez pas, nous
ne pouvons pas y aller, nous.
 
Vous avez trop de scrupules, ma chère. Je suis sûr que
Mr. Bingley serait enchanté de vous voir. Je vous donnerai
même un mot pour lui, si vous voulez, où je lui dirai que je
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quelque chose en faveur de Lizzy
 
J’espère bien que vous n’allez pas faire une chose pareille.
Lizzy n’a rien de mieux que les autres ; elle n’est pas de moitié
aussi jolie que Jeanne ni de moitié aussi en train que Lydia,
mais elle a toujours été votre préférée.
 
Elles n’ont pas grand’chose pour elles, ni les unes ni
les autres ; elles sont sottes et ignorantes comme toutes les
jeunes filles, mais Lizzy a un peu plus d’esprit que ses sœurs.
 
Mr. Bennett, comment pouvez-vous parler ainsi de vos
enfants ? Vous prenez plaisir à me mortifier, vous n’avez aucun
égard pour mes pauvres nerfs.
 
Vous vous trompez, ma chère amie ; j’ai le plus grand
respect pour vos nerfs, ce sont de vieux amis à moi : il y a
vingt ans que je vous en entends parler avec tant de considération !
 
Ah ! vous ne savez pas ce que je souffre.
 
Si, mais j’espère toujours que vous reprendrez le dessus
et que vous vivrez assez pour voir une foule de jeunes gens
avec cinq mille livres de rentes s’établir dans le voisinage.
 
Il pourrait en venir vingt, à quoi cela nous servirait-il,
puisque vous ne voulez pas aller les voir ?
 
Aussi, je vous donne ma parole, ma chère amie, que
quand il y en aura vingt, j’irai les voir tous.
 
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pas suffi à Mrs. Bennett pour le comprendre. Elle était, elle,
moins difficile à pénétrer : c’était une femme de petit jugement,
de pauvre culture et de caractère incertain ; quand elle était
contrariée, elle se croyait malade ; l’unique souci de sa vie
était de marier ses filles, et elle n’avait pas de plus grandes
joies que les visites et les nouvelles. »
 
 
 
Le même Mr. Bennett conserve, tout au long du roman, son
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voyons pas les choses en noir ; espérons jusqu’au bout que je
pourrai vous survivre. » Lorsque sa quatrième fille s’est fait
enlever, on croirait peut-être qu’il a perdu un peu de sa philosophie :
il admoneste vertement Ketty, la cinquième, lui annonce
qu’elle n’ira jamais plus au bal, qu’elle ne verra pas de dix
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demandé, dans la même matinée, la main de deux de ses filles,
Élisabeth et Jeanne, il ajoute en se retirant « Si quelqu’un
venait pour Marie (la troisième), j’ai tout mon temps ; vous
feriez entrer dans la bibliothèque. »
 
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et puis, si nombreux, que l’impression produite se creuse
lentement, à chaque détail nouveau. Flaubert, Balzac, Daudet,
 
 
travailleront dans le même sens. Elle a de plus le mérite d’être
presque la première, ou, du moins, d’appliquer la première à
des sujets qui lui sont propres une méthode encore très
récente et qu’elle porte à sa perfection, du premier coup. Il y a
quelque chose qui n’est qu’à elle : la pureté de ses livres. Jane
Austen était une jeune fille épanouie dans un milieu honnête
et dont les yeux si perçants n’avaient pourtant pas dépassé la
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On a vu que Jane Austen s’efface derrière son sujet, que son
art est rigoureusement impersonnel. Il faut pourtant s’entendre
là-dessus : un auteur ne disparaitdisparaît pas de son œuvre ; le seul
choix qu’il fait parle pour lui. Il peut ne pas exprimer la sympathie
ou l’antipathie que ses personnages lui inspirent, il ne
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nous saurons si Jane Austen a trouvé la vie révoltante ou
pitoyable. Rien de tout cela ; elle la trouve amusante ; son talent
est sous-tendu d’ironie : une bavarde qui mélange dans son
discours des pommes cuites et les lunettes de sa mère, une
femme qui ne songe qu’à marier ses filles, une petite campa-campagnarde
gnarde qui ne voudrait paapas dire non et ne sait pas dire oui,
c’est drôle, sans que personne sache exactement pourquoi : la
faiblesse humaine nous divertit, les illusions de l’amour-propre
nous enchantent. Et ce spectacle est plus amusant encore pour
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les gens, en quelque sorte, assez pour savoir à l’avance ce
qu’ils feront et ce qu’ils diront, qui jouit de les retrouver à
toute heure absurdes et consistants. Comment l’artiste pourrait-il
il en vouloir à la vie dont les formes sont si variées, la complexité
si attirante et la logique si profonde ? Elle l’amuse trop
pour qu’il lui soit sévère. Jane Austen savait bon gré aux gens