Souvenirs de la Marquise de Créquy de 1710 à 1803/Tome 7/15

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Tome 7


CHAPITRE XV.


Procès contre Nicolas Bézuchet. Nouvelles démarches de l’auteur. — Une visite au Juif Kaiffer. — L’accusateur public Faure. — Sa partialité pour Bézuchet. — Maladie de l’auteur. — Lettre et compte-rendu par le Duc de Penthièvre au Marquis de Créquy. — Condamnation de Bézuchet. — Guérison de l’auteur et continuation de son récit. — Nouvelle accusation contre Bézuchet. — Son emprisonnement et son supplice. — Heureux effet de son imposture. — Mme de Créquy est mise en surveillance et en arrestation chez elle. — Sa comparution au tribunal révolutionnaire. — La toillette des condamnés. — Acquittement de l’Abbé de Fénelon et du Père Guillou. — Accusation portée contre ce missionnaire par des méthodistes. — Les phrases ascétiques en style réfugié — Les crocodiles et les Wesleyens. — Emprisonnement de l’auteur au Luxembourg, à Ste-Pélagie et dans un endroit inconnu. Le régime de la Terreur et les Kantistes. — Le comte Garat, le comte Reynhart et le comte de Rambuteau.

Le tribunat du district avait commencé par envoyer notre faussaire en possession de mon hôtel de Créquy, rue de Grenelle, ainsi que de l’hôtel de Créquy, rue d’Anjou, lequel appartenait à mon fils et ma belle-fille ; mais vous imaginez bien que nous ne voulûmes pas céder la place à Nicolas Bézuchet. Nous interjetâmes appel de cette première sentence ; et comme il y eut un cri d’indignation générale contre l’arrêt et les juges, Bézuchet nous fit défaut à chaque audience, et toute la procédure civile en resta là. L’Assemblée nationale avait envoyé sa requête au comité de législation ; et quoiqu’on l’eût accueilli très favorablement, quand il osa venir à la barre afin d’y présenter son beau Mémoire, on ne savait absolument comment s’y prendre afin de le protéger avec plus d’efficacité. Non content de prétendre à la possession légale de tous nos biens, il réclamait en même temps et aux mêmes titres, la restitution de Chambord qui appartenait au Roi, la possession de Bellevue qui était à Mesdames, et la possession du Plessis-Piquet qui appartenait à je ne sais plus qui, mais qui provenait de la succession de MM. du Guesclin. Il en résultait une complication de difficultés si favorables pour nous, que la majorité de l’Assemblée, sur la proposition de M. de Talleyrand, fut d’avis de renvoyer la plainte au tribunal criminel du département de la Seine.

J’étais bien loin d’être en sécurité sur le résultat de cette ridicule affaire ; il n’y avait aucune espèce de sottises qu’on n’eût déjà fait accroire à la majorité de cette patriotique Assemblée ; ainsi jugez tout ce qu’il y avait à risquer pour nous devant un tribunal inférieur en expérience, en lumières, en consistance, enfin devant une Assemblée nationale au petit-pied[1] !

C’est que j’en ai vu de ces misérables juges en savates et en finge sale ; j’en ai entendu qui s’écriaient le jour où l’Assemblée nationale avait décrété que le droit de faire la paix et la guerre appartenait à la nation. – J’l’avons gagné l’droit d’guerre et d’paix ! J’l’avons gagné ! Guerre aux châteaux !!!

J’avais impérieusement exigé que votre père ne quittât pas notre châtelet de Jossigny pendant toute la durée de ce procès. Je tombai malade de fatigue en revenant de l’audience et je vais laisser parler M. de Penthièvre.

« Marquis, votre courageuse mère est dans son lit pour se dorloter, parce qu’elle a tout le bras droit tyrannisé par une douleur de rhumatisme et que sa main droite en est enflée. Elle se désespère de l’inquiétude qu’elle vous suppose, et je vais la remplacer pour vous tranquilliser tous les deux, je ne vous promets pas de m’en tirer aussi bien qu’elle ; mais j’y mettrai toute l’attention dont je suis capable, et j’entre en matière. La Marquise était allée mardi matin, chez un Juif appelé Kaiffer, et qui demeure, à ce qu’elle veut que je vous dise, rue Saint-Denis, au numéro 495 ; on l’avait exigé d’elle, et c’était pour y conférer sur votre affaire, attendu que cet israélite est un des deux cents citoyens désignés par le syndic général pour juger tout le monde, en exécution de l’art. vi du titre xi de la iie série de la loi du 29 septembre dernier. C’est elle qui me le dicte et qui sait toutes ces belles choses par cœur. Elle avait fait antichambre dans la cour du juif et tout à côté d’un évier de cuisine, avec les pieds sur un pavé qui n’était ni sec ni propre première cause de son indisposition. Il paraît que cet honnête juré, comme on les appelle, est imbu d’une grande défiance et d’un souverain mépris pour tous les Nobles ; aussi la Marquise a-t-elle eu grand soin de lui faire observer que malgré que vous mangeassiez assez souvent du lapin, du lièvre, du lard et de l’anguille, ainsi que des côtelettes de mouton et autres chairs qui avoisinent les entrailles des animaux, et quoique vous ne profitassiez jamais, ni elle non plus, de la licence que prennent certaines gens, par une fausse interprétation du Lévitique, laquelle consiste à filouter tous ceux qui ne sont pas de leur religion, il ne s’en suivait pas du tout que vous eussiez fait infibuler ni saigner personne des quatre membres. Il a dit : On verra ça ; et votre pauvre mère en a été pour ses frais d’antichambre et de conversation avec ce juif. Mon bon Dieu quel, temps pour y vivre ! Voilà les sujets qui veulent régir les souverains, et les chrétiens qui sont jugés par des juifs : il me semble qu’autant vaudrait faire juger les officiers de louveterie par des loups, n’est-il pas vrai ? Le Marquise avait donc été prise de rhume, et je ne l’ai pu voir mercredi, parce que les rues étaient si remplies de mauvaises gens en si grande émotion, que sur ma place des Victoires et du côté de ma fille, on ne pouvait passer outre, et que je n’ai pu sortir de chez moi. J’ai déjà été arrêté sur cette place du Palais-Royal, et quand j’entends dire pour me faire relâcher que je suis le beau-père de qui vous savez, c’est un si douloureux et si honteux bénéfice pour moi, qu’il me semble en recevoir un coup de stylet au milieu du cœur. Mais retournons à votre procès, car tout le monde a ses afflictions, et vous savez que les vôtres ne sauraient être pour moi des contrariétés minimes. Notre-Dame de bon-secours s’est donc fait habiller jeudi matin à la lumière des bougies, car elle était en course dès sept heures et quart. Voilà ce que l’on a dit chez elle à un de mes gens que j’y avais fait envoyer pour le premier coup de huit heures. Elle avait pris des précautions admirables, et la voilà qui vous fait dire comment elle avait mis tout autant de coqueluches que la Duchesse de Saulx ; mais l’homme propose et Dieu dispose, et la bonne mère a eu pendant tout le temps de l’audience une porte ouverte sur le dos en pleine correspondance avec les quatre fenêtres de la salle au grand’ouverte ; enfin c’était à n’y pas tenir pour elle, avec son horreur des courans d’air, et je vous dirai pourtant qu’elle est restée là jusqu’à la fin. Le substitut de l’accusateur public est un citoyen qui s’appelle Faure ; il a commencé par conclure en faveur de votre adversaire, et Mme de Créquy tournait à la mort, parce qu’elle ne voyait pas arriver le sieur Delamalle qui devait parler et plaider pour elle ; mais il n’avait garde de s’en acquitter, parce qu’il avait été mis en prison le mercredi au soir. Elle s’est levée comme une amazone, ou si vous l’aimez mieux, comme une autre Amalasonthe en disant qu’elle allait se défendre toute seule ; et la voilà qui s’est mise à faire à ces petites gens du jury tout l’historique de cette haute pairie de Créquy et de sa grande forêt dont vous ne possédez plus de quoi faire un manche de fouet, comme aussi toute l’histoire de la maison de Grenelle que cet imposteur a l’impudence de réclamer ; — tandis que je l’ai achetée d’un appelé M. de Feuquières, et que je vous en apporte le contrat, leur a dit la Marquise. Vous y verrez, dans ce contrat, que je l’ai achetée à vie pour une somme de quarante mille francs, une fois payée ; parce que je n’avais pas l’air d’avoir en point de vue pour deux ou trois années de vie ; il y a de cela soixante et un ans ; j’ai toujours eu la malice de m’en applaudir et j’espère en profiter jusqu’à ma mort. — C’est tout de même une fine commère et qui n’a pas froid aux yeux, disaient les gens du peuple qui se trouvaient à l’audience, et ce qui pourra vous surprendre à cause de la disposition générale des esprits, c’est que lorsqu’elle a eu fini de parier, elle a été couverte d’applaudissemens. — Mais c’est donc un filou et un escroqueur d’orphelins, c’est un voleur d’enfans, disaient les jurés sans se retenir le moins du monde, et du reste le filou dont il s’agit n’était pas dans la salle, il se tenait dans un couloir, où Dupont nous dit qu’il avait un air des plus interloqués. Cependant le citoyen Faure a prétendu qu’il était indispensable à lui de nommer un avocat d’office pour Mme votre mère et pour vous (à qui je suis prié de faire savoir, par parenthèse, que le fils de Mme de Créquy passait dans l’esprit des auditeurs et sur les bancs des jurés, pour être un petit bon homme de sept à huit ans), parce que, disait le même substitut d’accusateur public, il y avait des moyens de droit qu’il fallait plaider, et que les parties civiles ne pouvaient les invoquer, faute de les connaître. — Nommez donc un avocat d’office, a répondu la Marquise, et voilà qu’il est sorti de sur les bancs un grand diable de Gascon, nommé Coste, qui paraît avoir été le plus étrange orateur de la bazoche, et sur lequel Mme votre mère ne tarit pas. — Messieux, et je dirai plus, cito-iens, disait-il à Faure et à ses adhérons, au conspect d’une éspoliation pareille, on en reste comme une éstatue !! Il a parlé d’étantative éscandallûse environ cent fois, et du reste il a parlé comme un honnête et digne homme à qui N. D. des Victoires enverra demain matin un rouleau de cent louis dont on n’entend pas que vous ayez à vous mêler, parce que vous êtes un petit écolier, et qu’il faut vous laisser votre boursiquet pour acheter des bilboquets. — Veuve Froulay Créquy, a dit le premier juge, avez-vous quelque chose à ajouter à l’éloquent discours de votre défenseur officieux ? — Rien du tout : je m’en rapporte à votre bon sens et à votre conscience. La sentence dont vous ne pourrez avoir copie que demain, c’est-à-dire la semaine prochaine, si vous restez encore à Jossigny, l’arrêt, vous dis-je, porte en substance que le nommé Charles-Alexandre dit Créquy est débouté de ses poursuites, contre la défenderesse et son fils, qu’il est condamné aux frais du procès, à une amende de 500 francs pour les indigens de la section, à 200 francs de dommages et intérêts pour l’autre partie plaidante, et de plus, à six mois d’incarcération pour avoir voulu surprendre la bonne foi publique et la religion des autorités constituées. Comment trouvez-vous ce jugement dont nous avons rendu joyeusement et humblement grâce à Dieu ? Mme votre mère vous fait dire qu’elle n’est presque pas malade et qu’il vaut mieux ne pas vous presser de revenir. Pour abonder dans son sens, je vous dirai, comme observation de mon crû, qu’elle mange comme un Ogre et boit comme un Templier ; mais, à la vérité, c’est du biscuit avec de l’eau d’orge et je puis ajouter qu’elle jase comme une pie dénichée. — Faites-moi donc taire, ou j’en deviendrai comme un ésquelette ! Voilà ses dernières paroles et depuis sept à huit minutes, elle a tout-à-fait l’apparence d’une personne qui dirait son chapelet ; mais je pense bien que ce n’est pas sans quelques distractions de l’ordre judiciaire. Vous savez, Marquis, comment et combien vous est affectionné votre cousin,

Louis-Jean-Marie de Bourbon.


Je fus bientôt guérie, grâces à mes bains aromatiques, et je reprends la plume afin de vous continuer mon récit. Il se trouva que Bézuchet avait contrefait la signature de St.-Just et de Fouquier-Tinville, afin de se recommander à M. et Mme Roland pour en obtenir, sur les fonds du ministère de l’intérieur, une pension alimentaire et provisoire. Robespierre en profita pour le faire garder indéfiniment à Ste-Pélagie où nous avons été détenus ensemble, mais sans que je m’en pusse douter, car nous n’étions pas incarcérés dans le même corps de logis. C’est une chose dont j’ai toujours remercié le bon Dieu parce que le voisinage de cet homme aurait été pour moi, pauvre prisonnière abandonnée à la justice et l’humanité de nos guichetiers, un sujet d’insupportable dégoût et d’appréhension continuelle.

Vous verrez, dans les pièces justificatives que je vous ai fait réserver, tout ce que Bézuchet disait avoir à souffrir dans cette prison, dont il n’est jamais ressorti que pour être conduit à la guillotine. C’était sans doute à raison de son imposture envers le ménage Roland mais c’était principalement à titre de tyran féodal et d’ancien aristocrate, et pour le récompenser de s’être fait appeler Bourbon-Montmorency Créquy. Voyez donc cet étrange effet d’une étrange imposture, et cette prodigieuse concordance entre l’iniquité des révolutionnaires et la justice du ciel.

Un autre effet, presque miraculeux, des poursuites de ce misérable homme, c’est qu’ayant fait mettre des oppositions sur le paiement de tous nos revenus, il en est résulte qu’en dépit de notre inscription sur la liste des émigrés, aucun acquéreur ne s’est présenté pour acheter ni soumissionner aucune de nos terres ; et ceci par prévision, par méfiance ; en sorte que nous n’avons été dépouillés que de votre hôtel de la rue d’Anjou et de ces deux belles forêts de St.-Pol et de Vareilles sur lesquelles on a prétendu que les deniers dotaux de ma belle-fille se trouvaient hypothéqués. Quand on nous signifia juridiquement cette folle sentence, votre pauvre père était bien malade et j’étais sous clé, mais je me gardai bien d’interjeter appel au tribunal de cassation, et je ne manquai pas de faire la sourde et muette, en contrefaisant la morte et nous félicitant d’en être quitte à si bon marché[2].

J’avais été mandée pour le duodi, 5 floréal, au tribunal révolutionnaire, à l’effet d’être interrogée sur un vol de diligence qui devait avoir eu lieu dans les environs de Montflaux. C’était un des 24 substituts de Fouquier-Tinville, qui devait procéder à mon interrogatoire et recevoir ma déposition, et comme je m’étais rendue à ce qu’on appelait son cabinet long-temps à l’avance, on me fit entrer, en attendant son arrivée, dans une grande salle basse, où je me trouvai livrée toute seule à mes observations et réflexions.

Il y avait à l’entour de ladite salle des paniers d’osier de forme carrée et pareils à ceux où les femmes de chambre mettent le bois à brûler qui est à leur usage : j’eus la curiosité de soulever le couvercle d’un de ces paniers, et je vis qu’il était rempli de poignées de cheveux de toute sorte de couleurs. La femme du concierge me dit ensuite que c’était là qu’on faisait la toilette des condamnés, qu’on ne reconduisait plus en prison pour en finir plus vite, et que c’était elle qui profitait de leurs dépouilles qu’elle vendait à son profit. Jugez combien votre pauvre grand’mère avait le cœur oppressé de se trouver là.

Mon interrogatoire ne fut ni long ni difficile ; le substitut n’avait pas reçu les pièces qui concernaient cette chouannerie ; il ne se souvenait seulement pas de l’assignation qu’il m’avait fait envoyer, et je n’ai jamais entendu reparler de cette affaire-là ; c’était un blondin qui ne paraissait pas avoir plus de dix-huit ans ; il avait la figure d’une jeune fille avec un bonnet rouge, une carmagnole de peau de chèvre et de gros sabot.

Dupont me dit en nous en allant, que pendant que j’étais à jouer aux propos interrompus avec mon imbécile de substitut, l’Abbé de Fénélon et le Père Guillou venaient d’être acquittés par le tribunal révolutionnaire, en dépit de tout ce que Fouquier-Tinville avait pu dire. L’Abbé de Fénelon, parce que tous les ramoneurs et décroteurs de Paris l’avaient suivi jusque dans la salle d’audience, en pleurant et disant que c’étaient leur père, et parce que tout le peuple avait crié grâce, en disant que c’était l’Évêque des Savoyards[3]. Le Père Guillou, c’était parce qu’en entrant dans ce coupe-gorge, il tenait un grand crucifix serré sur sa poitrine, en chantant le vexilla regis de toute sa force ; ensuite de quoi il s’était mis à se déchausser pour leur montrer les stigmates de ses pauvres pieds, comme celles de ses vénérables mains, en leur disant qu’il ne craignait nulle autre chose que les artifices du démon ; qu’il n’avait jamais eu frayeur des hommes, si méchans qu’ils fussent ! Enfin qu’il avait enduré le supplice de la croix pour avoir prêché le saint Évangile de Dieu au Japon (ce qui était l’exacte vérité) ; mais que Notre Seigneur avait bien voulu toucher le cœur de ses juges, et qu’il n’était resté cloué sur la croix que pendant trois heures, ce qui fit que tous les juges et les auditeurs éclatèrent de rire, et qu’on le renvoya comme un fou. Il s’en retourna tranquillement dans le haut de son clocher des Carmes, rue de Vaugirard, où il avait établi son domicile, et je pense qu’il y demeure encore. C’était la Comtesse de Kercado (la Malézieu) qui s’était chargée de pourvoir à sa subsistance, et 24 francs lui duraient trois mois.

Le saint Abbé de Fénelon fut repris en sous-œuvre, un malheureux jour où les Savoyards ne se doutaient de rien, et il fut conduit à l’échafaud sur la même charrette que Madame Élisabeth de France et que la Maréchale de Noailles. — Monsieur le bourreau ! monsieur le bourreau ! cria celle-ci, arrêtez un moment pour me détacher les mains, laissez-moi prendre mon flacon, je vous en supplie, laissez-moi prendre mon flacon, la Princesse va se trouver mal !… C’était au bout de la rue royale, et il est vrai que Madame Élisabeth avait paru prête à s’évanouir en voyant la place Louis XV, où le Roi son frère et sa belle-sœur avaient été suppliciés. Voilà ce qui fut mis dans un journal du soir en dérision de cette pauvre Maréchale de Noailles[4].

À la suite de mes interrogatoires, de mes sollicitations et de mes visites à nos juges, que j’avais voulu faire toute seule, afin de ne pas exposer mon fils au danger de s’attirer l’attention des autorités révolutionnaires, je fus d’abord mise en état d’arrestation chez moi, sous la surveillance de trois sans-culottes qui nous voulaient rendre la vie si dure, que Dupont n’y trouva nul autre remède que celui de les gorger de mangeaille et de les maintenir ivres-morts. Il y en eut un qui n’eut pas la force de résister plus de huit jours à ce mauvais régime, et les deux autres en tombèrent malades.

Mais c’est conscience, et vous êtes un meurtrier, disais-je à Dupont.

Il me répondait qu’il n’y a pas de mauvais coups sur de mauvaises bêtes. Il a toujours force proverbes à sa disposition, et quand les deux survivans voulaient écrire à la section pour demander un autre sans-culotte en remplacement du défunt, Dupont leur disait que la grande bande fait les étourneaux maigres ; ensuite il épanchait pour eux des rouges-bords et des rasades d’eau-de-vie qu’il envoyait acheter au cabaret et chez l’épicier du coin, pour économiser ma cave et les provisions de mon office. Ces deux malheureux ne voulaient manger que des salaisons, des viandes fumées et des épices ; on leur donnait tous les jours un gros jambon et une merluche grillée, un fromage de Hollande et je ne sais combien de harengs-saurs ; mais c’était surtout de moutarde aux anchois qu’ils étaient singulièrement affriandés, car ils en couvraient des tartines. On finit par être obligé de les faire conduire à l’hospice de la république, ci-devant l’Hôtel-Dieu, où je ne doute pas qu’ils n’aient fait pénitence de leur goinfrerie sauvage. (Il est assez connu qu’on y faisait quelquefois du bouillon pour les malades avec des têtes de mouton, des tranches de cheval et des quartiers de chiens, des moineaux et des chats.)

On m’envoya deux autres sectionaires qui nous agréaient beaucoup mieux parce qu’ils dormaient toute la nuit et la meilleure partie de la journée. Je me souviens que l’un de ces deux hommes avait nom Poucedieu. Les Dupont le trouvèrent un jour de pluie dans mon premier salon, qui ouvraient de grands yeux ; – Qu’est-ce que c’est donc que ça ? dit-il en leur montrant le dais ; c’est comme un ciel de lit…

— Et voilà justement ce qu’il en est, lui répliqua Dupont ; on en a retiré le bois de la couchette pour en faire une manière de trône où nous devons mettre la statue de la liberté avec le buste de Pettetier-Saint-Fargeau…

— Ah ben, ça n’est pas si bête, pour une vieille marquise ! lui répondit mon surveillant Poucedieu…

L’Abbé de Dampierre, qui était resté Vicaire-Général du diocèse de Paris[5], et à qui aboutissaient. toutes les aumônes, avait imaginé d’envoyer à l’économe de l’hospice de la république pour 50 mille francs d’assignats (qui perdaient environ 95 pour cent : c’était la monnaie du temps) ; mais le citoyen Lévéville fit arrêter Mlle Dupont qui les lui apportait, et nous restâmes dans une grande inquiétude en voyant qu’elle ne revenait pas de l’Hôtel-Dieu, où l’Abbé de Dampierre l’avait envoyée bon gré mal gré. Je n’en perdis pas la tête et je ne voulus pas garder l’Abbé de Dampierre qui était caché chez moi et qui se désespérait de cette imprudence. Dupont le fit sortir par la rue de Sèves pour le conduire chez Mme de Grimaldi[6], rue de la Planche, où la cachette du prêtre était introuvable, mais il se trouva malheureusement que la place était prise ou plutôt que la cachette était remplie par le gros Abbé du Londel. Dupont fut obligé de conduire le Vicaire-Général par la rue du Bac, jusque dans le passage Sainte-Marie, en plein jour, ce qui faisait frémir ! Le bon citoyen Duperron, notre juge de paix, cacha l’Abbé de Dampierre pour la vingtième fois peut-être, et toujours le mieux du monde ; mais quand Dupont fut de retour à l’hôtel de Créquy, j’en étais déjà partie dans une vieille chaise à porteurs, pour aller en prison, on ne savait laquelle, et je ne le sais pas encore aujourd’hui.

On commença par m’interroger sévèrement sur la citoyenne Dupont, ma femme de confiance, qui distribuait de faux assignats ; on me fouilla de la matière la plus insolente et la plus odieuse, et l’on me conduisit dans une petite cave, où je fus obligée de m’asseoir à terre, parce qu’il n’y avait ni siège, ni banc, et pas même une botte de paille. J’avais soustrait à la recherche de mes geôliers une vingtaine de doubles louis que j’avais eu la prévision de faire cacher dans la semelle de mes galoches. On m’avait laissé tous mes habillemens, Dieu merci ! mais on m’avait pris un portefeuille où j’avais des assignats, et c’était pour les vérifier, soi-disant. On m’avait pris mon livre d’offices, mais on m’avait laissé mon rosaire, sur lequel on se contenta de m’adresser quelques brutalités injurieuses. Le chef de cette geôle avait nom le citoyen Salior ; il me demanda s’il était vrai que je fusse âgée de 93 ans. — Tiens, s’écria l’un des familiers de cette épouvantable inquisition, c’est l’âge de l’ancien régime ! J’avais pris la résolution de ne pas leur répondre une seule parole, et je l’exécutai fermement.

– Peut-être qu’elle est sourde, observa le citoyen Salior ? Ensuite il se mit à m’accabler d’imprécations républicaines et d’apostrophes dont je ne comprenais pas toute la portée, parce qu’elles étaient en termes d’argot. Il me disait, en fermant les poings et grinçant des dents : Oh ! la vieille… et l’épithète dont il se servait pour m’injurier commençait par la deuxième lettre de l’alphabet. C’est tout ce que j’y trouvai de compréhensible.

Je passai dans cet horrible caveau la plus triste nuit du monde, et j’éprouvai ce que dit saint François de Sales, qui ne pouvait prier convenablement quand il n’était pas agenouillé commodément. Lorsque je voulais m’exhorter à la résignation, je vous avouerai franchement que je ne pouvais m’empêcher de maugréer contre d’Abbé de Dampierre, avec ses charités en assignats ! Le lendemain matin, je fus conduite au Luxembourg, dont on avait fait une prison, et où je trouvai malheureusement beaucoup de personnes de ma connaissance.

C’était d’abord la Princesse de Rochefort à qui je demandai l’aumône et la charité d’un petit morceau de pain, parce que je n’avais rien mangé depuis vingt-quatre heures[7]. – Mon Dieu ! dit-elle à Mme d’Esparbès qui couchait dans la même chambre, nous n’avons plus ni pain ni rien du tout, comment donc faire ?

— Il faudrait aller demander quelque chose à Mme Mathieu de Montmorency, pour qui l’on envoie tous les jours une pleine soupière avec une grosse volaille de l’hôtel de Luynes…

Mme Mathieu répondit qu’elle avait tout mangé ; ensuite elle descendit dans notre chambre, où elle se plaignit amèrement de ce qu’on lui avait volé deux serviettes et je ne sais combien de bouteilles vides.

— Elle est comme son père, me dit ensuite Mme d’Esparbès : quand on parlait devant lui des pertes qu’on avait faites à la révolution, il disait toujours que personne n’en avait souffert plus que lui, parce qu’on avait eu l’indignité de lui prendre toutes les grosses carpes et les vieux brochets qu’ils avaient dans les fosses de leur château de Dampierre[8].

Je trouvai dans la même prison le Maréchal et Maréchale de Mouchy, la Princesse Joseph de Monaco, la Duchesse de Fleury et Mme de la Rivière, sa fille, Mme de Charmeau-Breteuil, enfin Mme de Narbonne et je ne sais combien d’autres femmes de mes parentes ou de ma société, qui me reçurent à bras ouverts et le cœur bien serré, ce qui fut réciproque, ainsi que vous pouvez bien croire.

Je me rappellerai toujours le moment du départ de la Maréchale de Mouchy, qui voulut absolument accompagner son mari devant le tribunal révolutionnaire[9]. Le geôlier, la geôlière avec tous les guichetiers et leurs ogrichons, lui disaient, dans la cour où nous étions descendus et rassemblés pour leur faire nos tristes adieux : — Mais reste donc, va-t’en donc, citoyenne, tu n’es pas mandée par le tribunal.

— Citoyens, répondait-elle, ayez pitié de nous, ayez la charité de me laisser aller avec M. de Mouchy ; ne nous séparez pas !

Son bonnet tomba par terre, elle se baissa péniblement, et le ramassa pour en couvrir ses quelques cheveux blancs… Enfin son dévouement triompha de la résistance des geôliers, on la laissa monter sur la fatale charrette à côté de son mari, et deux heures après ils n’existaient plus ! Cette vénérable femme n’avait pas été comprise dans le mandat d’amener de l’accusateur public ; elle avait passée par-dessus le marché dans la livraison du tribunal au bourreau pour ce jour-là.

Ce fut aussi le même jour que M. Roucher, l’auteur du poème des Mois, se trouvait sur le banc des accusés. Il s’aperçut qu’un jeune peintre de ses amis dessinait son profil et ne douta pas que ce fût pour sa famille à laquelle il écrivit au crayon ces vers touchans

Ne vous étonnez pas, objets charmans et doux,
Si quelque air de tristesse obscurcit mon visage ;
Lorsqu’une main savante esquissait mon image,
L’échafaud m’attendait, et je pensais à vous.

La Princesse de Carency n’était pas d’une résolution si courageuse ; elle eut la faiblesse de se dire enceinte, afin de reculer l’exécution de son arrêt de mort ; elle avait fini par en perdre la tête, ou peu s’en fallait, car elle essayait toujours de s’empoisonner en faisant infuser des centimes et des épingles dans du vinaigre, ce qui n’aboutissait qu’a lui donner des coliques affreuses ; ensuite on accourait pour nous requérir de livrer notre pitance de lait pour en faire boire à Mme de Carency qui venait encore de s’empoisonner. Comme le lait était notre principale nourriture, on finit par se révolter, en lui faisant dire que pour la prochaine fois on la laisserait aux prises avec le vert-de-gris et la colique ; ce qui lui fit passer la manie du suicide au moyen de l’oxide de cuivre.

Nous n’étions d’abord que trois dans la même chambre, et nous en étions enchantées ; mais on commença par établir en dehors, et tout au plus près de notre porte, un bizarre et fatiguant personnage, appelé M. le Marquis d’Alez de Bermoud d’Anduze, ni plus ni moins pour les noms, sans compter des prétentions nobiliaires à n’en pas finir. Aussitôt qu’on avait entr’ouvert notre porte, il se précipitait dans notre chambre, et nous étions obligées de le rudoyer pour qu’il nous laissât le temps de nous habiller et celui de faire nos prières. Il aimait beaucoup à raconter des histoires et particulièrement sur le danger des casseroles de cuivre et sur les retards de la petite poste. Ensuite, il aimait à discuter méthodiquement sur des choses incontestables ; et par exemple, il aurait fait une dissertation pour vous, prouver que la ville de Paris ne saurait avoir 44 lieues de tour par la raison qu’elle n’en a que 7 : ou bien que son ami l’abbé Legris-Duval était bien loin d’avoir 15 mille livres de rente, attendu qu’il n’en avait que 4 ; les preuves à l’appui surabondaient, et c’était, Dieu me pardonne un ennuyeux compère ! Il s’attendait toujours à voir arrivée en prison Madame sa nièce, la ci-devant Princesse Victor de Broglie, et dès qu’il entendait la moindre rumeur au bas de notre escalier, il se mettait à crier à tête fendre : — Est-ce vous, ma nièce ? arriver donc ! J’espère que vous m’apportez une chaise percée ?… La nièce n’est jamais arrivée, ni la chaise percée non plus, malheusement pour nous...

Il avait des querelles à se prendre aux cheveux avec l’Abbé de Saint-Simon (d’Archiac), qui couchait sur le même escalier, à cinq ou six marches au-dessous de ce Marquis languedocien que Dieu confonde ! C’était souvent au milieu de la nuit que leurs disputes étaient les plus violentes, parce que celui-ci crachait toujours sur la tête de l’Abbé qui n’y voulait mettre aucune indulgence.

On nous donna bientôt pour commensale une certaine Mme Buffaut ou Buffot, qui était une élégante du quartier d’Antin, et qui faisait la grande dame et la renchérie de manière à nous en divertir beaucoup, si nous n’avions pas eu la guillotine en perspective et la famine en présence réelle. Ensuite on nous adjoignit une bonne paysanne angevine dont je m’accommodai beaucoup mieux que de cette belle camarade de chambrée. J’aime mieux les villageois que les bourgeois.

Mon temps d’arrêt dans cette prison m’a pourtant mise à portée d’observer et de connaître une sorte de gens dont je ne me doutais en aucune manière. N’ayant jamais eu de relations qu’avec le grand monde ou bien avec de bons paysans de nos terres, des valets respectueux et de pauvres personnes du peuple, je n’avais et ne pouvais avoir aucune idée de cette bourgeoisie moderne qui est stylée d’après la philosophie de Voltaire. Ignorante et suffisante espèce de gens qui se croit élégante, et dont cette Mme Buffaut devait être le modèle achevé.

Elle disait un jour à l’Abbé de Saint-Simon : — Je comprends très bien ce que vous avez dit à ces dames sur l’amour de Dieu : je l’aime à la folie, le bon Dieu ; mais j’aime surtout l’abbé Louis, parce que je l’ai vu dire la messe au Champ-de-Mars, avec esprit, avec grâce et avec sensibilité. À propos de la Maréchale de Richelieu qu’on venait d’amener en prison, elle se mit à dire au Marquis d’Alez de Bermond d’Anduze : — Il paraît que les maréchaux d’autrefois c’étaient des ecclésiastiques ?… — Non, Madame, et comment donc cela ? — Mais je croyais avoir entendu dire que le Maréchal de Richelieu était un Cardinal ? Elle disait quelques années plus tard à Antoine de Lévis, que Buonaparte ne travaillail que pour le Prétendant des Bourbons, parce qu’il avait la promesse et l’ambition d’être fait connétable de Montmorency.

On nous avait expédié de Commune-Affranchie cette belle dame de Lyon dont je crois vous avoir dit quelque chose à propos de Mme Roland, et celle-ci, qui s’appelait Mme de la Verpillière, avait une autre sorte de bel air qui consistait à se moquer des gens à prétention. Elle avait pris en aversion déterminée Mme Buffaut qui lui semblait incivile, et le jeune M. de Rambuteau qui lui paraissait familier. Je ne sais plus quelle nouvelle il était venu nous donner de ses amis, Montmorency, Lévis ou Mailly, et cette malicieuse anoblie dit à Mme de Fleury : — Vous allez voir comme je vais lui river son clou ! Coucy, Mailly, Crouy, Créquy, Montmorency, Rambuty, lui dit-elle, il est inouï combien il y a de grands et beaux noms qui finissent en i…

On introduisit un jour auprès de nous une petite femme toute pâle, qui nous fit la révérence, et qui n’a pas dit une seule parole pendant trois jours et deux nuits qu’elle a passés dans la même chambre que nous, assise sur une chaise de paille et sans vouloir se coucher. Elle n’ouvrit la bouche que pour manger quelques morceaux de pain sec et boire quelques tasses de lait ou quelques demi-verres d’eau rougie que nous lui donnions. Elle avait les yeux toujours fixés sur une grosse cassette qu’elle tenait devant elle, sur une autre chaise qu’elle avait approchée pour soutenir ses pieds, et qu’elle avait l’air de couver des yeux (la cassette) en s’éventant continuellement ; ce qui ne s’accordait guère avec la température et le thermomètre.

Mon Dieu, que j’ai souffert du froid au Luxembourg ! Corvisart a prétendu que c’était une cause de longévité pour moi, parce que les fluides avaient reflué sur certains ligamens du cœur et des poumons que la vieillesse et la sécheresse allaient endurcir. Il parait que c’est l’ossification dans les viscères qui détermine la mort chez les vieillards. Il est vrai qu’en sortant de prison, je me suis trouvée dispose, alerte, fortifiée, rajeunie de vingt ans, et je suis convaincue que la sévérité de l’abstinence et surtout la rigueur du froid ont été pour beaucoup dans la prolongation de la vie : mais toujours est-il que c’est un supplice affreux !

La Dame en question ne voulut jamais descendre dans la cour pour y recevoir sa pitance, et c’était la vieille Créquy, la grosse Latrimouille, ou la petite Monaco, comme disait le geôlier, qui se chargeaient de lui porter sa nourriture.

Un matin, en remontant dans notre chambre, nous n’y trouvâmes plus que sa cassette, et le geôlier vint une heure après pour chercher les effets qu’elle avait laissés. Mme Buffot lui demanda témérairement si c’était qu’elle n’allait pas revenir avec nous ? Il répondit à cela par un geste du tranchant de la main sur sa nuque ; ensuite il défonça la cassette, où il ne se trouva qu’une chemise d’homme toute sanglante, et dont le col avait été coupé, comme on fait pour les apprêts d’une exécution capitale. Ensuite, il en tira une poignée de cheveux d’un beau noir, avec un petit papier sur lequel il y avait écrit : pour ma mère. Notre geôlier ne voulut pas nous dire le nom de cette malheureuse femme et nous n’avons jamais su quel était son malheureux fils.

Pendant la nuit, ou si l’on veut le jour suivant, car il était environ deux heures du matin, on vint lâcher dans notre chambre une manière de petit jockey qui se mit à protester de son républicanisme, et qui dit au geôlier de lui faire monter du vin de Champagne. Comme le geôlier l’avait appelé ma petite citoyenne, et comme sa colère ou son altération lui faisaient proférer des juremens épouvantables et continuels, voilà Mme d’Esparbès qui prend la parole et se met à lui dire : — Écoutez donc, Monsieur, Madame, Mademoiselle, car nous savons pas ce que vous êtes, et je suis bien aise de vous apprendre qui nous sommes ; ayez donc l’honnêteté de ne pas faire un pareil vacarme dans notre chambre, et, sur toute chose, ayez la politesse de ne pas jurer devant nous. Vous vous trouvez ici par devant Mme Buffot, s’il vous plait ! avec la Marquise de Créquy, avec la Princesse de Rohan-Rochefort, avec une autre personne qui n’es pas moins honnête et moins respectable que nous, et quant à celle qui vous parle, j’aurai l’honneur de vous dire que je suis Mme d’Esparbès, toute prête à vous servir si l’occasion s’en trouvait ? Ayez donc la bonté de ne pas jurer comme vous faites, et de ne pas blasphémer le saint nom de Dieu, ce qui nous mécontente et ce qui ne peut vous être utile à rien du tout.

— Ah bien, par exemple ; et plus souvent que vous me feriez taire ! lui répondit-on colériquement : soyez tranquille, allez ! je vous vaux bien et c’est pour le moins encore !…

— Mais je ne vous dis pas le contraire, poursuivit Mme d’Esparbès, et votre apparence est très-favorable à votre prétention ; c’est à cause de cela que nous vous prions de ne pas blasphémer si haut.

— Apprenez que je suis la Duchesse de Bouillon !

— Comment donc ? s’écria Mme de Rochefort, vous dites que vous êtes la Duchesse de Bouillon, la Landgrave de Hesse et la femme de mon neveu ? on n’a pas d’exemple d’une invention pareille à celle-ci !…

C’était, en définitive, une petite demoiselle qu’on avait fait épouser, municipaliter, au dernier duc de Bouillon qui était imbécille, et à qui son homme d’affaires, appelé M. Roy, avait persuadé qu’il devait divorcer pour conserver ses biens. On dit aujourd’hui que tous les domaines de ce pauvre Prince ont fini par tomber dans les griffes de ce procureur.

La petite citoyenne la Tour d’Auvergne ne voulut pas rester dans notre chambre, et nous fûmes charmées de sa résolution. Je n’ai pas entendu reparler d’elle, et c’est encore une la Tour d’Auvergne de plus en circulation. Elle avait entrepris de nous éblouir avec l’auréole de gloire du premier grenadier de la république française, ce qui nous fit lui rire au, nez car il est assez connu que le véritable nom de ce prétendu la Tour d’Auvergne est M. Coret[10]. Ce malheureux nom de la Maison d’Auvergne est au pillage, et je crois devoir vous prévenir qu’il ne subsiste aujourd’hui qu’un seul agnat mâle des Ducs de Bouillon, Vicomtes de Turenne, lequel est le frère de la Comtesse de Durfort-Civrac. Le premier grenadier de France était un vieux imbécile qui se croyait bâtard d’un Prince de Turenne, et c’était son seul droit au nom qu’il avait usurpé révolutionnairement. Il y a d’autres la Tour d’Auvergne qui n’ont pas même l’apparence d’un droit pareil à celui de M. Coret, et qui portent effrontément le nom du grand Turenne, au mépris des sentences et des arrêts multipliés qui les ont condamnés à le quitter. Il en est ainsi pour de certains Croûy, qui sont des bourgeois de Grenoble, et dont le nom roturier (Chanel,) n’a pas la moindre similitude avec celui des Princes de Croûy. C’est une contrariété véritable, assurément ! Mais que voulez-vous faire en temps de révolution ? Bienheureux quand on n’a pas à souffrir d’autres iniquités que celles de l’usurpation nominale !

Un beau matin, pendant la distribution du lait et du pain dans la cour de la maison d’arrêt, comme on disait alors, nous y vîmes arriver une forte députation de la Comédie française. Tous ces pauvres gens nous dirent qu’ils venaient d’être envoyés en prison par ordre du comité de salut public, parce qu’ils avaient joué Paméla, et que, dans cette pièce d’origine anglaise, un d’eux avait arboré la plaque de l’ordre du Bain, ou celle de la Jarretière, je ne sais plus laquelle des deux. Mlle Contat trouvait toujours quelque chose de spirituel et de respectueux à nous adresser quand elle nous rencontrait sur les escaliers ; et c’était visiblement une ingénieuse et gracieuse personne. Mlle Raucourt nous faisait des révérences de théâtre, en nous donnant exactement nos titres et qualifications, et la jolie petite Mlle Mézeray, qui riait toujours, était sans cesse à polisonner avec des enfans dans les corridors. Elle couchait tantôt dans un lieu, tantôt dans un autre, et quelquefois dans un grand vase de marbre où elle se laissait couler comme dans un entonnoir. Elle avait seulement de la peine à s’y réchauffer, la pauvre fille, et je lui fis donner une de mes couvertures, parce qu’on avait mis le scellé sur toutes les siennes.

J’avais eu le bonheur d’inspirer une sorte de prédilection à la citoyenne Longand, femme du concierge, et Dupont n’avait rien négligé pour entretenir sa disposition favorable à mon égard. Elle avait pris sur elle de me faire avoir une chaufferette, en dëpit du comité de sûreté générale et de l’accusateur public Fouquier-Tinville, qui ne tolérait, pas l’usage du feu dan& les maisons d’arrêt. C’était la sœur de la citoyenne Longand qui faisait mon petit ménage, et c’était une fort honnête demoiselle. Celle-ci ne pouvait s’empêcher de regretter l’ancien régime, en disant qu’avant la révolution elle était première ouvrière chez un marchand, ou pour mieux dire un fabricant d’oiseaux qui étalait sur le Pont-au-Change, et qui faisait beaucoup d’expéditions dans la banlieue de Paris. C’était ell qui teignait les serins jaunes en rouge, et qui fabriquait des crêtes de coq avec de l’écarlate qu’elle attachait ensuite avec de la colle forte sur la tête des petits moineaux. Elle avait le beau secret et l’industrie de faire éclore et d’élever des hannetons dans des chaussons de laine, afin de les revendre aux écoliers. Quand elle parlait de ses malheurs et des pertes qu’elle avait faites, on aurait dit qu’il était question de la chute des Bourbons et de la ruine des Princes de Guémenée !

On nous avait amené Mme de Montmartre, et quoiqu’on eût pu la soupçonner de n’être pas assez défavorable au jansénisme, c’était néanmoins une fille du premier mérite et de la plus haute vertu[11]. Quand on la fit comparaître au tribunal révolutionnaire avant de l’envoyer à l’échafaud, elle était assistée de sa porte-crosse, appelée Mme de Surbeck. — Citoyens, disait cette religieuse à tous les tigres de cette caverne, comment voudriez vous que Madame Notre Mère pût répondre à ce que vous lui dites ; elle est restée sept mois dans un cachot à Saint Lazare, elle en est devenue sourde…

— Écrivez, citoyen greffier, dit le représentant Barrère, chef des jurés et surnommé l’Anacréon de la guillotine, écrivez que la ci-devant abbesse de Montmartre a conspiré sourdement.

Mme de Surbeck accompagna son Abbesse et suivit la charrette à pied jusque sur la place de Louis XV ; elle se mit à genoux au bas de l’échafaud pour lui demander sa bénédiction, que Mme de Montmartre lui donna tout aussi paisiblement et solennellement que si la chose avait encore eu lieu dans le sanctuaire de son abbaye royale. — Va-t-en donc te cacher, béguine, lui dit le bourreau, va-t’en donc ! Si ce n’était pas moi qui suis de Montmartre et qui suis de service aujourd’hui sur la place de la Révolution, tu n’irais pas coucher chez toi !…

Son chez-elle était notre prison, la malheureuse ! et c’est là qu’elle revint trouver son lit et son bréviaire après l’exécution de sa supérieure. Elle était la tante de l’officier des cent-suisses du même nom qui fut tué dans la chapelle des Tuileries, le 10 aout. Il y a longtemps que ce nom de Surbeck est inscrit dans les annales de la fidélité courageuse, et le Roi François Premier avait un Page appelé François de Surbeck, dont l’héroïsme est assez connu.

Cette bonne Vendéenne qu’on nous avait adjointe, et que j’aimais beaucoup, s’appelait Martine Levacher ; elle était veuve d’un fermier de M. de la Rochejaquelein qui avait été fusillé sur la grève d’Avranches, après la déroute de Granville. Elle nous contait simplement les plus admirables choses du monde, je passais régulièrement tous les jours une heure ou deux à causer avec elle et nous disions souvent nos prières ensemble.

— Je veux faire abattre ton vieux clocher pour que vous n’ayez plus rien ici qui vous rappelle vos superstitions d’autrefois, disait un conventionnel au mari de cette femme.

— Vous serez bien obligé de nous laisser les étoiles qui sont plus anciennes et qu’on voit de plus loin que notre clocher, lui répondit ce paysan.

Quoiqu’elle ne fût plus jeune, on voyait qu’elle avait été très belle, et Stofflet aurait voulu l’épouser après la mort de son mari. Je l’aurais assez bien aimé, disait-elle ; mais comme il ne faut avoir en vue, quand on se marie, que d’avoir des enfans pour en faire de chrétiens, j’ai toujours refusé d’épouser M. Stofflet, parce que je n’étais plus en âge. Il parait que cela n’est pas si bien assuré pour les hommes ; mais pour les femmes qui se remarient quand elles sont hors d’âge, il m’est avis qu’elles ne sont pas en sûreté de conscience.

Voyez jusqu’où peut creuser la profondeur, et jusqu’où peut s’élever la sublimité d’une foi sincère, et remarquez bien que c’est une pauvre paysanne à qui j’ai ouï dire ceci.

J’étais donc au Luxembourg aussi bien que possible étant prisonnière et sous le régime de la terreur ; mais j’étais bien loin d’avoir épuisé la coupe de mes adversités révolutionnaires, et l’on vint nous signifier que nous allions être transférées dans une autre maison d’arrêt, en ayant soin de notifier à chacune de nous qu’elle ne pourrait emporter de son mobilier et de ses autres effets que ce qu’elle en pourrait porter elle-même. On a su depuis que le concierge nous avait dénoncée comme entretenant parmi les incarcérés un esprit de superstition, d’intolérance, et de mépris pour la représentation nationale, et du reste il est généralement connu que la plupart de ces dénonciations et ces déménagemens étaient sollicités par les geôliers, afin d’obtenir la confiscation du mobilier des détenus et de profiter de leurs dépouilles. Nous supposâmes qu’on avait l’intention de nous conduire à pied, et suivant Mme Buffot, c’était à dessein de nous faire assommer par la canaille ; mais dans tous les cas nous fimes nos dispositions en conséquence de notre inaptitude à porter des fardeaux. Nous emportâmes, chacune un pauvre petit paquet dans un mouchoir ; ensuite on nous fouilla très exactement, et finalement on nous entassa dans des carioles d’osier bien escortées par des porte-piques de la commune, qui nous menèrent à Sainte-Pélagie où la première figure que je reconnus fut celle de Mme Roland, qui passait sa tête au travers d’un guichet, et qui demandait à parler au greffier.


FIN DU SEPTIÈME VOLUME.
  1. On avait fait croire au peuple français que tous les embarras dans les finances étaient provenus principalement de ce que la Reine Marie-Antoinette envoyait tout l’argent du trésor à l’Empereur, son frère. On avait persuadé, non-seulement aux badauds de Paris, mais à un certain nombre de législateurs, que les aristocrates avaient fait creuser et miner tout le Champ-de-Mars et tous les bâtimens de l’École-Militaire afin de les faire sauter le jour de la fédération. Les journaux démocratiques invitaient les députes et les citoyens à se tenir en garde contre une épouvantable réunion de tigres, de lions, d’hyènes et de léopards qu’on devait renfermer sous les gradins qui conduisaient à l’autel de la patrie, afin de les lâcher sur les bons citoyens, au moment où ils viendraient prêter leur serment civique. M. de Talleyrand fit semblant d’en éprouver de l’inquiétude et l’Assemblée fit publier un procès-verbal signé par tous les membres de la commission des carrières et de la voirie pour constater qu’après avoir examiné soigneusement les bâtimens de l’École-Militaire, ainsi que tous les égouts voisins du Champ-de-Mars et les canaux souterrains qui servent à la conduite des eaux, ils n’avaient rien aperçu qui fût de nature à troubler la sécurité générale. Vous pouvez bien imaginer si ceux qui avaient mis en circulation de pareilles folies se moquèrent du gouvernement qui avait la faiblesse et la bonté de les faire démentir.
    Note de l’auteur
  2. C’est depuis la mort de mon petit-fils et pendant la dernière maladie de son père, que tous les biens de ma belle-fille ont été vendus révolutionnairement. Nous avons été privés de nos revenus pendant 57 mois ; mais vous devez bien penser que c’était le cadet de mes soucis. J’ai la prévision de mourir bien seule et bien tristement, mon pauvre cousin ! (Note de l’Aut.)
  3. Jean-Baptiste-André de Salignac de la Motte-Fénelon, arrière neveu de l’auteur de Télémaque, et fils du Marquis de Fénelon, Ambassadeur en Hollande, et Chevalier des ordres du Roi. Par excès d’humilité chrétienne, l’Abbé de Fénelon avait refusé l’épiscopat à plusieurs reprises et notamment en 1742, époque où le Cardinal de Fleury l’avait fait nommer à l’Archevêché de Besançon, quoi qu’il ne fut âgé que de 28 ans. Il avait également refusé l’Évêché-Pairie de Châlons-sur-Marne et l’Archevêché de Bordeaux en 1759. Il s’était dévoué spécialement à l’éducation religieuse et au soulagement des pauvres enfans originaires de la Savoye et des montagnes d’Auvergne, qui, jusqu’à lui, s’étaient trouvés abandonnés sur le pavé de Paris. Il était le filleul de ma tante de Breteuil et quand il est mort, en 1794, il était âgé de 71 ans. (Note de l’auteur.)
  4. À l’instant où la même charette passait en face du Palais-Royal, il en sortait deux hommes dont l’un dit à l’autre : — Je ne suis pas moins révolutionnaire que vous, mais je trouve que ceci passe toute mesure. Je ne crois pas que l’existence de cette femme serait en rien d’inquiétant pour l’établissement, ni pour le maintien de la république. Il est à prévoir que la nation pourra se trouver en danger de prendre des habitudes par trop sanguinaires ; voulez-vous que nous nous entendions ensemble et que nous agissions de concert afin d’y remédier : — Je ne m’y refuserai pas tout-à-fait, si la chose en question n’est pas de nature à compromettre ma tranquillité, répondit l’autre idéologue. Enfin les deux amis s’accordèrent, et il fut convenu qu’ils allaient traduire en français la Philosophie de Kant. L’un de ces hommes était M. le Comte Garat, qui est devenu sénateur impérial, et l’autre, M. le Comte Reynhart, ancien ministre plénipotentiaire et pair de France à l’estampille de 1830.
    (Note de l’Éditeur.)
  5. Charles-Antoine-Henry du Walk de Dampierre, né en 1746, sacré Évêque de Clermont en 1802. Les journaux de l’année 1834 ont annoncé qu’il venait de mourir dans sa ville épiscopale de Clermont, où sa mansuétude et sa charité pastorale lui avaient acquis l’attachement et la vénération de tous les partis. (Note de l’Éditeur.)
  6. La Comtesse douairière de Grimaldi, Dame de l’Ordre de Malte, née Baronne de Runkell et du Saint-Empire. Sa chapelle n’avait pas cessé d’être ouverte et fréquentée pendant tout le temps de la terreur ; ce qui était un miracle continuel. Je disais toujours de cette excellente Mme de Grimaldi, que si je lui survivais, je n’aurais ni repos ni cesse que je ne l’eusse fait Béatifier. Je te répète encore aujourd’hui très sérieusement et très respectueusement pour cette sainte personne.
    (Note de l’Auteur.)
  7. Marie Dorothée d’Orléans-Longueville de Rothelin, Princesse de Rohan-Guémenée-Montauban-Rochefort. Elle était sujette à la maladie la plus singulière et la plus régulière du monde. Elle était pendant six mois de l’année d’une coquetterie provoquante et d’une intempérance de langue insupportable. Le reste du temps, elle était parfaitement raisonnable, assez triste, honteuse et presque muette. Mme de Rohan-Rochefort et sa sœur, Mme de Cossé-Brissac, sont les dernières descendantes du grand Dunois. Quant à Mme la Marquise d’Esparbès et de Lussan, Comtesse d’Aubeterre, elle était fille de Noble Sieur Nicolas Toyeard, Écuyer, Seigneur de Jouy-sur-Seine, Secrétaire du Roi, greffier du conseil et fermier général de S. M., et d’Honnête Personne Jeanne Poisson, cousine germaine de Mme de Pompadour, qui fut l’auteur de leur fortune. Contre l’ordinaire des filles de finance, Mme d’Esparbès est une personne d’esprit et de fort bon goût. Son acte d’écrou dans les prisons portait qu’on l’avait incarcérée parce qu’elle avait été dénoncée à la société populaire de Saint-Germain-en-Laye comme aristocrate et carnivore. Elle me dit qu’elle avait envie d’en appeler à la justice et l’experience du fameux Représentant du Peuple Legendre, lequel était un boucher de Saint-Germain, précisément. (Note de l’Auteur.).
  8. Hortense d’Albert de Luynes, femme de Mathieu-Jean-Félicité de Montmorency-Lavat, son cousin germain. Elle est fille de ce Duc de Luynes et de Chevreuse à qui Bonaparte avait conféré le titre de Comte en l’appelant dans le Sénat-Conservateur. Le feu Duc de Luynes avait toujours bien de la peine à ne point dater ce qu’il écrivait de l’année passée ; mais, pour se prémunir contre cette infirmité naturelle qui pouvait avoir des inconvéniens dans certains cas, il datait alors de l’année prochaine ; et voilà ce qui lui est arrivé pour son testament qu’on a trouvé daté d’une année postérieuse à celle de sa mort : il en est résulté la nullité de cet acte, et Mme sa fille qui se trouvait la co-héritière et la sœur unique de M. le Duc de Chevreuse en a singulièrement profité.
      Nous avons pris l’engagement de ne rien retrancher de ces Mémoires ; mais il ne s’ensuit pas que nous ayons renoncé au droit d’en soumettre les faits et les jugemens au contrôle de la critique et de la justice ; aussi ferons-nous observer ici qu’on a peine à s’expliquer le jugement de l’auteur à l’égard de Mme la Duchesse Mathieu de Montmorency, dont la conduite en prison ne s’accorderait guère avec sa réputation de bienfaisance et de charité généreuse ! (Note de l’Éditeur.)
  9. Anne-Claude, Marquise d’Arpajon, Grande d’Espagne et Grand’Croix de l’ordre de Malte, née en 1729, mariée en 1741 à Philippe de Noailles, Baron de Mouchy-le-Châtel et Châtelain de Silly, Maréchal de France, Chevalier de l’ordre insigne de la Toison-d’Or, Grand’Croix de l’ordre royal et militaire de Saint-Louis, comme aussi de l’ordre militaire et hospitalier de Saint Jean de Jérusalem de Malte, Gouverneur des ville et châteaux royaux de Versailles et de Marly, ancien Ambassadeur de France auprès du Roi de Sardaigne etc. etc. etc. Il faisait toujours courir quatre pages avec ses titres, et l’on n’avait jamais vu de Grand Seigneur aussi petitement vaniteux. Au Partage de la succession du Duc de Villeroy, le Maréchal de Mouchy avait trouve moyen d’acquérir la principauté de Poix qui était sortie pour la deuxième fois de votre famille à la mort du dernier Duc de Lesdiguières et dont il avait fait prendre le titre à son fils ainé, le Marquis de Noailles, lequel est aujourd’hui Prince de Poix et Capitaine des Gardes-du-Corps. Ladite principauté de Poix, qui vous provenait des anciens Comtes de Soissons, était entrée dans votre maison par héritage en l’année 1497, et n’en est sortie qu’en 1722. (Note de l’Auteur.)
  10. Théophile-Malo Coret, dit La Tour d’Auvergne, mort dans une rencontre sur les collines d’Aberhauden, où il faisait partie de la colonne républicaine dite l’Infernale. (Note de l’éditeur.)
  11. Marie-Louise de Montmorency-Laval, Abbesse de l’église Royale de N.-D. de Montmartre, Dame et Patronne dudit lieu de Montmartre, de Barbery, Clignancourt, Saint Ouen, Charonne et autres lieux, née en 1723, condamnée à mort et exécutée le 28 aout 1795.