Texte établi par Vicomte du Couëdic de Kergoualer, Maurice Fleury, E. Paul (p. 57-58).


IX

Plymouth.


Le 26 juillet, à cinq heures du matin, nous fîmes voile pour Plymouth où nous arrivâmes le soir à quatre heures.

À peine dans le port, le Bellérophon devint l’objet de l’intérêt et de l’empressement des habitants de Plymouth, puis de toute l’Angleterre, à mesure que la nouvelle de l’apparition de l’Empereur s’y répandait. On voulait le débarquement ; on voulait voir le grand homme.

La mer était couverte d’embarcations remplies à chavirer d’hommes de toutes classes, de femmes élégantes. Ces bateaux entouraient le vaisseau dans l’espoir d’apercevoir l’Empereur ; ils s’approchaient assez près pour pouvoir nous parler.

Cet empressement inquiétait le Gouvernement et l’ordre fut donné de forcer les curieux à s’éloigner. Des chaloupes-canonnières furent mises en mer, commandées par les officiers du Bellérophon, qui repoussaient les bateaux des curieux ; mais ceux-ci s’obstinaient à rester, au risque de périr. Les femmes, debout, se cramponnaient au bras des hommes et ne voulaient pas que l’on s’éloignât. Le Gouvernement craignait qu’une ancienne loi anglaise ne vînt prêter son secours hospitalier au débarquement ; il se décida à nous éloigner au plus vite.

Depuis que nous étions en rade de Plymouth, on commençait à nous parler de Sainte-Hélène comme du lieu où nous pouvions bien être envoyés, et chacun de nous de s’enquérir de cette île. Les uns nous disaient que le pays était beau et le climat sain ; d’autres que c’était un horrible séjour, malsain, que nous y trouverions tous les inconvénients et désagréments que l’on trouve en général sous les tropiques, en animaux venimeux, etc…