Souvenirs d’un page de la cour de Louis XVI/Pages

CHAPITRE PREMIER

les pages

Ô illusions de l’enfance…, ne perdez-vous jamais vos douceurs !
Chateaubriand, René.


L’imagination se reporte toujours avec délices sur les jours heureux du jeune âge. Dans la carrière épineuse de la vie, on éprouve souvent un moment de douce satisfaction à reposer ses souvenirs sur ces paisibles années de l’enfance, dont quelques légères contradictions ont fait tous les chagrins, mais où les privations étaient si courtes et les larmes si vite oubliées !

Élevé au sein de l’abondance et des plaisirs, dans un de ces établissements destinés à perpétuer les traditions de l’ancienne chevalerie, combien, dans ma vie agitée, n’ai-je point éprouvé de douces émotions en recueillant ces souvenirs de mes premières années ! Peut-être, hélas ! que l’amertume de celles qui les ont suivies contribuait à me les rendre encore plus chères !… Quoi qu’il en soit, rien ne touche mon cœur comme la pensée de ces temps de bonheur. C’est ici mon chapitre, celui dans lequel je me complais. Qu’on me pardonne donc sa longueur, peut-être son peu d’intérêt ; il en a un bien vif pour moi, et tout ce qui y a rapport me fait toujours tressaillir.

De quelle ressource n’étaient pas pour la jeunesse ces beaux établissements, où les rejetons de la noblesse puisaient, au milieu de la cour, l’héroïsme et l’attachement à leur souverain ! Et combien ces ressources avaient d’étendue ! puisque, à mon arrivée à Versailles, on y comptait cent cinquante-huit pages, sans ceux des princes du sang qui résidaient à Paris.

J’entrai d’abord aux pages de la chambre du roi. Après quatre ans, les réformes, les circonstances, me firent passer à ceux de la grande écurie ; je puis donc parler de l’un et l’autre service, aussi bien que du gouvernement intérieur de cet établissement, qui n’était pas une des choses les moins curieuses à observer.

Les pages de la chambre étaient au nombre de huit. Leur service, borné à l’intérieur du château, ne demandait ni taille ni force ; aussi y entrait-on très-jeune, et j’en ai connu qui y étaient arrivés à neuf ans. Deux gouverneurs et un précepteur étaient chargés de surveiller leur éducation ; et, grâce à leur petit nombre, cette éducation était bien supérieure à celle que recevaient les pages des écuries, laquelle, je dois le dire, laissait beaucoup à désirer.

Autrefois, c’étaient les premiers gentilshommes de la chambre qui avaient la direction des pages ; chacun d’eux en avait six qui ne servaient que pendant une année. Mais, en 1784, on reconnut que ce mode de service avait plus d’un inconvénient, tant sous le rapport de l’éducation que sous celui de la dépense ; on réduisit donc le nombre des pages à huit ; mais on les rendit permanents, et, au lieu de les loger, comme auparavant, dans les hôtels des premiers gentilshommes auxquels ils étaient attachés, on leur en assigna un particulier, rue de l’Orangerie.

Il fallait, pour être reçu page, prouver au moins deux cents ans de noblesse directe, et avoir une pension de six cents livres destinée aux menues dépenses. Alors, les parents étaient délivrés de toute sollicitude : habillement, nourriture, maîtres, soins pendant les maladies, tout était fourni avec une magnificence vraiment royale.

Un seul habit de page de la chambre coûtait quinze cents livres ; aussi était-il en velours cramoisi brodé en or sur toutes les tailles. Le chapeau était garni d’un plumet et d’un large point d’Espagne. Ils avaient, de plus, un petit habit en drap écarlate, galonné en or et argent.

Le service des pages de la chambre consistait à se trouver au grand lever du roi, à l’accompagner à la messe, à l’éclairer au retour de la chasse, et à assister au coucher pour lui donner ses pantoufles. Je décrirai plus tard la manière dont se faisait ce service tout à fait singulier, car il était unique de faire veiller deux enfants pour donner une pantoufle. Mais, si le prince, sous prétexte d’intérêts particuliers, s’était relâché sur quelques points, on aurait bientôt vu s’évanouir toute la majesté qui doit entourer le trône et le souverain.

L’esprit réformateur du cardinal de Brienne n’oublia pas les pages. Quarante pages de la petite écurie et les deux de la vénerie disparurent de Versailles, en attendant que la Révolution vînt ensuite détruire les autres établissements de ce genre. Il ne resta que la grande écurie, qui vit ses cinquante pages chargés du service de toute la cour, même de celui des pages de la chambre qui, malgré leur petit nombre, n’échappèrent pas à la culbute ; et notre jeunesse nous incorporer tous à la grande écurie.

Il me serait très-difficile de bien peindre cette bruyante réunion, et de caractériser l’espèce de gouvernement qui y régnait. L’autorité des anciens sur les nouveaux en faisait une espèce d’oligarchie ; mais la dureté de cette autorité, la soumission profonde qu’il fallait lui montrer, la faisaient approcher du despotisme, tandis que la licence qui régnait parmi les membres de cette petite société, et le peu de respect qu’ils professaient pour le gouverneur, présentaient le spectacle d’une république, si ce n’est même d’une anarchie complète. Aussi, malgré les nombreux maîtres et professeurs qu’on y avait, l’éducation était nulle. Malheur à celui qui n’y apportait pas le goût de s’instruire ! Il en sortait bon danseur, tirant bien les armes, montant bien à cheval ; mais il en emportait des mœurs passablement relâchées, et beaucoup d’ignorance. Ce qui pouvait compenser un peu ce mauvais côté, c’était un caractère excellent et plié à tout par la sévère éducation que les nouveaux recevaient des anciens.

Je parlerai d’abord du superbe logement qui nous était affecté ; ensuite du service, et je finirai par les usages de notre intérieur, usages réglés par des lois plus sacrées que si elles eussent été gravées sur le marbre et l’airain, puisqu’elles étaient soutenues de l’autorité transmise aux anciens, de race en race, depuis un temps immémorial.

Tout le côté gauche de la grande écurie formait notre logement. On voyait, au rez-de-chaussée, une chapelle très-jolie, une grande salle d’exercices, les offices, les cuisines, et la salle à manger où étaient deux billards. Cette dernière pièce, vaste et assez sombre, dont la voûte massive reposait sur quatre piliers, était éclairée par des lampes et devait ressembler par son aspect, et surtout par le bruit qu’on y faisait, à la caverne de Gil Blas. La chère y était au moins aussi bonne. Nous étions répartis en quatre tables ; et, pour la nourriture, la lumière et le feu de trois ou quatre poêles, le roi donnait au maître d’hôtel quatre-vingt mille francs par an.

Au premier étage, dans une vaste galerie, se trouvaient disposées, sur deux lignes égales, les cinquante chambres où nous logions, toutes peintes en jaune vernissé et meublées uniformément. Comme ces chambres n’allaient qu’à la moitié de la hauteur de l’étage, il régnait, au-dessus, une espèce de galerie disposée comme des loges au spectacle, et servant de garde-meuble. Quatre poêles énormes étaient placés aux extrémités, et leurs tuyaux, passant au-dessus des chambres, y distribuaient une chaleur suffisante. Au fond de la galerie, une grande salle, bien chauffée, servait pour les études. Les deux sous-gouverneurs, le précepteur et l’aumônier avaient leurs appartements dans les mansardes, où se trouvait aussi la lingerie. Le gouverneur occupait le pavillon, sur la place d’armes. Là était placée notre bibliothèque, ouverte deux heures par jour, pour y changer les livres et y lire les papiers publics. On y trouvait aussi une collection de cartes géographiques, de rondes bosses à dessiner et d’instruments de physique.

Les pages de la grande écurie avaient pour uniforme la livrée du roi, c’est-à-dire des habits bleus couverts de galons en soie cramoisi et blanc. Mais dix-huit d’entre eux, au choix du grand écuyer chargé du service à cheval, avaient des habits bleus galonnés en or, veste et culotte rouges. Les poches, en travers ou en long, distinguaient la grande de la petite écurie.

Autrefois, la grande écurie n’avait d’autre service que d’éclairer le roi au retour de la chasse, et de le conduire à la messe ; et le premier page tenait l’étrier droit quand il montait à cheval. Mais, depuis la réforme de la petite écurie, les pages de la grande en eurent aussi le service. Deux d’entre eux, quand les princesses sortaient, les précédaient toujours, avec un troisième, de ceux qui étaient galonnés, et qu’on appelait surtout, pour porter la queue de la robe ; ils accompagnaient à cheval, quand les princesses sortaient en voiture.

Quand le roi allait à la chasse au tirer, tous les surtouts devaient être au rendez-vous. Ils quittaient leurs habits pour prendre de petites vestes de coutil bleu et des guêtres de peau, et se tenaient, chacun avec un fusil, derrière le prince, qui, ayant tiré, prenait une autre arme, tandis que la première, passant de main en main, arrivait à l’arquebusier qui la rechargeait. Pendant ce temps, le premier page faisait ramasser le gibier et en tenait un compte exact sur de petites tablettes ; et, aussitôt la chasse finie, il se rendait dans le cabinet du roi qui lui en ordonnait la distribution. Ce qui restait était pour lui. On pense bien que cette place était très-agréable ; car, outre l’avantage qu’elle offrait de se livrer à un travail particulier avec le roi, comme l’aurait fait un petit ministre, Louis XVI tuant à chaque chasse quatre ou cinq cents pièces, il en restait beaucoup au premier page. On nous distribuait aussi, en ces occasions, douze bouteilles de vin de Champagne.

Les jours de grandes cérémonies, les pages montaient sur la voiture à deux chevaux ; et quand le roi ou les princes voulaient envoyer savoir des nouvelles de quelqu’un, ou complimenter sur un événement de famille, c’était un page, suivi du palefrenier, qui était chargé de cette commission.

À l’armée, les pages devenaient les aides de camp des aides de camp du roi, et apprenaient, à la source du commandement, à commander un jour. Ils portaient aussi les armes du monarque quand il était encore d’usage de se revêtir d’une cuirasse. Tout page sortant, au bout de trois ou quatre ans, avait le droit de choisir une sous-lieutenance dans un corps ; et les premiers pages de la chambre du roi, des écuries et de la reine, avaient une compagnie de cavalerie et une épée.

La hiérarchie des pages, dans leur intérieur, se partageait en trois degrés : Les anciens, qui avaient pouvoir absolu sur les nouveaux au bout de deux âns. Les seconde-année, espèce de mixtes, nommés sémis, qui n’étaient point commandés et qui ne pouvaient se faire obéir, mais que, à la moindre faute envers les seigneurs anciens, on faisait mettre par les nouveaux sous huit robinets qui versaient abondamment de l’eau dans une cuve de marbre de la salle à manger. La première année se passait dans le noviciat de la nouveauté, noviciat des plus rudes. L’obéissance la plus entière et la plus passive était la première qualité d’un nouveau ; et bien des jeunes gens arrivant de leur province, peu pénétrés de ce principe, étaient reçus de manière à en être bien vite persuadés. Un nouveau n’avait rien à lui ; toujours prêt à obéir au moindre signe, obligé de prévenir même les intentions de son ancien, chacune des fautes qu’il commettait, même involontairement, était aussitôt punie, soit par arrêts plus exactement observés que ceux que prescrivaient les gouverneurs, soit par des pages de grammaire allemande qu’il fallait copier, soit enfin par des férules nommées savates, du nom de l’objet qui servait à les appliquer. Car aucun des termes admis dans un collége n’était en usage parmi nous. Les mots : sortoirs, réfectoires, classes, étaient scrupuleusement remplacés par ceux de corridors, salle d’étude, etc. ; les prononcer, c’eût été compromettre sa tranquillité ; et un nouveau ayant appelé son camarade « son compagnon » en conserva le nom tout le temps de son service.

Bien des gens blâmaient cette sévérité des anciens à l’égard des nouveaux ; on la regardait comme cruelle. Elle fut, à la vérité, quelquefois poussée à l’excès ; mais exercée modérément, comme je l’ai vue, elle était d’un très-bon effet ; et jamais un page n’est entré dans un régiment sans y être bien vu et chéri de tous. D’ailleurs, la nouveauté existait depuis longtemps ; elle était connue et approuvée de tous les chefs, dont beaucoup avaient été pages, et en avaient, par conséquent, fait l’expérience. Les épreuves que l’on faisait subir aux nouveaux surpassaient autrefois tout ce que la franc-maçonnerie offre de plus terrible. M. de la Bigne, écuyer du manége, page il y a bien cinquante ans, portait encore sur une fesse la marque d’un éperon brûlant qu’on lui avait appliqué. Je suis loin d’approuver de pareilles cruautés ; mais ce qui est incroyable, c’est qu’un ancien et un nouveau qui se retrouvaient ensuite égaux dans le monde étaient, malgré cela, bons amis.

De mon temps, la nouveauté se bornait à l’obéissance la plus exacte et à une distinction de rang qu’entraîne toujours l’ancienneté.

La grande liberté dont on jouissait à la grande écurie, les faibles études que l’on y faisait, l’esprit d’indépendance qui s’y transmettait d’âge en âge, tout cela contribuait à rendre la conduite de ces jeunes gens fort peu régulière. La prison, les arrêts, n’étaient que momentanés ; l’esprit de corps restait ; et il aurait fallu une grande sévérité pour y introduire une réforme. Trois heures de leçon le matin, et deux l’après-dîner, voilà les seuls instants où l’on ne pouvait se répandre dans la ville ; hors de là, on pouvait courir partout jusqu’à neuf heures et demie, heure du souper. On comprend ce qui devait résulter d’une pareille licence, que je trouvais très-douce alors, mais que je ne saurais approuver aujourd’hui.

On disait la messe dans la chapelle, tous les jours ; et deux capucins, du couvent de Meudon, étaient chargés des prédications et de la direction de nos consciences. — Quelles consciences, grand Dieu ! — Mais si l’on n’était pas très-ardent à aller confier aux révérends pères les peccadilles dont on se sentait coupable, on l’était un peu plus à écouter les leçons que nous donnait l’un d’eux, le père Chrysologue, célèbre astronome, dont les ouvrages sont aujourd’hui publiés sous son véritable nom : M. de Gy.

Les matinées étaient consacrées au manége, où se réunissaient tous les pages de Versailles. C’était, sans contredit, le plus fameux de l’Europe, tant par la beauté des chevaux que par le talent des écuyers. Le nombre de ces chevaux, qui était de deux cent quarante à mon arrivée, fut réduit ensuite à cent. Ils étaient tous de la plus grande beauté, et servaient dans les cérémonies. Naturellement difficiles, peu accoutumés au soleil, animés par le bruit, ils faisaient souvent le désespoir de leurs cavaliers. Pour leur service ordinaire, les pages avaient un rang de vingt à trente chevaux légers à la course. Il me serait difficile de dire combien le roi avait de chevaux ; mais je crois que, avant toutes les réformes, le nombre en allait bien à trois mille. Les chevaux de monture étaient à la grande écurie et ceux d’attelage à la petite. Le grand écuyer de France était Charles de Lorraine, appelé en France prince de Lambesc, parce que la souveraineté de cette maison n’y était pas reconnue, et qu’on lui refusait le titre d’Altesse. Le prince de Lambesc, aujourd’hui général autrichien, était un très-bon militaire, ferme, même dur, mais nullement féroce, comme les révolutionnaires ont voulu le montrer. C’était un des meilleurs écuyers de France. Dès cinq heures du matin, même en hiver, il était au manége que l’on faisait éclairer, à monter ou dresser des chevaux, et à donner des leçons. C’est lui qui m’a donné mes premières instructions ; en termes de l’art, c’est lui qui m’a fait ma longe. Depuis la suppression de la charge de connétable, le grand écuyer en faisait les fonctions. Il était alors vêtu de drap d’or, et portait l’épée royale dans un fourreau violet semé de fleurs de lis d’or.

Outre la beauté des chevaux, on allait admirer encore, à la grande écurie, le garde-meuble où l’on conservait toutes les selles de cérémonies, et une multitude d’anciens harnais et d’armes qui avaient autrefois servi dans les tournois.

On conservait parmi les pages, depuis plus d’un siècle, un petit poëme fait par M. de Cadrieux, page sous Louis XIV. Ce petit ouvrage, écrit d’une manière aussi légère que plaisante, contenait les usages établis parmi les pages, les règlements et l’emploi de la journée. Le caractère de chaque page y était tracé avec originalité. J’y avais fait quelques changements que le temps avait rendus nécessaires, et substitué le portrait des pages de mon temps ; mais cette copie s’est trouvée perdue dans mes voyages, et je la regrette souvent.

Les pages de la reine, au nombre de douze, étaient vêtus de rouge, galons en or. Monsieur et M. le comte d’Artois avaient chacun quatre pages de la chambre, douze aux écuries ; et leurs épouses, huit. Ceux de Monsieur et de Madame étaient aussi en rouge et or. Les pages de la chambre étaient habillés de velours brodé ; les différences de la pose du galon faisaient la distinction que les couleurs ne faisaient pas. Tous ces pages avaient aussi leurs gouverneurs et, comme nous, des maîtres de mathématiques, d’allemand, de dessin, de danse, d’armes, de voltige, d’exercice, de connaissance du cheval, sans parler des leçons du précepteur. On voit que si l’éducation n’y était pas bonne, ce n’était pas faute de moyens.

Cette réunion de pages, au manége, à la comédie, provoquait souvent des querelles et des duels d’autant plus dangereux qu’on se servait de fleurets aiguisés qui, par leur forme carrée, aggravaient la blessure. Toutefois, pendant près de six ans que j’ai habité Versailles, aucun page n’y est mort, ni de maladie, ni autrement. Un chirurgien, logé rue du Chenil, avait l’entreprise de recevoir chez lui les pages de la grande écurie malades. Comme on y était très-bien, on allait à cette infirmerie sur le plus léger prétexte. Le roi payait, chaque jour, cinq francs pour chaque page ; et les remèdes prescrits par nos médecins venaient de l’apothicairie de la cour.

Une chose singulière, c’est que l’on choisissait souvent le jardin ou une des chambres de cette maison pour vider ses différends. On y était au moins à portée des secours.

Dans l’hiver de 1790, une difficulté s’éleva entre les pages du roi et ceux des princes. Il fut décidé qu’on laisserait s’écouler le temps du carnaval, pour ne point interrompre les plaisirs de cette époque, et que, sous le prétexte d’une partie de barres, on se réunirait le mercredi des Cendres à la porte Saint-Antoine, sur la route de Marly, et que chacun se mesurerait alors avec l’adversaire qu’il avait choisi. Le rendez-vous eut lieu au jour dit. Déjà trois ou quatre étaient blessés, lorsque M. de Labesse, page de madame la comtesse d’Artois, connu depuis sous le nom de Branche-d’Or dans la guerre des chouans, fut si grièvement atteint sous le poumon, par M. de Montlezun, qu’on ne s’occupa plus que de le reporter à Versailles, où il fut saigné dix-sept fois. L’affaire s’étant ébruitée, les gouverneurs s’assemblèrent et tâchèrent de dissiper l’acharnement où l’on était et de ramener la paix.

Ces souvenirs étant destinés à récréer le déclin de mes jours, je me plais à donner ici les noms des pages avec lesquels j’ai été élevé.


pages de la chambre.


1785.


De Guebeneuc, Breton, massacré à Rennes dans les premiers troubles. — Du Rumain, Breton, chef d’escadron de gendarmerie en 1817. — Boisé, du Bourbonnais. — Du Blaisel, passé au service de l’Autriche. — Tuomelin, Breton ; sa devise était l’anagramme de son nom : Nil metuo. — Sainte-Hermine, d’Angoulème. — De Bigny, de Bourges, tué à Quiberon, au service de l’Angleterre. — Montleau, d’Angoulême, officier aux gardes, émigré, puis comédien à Hambourg jusqu’à sa rentrée en France.


1786 et 1787


Tuomelin. — Sainte-Hermine. — De Bigny. — Montleau. — Le chevalier de Guebeneuc, Breton. — De Molans, de la Franche-Comté. — D’Hésecques, de la Picardie. — Noaillan, de Bordeaux, officier aux grenadiers à cheval en 1814.

1788.

Sainte-Hermine. — De Bigny. — Le chevalier de Gueheneuc. — De Molans. — D’Hésecques. — Noaillan. — L’Espine, d’Avignon. — Bonnay, de Nevers, fils du pair.


1789.

De Bigny. — De Molans. — D’Hésecques. — Noaillan. — L’Espine. — Bonnay. — Boucher, d’Orléans. — La Roque, du Périgord.

Le 1er janvier 1790, les pages de la chambre furent supprimés et réunis à ceux de la grande écurie.


pages des écuries


1790.


Premiers.

Du Poérier, de Valognes. — Chamissot. — Saint-Pol. — Bernetz, chef vendéen, conseiller de préfecture à Évreux. — Sailly, premier page de la reine.

Anciens.

Lastours, premier écuyer de Madame en 1814. — Saubnac. — Vaillant. — La Tude, de Montpellier. — Vaugiraud, des Sables d’Olonne, chef des haras. — Du Dressier. — De Bigny. — Giverville, de la Normandie. — Nogent. — Saint-Aulaire. — D’Hésecques. — Noaillan.

Seconde année.

Diensie. — Sarrazin. — Boisfremont, peintre renommée. — Montlezun. — Belatte, d’Angoulème. — Lougueval, mort jeune. — Chevalier de Saint-Pol. — Dartaize de Mekenem. — Biencourt. — Crandalle, de Picardie, mort à Bruges en 1793. — Bourgogne, de la Flandre. — Vauquelin. — Cantwel, de Paris, fils du traducteur de Gibbon — Conseil. — Cacqueray, Normand, chef de Vendéens, tué, — Chevalier de Chamissot, Champenois, préfet du Lot, destitué comme libéral. — Sir Henry Swinburn, Anglais. — Chavigny. — Bonnet de Bélon. — Le Douarin. — Salvert. — L’Espine, d’Avignon. — Boucher. — La Roque, du Périgord, officier d’état-major.

Nouveaux.

D’Apchier. — Blocqueville, Normand, chef d’escadron en 1821. — Grignou, du Poitou, chef de chouans, fusillé en 1799. — D’Aubert. — D’Hosier, de Paris, condamné à mort dans la conjuration de Pichegru et Moreau ; a eu sa grâce. — Dampierre. — Perdrauville. — Bonnechose.


1791.
Premiers.

Saint-Pol. — Bernetz. — Saubnac. — Vaillant. — Vaugiraud, page de la reine.

Anciens.

Lastours. — Dieusie. — Sarrazin. — Montlezun. — Belatte. — Longueval. — Saint-Pol. — Dartaize. — Biencourt. — Crandalle. — Bourgogne. — Vauquelin. — Cantwel. — Conseil. — Cacqueray. — Chamissot. — Sir Henry Swinburn. — Chavigny. — Bonnet de Bélon. — Le Douarin. — Salvert. — L’Espine. — Boucher. — La Roque.

Seconde année.

D’Apchier. — Bioqueville. — Grignon. — D’Aubert. — D’Hosier. — Dampierre. — Perdrauville. — Bonnechose.

Nouveaux.

D’Albignac. — Chevalier de Lastours. — Turpin. — La Roche-Quierry. — Kerhoent, Breton. — Collins, Flamand ; son cadet fut l’un des pages de Bonaparte. — Péronin. — Marsangy.


1792.
Premiers.

Saubnac. — Vaillant. — Bourgogne. — Chamissot. — Salvert, de la reine.

La Révolution et les décrets sur la noblesse firent qu’on ne remplaça pas les pages qui sortaient à cette époque. La chute du trône, la captivité du roi et le danger que couraient tous ceux qui lui avaient été attachés, mirent fin à cet antique établissement, et ceux qui restaient se dispersèrent.

On remarquera que le changement parmi les pages et l’arrivée des nouveaux avaient lieu, pour la grande écurie, le 1er avril, tandis que les autres pages se renouvelaient le jour de l’an.