Souvenirs d’un demi-siècle/Tome 2/16

Hachette (Tome 2p. 348-355).


CONCLUSION



ICI j’arrêterai ces souvenirs qui ne sont peut-être que des bavardages. À quoi bon continuer ? les grands acteurs sont morts, je n’ai point de goût à parler des doublures et des comparses. Les faits qui se produisent n’ont plus d’intérêt pour moi, je m’en suis détaché, je les trouve insignifiants et parfois comiques. Le prince Napoléon publie un manifeste, ce qui est le droit de tout citoyen ; on l’arrête, on le met en prison, on l’interroge, on le relâche et l’on profite de cet incident pour retirer leurs grades aux princes d’Orléans qui servaient — et servaient bien — dans l’armée française. Le comte de Paris marie sa fille ; l’occasion paraît bonne d’expulser les prétendus prétendants et l’on pousse dehors le prince Napoléon, le prince Victor, le comte de Paris et ses fils. Le duc d’Aumale écrit, à ce sujet, une lettre aigrelette au président Grévy, qui, par décret, envoie l’Altesse Royale hors des frontières. Iniquité, ridicule, couardise ; cela ne vaut vraiment pas la peine que l’on s’y arrête.

Le président Grévy ne voyageait pas, le président Carnot voyage ; les journaux allemands insultent la France ; les journaux français insultent l’Allemagne ; aboiement de dogues qui empêchent les honnêtes gens de dormir, rien de plus. Rendre justice à ses ennemis est un devoir, j’ajouterai que c’est une habileté. Traiter Bismarck d’imbécile, comme nous l’avons fait quelquefois, c’est se reconnaître plus bête que lui, puisqu’il nous a vaincus. L’Europe est un camp armé où personne ne se soucie de faire la guerre, pas même Crispi le polygame, qui décamperait prestement à la première arquebusade.

Les ministres par lesquels la France a le déplaisir d’être gouvernée ressemblent à des collégiens qui jouent à saute-mouton ; ils passent les uns par-dessus les autres avec tant de rapidité et si fréquemment que je n’ai le temps ni de regarder leur visage, ni de demander comment ils s’appellent. N’attendez pas que je les nomme, ce serait dresser la liste des inconnus. Le spectacle n’est pas fait pour rassurer les cœurs, il est attristant. L’heure est mauvaise, elle est ce que les saint-simoniens appelaient une époque critique, période pénible qui s’est souvent présentée dans notre histoire ; on semble être dans un brouillard mal propice aux découvertes ; on cherche et l’on ne trouve pas. Pour échapper aux angoisses du moment — qui ne sera qu’un moment — et que je traverse aux heures de la vieillesse, d’où naît une incurable lassitude, je n’ai eu qu’un remède ; je l’indique et je le recommande, car il est souverain : c’est le travail. Je veux que la mort me surprenne au milieu de ma besogne. En parlant ainsi, je ne fais que traduire Ovide :

Cum moriar, medium solvar et inter opus…

Grâce au labeur constant dont j’ai occupé ma vie, j’ai pu m’isoler des choses éphémères, ne point participer aux médiocrités de la politique et rester insensible à ces crises ministérielles qui, disait-on, devaient entraîner la ruine générale et auxquelles on ne pensait plus le lendemain. Les nations ont la vie dure, la France plus que nulle autre. Elle n’est morte ni de Malplaquet, ni de Waterloo, ni de Sedan ; elle ne s’est pas suicidée pendant la Ligue, ni pendant la Terreur, ni pendant la Commune. Elle a de la vitalité, la bonne mère, et ce serait folie de la croire perdue, parce qu’elle divague de temps en temps. Les astres sont parfois obscurcis, ce n’est qu’une éclipse ; leur éclat n’en brillera pas moins à l’horizon. C’est aux enfants à relever l’héritage que les pères ont laissé péricliter. La génération qui grandit à cette heure réparera les fautes de la nôtre ; elle sera plus forte et moins rêveuse ; moins rêveuse surtout, je le lui souhaite. Ce que j’en sais me rassure ; elle est pleine de bon vouloir et cherche un pôle ; le jour où elle rencontrera la direction qui lui fait encore défaut, elle ne restera ni languissante, ni stérile ; j’ai confiance.

Les enfants qui naissent aujourd’hui seront des hommes lorsque ce livre tombera peut-être entre leurs mains. Si je pouvais leur parler avec l’espoir d’être écouté, je leur dirais : Étudiez l’histoire des autres nations, afin d’apprendre à être modestes. Quelles que soient vos douleurs patriotiques, ne haïssez jamais ; la haine est mauvaise conseillère, la colère engendre les vanités et les vanités sont dangereuses ; évoquez en vous l’esprit de justice et, tout en souffrant du mal que les autres vous font, souvenez-vous de celui que nous leur avons fait. La vie est, comme le chemin d’Hercule, peuplée de monstres ; la massue qui seule les tuera, c’est le travail. Nul peuple n’est le premier peuple du monde, sachez-le bien, mais tout peuple a sa vertu particulière, d’où peut jaillir sa grandeur.

Les hommes de mon âge ont été, en pleine virilité, frappés d’un coup qui n’a pas été mortel, mais peu s’en est fallu. En 1870 la défaite de la France nous jetant bas du haut de nos illusions, en 1871 la Commune nous prouvant, malgré nos croyances à l’adoucissement des mœurs et au progrès humain, que l’animalité des premiers jours de la création n’était qu’endormie et se réveillait au choc des événements ; cet effondrement du pays, cet accès de barbarie primitive ont tué quelque chose en nous qui jamais n’a ressuscité. Dans notre existence, une barrière s’est dressée que nous n’avons plus franchie. Le passé s’est clos sur nous et nous a enveloppés ; nous y sommes demeurés sans goût pour le présent, sans sécurité pour l’avenir. Comme des officiers que l’on met trop tôt à la retraite, nous sommes restés découragés, nous ne nous sommes plus mêlés à l’action et nous n’avons été que des spectateurs. À qui le tour ? Le nôtre n’est plus.

Ce que nous avons regardé n’était point pour nous plaire ; car, en somme, nous n’avons vu que des compétitions politiques, souvent surprenantes par l’infériorité de ceux qui les mettaient en œuvre. Je ne clignerais pas des yeux pour être maire de mon village ou empereur d’Occident ; aussi je n’ai jamais compris l’attrait que le pouvoir exerce sur certaines âmes et qui les pousse à des vilenies que nul galant homme n’accepterait dans la vie privée. Après la mort de l’Empereur, le prince Napoléon veut se substituer au Prince impérial ; le prince Victor se déclare prétendant contre le prince Napoléon, qui est son père ; le comte de Paris acceptait volontiers la couronne au détriment du comte de Chambord, et le duc d’Aumale est tout prêt à saisir le pouvoir au préjudice du comte de Paris ; à Berlin, le vieux Guillaume éloignait systématiquement des affaires son fils Frédéric. Partout jalousie, discorde, brigues, conspirations de famille, ouverture de succession du vivant même du propriétaire légitime. Et tout cela pourquoi ? Pour périr, pour être chassé comme un malfaiteur, pour végéter en exil, pour être mis dehors par les épaules et traîner des jours obscurs, faits de jactance et de regrets.

Le vieux monde ne veut pas se résigner à mourir ; le monde nouveau n’a pas encore trouvé son mode de vivre ; entre les représentants du système d’autrefois et les représentants du système de l’avenir, la lutte est sans merci. Quelles hécatombes ! Comptons les victimes, toutes frappées parce qu’elles ont exercé le pouvoir, parce qu’elles ont voulu s’en emparer, parce qu’elles avaient des droits ou des prétentions qui les en rapprochaient. L’année prochaine, la France va célébrer le centenaire de 1789. Quelle aurore ! Jamais plus belle espérance n’a fait tressaillir le cœur des hommes. L’humanité est femme, la vieille malédiction de la Genèse pèse sur elle : « Tu n’enfanteras que dans la douleur. » Trois familles, les Bourbons, les Bonaparte, les Orléans, se sont assises dans la salle du Trône, au palais des Tuileries, depuis que la nuit du 4 Août a vu l’abolition des privilèges qui consommait la Révolution et assurait le règne de ce que l’on appelle les idées modernes. Voyons ce que sont devenus les aînés et les cadets de ces races souveraines.

Louis XVI, Marie-Antoinette, Madame Élisabeth guillotinés ; Louis XVII mort en prison, réduit à l’imbécillité ; le duc d’Enghien fusillé ; Louis XVIII rentré à Paris, après vingt-deux ans de proscription, chassé, revenu de nouveau, mort dans sa maison, sous la pourpre, le seul depuis 1774, depuis Louis XV ; le duc de Berry assassiné ; le duc de Bourbon[1] suicidé ; Charles X et le comte de Chambord décédés en exil ; Philippe d’Orléans-Égalité exécuté ; Louis-Philippe mort en Angleterre ; le duc d’Orléans tué sur la route de la Révolte dans un accident de voiture ; le comte de Paris et son fils bannis de France ; Napoléon Ier agonise à Sainte-Hélène ; ses frères Joseph, Louis, Jérôme, que l’on avait déguisés en monarques, n’ont que le temps de s’évader des capitales de leurs royaumes improvisés ; Murat veut reprendre le sien et est passé par les armes, comme un voleur pris en flagrant délit ; le duc de Reichstadt, qui avait été le roi de Rome, est enlevé, dès l’âge de vingt et un ans, par la phtisie ou tout autre mal ; Napoléon III meurt en exil ; le Prince impérial est tué en Zoulouland ; le prince Napoléon vit en Suisse ; le prince Victor s’est réfugié en Belgique. Ce sont là les représentants des familles souveraines arguant des droits de la naissance ou de l’appel au peuple et s’appuyant sur la grâce de Dieu. J’ai passé sous silence les attentats dont ils ont été l’objet ; c’est miracle que Napoléon Ier, Louis-Philippe et Napoléon III y aient échappé.

Les chefs de république, ceux qui ont gouverné l’État, présidé les assemblées, qui n’exerçaient qu’un mandat renouvelable, ne sont pas plus favorisés des dieux ; aucun d’eux ne se prolonge ; tous tombent pour ne se point relever. Pendant la période révolutionnaire, les hommes dont le niveau dépasse celui de la foule périssent sur l’échafaud, depuis l’éloquent Barnave jusqu’à l’incorruptible Robespierre. S’il en est qui échappent au supplice, c’est qu’ils meurent à la peine, sans avoir réussi à se faire comprendre, comme Mirabeau, ou qu’ils se tuent de désespoir, comme Pétion, comme Roland et Condorcet, ou qu’ils sont assassinés, puis déifiés, puis jetés à la voirie, comme Marat, à moins qu’ils ne finissent pas se renier eux-mêmes et échanger leur carmagnole contre la livrée impériale. Le héros de la révolution de 1830, Lafayette, meurt ridicule et bafoué ; les membres du Gouvernement provisoire de 1848 sombrent dans l’histoire qui se referme sur eux. Ledru-Rollin est obligé de fuir. Lamartine s’éteint misérable et déconsidéré ; seul le général Cavaignac garde bon renom, mais il a sauvé la France en juin 1848 et elle le récompense en lui signifiant son congé. Les hommes du Gouvernement de la Défense nationale se sont effondrés ; Thiers a été remercié comme un fondé de pouvoirs dont l’on se méfie ; le maréchal Mac-Mahon s’est retiré, pour ne point s’associer à des actes que blâmait sa loyauté ; Jules Grévy s’en est allé, tout couvert d’éclaboussures. C’est grotesque et c’est sinistre. Quels sujets de drames pour les Shakespeare de l’avenir !

Dans ces récits, ai-je été parfois trop amer et souvent trop ironique ? Que le lecteur me le pardonne, qu’il se souvienne que j’écris sous la dictée de mes impressions et qu’il évoque avec moi les événements dont j’ai été le témoin. J’ai vu la Restauration nous conduire aux journées de juillet 1830, la royauté de Louis-Philippe nous échouer en février 1848, le Second Empire nous faire égorger à Sedan ; j’ai vu la Seconde République nous exposer à l’insurrection de Juin, j’ai vu le Gouvernement de la Défense nationale ne rien défendre, entraîner la France vers la ruine et nous livrer à la Commune. Pour un homme qui a passionnément et silencieusement aimé son pays, il n’y a pas lieu d’être satisfait, et je ne le suis pas. Ceux qui me liront trouveront les faits accomplis et n’en auront point la responsabilité : nous, nous les avons vus s’accomplir et nous en avons subi la douleur dont aucun détail ne nous a été épargné. Au temps de mon enfance, j’ai vu de vieux hommes qui ne pouvaient sans pleurer parler de Waterloo ; je ne puis, à l’heure qu’il est, penser à Sedan et à ce qui s’en est suivi sans me sentir étouffé. Que ceci serve d’excuse à ce que mes appréciations ont de trop aigu. Je n’ai pas l’âme d’un Peau Rouge et je n’ai pu chanter lorsque j’étais attaché au poteau du supplice.

On a dit que la Révolution française était une explosion qui avait éclairé le monde et fait sauter la France. Ce n’est qu’une boutade. La France est en avant des autres nations européennes de trente ou quarante ans, pas plus. C’est un pionnier ; elle défriche. Le sentier qu’elle trace à travers la forêt des préjugés, des illusions, des revendications, des théories, a bien des fondrières ; elle y tombe, mais elle se relève et continue son œuvre. Elle touchera au but qu’elle a visé ; derrière elle, les peuples s’engageront avec confiance sur cette route où déjà ils ont fait les premiers pas et, une fois de plus, avec gratitude, — avec jalousie peut-être, — ils reconnaîtront que c’est elle, la grande calomniée d’aujourd’hui, qui tient le flambeau et court en avant, pour le plus grand bien de tous, quitte à s’égarer quelquefois.

La monarchie, telle que l’a voulue la France monarchique, s’est-elle donc faite en un jour ? Il a fallu les horreurs de la guerre de Cent Ans, des rois prisonniers, des rois fous, des guerres civiles greffées sur la guerre étrangère, il a fallu le miracle de la « bonne Lorraine » pour que Charles VII fût roi, pour que, le premier de tous ceux qui ont porté la couronne, il eût une armée permanente et, par conséquent, un budget permanent, c’est-à-dire les instruments essentiels de la souveraineté. Et depuis lui jusqu’à Louis XIV, qui fut le premier roi de France au sens précis, au sens rêvé du mot, que de luttes, que d’insurrections, que de massacres, que de misères, que de ruines ; et combien de fois l’on a cru périr, pour se redresser plus vigoureux, plus alerte, plus hardi ! Si la monarchie a eu tant de peine à se constituer, à bâtir son édifice sur un terrain qui lui était favorable, il serait injuste d’exiger de la démocratie qu’elle s’improvisât et entrât d’un seul élan dans la perfection. Un siècle, qu’est-ce que cela dans la vie d’une nation !

Ceux qui parlent du bon temps d’autrefois — qu’ils n’ont pas connu — sont des niais ; leurs récriminations me rappellent les rabâchages du vieux Nestor. Dieu me garde de les imiter ! Certes, j’ai été jeune et, comme d’autres, j’ai regretté les heures de ma primevère ; mais, entre ce regret égoïste et le regret général des choses disparues, il y a un abîme. Désespérer de mon pays parce qu’il me fait traverser une période qui me déplaît serait une absurdité dont ma raison s’indignerait. Je constate en lui une puissance de vivre que j’admire et, dans ses excès même, je reconnais une énergie qui me rassure. Par l’histoire, je suis contemporain de toutes les époques et je n’ignore pas les phases par où nous avons passé : il en fut de meilleures, je le sais, mais combien ont été pires, plus basses, humiliantes ou forcenées !

Tout concourt à nous troubler et, dans le mouvement des idées dont le choc est perpétuel, il y a, lorsque l’on a dépassé un certain âge, un effet d’ahurissement analogue à celui que jadis nous a produit notre premier voyage en chemin de fer. Nous étions accoutumés à plus de calme, à plus de lenteur, je dirai le mot : à plus de silence. Le bruit qui se fait à la tribune, dans la rue, dans les journaux, nous étourdit. Défaut d’habitude ; nos enfants y seront accoutumés dès le berceau.

Le tumulte est énorme, j’en conviens, et blesse les oreilles délicates. Chacun s’y associe et cherche à crier plus fort que son voisin. Il n’est pas jusqu’à la science et à l’industrie qui n’y participent et n’impriment à toute chose une rapidité énervante. Une invention n’a pas été expérimentée qu’elle est remplacée par une autre. Sans le savoir, elles apportent leur contingent d’efforts à la solution du problème moderne. La création de l’imprimerie a plus fait pour la Réforme que les prêches de Luther et que l’épée de l’électeur de Saxe. La vapeur, l’électricité et les prodiges qu’elles accomplissent sont des facteurs d’une incomparable puissance pour la diffusion des idées, la transformation du travail et l’accroissement de la richesse. La découverte des masses de métaux précieux qui ont été répandus sur le monde, sous forme de monnaies, a bouleversé les lois économiques qui régissaient jadis les intérêts des peuples et des individus. Tout est si récent, si insolite, que l’on est en pleine confusion. C’est le chaos ; patience ; le Fiat lux sera prononcé.

En voyant l’évolution extraordinaire qui s’accomplit et dont nous sommes les moteurs, on crie : « C’est la fin du monde. » Non ; c’est la fin d’un monde ; ce qui n’est pas la même chose. On nous raille, je ne l’ignore pas ; mais peut-être, sans chercher longtemps, trouverait-on plus d’inquiétude que de gaieté dans les facéties dont nous sommes l’objet. En apprenant les réjouissances trop bruyantes de Paris, à la veille de l’ouverture de l’Exposition universelle de 1878, Bismarck a dit : « Peste ! la France a l’agonie folâtre. » Laissez-le dire ; il en a dit bien d’autres et de plus vraies, en ses heures de sincérité, ne serait-ce que celle-ci : « Je ne comprends pas que deux souverains puissent se rencontrer sans rire de ce qu’on les respecte encore et sans trembler de ce qu’on les respecte si peu. »

Est-ce demain que s’apaisera le tourbillon dont nous sommes enveloppés et que nous prenons trop volontiers pour une tempête ? Je ne le crois pas ; j’ai peur que la France ne soit pas au bout de ses infortunes et que bien des convulsions ne l’agitent encore. L’esprit de l’homme a des volcans qui ne dorment pas toujours et qui ont des éruptions terribles. Il a fallu la guerre de Trente Ans pour assurer la liberté de conscience ; peut-être faudra-t-il bien des luttes pour que la France démocratique — qui est, sans contredit possible, la France de l’avenir — trouve sa formule, l’applique, lui donne un corps et en tire l’ensemble des institutions consenties où elle rencontrera le repos, la grandeur et la prospérité.

Bernardin de Saint-Pierre a dit, et après lui les saint-simoniens ont répété : « L’âge d’or est devant nous. » Puisse cette parole être une vérité, et nos descendants, meilleurs, plus sages, moins égoïstes que nous, voir se lever l’astre de l’ère nouvelle.

Il est possible que tout ceci ne soit qu’un rêve ; mais n’est-ce pas le propre des vieillards de rêver, en remuant les cendres de leurs souvenirs, et de souhaiter que le bonheur qu’ils n’ont pas su atteindre soit le partage de leurs enfants !

Baden-Baden, 29 octobre 1888.
  1. Bourbon (Louis-Henri-Joseph, duc de), prince de Condé (1756-1830). Fils du prince de Condé qui commanda l’armée des émigrés, et père du duc d’Enghien. Peu après la chute de Charles X, on le trouva pendu dans son appartement. Avec lui s’éteignit la famille des Condé. (N. d. É.)