Sonnets (Fuster)/La Fleur rouge

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Librairie Nouvelle ; Librairie Universelle (Anthologie Contemporaine. vol. 38) (p. 7).
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LA FLEUR ROUGE



Près du fleuve dolent qui se lamente en paix,
Devant la forêt vierge, au bord de l’eau chantante,
La rouge fleur, mortelle au passant qu’elle tente,
Dort son cruel sommeil sous le feuillage épais.

Le feuillage est tranquille et sombre, l’air est frais :
Le voyageur suspend sa marche haletante,
Il respire la fleur, s’assoupit pour l’attente,
Et le pâle endormi ne s’éveille jamais.

J’ai respiré la fleur de l’amour. — Elle grise,
Elle fait défaillir la volonté surprise
Et le cœur se sent lourd d’une étrange douleur.

Et pourtant, enivré du poison qu’on adore,
Lassé, tremblant, mourant, on se soulève encore
Pour mourir tout à fait en épuisant la fleur.