Sonnets (Fuster)/Ave César !

Librairie Nouvelle ; Librairie Universelle (Anthologie Contemporaine. vol. 38) (p. 2).
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AVE CÉSAR !



Quand les gladiateurs descendaient dans l’arène,
Sous les yeux éblouis du peuple frémissant,
Ils regardaient d’abord le sol taché de sang
Et la farouche horreur des cadavres qu’on traîne,

Puis, adoptant la mort comme sa souveraine,
Marchant vers l’inconnu d’un cœur ferme et puissant,
Chaque gladiateur saluait en passant
Le César dédaigneux, la cruauté sereine.

Si nous devons souffrir, n’importe ! Fiers et doux,
Regardons notre sort s’entr’ouvrir devant nous
Et la douleur muette apprêter nos tortures.

Avant d’être écrasé sous l’essieu de son char,
Grave, et pâle déjà des angoisses futures,
Je ne veux pas mourir sans saluer César.