Sonnet (Émile Van Arenbergh)

Parnasse de la Jeune BelgiqueLéon Vanier, éditeur (p. 24).


Sonnet


Au fond d’un boudoir rouge en mon cœur je te vois :
— Là, de Chopin, très lente, une valse voltige ;
Comme un haschisch sonore épandant son vertige ;
— Là, je te garde reine et captive à la fois.

On dirait que ton corps d’une clarté s’y voile,
Comme un soleil de juin caché dans sa splendeur,
Et tes cheveux traînants semblent, en leur blondeur,
Le fil d’or que déroule, en tombant, une étoile.

Mes vers, ces oiselets d’écarlate et d’azur,
Becquètent en chantant ta lèvre, — ce fruit mûr,
Montrant ses blancs pépins dans sa pulpe amarante,

Et, tandis que friands, ils volètent autour,
Tes yeux cruels et doux, tes yeux clairs de vautour
Dardent de haut sur eux leur fixité vibrante.