Second Alcibiade (trad. Cousin)/Notes


NOTES SUR LE SECOND ALCIBIADE.

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J'ai eu sous les yeux l'édition générale de Bekker ; l'édition partielle de Biester, avec les notes de Gedike, Gottlaber et Schneider, Berlin, 1780 ; l'édition de Nurnberger, 1796, les notes de M. Ullrich, Berlin, 1821 ; Ficin et Schleiermacher.

Dacier a traduit en français ce dialogue.

PAGE 150. — Tu vois donc qu'il n'est pas sûr d'accepter au hasard ce qui se présente. — Et plus bas S. 157 : Car ce n'était pas à celui-là , mais à Périclès seul que, tu en voulais.

Les éditions. Ὁρᾷς οὖν ὡς οὐκ ἀσφαλὴς οὔτε τὰ διδόμενα εἰκῇ δέχεσθαί σε.-Οὐ γὰρ δή που τὸν ἐντυχόντα, ἀλλ' οὐδὲν ἐκεῖνον ὃν ἠβούλου

Bekker (Partis primae vol. secund. pag. 278-283) retranche σε et ὃν, malgré tous les manuscrits. Sans croire ce retranchement absolument indispensable dans le texte, je m'y suis conformé dans la traduction. PAGE 151. — Archélaüs, roi de Macédoine....

Archélaüs ne fut assassiné qu'après la mort de Socrate. Tout le monde a remarqué cet anachronisme.

PAGE 153. — Puissant Jupiter...

Quel est l'auteur de cette prière ?

PAGE 154. — Assurément je ne t'accuserai pas de vouloir te porter contre ta mère aux fureurs d'un Oreste.... (BEKKER pag. 282).

Peut-être n'est-il pas inutile d'expliquer un peu la marche générale de tout ce passage. Pour prouver que l'ignorance n'est pas toujours un mal, Socrate va dire à Alcibiade : Je ne t'accuse pas de vouloir tuer ta mère ; mais j'en fais la supposition. Dans ce cas, si tu ne la reconnaissais pas, l'ignorance t'empêcherait de la tuer ; donc l'ignorance qui t'épargne un crime, n'est pas un mal. Mais à peine Socrate a-t-il dit : Je ne t'accuse pas de vouloir tuer ta mère, Alcibiade s'écrie et l'interrompt. Alors Socrate ne prend pas une route aussi directe, et il va à son but par un circuit. Il fait de nouveau convenir Alcibiade que l'ignorance est un mal (et dans cette intention il est évident que κακὸν ἄρα ἐστὶν ἡ τοῦ βελτίστου ἄγνοια καὶ τὸ ἀγνοεῖν τὸ βέλτιστον veut dire : l'ignorance est donc un mal ; soit que τὸ ἀγνοεῖν τὸ βέλτιστον soit une glose ou une répétition ) ; ensuite pour ne pas s'exposer à le choquer encore, il ne suppose pas qu'il veuille tuer sa mère, mais seulement son tuteur Périclès. Eh bien , dans ce cas , si tu ne le reconnaissais pas, tu ne le tuerais pas, donc l'ignorance n'est pas un mal.

PAGE 156. — S'il t'était monté, tout d'un coup, dans la tête, croyant bien faire, d'aller tuer Périclès, ton tuteur.

Εἴ σοι αὐτίκα μάλα παρασταίη, οἰηθέντι βέλτιον εἶναι, Περικλέα,... (BEKKER, p. 283).

Périclès étant mort à l'époque où ce dialogue peut avoir eu lieu , si l'on traduit παρασταίη par le présent , s'il te prenait l'idée. . . . c'est un nouvel anachronisme que tout le monde a reproché à l'auteur de ce dialogue, et qui en vérité est bien surprenant dans l'écrivain le plus médiocre , les rapports chronologiques de Périclès, d'Alcibiade et de Socrate étant parfaitement connus et n'ayant pu tromper personne. J'ai donc préféré , sans y attacher beaucoup d'importance, traduire avec Dacier par le passé : s'il t'eût pris l'idée. . . s'il t'était monté tout d'un coup dans la tête. . .,

PAGE 158. — Si tu veux prendre la peine d'examiner ce que je vais te dire, tout absurde que cela soit en apparence, peut-être conviendras-tu qu'il en est ainsi.

Je lis : Ἔτι τοίνυν εἰ βούλει, τὸ μετὰ τοῦτο ἐπισκοπεῖν, ἄτοπον ἂν, ἴσως ἄν σοι δόξειεν εἶναι.

Befcker (pag. 284) avec Schleiermacher : ἄτοπον ἂν ἴσως σοι δόξειεν εἶναι ; ce qui fait un contre-sens, comme l'a très bien vu M. Ullrich , qui propose avec Buttmann εἰκὸς ἴσως ἂν.... si l'on ne préfère donner à εἶναι la même valeur qu'à εἰκὸς εἶναι, comme on dit en français cela est, pour cela est vrai.

PAGES 163, 164. — Si donc quelqu'un fait ce qu'il sait ou croit savoir, il en résulte un grand avantage et pour l'état et pour lui-même,

Οὐκοῦν κἂν μὲν πράττῃ ἅ τις οἶδεν ἢ δοκεῖ εἰδέναι, παρέπηται δὲ τὸ ὠφελίμως, καὶ λυσιτελούντως ἡμᾶς ἕξειν (146c) καὶ τῇ πόλει καὶ αὐτὸν αὑτῷ;

Schleiermacher remarque très bien que cette phrase ne convient pas au but général du dialogue ; et c'est probablement ce qui a fait ajouter à Ficin addit autem scientiam optimi. Bekker lit (p. 128) παρέπηται δὲ au lieu de παρέπεται, mais je n'entends pas alors l'économie de la phrase. Dacier qui suit Ficin, traduit comme s'il y avait παρέτηται ἡ τοῦ βελτίστου ἐπιστήμη τὸ ὠπελίμως καὶ λυσιτελούντως ἡμᾶς ποιεῖν [sous-entendu δεῖ) καὶ τῇ πόλει καὶ αὐτὸν αὐτῷ

PAGES 165, 166. — Car sans elle et moins l'âme a reçu préalablement de salutaires instructions relativement aux richesses, à la santé , et aux autres avantages de ce genre, plus elle est en péril de faire de grandes fautes.

Ἄνευ γὰρ ταύτης ὅσῳπερ ἂν μὴ πρότερον ἐπουρίσῃ τὸ, τῆς τύχης ἢ περὶ χρημάτων κτῆσιν, ἢ σώματος ῥώμην, ἢ καὶ ἄλλο τι τῶν τοιούτων, τοσούτῳ μείζω ἁμαρτήματα ἀπ´ αὐτῶν ἀναγκαῖόν ἐστιν, ὡς ἔοικε, γίγνεσθαι. (BEKKER , p. 289.)

Schneider et Schleiermacher retranchent μὴ πρότερον. Ullrich frappé de l'unanimité des manuscrits et de l'autorité du texte de Bekker, essaye de faire un sens avec μὴ πρόερον : plus l'âme n'a pas été d'avance bien disposée, bien disciplinée relativement. . . richtig gestimmt, gehörig geordnet. . . J'adopte cette explication, et je regarde ὥσῳπερ ἄν comme le développement de ἄνευ ταύτης; c'est aussi probablement pourquoi Bekker ne met point de virgule avant ὅσῳπερ ἄν.

PAGES 169, 170. — Je veux à ce propos te dire une autre histoire que j'ai entendu raconter une fois à quelques vieillards. Les Athéniens étant entrés en guerre avec les Lacédémoniens, il arriva qu'ils furent toujours battus dans tous les combats qui se donnèrent sur mer et sur terre. Affligés de ce malheur, et cherchant les moyens d'en prévenir le retour, après bien des délibérations, ils crurent que le meilleur expédient était d'envoyer consulter l'oracle d'Ammon....

Il ne peut s'agir de la guerre du Péloponnèse que Socrate avait vue lui-même toute entière. De quelle guerre est-il donc question ici ? Cette ambassade à Ammon de la part des Athéniens paraît aussi fort bizarre, et les témoignages historiques n'en font pas mention.