Traduction par Louis-Vincent Raoul.
Satires d’Horace et de PerseImprimerie Bogaert-Dumortier (p. 241-243).


PROLOGUE.


 D’où me viendrait cette chaleur soudaine
Qui brûle au sein des enfans d’Apollon ?
Ai-je dormi sur l’Hélicon,
Ou me suis-je abreuvé, dans le sacré vallon,
Des eaux de sa docte fontaine ?
Je ne m’en souviens pas, et je laisse Pirène,
J’abandonne le double mont
À ces poètes dont le front
Aime à se couronner des palmes d’Hippocrène.
Toutefois de ces grands auteurs,
Rustique et simple encore, osant suivre l’exemple,
Je viens aussi, dieu puissant des neuf sœurs,
Déposer mes vers dans ton temple.
Quel maître au perroquet, à la pie, au corbeau,
En façonnant leur voix rauque et sauvage,
Pour imiter notre langage,
Leur sut prêter un accent nouveau ?
La faim qui donne le génie ;

La faim qui, d’un organe inflexible et muet,
Parviendrait à tirer la plus douce harmonie.
Oui, faites briller un trésor,
Et soudain à l’éclat de l’or,
Vous verrez corbeaux et corneilles
Vers le Pinde prendre l’essor,
Et des chants d’Apollon égaler les merveilles.