Rimes de voyage
Revue des Deux Mondes, 2e périodetome 52 (p. 993-994).
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À SUBIACO.
UN TRAIT D’HISTOIRE.


De grands nuages noirs, le flanc chargé d’orages,
Sur la cime des monts roulaient silencieux.
L’air était étouffant, et sous les verts ombrages
Les oiseaux suspendaient leurs chants mélodieux.


On n’entendait au sein de la gorge profonde
Que le frémissement du lac aux froides eaux
Et les cris de Néron perçant la voûte ronde
De sa blanche villa penchée au bord des flots.

L’empereur ! Il est ivre, il pince de sa lyre,
Il chante, puis, levant la coupe d’or en l’air,
Il provoque le ciel en son ardent délire,
Et dit : « Le dieu Néron boit au dieu Jupiter ! »

Soudain le ciel répond par un coup de tonnerre ;
La foudre éclate, tombe, et son carreau vengeur
Frappe la coupe d’or, et la fond comme verre
Dans les tremblantes mains de l’insolent buveur.