Rig Véda ou Livre des hymnes/Texte entier/Debut

Traduction par Alexandre Langlois.
Bibliothèque Internationale Universelle (p. titre-269).
BIBLIOTHÈQUE INTERNATIONALE UNIVERSELLE
collection des chefs d’œuvre de l’esprit humain



MONDE ANCIEN


CIVILISATION ORIENTALE

I

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POÉSIE LYRIQUE


I

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INDE ― RIG-VÉDA

traduction de a. langlois

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PARIS

12, RUE DU CARDINAL-FESCH, 12
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1870
Tous droits réservés.


BIBLIOTHÈQUE INTERNATIONALE UNIVERSELLE


Le but de la Bibliothèque Internationale est de vulgariser, en langue française, les chefs d’œuvre de l’esprit humain, pour rapprocher les nations, dans une entente commune, au bénéfice de la civilisation. Divisés en autant de séries qu’il y a d’expressions différentes de la pensée, et coordonnés d’après leur filiation, depuis les époques primitives jusqu’à nos jours, ces chefs-d’œuvre représentent la part des travaux utiles que chaque peuple a apportée en son temps, au développement de la civilisation commune.

La Direction, internationale comme l’œuvre qu’elle vient de fonder, s’est adressée à des célébrités scientifiques et littéraires, pour former un Comité supérieur consultatif, et s’est adjoint des membres correspondants dans presque tous les pays.


COMITÉ SUPÉRIEUR CONSULTATIF


MM. Bertrand, professeur à la Sorbonne, de l’Académie des sciences.

Brunet de Presles, professeur à l’École des langues orientales vivantes, de l’Académie des inscriptions et belles-lettres.

Cahours, professeur à l’École polytechnique, de l’Académie des sciences.

Cloquet (le baron), de l’Académie des sciences.

Dehèque, de l’Académie des inscriptions et belles-lettres.

Drouyn de Lhuys (S. Exc.), sénateur, membre du conseil privé, ancien ministre des affaires étrangères, de l’Académie des sciences morales.

Dumas, sénateur, secrétaire perpétuel de l’Académie des sciences.

Élie de Beaumont, sénateur, secrétaire perpétuel de l’Académie des sciences.

Egger, professeur à la Sorbonne, de l’Académie des inscriptions et belles-lettres.

Franck, professeur au Collége de France, de l’Académie des sciences morales.

Garcin de Tassy, professeur à l’École des langues orientales vivantes, de l’Académie des inscriptions et belles-lettres.

Guérin (Jules), de l’Académie de médecine.

Guigniaut, secrétaire perpétuel de l’Académie des inscriptions et belles-lettres.

Jamin, professeur à la Sorbonne, de l’Académie des sciences.

Jourdain, chef de division au ministère de l’instruction publique, de l’Académie des inscriptions et belles-lettres.

Naudet, secrétaire perpétuel honoraire, de l’Académie des inscriptions et belles-lettres et des sciences morales.

Nisard, sénateur, de l’Académie française.

Paris (Paulin), professeur au Collége de France, de l’Académie des inscriptions et belles-lettres.

Patin, doyen de la Faculté des lettres, de l’Académie française.

Pellat, doyen de la Faculté de droit, de l’Académie des sciences morales.

Quatrefages (de), professeur au Muséum, de l’Académie des sciences.

Ravaisson, inspecteur général de l’Université, de l’Académie des inscriptions et belles-lettres.

Rougé (le vicomte de), conseiller d’État, professeur au Collége de France, de l’Académie des inscriptions et belles-lettres.

Saulcy (de), sénateur, de l’Académie des inscriptions et belles-lettres.

Slane (le baron de), de l’Académie des inscriptions et belles-lettres.

Taylor (le baron), sénateur, de l’Académie des beaux-arts.

Thierry (Amédée), sénateur, de l’Académie des sciences morales.

Villemain, secrétaire perpétuel de l’Académie française.

Witte (le baron de), de l’Académie des inscriptions et belles-lettres.

Didot (Firmin), libraire de l’Institut.






MM.

Amari (M.), ancien ministre de l’instruction publique, membre correspondant de l’Institut — Italie.

Albrespy (André) , membre de plusieurs Sociétés savantes. — France.

Atkinson (Robert) , professeur au queen’s collège. — Angleterre.

Bachmaier (le docteur). — Allemagne.

Benedict (Jules), membre correspondant de l’Institut. — Angleterre.

Benfey (Théodore), membre correspondant de l’Institut. — Allemagne.

Bille (de), directeur du Dagbladet. — Danemarck.

Birch (Samuel), membre correspondant de l’Institut. — Angleterre.

Blondel, doyen de la Faculté de droit de Douai. — France.

Bonnucci (Carlo), membre correspondant de l’Institut. — Italie.

Brulloff, membre correspondant de l’Institut. — Russie.

Burnouf (E.), directeur de l’École d’Athènes. — France.

Carvallo, ingénieur. — France.

Captier, littérateur. — France.

Cazenove (L. de), docteur en droit. — France.

Chéron (J.), docteur en médecine et docteur ès-sciences. — France.

Charton (Ed), membre correspondant de l’Institut. — France.

Chenu (le docteur). — France.

Clausius, membre correspondant de l’Institut. — Allemagne.

Chodzko (Alexandre), professeur au Collège de France. — France.

Cortambert (E), bibliothécaire à la Bibliothèque impériale. — France.

Croockewit (J. H.), docteur ès sciences, Résident de l’île de Banka. — Indes Néerlandaises. —

David (le baron Étienne), ancien ministre plénipotentiaire. — France.

Deinse, (van), Résident de Menado. — Indes Néerlandaises.

Demolombe, doyen de la Faculté de droit de Caen, membre correspondant de l’Institut. — France.

Deml (Pierre), publiciste. — Autriche.

Diefenbach (L.), Biblioth. de la ville de Francfort. — Allemagne.

Docters (van Leeuwen), capitaine d’infanterie — Indes Néerlandaises.

Dognée, secr. gén. de l’institut hist. de France et de Belgique. — Belgique.

Doniol (Henry), membre correspondant de l’Institut. — France.

Dozij (R), membre correspondant de l’Institut. — Hollande.

Dunant (H.), fondateur de la Société Internationale de secours aux armées de terre et de mer. — France.

Dupré, membre correspondant de l’Institut. — Italie.

Falcony (Jacques), avocat. — Italie.

Felice (G. de), membre de la société des sciences , etc. — France.

Felsing (Jacques), membre associé de l’Institut. — Allemagne.

Fergusson (Samuel). — Angleterre

Fichte (D. F. H. van), membre associé de l’Institut, professeur de philosophie — Allemagne.

Foucaux (R. E.), professeur de sanscrit au Collège de France. — France.

Frankland (Ed), membre correspondant de l’Institut. — Angleterre.

Girard de Rialle, prof. à l’École Imp. des langues orient. — France.

Gorresio, directeur de la Bibliothèque royale de Turin, membre correspondant de l’Institut. — Italie.

Guarmani (Carlo), membre de plusieurs Académies. — Italie.

Guyon (le docteur), membre correspondant de l’Institut. — France.

Haidinger, membre correspondant de l’Institut. — Allemagne.

Henny (W. A.), Secrétaire de la Direction de l’Instruction publique, etc. — Indes Néerlandaises.

Hervey-Saint-Denys (marquis d’), prof. au Collège de France. — France.

Hillebrand, professeur à la Faculté des lettres de Douai. — France.

Hirn (G. A.), membre correspondant de l’Institut. — France.

Holsbeeck (Henri van), docteur médecin. — Belgique.

Hucher (Eugène), membre correspondant de l’Institut. — France.

Humbert (Aimé), recteur de l’Académie de Neuchâtel. — Suisse.

Jalabert (Charles), doyen de la Faculté de droit de Nancy. — France.

Jong Van Beek en Donk (J. de), avocat général. — Hollande.

Lacroix (P.) (Bibliophile Jacob), bibliothécaire de l’Arsenal. — France.

Lancereau, orientaliste. — France.

Lancrenon, membre correspondant de l’Institut. — France.

La Sagra (Ramon de), membre correspondant de l’Institut. — Espagne.

Lecoq (Henri), membre correspondant de l’Institut. — France.

Lefébure (E), orientaliste. — France.

Lesseps (F. de), fondateur de la Société Inter. de l’Isthme de Suez. — France.

Levallois (J.), littérateur. — France.

Lindo (Dr. M. P), inspecteur de l’instruction primaire à la Haye. — Hollande.

Malaguti, recteur de l’Académie de Rennes, membre correspondant de l’Institut. — France.

Manderstroem, (S. Exc.), ancien ministre. — Suède.

Marschall (S. Exc. le comte), chambellan de l’empereur d’Autriche, membre de plusieurs Sociétés savantes. — Autriche.

Martin (Th.), doyen de la Faculté des lettres de Rennes, membre correspondant de l’Institut. — France.

Mathey (Jules), littérateur. — Suisse.

Menten (H), ingénieur des mines. — Indes Néerlandaises.

Minervini (Jules), directeur de la Bibl. de l’Université de Naples, membre correspondant de l’Institut. — Italie.

Minieri (C.), directeur de la Bibliothèque roy. à Naples. — Italie.

Monnier (Marc), littérateur. — Suisse.

Muntz (Eug.), littérateur. — France.

Morikofer (J.C.), professeur d’histoire à Winterthur. — Suisse.

Nicolas, orientaliste. — France.

Noüe (le comte Ars, de), archéologue. — France.

Oppert (Jules), professeur au Collège de France. — France.

Owen (R.), membre associé étranger de l’Institut. — Angleterre.

Petit-Pierre (Gustave), philologue. — Suisse.

Pierre (J.), doyen de la Faculté des Sciences de Caen, membre corr. de l’Institut. — France.

Plateau, membre correspondant de l’Institut. — Belgique.

Quetelet, directeur de l’Observatoire royal de Bruxelles. — Belgique.

Reinhold Host, membre de la Société Asiatique de Paris. — Angleterre.

Ridou, professeur de l’Université. — France.

Ripalda (le comte de), sénateur, membre de plusieurs Sociétés savantes. — Espagne.

Rosny (Léon de), prof. à l’École Impériale et spéciale des langues orientales vivantes. — France.

Rossi (G. B. de), associé étranger de l’Institut. — Italie.

Roulliet (Antony), attaché au Ministère de la Maison de l’Empereur. — France.

Secchi (R. P.), directeur de l’Observatoire romain, membre correspondant de l’Institut. — Italie.

Spiegel (F. L. E.), membre correspondant de l’Institut. — Allemagne.

Staaff (colonel), littérateur. — Suède.

Summers (James), professeur au queen’s collège. — Angleterre.

Tappan (Henri P.), membre correspondant de l’Institut. — États-Unis.

Tissot, doyen de la Faculté des Lettres de Dijon, membre correspondant de l’Institut. — France.

Travers, professeur honoraire à la Faculté de Caen. — France.

Veuger Kuiper (H.), Chef de la Direction de l’Instruction publique. — Indes Néerlandaises.

Visconti (le baron), membre correspondant de l’Institut. — Italie.

Weber (W.), membre correspondant de l’Institut — Allemagne.

Weil (G.), membre correspondant de l’Institut. — Allemagne.

Wohler, membre correspondant de l’Institut. — Allemagne.

Worsaae, directeur des Musées royaux. — Danemark.

Wrangell (l’amiral Frédéric de), membre correspt. de l’Inst. — Russie.


Pour la Direction :
MM. Max. Grazia, A. Pino, F.-G. Eichhoff, J. David.


PRÉFACE



Un des principaux devoirs de notre époque est de résumer et de coordonner les travaux considérables que lui a légués le génie des découvertes, dans la science comme dans l’histoire. Grâce à quelques hommes supérieurement doués, poëtes et philologues à la fois, l’Orient nous a ouvert les trésors de sa pensée, et nous a permis de jeter, en arrière, un coup d’œil d’une portée qui n’avait jamais été atteinte. L’étude régularisée du sanscrit, du zend, du copte et du groupe des langues sémitiques a reculé les bornes de l’histoire, ou plutôt a éclairé et peuplé des espaces qu’on croyait obscurs et vides. De même que des voyageurs intelligents et hardis ont rencontré des tribus nombreuses, agricoles ou pastorales, au centre de l’Arabie qu’on désignait jadis comme une contrée improductive et désolée, et nous ont révélé le Nedjed, cet oasis prolongé entre deux déserts ; de même des nations qu’on croyait perdues dans les âges, sans annales, sans poésie, presque sans langue, ont émergé tout à coup avec leur antiquité fabuleuse, leurs légendes innombrables, leurs poëmes magnifiques, leurs efforts miraculeux dans le développement de l’intelligence et de la civilisation. L’histoire change d’aspect, et l’esprit de l’homme s’agrandit dans le passé. Il est temps de modifier l’enseignement général, et de vulgariser au profit de tous ces documents précieux qui rendent à nos premiers ancêtres leur place distincte et leur gloire littéraire. La publication importante qui s’entreprend, répond à ce besoin nouveau.

On sait que pour les Romains il n’existait au monde qu’une cité, Rome, et des barbares conquis ou à conquérir. Les Grecs, sauf quelques annalistes et quelques philosophes, montraient contre l’Asie un antagonisme persévérant. Les Hébreux s’étaient isolés dans l’aversion de leurs contemporains polythéistes. Les Égyptiens eux-mêmes n’estimaient que leurs propres mœurs, et les traditions sévères et grandioses qui relataient les vicissitudes de leur empire. Tous les peuples antiques, y compris les Indiens, se méfiaient de l’étranger, et le traitaient en ennemi. Ce n’est que dans des temps relativement modernes, ce n’est surtout que d’après l’influence extensive du christianisme, qu’on voyagea au loin, qu’on s’enquit des mœurs, et qu’on apprit les langues des pays, inconnus. De là ces études entreprises d’abord au nom de la religion, continuées ensuite au nom de la science. Alors seulement on songea à ces histoires universelles qui ne dédaignent aucun peuple, et portent une lumière investigatrice sur toutes les races et sur tout leur passé. L’érudition a hérité de ces travaux, et les a poussés plus profondément encore. Les progrès des Indianistes sont même tellement considérables qu’il semble utile de les résumer pour les propager, et pour en tirer une instruction qui changera peut-être un jour le rang des nations. Désormais les Aryas et les Chinois disputeront en valeur et en célébrités de toutes sortes avec les Égyptiens et les Hébreux, et nous trouverons entre-eux des rapports secrets qui expliquent leur origine et agrandissent leur mission. L’Arabe sous sa tente, le Babylonien dans ses murs de briques, le Phénicien sur ses navires, l’Iduméen sur ses chameaux ont vécu sous l’œil de Dieu, aussi bien que les prêtres du Sapta-Sindhou, les conquérants de l’Indoustan, les colonisateurs de l’Iran, et les fertilisateurs des vastes deltas de l’extrême Orient.

Tous les anciens ont été poétiques dans l’expression de leurs idées, et quand ils n’ont pas manié le poinçon des fils de Cham, le kalem des fils de Sem, ou le pinceau des fils de Japhet, c’est avec la truelle, l’équerre et le ciseau qu’ils ont marqué leur passage sur la terre. Voyez ces montagnes de briques qui témoignent de la puissance ingénieuse de Babylone, ces sculptures colossales de Nimroud et de Khorsabad, et ces monuments magnifiques que les déserts de l’Égypte et de la Nubie nous offrent comme des miracles d’exécution. Partout l’homme a chanté la majesté de Dieu et la grandeur de la nature sur la pierre, sur la brique, sur le marbre comme sur le papyrus, et son sentiment primordial a été l’admiration, son rêve l’extase, son langage la poésie.

Voir et admirer sont synonymes chez les groupes primitifs ; le soleil suffit à leur admiration, et son absence les terrifie tout d’abord, de même que son retour les rassure. La nature leur explique le créateur, ou plutôt la parole divine vibre en eux comme les cordes de la lyre après le toucher de l’artiste. Or, il est naturel de ne croire d’abord qu’à un dieu unique, car l’unité fait l’omnipotence, et l’esprit ne s’adresse volontiers qu’à un seul maître. Plus tard, l’homme qui ne développe son intelligence qu’en cherchant à se rendre compte des phénomènes de la création, rencontre des forces diverses et y veut reconnaître des attributs divins, constate des contradictions violentes, et se persuade qu’elles sont dues à une puissance rivale. De là les premières erreurs, les premières dérogations à la logique primitive, c’est-à-dire la dualité adéquate du bien et du mal.

Pour bien comprendre les religions, véritable origine de la pensée, il faut en simplifier l’étude, rechercher le principe de tous les cultes jusque dans les erreurs relativement les plus modernes, dégager le fond des formes surchargées qui l’entourent, et alors, dans le naturalisme védique, on retrouvera Agni, le lumineux, dans ce peuple d’âmes célestes qui caractérise les cultes zoroastriens, Zervan-Ackéren, l’infini, dans le sabéisme des Chaldéens Bel, le dominateur des astres, dans la foule des triades égyptiennes, Ammon, le père des dieux et des hommes, dans le polythéisme assyrien, le Dieu que personne ne blesse, dans le Tien des Chinois, le maître du ciel, dans le Nirvana bouddhique l’unité absorbante, dans Lao-Tseu, l’appétit de Dieu, dans Socrate, sa démonstration, dans Platon, son rêve. Cette constatation divine, cette prescience de la vérité qui n’est qu’un souvenir des âmes les mieux douées, confiance chez les plus faibles, inspiration du génie chez les plus forts, ces mystères de l’esprit en gestation d’une idée fécondante, voilà la grande et glorieuse conséquence de l’étude approfondie de l’antiquité.

Mais que de desiderata renferme la science historique, puisque nous ne savons rien sur ces mystérieux Pélasges, qui n’ont laissé sur leurs traces que des amas de terre et de pierres, des tombeaux et des murailles ; rien sur ces nobles Étrusques, dont un conquérant, aussi absolu que dédaigneux a effacé l’empire sans pouvoir pulvériser l’industrie, et dont l’art, relativement avancé et naïvement élégant, a surgi un jour de la terre, sa fidèle gardienne, comme une protestation contre les destructeurs de sa civilisation ; rien sur les Himyarites, ces premiers agriculteurs de l’Yémen, que les fils d’Ismaël ont vaincus et remplacés ; rien sur les Adites, de la race de Kousch, qui furent les premiers despotes de la Chaldée ; presque rien sur les Phéniciens, ces premiers navigateurs de la Méditerranée, ces premiers colonisateurs de ses rivages. Et les Finnois, qui nous ont laissé un poëme, sans nous laisser une histoire ; et les Atlantes, ces habitants d’une île immense, sombrée entre l’Afrique barbare et l’Amérique inconnue ; et les Ibériens ou les Proto-Espagnols, qu’on dirait autochtones, tant ils s’enfoncent dans les siècles ; et, de l’autre côté de l’Atlantique, ces premiers conquérants du Mexique, venus du nord de l’Asie, en contournant les rivages rigides du pôle arctique, et tels que les rappelle une curieuse représentation, conservée à Mexico, pages naïves d’une légende immémoriale ; et tant de nations ou au moins de tribus énoncées dans l’énumération si précieuse de la Bible ; et ces barbares enfin, dont l’histoire ne constate que les irruptions, les massacres, les incendies, les pillages, les Nubiens de l’Afrique, les Touraniens de l’Asie, ces ennemis éternels de l’Égypte et de l’Inde, et leurs fils, les Scythes, et les Parthes, leurs petits-fils ; et les peuples de Mosoch, de Gog, de Magog, de Thubal, dont il ne reste qu’un nom sans mémoire, dont pas un écho ne répète une syllabe de la langue ; ne sont-ils pas tous à jamais perdus, si l’on ne trouve un jour quelque mention de leurs actes dans des légendes encore ignorées ? L’histoire n’a-t-elle pas là une grande page blanche qu’il n’appartient qu’à la science moderne de remplir peu à peu, en éclairant l’avenir avec les lueurs du passé ?

C’est incontestablement à l’Orient qu’appartient l’honneur d’avoir commencé l’œuvre du perfectionnement humain. Tout s’y trouve, depuis les premières formules religieuses, jusqu’aux premières évolutions des sciences, des lettres et des arts. Dans les productions intellectuelles de ces vastes contrées, il y a plus qu’une augmentation du savoir général, il y a la révélation d’une loi providentielle, à laquelle tous les peuples ont obéi sans la connaître. Tandis que l’Indou, à la vive imagination, aux tendances métaphysiques, ébauchait presque tous les systèmes de religion et de philosophie, le Chinois patient, laborieux, pratique, développait les sciences morales et les appliquait à l’individu, à la famille, au gouvernement. L’Hébreu, isolé dans ses pérégrinations et dans ses luttes, et persévérant jusqu’à l’héroïsme, proclamait et maintenait la plus sublime des conceptions, le monothéisme pur, tandis que le sévère Iranien affirmait la responsabilité humaine, par le dogme de la résurrection. Le grave Égyptien démontrait, par ses monuments éternels, ce que peuvent la volonté et le génie de l’homme contre les efforts du temps, et par ses prêtres savants, ce que peut un sacerdoce intelligent sur la civilisation d’un pays ; de son côté, l’audacieux Chaldéen préparait les voies du ciel à la science astronomique et l’industrieux Phénicien colportait, sur ses navires, la civilisation asiatique le long du bassin de la Méditerranée, et jusqu’à la mer du Nord. Le Grec, aimé du soleil et des muses, transformait l’art et la poésie des orientaux, en les idéalisant, et la philosophie, en lui imprimant un nouvel essor. Le Romain, au contraire, esprit positif et généralisateur, plus logique que le Chinois, presque aussi tenace que l’Hébreu, organisait les sciences politiques par son art de gouverner et par sa codification des lois.

De ces produits multiples et différents de l’intelligence, se complétant l’un l’autre, convergeant tous vers un même point, le progrès de l’humanité, ressort pour nous, la démonstration d’une œuvre d’ensemble, d’un but commun, dont la diversité des nations, leur antagonisme même, et les modifications successives qu’elles ont éprouvées, ne font que confirmer l’évidence. Et si, de ces pays lointains et de ces temps reculés nous descendons jusqu’à nos jours, nous trouvons la même démonstration et la même confirmation dans toutes les contrées et à toutes les époques. L’Italie, poétique et généralisatrice, par ses origines greco-romaines, se fait l’intelligente auxiliaire de la renaissance des lettres et des arts ; l’Allemagne, presque aussi mystique que les Aryas primitifs, douée en même temps et de l’instinct de la recherche, et du besoin d’approfondir chaque idée, suscite la réforme religieuse, que nous considérons ici dans son résultat purement scientifique, et ouvre de nouvelles issues à la philosophie et à la science du droit ; l’Angleterre, aussi industrieuse que les Phéniciens, aussi positive que les Romains, étend le domaine des applications utiles ; la France, enfin, avec sa facilité étonnante de compréhension et d’assimilation, vulgarise au bénéfice du monde entier l’œuvre de tous. De même que pour le blé, l’agriculteur trace le sillon, sème le grain, coupe l’épi mûr, le bat et le passe au crible, de même les semailles et la récolte des idées ont exigé les travaux variés et multiples de tous les peuples, ouvriers providentiels, chargé chacun d’une tâche spéciale, d’après ses aptitudes différentes.

Mais l’ouvrier n’a eu pendant longtemps aucune conscience de son œuvre. Chaque nation a cru qu’il y avait exclusivement en elle la force de vivre, le droit de contraindre, et la sève pour féconder. Ce n’est qu’aujourd’hui, après l’éclosion des idées internationales chez presque tous les peuples, que nous pouvons entrevoir dans les produits de l’intelligence à travers les siècles, non-seulement une œuvre d’ensemble, mais de continuité, démontrée par des foyers, au rayonnement progressif, aux périodes régulières formant cycle, le développant, se complétant les uns par les autres, et ne s’éteignant qu’après avoir allumé ailleurs un plus vaste foyer.

L’Orient, nous l’avons dit, enfante la civilisation, que les Phéniciens apportent en Grèce, et les Grecs à Rome. Au moment où la Grèce perdait, sous Alexandre, sa force productive avec la liberté, Rome, exclusivement politique et conquérante, n’avait aucune des aptitudes nécessaires à conserver et à développer les traditions orientales. Il fallait qu’un autre foyer vint luire quelque part. Alors, sur une langue de terre presque inhabitée, entre la Méditerranée et le lac Maréotis, fut bâtie Alexandrie, au moment où son fondateur, par ses conquêtes en Asie, lui ouvrait des contrées mystérieuses et immenses, dont elle était destinée à conserver les traditions intellectuelles, par une double fusion d’idées, entre l’Orient et la Grèce d’abord, entre le monde ancien et le monde nouveau ensuite.

Le monde nouveau date de l’avénement du christianisme. À l’époque où Jésus-Christ parut, l’Asie, déjà vaincue par une poignée d’hommes sous Alexandre, ne possédait plus d’éléments utiles à la civilisation générale : la Grèce, atteinte dans sa fécondité par la suppression de ses libertés, atteinte dans sa vie par la mort de Philopœmen, le dernier de ses héros, ne devait plus s’attendre qu’à être ensevelie, avec ses dieux, sous l’amère et dissolvante ironie de Lucien. Alexandrie, asile de l’intelligence proscrite ou comprimée, ne pouvait avoir d’autre génie que le génie de la conservation, et se trouvait ainsi destituée de toute initiative ; le reste se partageait entre Rome et les peuples qu’on appelait Barbares. Mais Rome n’avait plus de vitalité et l’avenir lui échappait. Les Gracques avaient vainement essayé une transformation sociale à l’intérieur ; César avait vainement imaginé une transformation sociale à l’extérieur ; l’oligarchie romaine, conséquente avec ses intérêts de caste, et avec l’esprit positif de son pays, supprimait les rêveurs par la roche Tarpéienne ou par le poignard. La matière dominait l’esprit, la force s’imposait au droit. Auguste, qui, selon nous, a donné improprement son nom à la plus belle période de la littérature latine, ajoutait la ruse à la force. L’âme romaine n’était plus à Rome, parce que sa raison d’être providentielle avait cessé d’exister. Les descendants de ces vieux Quirites, qui avaient cru à l’enlèvement de Romulus par leurs dieux, ne croyaient plus en eux-mêmes. La dissolution du monde ancien, sans être évidente, était complète, universelle, malgré son pouvoir encore très-grand et son prestige encore intact. C’est alors que du fond de la Judée, soumise à ces mêmes Romains auxquels l’initiative venait de manquer, apparaissait l’astre du monde nouveau.

Croyances, lois, mœurs, le christianisme renouvelle tout. Il franchit, dès sa naissance, des barrières qu’on croyait insurmontables, les rivalités des classes et des races ; il appelle les hommes frères, et les déclare égaux ; il leur dit qu’il y a un seul Dieu, une âme immortelle et responsable, que les fautes sont inhérentes à la nature humaine, et que le pardon n’attend que le repentir. Il proclame devant tous la vie de l’esprit et son triomphe sur la matière ; il nous apprend que la haine tue, et que l’amour féconde, et il nous convie, après avoir accompli notre tâche commune de labeur, aux béatitudes d’une vie éternelle. Douce religion, qui se base sur le dévouement sublime de son fondateur ; douce philosophie, qui s’annexe, en les divinisant, le spiritualisme grec par Platon et les traditions orientales par les Alexandrins.

Au moment où Constantin fermait la période de lutte, pour inaugurer la période dogmatique du christianisme, Rome était encore debout avec ses temples aux mille dieux, avec ses aigles victorieuses. Telle qu’elle était, Rome ne pouvait pas comprendre le christianisme, et l’instinct de sa conservation devait lui commander les plus violentes répressions contre ce formidable ennemi. Il fallait donc des peuples jeunes, des natures neuves et promptes à s’émouvoir, pour accomplir la ruine du pouvoir romain et assurer le triomphe de la nouvelle civilisation. C’est pourquoi des multitudes innombrables, différentes de race, de mœurs, de langage, s’ébranlèrent tout à coup et en même temps, comme si l’on avait pu leur donner un mot d’ordre, et marchèrent, des quatre coins du monde, se heurtant et s’entre-choquant entre elles, à la destruction de la ville fatale. La lutte fut longue entre les deux mondes, elle dura plusieurs siècles, et les villes incendiées, les campagnes ravagées, les hommes égorgés ou réduits en esclavage, les œuvres de la pensée dispersées ou détruites, presque toutes les traditions, presque tous les souvenirs d’une grande civilisation noyés dans le sang ou anéantis dans l’ignorance, tels furent les résultats apparents de cette immense conflagration.

Mais les résultats réels furent, du côté des Romains, la jeunesse rendue à la race latine, prématurément vieillie par l’abus de la force, fatalement corrompue par les excès de la conquête ; du côté des Barbares, l’universalisation de la foi chrétienne, et par elle la révélation d’une haute et généreuse morale, l’adoucissement des mœurs, et l’éclosion d’un spiritualisme d’où devait émaner la régénération du monde ; des deux côtés, comme résultat politique, l’adoption de la commune romaine, dont le souvenir avait été maintenu au milieu de la plus violente décentralisation, et dont le développement devait résulter de l’exagération même du despotisme féodal. Il est une loi providentielle qui impose au vainqueur la civilisation du vaincu, de même qu’elle permet aux forces de renouvellement de dominer tous les esprits et, à un moment donné, de diriger toutes les volontés : le droit romain fut donc adopté, d’une façon plus ou moins intelligente, par les hommes du Nord, et le christianisme devint le maître des vainqueurs et le défenseur des vaincus.

En ne considérant cette foi nouvelle que du point de vue de son action historique, on trouve qu’elle contenait tous les éléments d’un grand progrès assuré à l’avenir ; mais la chaîne de continuité du passé était inévitablement destinée à se briser, car le christianisme ne pouvait, en tant que manifestation humaine, et dans la période de son organisation, nous ne disons pas chercher, mais seulement admettre aucun autre levier de progrès en dehors de lui. Eh bien ! c’est à ce moment même qu’un grand homme surgissait en Arabie, Mahomet, reliant entre elles, par le monothéisme, de nombreuses tribus éparses, ennemies les unes des autres, et créant, sans le savoir, un nouveau foyer de civilisation. Ainsi, quand bouillonnaient dans cette fournaise ardente, qu’on appelle le moyen âge, les divers éléments destinés, par leur fusion, à constituer de nouvelles nations dans notre Occident, quand de nouvelles langues commençaient à se former, quand l’ouvrier et l’agriculteur, pour se mettre à l’abri des violences du seigneur du château, bâtissaient des bourgades et des villes, lorsque enfin l’état social de l’Europe s’organisait progressivement, les Arabes, en envahissant l’Espagne, nous rapportaient une partie des documents de la civilisation grecque, et réveillaient nos imaginations par le charme de leur poésie orientale. Les Arabes ont été pour nous ce que les Phéniciens ont été pour les Grecs, ce que les Alexandrins ont été pour les chrétiens. Seulement, tandis que les Phéniciens transmettaient la civilisation orientale par le commerce, et les Alexandrins la civilisation greco-orientale par l’asile accordé à la science, les Arabes nous ont transmis la civilisation greco-alexandrine par la conquête. Leur œuvre providentielle commence à l’invasion de l’Espagne, se continue avec les croisades, et ne finit vraiment qu’à la prise de Constantinople, époque où les savants grecs, bannis de leur patrie adoptive, allaient apporter eux-mêmes en Italie les matériaux nécessaires pour compléter la renaissance en Occident.

Si nous ne nous trompons pas sur l’action et sur l’importance des foyers civilisateurs que nous venons d’indiquer, nous croyons être aussi dans le vrai en disant qu’il y a des périodes régulières dans chaque foyer. En effet, dans l’Asie orientale, chez la race Aryenne, chez les races chamitiques ou sémitiques, chez les Grecs, chez les Latins, au point de départ de la pensée, on trouve une seule force agissante, le sentiment religieux, une seule expression de l’intelligence, la poésie lyrique. Ces poésies spontanées, transmises oralement de génération en génération pendant plusieurs siècles, conservées par le sacerdoce indou et persan, comme le Rig-Véda et les Gathas ; consacrées par la foi, comme les bénédictions d’Isaac et de Jacob, chez les Hébreux ; inspirées par le gouvernement religieux et politique chez les Égyptiens, comme leurs chants de triomphe, et les hymnes des Rituels ; essentiellement monarchiques, comme les plus anciennes odes du Chi-kîng chinois ; quelquefois détruites par le temps, comme les hymnes orphiques des Grecs, dont nous ne possédons rien d’authentique, et comme les chants arvals et saliens des Latins, dont il ne nous reste que des fragments ; ces poésies naïves, ces invocations, ces hymnes, actions de grâces ou prières, ces chants populaires, ces manifestations d’un monde encore jeune, d’une pensée encore vierge, auxquels le printemps donne toute sa sève, et la foi toute sa force, constituent, selon nous, la période primitive de l’intelligence.

Ensuite, le culte s’établit, et fixe les tribus sur le sol, où elles s’assemblent et commencent à se développer ; la lutte du pouvoir surgit entre le prêtre et le guerrier ; peu importe qui aura la victoire, le pacte social en est la conséquence naturelle. Le prêtre demande des armes à la foi, en organisant sa cosmologie et sa théogonie ; s’il est vainqueur, le pacte social sera théocratique. Le guerrier demande des armes aux intérêts civils, en organisant l’État par des compromis avec les chefs qui se joignent à lui ; s’il est vainqueur, le pacte social sera politique. Il arrive parfois qu’un sacerdoce intelligent, plutôt que de combattre le pouvoir politique, vient en aide à son organisation par une alliance qui assure sa suprématie morale ; si cette alliance a lieu, le pacte social sera mixte. Le peuple, à l’imagination impressionnable, suit les uns et les autres, et voit des prodiges dans les actions et les événements les plus naturels. De là les codes sacrés, les législations nationales, les légendes épiques. La victoire de la théocratie obscurcit les premières lueurs de l’unité dogmatique, qui s’achemine à travers mille subtilités vers le mysticisme, et produit les Oupanichads, et les Brahmanas dans l’Inde ; la victoire du pouvoir civil efface ou fractionne l’unité dogmatique, et produit le Chou-king en Chine, et les rêveries ingénieuses du polythéisme greco-romain ; la fusion des deux forces, des deux idées dirigeantes maintient l’unité dogmatique au profit du pouvoir politique, et produit les Triades locales des Égyptiens. Dans les trois cas, la philosophie commence à poindre à travers la théologie, mais elle n’est encore qu’à l’état de conception primordiale. Les législations, théocratiques dans l’Inde, comme les Lois de Manou ; politiques, sous un formalisme excessif, dans l’empire absolu de la Chine, comme le Tchéou-li ; mixtes, c’est-à-dire mêlant le sacerdoce à la magistrature, comme les lois hébraïques ; faisant un tribunal du temple ou demandant, en dernier ressort, le jugement aux oracles, comme les lois égyptiennes ; parfois violentes, chez les Grecs, poussés à la licence par un sentiment exubérant de liberté, comme les lois de Lycurgue, de Zaleucus, de Dracon, et même de Solon ; ou concises par le nombre et par la forme, et terribles par leur concision même, comme les douze tables chez les Romains, dont la jalousie oligarchique soupçonne des ennemis partout, les législations, disons-nous, suivent le même chemin que les codes sacrés.

Les légendes épiques complètent le mouvement. Elles sont théocratiques dans l’Inde, comme le Ramâyâna, et le Mahâbhârata ; mixtes en Égypte, comme le poëme de Pentaour, monument d’une haute importance, parce qu’il détermine d’une manière évidente le moment où la forme lyrique, expression individuelle, cède le pas à la forme épique, expression collective ; héroïques en Grèce, comme l’Iliade et l’Odyssée ; historiques à Rome, comme les Annales d’Ennius, et la Guerre punique de Nevius. Cette période, dans laquelle le dogme se fixe, le pacte social s’établit, et l’expression poétique devient collective, constitue, selon nous, la période d’organisation de l’intelligence.

Plus tard de grands changements surviennent dans l’État, soit par une réforme religieuse, comme dans l’Inde et la Perse ; soit par la constitution de l’unité nationale, comme dans l’Égypte ; soit par une nouvelle organisation politique, comme chez les Hébreux ; soit par le triomphe de la liberté, comme en Grèce ; soit par de grandes conquêtes territoriales, comme à Rome ; soit, en dehors de la politique et de la religion, par les sciences positives ou morales, comme en Chine. À ce moment la nation a la conscience d’une énergie nouvelle, elle est active, féconde au dedans, redoutée au dehors. Le commerce et l’industrie se développent, les arts se perfectionnent, la philosophie domine les autres sciences qu’elle a fait naître, et Kapila, Patandjali, paraissent dans l’Inde ; Salomon, chez les Hébreux ; Lâo-Tseu, Confucius chez les Chinois ; Socrate, Platon, Aristote, en Grèce ; Lucrèce et Cicéron à Rome. La religion elle-même incline vers la philosophie dans la réforme de Çakya-Mouni et de Zoroastre. L’éloquence politique et le théâtre brillent dans la littérature, à laquelle ils donnent, par l’effet de l’idée et de sa vivante représentation, une double force. De grands noms surgissent en Grèce et à Rome, dans l’éloquence politique, Periclès, Eschine, Démosthène, Caïns Gracchus, Hortensius, Cicéron ; de grands noms dans le théâtre, Eschyle, Sophocle, Euripide, Aristophane, Accius, Plante, Térence. L’histoire s’élabore, chez les Grecs, avec Hérodote ; chez les Latins avec Tite-Live ; et elle se prépare à sortir de la littérature pour entrer dans les sciences sociales, avec Thucydide et Xénophon en Grèce, César et Salluste à Rome. La poésie lyrique, si elle n’a pu conserver l’enthousiasme et l’abondance des temps primitifs, a gagné en art, en prestige, en ampleur avec Pindare, et s’est alliée à la philosophie avec Horace. L’épopée est devenue littéraire avec Virgile. La sève monte dans toutes les branches de la vie nationale ; rien ne reste inerte, rien n’est infécond ; il y a floraison, épanouissement, fructification ; c’est, à notre avis, la période d’expansion de l’intelligence.

Plus tard enfin, ou la réforme religieuse, qui contenait des éléments de progrès, a été vaincue, comme le bouddhisme dans l’Inde, absorbée et défigurée comme le mazdéisme en Perse ; ou la défense de l’unité nationale, plusieurs fois brisée, est devenue impossible par l’extinction de toute force organisatrice, comme en Égypte ; ou la scission de l’unité politique a ouvert le pays à tout envahisseur, comme chez les Hébreux ; ou la liberté a péri au milieu de la discorde dissolvante des partis, comme en Grèce ; ou les conquêtes, par lesquelles on avait étendu le territoire national, sont devenues une arme destructive pour les conquérants eux-mêmes, comme à Rome ; ou la dissolution politique a empiété sur le savoir et l’a nivelé, avec le reste, comme en Chine ; la dernière heure a sonné, peu importe comment, jusqu’à une renaissance plus ou moins retardée, pour chacun de ces peuples. La sève s’arrête ; l’arbre n’a plus de vie, ses fleurs s’étiolent, ses branches se sèchent, la philosophie est sans école, les sciences sont sans interprètes ; la poésie lyrique n’a plus ni spontanéité, ni vigueur, parce qu’elle n’est plus inspirée par de hauts sentiments personnels ; l’épopée populaire des périodes d’organisation, suivie de l’épopée littéraire des périodes d’expansion, devient froide ou déclamatoire parce qu’elle ne répond plus à de hauts sentiments de collectivité. Le théâtre se ferme ou s’avilit ; le genre didactique domine seul par la satire âpre et mordante ; il n’y a plus de goût, il n’y a plus de moralité, il n’y a plus d’idées ; aussi écrit-on beaucoup, moralise-t-on beaucoup, sans pouvoir autre chose que commenter les idées du passé. Quelques âmes généreuses protestent comme Plutarque, comme Tacite, elles n’en font que mieux connaître la profonde misère de leur époque. Alors les grammairiens paraissent pour sauver la langue, levier d’un renouvellement à venir. Nous sommes arrivés à la période de décadence ; mais ne redoutons pas ce mot, il n’exprime qu’une transition.

À proprement parler, il n’y a point de décadence : l’idée, plus forte que le fait, survit dans les ruines ; la civilisation, plus vivace que les nationalités, passe de l’une à l’autre au bénéfice du genre humain. Ce que nous avons établi plus haut : ces temps primitifs, ces organisations laborieuses, ces épanouissements plus ou moins lumineux, ces décadences temporaire ne sont, à vrai dire, que les quatre périodes de la nature, les quatre périodes de la vie humaine. Mais comme l’hiver n’est pas la fin des saisons, comme la vieillesse et la mort ne sont pas la fin de la vie, de même la décadence n’est pas la fin de la civilisation d’un pays, car elle est relative, et non pas absolue, elle s’opère toujours à l’avantage de la civilisation universelle ; elle ouvre à chaque modification, un plus grand foyer de rayonnement, et doit être suivie tôt ou tard d’une renaissance. Chaque nation a été, tour à tour, dans l’ancien comme dans le nouveau monde, le centre d’un mouvement partiel ou d’un mouvement général. Seulement, en ce qui regarde l’ancien monde, l’absence d’une chronologie certaine, et le nombre restreint des documents connus ne permet pas de saisir les influences relatives d’un pays sur un autre, au fur et à mesure qu’elles se sont exercées ; et l’on ne peut considérer les produits de la pensée orientale que par groupes d’ensemble et par pays. Avec le nouveau monde, les différents mouvements intellectuels se dessinent beaucoup plus nettement, et il est facile d’y voir, non-seulement des influences réciproques, directes ou indirectes, mais aussi les phases diverses et multipliées de ces influences. Dans les deux mondes, même continuité de foyers, mêmes évolutions de périodes, tel est le phénomène providentiel qu’il nous reste à constater.

La période primitive du christianisme présente deux phases distinctes, de Jésus-Christ à saint Justin, et de saint Justin à l’édit de Constantin. Pas de poésie écrite d’abord, mais une sublime poésie d’action, dans la foi, dans l’abnégation, dans le dévouement jusqu’au martyre. Au sacrifice de la vie viennent s’ajouter ensuite les œuvres de la pensée. C’est le temps de Clément d’Alexandrie et d’Arnobe, le temps des Apologistes. Après l’édit de Constantin, et jusqu’à la chute de l’empire romain, l’organisation s’accomplit ; les dogmatistes surgissent, et l’éloquence religieuse, qui vient de naître, touche vite à son apogée par saint Athanase, saint Jean Chrysostôme, saint Jérôme, saint Augustin ; la poésie élève des notes douces et mélancoliques dans les méditations de saint Grégoire de Nazianze, et brille de quelques éclairs puissants dans les hymnes de Synésius. De la chute de l’empire romain aux croisades, le christianisme se transforme, en tant qu’élément social, et devient la base fondamentale d’une société nouvelle. Avant l’avènement du christianisme, les Alexandrins avaient commencé leur œuvre de conservation en ouvrant un asile à l’intelligence. Ce mode d’action, que nous ne rencontrons qu’une fois dans l’histoire, exigeait naturellement des évolutions successives en rapport avec l’ordre de son développement. Aussi de Ptolémée Philadelphe à Philon le Juif, nous ne trouvons qu’une période de préparation. Avec Philon, les idées orientales et platoniciennes, qui devaient entrer plus tard dans la philosophie chrétienne, se naturalisent à Alexandrie. De Philon à Plotin, le travail d’assimilation continue, mais il est à l’état latent, et il ne peut constituer qu’une période de transition. À Plotin commence la période de fusion. Proclus l’accomplit. Là se borne l’œuvre des Alexandrins, qui va être reprise et continuée, un siècle environ après la mort de Proclus, par les Arabes.

Aux temps de l’ignorance qui précèdent Mahomet, les Arabes qui ont gardé l’esprit, l’allure, les mœurs de leurs ancêtres les plus reculés, chantent dans leurs mohallakats, ces chefs-d’œuvre de leurs poètes nomades et guerriers, leur passion pour l’amour, les combats et l’indépendance. Colorée comme sa nature, brûlante comme son soleil, ardente comme le sable de ses déserts, cette poésie, remplie d’énergie et de tendresse à la fois, mais chargée des colères et des haines de tribu contre tribu, décèle tous les signes caractéristiques de la période primitive. De Mahomet aux Abbassides, les forces, disséminées jusqu’à l’individualisme le plus absolu, se sont concentrées sous l’autorité toute-puissante du khalifat. Les Arabes ont vaincu les dissidents intérieurs, et les ennemis extérieurs ; ils ont conquis des territoires immenses, dompté des peuples nombreux ; ils possèdent dans le Koran leur code sacré et leur législation sociale ; ils ont des poëtes qui chantent, l’épée à la main, des épopées populaires en de grands récits de guerre et d’amour ; ils commencent à étudier Aristote, et préparent la renaissance de la philosophie ; c’est leur période d’organisation. La période de transformation part des Abbassides et finit à la rupture définitive entre les khalifes de Cordoue et les khalifes d’Orient. Les anciens manuscrits sont recherchés : Al-Farabi, Al-Gazel, Averroès vulgarisent la philosophie grecque ; les sciences mathématiques et naturelles progressent considérablement pour ces temps ; la poésie est en grand honneur ; l’architecture fleurit dans un style à la fois étrange et splendide ; enfin, les savants et les poëtes arabes apportent, par l’Espagne, les éléments qui manquaient au complet développement du foyer occidental ou européen.

Ce foyer est représenté par différents groupes : Latin, Germanique, Slave, Finnois, et mixte. Le mode d’action est toujours le même dans chacun d’eux. Nous nous réservons de le démontrer en tête des œuvres du monde moderne. En attendant nous savons que l’œuvre est commune, que le but est commun, qu’il en ressort une responsabilité commune ; aussi, peu importe la latitude sous laquelle les nations vivent, peu importe le nom sous lequel elles invoquent Dieu, elles appartiennent toutes à la grande famille humaine, et aucune catastrophe ne peut frapper l’une d’elles sans qu’elle n’atteigne directement, ou indirectement, de près ou de loin, toutes les autres.

Le moment est venu d’asseoir l’enseignement général sur des bases aussi larges que le réclament nos intérêts et nos devoirs. Pour nous, le degré le plus avancé du progrès se mesure par l’étendue plutôt que par la profondeur des connaissances. Si le point de départ, c’est l’homme, le point d’arrivée, ce sont les hommes. Ces météores éblouissants de l’intelligence, qu’on appelle génies, n’auraient pas eu leur raison d’être au milieu du monde, s’ils n’avaient pas été destinés à éclairer tôt ou tard les multitudes. De nos temps, après Kepler, Galilée et Newton, ces trois grands scrutateurs de la nature, après Dante, Shakespeare, et Molière, ces trois grands révélateurs du cœur humain, les individualités géantes ont fait place aux collectivités. Voilà pourquoi la révolution de 1789 a été possible.

Des lois éternelles gouvernent le monde moral, comme elles gouvernent le monde physique ; et si l’on ne peut encore les déterminer d’une manière certaine, il n’est pas sans importance de les chercher, tout en préparant en même temps les matériaux nécessaires à cette grande découverte. C’est ainsi que nous avons entrepris de réunir en des groupes lumineux les chefs-d’œuvre de la pensée de tous les temps et de tous les pays. L’instruction, utile à toutes les époques, est devenue indispensable aujourd’hui. Mais ce qui est non moins indispensable c’est de faire entrer par l’instruction, dans l’esprit des peuples, l’idée si méconnue et pourtant si vraie, qu’il y a entre eux une solidarité inévitable. Cette idée suffirait seule à diminuer les éventualités de la guerre, qui a cessé d’être un agent de la civilisation, et à remplacer les luttes sanglantes des batailles par les luttes pacifiques et fécondes de l’intelligence.

Notre but n’est donc pas seulement de former une bibliothèque modèle, renfermant dans un nombre relativement très-restreint de volumes, tout ce qui trouve de grand et d’utile dans les plus riches bibliothèques du monde ; mais surtout de provoquer une ère de travail collectif, dans une entente commune, par la reproduction logique de l’œuvre de nos pères dans le domaine de la religion, des sciences, des lettres et des arts, c’est-à-dire par l’histoire du perfectionnement des facultés humaines, aboutissant à l’histoire la plus vraie et la plus complète de l’humanité. Notre méthode est simple : la loi des filiations. Notre plan d’organisation est aussi simple que notre méthode : une division par séries des foyers déterminés de civilisation, et des évolutions périodiques dans chaque foyer.

La loi des filiations nous amène naturellement à placer les causes en présence de leurs effets, qui deviennent à leur tour causes d’autres effets, ce qui nous permet d’élever une reproduction scientifique et littéraire au rang de l’histoire.

La division par séries répond aux formes, ou expressions différentes, sous lesquelles la pensée s’est manifestée. Ces formes ou expressions différentes tiennent non-seulement à la loi générale de la variété dans l’unité, mais aussi à la loi historique du progrès ; car chaque peuple, tout en embrassant, dans une certaine mesure, les branches multiples du savoir, a naturellement cultivé, d’une manière spéciale, celle qui répondait le mieux à ses aptitudes.

Les foyers déterminent l’action locale, les périodes, le mode de cette action, et ils concourent ensemble à expliquer le mouvement progressif de la pensée. On peut discuter nos foyers et nos périodes, mais une chose est indiscutable, selon nous : le progrès indéfini de l’humanité. Dès lors toutes nos prémisses, et toutes les conséquences qui en dérivent conservent la valeur que nous leur avons donnée ; car, quand même nous nous serions trompés dans la fixation des foyers et des périodes, il n’en resterait pas moins un mode d’organisation d’une véritable utilité pratique dans une collection de chefs-d’œuvre aussi vaste que la nôtre.

Nous entendons par chefs-d’œuvre toute manifestation de la pensée, ayant été cause médiate ou immédiate d’une éclosion d’idées nouvelles, et ayant reçu la consécration du pays qui l’a produit. Ces chefs-d’œuvre nous les donnerons autant que possible en entier. Mais il y a aussi des ouvrages qui, tout en portant le cachet d’une décadence, ont néanmoins servi au progrès, soit par des erreurs utiles à la découverte de la vérité, soit comme démonstration de la loi providentielle de continuité, soit enfin comme complément des phases historiques d’un peuple. De ces ouvrages nous ne publierons que la partie nécessaire pour expliquer l’action qu’ils ont exercée.

Les documents de l’ancienne civilisation hébraïque, tout en nous appartenant au point de vue de leur manifestation humaine, nous imposent des devoirs au point de vue de nos croyances : nous donnerons donc la Bible en entier, en un volume spécial, parmi les codes sacrés ; sa belle et grande poésie lyrique, ses lois et sa philosophie pratique paraîtront en outre, en appendice aux volumes de ces diverses séries.

Spiritualistes, et notre œuvre le démontre, nous n’avons à faire prévaloir aucune idée personnelle, notre tâche devant se borner à choisir, à classer, à reproduire les ouvrages qui ont eu une influence directe ou indirecte sur le mouvement humain. Mais ce choix, cette classification et cette reproduction, s’appliquant au travail collectif des grands esprits de tous les temps, il devenait nécessaire pour nous de faire appel au travail collectif des intelligences vivantes de tous les pays. Des hommes considérables parmi les membres de l’Institut français, et parmi les savants et littérateurs européens, ont répondu à nos pressantes invitations, et ont accepté de faire partie, soit d’un comité supérieur consultatif, soit de comités nationaux, soit de la direction, en qualité de membres correspondants. Nous tenons, dès le commencement de notre publication, à remercier publiquement ces nobles penseurs, ces écrivains illustres, dont l’approbation sympathique nous a encouragés dans notre tâche laborieuse, et dont les conseils éclairés nous permettront de conduire à bonne fin cette vaste et difficile entreprise. Quant à nous, nous serons assez récompensés, si nous arrivons à graver dans le souvenir de nos contemporains les noms des travailleurs de la pensée, auxquels notre siècle doit l’étendue de sa civilisation, et à faire respecter, comme les dieux Lares de la famille humaine, ces génies glorieux et persécutés, qui ont souvent payé par des supplices ou des souffrances de toutes sortes le mérite inappréciable d’avoir fécondé l’avenir.

Pour la direction :
Max. Grazia.
A. Pino.



POÉSIE LYRIQUE


INDE

INTRODUCTION





INTRODUCTION
PREMIÈRE PARTIE

Il y a cent ans, personne ne se doutait que les Aryas de la Bactriane fussent nos ancêtres. L’extrême Orient nous était presque inconnu ; l’Inde, particulièrement, n’était pour nous que l’empire du mystère, du fantastique, de l’impossible. Nous n’en savions quelque chose que par les Grecs, les Arabes, les Persans, conquérants ou voisins, intéressés à ne représenter leurs rivaux que sous les couleurs qui leur convenaient. Voltaire avait pris la compilation propagandiste d’un missionnaire catholique pour un extrait réel des livres sacrés des brahmanes. On n’entrevoyait l’Inde qu’à travers les songes des docteurs musulmans ; on ne connaissait ni ses origines, qui sont les nôtres, ni ses théogonies, parmi lesquelles tous les peuples antiques ont cherché des idées et puisé les croyances. Le sanscrit, clef de tant de mystères, est une découverte moderne. Ce n’est pas qu’on n’ait eu primitivement le soupçon d’une langue et d’une littérature religieuse et philosophique, dont les prêtres seuls se réservaient la connaissance ; mais sans grammaire et sans lexique de cette langue, on ne pouvait que conjecturer ses richesses. Tout était ténèbres, alors, dans ce monde voilé sinon éteint, dans ce passé dérobé aux yeux profanes par l’inquiétude jalouse des brahmanes.

Le soupçon qu’on en avait tenait plutôt du rêve que de la réalité, et, comme tout mystère, il avait sa légende. On prétendait que saint François Xavier, possédant miraculeusement le don des langues, avait appris d’un ange le sanscrit pour réfuter les erreurs des doctrines brahmaniques, mais sans pouvoir en transmettre la connaissance. On disait qu’un jésuite, du nom de Roberto de Nobili, s’était fait brahmane pour connaître les arcanes religieux de l’Inde ; mais que, découvert et dévoilé, il avait subi des persécutions ingénieusement féroces, et qu’on lui avait arraché les yeux pour qu’il ne pût avancer davantage dans une étude essentiellement secrète. D’autres missionnaires, sans approfondir cette langue mystérieuse, en constatèrent l’importance ; le père Pons, par exemple, fit au père Duhalde un rapport assez exact des richesses sanscrites et des traditions védiques. Tout cela, du reste, n’était que des conjectures et des essais ; et Anquetil-Duperron, en traduisant du persan les Oupanichads, ne nous fit connaître que les commentaires et non le texte des Védas. On savait depuis longtemps que les Arabes de Bagdad et les sultans Gaznévides avaient fait traduire des poëmes et des théologies indiennes ; mais se méfiant avec raison du choix et du jugement mahométans, on s’en rapportait peu à ces traductions expurgées par le fanatisme.

Tout restait donc à faire quand la conquête des Indes par une nation policée et curieuse éveilla l’intérêt des savants, et suscita leurs investigations. Les Anglais, plus persévérants que nous, et plus à même d’ailleurs, par leur établissement définitif sur les bords du Gange, de s’informer des mœurs et de l’esprit de leurs tributaires, s’enquirent des langues qu’on parlait autour d’eux : le palî, ancien idiome, le pracrit, dialecte vulgaire ; le sanscrit, langue hiératique et littéraire. Ils étudièrent surtout ce dernier ; ils se firent initier à ses œuvres innombrables en littérature et en théologie, demandèrent à plusieurs brahmanes un abrégé de leurs codes religieux et civils, se procurèrent des manuscrits, entreprirent des dictionnaires, réunirent des savants laïques et religieux, et fondèrent avec eux la société asiatique de Calcutta. William Jones avait donné l’impulsion ; Colebrooke la suivit et la dépassa. Grâce à sa liaison avec un de ces brahmanes curieux et intelligents, qui voulait à la fois s’instruire dans l’histoire de nos idées et dévoiler la source des siennes, Colebrooke put pénétrer la philosophie et la religion de ce grand peuple des Aryas, souche des principales nations européennes, ainsi que des Hindous et des Perses. C’est donc à Colebrooke et à son digne initiateur Ram-mohun-roy, que nous devons le premier ouvrage sérieux sur les philosophies théocratiques de l’Inde. Une fois cette grande phase de l’humanité dévoilée, l’érudition et la science se précipitèrent à sa conquête. Les manuscrits védiques abondèrent en Europe : Rosen rectifia les textes, Langlois, Wilson les traduisirent, Muller, Weber les classèrent ; Eugène Burnouf élucida les travaux antérieurs ; d’autres de plus en plus nombreux les suivirent ; et un monde fut découvert, non moins nouveau que l’Amérique de Christophe Colomb.

Maîtres désormais de textes véritables, en possession de lexiques et de grammaires, de commentaires et de gloses qui pouvaient guider et assurer leur marche, une foule d’hommes studieux se plongèrent à l’envi sur cet océan de définitions, de dissertations, d’amplifications, de scholies, de poëmes, d’où émergèrent bientôt, grâce à leurs persévérants efforts, une société tout entière, et divers cultes successifs. Que découvrîmes-nous tour à tour ? Des traditions sacrées formulées sous les rhythmes de l’hymne, reproduites oralement pendant des temps indéterminés, et transcrites sur des feuilles de palmier vers le douzième siècle avant notre ère, ce sont les Védas. Puis une religion officielle, le Brahmanisme ; des lois religieuses, le Code de Manou ; des épopées sacrées, le Ramâyana, le Mahâbhârata ; plusieurs systèmes philosophiques, le Sankya, le Nyaya, le Védanta ; des schismes nombreux, des individualités athéistes ; des légendes théocratiques, les Pouranas ; des traditions historiques, les Itihasas ; des commentaires pratiques, les Brahmanas ; des recensions sacerdotales, les Samhitas ; des résumés liturgiques, les Soutras ; des leçons religieuses, les Oupanichads ; une encyclopédie officielle, les Sastras, et enfin une réforme radicale, d’abord victorieuse et ensuite vaincue, le bouddhisme : inextricable confusion de vérités et d’erreurs, d’utopies et de systèmes, de réalités et de rêves, sans date, sans chronologie, sans fil conducteur.

Ce n’est que plus tard, et au fur et à mesure du classement des formes différentes sous lesquelles la pensée humaine s’est manifestée, que nous pourrons passer en revue tous les produits de l’inspiration indienne. Aujourd’hui nous n’avons à nous occuper d’une manière spéciale que des Védas, dont le nom signifie : science suprême.

Les Védas sont au nombre de quatre, le Rig, le Sâma, le Yadjour, et l’Atharva-Véda. Le Rig, le Sâma, et l’Atharva ne renferment que des vers ; le Yadjour-Véda contient des vers et de la prose et se partage en Yadjour blanc et Yadjour noir. Ces quatre livres constatent, selon nous, dans la série lyrique, les deux premières périodes de la civilisation indienne. Le Rig, le plus ancien et le plus vénéré de tous, auquel on a souvent donné le nom unique de Véda, nous a conservé les traditions du culte de la famille, et contient les seuls documents historiques et littéraires qui nous restent de l’Inde dans la période primitive. Le Yadjour et le Sama-Véda sorte de rituels des cérémonies du culte sacerdotal, nous semblent affirmer l’avénement de la période d’organisation dont le Code de Manou est la plus haute expression. Par contre l’Atharva-Veda, par ses objurgations, ses superstitions, ses colères et ses haines, par son manque presque absolu de valeur philosophique et littéraire, indique que ce qu’il y avait de beau et de bon dans les idées cosmologiques du Rig-Véda, ce qu’il pouvait y avoir d’utile dans la forte et intelligente constitution du brahmanisme s’était entièrement dégradé et que la période d’organisation touchait à sa fin. Le terrain est donc préparé : Kapila et Çakya-Mouni n’ont plus qu’à venir, l’un pour opposer sa philosophie rationnelle à l’absorbante orthodoxie brahmanique, l’autre pour combattre les castes au nom de l’égalité de la douleur et de la misère humaine.

Il suffit de lire les hymnes du Rig pour reconnaître qu’ils ont été chantés dans le Saptasindhou, le pays des sept rivières de la vallée de l’Indus. La division en castes n’existait pas à cette époque. La constitution du pouvoir politique et du pouvoir religieux s’organisait peu à peu, comme ailleurs. Mais ici c’est le pouvoir politique qui a été vaincu dans la personne de Viçwamitra, forcé de se faire brahmane, pour rester puissant ; et, dès lors, les deux pouvoirs, n’en ont plus formé qu’un seul, quoique divisés en apparence. Le Yadjour et le Sâma-Véda, représentant la constitution brahmanique définitive, nous conduisent peut-être au temps où les Aryas s’étaient avancés de l’ouest au sud-est des monts Hymalaya, sur les bords de la Saraswati et du Gange où fut composé plus tard l’Atharva-Véda. Quoi qu’il en soit, ce que nous savons d’une manière certaine, c’est que chaque Véda a emprunté ses vers au Rig, en les disposant suivant les besoins du culte. C’est donc à ce dernier qu’il nous faut principalement demander le secret de l’antique civilisation indienne.

Les hymnes du Rig-Véda sont les cantiques des Aryas, les vaillants, les nobles, les honorables, d’où descend la race indo-européenne tout entière. On les chantait à l’aurore, à midi, et au soir, en plein air, sous la voûte du ciel. Pas de temple, pas de sanctuaire ; une enceinte pure et simple, au milieu de laquelle était disposé un tertre comme autel, dont chaque face répondait à un des points cardinaux ; un banc de gazon pour les dieux ou pour les mânes évoqués ; un foyer pour le sacrifice ; le beurre, le lait, une liqueur fortifiante, pour offrandes, le père pour pontife, la mère pour officiante, les enfants pour fidèles : culte naïf et primitif, que rien encore ne complique, ne trouble, et qui semble le même pour l’Arya du Pendjab, et pour l’Arya de l’Irân, pour le pâtre et pour l’agriculteur.

Les chants védiques expriment à leur origine une confiance naïve, un optimisme naturel, un sentiment de vérité, qui peu à peu s’altérèrent sous l’influence sacerdotale. Avant que les brahmanes eussent formé une caste dominatrice, eussent conquis une puissance absolue, la sincérité des cœurs, comme partout, avait pressenti l’unité de Dieu. Plus tard une philosophie théologique embrouilla fatalement ces premières idées naturelles et pures ; et, l’élan des âmes étant remplacé par une liturgie minutieuse et glacée, le monothéisme primitif fut englouti dans un panthéisme sans limites. Il y a donc évidemment, dans les Védas, des inspirations de différents âges, des prières de différents cultes, toute une tradition idéale qui peut mettre sur la trace des révolutions théologiques. Peut-être y aura-t-il un jour une sorte de révélation historique sur les Hindous qui surgira de l’étude de leurs Védas. Jusqu’à présent, malgré les milliers de commentaires dont leur texte a été entouré, on ne peut qu’y entrevoir une lente conquête des Aryas sur les Dasyous, indigènes d’une autre race, refoulés vers le midi de l’Inde ; quelques convulsions intérieures, quelques rivalités locales, et cette sourde domination brahmanique, qui s’infiltre peu à peu dans les âmes, qui se substitue à l’autorité patriarcale, qui combat et domine plus tard l’autorité royale, et aboutit enfin à l’établissement des castes. On ne peut donc qu’en déduire trois inspirations, trois manières, et pour ainsi dire, trois philosophies.

La première de ces inspirations, celle des Aryas primitifs, originale dans sa forme, unitaire dans sa théogonie, simple dans ses vœux, la plus ancienne, la plus pure, ne s’adresse qu’aux phénomènes les plus sensibles de la nature : le feu, l’éther, le soleil ; la seconde, plus raisonneuse, plus recherchée, spécifie les attributs de la puissance providentielle, multiple le nombre des phénomènes qu’elle croit représenter les forces divines, et s’achemine ainsi vers le polythéisme ; la troisième, obscure à force d’explications, inintelligible à force d’abstractions, s’enfonce de symboles en symboles dans le vide d’un panthéisme insondable. C’en est fait, le brahmane dominateur peut venir, les âmes vacillantes tomberont fatalement sous son joug, et un peuple, d’origine active et intelligente, descendra jusqu’au dernier degré de l’apathie et de l’impuissance.

Quoi qu’il en soit, dans le principe, ce qui caractérise le Véda, c’est la simplicité. L’homme reconnaît une suprématie céleste, et il croit qu’elle se manifeste dans les phénomènes qu’il observe ; le feu lui parait une des forces les plus incontestables de la nature, et il s’adresse à lui sous le nom d’Agni ; le soleil lui semble un des bienfaiteurs les plus manifestes de l’humanité, et il l’invoque sous le nom de Sourya ; l’atmosphère lui est favorable par ses pluies fécondes, et il la bénira sous le nom d’Indra ; la voûte céleste attire ses regards, ce sera pour lui Varouna ; la nature terrestre, la verdure et ses prestiges le charment par leur splendeur, et il la différenciera du ciel par le nom de Prisni ; le vent de la montagne enfin est pour lui un tyran, qui courbe sous son sceptre le panache des forêts et la crête des flots, qui amoncelle les nuages ou qui les déchire, et il le suppliera sous le nom de Roudra. Ainsi fait-il de tous les phénomènes qui le frappent, que tantôt il individualise, que tantôt il résume sous le nom générique de Dévas, esprits lumineux.

Un autre trait caractéristique du Véda est la sincérité. Cette sincérité se manifeste aussi bien dans les vœux les plus exigeants que dans les objurgations les plus violentes. L’Arya est aussi franc dans ses désirs de richesse et de prospérité que dans sa haine pour le Dasyou, l’indigène, son rival, son ennemi. À l’entendre, le Dasyou ne vit que de rapines, dérobe honteusement, comme un brigand, le bien d’autrui ; il n’a ni foi, ni loi, il méconnaît les dieux, il est lâche, perfide et pervers. L’Arya le voue à l’exécration, et supplie les puissances célestes de le foudroyer, de l’anéantir, aussi bien qu’il les implore sans cesse pour doubler ses biens, pour augmenter ses troupeaux, pour lui donner une postérité nombreuse, valeureuse et productive. Tel est l’homme primitif, aux passions exaltées et franches, à l’énergie de sentiments, à l’avidité des richesses. Ce sont d’abord des vaches et des chevaux qu’il réclame aux divinités, c’est plus tard de l’or, et toujours le triomphe, la fortune, le bonheur matériel et immédiat. Il leur apprête le soma, la liqueur du sacrifice, afin qu’ils lui rendent un bienfait pour chaque goutte du breuvage sacré, il les convie à recevoir ses offrandes pour leur en demander instantanément le prix.

Et maintenant, quel est le peuple qui chantait ces hymnes si heureusement inspirés ? Figurons-nous d’abord, au pied des montagnes les plus hautes du globe, sur le versant occidental de l’Himalaya (séjour des neiges), un pays rude et austère, des champs d’orge sur les plateaux, des herbages dans les fonds, et à l’horizon des rochers superposés, des torrents qui se mêlent aux flots de l’Indus, toute la majesté de la nature, mais aussi toute sa rigueur. L’hiver et l’été sont durs : froid glacial ou chaleur étouffante ; les équinoxes sont féconds en tempêtes ; mais le printemps a des charmes si vifs que le chant des ancêtres le redira à toutes les générations. C’est là que vécurent ces Aryas de l’Inde, séparés de leurs frères, les Iraniens, et des émigrants Aryas, nos véritables ancêtres, qui sont déjà partis, et, sous les noms de Celtes, de Pélasges, de Germains et de Slaves, ont suivi la marche du soleil, contourné la mer Caspienne, traversé des fleuves et leurs courants rapides, des montagnes et leurs forêts épaisses, des marais et leurs terrains mouvants, en emportant avec eux, dans notre Occident, le véritable Agni, le feu sacré de l’intelligence et du progrès.

L’Arya de l’Inde, traînant après lui ses troupeaux, pillant pour les augmenter, luttant pour les défendre, s’arrêtant tout à la fois pour combattre et pour se reposer, acharné contre les autochtones, ces Dasyous qu’il ne peut assez souvent maudire, rapportant à ses dieux ses victoires et leur en demandant de nouvelles, est un peuple en marche qui se développe par une lente conquête. Aussi ses hymnes sont-ils à la fois des prières, des chants de victoire, des imprécations contre les vaincus, rarement des préceptes de conduite, plus rarement encore des préceptes de morale. L’Arya médo-perse, soumis aux variétés climatériques du sol qu’il a choisi pour son établissement, réjoui par le printemps, désolé par l’hiver, enthousiasmé des fleurs et des fruits de son Iran, épouvanté des neiges et des tempêtes de son Touran, discernera dans la nature deux forces ennemies, deux combattants, le bien et le mal. L’Arya slavo-scandinave, en pénétrant dans le Nord rigide, verra des divinités féroces dans ses nuages fantastiques, et dans ses glaces polaires. L’Arya celtique, voyageant à travers les brumes et les marais, prendra des rochers pour autels et des forêts pour temple ; de sa terreur naîtront des mystères terribles, et de sa vie menacée des sacrifices sanglants. L’Arya gréco-romain, au contraire, sous son ciel azuré, au bord de sa mer radieuse, sur sa terre favorisée par la plus douce des températures, s’épanouira en mille grâces de poésie, et peuplera les cieux de toute une génération divine.

Le pays, où se livrent les luttes sourdes et répétées des Aryas-Hindous, le Saptasindhou, formé par les affluents de l’Indus, et longtemps borné, pour ces derniers, d’un côté par le fleuve, de l’autre par la montagne, n’est pas encore fort distant du lieu d’origine des vaillants hommes, la Bactriane, si féconde en émigrants. Les Aryas-Hindous s’y développeront avec patience, y gagneront pied à pied une patrie, y poursuivront, combat par combat, l’extermination de leurs mystérieux adversaires, et fonderont leur unité en consacrant tour à tour les inspirations de leurs poètes, et en léguant à leur postérité leur étrange livre aux centaines d’auteurs.

Qu’étaient-ce donc ces auteurs si nombreux ? Nous l’avons dit, des pères de famille, ces prêtres naturels, primitifs interprètes des vœux et des hommages de leurs enfants. Ces pères de famille allumaient le feu du sacrifice, lui offraient comme aliment le soma, liqueur tirée de l’asclépiade amère, le beurre, le lait, plus tard un bélier, et enfin le cheval. Pendant ce sacrifice ils prononçaient des paroles sacramentelles et des prières ; et, quand le sacrificateur était poëte, ces paroles devenaient des rhythmes, ces prières devenaient des hymnes. Puis on répétait ces hymnes à chaque nouveau sacrifice ; on se les transmettait oralement de fils en fils ; et la tradition s’établissait, et le respect des ancêtres se consolidait par cette tradition même, et l’on évoquait autour du gazon sacré les mânes de ces ancêtres inspirés, et l’alliance se perpétuait entre le passé et le présent, en engageant l’avenir et en fondant peu à peu le culte, les rites et la foi. Autant de familles, autant de sacrifices ; autant de poëtes patriarches, autant de cantiques. De là ce millier d’hymnes, dans le Rig-Véda dont encore nous avons perdu un grand nombre ; car, lorsque la famille s’éteignait, sa prière particulière n’étant plus répétée, n’étant plus transmise par la piété filiale, s’effaçait de la mémoire des indifférents qui se contentaient de répéter et de transmettre la prière de leur propre chef. Puis, d’un autre côté, dans les branches nombreuses, multipliées par les mariages qui créaient de nouvelles familles, de nouveaux poëtes se manifestaient, chantant à leur manière les merveilles de la vie et les mystères de la mort. Le concert du Véda variait dès lors d’accents et d’expression : des idées neuves surgissaient, des interprétations différentes des phénomènes de la nature et de l’intervention céleste, ajoutaient de nouveaux dieux au panthéon traditionnel ; l’amour-propre, l’antagonisme, la passion prenaient parfois aussi une place destructive dans le groupe primitif, et peu à peu, fatalement, s’altérait la candeur originelle.

L’antiquité du Rig-Véda est aujourd’hui incontestable. Son caractère religieux l’a fait conserver avec une sorte de piété ardente et jalouse, et l’on pourrait jusqu’à un certain point reconnaître au style même des invocations, et à la nature des êtres surhumains qu’on y adore, l’époque d’une grande partie de ses hymnes. D’abord la conception d’une force divine y est simple, et la prière naïve. L’Arya est en marche ; il implore en sa faveur les forces de la nature, il lève les obstacles qu’il rencontre par une invocation : ici à une rivière pour qu’elle modère son courant, là à une montagne pour qu’elle abaisse ses pentes, plus loin aux eaux du ciel pour qu’elles assainissent par leur abondance les miasmes d’un marais ; plus habituellement à Indra pour qu’il accorde un nouveau triomphe à ses protégés. Plus tard, l’Arya vainqueur s’établit sur la terre conquise, il la cultive avec la charrue, il rentre sa récolte sur des chars, bat ses blés, crible son orge, cultive ses rizières ; et son ordre social plus avancé se reflète déjà dans ses dieux. Il compare Agni, le feu, à un coursier, qui, attelé à son char, secoue sa crinière ; Ousha, l’aurore, à une déesse montée sur un brillant véhicule ; les vents du matin, les Marouts, fils de Vayou ou de Roudra, sont aussi sur des chars, armés en guerre avec le glaive et le carquois, décochant des flèches contre les nuages, et buvant le soma avant leur journée de travail. Plus tard il se mêle à la figure vague, mais encore noble de l’image providentielle, des traits exagérés ou bizarres : Sourya, le soleil, a des bras d’or, des mains d’or, et même une langue d’or ; les Marouts, ont des attelages de daims, des cuirasses et des lances. C’est que l’industrie vient d’apparaître chez l’Arya indien : il peigne le chanvre, tisse la laine, perfore des puits, utilise tous les animaux domestiques, travaille les métaux et sait en apprécier l’usage et la valeur. Plus tard encore, la pensée pure et instinctive cède le pas à l’interprétation des dépositaires de la tradition. Le brahmane apparaît comme le seul intermédiaire entre la divinité et l’homme ; il impose son intervention, il complique le rituel, il crée les castes, il édicte des lois, et la multitude, lui confiant son âme, se laisse dominer peu à peu, absorber, annuler.

Mais cette multitude qu’on vient de condamner à une inégalité infranchissable par l’institution des castes, et à une ignorance absolue par l’interdiction de lire même ses codes sacrés, fera dévier le sabéisme ingénieux et poétique, qui avait succédé au monothéisme primitif, vers un polythéisme universel. Le soma, cette liqueur du sacrifice, sera traité de divinité, ainsi que le mortier et le pilon qui servent à l’obtenir ; la plante médicinale passera déesse ; les grenouilles seront invoquées, les dés enfin deviendront des dieux. C’en est fait, le bien et le mal, la pluie bienfaisante comme l’ouragan, la moralité comme les passions, prennent rang dans cet olympe étrange, qui a remplacé la voûte céleste et pure des premiers Aryas. C’était par l’Asoura, le principe de vie, indépendant de toute manifestation particulière, que s’était révélé le monothéisme primitif ; maintenant l’Asoura cessera d’être une croyance pour entrer dans le domaine philosophique qui intervertira sa valeur ; et Vâk, la sainte parole symbolisant les puissances diverses de la nature, créera pour la multitude autant de dieux, que ses besoins, ses terreurs et ses rêves en auront exigés.

Malheureusement l’ordre chronologique du Véda a été confondu par ses transcripteurs, et le classement en est arbitraire à un tel point que dès la première des huit sections du Rig, on rencontre des hymnes de tous les âges. Dans ce recueil, que les brahmanes ont coordonné, on reconnaît, sans difficulté, le dessein spécial de mettre d’accord les anciennes prières avec le nouveau culte. On y trouve même une sorte d’idée dirigeante dans la disposition des invocations de presque tous ses livres : d’abord paraît Agni, puis Indra, ensuite les Viçwadévas, tous les dieux ; comme si les diverses familles, les diverses tribus, dont chacune affectionnait tout naturellement le nom et l’image de son dieu particulier, avaient voulu s’entendre et s’arranger de manière à former, dans chaque livre, une espèce de panthéon des différents symboles et des différents attributs de la divinité indienne. Peut-être cet arrangement a-t-il plus d’importance qu’on ne lui en a accordé jusqu’à présent, et dévoile-t-il une partie de l’intelligence politique des brahmanes, lesquels, pour arriver à la domination de toutes les tribus des Aryas de l’Inde, auraient commencé par en adopter les différents symboles, en leur faisant une place d’honneur dans le livre qu’ils déclaraient sacré. Y a-t-il une époque antérieure au Rig-Véda ? Tout le fait présumer : les divers Manous, rappelés dans le Rig tout autant que les douze prophètes qui précèdent Zerdoust ou Zoroastre, énumérés dans le Décatir. Aussi MM. Émile Burnouf, Lassen Oppert, Obry, ont-ils cherché à déterminer la géographie et même la langue de ce berceau commun de l’Occident tout entier, l’Aryana. À l’âge le plus éloigné peuvent se rapporter, chez les Aryas, les premiers rudiments de la vie et l’unité divine d’Agni, antérieure à celle d’Indra. Puis vient le temps des Richis, ces poëtes religieux, qui chantaient dans la langue ancienne les bienfaits de l’Être tout-puissant, en lui dénonçant les méfaits des phénomènes naturels, la grêle, la glace, l’ouragan. Cette animation de la matière en mouvement n’est que de la poésie ; mais elle ne cache qu’aux inattentifs l’unité fondamentale. Enfin, la séparation amène deux dialectes, le sanscrit et le zend, et chaque grande émigration, tout en conservant des traditions analogues, se divise par les interprétations, c’est-à-dire par la théologie. Les méditatifs Aryas, avant leur séparation, tandis qu’ils formaient encore une alliance de tribus homogènes dans les plaines de la Bactriane, avaient observé la nature, et réfléchi sur les secrets de l’univers. Aussi, frappés tout autant par le spectacle des phénomènes physiques que par les mystères de l’existence, ils semblent s’être expliqué le principe du monde visible par le mouvement qui prouve la vie, et par la vie qui naît, croît, cesse, et se renouvelle constamment autour de nous. De là la conception d’un principe de vie, unique et général, indépendant des individus de toutes les espèces, dans le règne végétal comme dans le règne animal, se transformant, se divisant, se répandant partout. Les Indiens nommèrent ce principe Asoura, les Iraniens Ahoura, et c’est en lui que MM. Alfred Maury, Pavie, Eichhoff reconnaissent ce monothéisme, dont d’autres indianistes placent l’éclosion beaucoup plus tard. En tout cas, ce principe des Asouras, qui explique le monde pour les Aryas et justifie l’intervention des dieux, est le fondement de leur culte, et le sentiment inspirateur de leurs hymnes. Il est avéré, en outre, qu’avec le culte des éléments, ils avaient adopté le culte des mânes. La tradition le prouve surabondamment ; le respect de l’hymne de famille, l’évocation des aïeux autour du gazon sacré, le texte même de certains chants, tout confirme l’existence chez eux de cette vieille idée, qu’on trouve aussi dans la religion des plus anciens Grecs et Latins. Les Aryas honoraient leurs ancêtres, dont quelques-uns, tels que les Ribhous devenaient même des demi-dieux. Ils leur offraient des sacrifices : et c’est peut-être la raison déterminante de l’adoption des Védas par les brahmanes ; car ainsi était établie la valeur traditionnelle d’un recueil, auquel on donnait le sens de parole divine, prononcée et recommandée par des êtres surhumains.

En nous rendant compte du panthéon védique d’après la lecture des hymnes, et non d’après les commentaires brahmaniques, nous avons d’abord constaté une simplicité et une clarté toute en l’honneur des conceptions primitives et de l’esprit net et sobre de nos premiers ancêtres. Indépendamment de l’Asoura, ce principe générateur de la pensée religieuse et de ses symboles, nous trouvons trois grands dieux auxquels l’Arya-Indien s’adresse le plus souvent : ce sont Agni, le feu, Indra, l’éther et Sourya, le soleil. Quant à Aditi, la nature indivise, Varouna, le ciel étoilé, Vayou, l’air, Roudra, le vent, les Marouts, les brises, les Aswins, les crépuscules, Ousha, l’aurore, Prisni, la terre, ils n’apparaissent que comme dieux secondaires, puissants dans leur cercle d’activité, mais plutôt auxiliaires des trois dieux supérieurs que souverains par eux-mêmes de toutes les choses et de tous les êtres. Le Rig-Véda ouvre et ferme par un hymne à Agni. Si, comme nous le croyons, une idée dirigeante a présidé au classement du Rig, cette disposition n’indiquerait-elle pas qu’Agni était le dieu des prêtres, comme Indra semble le dieu des guerriers, et qu’il devait, d’après les brahmanes, triompher de tous ses rivaux, et les absorber à la fin dans sa toute-puissance ? Toujours est-il qu’il y a une sorte d’antagonisme entre eux, sinon dans les actes, au moins dans les attributs, et l’on voit cette lutte naître et se développer dans des chants divers, qui, par leurs louanges graduées et progressives, tendent à attribuer à l’un ou à l’autre la prédominance, la souveraineté suprême, la création. Nous chercherons à établir cette hypothèse par la légende de l’un, Indra, et par les développements, de l’autre, Agni ; quant à Sourya, il est aussi clair dans sa cause et aussi incontestable dans ses effets que l’astre immense et bienfaisant qu’il représente.

Ce qui donne à Sourya, le soleil, une valeur toute poétique, c’est qu’il apparaît à chacun comme le plus distinct, le plus évident, le plus actif de tous les dieux. Rien n’est douteux dans sa puissance, rien n’est équivoque dans ses diverses manifestations. Son séjour est dans le ciel, mais son empire est aussi bien sur la terre que dans les airs, dans l’espace qu’il remplit, dans la nature qu’il éclaire, échauffe et féconde. Les animaux lui doivent la vue pour se diriger, les hommes l’intelligence pour le comprendre ; il donne aux montagnes leur physionomie, à la plaine sa parure, au fleuve son scintillement, à la fleur sa beauté, à tous les êtres ce qui les caractérise et ce qui les différencie. Son absence efface toutes les couleurs, vide l’horizon, éteint tous les yeux, confond tous les esprits, détruit toute individualité, et remplace par un chaos temporaire l’harmonie des mondes, qui n’est autre chose pour les hommes primitifs que la lumière. Mais Sourya ne se contente pas de briller, et de dispenser, entre tous, les effluves inépuisables de sa splendeur ; il pénètre chaque corps organisé, il prodigue sa chaleur à la création entière, dote la sève de son activité, le sang de sa tiédeur, la terre de sa fécondité, l’imagination de ses brillantes couleurs ; il entretient l’existence de tous, et imprime au mouvement universel sa vertu de croissance et d’élasticité. Le soleil enfin crée la joie, le bonheur ; la nuit est triste, le ciel voilé par la tempête est terrible ; les ténèbres sont la mort, la clarté seule est la vie. Ces propriétés bienfaitrices du soleil, les Aryas les saisissent, et les expriment par les noms divers du soleil, qu’ils appellent tour à tour Sourya, le resplendissant, et Savitri, le créateur, Pouchan, le nourricier, et Mitra, l’ami de tous, Bhaga, le fortuné et Aryaman, le puissant. Enfin, sous le nom de Vichnou, le voyageur céleste, ils se le figurent d’abord comme un nain qui apparaît avec sa grosse tête à l’horizon, croît avec la rapidité vertigineuse d’un dieu, projette ses feux dans l’infini, s’empare du ciel et le traverse en trois pas : le lever, le zénith et le coucher. Pour eux Vichnou c’est le soleil dans sa force, dans sa puissance, dans sa domination, indépendamment de ses bienfaits et de ses œuvres.

Telle est même l’influence qu’on prête, dans les hymnes védiques, à l’astre souverain, que Eug. Burnouf n’a pas hésité à présenter Indra comme le symbole de l’énergie atmosphérique du soleil. Or il explique sa pensée en termes si exacts et si poétiques à la fois, que nous prendrons la liberté, au bénéfice de nos lecteurs, d’emprunter à sa judicieuse et profonde étude du Véda, ce morceau si remarquable :

« J’appelle Indra la puissance météorique du soleil ; Ahi, Sushna, Vritra, le nuage sous ses aspects ; Marouts, les vents déchaînés. Indra ne va-t-il pas jouer dans les airs le même rôle qu’un roi puissant à la tête de son armée ? C’est le dieu de la lutte par excellence : on l’appelle Indra de la racine Ind, régner, Arya comme les nobles seigneurs du temps, Sousipra, au beau nez, pour distinguer le chef, par ce signe de noblesse, des ennemis au nez aplati, que l’on appelait Dasyous, et que l’on nomme ici Dânavas, on le nomme Hchattriya, comme les princes féodaux ; on le nomme Râja, car il est vraiment le roi des cieux ; il est Div, c’est-à-dire paré de vêtements brillants ; il est Çakra, c’est-à-dire puissant. Voici maintenant son cortège et son œuvre, comme le Véda nous les présente.

« Quand la nuit touche à son terme, une fine lueur se répand d’en haut et commence à rendre visibles les silhouettes des arbres et des collines. L’âne s’éveille le premier et donne avis à toute la nature que le roi du ciel est en route et qu’il approche. C’est cette bête, si belle dans les contrées du midi, et dont la nôtre n’est qu’une grotesque dégradation, que les Aryas ont donnée pour attelage aux cavaliers célestes, aux deux Açwins véridiques, courriers matinaux et médecins vigilants, qui viennent, avec la clarté pour remède, guérir la nature entière des maux et des erreurs de la nuit. »

Ô Açwins, écoutez l’hymne que chantait en votre honneur un homme errant dans les ténèbres, hymne que j’ai répété en recouvrant la vue par votre protection, auteurs de tout bien.

(Caxivan, i, 241.)

Avec vos coursiers aux ailes d’or, rapides, doux, innocents, s’éveillant avec l’aurore, humides de rosée, heureux et disposés à faire des heureux, venez à nos sacrifices, comme les abeilles au miel.

Vos rayons avec le jour repoussent les ténèbres et projettent au loin dans l’air des lueurs brillantes. Le soleil attelle ses coursiers.

(Vamadéva, i, 191.)

« Le char des Açwins a trois sièges, sur un desquels est placée la fille du soleil, Arjunî, cette charmante lumière, que le regard des dieux suit avec un pur amour ; la jeune et aimable fille est emportée par eux dans leur course circulaire.

« Alors apparaît l’Aurore, sœur de la Nuit ; elle est sur un char éclatant ; rougeâtre, elle ouvre les portes rougeâtres de l’Orient ; elle s’avance, elle s’étend, elle remplit le monde de clarté.

Ousha se dévoile, comme une femme couverte de parure, elle semble se lever et se montrer à la vue, comme une femme qui sort du bain. Elle a tissé la plus belle des étoiles ; et toujours jeune elle précède a l’orient la grande lumière.

(Satyasravas, ii, 375.)

« En effet voici le roi lui-même, voici Indra. Le ciel n’est plus rougeâtre ; les Açvins ont été plus loin vers l’Occident ; l’Aurore disparaît comme eux ; c’est le cortège royal qui va venir.

« Indra est monté sur un char d’or, traîné par des coursiers jaunes ; il est lui-même tout resplendissant d’or ; il porte la tiare étincelante ; il tient dans une main, l’arc d’or ; dans l’autre, la foudre, qui est sa flèche ; sur son char est le disque d’or, aux bords tranchants. Il a pour cocher l’habile et prudent Mâtali.

L’escorte d’Indra est composée des Marouts, qui sont au nombre de soixante-trois ; Mâtariçwan (le chien de Mâtali ?) est leur chef ; il complète le nombre soixante-quatre, qui est celui des divisions de la rose des vents. Les Marouts sont traînés par des antilopes, les plus rapides des animaux. Fils de Prisni, qui est la terre montueuse, ou de Sindhou, qui est l’Indus, ils vont avec bruit autour de leur seigneur, prêts à le soutenir dans la lutte. Du reste, eux-mêmes sont tous des princes et méritent le nom d’Aryas et de Kchattryas, comme Indra, qui est leur suzerain et leur chef de guerre.

Tout ce cortège bruyant, mouvant et lumineux, dont les armes se choquent et dont les fouets claquent au milieu des airs, s’avance vers le foyer d’Agni, s’y arrête un instant, y reçoit de la main du prêtre et par l’entremise du feu sacré, le soma, liqueur ardente des guerriers, et les aliments solides de l’offrande. Indra et la brillante armée des rapides Marouts sont prêts désormais à engager le combat.

Déjà en effet, en présence d’Indra qui s’avance, Ahi, le serpent, fait glisser son corps vaporeux dans les airs, et rassemble des montagnes de nuages. Sushna, l’aride, tient les eaux suspendues dans l’atmosphère, les refuse à la terre, dessèche les plaines et les collines, tarit les fleuves, fait périr de faim et de maladie les troupeaux et les hommes. Le sacrifice languit, l’œuvre de la production et de la vie semble près de s’arrêter, les Asouras ne recevront plus les aliments dont ils ont besoin pour accomplir sans fatigue leur fonction divine. Tous les êtres sont intéressés dans la lutte. Vritra, celui qui couvre de nuages l’atmosphère, s’est emparé des régions dont Indra est le maître ; il y commande, il a voilé la face du resplendissant, et a dérobé à la terre la vue de sa majesté. Mais voici Indra qui s’avance armé de la foudre.

À INDRA

Je veux chanter les antiques exploits par lesquels s’est distingué le foudroyant Indra. Il a frappé Ahi ; il a répandu les ondes sur la terre ; il a déchaîné les torrents des montagnes.

Ahi se cachait dans la montagne ; il l’a frappé de cette arme retentissante, fabriquée pour lui par Twastri ; et les eaux, telles que des vaches qui courent à leur étable, se sont Jetées au grand fleuve.

… Magavan a pris sa foudre qu’il va lancer comme une flèche ; il a frappé le premier-né des Ahis.

… Aussitôt les charmes de ces magiciens sont détruits ; aussitôt tu sembles donner naissance au soleil, au ciel, à l’aurore. L’ennemi a disparu devant toi !

Indra a frappé Vritra, le plus nébuleux de ses ennemis. De sa foudre puissante et meurtrière, il lui a brisé les membres, tandis qu’Ahi, comme un arbre frappé de la hache, gît étendu sur la terre.

… Il osait provoquer le dieu fort et victorieux… il n’a pu éviter un engagement mortel, et l’ennemi d’Indra, d’une poussière d’eau, a grossi les rivières.

Privé de pieds, privé de bras, il combattait encore, Indra de sa foudre le frappa à la tête, et Vritra… tombe déchiré en lambeaux…

La mère de Vritra s’abaisse ; Indra lui porte par-dessous un coup mortel ; la mère tombe sur le fils. Dânou est étendue comme une vache avec son veau.

Le corps de Vritra, ballotté au milieu des airs agités et tumultueux, n’est plus qu’une chose sans nom que submergent les eaux. Cependant l’ennemi d’Indra est enseveli dans le sommeil éternel…

Indra, roi du monde mobile et immobile, des animaux apprivoisés et sauvages, armé de la foudre, est aussi roi des hommes. Comme le cercle d’une roue en embrasse les rayons, de même Indra embrasse toutes choses.

(hiranyastoupa, i, 57.)


« Le résultat de la bataille est que la vie est rendue aux animaux et aux plantes ; c’est l’œuvre d’Indra, prince dispensateur des richesses, trésor inépuisable de l’abondance. »

Dans le Rig, comme on le voit, Indra a presque l’importance suprême. N’était Agni qui balance son empire, il serait le premier des dieux. Il possède une légende complète : dès sa naissance, il est fort ; dès qu’il combat, il est invincible. Une fois pourtant il a hésité, il a tremblé, c’est sans doute à la première bataille des éléments, à l’heure du chaos primitif : les nuages s’amoncelaient avec tant d’intensité, les ténèbres étaient si épaisses, l’horreur était si profonde qu’Indra allait fléchir, lorsque Twachtri lui apporta la foudre. Or Twachtri, c’est Agni, c’est le feu qui est partout, dans l’atmosphère par la foudre, dans le soleil par les rayons, dans la terre par la sève, dans la créature par la chaleur du sang. Mais, sur l’autel où il s’allume, l’homme semble communiquer plus directement avec lui ; il le crée par sa volonté, il le dégage du bois qui le contient, il l’alimente avec le beurre, il le voit naître, grandir, dominer, porter dans les airs la flamme, et la prière dans les cieux. Aussi voyez comme il l’aime, comme il l’invoque, comme il le loue ; c’est l’intermédiaire tout-puissant, c’est le recours éternel, c’est le bienfaiteur immuable ! Immense comme le monde, il se fait petit pour consumer l’holocauste ; brûlant comme le soleil, il se fait tiède pour entrer dans le cœur de l’homme ; sa langue dévore tout ce qu’elle touche, mais réchauffe tout ce qu’elle épargne. Il est le principe vivifiant par excellence, infini comme l’univers et subdivisé comme l’étincelle, c’est à la fois le plus fort et le plus utile des éléments, le plus à la portée de l’homme, le plus directement applicable ; aussi persistons-nous à croire qu’il fut la première manifestation de Dieu pour les Aryas, et l’attribut céleste le plus incontestable.

Tel est le précis de ce que nous pouvons déduire des Védas sur les origines et le culte des Aryas-Indiens. Occupons-nous maintenant de leur imagination féconde et lumineuse, c’est-à-dire de leur véritable gloire.

Le Rig-Véda n’est pas seulement un monument historique des plus importants, il est un véritable chef d’œuvre littéraire. Quelle verve et quelle fécondité dans ces esprits inspirés, qui, sans antécédents étrangers, sans autre modèle que la nature, ont rencontré dans leurs âmes ardentes les élans les plus sublimes, les mouvements les plus heureux, les nuances les plus élégantes, les formes les plus poétiques.

Leur cadre est étroit : leurs grands dieux qu’ils nomment les Adityas ne sont qu’au nombre de douze ; ils confondent parfois les attributs et les rôles de chacun de ces dieux, ils leur accordent tour à tour la priorité et la souveraineté célestes, ils ne savent auquel d’entre eux attribuer la création et la toute-puissance. Qu’importe ! ils ne raisonnent pas, ils chantent ; et leurs hésitations, leurs erreurs, sont toujours rachetées par le tableau qu’ils représentent ou par la scène qu’ils décrivent. Il se dégage de leur poésie une fraîcheur qui nous rend sensible et délicieuse la nature limpide des montagnes. Ousha, leur aurore, a toutes les grâces et toutes les beautés à la fois : elle réveille les oiseaux et tranquilise les hommes, elle apporte sur son char tous les dons des dieux ; elle est l’admirable par ses couleurs, la bienfaisante par ses promesses, la toute aimable par ses charmes, l’impatiemment attendue, l’éternellement espérée. Et les Açwins, les crépuscules, quelle belle, juste et pittoresque épithète que de les surnommer les véridiques, ceux qui ne trompent jamais aucun être de la création ; les messagers fidèles qu’on bénit d’annoncer l’aurore, qu’on remercie de présider à la nuit, pour mettre l’homme en garde et imposer le sommeil aux animaux. Et les Marouts, les vents, ces braves, ces diligents, ces infatigables compagnons d’Indra dans sa lutte perpétuelle contre les noirs nuages qui, sans lui, se résoudraient en grêle plutôt qu’en pluie, qui désoleraient la nature, au lieu de la féconder. Comme ils combattent avec ardeur, ces vaillants auxiliaires, comme ils se précipitent, comme ils se succèdent, comme ils attaquent le sinistre Vritra, l’amonceleur des nuées, le génie des frimas et des ténèbres, comme ils dispersent ses masses compactes, comme ils apprêtent l’œuvre d’Indra qui, d’un coup de foudre, achève la victoire !

Le nombre est grand des auteurs auxquels on attribue ces hymnes, si riches de ton, si variés d’images, d’un mouvement si lyrique, comme celui à Indra par Gritsamada ; d’une grâce si délicate, comme celui à l’aurore par Gotâma ; d’une ampleur si majestueuse, comme celui de Vamadéva à Agni. Aussi faut-il leur pardonner, comme le fait M. Barthélémy Saint-Hilaire, certaines répétitions dans la forme de leurs poésies et dans le sujet de leurs chants. Chaque chantre cependant semble avoir son dieu de prédilection. Pour Viswamitra, poëte guerrier, c’est Indra ; pour son rival, Vasichtha, poëte prêtre, c’est Agni ; pour Sounahsépa, c’est Varouna, le dieu des espaces célestes de la nuit comme du jour, dont l’œuvre n’est jamais interrompue, dit son panégyriste ; pour Hiranyastoupa, c’est Savitri, le soleil vivifiant, et il en raconte pompeusement les grandeurs et la puissance ; pour Canwa et Gotama, ce sont les Marouts, qui dispersent, ébranlent, fendent les nuages, et les font tomber en bienfaisante pluie ; pour Savya, c’est Indra, non le dieu des combats terrestres, mais le distributeur des eaux célestes, vainqueur de Vritra, le noir nuage ; enfin pour chacun d’eux aussi, c’est toujours Indra, la force, et Agni, la bonté. On ne saurait croire avec quelle abondance, quelle pompe, quelle imagination, ils proclament et décrivent les vertus de leurs divinités. Leur verve est inépuisable, et leurs hymnes sonores, comme ils les appellent, varient les images, les métaphores, les comparaisons, les allégories avec une richesse qui semble s’accroître de génération en génération : ainsi Nodhas, fils de Gotama, Prascanwas, fils de Ganwa, Parasara, petit-fils de Vasichtha, Samyou et Garga, fils de Bharadvadja, ont la même foi que leurs pères ; mais leurs chants ont peut-être encore plus d’éclat et d’originalité.

Du reste, plusieurs d’entre eux sont de véritables poëtes comme Bharadvadja, Caxivan, Coutsa, Gotama, Gritsamada, Sounahsépa, et surtout Viswâmitra, Vamadéva, Dirghâtamas et Vasichtha. Ce dernier est le plus fécond de tous : on compte cent seize hymnes sous son nom, tandis que le grand Dirghâtamas, le poète le plus penseur, le plus hardi et le plus brillant, n’en a composé que ving-sept. Il est vrai que, parmi ces chants tous inspirés et grandioses, outre Açwaméda, ce sacrifice du cheval si largement décrit, Dirghâtamas nous a laissé une sorte de poëme dithyrambique adressé aux Viçwadévas, à tous les dieux, et qui raconte dans un style magnifique l’ordre des phénomènes de la nature jusqu’alors incompris, la division des temps, des saisons, des mois, des jours, et où se manifeste la prescience d’un unique auteur de ces mouvements réguliers et splendides, qui émerveillèrent les premiers hommes avant même qu’ils s’en rendissent compte. Eh bien ! ces mystères divins, Dirghâtamas les explique avec cette inspiration du poëte, cette certitude du prêtre et cette conscience exaltée, qui font de lui une des plus grandes figures du Védisme. Il invoque tout d’abord Agni, le dieu toujours présent au sacrifice, et lui donne deux frères, le feu céleste, la foudre, et le feu du soleil, le rayon. Puis, énumérant les vertus du nombre fatidique sept, il démontre par sept rênes pour la direction d’un char qui n’a qu’une roue, les sept couleurs de l’arc-en-ciel. Mais tout à coup il interrompt sa démonstration par cette question audacieuse : « Qui a vu à sa naissance cet être divin prendre un corps pour en donner à ce qui n’en a pas ? Où était alors l’esprit, le sang, l’âme de la terre ? » Et à la strophe suivante, il déclare que, faible et ignorant, il n’en veut pas moins sonder ces mystères. Puis vient le grand détail de la création et Agni, transformé à la fois en astre flamboyant et en diviseur du temps, s’élance sur un char aux douze rayons (les douze mois), et emmène avec lui les sept cent trente jumeaux, c’est-à-dire les trois cent soixante-cinq jours et les trois cent soixante-cinq nuits.

Certainement les explications de Dirghâtamas sont un peu confuses ; il appelle tantôt pied, tantôt roue, tantôt rayon, les mois, les quinzaines, les jours, les nuits et les heures ; certainement il va un peu loin quand il accorde au poëte le don de consolider l’océan céleste, mais sa seconde expression où il dit qu’il suit la révolution du soleil, n’est-elle pas la preuve que la pensée humaine cherche déjà à s’expliquer la logique des mondes ? En tout cas, cette vaste allégorie, où il exalte à la fois les grandeurs d’Agni et les vertus de la libation, l’amène à des pensées d’une pénétration singulière pour une époque si reculée : « Les deux esprits éternels vont et viennent partout, dit-il, seulement les hommes connaissent l’un sans connaître l’autre. » N’a-t-il pas voulu dire que l’on voyait bien le feu dans ses manifestations visibles, mais qu’on ignorerait toujours la puissance de l’invisible ? Et il continue, enchaîné dans sa pensée, selon son énergique métaphore, la poursuite de l’âme suprême, il soupçonne l’unité de Dieu, il frôle la vérité ; encore un élan, et il l’affirmerait ; mais il se contente de confesser la foi du Védisme, tout en cherchant à s’en rendre compte : « L’esprit divin qui circule au ciel, on l’appelle Indra, Mitra, Varouna, Agni. Les sages donnent à l’être unique plus d’un nom. »

Cette intuition d’un esprit suprême, qui réside au ciel, domine la terre et gouverne le monde, est aussi précieuse que significative dans la bouche d’un des plus nobles et plus anciens Richis ; elle ébranle bien vivement l’hypothèse que les chantres des Védas ne possédaient pas le sentiment de l’unité divine. Ils en ont, au contraire, plus que le souvenir, plus que l’espoir, ils en ont la certitude et en cherchent la démonstration. À nos yeux ils ont toujours conservé dans leur âme ce sentiment épuré et sublime, et ils nous semblent même l’avoir imposé à leurs successeurs, les brahmanes. Aussi, répéterons-nous avec M. Villemain, dans sa belle étude sur Pindare et la poésie lyrique : « La rencontre des mêmes notions dans l’homme atteste l’identité des âmes et leur affinité naturelle avec la vérité divine. »

Quel que soit, du reste, le sens réel des Védas, quel que soit l’esprit qui les ait conçus, la foi qui les ait chantés, on demeure tout étonné, au point de vue littéraire, de la sérénité du style, de la grandeur des idées, de la fermeté des sentiments qui les caractérisent. Il semble qu’un souffle divin ait enflammé tous ces esprits, inspiré tous ces poëtes. On croirait, à les entendre, que, de leur temps, la fraîcheur odorante qui s’élevait, à l’aurore, du fond des prairies, du feuillage des arbres, du sein des fleurs, avait plus de charme pour les sens et de grâce pour l’esprit que de nos jours. Mais si le ciel enchante les Richis par ses clartés, la terre par ses parfums, l’atmosphère par ses couleurs ; si la brise qui agite les moissons, la rosée qui diamante les herbes, le rayon naissant qui empourpre l’espace, jettent leur âme dans l’extase et dirigent leurs chants vers les cieux, n’est-ce pas la preuve indiscutable que leur cœur est poétique et que leurs lèvres sont sincères ? N’en ressort-il pas cette évidence que l’humanité des premiers âges sentait instinctivement la divinité sourdre de l’âme, comme une source de la montagne ? Que voulez-vous que soient ces vents harmonieux et bienfaisants, sinon des dieux propices, et cette atmosphère vivifiante, et ce soleil fécondant, et cette nature si riche, et ces eaux si utiles, c’est-à-dire tous les génies védiques, sinon d’admirables allégories de la force, de la grandeur et de la générosité d’un Être supérieur et créateur, qui détaille ses bienfaits avec tant de prodigalité, que le contemplateur de sa bonté finit par s’égarer dans ces manifestations infinies.

Ce n’est pourtant que par les idées, par les images, par les élans du cœur que nous pouvons goûter ces délicieuses poésies, car nous ne percevons ni leurs rhythmes, ni leur harmonie. Or tous les indianistes sont d’accord sur les progrès grammaticaux du sanscrit, sur la perfection graduée de sa forme ; et ils traitent volontiers d’inculte l’idiome rude et primitif des Aryas védiques. Quels ne sont donc pas la puissance et l’éclat naturels de ce langage rudimentaire pour rayonner encore à ce point, pour nous émouvoir par sa franchise, sa noblesse, sa vigueur ! Qu’on ne reproche pas à ces hymnes primitifs leur monotonie, elle n’atteste que leur candeur, et n’est produite que par l’uniformité de l’adoration. Qu’on n’accuse pas de subtilité les nuances d’expression des prières védiques, où des poètes primordiaux s’ingénient de toutes façons à symboliser leur reconnaissance. Qu’on n’exige pas de ces chants lyriques et isolés cet ensemble merveilleux qui surprend et entraîne dans les épopées helléniques. Qu’on ne leur demande pas cette composition savante des idées qui sait les pondérer avec choix, les opposer avec art, les classer au profit de l’effet, les énumérer au profit de l’émotion. Tous ces perfectionnements de l’esprit, toute cette œuvre de la critique sur soi-même, toute cette rhétorique habile et chatoyante, fruit des siècles autant que du génie, les Richis les ignoraient, et cependant leur œuvre nous attire et nous charme ; tant la vérité s’y manifeste avec une netteté saisissante et une incontestable splendeur.

Et maintenant résumons-nous. S’il est possible de pressentir, il n’est pas possible de déterminer d’une manière certaine l’époque où les grandes et simples idées du Véda se modifièrent en s’oblitérant ; où ce naturalisme sincère et curieux, qui n’avait pour lien que le sentiment unique des cœurs, devint une doctrine, et vit les variétés de son inspiration s’assujettir aux règles d’un système, et former un ensemble, une religion comme le mot l’indique lui-même. N’est-ce pas à la longue que ce phénomène dut se produire ? N’est-ce pas peu à peu, interprétation sur interprétation, concession sur concession, que le Brahmanisme, dut parvenir à l’absorption des croyances antérieures et à l’organisation puissante d’une théologie enlaçant toutes les consciences, convainquant toutes les raisons, brisant les obstacles et imposant ses lois ? Il y a là un travail que la science n’a pas fait, et qui nous expliquerait peut-être mieux les transformations successives de l’idée religieuse.

L’Açwaméda (le sacrifice du cheval) fut probablement le premier pas vers une religion commune et un sacerdoce reconnu, parce que ce fut le premier culte national. Jusqu’alors le père de famille avait suffi au sacrifice des premiers jours ; plus tard la tribu s’étant régularisée en s’augmentant, les défenseurs ayant pris leur place en face du péril et leur rôle dominateur au sein de la foule, les poètes étant prêtres, il fallut sept officiants ordinaires, qu’on choisissait parmi les individus principalement voués au sacerdoce. Dès lors le sacrifice change de nature ; de la famille il passe à un groupe plus nombreux, à celui de la tribu qui peut seule se priver d’un serviteur si nécessaire que le cheval, qui peut seule offrir un holocauste si précieux, chez qui peuvent seuls se rencontrer des sacrificateurs spéciaux et experts. Dès lors les castes naissent, et vont être bientôt les Brahmanes, les Kchattriyas, et les Vaiçyas, c’est-à-dire les prêtres, les guerriers, et les cultivateurs. Quant aux ouvriers, les Soudras, l’interprétation moderne veut qu’ils soient les vaincus, les esclaves, et voilà pourquoi on ne les auraient pas initiés au Véda.

Si donc l’Awçameda dut commencer la transformation du Rig-Véda, c’est aussi à partir de cette époque que doit dater le culte de Brahma, la prière personnifiée, et toute l’organisation brahmanique. Mais, nous l’avons dit, les hymnes qui se rapportent à cette phase sont disséminés, et il n’est pas possible, dans l’état présent de nos connaissances sur l’Inde, de les classer méthodiquement. Cependant il est facile de discerner quand le père de famille cède à un ministre spécial du culte l’ordre et les détails du sacrifice[1] ; il est facile de reconnaître une sorte de sacerdoce quand le prêtre se glorifie des dons et des récompenses qu’accordent les chefs et les riches à son intervention[2] ; enfin lorsque les tableaux primitifs, les invocations naïves aux forces de la nature se compliquent d’une sorte de métaphysique, lorsque dans la dernière section apparaissent successivement Vâk, la parole sainte, Paramâtma, l’âme suprême, Pradjapati, le dieu créateur, Gandharva, l’oiseau divin qui remplace Agni comme messager entre la terre et le ciel ; lorsqu’on s’adresse tour à tour à Patha, l’arbre de la science sacrée, à Véna, le nuage du sacrifice, à Pouroucha, le principe masculin, qui a pour auxiliaire Viradj, la substance corporelle, et à Adhipouroucha, l’âme incorporée ; lorsqu’on invoque Nirritti, la mort, pour la repousser, la Pauvreté, pour la maudire, la Bienfaisance, pour l’implorer, la Libéralité, pour l’exciter, les Plantes pour qu’elles chassent la maladie, le Courroux divin, pour qu’il s’apaise, les Mânes d’un jeune richi, pour qu’il reprenne la vie ; lorsqu’enfin l’on raconte si étrangement les noces de Sourya, le soleil, considéré à la fois comme flamme et comme rayon ; lorsqu’on a fait à Sindhou, l’Indus, une sorte d’adieu, et que l’on énumère toutes les autres rivières qui descendent vers la péninsule ; lorsqu’on chante le Sacre d’un roi, qui va être bientôt le conquérant du Gange, à ce moment significatif, le Védisme, sans avoir cessé et surtout sans avoir épuisé sa poésie, fait place à d’autres inspirations, qui souvent seront aussi grandes, quoique d’un genre différent. Ces nouvelles inspirations appartiennent au Brahmanisme, c’est-à-dire à la période d’organisation indienne.

Max. Grazia — Jules David.


POÉSIE LYRIQUE

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I N D E

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RIG-VÉDA


OU LIVRE DES HYMNES


TRADUCTION DE A. LANGLOIS



INDE

PÉRIODE PRIMITIVE.

Deux pays fournissent seuls, dans l’ancien Orient, assez de documents pour déterminer les diverses périodes de leur civilisation, l’Inde et la Chine. La période primitive de l’Inde est représentée par le Rig-Véda, ou Livre des vers. Nous avons choisi la traduction du savant orientaliste A. Langlois, non-seulement parce qu’elle est la seule complète en langue française, mais aussi parce qu’étant éminemment littéraire elle répond à notre but qui est la vulgarisation des chefs-d’œuvre de l’esprit humain.




RIG-VÉDA


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SECTION  PREMIÈRE[3].


LECTURE PREMIÈRE.

HYMNE I.

À Agni[4], par Madhoutchhandas.

(Mètre : Gâyatrî.)

1. Je chante Agni, le dieu prêtre et pontife, le magnifique (Agni) héraut du sacrifice[5].

2. Qu’Agni, digne d’être chanté par les Richis anciens et nouveaux, rassemble ici les dieux[6].

3. Que par Agni (l’homme) obtienne une fortune sans cesse croissante, (une fortune) glorieuse, et soutenue par une nombreuse lignée.

4. Agni, l’offrande pure que tu enveloppes de toute part s’élève jusqu’aux dieux.

5. Qu’avec les autres dieux vienne vers nous Agni, le dieu sacrificateur, qui joint à la sagesse des œuvres la vérité et l’éclat si varié de la gloire.

6. Agni, toi qui portes le nom d’Angiras[7], le bien que tu feras à ton serviteur (par le fait de sa reconnaissance) tournera à ton avantage[8].

7. Agni, chaque jour, soir et matin, nous venons vers toi, t’apportant l’hommage de notre prière ;

8. (À toi), gardien brillant de nos offrandes, splendeur du sacrifice[9] ; (à toi), qui grandis au sein du foyer que tu habites.

9. Viens à nous, Agni, avec la bonté qu’un père a pour son enfant ; sois notre ami, notre bienfaiteur.

HYMNE II.

À Vayou[10], par Madhoutchhandas.

(Mètre : Gâyatrî.)

1. Illustre Vâyou, viens, et prends ta part de ces liqueurs[11] préparées avec soin ; écoute notre prière.

2. Vâyou, des chantres sacrés, disposés à faire les libations, habiles à connaître le jour (des sacrifices), te célèbrent en ce moment par leurs vers.

3. Vâyou, d’accord avec le vœu de ton serviteur, ta grande voix s’élève et vient attester que tu reçois nos libations de soma.


À Indra[12] et à Vayou.

4. Indra et Vâyou ! c’est pour vous que sont ces libations ; venez prendre les mets[13] que nous vous offrons ; voici des boissons qui vous attendent.

5. Vâyou et Indra ! vous voyez ces oblations, vous qui daignez (quelquefois) assister à nos sacrifices ; venez tous deux avec empressement.

6. Vâyou et Indra ! (dieux) forts, venez (recevoir) l’hommage de (l’homme) qui fait des libations en votre honneur ; accourez à sa prière.


À Mitra et à Varouna[14].

7. J’invoque Mitra, qui a la force de la pureté, et Varouna, qui est le fléau de l’ennemi : (ces dieux) accordent la pluie[15] à la prière qui les implore.

8. Ô Mitra et Varouna ! vous qui (d’une main favorable) touchez notre sacrifice, vous dont ce sacrifice augmente la force, (voyez comme) par lui vous obtenez d’abondantes offrandes.

9. Que Mitra et Varouna, (dieux) sages et puissants, habitants des larges demeures, nous accordent la force qui fait exécuter l’œuvre !


HYMNE III.
Aux Aswins[16], par Madhoutchhandas.
(Mètre : Vrihatî.)

1. Aswins (dieux) aux mains agiles, aux longs bras[17], maîtres de splendeur, acceptez les mets du sacrifice.

2. Puissants Aswins, célèbres par votre force et par vos nombreux exploits, écoutez nos voix, qui portent vers vous notre prière.

3. Secourables et véridiques[18], venez ; nos libations vous attendent, disposées sur un tapis formé de gazon sacré[19]. Venez par la route (qu’arroseront) les larmes (de nos ennemis[20]).


À Indra.

4. Accours, brillant Indra ; ces libations sont pour toi, toujours pures et préparées par des mains (pieuses).

5. Accours, Indra, appelé par la prière, invoqué par le sage[21] ; écoute les paroles saintes du ministre qui t’offre ces libations.

6. Accours, Indra, avec empressement à ces paroles, toi que portent deux coursiers azurés[22] ; avec nos libations, reçois les mets que nous te présentons.


Aux Viswadévas.[23]

7. Viswas, dieux protecteurs, soutiens de l’homme, dispensateurs de la richesse, venez partager les libations qu’a préparées votre serviteur.

8. Ô Viswas, vous qui envoyez la pluie, hâtez-vous d’accourir vers ces libations, comme les vaches courent vers leurs pâturages.

9. Ô Viswas[24], dieux prévoyants, exempts d’inquiétude et de mal, acceptez cette offrande, et apportez-nous le bien.

À Saraswatî[25].

10. Saraswatî, toi qui purifies (le cœur), comblée de nos offrandes, aie pour agréable notre sacrifice, ô toi, trésor de la prière !

11. Saraswatî inspire les paroles saintes ; elle exprime les bonnes pensées ; c’est à elle que s’adresse notre sacrifice.

12. Saraswatî appelle et encourage l’onde (des libations)[26] ; elle élève un drapeau sous lequel brillent toutes les Prières.


HYMNE IV.
À Indra, par Madhoutchhandas.
(Mètre : Gâyatrî.)

1. Chaque jour nous appelons à notre secours le dieu célèbre par ses actions brillantes, comme le fermier appelle sa (vache) nourricière.

2. Approche de notre sacrifice ; tu aimes les libations, bois celles que nous t’offrons ; et si tu es satisfait, toi qui es riche, accorde-nous des troupeaux de vaches.

3. Puissions-nous ainsi (nous) voir au nombre de ces hommes sages que tu daignes visiter ! Tiens, ne nous dédaigne pas.

4. Chef de famille[27] écoute la voix d’un homme éclairé ; aie recours à Indra, sage et invincible, qui (sera) le rempart de tes amis.

5. Que (ces amis), en fêtant Indra, puissent dire : Vous, qui êtes nos adversaires, retirez-vous loin d’ici.

6. Que nos ennemis nous appellent des hommes fortunés, placés que nous sommes sous la protection d’Indra.

7. Offre donc à Indra ce (soma), aussi ardent qu’il peut l’être lui-même ; ce (soma), ornement du sacrifice, joie des mortels, aimé du (dieu) qui descend vers nous, et nous donne le bonheur.

8. Ô (dieu, que l’on appelle) Satacratou[28], après avoir goûté de cette libation, triomphe des Vritras[29] ; sauve, en faveur de ces offrandes, celui qui te présente ces mets.

9. Ô Satacratou, nous accumulons autour de toi les offrandes ; en retour, Indra, comble-nous de tes biens !

10. Au gardien de la richesse, au (dieu) grand, auteur de toute félicité, ami de l’homme pieux, à Indra, adressez vos cantiques.


HYMNE V.
À Indra, par Madhoutchhandas.
(Mètre : Gâyatrî.)

1. Venez, amis ; placez-vous, et chantez Indra, vous qui avez un trésor d’hymnes (sacrés).

2. (Chantez) le grand Indra, le maître souverain de la richesse ; répandez en même temps les libations.

3. Qu’il soit pour nous une source de biens, d’opulence, de sagesse ; qu’il vienne partager nos offrandes.

4. Chantez cet Indra qui, dans les combats, porté sur un char, renverse ses ennemis par le choc de ses coursiers.

5. En l’honneur de ce dieu, qui aime les libations, voilà des boissons purifiées et mêlées avec du caillé[30].

6. Ô bienfaisant Indra, (tu nais) pour recevoir nos libations et pour régner (sur les dieux) ; à peine es-tu né, que déjà ta forme est immense[31].

7. Ô Indra, glorifié par nos chants, remplis-toi de ces boissons ardentes ; puissent-elles plaire à un dieu sage comme toi !

8. Les hymnes, les louanges (des anciens) ont ajouté à ta grandeur, ô Satacratou ! que nos chants aient le même effet !

9. Qu’Indra, protecteur invincible, en qui sont toutes les vertus de la virilité, se réjouisse de ces mets abondants et variés.

10. Que nul homme ne porte atteinte à nos corps ; Indra, seigneur célébré par nos chants, éloigne de nous la mort.

HYMNE VI.

À Indra, par Madhoutchhandas.

(Mètre : Gâyatrî.)

1. Placés autour du (foyer), les hommes préparent le char[32] (du dieu) brillant, pur et rapide[33] ; (cependant) brillent dans le ciel les feux (du matin).

2. À ce char sont attelés ses deux coursiers, beaux, brillants, impétueux, rougeâtres, et dignes de porter un héros.

3. Ô mortels, (voyez-le) mettant l’ordre dans la confusion, donnant la forme au chaos. Ô Indra, avec les rayons du jour tu viens de naître.

4. À peine la formule de l’offrande[34] a-t-elle été prononcée, que les (Marouts)[35], dont le nom mérite d’être invoqué dans les sacrifices, viennent exciter (de leur souffle) le feu à peine sorti du sein de l’arani[36].

5. Avec (ces Marouts), qui brisent tout rempart et supportent[37] (la nue), Indra, tu vas, du sein de la caverne, délivrer les vaches (célestes)[38].

6. Voilà pourquoi l’hymne qui chante les dieux célèbre aussi le grand (dieu des vents), qui assiste (Indra) de ses conseils, et découvre les heureux trésors.

7. Avec l’intrépide Indra, (ô dieu), on te voit accourir ; tous deux pleins de bonheur, tous deux également resplendissants.

8. Notre sacrifice confond, dans un hommage aussi empressé, Indra et la troupe (des Marouts) bienfaisante, irréprochable, et brillante des feux (du matin).

9. (Dieu des vents), qui parcours le monde, viens vers nous, ou de ton séjour habituel, ou de la demeure céleste de la lumière[39] ; notre voix aujourd’hui t’appelle.

10. Nous invoquons aussi la libéralité d’Indra ; (qu’il nous entende), soit d’ici-bas, soit de l’air qui enveloppe la terre, soit du vaste séjour de la lumière.

HYMNE VII.

À Indra, par Madhoutchhandas.

(Mètre : Gâyatrî.)

1. C’est Indra dont nos chants, Indra dont nos hymnes, Indra dont nos prières exaltent la grandeur.

2. Indra, avec ses deux coursiers azurés et dociles à la voix[40], va se mêlant à tout ; Indra, tout brillant d’or, porte la foudre.

3. Pour élargir l’horizon, Indra a élevé le soleil dans le ciel ; au milieu des vaches (célestes), il a lancé sa foudre.

4. Dans les combats, si fertiles en butin, Indra protège-nous ; sois pour nous un auxiliaire terrible !

5. Dans les grandes comme dans les petites affaires, c’est Indra que nous invoquons ; Indra, qui s’unit à nous, et frappe nos ennemis de sa foudre.

6. Toi, qui es libéral et qui donnes l’abondance, accorde-nous le fruit de ce sacrifice, (sois) favorable à nos vœux.

7. Les sacrifices se succèdent, et, dans tous ces hymnes brillants qui s’adressent au foudroyant Indra, je n’en vois aucun digne de lui.

8. Tel que le taureau qui s’approche avec amour de ses compagnes, tel (Indra), maître clément et généreux, visite les hommes avec puissance.

9. Lui qui, sans égal, règne sur les hommes, (dispense) les biens, et (gouverne) les cinq classes d’êtres[41].

10. Nous invoquons pour vous Indra, qui enveloppe de toute part la nature ; qu’il nous soit, à nous, particulièrement propice !

HYMNE VIII.

À Indra, par Madhoutchhandas.

(Mètre : Gâyatrî.)

1. Ô Indra, viens à notre secours ! donne-nous de l’or : l’or procure l’opulence, la victoire, la force constante et durable.

2. Avec l’or, et protégés par toi, nous pouvons repousser nos ennemis et à pied[42] et à cheval.

3. Protégés par toi, ô Indra, nous prenons nos armes, auxquelles tu donnes la force de ta foudre, et nos ennemis sont vaincus dans le combat.

4. Avec nos héros armés de traits, mais surtout avec ton aide, ô Indra, nous résistons à la foule de nos adversaires.

5. En effet, Indra est grand et supérieur à tout : qu’il surpasse tout, le dieu qui porte la foudre ! sa force est comme le ciel, elle est immense.

6. Ce n’est pas seulement le guerrier qui obtient sa faveur dans la mêlée, c’est encore l’homme qui désire un fils, c’est le sage qui s’attache à la prière.

7. Le sein d’Indra, altéré de soma, doit toujours en être rempli : telle la mer est toujours (gonflée d’eau), telle la langue est sans cesse humectée de salive.

8. C’est ainsi que la prière qu’on lui adresse, grande et sonore, assure à son serviteur des troupeaux de vaches ; elle est pour celui-ci comme la branche chargée de fruits.

9. C’est ainsi que ton pouvoir, ô Indra, que ton secours est acquis au serviteur qui me ressemble.

10. Mais aussi l’hymne et le chant qui plaisent à Indra doivent être préparés ; le soma doit être versé (pour le dieu qui l’aime).

HYMNE IX.

À Indra, par Madhoutchhandas.

(Mètre : Gâyatrî.)

1. Viens, Indra, toi qui aimes les mets (du sacrifice) et toutes les espèces de libations ; toi qui es grand, fort et victorieux.

2. En l’honneur d’Indra, qui donne le bonheur et qui protège puissamment, répandez cette boisson, qui donne aussi le bonheur et produit de si puissants effets.

3. Sois heureux de nos louanges flatteuses, dieu à la noble face[43] et maître souverain ; assiste avec (les autres dieux) à nos sacrifices.

4. (Avec nos libations), j’ai versé[44] des prières : qu’elles montent heureusement vers toi, seigneur puissant, et daigne les accueillir !

5. Indra, réunis ici les biens divers qu’il est possible de souhaiter ; ils sont en toi avec une merveilleuse abondance.

6. Riche et puissant Indra, conduis-nous à cette opulence, et donne-nous la force et la gloire.

7. Ô Indra, toi qui es la vie de tous, accorde-nous une fortune large, grande et solide, fondée sur l’abondance de nos récoltes et le nombre de nos vaches !

8. Oui, donne-nous une grande fortune, des richesses, des biens innombrables, et des chariots chargés d’abondantes provisions !

9. Par nos chants nous invoquons Indra, maître de la richesse, ami de nos hymnes, et prompt à venir à notre secours.

10. Avec ces libations diverses, le père de famille[45] prétend honorer la haute puissance du grand Indra, devenu son hôte.

HYMNE X.

À Indra, par Madhoutchhandas.

(Mètre : Anouchtoubh.)

1. Les voix des chantres, les hymnes des poëtes, célèbrent ta grandeur, ô Satacratou, les prêtres t’élèvent parmi nous, comme on élève la hampe d’un drapeau[46].

2. En voyant (le père de famille) aller de montagne en montagne pour faire tous les préparatifs du sacrifice[47], le généreux Indra a compris son dessein, et il arrive avec l’escorte des (Marouts).

3. Indra, attelle à ton char tes deux coursiers azurés, à la crinière brillante, à l’ardeur impétueuse, au ventre qui remplit le surfaix ; toi qui aimes le soma, approche pour mieux entendre nos chants.

4. Viens, écoute, accepte nos vœux, accède à nos désirs ; bénis, ô Indra, toi qui es notre véritable asile, notre sacrifice et les mets que nous t’offrons.

5. Chantons, exaltons Indra, qui détruit la foule de (nos ennemis) ; que le dieu puissant (que nous appelons Sacra) entende son nom répété parmi nos fils et nos amis.

6. Invoquons-le pour obtenir des amis, pour obtenir des richesses, pour obtenir du pouvoir. Que le puissant Indra soit puissant[48] pour nous, et nous comble de biens !

7. Indra, nous te présentons, avec un entier abandon, ces offrandes abondantes et pieuses. Ouvre pour nous le pâturage des vaches (célestes) ; accorde-nous l’opulence, ô toi qui portes la foudre !

8. Le ciel et la terre ne peuvent contenir (le dieu) qui donne la mort à ses ennemis. Fais descendre en vainqueur les ondes qui répandent le bonheur, et envoie nous les vaches (célestes).

9. Toi qui as une oreille ouverte (à la prière), écoute notre invocation, accueille nos hymnes ; Indra, rapproche-toi de nous pour exaucer les vœux que t’adresse, de concert avec moi, un père de famille.

10. Nous connaissons ton extrême générosité ; nous savons que tu entends notre voix suppliante dans les combats : nous implorons le secours du plus libéral (des dieux), qui se manifeste par mille bienfaits.

11. Hâte-toi (de venir) vers nous, ô Indra, fils de Cousica[49] ! Goûte avec plaisir de nos libations ; donne à notre corps une vigueur toujours nouvelle. Que le poëte (qui te chante) reçoive de toi mille présents.

12. Ô (dieu) digne d’être célébré, que nos éloges t’environnent de toute part ; éloges qui, comme toi, grandissent avec le temps ; qui, agréés par toi, te rendent favorable à nos désirs.

HYMNE XI.

À Indra, par Djétri, fils de Madhoutchhandas.

(Mètre : Anouchtoubh.)

1. Tous les hymnes exaltent la grandeur d’Indra, étendu comme une mer profonde ; (Indra), le plus illustre des guerriers portés sur des chars de bataille, le maître des mets (sacrés), le maître des hommes pieux.

2. Ô Indra, maître de la force, après t’avoir offert ces mets (sacrés), et sûrs d’une amitié telle que la tienne, nous n’avons rien à craindre ; nous te louons, toi vainqueur invincible.

3. Les trésors d’Indra ne sont pas épuisés ; sa protection est toujours aussi forte qu’autrefois ; toujours il a pour ses adorateurs une réserve de nourritures abondantes, et des vaches fécondes.

4. Indra est le destructeur des villes (des Asouras)[50] : de sa nature, il est jeune et sage ; il possède une force incomparable. À lui s’adressent tous les sacrifices ; il lance la foudre, et s’entend louer partout.

5. Ô (dieu) qui portes le tonnerre, tu as ouvert la caverne où Bala tenait renfermées les vaches (célestes) ; les dieux sont venus vers toi, rassurés contre la crainte qu’ils avaient éprouvée.

6. (Dieu) guerrier, pour obtenir tes dons, je m’approche avec des libations et des hymnes. Devant toi, qui mérites nos louanges, se présentent de fidèles serviteurs : qu’ils connaissent ce que tu peux.

7. Par ta (secourable) magie, ô Indra, tu as donné la mort au magicien Souchna[51]. Que les hommes sages connaissent ta puissance ; daigne élever leur fortune.

8. Que les hymnes célèbrent Indra, fort et souverain ; Indra, dont les bienfaits ne peuvent pas se compter.

HYMNE XII.

À Indra, par Médhatithi, fils de Canwa.

(Mètre : Gâyatrî.)

1. Nous prenons (pour l’objet de nos chants) Agni, le messager (des dieux), le sacrificateur en qui sont tous les biens, le prêtre qui accomplit l’œuvre sainte.

2. C’est Agni que, dans leurs invocations, les hommes appellent sans cesse, Agni le maître du peuple, le ministre des holocaustes, l’ami du monde.

3. Agni, toi qui viens de naître (de l’aranî)[52], amène ici les dieux sur ce cousa choisi ; tu es pour nous un sacrificateur digne d’éloges.

4. Agni, éveille les dieux avides (de nos sacrifices) ; va leur porter cette nouvelle, et reviens avec eux t’asseoir sur le cousa.

5. Toi que nous appelons par nos libations de beurre, brillant Agni, brûle nos ennemis alliés avec les Râkchasas[53].

6. C’est avec Agni que s’enflamme Agni[54], jeune et sage, gardien du foyer domestique, ministre des holocaustes ; sa bouche est le vase[55] (qui reçoit nos offrandes).

7. Célèbre, au milieu de la cérémonie sainte, Agni, dieu sage, fidèle au devoir et à la vérité, destructeur du mal.

8. Divin Agni, messager des dieux, sois le protecteur du (père de famille) qui t’honore par ses holocaustes.

9. (Dieu) purificateur, donne la joie à cet (homme pieux) qui, pour le service des dieux, s’approche de toi avec l’holocauste.

10. Agni, purificateur et resplendissant, appelle ici les dieux vers notre holocauste et notre sacrifice.

11. Célébré par un hymne nouveau, procure-nous la richesse, l’abondance, et une race vigoureuse.

12. Agni, toi qui brilles d’un éclat pur, toi que nous invoquons dans toutes les prières adressées aux dieux, accueille avec faveur l’hymne que nous te consacrons.

HYMNE XIII.

Aux Apris[56], par Médhatithi.

(Mètre : Gâyatrî.)

1. Agni, (surnommé) Sousamiddha[57], amène pour nous les dieux vers celui qui offre l’holocauste : prêtre et sacrificateur, consomme le sacrifice.

2. Sage (divinité, qu’on nomme) Tanoûnapât[58], fais aujourd’hui agréer aux dieux notre sacrifice ; qu’il leur soit aussi doux que le miel !

3. J’invoque ici, dans cette assemblée, (celui qu’on appelle) Narâsansa, (le dieu) chéri et sacrificateur, dont la langue est si douce.

4. Agni, sur ton char bienheureux, amène les dieux ; ô toi, sacrificateur (appelé) Ilita[59], toi que Manou[60] a constitué (pour présider à nos fêtes) !

5. Mortels éclairés, étendez le gazon (sacré) ; qu’il soit arrosé de beurre à l’endroit où (les dieux) vont venir prendre leur ambroisie.

6. Qu’elles s’ouvrent, les portes divines (de l’enceinte sacrée, ces portes) que le sacrifice sanctifie ! qu’elles s’ouvrent aujourd’hui pour la pieuse cérémonie !

7. J’appelle à ce sacrifice la belle Nuit et la belle Aurore : qu’elles viennent toutes deux prendre place sur ce cousa.

8. J’appelle aussi ce couple de dieux[61] à la douce langue, sages et sacrificateurs : qu’ils aient leur part de notre sacrifice.

9. Que les trois déesses qui apportent la joie, Ilâ, Saraswatî et Mahî[62], daignent sans crainte s’asseoir sur ce cousa.

10. J’appelle ici le grand Twachtri[63], qui sait revêtir toutes les formes : qu’il soit notre ami !

11. Divin Vanaspati[64], donne aux dieux l’holocauste qui leur est destiné. Que la sagesse soit le partage de celui qui le leur offre !

12. En l’honneur d’Indra, employez la swâhâ[65] dans la maison du (père de famille) qui offre le sacrifice : c’est là que je convie les dieux.

HYMNE XIV.

À tous les dieux, par Médhatithi.

(Mètre : Gâyatrî.)

1. Agni, la fête (est préparée) ; nous t’invoquons. Viens avec tous les dieux goûter de nos libations, et consomme le sacrifice.

2. Les enfants de Canwa[66] t’appellent : ô sage (divinité), ils chantent ta prudence. Agni, viens avec les dieux.

3. Ils chantent aussi Indra et Vâyou, Vrihaspati[67], Mitra, Agni, Poûchan, Bhaga (et les autres) Adityas, et la troupe des Marouts.

4. (Ô dieux), on vous présente des boissons agréables et qui causent la joie, limpides, douces, reposant dans le tchamoû[68].

5. Les fils de Canwa te célèbrent, demandant ta protection, placés sur les couches de gazon purifié, et t’honorant de leurs holocaustes.

6. Avec tes coursiers, dont la croupe est arrosée de beurre consacré, et dociles à la pensée qui les attelle, amène ici les dieux à nos libations.

7. Près de ces dieux dignes de nos hommages, et alimentés par nos sacrifices, amène aussi leurs épouses[69] ; (divinité) à la langue brillante, fais qu’ils boivent de (nos libations, aussi douces que le) miel.

8. Agni, au moment où nous dirons vachat[70], que ces dieux adorables, que ces dieux dignes de nos chants, touchent de leur langue notre douce (ambroisie).

9. Sage et sacrificateur, tu peux amener ici, des régions lumineuses, tous les dieux éveillés par l’Aurore.

10. Agni, avec tous les dieux, avec Indra, avec Vâyou et le brillant Mitra, bois de notre doux soma.

11. Sacrificateur constitué par la main de Manou, Agni, tu hantes les sacrifices : accomplis pour nous la cérémonie présente.

12. Ô dieu, attelle à ton char tes coursiers rougeâtres et rapides, et qu’ils transportent ici les dieux.

HYMNE XV.

Aux Ritous,[71] et à d’autres dieux,

par Médhatithi.

(Mètre : Gâyatrî.)

1. Indra, bois le soma avec Ritou ; viens prendre ces boissons qui égayent (l’esprit), et qui sont préparées en ce lieu.

2. Ô Marouts ! buvez avec Ritou à la coupe[72] (sacrée) ; purifiez notre sacrifice, rappelez-vous (que) rien n’égale votre générosité.

3. (Dieu surnommé) Nechtri[73], viens, accompagné de ton épouse[74], prendre ta part du sacrifice, et bois avec Ritou, toi qui possèdes de riches trésors.

4. Agni, amène ici les dieux ; donne-leur les places qu’ils doivent occuper trois fois dans le jour[75] ; qu’ils soient par toi parés de leurs ornements : bois avec Ritou.

5. Au vase qui contient l’offrande sainte, Indra, bois le soma après les Ritous ; car vous êtes unis d’une inviolable amitié.

6. Mitra et Varouna, divinités pieuses, profitez avec Ritou de cet abondant sacrifice que (les esprits impurs) ne sauraient vous enlever.

7. Portant dans leurs mains les vases[76] (sacrés), les hommes désireux de richesses célèbrent, au milieu des cérémonies du sacrifice, le dieu appelé Dravinodâs[77].

8. Dravinodâs, donne-nous des trésors renommés ; trésors dont nous jouissions par la grâce des dieux.

9. Dravinodâs veut boire avec les Ritous des libations contenues dans la coupe (sacrée)[78]. Venez, approchez-vous, et achevez l’holocauste.

10. Dravinodâs, voilà la quatrième fois[79] que nous t’invoquons avec les Ritous ; sois donc libéral pour nous.

11. Aswins ! divinités pures et animées d’un feu brillant, buvez de ce doux breuvage avec Ritou, et agréez notre sacrifice.

12. (Dieu) libéral, qui apparais sous la forme du feu domestique[80], tu es avec Ritou le chef du sacrifice : en faveur d’un homme ami des dieux, consomme le sacrifice qui leur est offert.

HYMNE XVI.

À Indra, par Médhatithi.

(Mètre : Gâyatrî.)

1. Indra, que tes chevaux azurés et brillants comme le soleil t’amènent vers nos libations, dieu bienfaisant !

2. Nous avons préparé des grains d’orge[81] (frits) et arrosés de beurre : que les chevaux d’Indra le transportent ici sur son char fortuné.

3. Nous invitons trois fois Indra à venir goûter de notre soma, le matin et (à deux autres moments) que nous reprenons le sacrifice[82].

4. Accours, Indra, vers nos libations avec tes chevaux à large crinière ; nous t’appelons, le breuvage est versé.

5. Viens jouir de nos hymnes et de nos libations ; bois, tel que le cerf[83] altéré.

6. Ces breuvages, ces libations sont disposées sur la couche de cousa ; Indra, bois pour augmenter ta force.

7. Cet hymne que nous t’adressons doit surtout te plaire et toucher ton cœur ; bois donc ce breuvage que nous avons préparé.

8. Pour son bonheur, pour le plaisir de partager notre soma, voilà qu’Indra, le vainqueur de Vritra[84], s’approche, et ne dédaigne pas tous les préparatifs que nous avons faits.

9. Ô Satacratou, accomplis les vœux que nous formons, en nous accordant des vaches et des chevaux ! Pieusement recueillis, nous te consacrons nos chants.

HYMNE XVII.

À Indra et à Varouna, par Médhatithi.

(Mètre : Gâyatrî.)

1. J’implore le secours d’Indra et de Varouna, tous les deux rois souverains ; ce sont eux qui en ce moment font notre joie.

2. Protecteurs des mortels, vous allez venir à notre secours, écoutant la prière d’un prêtre tel que moi.

3. Indra et Varouna, rassasiez-vous de nos offrandes à votre souhait, et venez près de nous : tel est notre vœu.

4. Nous vous présentons à la fois et des prières et des offrandes : puissions-nous être comptés au nombre de ceux dont vous agréez les dons !

5. Parmi les êtres généreux, c’est Indra ; parmi les êtres dignes d’éloge, c’est Varouna, dont le pouvoir est le plus mémorable.

6. Par leur protection, puissions-nous obtenir et conserver (la richesse) ! puissions-nous ressentir l’excès (de leur bonté) !

7. Indra et Varouna, je vous invoque, et vous demande l’opulence en tout genre ; donnez-nous aussi la victoire.

8. Indra et Varouna, nos pensées s’adressent à vous avec respect ; daignez avec empressement nous accorder le bonheur.

9. Indra et Varouna, accueillez l’hymne par lequel je vous invoque, l’hymne que je vous consacre à tous deux, et que vous pouvez exaucer.

HYMNE XVIII.

À Agni, par Médhatithi.

(Mètre : Gâyatrî.)

1. (Dieu appelé) Brahmanaspati[85], distingue celui qui t’offre ce soma (comme) Cakchîvân[86], fils d’Ousidj.

2. Qu’il nous couvre de sa protection, celui qui est prompt, riche et destructeur du mal, qui connaît les trésors et augmente l’abondance.

3. Que la parole injurieuse d’aucun mortel ennemi ne puisse nous blesser : garde-nous, Brahmanaspati !

4. Il ne saurait périr, le mortel que conservent Indra, Brahmanaspati, Soma[87].

5. Brahmanaspati, Soma, Indra et Dakchina[88], préservez du mal ce mortel !

6. Avec la prière, je m’adresse au (dieu appelé) Sadasaspati[89], admirable, chéri, bienfaisant, ami d’Indra.

7. Sans lui, malgré la science du prêtre, le sacrifice ne peut s’accomplir ; il vient au-devant des prières qui s’unissent à lui.

8. Il comble de ses biens l’auteur du sacrifice, il accomplit l’holocauste ; (par lui) l’hymne s’élève vers les dieux.

9. Je vois le plus fort, le plus illustre (des dieux), (celui qu’on nomme) Narâsansa[90], brillant comme du haut de la demeure céleste.

HYMNE XIX.

À Agni et aux Marouts, par Médhatithi.

(Mètre : Gâyatrî.)

1. Le sacrifice est préparé avec soin ; nous t’appelons à venir goûter de nos libations : Agni, viens avec les Marouts.

2. Aucun dieu, aucun mortel n’est assez fort pour lutter contre un être aussi grand que toi : Agni, viens avec les Marouts.

3. Tous ces dieux bienfaiteurs (des hommes) connaissent ce vaste monde (où règne la lumière) : Agni, viens avec les Marouts.

4. Menaçants, doués d’une force invincible, ils peuvent obscurcir la lumière du soleil[91] : Agni, viens avec les Marouts.

5. Resplendissants, revêtus d’une forme terrible, ils peuvent donner les richesses, comme ils peuvent aussi détruire leurs ennemis : Agni, viens avec les Marouts.

6. Sous la voûte brillante du ciel, ces dieux s’élèvent et vont s’asseoir : Agni, viens avec les Marouts.

7. Ils soulèvent et poussent les montagnes (de nuages) au-dessus de l’abîme des mers : Agni, viens avec les Marouts.

8. Ils étendent avec force les rayons à travers l’Océan (céleste) : Agni, viens avec les Marouts.

9. À toi cette première libation ; je t’offre la douce boisson du soma : Agni, viens avec les Marouts.




LECTURE DEUXIÈME.

HYMNE I.

Aux Ribhous[92], par Médhatithi.

(Mètre : Gâyatrî.)

1. En l’honneur d’une race divine, la bouche des prêtres chante cet hymne, qui doit provoquer la généreuse reconnaissance (de ces dieux).

2. Ce sont eux dont la pensée a créé les chevaux radieux d’Indra, ces chevaux que la voix suffit pour atteler à son char ; ils ont entouré le sacrifice de cérémonies (saintes).

3. Ils ont construit pour les véridiques Aswins un char fortuné qui fait le tour (du monde) ; ils ont produit la vache qui donne le lait.

4. Les Ribhous, puissants par leurs prières et par leur justice, ont rendu à la jeunesse leur père et leur mère.

5. Ces libations s’adressent à vous et à Indra qu’accompagnent les Marouts, ainsi qu’aux brillants Adityas.

6. Ce sont les Ribhous qui ont divisé en quatre parties la coupe encore nouvelle du divin Twachtri[93].

7. Avec nos louanges, recevez, pour en tenir compte au religieux (père de famille), trois genres d’offrandes dans sept sacrifices différents[94].

8. Chargés de (nos sacrifices), (les Ribhous) ont vécu en persévérant dans le bien, et ont obtenu une part du sacrifice offert aux dieux.


HYMNE II.

À Indra et à Agni, par Médhatithi.

(Mètre : Gâyatrî.)

1. J’appelle ici Indra et Agni ; nous désirons qu’ils soient célébrés, (et qu’ils acceptent) nos libations, ces dieux jaloux de nos offrandes.

2. Mortels, chantez dans vos sacrifices Indra et Agni ; ornez-les de vos louanges. Qu’ils soient exaltés dans vos hymnes.

3. À la voix d’un ami qui vous loue et vous invoque, venez, Indra et Agni, goûter de notre soma.

4. À ces libations ici préparées nous invitons ces (dieux) redoutables : qu’Indra et Agni s’approchent.

5. (Divinités) puissantes, Indra et Agni, vous qui présidez à nos assemblées (pieuses), domptez les Râkchasas ; empêchez ces êtres voraces de se multiplier[95].

6. Donnez-nous cette assurance. Veillez au loin du haut du ciel ; Indra et Agni, accordez-nous le bonheur.


HYMNE III.

À divers dieux, par Médhatithi.

(Mètre : Gâyatrî.)

1. Éveille les Aswins alliés au Matin[96] ; qu’ils viennent ici goûter de notre soma.

2. Nous invoquons les Aswins, ces deux divinités habitantes du ciel, et qui se distinguent par leur habileté à conduire un char brillant.

3. Ô Aswins de votre fouet qu’humectent nos libations, que fortifient nos prières, touchez notre sacrifice.

4. Non loin de vous est la maison où vous dirigez votre char, ô Aswins ! (la maison) de celui qui vous offre le soma.

5. J’appelle à notre secours Savitri[97] à la main d’or[98] ; ce dieu voit bien le lieu (où l’invoquent ses serviteurs).

6. Célèbre, pour obtenir sa protection, Savitri, enfant des libations[99]. Nous voulons en son honneur accomplir l’œuvre sainte.

7. Nous invoquons Savitri, qui est l’œil des mortels, (Savitri) à qui nous devons et nos demeures et toutes nos richesses.

8. Amis, placez-vous ; nous avons à chanter Savitri. C’est lui qui donne l’opulence et qui brille (au ciel).

9. Ô Agni, amène ici, pour prendre part à nos libations, Twachtri et les épouses chéries des dieux[100].

10. Agni toujours jeune, amène en ces lieux, pour notre bien, ces épouses divines. Hotrâ[101], Bhâratî[102], Varoutrî[103], Dhichanâ[104].

11. Que ces déesses, amies des hommes, nous couvrent de leur haute faveur, et nous donnent la prospérité ; que rien ne blesse leur aile (protectrice).

12. J’appelle ici Indrânî, Varounânî, Agnâyî[105] ; je les vénère, et les invite aux libations de soma.

13. Que le grand Ciel et la Terre agréent notre sacrifice, et qu’en récompense ils nous comblent de leurs biens.

14. Par leurs prières les sages, dans ce lieu où siège Gandharva[106], recueillent le lait du Ciel et de la Terre.

15. Ô Terre, sois pour nous une habitation large et fortunée : donne-nous bonheur et gloire.

16. Que les dieux nous protègent de cette région d’où Vichnou[107] s’est élancé, (excité) par nos sept genres d’invocations[108].

17. Oui, d’ici Vichnou s’est élancé ; trois fois il a foulé un sol[109] empreint de la poussière de son pied.

18. Vichnou, sauveur invincible, gardien des devoirs sacrés, en trois stations a fourni sa carrière.

19. Considérez donc les actes de Vichnou, par lesquels cet ami, ce compagnon d’Indra, indique (à l’homme pieux) le moment des sacrifices.

20. Les pères de famille[110] éclairés examinent constamment la haute station de Vichnou ; leur œil est toujours comme tendu vers le ciel.

21. Et cette haute station de Vichnou, les prêtres vigilants la célèbrent par leurs hymnes et les feux du sacrifice.


HYMNE IV.

À divers dieux, par Médhatithi.

(Mètre : Gâyatrî. ― Pouras : Ouchnih et Anouchtoubh.)

1. Les voilà préparées, ces abondantes libations qu’accompagnent nos prières ; nous te les présentons, Vâyou[111] ; viens, et bois.

2. Nous invitons à goûter notre soma Indra et Vâyou, ces deux divinités habitantes du ciel.

3. Les sages invoquent le secours d’Indra et de Vâyou, aussi rapides que la pensée, doués de mille yeux[112], et maîtres de la prière.

4. Nous appelons à nos libations Mitra et Varouna, qui, de leur essence, sont forts et purs.

5. J’invoque, en allumant le feu du sacrifice, Mitra et Varouna, ces maîtres de la pure lumière, dont nos offrandes augmentent la grandeur.

6. Que Mitra soit notre sauveur ; que Varouna nous prodigue ses secours ! que tous deux nous rendent opulents !

7. Nous appelons à partager notre soma Indra escorté des Marouts : qu’avec ses compagnons il se réjouisse (de nos libations) !

8. Ô Marouts, qui avez Indra pour chef, et vous dieux, qui distribuez les biens de Poûchan[113], écoutez tous mon invocation.

9. (Divinités) libérales, robustes auxiliaires d’Indra, donnez la mort à Vritra : que le méchant ne règne pas sur nous !

10. Nous convions tous les dieux à nos libations ; (nous y appelons) les Marouts, ces terribles fils de Prisni[114].

11. Ô mortels, quand vous vous réunissez à la fête du sacrifice, (entendez-vous) le bruit des Marouts ? c’est comme une marche triomphante.

12. Nés de tous les côtés dans les régions de l’air splendides et riantes, que les Marouts nous protègent et nous conservent !

13. (Accepte), ô brillant Poûchan, ces libations que nous t’offrons sur ce magnifique lit de cousa ; et du ciel, viens (vers nous avec l’amour du pasteur qui retrouve sa brebis perdue).

14. Poûchan, d’un rayon lumineux, sait toujours percer la retraite mystérieuse où, sur une couche magnifique de gazon, siège le roi (des sacrifices).

15. Que ce dieu, satisfait de mes libations, fasse accomplir leur carrière aux six (coursiers) qu’il attelle[115], comme (le laboureur) avec ses bœufs (trace le sillon où il) sème son orge.

16. (Cependant les Eaux), mères des êtres et amies des hommes pieux[116], viennent suivant leurs voies, et distribuant leur lait aussi doux que le miel.

17. Soit qu’elles précèdent la naissance du soleil, ou bien qu’elles l’accompagnent (dans le ciel), puissent ces Eaux aimer notre sacrifice !

18. J’invoque ces Eaux divines qui désaltèrent nos vaches ; qu’un holocauste soit fait en l’honneur des ondes.

19. Dans les Eaux se trouve l’ambroisie (pour les dieux) ; dans les Eaux est la santé (pour les hommes). Dévas[117], présentez les mets sacrés en bénissant les Eaux.

20. Dans les Eaux, m’a dit Soma[118], sont tous les remèdes. Agni fait le bonheur de tous, et les Eaux guérissent tous les maux.

21. Eaux salutaires, protégez mon corps contre les maladies ! Que je puisse longtemps voir le soleil !

22. Eaux purifiantes, emportez tout ce qui peut être en moi de criminel, tout le mal que j’ai pu faire par violence, par imprécation[119],par injustice.

23. En ce jour, j’ai honoré les Eaux ; nous nous sommes présentés avec (des coupes remplies de) ce précieux élément. Agni, toi qui aimes les libations, viens, et couvre-moi de ton éclat.

24. Agni, donne-moi de l’éclat, de la famille, de longs jours ! Que les dieux, qu’Indra et les (saints) Richis se souviennent de moi !


HYMNE V.

À divers dieux, par Sounahsépa.

(Mètres : Trichtoubh et Gâyatrî.)

1. Parmi les dieux immortels, quel est celui dont nous prononcerons d’abord le nom vénérable ? Quel est celui qui doit nous rendre à la grande Aditi[120], et me faire revoir et le père et la mère (du monde) ?

2. Avant celui des autres immortels, nous prononcerons le nom vénérable d’Agni. C’est lui qui doit nous rendre à la grande Aditi, et me faire revoir le père et la mère (du monde).

3. Nous t’invoquons (ensuite), divin Savitri[121], maître de l’opulence ; toi qui nous aides sans relâche, accorde-nous la richesse.

4. Cette (richesse) recherchée, estimée, qu’on blâme quand on ne l’a pas, qu’on cesse de haïr (quand on la possède), tu la tiens dans tes mains.

5. Puissions-nous, par ta protection, (par la faveur d’un dieu) possesseur de la richesse, acquérir un commencement de prospérité qui fonde notre bonheur !

6. Ni ces oiseaux qui volent dans les airs, ni ces ondes qui coulent sans cesse, ni les vents conjurés, ne peuvent égaler ta force, ta rapidité, ta véhémence.

7. (Dans le ciel, arbre majestueux) sans racines (ici[[]]-bas), règne Varouna[122] fort et pur, trésor élevé de rayons lumineux. Ces rayons descendent ; mais leurs racines sont en haut. Puissent-ils briller pour nous au milieu des airs !

8. C’est lui, c’est le royal Varouna qui prépara au soleil[123] cette large voie où il poursuit sa carrière ; qui, dans une région dépourvue de route, en fit une pour (l’astre) voyageur. Qu’il nous défende contre (l’ennemi) qui nous perce le cœur !

9. Puissant (Varouna), tu possèdes contre nos maux cent et mille remèdes. Que ta faveur soit grande, soit étendue ! Retiens loin de nous Nirriti[124] enchaînée ; détourne sa face (cruelle), et préviens le crime préparé contre nous.

10. Ces étoiles qui brillent au-dessus de nos têtes apparaissent la nuit, et avec le jour elles se retirent ; la lune aussi vient la nuit étaler ses splendeurs. L’œuvre de Varouna n’est jamais interrompue.

11. Je viens donc à toi avec une prière respectueuse ; celui qui t’offre cet holocauste te bénit et t’implore. Varouna, sois favorable à nos vœux : toi dont le nom est au loin célébré, épargne notre vie !

12. Voilà ce qu’on m’a répété et le jour et la nuit, voilà ce que mon propre cœur me dit. Que le royal Varouna nous délivre, lui qu’a invoqué Sounahsépa enchaîné[125] !

13. Oui, Sounahsépa enchaîné, attaché aux trois poteaux du bûcher sacré, a prié le fils d’Aditi, le royal Varouna, de le sauver. Que (ce dieu) sage et invincible brise nos fers !

14. Ô Varouna, par nos invocations, par nos sacrifices, par nos holocaustes, nous voulons détourner ta colère. Viens, toi qui donnes la vie[126] ; roi prudent, délivre-nous de nos fautes.

15. Ô Varouna, délie les chaînes qui nous serrent d’en haut, d’en bas et du milieu[127]. Fils d’Aditi, par le sacrifice que nous t’offrons, que nos fautes soient effacées, que nous soyons à Aditi[128] !


HYMNE VI.

À Varouna, par Sounahsépa.

(Mètre : Gâyatrî.)

1. Dans tous ces sacrifices que nous t’offrons journellement, ô divin Varouna, nous pouvons, pauvres mortels, manquer à quelqu’un de nos devoirs.

2. (Épargne-nous ;) ne nous livre pas à la mort, au fer d’un ennemi, au ressentiment d’un furieux.

3. Varouna, par nos chants nous voulons adoucir et calmer ton esprit, de même que le conducteur d’un char (délasse par sa voix) son cheval fatigué.

4. Vers toi, comme l’oiseau vers son nid, volent mes pensées, pour obtenir une existence prospère.

5. Et dans quel (autre) temps devons-nous invoquer l’illustre Varouna, qui possède la force et la richesse, et nous rendre propice celui qui est l’œil du monde ?

6. Que (Mitra et Yarouna) accueillent ce (sacrifice) offert pour tous les deux ; ils sont justes, quand ils favorisent un pieux serviteur.

7. Varouna connaît la voie de l’oiseau qui vole dans l’air, celle du vaisseau qui vogue sur la mer.

8. Ce dieu, ferme en ses œuvres, connaît la marche des douze mois qui engendrent les êtres, et celle du mois qui complète l’année[129].

9. Il connaît la carrière du vent, qui exerce au loin sa remarquable puissance ; il connaît la demeure élevée des dieux.

10. Au sein de nos demeures réside et règne Varouna, fidèle à ses desseins, et digne d’être honoré par les sacrifices.

11. Le sage voit toutes les merveilles accomplies par lui, comme celles qu’il accomplira.

12. Que ce fils d’Aditi, honoré par nos sacrifices, nous dirige chaque jour dans une bonne voie ; qu’il prolonge notre existence !

13. Varouna a revêtu sa cuirasse d’un or éclatant et pur ; des rayons de lumière l’environnent de toute part.

14. Nul dans le monde n’oserait affronter ce dieu ; nul parmi ceux qui ont l’habitude du mal, de l’injure, du crime.

15. C’est lui qui prépare cette nourriture abondante, soutien de notre vie mortelle.

16. Après ce dieu qui éclaire le monde, ma prière soupire, comme la vache après son étable.

17. S’il est vrai que mes libations te soient agréables, s’il est vrai que, comme sacrificateur[130], tu consommes notre offrande avec plaisir, nous voulons encore nous adresser à toi.

18. Et en effet j’ai vu (ce dieu) visible pour tous ; j’ai vu son char sur la terre ; (Varouna) exauce nos prières.

19. Ô Varouna, écoute aujourd’hui mon invocation ; sois-nous favorable ! J’implore ton secours.

20. (Dieu) sage, tu brilles partout, au ciel et sur la terre. Écoute et sauve-nous.

21. Délie les chaînes qui nous serrent d’en haut, d’en bas et du milieu[131]. Fais que nous vivions.


HYMNE VII.

À Agni, par Sounahsépa.

(Mètre : Gâyatrî.)

1. Dieu vénérable, (dieu) maître des mets consacrés, revêts ta robe (resplendissante), et accomplis notre sacrifice.

2. Viens, Agni, toi notre sacrificateur, toujours jeune, digne entre tous d’être l’objet de nos pensées, et de nos hymnes les plus brillants.

3. Sois pour nous généreux et bon, comme un père pour son fils, un parent pour son parent, un ami pour son ami.

4. Sur ce lit de cousa préparé par nous, que Varouna, Mitra, Aryaman, viennent s’asseoir ; rivaux terribles pour leurs ennemis, qu’ils soient pour nous comme un homme[132] (vis-à-vis d’un autre homme).

5. Premier des sacrificateurs, daigne te complaire en notre amitié ; écoute nos chants avec bonté.

6. Quel que soit le dieu que nous honorions avec notre sacrifice perpétuel, toujours à toi s’adresse l’holocauste.

7. Sois toujours le maître chéri des pauvres mortels, le sacrificateur satisfait de nos hommages, l’élu de notre cœur. Amis d’Agni, nous nous plaçons sous ses auspices.

8. Sous les auspices d’Agni, les Dévas présentent les mets choisis pour le sacrifice ; sous les auspices d’Agni, nous poursuivons nos adorations.

9. Ainsi, dieux et mortels, unissons-nous pour accomplir de concert cette œuvre de bénédiction.

10. Ô Agni, fils de la force[133], avec tous les feux[134], reçois ce sacrifice, ces prières et ces mets consacrés.


HYMNE VIII.

À Agni, à tous les dieux, par Sounahsépa.

(Mètres : Gâyatrî et Trichtoubh.)

1. Nous adressons nos hommages à Agni, roi des sacrifices, (Agni qui nous apparaît) tel qu’un coursier orné d’une longue queue[135].

2. Qu’il nous soit favorable, ce fils de la force, dont les pas s’étendent au loin ; qu’il répande ses biens sur nous !

3. De loin, de près, que ce (dieu), qui est partout, nous protège toujours contre le mortel méchant.

4. Agni, annonce aux dieux le sacrifice nouveau que nous leur offrons, accompagné de nos hymnes.

5. Fais-nous part des trésors d’abondance que fournissent la région supérieure, la région du milieu, et celle qui est près de nous[136].

6. Dieu resplendissant, tu puises comme à la source intarissable d’un fleuve, pour répandre tes faveurs sur ton serviteur.

7. Le mortel que tu protèges dans les combats, que tu soutiens dans les batailles, ne manquera jamais de te préparer des offrandes.

8. Dieu, invincible, cet homme est vainqueur de tous ses ennemis, et acquiert une force à jamais mémorable.

9. Que ce dieu, qui voit tout, accorde la victoire à nos cavaliers, et la richesse à nos sages !

10. Éveillé par nos chants, accueille le sacrifice de chaque mortel, et l’hymne par lequel il prétend charmer ta colère.

11. La grandeur d’Agni est sans borne ; la fumée (du sacrifice) forme sa bannière ; son éclat est immense. Qu’il reçoive avec faveur nos prières et nos offrandes !

12. Qu’il prête l’oreille à nos chants, cet Agni qui remplit tout de sa splendeur, qui est l’étendard des dieux, qui, comme un roi, brille par sa richesse.

13. Adoration aux grands dieux ; adoration aux dieux enfants ; adoration aux dieux jeunes ; adoration aux dieux âgés. Nous offrons aux dieux tous les sacrifices que nous pouvons. Ô dieux, (il dépend de vous) que l’hommage dû à vos bontés ne soit jamais interrompu.


HYMNE IX.

À Indra, aux instruments du sacrifice, par Sounahsépa.

(Mètres : Anouchtouth et Gâyatrî.)

1. Dans cet endroit où s’élève une pierre à la base profonde pour recevoir les libations, Indra, viens boire le jus préparé dans le mortier[137].

2. Dans cet endroit où, pareils à deux djaghanas[138], figurent les deux bassins destinés au soma, Indra, viens boire le jus préparé dans le mortier.

3. Dans cet endroit où la mère de famille entre et sort avec empressement[139], Indra, viens boire le jus préparé dans le mortier.

4. Dans cet endroit où l’on passe une lanière autour du bâton (de l’aranî)[140], comme une rêne au col d’un cheval fougueux, Indra, viens boire le jus préparé dans le mortier.

5. Quelle que soit l’œuvre à laquelle on t’emploie dans chaque maison, ô mortier ! résonne d’une manière éclatante, tel que le tambour des vainqueurs.

6. Ô pilon[141] ! à ton extrémité l’air souffle avec force. Ô mortier ! prépare le breuvage d’Indra !

7. Ô mortier ! ô pilon ! instruments du sacrifice, vous qui apprêtez les mets (des dieux), séparez-vous, unissez-vous comme les mâchoires[142] qui broient la nourriture.

8. Nobles instruments de bois[143], avec ces nobles faiseurs de soma vous nous préparez aujourd’hui pour Indra une boisson aussi douce que le miel.

9. Toi, (Haristchandra)[144], emporte le soma tombé dans le bassin ; verse-le sur le filtre, et que la peau de vache le reçoive[145].


HYMNE X.

À Indra, par Sounahsépa.

(Mètre : Panctî.)

1. (Divinité) sincère et amie du soma, nous sommes comme frappés de malédiction ; mais, Indra, toi qui es riche, donne-nous la renommée en nous accordant par milliers des vaches et de superbes chevaux.

2. (Dieu) à la noble face[146], maître des offrandes, compagnon de Satchî[147], à toi la puissance ! Indra, toi qui es riche, donne-nous la renommée en nous accordant par milliers des vaches et de superbes chevaux.

3. Endors les deux funestes jumelles (messagères d’Yama)[148] ; qu’elles reposent sans s’éveiller. Indra, toi qui es riche, donne-nous la renommée en nous accordant par milliers des vaches et de superbes chevaux.

4. Qu’ils dorment, ceux qui ne nous veulent que du mal ! noble héros, qu’ils s’éveillent, les amis qui désirent notre bien ! Indra, toi qui es riche, donne-nous la renommée en nous accordant par milliers des vaches et de superbes chevaux.

5. Indra, frappe le méchant qui, comme l’une, ose élever pour te louer une voix odieuse. Indra, toi qui es riche, donne-nous la renommée en nous accordant par milliers des vaches et de superbes chevaux.

6. Que le vent pousse au loin l’orage ; qu’il le détourne de nous, et le fasse tomber sur la forêt. Indra, toi qui es riche, donne-nous la renommée en nous accordant par milliers des vaches et de superbes chevaux.

7. Détruis tout ce qui élève la voix autour de nous ; donne la mort à l’ennemi qui menace notre tête. Indra, toi qui es riche, donne-nous la renommée en nous accordant par milliers des vaches et de superbes chevaux.


HYMNE XI.

À Indra, aux Aswins et à l’Aurore, par Sounahsépa.

(Mètres : Gâyatrî et Trichtoubh.)

1. Comme on remplit un large réservoir, comblez Indra, le grand Satacratou, d’offrandes et de libations.

2. (L’eau) coule dans la vallée ; de même Indra vient (naturellement) vers ces cent breuvages, vers ces mille mets préparés avec soin.

3. Ces (offrandes) font la joie de ce (dieu) puissant ; son vaste sein les reçoit et les contient, comme la mer (renferme les ondes).

4. Ces libations sont pour toi ; viens à nous de même que la colombe vient à sa compagne, et accueille nos prières.

5. Maître des richesses, héros que nos chants élèvent, ô toi que nous célébrons, à ta puissance ajoute la bonté et la justice !

6. Lève-toi, Satacratou, pour nous secourir dans ce combat. Notre reconnaissance n’oubliera pas de t’invoquer encore.

7. Dans toutes les circonstances, dans tous les combats, c’est le puissant Indra que nous appelons à notre secours, nous qui sommes ses amis.

8. S’il entend notre appel, qu’il nous soutienne par mille secours, (qu’il nous fortifie) par de nombreux aliments.

9. J’invoque le dieu fort qui de son antique (et céleste) séjour vient visiter les hommes, lui qu’autrefois invoqua aussi mon père.

10. Toi que tous chérissent et appellent, toi notre ami et notre refuge, nous te louons ; (sois favorable) à ceux qui chantent (ta gloire).

11. (Dieu) armé de la foudre, et ami, comme nous, du soma ; toi qui nous rends amour pour amour, (nous t’invoquons pour obtenir) des vaches (fécondes).

12. Qu’il en soit ainsi, (dieu) armé de la foudre, (dieu) ami du soma, et notre protecteur. Comble les désirs de tes serviteurs.

13. Par la faveur d’Indra, qui partage notre bonheur, que nos (vaches) soient fécondes et robustes ; qu’elles fassent notre joie, et nous donnent une nourriture abondante.

14. Terrible (Indra), que les autres dieux, heureusement disposés par toi, non moins que toi sensibles à nos louanges, soient pour nous comme l’axe qui soutient et fait tourner les roues du char !

15. Tu es déjà pour nous, Satacratou, cet axe bienfaisant ; ce que peuvent désirer tes panégyristes, tu le leur accordes en récompense de leurs offrandes.

16. Au milieu des hennissements (des chevaux), des cris, des souffles haletants, Indra gagne de (glorieuses) dépouilles. Fort et généreux, que (ce dieu) nous donne un char d’or ; qu’il nous donne les biens dont il peut disposer !

17. Venez, bienfaisants Aswins, et que nos offrandes nous fassent obtenir de vous des chevaux, des vaches, de l’or.

18. Ô bienfaisants Aswins, un même char, un (char) immortel vous transporte à travers l’océan (de l’air).

19. De ce char une roue touche la crête de la (montagne) inabordable, l’autre roule dans le ciel[149].

20. Aurore immortelle, amie de la louange, quel mortel est (aujourd’hui) l’objet de ta prédilection ? Brillante (déesse), qui viens-tu visiter ?

21. Vive et légère, merveilleuse par tes couleurs, resplendissante, de loin ou de près nous ne pouvons manquer de t’admirer.

22. Fille du ciel, invitée par nos offrandes, viens, et apporte-nous la richesse.


HYMNE XII.

À Agni, par l’Angiras Hiranyastoupa.

(Mètre : Trichtoubh.)

1. Agni, tu as été l’antique Richi Angiras[150] ; Dieu, tu es l’heureux ami des autres dieux. Dans ton œuvre sainte sont nés les Marouts, sages, agissant avec prudence, et chargés d’armes brillantes.

2. Ô Agni, toi le premier et le plus grand des Angiras, (dieu) sage, tu ornes les cérémonies divines ; tu es né de deux mères[151] ; puissant et raisonnable, pour le bien de l’homme et des mondes, tu reposes partout dans la nature.

3. Agni, montre-toi d’abord à Mâtariswan ; qu’il vienne avec respect te donner des forces ;[152]. Que le ciel et la terre soient illuminés ; choisi pour notre sacrificateur, porte notre offrande. Ô toi, notre refuge, exerce ta haute fonction !

4. Agni, c’est toi qui as révélé à Manou[153] la région du ciel, toi qui as été généreux pour le généreux Pouroûravas[154]. Quand du sein de tes parents tu as été extrait par le frottement[155], on t’a porté d’abord du côté de l’orient, puis du côté opposé[156].

5. Bienfaisant Agni, auteur de notre prospérité, tu es digne d’être célébré par celui qui, élevant la coupe sacrée, connaît la vertu des invocations et des prières. Agni, tu es la vie, tu es le protecteur de l’homme.

6. Agni, (dieu) sage, tu places dans la bonne voie l’homme qui s’égarait dans la mauvaise. Dans ces rencontres où le combat s’engage, où le guerrier va recueillir un heureux butin, c’est par toi que quelques hommes triomphent de la multitude.

7. Agni, tu entretiens chaque jour le mortel qui t’honore dans une espèce d’immortelle abondance ; ton sage serviteur obtient de toi le bonheur et la nourriture qu’il désire dans les deux espèces[157].

8. Agni, pour prix de nos louanges, donne au père de famille qui t’implore la gloire et la richesse ; à nos hommages nous ajouterons des hommages nouveaux. Ciel et Terre, protégez-nous, avec les autres dieux.

9. Agni, toi (qui brilles) à côté des parents qui t’ont produit[158], dieu vigilant et irrépréhensible parmi les dieux, toi qui t’es donné une forme sensible, sois-nous favorable ; accueille le sacrifice du père de famille. Toi qui possèdes la fortune, tu peux bien conférer les richesses.

10. Agni, tu es pour nous un défenseur prudent et un père ; à toi nous devons la vie, nous sommes ta famille. En toi sont les biens par centaines, par milliers. (Dieu) invincible, tu es la force des héros et le gardien des sacrifices.

11. Agni, alors que tu pris une forme humaine, pour le bien de l’humanité, les Dévas te donnèrent comme général à Nahoucha. Quand le fils de notre (premier) père naquit, ce sont eux aussi qui choisirent Ilâ pour commander aux enfants de Manou[159].

12. Divin Agni, par tes secours protège notre fortune et nos personnes ! Tu mérites nos louanges. Tu conserves les vaches du fils de ton fils[160] toujours attentif à perpétuer ton culte.

13. Agni, tu étends ta protection sur le serviteur constant dans ses hommages. Tes quatre yeux[161] brillent et s’allument. Tu chéris la prière du prêtre qui te présente l’holocauste ; car (tu es) bon et clément.

14. Agni, tu aimes (et dispenses) cette richesse enviée qui est le premier vœu de ton chantre respecté. Protecteur prévoyant du faible, tu reçois le nom de père ; ta haute sagesse gouverne depuis l’enfant jusqu’aux (habitants des) régions célestes.

15. Agni, l’homme qui se répand en pieuses générosités, tu le couvres de tout côté comme d’une épaisse cuirasse. Le (père de famille) qui, aux agréments qu’il prépare à ses hôtes, aux doux aliments qu’il leur donne, ajoute encore le sacrifice d’une victime vivante[162], ne peut être comparé qu’au ciel[163].

16. Agni, si nous avons commis une faute, si nous avons marché loin de toi, pardonne-nous. Tu es un parent, un père, un défenseur prévoyant. En faveur des mortels qui offrent le soma, tu apparais pour accomplir le sacrifice.

17. Agni, toi qui fus Angiras, (dieu) saint, viens en ces lieux avec ces sentiments qu’avaient autrefois Manou, Angiras, Yayâti[164] et les anciens. Viens ici, amène la troupe céleste, fais-les placer sur le cousa, et consomme le sacrifice.

18. Agni, que ta grandeur croisse par l’effet de cet hymne que nous t’adressons suivant nos forces et notre science ! Conduis-nous à la richesse, et avec la sagesse accorde-nous aussi l’abondance.


HYMNE XIII.

À Indra, par Hiranyastoûpa.

(Mètre : Trichtoubh.)

1. Je veux chanter les antiques exploits par lesquels s’est distingué le foudroyant Indra. Il a frappé Ahi[165], il a répandu les ondes sur la terre, il a déchaîné les torrents des montagnes (célestes).

2. Il a frappé Ahi, qui se cachait au sein de la montagne (céleste) ; (il l’a frappé) de cette arme retentissante formée pour lui par Twachtri[166] ; et les eaux, telles que les vaches qui courent vers leur étable, se sont précipitées vers la mer.

3. Indra, impétueux comme le taureau, se désaltérait de notre soma ; pendant les Tricadrous[167] il buvait de nos libations. Cependant Maghavan[168] a pris la foudre qu’il va lancer comme une flèche ; il a frappé le premier-né des Ahis.

4. Indra, quand ta main a frappé le premier-né des Ahis, aussitôt les charmes de ces magiciens sont détruits ; aussitôt tu sembles donner naissance au soleil, au ciel, à l’aurore. L’ennemi a disparu devant toi.

5. Indra a frappé Vritra, le plus nébuleux de ces ennemis. De sa foudre puissante et meurtrière, il lui a brisé les membres, tandis qu’Ahi, tel que l’arbre attaqué par la hache, gît étendu sur la terre.

6. Comme s’il n’avait point de rival à craindre, enivré d’un fol orgueil, (Vritra) osait provoquer le (dieu) fort et victorieux, qui a tant de fois donné la mort. Il n’a pu éviter un engagement meurtrier, et l’ennemi d’Indra d’une poussière humide a grossi les rivières.

7. Privé de pieds, privé de bras, il combattait encore Indra. Celui-ci le frappe de sa foudre sur la tête, et Vritra, cet eunuque qui affectait les dehors de la virilité, tombe déchiré en lambeaux.

8. Ainsi qu’une digue rompue, il est couché par terre, et recouvert de ces eaux dont l’aspect charme notre cœur. Ces ondes, que Vritra embrassait de toute sa grandeur, foulent et pressent maintenant Ahi terrassé.

9. La mère de Vritra[169] s’abaisse ; Indra lui porte par dessous un coup mortel ; la mère tombe sur le fils. Dânou est étendue comme la vache avec son veau.

10. Le corps de Vritra, ballotté au milieu des airs agités et tumultueux, n’est plus qu’une chose sans nom, que submergent les eaux. Cependant, l’ennemi d’Indra est enseveli dans le sommeil éternel.

11. Ces ondes, vaches (célestes), avaient été comme emprisonnées par Pani[170], elles étaient devenues les épouses d’un vil ennemi, et confiées à la garde d’un pasteur tel qu’Ahi. Indra tue Vritra, et ouvre la caverne où les eaux se trouvaient enfermées.

12. Telle la queue du cheval (pour les insectes qui l’attaquent), tel tu étais alors, divin Indra, pour cet (ennemi) qui, dans ce duel (terrible), te frappait aussi de son arme. Vainqueur héroïque, tu reprenais les vaches célestes, tu venais jouir de nos libations reconnaissantes, tu donnais carrière aux sept fleuves[171].

13. Ni l’éclair, ni la foudre, ni la pluie, ni le tonnerre lancé par son ennemi, au moment où Indra et Ahi combattaient, rien ne put arrêter Indra ; Maghavan triompha des efforts de ses adversaires.

14. Pouvais-tu croire qu’un autre que toi fût capable de tuer Ahi, quand tu sentis, avant de lui donner la mort, la crainte entrer dans ton cœur ? (C’est encore par amour pour nous que tu frémis de terreur, quand tu traversas les airs, comme l’épervier, au-dessus de ces quatre-vingt-dix-neuf[172] torrents formés par les eaux.

15. Indra, roi du monde mobile et immobile, des animaux apprivoisés et sauvages, (dieu) armé de la foudre, est aussi roi des hommes. Comme le cercle d’une roue en embrasse les rayons, de même Indra embrasse toutes choses.




LECTURE TROISIÈME

HYMNE I.

À Indra, par Hiranyastoûpa.

(Mètre : Trichtoubh.)

1. Venez, allons vers Indra, (qui nous enverra) les vaches (célestes) que nous désirons ; il peut faire le bonheur des hommes sagement pieux. (Dieu) invulnérable, il nous fait goûter tous les plaisirs de l’abondance que procurent ces vaches (merveilleuses).

2. De même que l’épervier vole vers son nid, moi je me rends vers ce maître généreux et invincible, et j’honore par mes justes louanges cet Indra digne de tous les hommages de ses serviteurs.

3. Entouré de son armée[173] il a pris son carquois et ses flèches. Il est pour nous le père de famille[174] qui conduit ses vaches là où il veut. Indra, toi qui donnes la richesse, montre-toi généreux ; ne sois pas pour nous un marchand.

4. Et voilà pourquoi tu as frappé de ton arme (Vritra), le brigand[175] chargé de butin ; Indra, seul tu l’as attaqué, les Marouts étant près de toi. Sous les flèches de ton arc, les Sanacas[176] ont trouvé la mort de mille manières ; ils ont péri, ces êtres qui ne connaissent pas les sacrifices.

5. Ces impies, qui osaient lutter contre des (dieux) amis des sacrifices, tournèrent honteusement la tête, ô Indra, quand du haut des airs, à la face du ciel et de la terre, monté sur ton char, ferme, terrible, tu soufflas sur ces misérables.

6. Ils avaient attaqué l’armée du grand Indra ; les religieux[177] Angiras priaient en détresse. Tels que de vils eunuques qui voudraient combattre contre un héros, vaincus et troublés, (nos ennemis) furent précipités, et s’enfuirent devant Indra.

7. Et toi, Indra, sur les frontières de ton brillant empire tu combattais ces ennemis, qui, après avoir ri, pleuraient leur folie. Du haut du ciel, tes feux venaient consumer le brigand. Tu protégeais celui qui t’offre des hymnes et des libations.

8. Brillants d’or et de pierreries, nos cruels adversaires couvraient la terre, et s’enorgueillissaient de leurs forces. Ils n’ont pu surpasser Indra, qui les a vus s’évanouir à l’éclat du soleil.

9. Indra, tu embrasses également par ta grandeur et la terre et le ciel. (Excité) contre ces mécréants par nos chants respectueux, Indra, tu as soufflé sur le brigand.

10. Le puissant Indra a touché de sa foudre ces (nuages) qui du ciel n’arrivaient pas à la surface de la terre, et qui de leurs voiles magiques semblaient envelopper (le brigand) riche de ces dépouilles. De son trait lumineux, il a fait jaillir le lait des vaches (célestes).

11. Les ondes enlevées à Vritra coulaient au gré de nos souhaits. Cependant (l’impie) reprenait ses forces au sein des rivières. Indra, poursuivant son dessein, a d’un trait vigoureux, durant plusieurs jours, détruit son espoir.

12. Il a brisé la porte de cette caverne, où (Vritra) tenait les eaux enfermées avec lui. Indra a déchiré Souchna[178] aux cornes (menaçantes). Telle fut, ô Maghavan, ta rapidité, telle fut ta vigueur, quand de ta foudre tu frappas ton ennemi avide de combattre !

13. Le trait du dieu tomba sur ces (faibles) adversaires ; fort et acéré, il brisa leurs villes (aériennes)[179]. La foudre atteignit Vritra, et Indra, à la vue de son rival terrassé, livra son âme à la joie.

14. Tu as sauvé Coutsa[180], ton favori. Tu as sauvé dans les combats le vaillant Dasadyou[181]. La poussière soulevée par le pied de tes coursiers s’élevait jusqu’au ciel, (au moment où) le fils de Switrâ se dressait pour lutter contre des héros.

15. Tu l’as sauvé ce vaillant fils de Switrâ, ô Maghavan, lorsque, fort de ta protection, il marchait sur les eaux pour regagner la terre. Daigne aussi faire retomber la douleur et la honte sur nos ennemis, qui depuis longtemps veillent ici pour nous surprendre !


HYMNE II.

Aux Aswins, par Hiranyastoûpa.

(Mètre : Trichtoubh.)

1. (Dieux) intelligents, venez aujourd’hui trois fois[182] vers nous. Merveilleuse est votre course, ô Aswins ! (merveilleux sont) vos bienfaits. Vous êtes liés dans votre carrière comme le jour et la nuit. Les sages vous arrêtent pour vous rendre hommage.

2. Trois roues soutiennent votre char chargé de doux aliments, quand vous venez près de la bien-aimée de Soma[183]. C’est là un mystère connu de tous. Sur ce char s’élèvent trois poteaux d’appui. Âswins, vous venez trois fois la nuit et trois fois le jour.

3. Dans la même journée, trois fois vous daignez couvrir nos fautes du voile (de l’indulgence) ; trois fois aujourd’hui versez une douce rosée sur notre sacrifice ; trois fois, ô Aswins, le soir, (à midi) et le matin, recevez nos offrandes, et faites-les fructifier pour nous.

4. Trois fois visitez notre demeure, venez trois fois vers des hommes pieux, trois fois vers des hommes dignes de votre protection ; faites-leur sentir trois fois votre présence. Apportez-nous trois fois l’heureux fruit de nos sacrifices ; ô Aswins, trois fois répandez sur nous l’abondance, telle qu’une pluie féconde.

5. Ô Aswins, trois fois amenez-nous la richesse ! Venez trois fois partager le sacrifice destiné aux dieux. Trois fois agréez nos prières. Trois fois nous vous demandons le bonheur, trois fois la nourriture. Trois fois la fille du soleil[184] monte sur votre char à trois roues.

6. Ô Aswins, trois fois vous nous donnez les médicaments célestes, trois fois les médicaments terrestres, trois fois aussi les médicaments qui viennent des eaux[185]. Maîtres de la prospérité, donnez à mon fils[186] la fortune de Samyou[187] ; (donnez-lui) cette santé qui résulte de l’harmonie des trois humeurs (corporelles)[188].

7. Trois fois par jour, ô Aswins, amis de nos sacrifices, venez vous asseoir sur notre cousa, attaché par un triple lien. Trois fois, ô (dieux) véridiques, de la région lointaine[189] (qui vous possède), accourez, sur votre char, vers ces trois (autels dressés par nous)[190] ; soyez comme le souffle vital qui anime les corps.

8. Ô Aswins, (venez) trois fois avec ces ondes qui sont les mères des sept rivières[191]. Trois coupes (sont disposées pour vous) ; trois fois l’holocauste doit avoir lieu. Au-dessus des trois mondes, vous poursuivez votre carrière, et, les jours comme les nuits, vous gardez la voûte céleste.

9. Où sont les trois roues sur lesquelles votre char roule (dans les trois mondes)[192] ? où sont les trois sièges unis ensemble ? Quand voulez-vous, ô (dieux) véridiques, atteler à votre char cet âne robuste, qui vous amène au lieu du sacrifice ?

10. (Dieux) véridiques, approchez : voici le moment de l’holocauste. Mouillez vos lèvres avides à ce doux breuvage. Avant l’aurore, Savitri amène au feu du sacrifice votre char magnifique, et tout brillant de notre beurre sacré.

11. Ô Aswins, (dieux) véridiques, venez avec les trente-trois dieux[193] goûter ici de nos douces libations. Prolongez notre vie, détruisez nos péchés, écartez nos ennemis, et restez toujours avec nous.

12. Ô Aswins, sur votre char qui parcourt les trois mondes, apportez avec vous la richesse ; (donnez-nous) une forte lignée. Je vous implore ; écoutez-moi, venez à notre secours, et dispensez-nous l’abondance et la prospérité.


HYMNE III.

À Agni et autres dieux, par Hiranyastoûpa.

(Mètres : Trichtoubh et Djagatî.)

1. J’invoque d’abord Agni, et lui demande sa bénédiction. J’appelle à notre aide Mitra et Varouna. J’invoque la nuit qui enveloppe le monde : je demande le secours du divin Savitri.

2. Le divin Savitri, revenu vers nous sous sa face ténébreuse[194], établit chacun à son poste, dieux et mortels. Il apparaît sur son char d’or, et de son regard embrasse les mondes.

3. Le dieu, ami de nos sacrifices, suivra deux routes, l’une ascendante, l’autre descendante ; il arrive, traîné par deux chevaux brillants. Le divin Savitri vient de la région lointaine (où il a séjourné), pour détruire tout ce qui est mal.

4. Sur ce large char qui s’avance vers nous, tout brillant d’ornements d’or, (attelé de coursiers) que presse un aiguillon d’or, Savitri est monté, (Savitri) resplendissant de mille lumières, digne de nos hommages, possédant la vertu de repousser ses rayons ténébreux[195].

5. Ses (chevaux) noirs, (pendant la nuit), allongent leurs pieds blancs ; et, sur un char dont le train est d’or, ils amènent la lumière aux hommes ; devant le char du divin Savitri se lèvent toujours et les mortels, et tous les êtres créés.

6. Des trois mondes[196] deux appartiennent au domaine de Savitri ; le troisième est la demeure d’Yama et le séjour des morts. Comme le char est soutenu par l’essieu, tout ce qui est immortel est supporté par le soleil. C’est là une vérité que chacun peut proclamer.

7. Le noble (dieu qu’on appelle) Asoura[197] s’élève par un mouvement insensible, et vient, comme porté sur des ailes, se révéler aux cieux. Où est en ce moment[198] le soleil ? qui peut le savoir ? quelle région éclaire son rayon ?

8. Savitri, le dieu à l’œil d’or, éclaire les huit régions de la terre[199] les êtres qui habitent les trois mondes et les sept rivières[200]. Il vient, distribuant ses largesses à ses serviteurs.

9. Savitri, (dieu) à la main d’or[201] (dieu) clairvoyant, s’avance entre le ciel et la terre. Il tue la douleur, il s’unit (au disque) du soleil[202], ou traverse l’air sous sa forme ténébreuse[203].

10. Que le noble Asoura, à la main d’or, qui fait notre bonheur et possède la richesse, vienne vers nous. Éloignant les Rakchasas et les mauvais génies, qu’il soit pour nous un dieu toujours présent, chaque matin célébré par nos hymnes.

11. Ô Savitri, par ces routes antiques et solides, (ces routes) faciles et dépourvues de poussière, que tu suis dans le ciel, viens aujourd’hui pour nous garder et daigne, ô dieu, converser avec nous.


HYMNE IV.

À Agni par Canwa, fils de Ghora.

(Mètre : Vrihatî.)

1. Par des hymnes solennels, nous implorons, au nom de l’assemblée religieuse (ici réunie), le grand Agni, que tant d’autres invoquent comme nous.

2. Agni, augmente la force des mortels ! Nous t’honorons par des holocaustes ; sois-nous aujourd’hui favorable, sois notre protecteur, (ô dieu) qui possèdes la richesse !

3. Nous te choisissons pour être le messager (des dieux) et le sacrificateur, toi qui renfermes tous les biens. Tes feux grandissent et s’étendent : tes rayons touchent au ciel.

4. Pour les dieux Varouna, Mitra, Aryaman, s’allument les feux de leur antique messager. Le mortel qui t’honore, ô Agni, obtient par toi toute l’opulence (qu’il souhaite).

5. Agni, tu es pour les mortels un heureux messager, un sacrificateur, un gardien du foyer domestique, une source de joie. Toutes les œuvres fortes et constantes qu’accomplissent les Dévas se font par ton concours.

6. Par toi, Agni, toujours jeune et fortuné, se consomment tous les holocaustes ; sois-nous favorable et aujourd’hui et dans l’avenir, et, par les sacrifices que nous offrons, augmente la force des dieux.

7. C’est Agni surtout, (Agni) brillant de son propre éclat, que les hommes viennent honorer par leurs hommages ; ce sont les feux d’Agni qu’ils allument par leurs offrandes, quand ils veulent être vainqueurs de leurs ennemis.

8. (C’est avec lui que les autres dieux) ont vaincu Vritra et lui ont donné la mort ; (avec lui qu’ils) ont étendu le ciel, la terre et les eaux, pour en faire le domicile (des êtres). Qu’(Agni) soit pour Ganwa, qui l’invoque, un riche bienfaiteur ; (qu’il le dirige vers la richesse) comme le cheval hennissant (porte le guerrier) vers les vaches (de ses ennemis).

9. Prends place (sur notre cousa) ; tu es noble, grand, et digne de nos hommages. Brille donc, Agni, le bien-aimé des dieux, et enveloppe-toi d’une fumée éclatante et remarquable !

10. Toi que les Dévas ont allumé ici-bas en faveur de Manou, objet précieux du sacrifice et maître des holocaustes ; toi qui nous réjouis par le don de la richesse, et qu’a fêté le Canwa Médhyâtîthi[204] ; toi qu’honorent le généreux (père de famille) et ceux qui chantent des hymnes !

11. Cet Agni, que le Canwa Médhyâtîthi alluma jadis, nos offrandes viennent de le faire briller au foyer du sacrifice. Que nos chants s’élèvent pour célébrer la grandeur d’Agni !

12. Toi qui reçois nos offrandes, comble-nous de biens ; car tu es l’ami des dieux, Agni. Tu es le roi de l’abondance la plus renommée. Fais notre bonheur, toi qui as la puissance.

13. Lève-toi donc, et sois notre protecteur, non moins que le divin Savitri. Lève-toi pour nous accorder l’abondance, à nous qui, par les hymnes de nos prêtres, invoquons ton appui.

14. Lève-toi, et sois notre guide pour nous sauver du mal. Brûle tous nos ennemis, fais que nous nous levions également pour agir et pour vivre. Fais agréer aux dieux nos sacrifices.

15. (Dieu) jeune et resplendissant, Agni, sauve-nous du Râkchasa ; sauve-nous du méchant, étranger à toute générosité ; sauve-nous de l’ennemi cruel, et de celui qui veut notre mort.

16. Comme (le guerrier) armé d’une massue, accable de tout côté nos vils adversaires, ô toi qui es entouré de rayons brûlants ! Ne souffre pas que nous ayons pour maître le mortel qui nous hait, et qui aiguise ses traits contre nous.

17. Ce n’est pas (en vain) qu’on a demandé à Agni la richesse qui procure la force. Agni a donné le bonheur à Canwa ; il a sauvé Médhyâtîthi et ses amis ; il a comblé de ses biens (le mortel) qui le glorifie.

18. Nous appelons à notre sacrifice, de la région lointaine (où ils séjournent maintenant), Tourvasa, Yadou et Ougradéva. Qu’ils viennent avec Agni ; que ce dieu, vainqueur du Dasyou, amène aussi Navavâstwa, Vrihadratha et Tourvîti[205].

19. Agni, c’est Manou qui, pour le bonheur de race à jamais bénie, a constitué ton foyer lumineux. Tu as lui pour Canwa, ô (dieu) né au foyer du sacrifice ; et arrosé (du beurre consacré), tu obtiendras toujours le respect des mortels.

20. Les rayons d’Agni sont brillants, forts, redoutables. Il est difficile d’en approcher. Daigne réduire en cendres les mauvais génies[206], doués d’une force (funeste), et tous les (ennemis de notre bonheur).


HYMNE V.

Aux Marouts, par Canwa.[207].

(Mètre : Gâyatrî.)

1. Enfants de Canwa, célébrez la puissance des Marouts que transporte un char brillant, (puissance) rapide et inattaquable dont vous ressentez les effets.

2. Ils viennent de naître, brillants de leur propre éclat. (Voyez-vous) leurs armes, leurs parures, leur char traîné par des daims ? (entendez-vous) leurs clameurs ?

3. Écoutez, c’est le bruit du fouet qu’ils tiennent dans leurs mains ; c’est le bruit qui, dans le combat, anime le courage.

4. À cette troupe (divine), qui détruit vos ennemis, noble, forte et glorieuse, offrez la part d’hymnes et de sacrifices que lui accordent les Dévas.

5. Loue donc cette puissance des Marouts, invulnérable et rapide, qui règne au milieu des vaches (célestes), et ouvre avec force (leurs mamelles pour en faire couler) le lait[208].

6. Parmi vous qui remuez si puissamment le ciel et la terre, qui agitez celle-ci comme la cime (d’un arbre), quel est le plus vigoureux ?

7. Contre votre marche impétueuse et terrible, l’homme ne peut résister ; les collines et les montagnes s’abaissent devant vous.

8. Sous vos pas redoutables, la terre tremble de crainte, telle qu’un roi accablé par l’âge.

9. Le lieu de votre naissance est ferme et stable[209] ; vous pouvez, du sein de votre mère, vous élancer, tels que des oiseaux ; car, des deux côtés, est un élément solide.

10. Ces (dieux) répandent le son comme on répand la libation. Leur souffle étend les voies du ciel ; (l’eau tombe), et la vache (en s’y désaltérant) y entre jusqu’aux genoux.

11. (Voyez-vous) ce long et large (nuage), fils de l’onde (qui s’y amoncelle) ? (Il semble) invulnérable. (Les Marouts) savent le chemin par lequel on arrive jusqu’à lui pour l’ébranler.

12. Ô Marouts, puisque vous avez la force, faites-la sentir aux hommes, faites-la sentir aux collines.

13. Quand les Marouts sont en marche, le chemin retentit de leur voix : chacun les entend.

14. Accourez, portez ici vos pas rapides. Les enfants de Canwa vous attendent avec leurs offrandes ; ici vous serez satisfaits.

15. Agréez notre sacrifice, car nous vous sommes dévoués. Daignez nous assurer une longue existence.


HYMNE VI.

Aux Marouts, par Canwa.

(Mètre : Gâyatrî.)

1. Ô vous qui aimez nos hymnes, qui vous plaisez sur notre cousa, quand viendrez-vous nous prendre dans vos bras, comme un père (prend) son enfant ?

2. Où êtes-vous maintenant ? Quand arriverez-vous ? Venez de la terre comme du ciel. (N’entendez-vous pas les hommes) soupirer après vous, comme les vaches (après le pâturage) ?

3. Ô Marouts, où sont les biens nouveaux (que nous allons tenir de vous) ? où sont vos trésors ? où sont toutes vos félicités ?

4. Fils de Prisni, quand vous ne seriez pas immortels, (faites toutefois) que votre panégyriste jouisse d’une longue vie.

5. Que l’homme qui chante vos louanges ne soit pas comme la (faible) biche sur le gazon ; qu’il n’aille pas tristement fouler le chemin d’Yama.

6. Que jamais Nirriti[210] si redoutable par sa force, Nirriti l’insurmontable, ne vienne nous frapper ; qu’elle tombe avec la soif (qu’elle a causée).

7. Oui, c’est la vérité : ces (dieux) forts et resplendissants, dont Roudra est le chef, peuvent, sur un sol desséché, faire tomber la pluie sans l’accompagner de vent.

8. Tel que la vache, le tonnerre mugit ; comme le veau est suivi de sa mère, (les Marouts sont suivis) de la foudre, et par eux la pluie sort (du nuage).

9. Les Marouts, même pendant le jour, forment une espèce de nuit avec le nuage qui transporte les ondes et qui fond sur la terre.

10. Le bruit des Marouts a retenti, et aussitôt toute demeure sur la terre, les hommes même, ont tremblé.

11. Ô Marouts, dont la main est forte et la marche infatigable, venez ici près de ces rivières aux bords agréables.

12. Que vos roues, que vos chars, que vos chevaux soient fermes ; que leurs harnais soient éclatants de lumière.

13. Allons, élève la voix pour célébrer Agni, (qui est) Brahmanaspati[211], et qui ne brille pas moins que Mitra.

14. Que les vers harmonieux sortent de ta bouche, et se répandent comme une (douce) pluie. Chante l’hymne religieux.

15. Célèbre la troupe des Marouts, brillante, digne d’éloges et de respects. Qu’ici, dans ce sacrifice, ils reçoivent nos hommages.


HYMNE VII.

Aux Marouts, par Canwa.

(Mètre : Vrihatî.)

1. Ô Marouts, lorsque de la région lointaine (où vous habitez), comme un rayon lumineux, vous lancez votre souffle puissant, quel est l’homme dont le sacrifice, dont l’hymne vous attire ? quelle maison, ô dieux terribles, quel mortel visitez-vous ?

2. Que vos traits soient solides pour repousser nos ennemis, fermes pour les arrêter ; que votre force soit digne de louange, et ne ressemble pas à celle d’un mortel qui ne sait que tromper.

3. (Dieux) puissants, vous renversez ce qui est solide, vous soulevez ce qui est lourd ; et c’est ainsi que vous enlevez les arbres de la forêt ou les flancs de la montagne.

4. Partout vainqueurs, on ne vous connaît d’ennemis ni par delà le ciel, ni sur la terre. Enfants de Roudra, que votre force soit puissante par la concorde, et la victoire vous est assurée.

5. Ils ébranlent les montagnes, ils arrachent les rois de la forêt. Ô dieux Marouts, toute votre troupe s’élance, comme si l’ivresse exaltait vos esprits.

6. À vos chars vous avez attelé des daims ; l’avant-train de ces chars est rouge. La terre entend le bruit de votre approche, et les mortels ont frémi.

7. Compagnons de Roudra, nous implorons votre prompt secours en faveur de notre famille. Venez-nous en aide, et (protégez) un Canwa tremblant, comme vous l’avez fait autrefois.

8. Suscité par votre colère ou par la vengeance de quelque mortel, un (ennemi) puissant nous attaque. Privez-le de tout aliment, de toute vigueur, des secours qu’il attend de vous.

9. Dieux prudents et dignes de nos sacrifices, vous avez accordé toute votre protection à Canwa. Accordez-nous aussi, ô Marouts, tous vos secours ; soyez avec nous, comme l’éclair est avec la pluie.

10. (Dieux) pleins de libéralité et de force, vous possédez toute la vigueur, toute la puissance (désirable). Marouts, à l’ennemi passionné de votre poëte, envoyez, comme une flèche, un ennemi (qui le frappe).


HYMNE VIII.

À divers dieux, par Canwa.

(Mètre : Vrihatrî.)

1. Lève-toi, Brahmanaspati[212]; pleins de dévotion, nous venons à toi. Que les Marouts s’approchent avec leurs riches trésors ; et toi, Indra, sois présent, et prends ta part (de nos libations).

2. Ô fils de la force[213], le mortel t’honore pour obtenir les richesses qu’il désire. Marouts, que l’homme qui vous célèbre soit par vous riche en famille et en chevaux !

3. Vienne Brahmanaspati ! vienne la déesse de la parole sainte[214] ! Que les Dévas rendent notre sacrifice puissant, utile aux hommes, et parfait !

4. Il possède une richesse impérissable, (le dieu) qui se montre magnifique envers son panégyriste. C’est pour ce dieu que nous appelons à notre sacrifice Ilâ[215] qui est forte, victorieuse et invulnérable.

5. Brahmanaspati commence[216] une prière mélodieuse, dans laquelle ont une place Indra, Varouna, Mitra, Aryaman, tous les dieux.

6. Prononçons-la donc, dans nos sacrifices, cette prière qui donne le bonheur, et qui est si puissante. Et si vous pouvez vous complaire en nos vœux, dieux forts, que notre hymne tout entier arrive jusqu’à vous !

7. Quel dieu ne viendrait pas au secours de l’homme religieux, au secours de l’homme qui lui a préparé un lit de cousa ? (Voyez ce) père de famille qui se présente avec les prêtres ; sa maison est riche, son intérieur est fortuné.

8. Qu’il possède la puissance[217] ! Aidé de ses royaux protecteurs, (je le vois) abattre ses ennemis, et au milieu de la terreur (du combat) conserver dignement son poste. Il est comme armé de la foudre ; et dans aucune affaire, ni grande ni petite, il ne connaît ni supérieur ni vainqueur.


HYMNE IX.

Aux Adityas, par Canwa.

(Mètre : Gâyatrî.)

1. L’homme que protègent les (dieux) sages, Varouna, Mitra, Aryaman, est promptement vainqueur (de ses ennemis).

2. Il croît à l’abri des attaques de ses adversaires, celui que les dieux défendent, et dont ils sont comme le bras protecteur.

3. Ces royaux amis ouvrent devant leurs favoris les routes embarrassées, et renversent leurs antagonistes ; ils détruisent l’effet de nos fautes.

4. Ô Adityas, pour venir au feu de notre sacrifice, la route est facile et sans obstacles. Votre attente n’y sera pas trompée par de vains apprêts.

5. Puissants Adityas, qu’il aille directement vers vous, le sacrifice offert en votre honneur.

6. Le mortel (que vous aimez) obtient la richesse, toute espèce de biens, de la famille ; il est à l’abri du malheur.

7. Amis, comment célébrerons-nous dignement la gloire de Mitra, d’Aryaman et de Varouna, dont la forme est si grande ?

8. (Ô dieux), je me garderai de vous recommander un homme accoutumé à la violence et aux imprécations ; (je vous présente) un mortel religieux, et je vous entoure de ses offrandes.

9. (Tel que le joueur), qui doit craindre tant que son partenaire tient les quatre dés dans sa main, (celui que je vous recommande) doit être modeste en ses paroles, (placé qu’il est sous le coup de votre disgrâce).


HYMNE X.

À Pouchan, par Canwa.

(Mètre : Gâyatrî.)

1. Ô Poûchan, deviens notre guide sur cette route ; enfant de la libation[218], détourne le mal de devant nos pas ! Ô dieu, sois notre compagnon de voyage !

2. Ô Poûchan, si quelque brigand, pareil à un de ces loups dont il faut se méfier, s’offrait à nous montrer le chemin, éloigne-le de nous !

3. Daigne, loin de notre passage, écarter ce brigand qui assiège les routes, ardent à voler, et méditant le crime !

4. Terrasse et foule sous ton pied le corps palpitant du voleur, quel qu’il soit, qui emploie la violence ouverte aussi bien que la ruse !

5. Poûchan, dieu sage et secourable, nous demandons ton secours, tel que celui que tu as prêté à nos pères !

6. Ainsi, toi qui possèdes tous les biens, toi qui brilles si magnifiquement par tes armes d’or, donne-nous des richesses que nous honorerons par nos libéralités.

7. Éloigne ceux qui s’approchent de nous (pour nous frapper) ; aplanis pour nous les chemins. Poûchan, viens ici participer à notre sacrifice.

8. Conduis-nous dans un bon pâturage. Qu’une nouvelle maladie ne nous attaque pas en route. Poûchan, viens ici participer à notre sacrifice.

9. (Pour nous) sois puissant, sois généreux ; donne-nous de la richesse, de la gloire, une nourriture abondante. Poûchan, viens ici participer à notre sacrifice.

10. Nous ne voulons point offenser Poûchan ; (au contraire), nous le célébrons par nos hymnes. (En récompense), nous attendons les trésors de sa libéralité.


HYMNE XI.

À Roudra[219] et à Soma, par Canwa.

(Mètres : Gâyatrî et Anouchtoubh.)

1. Quand saluerons-nous de nos chants Roudra le sage, le bienfaisant, le fort, l’ami de notre cœur,

2. Afin que Aditi produise pour nous, pour nos troupeaux, nos hommes, nos vaches et nos enfants, tous les biens qui sont du ressort de Roudra ;

3. Afin que Mitra, Varouna, Roudra et tous les dieux, touchés de nos prières, nous favorisent également ?

4. Nous supplions Roudra maître des chants divins, maître des sacrifices ; Roudra, qui envoie la pluie pour guérir nos maux : qu’il nous accorde le bonheur de Samyou[220].

5. Roudra brille tel que l’or, tel qu’un soleil éclatant ; Roudra, le meilleur des dieux et notre refuge.

6. Qu’il répande sa bénédiction sur nos chevaux, nos brebis, nos béliers, nos vaches, nos hommes et nos femmes.

7. Ô Soma[221], accorde-nous la fortune, l’abondance, et la force de cent personnes !

8. Ô Soma, que nul méchant, que nul ennemi n’ait prise sur nous ! ô Indou, donne-nous notre part de prospérité !

9. Ô Soma, viens dans ce foyer, dans cette noble demeure du sacrifice, te joindre (aux prières) qui naissent de toi ! Ô Soma, toi qui es comme le prince immortel (de cette fête), écoute (ces prières) qui célèbrent ta gloire !

HYMNE XII.

À Agni, par Prascanwa, fils de Canwa.

(Mètre : Vrihatî.)

1. Agni, (dieu) immortel surnommé Djâtavédas[222], donne à ton serviteur ces biens divers et solides qu’apporte l’Aurore. Amène avec toi aujourd’hui les dieux que le matin éveille.

2. Agni, tu es le messager chéri (des dieux) ; tu te charges de nos holocaustes, et sur ton char tu transportes nos sacrifices. Compagnon des Aswins et de l’Aurore, accorde-nous cette large opulence qui vient avec la force.

3. En ce jour nous honorons Agni, le messager divin, notre refuge et l’ami des hommes ; (Agni) qui élève son étendard de fumée, qui se répand en lumière, et qui, à l’heure du matin, devient le trésor du sacrifice.

4. Au point du jour j’invoque Agni, qui est le bien de tous ; (Agni) toujours jeune, toujours bon, hôte vénéré, maître chéri ; et je le supplie de me conduire vers les autres dieux.

5. Je chanterai la louange, ô toi qui soutiens constamment le monde, sauveur immortel, sacrificateur, Agni, digne de nos hommages et porteur de nos holocaustes.

6. (Dieu) jeune, toi que célèbre avec raison ton serviteur, toi qu’on vénère avec sollicitude, et dont la langue est flattée de nos douces offrandes, daigne accorder à Prascanwa[223] une longue vieillesse, et honore une race divine.

7. Les hommes allument tes feux, ô sacrificateur dont la bienfaisance est universelle. Agni, que tant d’êtres implorent, hâte-toi d’amener ici les dieux connus par leur sagesse.

8. Avec Savitri, l’Aurore, les Aswins, Bhaga, c’est toi, Agni, que les fils de Canwa invoquent et le matin et le soir. C’est toi dont ils font briller les feux, versant leurs libations ; toi qui dois porter leurs holocaustes et recevoir leurs hommages.

9. Agni, tu es le maître des sacrifices, et un messager pour les mortels. Amène aujourd’hui, pour qu’ils goûtent de nos libations, les dieux fortunés que l’Aurore éveille.

10. Agni, foyer de lumière, et brillant pour tous les yeux, tes clartés ont accueilli les anciennes aurores. Tu es dans nos hameaux un protecteur, un prêtre que Manou a constitué pour nos sacrifices[224].

11. Comme faisait Manou, ô divin Agni, nous te plaçons pour consommer notre offrande, toi, prêtre, sacrificateur ; toi, messager immortel, sage, et rapide.

12. Fidèle à tes amis, quand, pontife rapproché de nous, tu remplis ton office de messager des dieux, alors tes clartés s’élèvent comme les vagues bruyantes de la mer.

13. Agni, toi qui prêtes l’oreille à notre voix, écoute, et fais-toi accompagner des dieux, nos protecteurs ; que Mitra, Aryaman (et les autres) viennent avec le Matin à notre sacrifice, et prennent place sur le cousa.

14. Que les Marouts, bienfaiteurs généreux, entendent notre hymne ; qu’ils reçoivent notre offrande qui fait leur bonheur, et que leur transmet la langue d’Agni ; que Varouna, ferme en ses desseins, boive nos libations, et (se présente) avec les Aswins et l’Aurore.


HYMNE XIII.

À Agni, par Prascanwa.

(Mètre : Anouchtoubh.)

1. Ô Agni, honore en ce jour, par tes saintes clartés, les Vasous, les Roudras, les Adityas ; sois propice à la race religieuse de Manou, qui répand les libations de beurre (consacré).

2. Agni, les dieux sont sages, et accordent à leur serviteur le prix fortuné de sa piété. Ô toi que nos chants célèbrent, toi que traînent des chevaux rouges, amène les trente-trois dieux[225].

3. Dieu qui possèdes tous les biens et qui accomplis les grandes œuvres, écoute l’invocation de Prascanwa, comme jadis celle de Priyamédha[226], d’Atri[227], de Viroûpa[228], d’Angiras.

4. Se plaisant dans l’œuvre sainte et poursuivant leur grande mission, les (prêtres) implorent le secours d’Agni, qui, au milieu des sacrifices, brille d’un pur éclat.

5. Ô toi que l’on honore par des libations de beurre, (divinité) généreuse, écoute aussi ces prières que t’adressent les fils de Canwa pour obtenir ta protection.

6. Agni, toi, l’ami des hommes, toi qui reçois l’hommage de tant d’offrandes variées, et que couronne une chevelure brillante, voilà un peuple qui t’invoque, et te prie d’être le porteur de ses holocaustes.

7. Les sages, ô Agni, le placent dans leurs cérémonies, toi, prêtre, sacrificateur, toi, opulent et glorieux, disposé à nous prêter l’oreille.

8. Les prêtres, tenant les libations toutes prêtes, t’appellent au banquet (sacré), toi qu’enveloppe un si grand éclat, et te présentent, ô Agni, l’holocauste au nom d’un serviteur mortel.

9. Ô toi que la force a produit, libéral et protecteur, que les dieux soient dès le matin invités à nos libations, et fais en ce jour asseoir ici, sur notre cousa, la famille divine !

10. Honore, ô Agni, cette famille divine ! qu’elle vienne ; et que tous les dieux soient confondus dans une même invocation. (Divinités) généreuses, ces libations (sont pour vous) ; prenez ce soma préparé d’hier.


HYMNE XIV.

Aux Aswins, par Prascanwa.

(Mètre : Gâyatrî.)

1. L’Aurore vient, nouvelle et chérie, briller au ciel ; ô Aswins, je vous chante avec empressement !

2. Enfants de la libation[229], dieux secourables, trésor d’abondance, vous accordez à la prière aide et protection.

3. Les hymnes s’élèvent vers vous au moment où votre char, emporté par vos (coursiers) ailés, se montre au monde abattu.

4. (Dieux) forts, un mortel, maître de l’œuvre (pieuse), dépense (pour vous) ses libations et ses mets, et il vous présente son holocauste.

5. (Dieux) véridiques, digne objet de nos louanges, buvez avec force de ce soma, (breuvage) qui sera l’aiguillon de votre amour pour nous.

6. Ô Aswins, percez les ténèbres qui nous entourent, et donnez-nous cette nourriture lumineuse qui rassasie nos (yeux) !

7. Pour venir jusqu’à nous jouir de nos hymnes, ô Aswins, montez sur votre vaisseau[230], ou bien attelez votre char !

8. Que votre vaisseau, large comme le ciel, que votre char s’arrête près de(nos) ondes (sacrées). Avec la prière vont se verser pour vous les libations.

9. Fils de Canwa, les libations, trésor du (dieu) resplendissant, sont disposées dans leur bassin. (Ô Aswins), où est votre forme[231] ?

10. Cependant le soma se colore, le soleil commence à se dorer. Je le vois à la langue d’Agni qui noircit.

11. Par la vertu du sacrifice le chemin est ouvert. (Le soleil) peut passer les rivages (de la nuit). Le voilà qui s’avance dans le ciel.

12. C’est ainsi que le poëte chante les Aswins, qui daignent se plaire à nos libations ; que leur secours soit le prix de nos chants !

13. Venez près (du père de famille) qui vous honore, comme (autrefois) près de Manou ; jouissez des libations et des hymnes (qu’il vous consacre, divinités) heureuses.

14. À peine commencez-vous votre brillante révolution, que l’Aurore vous suit. Chaque nuit, agréez aussi nos sacrifices.

15. Aswins, buvez tous deux ; tous deux soyez nos bienfaiteurs, et accordez-nous votre illustre protection.





LECTURE QUATRIÈME

HYMNE I.

Aux Aswins, par Prascanwa.

(Mètre : Vrihatî.)

1. (Dieux) que grandissent nos sacrifices, les plus douces des libations sont disposées pour vous. Aswins, prenez ces breuvages préparés d’hier, et accordez à votre serviteur les biens (qu’il désire) !

2. Aswins, arrivez sur votre char magnifique, (ce char) qui parcourt les trois mondes, et que décorent trois sièges ! Les fils de Canwa vous adressent cette prière dans le sacrifice ; daignez écouter leur invocation.

3. Aswins, que grandissent nos sacrifices, buvez de nos douces libations ! (Déités) secourables, chargeant votre char de richesses, venez en ce jour près du (père de famille) qui vous honore.

4. Vous qui possédez tous les biens, (placez-vous) sur notre triple cousa, et répandez vos douceurs sur notre sacrifice. Ô Aswins, les fils de Canwa vous invoquent, versant ces libations en votre honneur ! ils vous (invoquent), brillants de la lumière qui se lève.

5. Maîtres de pureté, accordez-nous cette protection dont vous avez autrefois honoré Canwa. Aswins, vous dont le sacrifice augmente la force, goûtez de nos libations.

6. Secourables Aswins, venez sur votre char, apportant l’abondance à Soudas[232]. Donnez-nous ces richesses que tous désirent, et qu’elles nous arrivent de l’océan (aérien) ou du ciel[233].

7. (Dieux) véridiques, que vous soyez loin ou près de nous, venez toujours à notre prière, en même temps que les rayons du soleil, sur votre char aux roues si magnifiquement rapides.

8. Que vos coursiers, avides de nos sacrifices, vous amènent ici vers nos libations. Accordez la richesse au (père de famille) généreux qui vous présente ces offrandes ; (dieux) forts, prenez place sur le cousa.

9. (Dieux) véridiques et secourables, avec ce char brillant de la lumière du soleil, et sur lequel vous apportez toujours la richesse à votre serviteur, venez pour goûter à nos douces libations.

10. (Divinités) opulentes, nous implorons votre protection par nos hymnes et nos prières. Aswins, les fils de Canwa vous sont dévoués, et dans leur assemblée vous n’avez jamais manqué de libations.


HYMNE II.

À l’Aurore, par Prascanwa.

(Mètre : Vrihatî.)

1. Fille du ciel. Aurore, lève-toi, et apporte-nous tes richesses et ton opulente abondance. Déesse brillante et généreuse, (viens) avec tes trésors.

2. La prière sainte a souvent contribué à l’heureux établissement (de l’homme) ; elle lui a valu des chevaux, des vaches, des biens de toute espèce. Aurore, que ta présence inspire ma prière, et envoie-moi le bonheur des riches.

3. Elle est née déjà, elle va briller, cette divine Aurore ; elle met en mouvement les chars, qui, à son arrivée, s’agitent (sur la terre), comme sur la mer les (vaisseaux) avides de richesses.

4. Parmi ces pères de famille dont la piété salue ton apparition pour obtenir tes largesses, il n’est pas d’enfant de Canwa plus dévoué que celui qui, en ce moment, invoque ton nom.

5. L’Aurore, comme une bonne mère de famille, vient pour protéger (le monde). Elle arrive, arrêtant le vol du (génie) malfaisant de la nuit[234], et excitant l’essor des oiseaux.

6. L’Aurore excite également l’homme diligent et le pauvre. Elle est ennemie de la paresse. À tes clartés, (ô déesse) riche en présents, il n’est plus d’être ailé qui s’oublie dans le repos.

7. La voilà qui, dans la région lointaine où se lève le soleil, attelle ses chevaux. L’heureuse Aurore vient trouver les fils de Manou avec des centaines de chars (tout chargés de richesses).

8. Le monde entier, à son aspect, se prosterne. Sage et opulente, elle fait la lumière. L’Aurore, fille du ciel, par ses rayons chasse nos ennemis et confond leur haine.

9. Fille du ciel, Aurore, brille de ton doux éclat ! Apporte-nous le bonheur et l’abondance, éclaire nos sacrifices.

10. Prévoyante (déesse), dès l’instant que tu brilles, tu deviens la vie, le souffle de l’univers. (Apparais) sur ton large char, riche et resplendissante ; écoute notre prière.

11. Aurore, accorde-nous ces aliments divers qui conviennent au genre humain ! Approche-toi de ces hommes innocents et pieux qui ont pour toi des hymnes et des oblations !

12. Aurore, amène ici du ciel tous les dieux à nos libations ! Accorde-nous, Aurore, une abondance telle, que nous soyons renommés pour nos vaches, nos chevaux et notre vigueur.

13. Que l’Aurore, dont nous apercevons les heureuses clartés, nous donne la richesse si belle, si désirée ; que cette richesse nous vienne doucement !

14. Tous les anciens sages qui ont imploré ton secours, ô grande (déesse), ont été exaucés. Aurore, accueille également notre prière, et (réponds-nous) par le don d’une brillante et pure abondance.

15. Divine Aurore, après avoir de tes rayons illuminé les portes du ciel, accorde-nous que notre maison soit puissante, que nos ennemis s’en éloignent, et que les vaches fécondes y entretiennent l’abondance.

16. Noble et magnifique Aurore, répands sur nous une large et belle opulence ; que nous obtenions de toi des vaches, de la richesse qui assure le triomphe, et de nombreux aliments !


HYMNE III.

À l’Aurore, par Prascanwa.

(Mètre : Anouchtoubh.)

1. Aurore, viens glorieusement, et monte au ciel resplendissant de lumière ! Que les vaches (célestes)[235], au poil rouge, t’amènent à la maison du (père de famille) qui t’offre ces libations.

2. Aurore, fille du Ciel, sur ce char heureux et magnifique qui te porte, viens aujourd’hui au sein d’une famille disposée à t’honorer par ses offrandes.

3. Ô brillante Aurore, l’oiseau, l’homme[236] et le quadrupède, à ton retour dans le ciel, se lèvent de tout côté.

4. Tu rayonnes, et ton éclat se communique à l’univers. Aurore, les fils de Canwa désirent tes faveurs, et t’invoquent par leurs hymnes.


HYMNE IV.

Au Soleil, par Prascanwa.

(Mètres : Gâyatrî et Anouchtoubh.)

1. Le Soleil, ce dieu qui renferme tous les biens, s’élève aux yeux de l’univers, porté par ses chevaux[237] brillants.

2. Devant le Soleil, œil du monde, les étoiles, telles que les voleurs, disparaissent avec les ombres de la nuit.

3. Ses rayons lumineux éclairent les êtres, étincelant comme des feux.

4. Soleil voyageur[238], (fanal) exposé aux yeux de tous, auteur de la lumière, tu remplis tout le ciel de ton éclat.

5. Tu te lèves à la vue du peuple[239] des dieux, à la vue des hommes, à la vue du ciel entier, pour apporter le bonheur.

6. Soleil purifiant, Soleil protecteur, avec cet œil dont tu vois le monde humain,

7. Tu parcours le ciel et la vaste région de l’air, mesurant les jours et les nuits et contemplant les créatures.

8. Divin Soleil, sept cavales sont attelées à ton char ; ta chevelure est couronnée de rayons, (astre) éblouissant de lumière.

9. Traîné par les sept coursiers purifiants que le Soleil a attelés, le char marche sans contrainte.

10. (Tout à l’heure) environnés de ténèbres, (et maintenant) éclairés par le plus brillant des astres, nous nous présentons devant le Soleil, le plus grand des dieux, la plus belle des lumières célestes.

11. Ô toi dont les rayons sont bienfaisants, Soleil, en te levant aujourd’hui, en montant au haut du ciel, détruis le mal qui me ronge le cœur et pâlit mon visage.

12. Nous donnons nos couleurs jaunes aux perroquets, aux sâricâs[240] ou bien aux (fleurs de) l’hâridrava[241].

13. Le fils d’Aditi vient de naître avec toute sa vigueur. C’est lui qui peut vaincre mon ennemi. Je ne me reconnais pas une pareille puissance.


HYMNE V.

À Indra, par Savya,[242] fils d’Angiras.

(Mètres : Djagatî et Trichtoubh.)

1. Charmez par vos accents Indra, le bélier[243], (chef du troupeau divin), invoqué par toutes les bouches, célébré par nos hymnes ; (Indra), océan de richesses, dont les (œuvres), favorables aux mortels, s’étendent aussi loin que les mondes célestes. Pour obtenir ses faveurs, honorez le plus grand des sages.

2. Que les Ribhous[244], protecteurs généreux, vénèrent cet Indra victorieux, qui remplit l’air et s’environne de puissance ; ce Satacratou, qui abat l’orgueil (de ses ennemis). Que leur voix, montant jusqu’à lui, aille l’encourager !

3. À la prière des Angiras, tu as ouvert l’antre qui renfermait les vaches (célestes)[245]. Tu as guidé Atri[246] dans la prison aux cent portes. Tu as donné à Vimada[247] une heureuse abondance de provisions. Sur un champ de bataille, en faveur de ton serviteur, tu as lancé ta foudre.

4. Tu as ouvert le réservoir des eaux (contenues dans le nuage). Tu t’es emparé du trésor de Dânou[248], amassé dans la montagne céleste. Quand Vritra, quand Ahi eurent senti les coups de ta puissance, alors tu as élevé dans le ciel le soleil, pour l’offrir à notre vue.

5. Par ta magie, tu as dissipé les prestiges de ces magiciens, (de ces Asouras), qui consumaient dans leur propre feu les offrandes les plus précieuses[249]. Ami des hommes, tu as brisé les villes (aériennes) de Piprou[250], et, dans (les combats) funestes aux Dasyous[251], tu as sauvé Ridjiswan[252].

6. Tu as préservé Coutsa[253], quand il s’agissait de combattre Souchna[254]. Tu as donné la mort à Sambara[255], en faveur d’Atithigva[256]. De ton pied, tu as renversé le grand Arbouda[257]. Enfin, dans tous les temps, tu as été l’ennemi mortel des Dasyous.

7. En toi est réunie toute vigueur ; ton cœur se plaît à nos libations ; on voit la foudre placée dans ta main. Brise toutes les forces de l’ennemi.

8. Fais une distinction entre les Aryas[258] et les Dasyous. En faveur de celui qui t’offre ce lit de cousa, frappe les impies qui voudraient nous dominer. Sois un guide puissant pour le (père de famille) qui te présente ce sacrifice. Telles sont les grâces que je demande de toi pour ceux qui prennent part à la joie de cette fête.

9. Indra, pour plaire à l’homme pieux, frappe l’impie ; pour plaire à ceux qui l’honorent, il accable ceux qui le dédaignent. Vamra[259], chantant les louanges de cet Indra qui est grand, qui grandit toujours, et remplit le ciel, (Vamra) put renverser le rempart (dont l’avaient entouré les fourmis).

10. Qu’Ousanas[260] essaye de lutter de vigueur avec toi ; bientôt ta force, stimulée par la résistance, fait frémir et le ciel et la terre. Ô toi qui es l’ami des hommes, sois satisfait de nos hommages, et que tes (chevaux), qu’attelle la pensée, t’amènent, aussi léger que le vent, ici, vers nos offrandes.

11. Quand Indra s’entend appeler par nos hymnes, il monte sur son char ; il presse ses deux coursiers à la marche sinueuse. Le (dieu) terrible, du sein du nuage voyageur, fait jaillir une onde impétueuse ; il ébranle les larges cités de Souchna.

12. Te voilà sur ton char, disposé à goûter de nos libations. Tu reçus jadis avec bonté celles de Sâryâta[261], ô Indra ! Puisses-tu te complaire (aussi) en nos offrandes ! Puisse notre hymne monter sans obstacle jusqu’à toi dans le ciel !

13. C’est toi, Indra, qui donnas une jeune épouse, Vrichayâ, au vieux Cakchîvân[262], qui savait te chanter et t’offrir des libations. (Dieu) fameux par tes œuvres, c’est toi qui devins Ménâ, fille de Vrichanaswa[263]. Toutes tes actions méritent d’être célébrées dans nos sacrifices.

14. Indra est le refuge de la piété indigente. Voyez les Padjras[264], où l’hymne (reconnaissant) est aussi (solide) que le poteau d’une porte. Indra peut donner des chevaux, des vaches, des chars, des trésors. Il est au milieu de nous pour combler nos vœux.

15. Adoration au (dieu) qui donne la pluie[265], qui brille de sa propre splendeur ! (Au dieu) puissant qui jouit d’une force véritable, salut ! Indra, dans ce sacrifice couvre de ta protection et maîtres et sujets !


HYMNE VI.

À Indra, par Savya[266], fils d’Angiras.

(Mètres : Djagatî et Trichtoubh.)

1. Adore avec ardeur le bélier (divin), le maître du bonheur, dont cent fidèles chantent ensemble la gloire. Par mes hymnes j’implore le secours d’Indra, et je l’invite à venir comme un coursier rapide, à diriger son char vers nos sacrifices.

2. Aussi ferme qu’une montagne au milieu des torrents, armé de mille vertus, on a vu Indra, quand il frappait ce (Vritra) qui enchaîne les rivières, (on l’a vu) doubler ses forces, faire bondir les ondes, et recevoir avec joie nos offrandes.

3. C’est lui qui, s’emparant de la mamelle (du nuage), l’ouvre et la ferme à son gré ; source de joie pour les (mortels) raisonnables, il se plaît à nos libations. Je l’invoque d’une âme toute pieuse, cet Indra qui répand ses dons avec largesse et qui nous comble des trésors de l’abondance.

4. Indra aime les offrandes disposées sur le cousa, et qui montent vers lui dans le ciel, comme l’Océan aime les (rivières) ses vassales qui descendent vers lui. Dans sa lutte contre Vritra, à la suite d’Indra se placent ses auxiliaires (les Marouts), qui épuisent les eaux, et, toujours fermes, savent à leur gré changer de direction.

5. De même que les eaux se portent vers les pentes (de la montagne), de même ces Marouts, enivrés de nos libations, se précipitent vers Vritra qui veut retenir la pluie, et secondent les efforts d’Indra, quand ce dieu, armé de la foudre et fortifié par nos offrandes, frappe les soldats de Bala[267], comme Trita frappa les gardes (Asouras)[268].

6. Autour de toi, Indra, brille la lumière et triomphe la force. Vritra, retenant les ondes, s’était assis au haut des airs, quand sur cette pente (céleste), où il semblait difficile de saisir cette masse énorme, tu es venu lui briser sa large mâchoire.

7. Les prières, qui exaltent ta grandeur, vont vers toi, comme les ondes vers le lac (qui les reçoit) ; ô Indra, Twachtri[269] a doublé ta force en te fabriquant un trait invincible.

8. Indra, toi qu’honorent nos sacrifices et que traînent de brillants coursiers, tu as frappé Vritra pour ouvrir, en faveur de l’homme, une voie à la pluie. Tes mains ont saisi ton arme de fer, et dans les airs, tu as fait briller le soleil à nos yeux.

9. Cependant (les mortels) effrayés invitaient Indra à monter dans le ciel par un de ces hymnes brillants et forts, aux larges et harmonieuses mesures ; et les Marouts, amis de l’homme et auxiliaires du dieu, protecteurs de la terre, le flattaient heureusement (de leurs voix).

10. Le firmament lui-même se resserra de frayeur à la voix d’Ahi, au moment où l’on te vit, ô Indra, enivré de nos libations, frapper violemment de ta foudre la tête de ce Vritra qui menaçait de ruine le ciel et la terre.

11. Maghavan, la terre serait-elle dix fois plus large, les hommes qui la cultivent augmenteraient-ils en nombre chaque jour, ta force n’en serait pas moins célèbre ; telle que le ciel, ta puissance s’étendrait pour nous couvrir.

12. Habitant aux frontières de l’Éther resplendissant, de ta nature fort et superbe, pour notre bien tu as fait la terre à l’image de ta grandeur. Tu parcours le ciel heureusement, environné des eaux.

13. Tu es le modèle de la terre (étendue comme toi) et le maître du (ciel) immense et peuplé de dieux magnanimes. Tu remplis de ta grandeur tout l’espace de l’air. Ah ! sans doute il n’existe aucun être semblable à toi.

14. Non, tu n’as pas de semblable, toi qui, dans l’ivresse de nos libations, as combattu l’ennemi ravisseur de la pluie, toi que le ciel et la terre ne peuvent contenir, dont les vagues de l’air ne peuvent atteindre la fin. Seul, tu as fait tout ce qui existe.

15. En te voyant, dans ce combat, de ton arme meurtrière frapper Vritra à la face et le terrasser, les Marouts t’adressaient leurs hommages ; tous les dieux t’accompagnaient de leurs louanges enivrantes.


HYMNE VII.

À Indra, par Savya.

(Mètres : Djagatî et Trichtoubh.)

1. (Réunis) dans la maison d’un fidèle serviteur, nous offrons à Indra nos prières et nos hymnes. Avec la même célérité que (le voleur emporte) le trésor de l’homme endormi, que (ce dieu) prenne l’offrande (que nous lui présentons. Qu’il se rappelle que) chez les riches on ne recueille que des hymnes honorables.

2. Ô Indra, tu peux nous donner des chevaux, des vaches, de l’orge[270] ; tu es le maître et le gardien de la richesse. De tout temps tu fus célébré pour ta libéralité ; tu ne sais pas tromper nos désirs, tu te montres l’ami de tes amis. C’est pour cela que nous t’adressons cet hymne.

3. Brillant Indra, tes exploits sont nombreux ; noble époux de Satchî, ton opulence éclate de tout côté. Que la victoire soit à toi ! et donne-nous les richesses que tu auras recueillies. Ne trompe pas les vœux du serviteur qui t’implore.

4. Accueille avec bienveillance ces holocaustes et ces libations. Préviens nos besoins en nous donnant des vaches, des chevaux. Puissions-nous, avec le secours d’Indra charmé de nos libations, vaincre le Dasyou, nous délivrer de nos ennemis, et obtenir l’abondance !

5. Puissions-nous acquérir des richesses, des aliments, de ces biens qui font le bonheur et la gloire des hommes ! Puissions-nous ressentir les effets de cette prudence divine qui multiplie le nombre de nos hommes, de nos vaches, de nos chevaux !

6. Ces boissons enivrantes, (ces holocaustes) qui augmentent ta force, ces libations offertes pour la mort de Vritra, ô maître de la vertu, ont toujours flatté ton âme ; et l’on t’a vu, facilement vainqueur, détourner des milliers de malheurs loin de l’homme qui t’offre le sacrifice et un siège de cousa.

7. Avec ta force victorieuse tu vas de combats en combats, tu détruis successivement les villes (des Asouras). La foudre est ta compagne, et de cette arme meurtrière tu vas, sous un autre ciel, frapper le magicien Namoutchi[271].

8. En faveur d’Atithigwa[272], tu as, avec une vigueur puissante, donné la mort à Carandja et à Parnaya[273]. Ton bras seul a suffi pour briser les cent villes de Vangrida[274], assiégées par Ridjiswân[275].

9. Vingt rois, suivis de soixante, de quatre-vingt-dix-neuf mille[276] soldats, étaient venus attaquer Sousravas[277], qui n’avait d’autre allié que toi : ô noble défenseur, la roue de ton char formidable les a tous écrasés.

10. Non moins heureux que Sousravas, que tu as sauvé par ton secours, ô Indra, Toûrvayâna[278] a obtenu ta protection. Tout jeune qu’il était, grâce à tes bontés, Coutsa[279], Atithigwa[280] et Ayou[281] l’ont reconnu pour leur suzerain[282].

11. Ô Indra, en terminant le sacrifice, nous osons nous vanter de la protection des dieux et de ton heureuse amitié. Puissions-nous plus tard te louer encore, tenant de ta faveur l’avantage d’une famille nombreuse et d’une longue vieillesse !


HYMNE VIII.

À Indra, par Savya.

(Mètres : Djagatî et Trichtoubh.)

1. Au milieu des guerres suscitées par nos fautes, ô Maghavan, ne nous abandonne pas, car ta puissance ne connaît point de rivale ! D’un bruit terrible tu fais résonner les rivières et les ondes. Comment les mondes ne trembleraient-ils pas de crainte ?

2. Adresse ta prière au puissant Sacra, à l’époux de Satchî. Loue et glorifie cet Indra qui t’écoute, et qui, par sa haute puissance, fait l’ornement du ciel et de la terre, (Indra) qui donne la pluie et comble nos désirs.

3. Adresse (à ce dieu, qui est) le ciel immense, une prière dont il soit flatté. Vainqueur, c’est en lui-même qu’il trouve sa force, ce maître glorieux qui est notre vie[283], notre défense, notre bienfaiteur, et que, sur un char, emportent rapidement ses deux coursiers.

4. Tu as ébranlé les larges plaines du ciel ; ta main victorieuse a frappé Sambara[284], et sur ces orgueilleux magiciens, insolemment conjurés contre nous, tu as lancé ta foudre, arme rayonnante et acérée.

5. Sur la tête de Souchna, qui souffle la sécheresse et s’unit (à ses frères pour notre ruine), tu abats avec bruit les eaux. Toi, dont le conseil ferme et protecteur exécute tant de choses, pourrais-tu trouver un vainqueur ?

6. C’est toi qui as sauvé Narya[285], Tourvasa[286] et Yadou[287], ô Satacratou ! toi qui (as défendu) le Vayya Tourvîti[288] ; toi qui as, au moment du combat, (protégé) Étasa[289] qu’emportait un char léger ; c’est toi qui as détruit quatre-vingt-dix-neuf[290] villes (des Asouras).

7. Il travaille au bonheur de sa nation, le prince ami de la vertu qui, en l’honneur d’Indra, présente l’holocauste et l’hymne sacré, ou qui accompagne la prière de riches offrandes. Le généreux Indra lui envoie la pluie du haut du ciel.

8. La force (de ce dieu) est incomparable, ainsi que sa prudence. Qu’ils voient leurs œuvres prospérer, ô Indra, ceux qui t’honorent par l’offrande du soma, et doublent par leur piété ta grandeur et ta force puissante.

9. C’est pour toi, Indra, que sont préparées ces libations copieuses qui ont jailli dans le mortier sous les coups du pilon, et qui reposent dans ces vases. Viens te désaltérer, satisfais ton désir, et comble ensuite nos vœux en nous accordant la richesse.

10. Autour des flancs de Vritra s’étendait une montagne noire qui arrêtait l’essor des eaux. Ces ondes prisonnières, dont la longue chaîne se prolongeait au loin, Indra les a, sur les pentes (du ciel), précipitées en torrents.

11. Ô Indra, accorde-nous le bonheur avec la gloire ; que notre force soit assez grande pour résister à nos ennemis. Conserve-nous riches et puissants. Que par toi nous ayons des richesses, de la famille, des aliments.


HYMNE IX.

À Indra, par Savya.

(Mètre : Djagatî.)

1. Indra est plus étendu que le ciel, plus grand que la terre. Terrible et fort, en faveur des hommes il s’enflamme, et, tel que le taureau qui aiguise ses cornes, il affile son trait foudroyant.

2. Océan aérien, il est comme la mer et reçoit dans son sein les vastes torrents du ciel. Indra, pour prendre part à nos libations, accourt avec l’impétuosité du taureau, toujours prêt à prouver sa force dans le combat pour mériter nos louanges.

3. Ô Indra, ce n’est pas pour toi que le nuage grossit comme une montagne. (Tu le frapperas en notre faveur.) Tu es le roi de ceux qui possèdent l’opulence. Dieu puissant, c’est par des coups d’éclat qu’il nous apparaît, redoutable et disposé à toute espèce d’attaque.

4. Il aime l’hymne que lui adressent les pieux (solitaires) de la forêt, et par ses exploits il se fait reconnaître des mortels. C’est quand le noble Maghavan reçoit l’hommage de nos hymnes que son cœur est flatté, et que, par ses largesses, il répond aux vœux de son serviteur.

5. Soutien des mortels, avec une sainte vigueur il livre pour eux de grands combats. Aussi les mortels ont foi dans le brillant Indra, qui frappe (leurs ennemis) d’un trait mortel.

6. Ami de la louange, de plus en plus ferme et vigoureux, il détruit les demeures fondées (par les Asouras) ; il empêche les splendeurs célestes d’être voilées, et, pour le bonheur de celui qui offre le sacrifice, il fait descendre la pluie.

7. Ô toi qui aimes le soma et qui écoutes nos hymnes avec plaisir, dispose ton âme à la libéralité. Dirige de ce côté tes deux coursiers. Ceux que tu protèges, ô Indra, sont parmi les écuyers les plus habiles à conduire un char. Ni la ruse, ni la violence ne sauraient triompher de toi.

8. Dans tes mains tu portes des richesses infinies ; ton corps divin est doué d’une force invincible. Telles que des puits abondants, toutes les parties de ton vaste corps, ô Indra, sont des sources de bienfaits et d’œuvres salutaires.


HYMNE X.

À Indra, par Savya.

(Mètre : Djagatî.)

1. Avec l’empressement qui pousse le coursier vers la cavale, qu’Indra vienne prendre les copieuses libations que le père de famille a versées dans les coupes. (Faisons que) le grand (dieu), avide de nos offrandes, arrête ici son char magnifique tout resplendissant d’or, et attelé de deux chevaux azurés.

2. Les chantres pieux et avides de ses faveurs entourent son autel, se rendant vers lui comme les marchands vers la mer. Toi aussi, empresse-toi de venir vers celui qui est le maître de la force et la vertu du sacrifice, de même que les femmes vont vers la montagne, (pour y recueillir des fleurs).

3. Il est rapide, il est grand. Dans les œuvres viriles, sa valeur brille d’un éclat irréprochable ; pernicieux (pour nos ennemis), et se distinguant comme la cime de la colline. Terrible, couvert d’une cuirasse de fer, enivré de nos libations, il va, au milieu de ses sujets, dans le lieu où sont enchaînés (les nuages), se jouer du magicien Souchna.

4. Quand la force divine, augmentée par tes offrandes, vient, pour ton bonheur, s’unir à Indra, comme le Soleil à l’Aurore, alors le dieu qui, par sa puissance indomptable, dissipe les ténèbres, soulève les clameurs de ses ennemis, et les précipite violemment dans la poussière.

5. Lorsque tu veux faire retirer les ondes, et, dans chaque partie du ciel, restituer à l’air toute sa pureté, alors, puissant Indra, dans ton ivresse, qui répand sur nous le bonheur, tu frappes Vritra avec courage, et tu nous ouvres l’océan des pluies.

6. C’est ta puissance, ô magnanime Indra, qui donne à la terre les ondes du ciel. Enivré de nos libations, tu fais jaillir l’eau (de la mer) ; et, d’une arme lancée d’un bras non moins fort que le sien, tu atteins Vritra.


HYMNE XI.

À Indra, par Savya.

(Mètre : Djagatî.)

1. J’apporte mon hommage au dieu magnifique, grand, riche, vrai et fort. Telle que le cours de ces torrents qui descendent de la montagne, sa puissance est irrésistible ; il ouvre à tous les êtres le trésor de sa force et de son opulence.

2. Ah ! sans doute le monde entier se dévoue à ton culte ; les libations coulent en ton honneur non moins abondantes que des rivières, quand on voit ta foudre d’or menaçante, meurtrière, s’attacher sans relâche (au corps de Vritra), semblable à une montagne.

3. Pour ce terrible, pour cet adorable Indra, viens, brillante Aurore, préparer les offrandes du sacrifice : ce dieu n’est fort, puissant et lumineux, il n’est Indra que pour nous soutenir, comme le cheval n’est fait que pour nous porter.

4. Indra, trésor d’abondance et de louanges, nous sommes à toi ; en toi nous mettons notre confiance. Les hymnes montent vers toi, et nul autre n’en est plus digne. À toi sont nos chants, de même que tous les êtres sont à la terre.

5. Indra, ta force est grande, et nous sommes tes serviteurs. Accomplis le vœu de celui qui te chante. Ta force est aussi étendue que le ciel, et cette terre se courbe de frayeur devant ta puissance.

6. Dieu armé de la foudre, tu déchires avec ton arme les flancs de (Vritra), de cette large montagne qui remplit les airs ; et les ondes qu’elle retenait, par toi, ont trouvé leur cours. Oui, tu possèdes la souveraine puissance.


HYMNE XII.

À Agni, par Nodhas, fils de Gotama.

(Mètres : Djagatî et Trichtoubh.)

1. L’immortel, né de la force, s’élance rapidement, chargé par le père de famille d’être le sacrificateur et le messager (des dieux). Il a ouvert les voies merveilleuses de la lumière, et, dans le sacrifice offert aux divinités, il allume l’holocauste.

2. Le (dieu) toujours jeune, s’unissant à son propre aliment, se dispose à le consumer avec rapidité, et se dresse au-dessus du bûcher. Telle que le coursier, la flamme brillante s’échappe du foyer, et frémit ainsi que le tonnerre sous la voûte céleste.

3. Porteur des offrandes, placé en avant par les Roudras et les Vasous, sacrificateur et pontife, trésor d’oblations, immortel, il est célébré par les humains, enfants d’Ayou, comme le char qui transporte leurs holocaustes, et il reçoit dans son sein resplendissant leurs précieuses libations.

4. Animé par le souffle du vent, il s’élève sans effort au-dessus du bûcher, résonnant avec force sous les libations qui coulent des vases sacrés. Agni, avec l’impétuosité du taureau tu te précipites sur ton aliment ; toujours nouveau, tu déploies ta flamme rougeâtre, et traces ton noir sillon.

5. Avec tes dents de flamme, tu attaques le bûcher, excité par le vent. Là, tu règnes comme le taureau puissant au milieu du troupeau. Par ta force (naturelle), tu t’élèves dans l’air indestructible. Tous les êtres, animés ou inanimés, redoutent tes atteintes.

6. Pour perpétuer tes divines naissances, les Bhrigous[291] t’ont placé parmi les enfants de Manon tel qu’un trésor précieux, ô Agni, toi qui écoutes volontiers la voix des mortels ; toi leur prêtre, leur hôte honorable, leur ami bienfaisant.

7. Ce premier des sacrificateurs, que, dans les saintes cérémonies, les sept[292] coupes du prêtre viennent honorer ; cet Agni, distributeur de tous les biens, je l’honore par mes offrandes ; je m’adresse à celui qui est le plus précieux (des êtres).

8. Fils de la Force, protecteur de tes amis, accorde-nous aujourd’hui, à nous les panégyristes, un bonheur sans réserve ; ô Agni, enfant des mets (sacrés)[293], sois pour nous comme une armure de fer, et délivre celui qui te chante de la souillure du mal.

9. Sois pour l’homme qui te loue, ô (dieu) resplendissant, un véritable rempart ; ô (dieu) riche, donne-nous la richesse et la sécurité ; ô Agni, délivre du mal ton serviteur. Que, dès le matin, notre protecteur vienne recueillir le trésor de notre prière.


HYMNE XIII.

À Agni, par Nodhas.

(Mètre : Trichtoubh.)

1. Les différents feux, ô Agni, sont comme autant de rameaux qui viennent de toi ; tu es la joie de tous les immortels. Vêswânara[294], tu es un centre pour les hommes, que tu soutiens, tel qu’une colonne érigée près d’eux.

2. Agni est la tête du ciel et l’ombilic de la terre. L’univers le reconnaît pour maître. Vêswânara, les Dévas t’ont donné la naissance pour que tu sois, en faveur du pieux Arya[295] une divinité lumineuse.

3. Comme les rayons sont dans le soleil, de même dans Vêswânara sont les trésors qui se retrouvent sur les montagnes, dans les plantes, dans les eaux, chez les hommes. Agni, tu es le roi de tous ces trésors.

4. De même qu’autour d’un fils, le ciel et la terre s’étendent autour de lui. (Nous chantons) ses louanges ; c’est un sacrificateur magnifique, c’est pour nous comme un enfant de Manou. (Nous versons) de larges libations en l’honneur de Vêswânara, vrai, fort, vigoureux et fortuné.

5. Opulent Vêswânara, tu es plus grand que le vaste ciel ; tu es le roi des êtres humains ; tu as même combattu en faveur des dieux, et défendu leurs biens.

6. Oui, je dois chanter la grandeur de ce (dieu) bienfaisant que les enfants de Pourou honorent comme vainqueur de Vritra, Agni, l’ami des hommes, frappe le Dasyou, ébranle les airs, et brise les membres de Sambara[296].

7. Vêswânara, par sa puissance, règne sur tous les hommes. Brillant, honoré parmi les Bharadwâdjas[297] ; Agni reçoit de l’illustre chef, fils de Satavân[298], de nombreuses offrandes, des chants, des prières.


HYMNE XIV.

À Agni, par Nodhas.

(Mètre : Trichtoubh.)

1. (Ce dieu) qui se charge de nos offrandes, qui est la glorieuse bannière du sacrifice ; ce protecteur fidèle, ce rapide messager, cet ami bienveillant, cet enfant de deux mères[299], a été, comme un trésor précieux, apporté à Bhrigou[300] par (le dieu du vent) Mâtariswan ?

2. Ce maître souverain est honoré par deux espèces de serviteurs, les uns qui ont des holocaustes, les autres qui n’ont que des vœux. Précédant la lumière du ciel, (Agni) prend place, sacrificateur vénérable et roi des hommes, sagement libéral au milieu d’eux.

3. Puisse cet hymne nouveau parvenir jusqu’à ce dieu qui naît sous notre souffle, et dont la langue est adoucie par nos libations ! lui qu’au moment du sacrifice les prêtres, enfants de Manou, viennent engendrer, et honorent de leurs présents.

4. (Dieu) avide de nos libations, refuge des humains, purificateur, pontife excellent, Agni a été placé parmi les hommes ; il dompte nos ennemis, il protège nos demeures. Dans l’asile domestique (que nous lui avons donné), qu’il soit (pour nous) le maître de la richesse !

5. Enfants de Gotama[301], nous te célébrons par nos hymnes, ô Agni, maître de la richesse. Nous te chargeons de nos offrandes, comme un coursier qui doit les transporter (fidèlement). Que, dès le matin, notre protecteur vienne recueillir le trésor de notre prière.


HYMNE XV.

À Indra, par Nodhas.

(Mètre : Trichtoubh.)

1. À ce (dieu) grand, puissant et rapide ; à cet Indra, digne de nos louanges ; à ce maître insurmontable, j’offre l’hommage de mon hymne et l’abondant tribut de mes prières. Que ce soit pour lui comme un mets (agréable) !

2. Oui, telle qu’un mets agréable, je lui présente cette pure invocation, dont la vertu est de donner la victoire ; (les poètes dévoués) à Indra de cœur, d’âme et d’esprit, en l’honneur de ce maître antique, embellissent la prière.

3. Ma bouche chante un hymne qui représente le tableau de ses bienfaits ; je voudrais, par la brillante expression de mes pensées, obtenir la faveur de ce maître magnifique, et ajouter quelque chose à sa grandeur.

4. Pour lui je prépare un hymne, comme l’ouvrier (fabrique) un char pour (le maître) qui l’a commandé. (Je lui offre) des paroles, à lui dont les paroles exaltent la gloire ; (j’offre) au sage Indra des chants poétiques qui soient puissants sur son âme.

5. Ce que l’appât de la nourriture est pour le coursier, la coupe du sacrifice l’est pour mon hymne ; (il se sent plus d’ardeur) à chanter Indra. Je veux célébrer ce (dieu) héroïque, magnifique dans ses dons, objet de nos pieuses louanges, et destructeur des villes (des Asouras).

6. Twachtri[302] a pour ce dieu guerrier fabriqué un trait fameux par ses œuvres ; et, de cette arme redoutable, ce maître actif et puissant a percé les membres de Vritra.

7. Dès l’instant que, dans les sacrifices qui lui sont offerts par le noble seigneur ici présent, (Indra) a touché les libations et les mets sacrés, aussitôt le (dieu) puissant s’empare du (nuage), noir sanglier que les vapeurs ont gonflé ; il le pénètre, et le transperce de sa foudre.

8. Joyeuses de la mort d’Ahi, les épouses des dieux[303] ont chanté Indra, qui embrasse le ciel et la terre, tandis que le ciel et la terre ne peuvent égaler sa grandeur.

9. Car il est plus étendu que le ciel, la terre et l’air[304] ; roi par lui-même, héros digne de toutes les louanges, puissant rival de rivaux puissants, au sein de son empire, Indra se présente au combat.

10. Vritra dessèche (la terre) ; de sa foudre puissante Indra le frappe ; et, répondant aux vœux (du père de famille) qui offre le sacrifice, (il ouvre la nue) : telles que des vaches prisonnières, les (ondes) salutaires obtiennent leur délivrance.

11. Quand, sous les coups du tonnerre, il ébranle tout autour de lui, les ondes, à ses lueurs éblouissantes, se sont agitées de plaisir. Maître généreux, en faveur de Tourvîti[305], son serviteur, il a fait subitement surgir un gué au milieu des eaux.

12. Maître incomparable, hâte-toi de lancer ta foudre sur Vritra. Tels que les flancs d’une vache immolée, partage entre nous avec ton arme les membres du nuage, et fais couler des torrents de pluie.

13. (Poëte), chante les anciens exploits de (ce dieu) rapide. Il est digne de tes louanges lorsque, dans le combat, il lance de loin ses traits, et se précipite pour frapper de près ses ennemis.

14. Indra paraît, et, de crainte, les montagnes les plus solides, et le ciel, et la terre, ont tremblé. Occupé à répéter l’éloge de ce dieu bon et secourable, que Nodhas sente à tout moment renouveler ses forces.

15. C’est pour lui qu’a été composé cet hymne (au nom des fidèles) ici présents. Puisse cet hymne plaire à celui qui est le seul puissant, le seul riche ; à Indra, qui protégea dans le combat contre Soûrya, fils de Swâswa, le pieux Étasa[306].

16. Ô toi que transportent deux brillants coursiers, Indra, exauce le vœu poétique que t’adressent les fils de Gotama. Tourne vers eux ta pensée, et accorde-leur tous les biens. Que, dès le matin, notre protecteur vienne recueillir le trésor de notre prière.





LECTURE V

HYMNE I.

À Indra, par Nodhas.

(Mètre : Trichtoubh.)

1. Tels qu’Angiras[307], nous adressons au (dieu) fort et digne d’éloges un hymne qui puisse lui plaire. Nous chantons la gloire d’un héros qui mérite la louange et la prière du poëte.

2. Allons, offrez au grand (Indra) vos profondes adorations ; offrez au (dieu) fort vos chants harmonieux. C’est par lui que nos ancêtres, les fils d’Angiras, en récompense de leurs hymnes, ont suivi les traces de leurs vaches, et les ont retrouvées[308].

3. Dans cette recherche que faisait Indra, de concert avec les Angiras, Saramâ[309] a senti ce qui pouvait être l’aliment de son nourrisson. Vrihaspati[310] a frappé le vorace (Asoura) ; il a retrouvé les vaches, et les illustres (Angiras) en ont poussé des cris de joie.

4. C’est toi, puissant Indra, toi, digne d’être célébré par des hymnes harmonieux, qui, accompagné des sept prêtres (Angirasas) habiles à chanter sur des mesures de neuf ou dix syllabes[311], as effrayé par le bruit (de ton tonnerre) Bala, recéleur des pluies fécondes.

5. Chanté par les Angiras, (dieu) admirable ! tu as dissipé les ténèbres devant les rayons de l’aurore et du soleil ; ô Indra, tu as étendu la surface de la terre, tu as assuré le firmament.

6. Mais l’œuvre la plus belle, la plus merveilleuse de ce (maître) superbe, c’est d’avoir, d’une onde aussi douce que le miel, rempli le lit des quatre fleuves[312].

7. Cet invincible (Indra), que célèbrent nos chants, a divisé en deux parts le ciel et la terre, deux compagnons toujours renaissant ensemble. Tel que Bhaga[313] ce (dieu) magnifique en ses œuvres, du haut des airs les maintient, ces deux vénérables auteurs du monde.

8. Revêtues de formes différentes, l’une noire, l’autre brillante, la Nuit et l’Aurore se succèdent ; et, toujours jeunes, chacune à son tour, elles roulent sans cesse autour du ciel et de la terre.

9. Le (dieu) fort et magnanime se complaît en des œuvres généreuses ; il maintient la vieille amitié (qui l’unit aux hommes). Il peut, quand il le veut, remplir d’un lait nourrissant la mamelle de vaches noires ou rouges[314] et trop jeunes encore.

10. Une troupe d’immortelles sœurs, toutes habitantes du même séjour, animées du même esprit de salut et de recueillement, accomplit avec constance, en son honneur, mille et mille pratiques de piété ; et, telles que de chastes épouses, elles ornent la pompe triomphale du magnifique (Indra)[315].

11. En effet, les Prières sans cesse avides de s’unir à toi, (dieu) admirable et digne d’éloges, curieuses d’obtenir par leurs hommages le trésor (de tes bénédictions), accourent (aux sacrifices) : comme des épouses chéries s’approchent de l’époux qui les aime, les saintes Invocations, ô (maître) puissant, viennent vers toi.

12. Sous tes brillantes mains, merveilleuse (déité), les richesses ne sauraient diminuer ni périr ; ô Indra, tu es lumineux, fort et prudent. Époux de Satchî, fais-nous sentir les effets de tes œuvres.

13. L’enfant de Gotama, Nodhas, a composé pour toi, ô généreux Indra, cet hymne nouveau, pour toi qui es éternel, qui nous diriges dans la bonne voie ; toi qui attelles deux coursiers à ton char (magnifique). Que, dès le matin, notre protecteur vienne recueillir le trésor de notre prière.


HYMNE II.

À Indra, par Nodhas.

(Mètre : Trichtoubh.)

1. Indra, tu es grand, toi qui, te montrant au jour de malheur, soutiens le ciel et la terre par tes puissantes vertus, lorsque tout dans la nature, et les plus fermes montagnes elle-mêmes, tremblent de terreur devant toi, et vacillent comme de frêles rayons.

2. Quand tu lances tes coursiers merveilleux, alors le poëte arme tes mains de la foudre ; et avec cette arme, ô invincible, ô adorable Indra, tu frappes tes ennemis, et tu renverses leurs larges villes.

3. (Dieu) vrai et triomphant, ô Indra, tu commandes aux Ribhous, tu aimes les héros, tu détruis (tes adversaires) ; c’est toi qui, dans un jour de bataille, au milieu de la mêlée, as pris le parti du jeune et brillant Coutsa[316], et as terrassé l’avare Souchna.

4. C’est ton amitié qui t’animait (pour nous), ô Indra, lorsque, lançant la foudre en maître généreux, tu frappais Vritra, et que, héros magnifique et invincible, tu faisais sur ce champ de bataille reculer les Dasyous, dont tu déchirais les membres.

5. Indra, tu ne dépenses pas ta force contre les mortels ; tu ne veux pas nuire à celui qui est ferme parmi eux. Ouvre les régions du ciel au (nuage) qui vient vers nous, et que ta foudre terrasse nos ennemis.

6. Quand tu combats pour leur donner la pluie et faire descendre sur eux l’onde bienfaisante, les hommes t’invoquent. Ô toi qui reçois nos offrandes, que ta protection soit la récompense de nos présents et de nos hommages solennels !

7. C’est ainsi, ô foudroyant Indra, que, combattant en faveur de Pouroucoutsa[317], tu as détruit sept villes. À Soudas[318], enfant de Poûrou, tu as conféré les richesses d’Anhou[319], avec autant de facilité que l’on arrache quelques tiges de cousa.

8. Héros divin, ô Indra, ô toi qui embrasses le monde, tu répands pour nous (sur la terre) les divers aliments, tels qu’une bienfaisante rosée ; et avec ces aliments tu nous donnes cette vie, qui, comme une eau (salutaire), circule partout (dans nos veines).

9. Indra, les enfants de Gotama ont composé pour toi ces hymnes que notre respect te présente. (Viens) avec tes coursiers azurés, et amène-nous une magnifique abondance. Que, dès le matin, notre protecteur vienne recueillir le trésor de notre prière.


HYMNE III.

Aux Marouts, par Nodhas.

(Mètres : Trichtoubh et Djagatî.)

1. « Allons, Nodhas, présente l’hommage d’un hymne aux Marouts, à cette troupe qui donne l’abondance et la fécondité, et qui aime nos sacrifices ». Recueilli, et les mains pieusement levées pour la sainte cérémonie, je compose des vers qui vont couler comme une onde (pure).

2. Ils naissent du ciel, ces brillants et vigoureux enfants de Roudra[320], qui sèment la vie et sont exempts du mal, tantôt purs et beaux comme des soleils, tantôt mouillés de pluie, funestes et horribles comme les mauvais génies[321].

3. Jeunes et redoutables, ils ne connaissent pas la faiblesse de la maladie ; ennemis de l’impie, ils favorisent (l’homme fidèle). Fermes comme le roc, ils ébranlent de leur souffle puissant tout ce qu’il y a de plus fort dans tous les mondes, au ciel et sur la terre.

4. Des ornements divers relèvent leur beauté ; sur leurs poitrines pendent avec grâce de brillants colliers ; sur leurs épaules se dressent leurs armes éclatantes. Ils naissent du ciel au même instant que se montre Swadhâ[322].

5. Ils donnent la richesse, et remuent le monde ; ils détruisent leurs ennemis, et produisent par leur puissance les vents et les éclairs ; les nuages du ciel sont comme une mamelle qu’ils pressent vivement, et, parcourant avec bruit les airs, ils engraissent la terre d’une eau féconde.

6. Les Marouts, riches en présents, répandent le lait céleste ; tels, dans les cérémonies sacrées, les (prêtres) versent le beurre liquide. De même que l’écuyer dresse le cheval, eux, ils apprennent au nuage à pleuvoir. C’est une nourrice intarissable qu’ils ont l’art de traire au milieu des mugissements de la foudre.

7. Magnifiques et habiles à changer de formes, vous vous parez de superbes lueurs, et vous avancez rapidement, forts, et pareils à de larges collines ; tels que des éléphants sauvages, vous renversez les forêts, quand à votre char puissant vous avez attelé des (coursiers) rougeâtres[323].

8. Ces (dieux) riches et prévoyants frémissent comme des lions. Leur beauté est celle du chevreuil. Terribles (pour un ennemi), bons (pour leur serviteur), ils poussent avec ardeur les daims[324] qui les emportent ; et, agitant leurs armes, ils s’unissent pour faire sentir (à ceux qui leur résistent) leur puissant et funeste courroux.

9. Héros pleins de vigueur, troupe amie des mortels, faites retentir, de votre voix animée par la colère, et la terre et le ciel. Et déjà, sur le siège de vos chars, ô Marouts, j’ai cru voir vos formes admirables s’élever, et briller comme l’éclair.

10. Ces (dieux) possèdent tous les biens, et habitent avec la richesse ; ils sont doués d’une force tumultueuse et d’une voix éclatante ; habiles archers, ils tiennent une flèche dans leurs mains ; héros dont la puissance est sans borne, ils semblent mordre le nuage pour en extraire (la pluie).

11. Montés sur leurs chars aux roues d’or, les Marouts amoncellent les nuages, et les poussent sur leur route comme des montagnes. Dignes de nos hommages, ils vont, ils se précipitent, abattant ce qui est solide, exerçant leur dur empire, et armés de traits resplendissants.

12. Nous invoquons ces enfants de Roudra, sages, purs, redoutables, et dispensant la pluie. Honorez, pour votre bonheur, cette famille des Marouts, forte, libérale, victorieuse, et parcourant le domaine des airs.

13. Ô Marouts, le mortel que vous protégez surpasse tous les autres en puissance ; ses coursiers ont de gras pâturages, ses gens ont la richesse ; il voit croître son opulence et la renommée de ses sacrifices.

14. Ô Marouts, donnez à nos nobles seigneurs un fils fort dans ses œuvres, difficile à vaincre dans les combats, magnifique, robuste, opulent, éclairé, et digne d’être chanté. Puissions-nous, pendant une centaine d’années, célébrer une telle famille !

15. Ô Marouts, accordez-nous une fortune qui soit stable ; que nos gens soient pleins de force, qu’ils soutiennent les attaques de nos ennemis. Que cent, que mille trésors augmentent notre richesse ! Que, dès le matin, nos protecteurs viennent recueillir le tribut de notre prière.


HYMNE IV.

À Agni, par Parasara, fils de Sacti, petit-fils de Vasichta.

(Mètre : Dwipada.)

1. Tel que le brigand qui se renferme dans sa caverne avec son bétail, (tu te caches)[325], ô (dieu), qui te joins au sacrifice et qui portes les offrandes !

2. Cependant les (Dévas), tes sages compagnons, suivent tes traces[326] ; et tous, habiles sacrificateurs, ils savent te retrouver.

3. Les Dévas poursuivent le cours des saintes cérémonies ; et bientôt (le dieu) s’est entouré de (rayons) abondants et brillants comme la lumière du ciel.

4. Les ondes (sacrées)[327] augmentent sa force ; leur (doux) breuvage fait grandir cet heureux nourrisson, né au giron du sacrifice.

5. Tel qu’une agréable végétation, que la terre étendue, que la colline chargée de fruits, que l’eau salutaire ;

6. Tel que le coursier débarrassé de ses liens, que la mer impétueuse, tel est Agni. Qui donc peut le maîtriser ?

7. Agni est pour les ondes comme un frère pour ses sœurs ; de même qu’un roi dévore les riches, de même il dévore les bois,

8. Quand, excité par le vent, il se jette sur la forêt et déchire la chevelure de la terre.

9. Tel que le cygne qui plonge, il souffle au milieu des ondes[328]. Éveillé dès l’aurore, il avertit les hommes que l’heure de l’œuvre sainte est arrivée.

10. Ainsi que l’excellent soma[329], il naît du sacrifice. De même que l’animal au sein de sa mère, (il est faible d’abord) ; bientôt il se développe, et porte au loin ses splendeurs.


HYMNE V.

À Agni, par Parasara.

(Mètre : Dwipada.)

1. Tel qu’un trésor richement varié, un soleil resplendissant, un souffle vital, un fils dévoué ;

2. Tel qu’un coursier docile, tel est (Agni) ; pur et brillant, il s’attache au bois comme la tendre génisse à la mamelle de sa mère.

3. Tel qu’une maison agréable, il renferme notre bonheur ; tel que la moisson que (le soleil) a mûrie, il doit conquérir (l’amour) des hommes.

4. Tel que le poëte qui chante (les dieux), il est béni par les mortels ; tel que le coursier chéri, il apporte (à la terre) sa nourriture.

5. Entouré d’un éclat incomparable, il accomplit sans relâche son œuvre sainte ; il est dans le foyer, semblable à une épouse fidèle dans sa maison : il embellit tout ;

6. Et quand il allume ses flammes variées, il brille comme le soleil dans le monde, comme un char doré dans les batailles.

7. Il répand la terreur de même que l’armée qu’on lance (au combat), de même que la flèche de l’archer garnie d’une pointe étincelante.

8. Jumeau du passé, jumeau de l’avenir, il est le fiancé des filles et l’époux des femmes.

9. Comme les vaches vont vers l’étable, nous, le matin et le soir[330], nous venons vers lui dès l’instant qu’il brille.

10. Ainsi qu’une onde impétueuse, le voilà qui pousse ses vagues (enflammées), et ses rayons s’élèvent vers la voûte du ciel.


HYMNE VI.

À Agni, par Parasara.

(Mètre : Dwipada.)

1. Né sur le bûcher, ami des mortels, (Agni) chérit le père de famille qui ordonne le sacrifice[331], comme un roi chérit l’homme fort.

2. Tel qu’un protecteur vertueux, tel qu’un prêtre vénérable, il est notre patron, notre sacrificateur, le porteur de nos offrandes.

3. Dans sa main il tient toutes les richesses, et quand il se renferme dans sa retraite[332], les Dévas commencent à trembler.

4. Les prêtres alors le découvrent, (les prêtres) dévoués à la prière, et chantant les hymnes que le cœur inspire.

5. Semblable à (l’astre) voyageur[333] il soutient l’air et la terre ; encouragé par les invocations pieuses, il affermit le ciel.

6. Agni, jouis des diverses offrandes qui te sont présentées ; toi qui es la vie de tous les êtres, quitte chaque jour pour nous ta retraite.

7. Celui qui sait le tirer de sa retraite, et qui le ramène au foyer du sacrifice,

8. (Agni) le comble de biens, ainsi que ceux qui l’honorent par leurs saintes pratiques.

9. Il enveloppe (de sa flamme) les ramées, et attaque avec force le corps même des branches (qui sont comme) ses mères[334].

10. Sage soutien de tous les êtres, il habite le séjour des ondes (sacrées), où tes (hommes) religieux lui ont préparé avec soin une espèce de demeure.


HYMNE VII.

À Agni, par Parasara.

(Mètre : Dwipada.)

1. (Agni), animé par nos libations, s’élève vers le ciel, où il porte (nos offrandes) ; il éclaire la nuit, (il illumine) tous les êtres, animés et inanimés ;

2. Et, Déva incomparable parmi les Dévas, il les surpasse tous par sa grandeur.

3. Ô dieu, dès l’instant que tu viens à la vie du sein de (la branche) aride, tous aussitôt s’appliquent à l’œuvre sainte ;

4. Tous par leurs hymnes célèbrent ta divine essence, et honorent l’immortel auteur du sacrifice.

5. Pour l’auteur du sacrifice est notre hymne, pour lui notre offrande. Il est la vie de tous, et tous s’unissent pour l’œuvre (sacrée).

6. Favorise de ton attention, comble de tes bienfaits ceux qui t’honorent par leurs présents ou par leurs prières.

7. Sacrificateur placé près des enfants de Manou, tu es le maître de la richesse.

8. Tes (serviteurs) demandent que tu répandes dans leurs corps une semence de vie. Qu’ils sentent, à leur ferme assurance, (que leurs vœux sont exaucés).

9. Tels que des fils dociles à l’ordre de leur père, ils viennent avec empressement honorer Agni d’un culte pieux.

10. (Agni) donne la fertilité et ouvre les portes de l’opulence ; (le dieu) qui triomphe de tout[335] a décoré d’étoiles la voûte céleste.


HYMNE VIII.

À Agni, par Parasara.

(Mètre : Dwipada.)

1. Agni répand des clartés non moins vives que les clartés de (l’astre) qui éclipse l’aurore ; tel que le flambeau céleste, il remplit (de lumières) et la terre et le ciel.

2. Tu nais, et de ta splendeur tu embrasses déjà toute la nature. Tu es le fils des Dévas, et tu deviendras leur père[336].

3. Agni, bon et prudent, veut connaître la douceur de nos libations ; elles sont pour lui comme le lait de nos vaches.

4. Tel qu’un homme bienfaisant parmi le peuple, dont le secours est réclamé dans le besoin, il siège au milieu de nous, il est la joie de nos foyers.

5. Il est, dans nos demeures, agréable comme un enfant nouveau-né, comme un coursier chéri. Qu’il soit le bienfaiteur du peuple !

6. Quand j’appelle tout ce peuple[337], ainsi réuni avec mes compagnons, qu’Agni reçoive tous les honneurs divins.

7. Personne ne peut troubler nos cérémonies, ô (Agni), lorsqu’à de tels ministres de ton culte tu donnes un tel père de famille.

8. Si ton sacrifice se trouvait interrompu, tu saurais bien, avec tes serviteurs, mettre en fuite les criminels.

9. Que (Agni) répande donc ses clartés, non moins vives que les clartés de l’astre) qui éclipse l’aurore ; qu’il fasse briller ses formes éclatantes, et qu’il protège son (serviteur).

10. Mais voilà ses (rayons) porteurs de (nos offrandes), qui s’ouvrent d’eux-mêmes les portes, et s’élèvent tous vers la voûte du ciel.


HYMNE IX.

À Agni, par Parasara.

(Mètre : Dwipada.)

1. Puissions-nous posséder l’abondance ! Que, propice à nos vœux, le brillant Agni obtienne tous les honneurs !

2. Lui qui connaît les divines pratiques, lui qui aime à naître au milieu des enfants de Manou !

3. Lui, qui naît au sein des ondes sacrées, dans le bûcher (du sacrifice), parmi les (offrandes) solides et liquides[338] !

4. Lui qui, sur la montagne[339] ou dans l’intérieur de nos foyers, est comme le patron du peuple, immortel et bienveillant !

5. Agni, ami des libations qu’amènent les crépuscules[340], donne ses trésors à celui qui le célèbre par ses hymnes.

6. (Dieu) sage et prévoyant, conserve toutes les créatures, la race des Dévas et les mortels !

7. Agni, qui a pour ceinture le sacrifice lui-même, est fortifié par les libations que lui apportent les Aurores et les Nuits, (déesses) aux formes si différentes, et par les offrandes liquides et solides.

8. Nous l’avons invoqué, ce sacrificateur heureusement placé près de nous, cet agent de toutes les œuvres saintes.

9. Puissions-nous, par toi, devenir célèbres ! puissions-nous obtenir l’opulence et le bonheur !

10. Les hommes te vénèrent avec empressement ; qu’ils reçoivent de toi la richesse, comme (on reçoit) l’héritage d’un vieux père !

11. Mais, dans les combats, brille (et deviens redoutable) autant que l’usurier avide, que l’archer courageux, que le guerrier terrible qui conduit un char[341] !…


HYMNE X.

À Agni, par Parasara.

(Mètre : Trichtoubh.)

1. Tendrement attachées à un (dieu) qui les paye d’une égale tendresse, de pieuses sœurs[342], habitantes d’un même séjour, vénèrent (Agni) comme des épouses vénèrent un époux adoré : de même les vaches (lumineuses) rendent hommage à l’Aurore, qui, (par degré) sombre et rougeâtre, se pare à son lever des couleurs les plus variées.

2. Nos pères, les Angiras, ont, par leurs chants et par l’harmonie de leurs hymnes, brisé la force du vorace (Asoura) ; ils nous ont découvert les voies du vaste ciel ; nous leur devons le jour, la lumière, le feu, les vaches célestes[343].

3. Ils ont recueilli le brillant (Agni) ; ils ont amassé pour lui un trésor d’offrandes. Puis, chargées de diverses parties de l’œuvre sainte, de vénérables sœurs[344], attentives, modestes, sont venues, en présence des Dévas, accroître par leurs hommages la force du nouveau-né.

4. Aussitôt que le souffle de Mâtariswan a excité (Agni), dans tous les foyers (le dieu) s’élève et brille. (Le prêtre), suivant l’exemple de Bhrigou[345], et agissant (avec les dieux) comme un prince à l’égard d’un prince plus puissant, engage Agni à lui servir de messager.

5. Quand (le prêtre) verse le liquide (consacré) en l’honneur de celui qui est grand, secourable et brillant, alors l’ennemi (du jour), qui le voit, s’enfuit ; aussitôt le dieu, comme un archer, superbe, lui décoche une flèche étincelante, et lance sa lumière jusque sur (l’Aurore) sa fille.

6. Agni, toi qui brilles entre le ciel et la terre[346], augmente la fortune de celui qui, chaque jour, allume ton brasier et t’offre les libations que tu aimes, il est sûr du triomphe, celui dont tu montes le char et dont tu presses (les coursiers).

7. Toutes les offrandes vont à Agni, comme les sept[347] fleuves à l’Océan. Nos familles sentent l’indigence qui les presse. Par ta sage entremise, que notre vœu soit connu des dieux.

8. La force que nos offrandes ont donnée à ce (dieu) roi des hommes, produit une pure semence (de lumière) jetée au sein du ciel. Qu’ainsi soit engendré et sacré par Agni un prince royal, fort, irréprochable et généreux[348] !

9. Le soleil, qui, rapide comme la pensée[349], traverse toujours seul les routes (célestes), est le maître de la richesse ; Mitra et Varouna, ces deux rois aux belles mains[350] gardent la douce ambroisie des vaches (célestes).

10. Agni, ne brise pas le traité d’amitié conclu avec nos pères. Tu connais (nos besoins), car tu es sage. La vieillesse est comme un nuage qui pèse sur moi et défigure mon corps. Préviens cette ennemie, et souviens-toi de moi.


HYMNE XI.

À Agni, par Parasara.

(Mètre : Trichtoubh.)

1 . « (Poëte), commence un hymne en l’honneur d’un (dieu) sage et éternel. Agni tient dans sa main tous les biens qui conviennent à l’homme. Agni est le maître de la richesse et l’auteur d’œuvres immortelles. »

2. (Agni), tel qu’un nourrisson chéri, était près de nous[351]. Cependant tous les Dévas[352] le cherchaient avec constance, sans le trouver. Fatigués, privés de leur char[353], et prodigues de prières, ils ne s’arrêtèrent qu’en le voyant briller sur son siège.

3. Agni, ces (Dévas) purs comme toi, après l’avoir honoré d’une triple libation[354] de beurre consacré, ont partagé eux-mêmes les honneurs du sacrifice, et ils ont sanctifié leurs corps, se montrant dignes de leur naissance[355].

4. (Ces Dévas) honorables, impatients de voir se développer et le ciel et la terre, commencent des (chants) que doivent comprendre les enfants de Roudra. Et bientôt cette (troupe) mortelle (des Marouts cherchant) avec Indra, a trouvé Agni siégeant sur son brillant foyer.

5. En le voyant, (les Dévas) viennent avec leurs épouses[356] s’asseoir près de lui, et adorer celui qui est adorable. Leurs corps étaient épuisés par le travail ; le coup d’œil d’un ami les a ranimés.

6. Vingt et une fois[357] ces (Dévas), dignes de nos hommages, prononcent en ton honneur de mystérieuses invocations ; et vingt et une fois, compagnons de ta joie, ils les accompagnent de libations. Accueille nos offrandes et solides et liquides.

7. Ô Agni, toi qui connais les besoins des mortels, accorde-leur toujours ce qui doit adoucir les maux de la vie ! Toi qui connais aussi parfaitement les routes que suivent les dieux, sois pour eux un messager infatigable, et porte-leur nos offrandes.

8. (Par toi) les sept fleuves[358], sensibles à nos peines, (coulent) du ciel (sur la terre.) (Par toi les Angiras)[359], habiles dans les sacrifices, ont connu les portes de la fortune, et Saramâ a découvert le cachot où étaient renfermées les vaches (célestes), trésor de la race humaine.

9. La (noble) mère (des Adityas), la grande Aditi[360], apparaît avec majesté, escortée de ses fils, de ces généreux enfants qui s’élèvent, ouvrant la voie à l’immortalité, et assurant la marche de (l’astre) voyageur.

10. Cependant (les prêtres) ont nourri de leurs trésors les clartés d’Agni, pour qu’elles attirent les regards des immortels. Les (flammes) rougeâtres courent et s’élancent comme des ondes déchaînées. Agni, les (dieux) sont avertis.


HYMNE XII.

À Agni, par Parasara.

(Mètre : Trichtoubh.)

1. Abondant comme le trésor amassé par un père, prudent comme le commandement du sage, aimable comme l’hôte qui se plaît dans nos foyers, (Agni), tel qu’un sacrificateur, fait fructifier la maison de l’homme pieux.

2. Semblable au divin Savitri, il connaît la vérité ; par sa force il protège tous nos sacrifices. Comblé de nos louanges, il mérite d’être honoré comme la forme la plus pure, comme l’âme la plus vivifiante.

3. Tel que le dieu qui embrasse tout, tel qu’un roi ami de ses sujets, il protège la terre. Ses serviteurs ressemblent à des fils élevés dans la même maison, et qu’une épouse vertueuse, aimée de son époux, (chérit également).

4. Ô Agni, les prêtres, te choisissant une demeure sûre, te font perpétuellement briller dans ton foyer, et t’adressent leurs hommages ; dans ce foyer ils déposent leurs nombreuses offrandes. Ô toi qui es la vie de tous, deviens (pour nous) un trésor de richesses.

5. Ô Agni, que nos princes obtiennent (par toi) la fortune, et, maîtres généreux du sacrifice, jouissent de tous les agréments de la vie ! Que, dans les combats, nous nous emparions des trésors de l’ennemi, disposés à partager avec les dieux le fruit glorieux (de la victoire) !

6. Les vaches (célestes), brillant des feux du sacrifice, montrent avec bonheur leurs mamelles remplies de lait ; et, de l’extrémité de l’horizon, jalouses de mériter sa faveur, les ondes viennent couler au sein du nuage (qu’elles grossissent).

7. Les (Dévas) aussi, dignes de nos hommages, ont voulu te complaire, ô brillant Agni ! ils ont dans ton sein versé leurs libations ; ils ont (pour les sacrifices) fait la nuit et l’aurore d’apparences différentes, et les ont distinguées par la couleur noire et la couleur rouge.

8. Ô Agni, donne-nous la grandeur et la richesse, comme tu le fais pour ceux des mortels que tu favorises ! Tu couvres le monde entier comme d’une ombre protectrice, et tu remplis le ciel, la terre et l’air.

9. Ô Agni, que par ton secours nos coursiers, nos soldats, nos chefs, triomphent des coursiers, des soldats, des chefs (ennemis) ! que, possesseurs de la fortune de leurs pères, nos enfants, comme nous, maîtres généreux du sacrifice, vivent cent hivers !

10. Prudent Agni, que ces chants te soient agréables, qu’ils charment ton esprit et ton cœur ! Puissions-nous avoir assez de force pour porter le doux poids de tes opulentes faveurs, et posséder des richesses que notre reconnaissance partage avec les dieux !


HYMNE XIII.

À Agni, par Gotama, fils de Raghougana.

(Mètre : Gâyatrî.)

1. Offrons le sacrifice, et prononçons la prière en l’honneur d’Agni, qui nous entend de loin,

2. Et qui, premier gardien des biens de son serviteur, les protège au milieu des luttes sanglantes.

3. Aussi, que le peuple s’écrie : « Agni est né pour être vainqueur de Vritra, et s’emparer de ses trésors dans tous les combats. »

4. (L’homme) dont tu honores la maison en devenant son messager, dont tu transportes les holocaustes, dont tu embellis le sacrifice,

5. Ô Angiras[361], ô fils de la Force, est renommé parmi le peuple, qui vante ses offrandes, son heureuse destinée, et la beauté de ses lits de cousa.

6. Amène ici les dieux, ô brillant (Agni), et fais-leur agréer et nos louanges et nos holocaustes !

7. Ô Agni, quand tu pars pour accomplir ton message, on n’entend jamais le bruit de ton char, ni de tes coursiers.

8. Aidé par toi, ton serviteur, ô Agni, du dernier rang s’est élevé au premier ; il possède l’abondance et la gloire.

9. Car, ô divin Agni, tu donnes, à celui qui honore les dieux, la splendeur, l’opulence, et la force d’une nombreuse famille.


HYMNE XIV.

À Agni, par Gotama.

(Mètre : Gâyatrî.)

1. Daigne écouter ces longs hymnes qui font le plaisir des dieux, et que ta bouche reçoive nos holocaustes.

2. Ô Agni, le plus grand des Angiras, le plus sage (d’entre les dieux), nous voulons t’adresser une prière qui te soit chère et agréable.

3. Parmi les mortels, ô Agni, quel est ton ami ? Quel est celui qui se recommande par ses sacrifices ? Qui es-tu, et en quel endroit es-tu retiré ?

4. Ô Agni, tu es le parent des mortels, tu es leur ami chéri ; tu es un compagnon digne des hommages de tes compagnons.

5. Honore pour nous Mitra et Varouna, honore les autres dieux par un large sacrifice. Ô Agni, viens occuper le foyer qui t’est préparé.


HYMNE XV.

À Agni, par Gotama.

(Mètre : Trichtoubh.)

1. Ô Agni, par quel moyen peut-on parvenir à charmer ton âme ? Quel hymne est capable de te plaire ? Quel homme, par ses sacrifices, peut ajouter à ta grandeur ? Quel hommage devons-nous t’adresser ?

2. Viens, Agni sacrificateur ; prends ici ta place ; sois pour nous un guide heureux et sûr. Que le ciel et la terre, qui remplissent tout, te conservent ! Que par toi le sacrifice s’accomplisse pour le plus grand bonheur des dieux !

3. Ô Agni, brûle tous les Rakchasas ; protège nos sacrifices ! Amène ici (Indra), maître des libations ; qu’il vienne avec ses deux coursiers azurés. À ce (patron) généreux nous offrons l’hospitalité.

4. Ô (dieu) qui dans ta bouche portes (nos offrandes), je t’adresse un hymne qui (sans doute) produira son fruit. Prends place avec les (autres) dieux ; remplis ici les fonctions de prêtre et de sacrificateur, et reçois aussi nos hommages. Exauce nos vœux, toi qui es le maître et le père des richesses.

5. On t’a vu (jadis) sous la forme d’un prêtre, enfant de Manou[362], et sage au milieu des sages, offrir des sacrifices aux dieux. De même aujourd’hui, ô pontife plein de vérité, ô Agni, épuise en leur honneur la coupe sacrée !


HYMNE XVI.

À Agni, par Gotama.

(Mètre : Trichtoubh.)

1. Quel sacrifice pouvons-nous faire à Agni ? Quel chant peut être agréable à ce dieu brillant, qui, juste, immortel (placé) parmi les mortels, sacrificateur et prêtre suprême, vient ici pour honorer les dieux ?

2. Appelez en ces lieux, par vos invocations, celui qui, dans les sacrifices, est un pontife heureux et juste. Quand Agni daigne venir en faveur d’un mortel, alors qu’il avertisse les dieux, et qu’il accomplisse avec bonté le sacrifice.

3. (Agni) est un ami véritable, puissant et redoutable ; il sait opérer des merveilles. Le peuple qui accourt pour honorer les dieux l’invoque le premier dans les sacrifices, et le proclame (le dieu) admirable.

4. Le plus grand parmi les chefs du sacrifice, Agni est aussi le fléau de nos ennemis. Qu’il vienne recevoir, pour prix de sa protection, nos chants et nos offrandes. Voilà que des hommes, riches et puissants, ont disposé les mets sacrés, et demandent que tes louanges soient célébrées.

5. Le juste et opulent Agni a été chanté par les sages enfants de Gotama[363]. Qu’il leur donne à son tour et la force et l’abondance. (Voyez-vous) sa forme qui s’embellit ? C’est qu’il se plaît à nos hommages.


HYMNE XVII.

À Agni, par Gotama.

(Mètre : Gâyatrî.)

1. Ô (dieu) riche et prévoyant, nous, enfants de Gotama, par nos chants et nos pures libations nous t’honorons.

2. Gotama, avide de tes dons, te célèbre par ses hymnes ; par nos pures libations nous t’honorons.

3. Comme (autrefois) les Angiras, nous t’invoquons, toi surtout qui donnes la richesse ; par de pures libations nous t’honorons.

4. Toi qui contribues surtout à la mort de Vritra, toi qui mets en fuite les Dasyous, par de pures libations nous t’honorons.

5. Nous, enfants de Rahoûgana[364] nous avons en l’honneur d’Agni chanté un hymne aussi agréable que le miel ; par de pures libations nous t’honorons.


HYMNE XVIII.

À Agni,[365] par Gotama.

(Mètres : Trichtoubh, Ouchnib et Gâyatrî.)

1. Dans l’espace des airs, Ahi[366] vole avec rapidité ; il déploie sa chevelure dorée, et agite (le nuage) avec la violence du vent. Alors se trouvent voilées les Aurores fécondes, entourées d’un pur éclat, et pareilles à de laborieuses ménagères.

2. Les feux ailés (d’Agni) viennent heurter la nue, qui, noire et chargée de pluie, a résonné. Ils se mêlent à ces ondes, qui, en s’ouvrant, semblent heureusement sourire. Elles tombent, et cependant le tonnerre gronde au ciel.

3. Quand (le prêtre) fortifiant (Agni) avec le lait des libations, l’a ensuite, par les voies les plus droites du sacrifice, conduit (au ciel)[367], Aryaman, Mitra, Varouna qui parcourt (le monde), touchent la surface du (nuage) placé au-dessous d’eux, et lui percent le sein.

4. Ô Agni, fils de la Force, tu es le maître de ces aliments que nous donne la vache. Toi qui connais tous les biens, accorde-nous l’abondance.

5. Agni, tu es resplendissant et sage ; tu es notre refuge. Tu mérites d’être célébré par nos hymnes. Toi qui es la source du bonheur, brille pour nous de tes plus beaux rayons.

6. Ô Agni, que ta flamme se pare de tout son éclat le soir, le jour et le matin ! (Dieu) à la langue effilée, consume les Rakchasas.

7. Ô Agni, pour prix de nos hymnes accorde-nous ta protection, toi qui mérites d’être loué dans toutes nos prières !

8. Ô Agni, donne-nous une fortune solide et digne d’envie, telle que tous les efforts (de nos ennemis) ne puissent la renverser !

9. Ô Agni, accorde-nous, avec la sagesse, une opulence qui nous procure tous les plaisirs de la vie, et nous rende l’existence agréable !

10. Gotama, toi qui aspires au bonheur, offre à cet Agni, dont la flamme est effilée, nos hymnes et nos chants pieux.

11. Ô Agni, qu’il périsse celui qui cherche à nous nuire soit de près, soit de loin ; et augmente notre prospérité.

12. Agni a mille yeux[368] ; (divinité) prudente, il écarte les Rakchasas ; sacrificateur, il honore (les dieux), digne lui-même d’être honoré !


HYMNE XIX.

À Indra, par Gotama.

(Mètre : Gâyatrî.)

1. Le soma enivrant est préparé, et le prêtre y ajoute l’harmonie de ses chants. (Dieu) puissant qui portes la foudre, tu as avec vigueur chassé Ahi des plaines (célestes), consacrant ainsi ta royauté.

2. Nos joyeuses libations, versées en ton honneur et portées sur les ailes de l’épervier (poétique)[369], ont enivré ton cœur. Fort de ces offrandes, (dieu) armé de la foudre, au milieu des ondes (célestes), tu as avec vigueur frappé Vritra, consacrant ainsi ta royauté.

3. Viens, approche, et triomphe ; car ton arme est invincible. Indra, ta force est véritablement virile ! Frappe Vritra, et par la victoire délivre les ondes, consacrant ainsi ta royauté.

4. Ô Indra, de la terre au ciel, tu es vainqueur de Vritra. Envoie-nous ces ondes que poussent les Marouts, et qui sont une source de vie, consacrant ainsi ta royauté.

5. Vritra s’agite ; Indra courroucé accourt, et de sa foudre lui heurte le front, invitant les ondes à couler, et consacrant ainsi sa royauté.

6. Indra, heureux de nos hommages, a heurté le front de Vritra de sa foudre, armée de cent pointes. Il désire ouvrir à ses amis le chemin de l’abondance, consacrant ainsi sa royauté.

7. Foudroyant Indra, toi qui portes le tonnerre, tu possèdes une force indomptable. Mais tu sais aussi employer la magie, et quand le magicien (Vritra) se cachait sous la forme d’un cerf[370], tu l’as frappé, consacrant ainsi ta royauté.

8. Les éclats de ta foudre sont allés (rouvrir les sources) des quatre-vingt-dix fleuves[371]. Ô Indra, ta vigueur est immense ; tu déploies la force de tes bras, consacrant ainsi ta royauté.

9. Des milliers (d’adorateurs) se réunissent pour honorer Indra. En voilà vingt[372] (surtout) qui célèbrent sa gloire ; des centaines (de riches) chantent ses louanges. L’œuvre sainte est préparée en l’honneur du dieu qui sait consacrer sa royauté.

10. Indra a brisé la force de Vritra ; sa vigueur a vaincu la vigueur (de l’ennemi) ; sa puissance est grande, et, en frappant Vritra, il nous donne (la pluie), consacrant ainsi sa royauté.

11. Le ciel et la terre, témoins de ton courroux, ont frémi de crainte quand, escorté des Marouts, ô foudroyant Indra, tu attaquais Vritra avec vigueur, consacrant ainsi ta royauté.

12. Vritra, par son bruit, par ses mouvements, ne put effrayer Indra ; il se trouva pressé par la foudre de fer, armée de mille pointes, (du dieu) consacrant ainsi sa royauté.

13. De ta foudre tu combattais la foudre de Vritra ; et quand tu cherchais à terrasser Ahi, ta force, ô Indra, éclatait dans le ciel, consacrant ainsi ta royauté.

14. (Dieu) qui portes la foudre, au bruit que tu causes, les êtres, animés et inanimés, sont tous émus ; Twachtri lui-même[373], effrayé de ta colère, tremble, ô Indra, en te voyant consacrer ainsi ta royauté.

15. Nous ne pouvons suivre sa marche rapide : quel autre pourrait le surpasser en puissance ? Les Dévas ont conféré la vigueur, la force et la splendeur suprême à cet Indra qui consacre ainsi sa royauté. 16. Atharwan[374], ami de Manou, et Dadhyantch[375] ont jadis établi une cérémonie (que nous renouvelons aujourd’hui). Que de pieuses libations et des hymnes aient lieu en l’honneur de cet Indra, qui sait ainsi consacrer sa royauté.




LECTURE SIXIÈME

HYMNE I.

À Indra, par Gotama.

(Mètre : Pankti.)

1. Les prêtres, (par leurs chants), exaltent la puissance et augmentent le bonheur d’Indra, le vainqueur de Vritra. Dans les grandes affaires, comme dans les petites, nous l’invoquons. Qu’il daigne nous protéger dans les combats !

2. Héros (invincible), tu vaux, à toi seul, une armée ; tu triomphes de la force et du nombre de nos ennemis ; tu donnes de l’accroissement au faible, et tu fais part de tes biens immenses à celui qui t’honore par ses sacrifices et ses libations.

3. Quand les combats s’engagent, la victoire procure la richesse. Attelle (à ton char) tes chevaux qui abattent l’enivrement (de l’orgueil). Quel est celui que tu vas frapper ? Quel est celui que tu vas enrichir ? Indra, puissions-nous être l’objet de ton choix !

4. (Indra), terrible et grand dans ses œuvres, (est) encore plus fort après nos libations. Le (dieu) magnifique, à la face superbe, aux coursiers azurés, s’approche de nous, et, pour notre bonheur, il prend en ses mains sa foudre de fer.

5. Il remplit l’air qui environne la terre ; au ciel sont attachées ses splendeurs. Indra, personne ne fut, personne ne sera pareil à toi. C’est toi qui soutiens l’univers.

6. Indra, toi qui portes le nom d’Arya[376], et qui donnes à ton serviteur sa nourriture de mortel, accorde-nous notre part, et ouvre pour nous le vaste trésor dont tu disposes.

7. Heureux de nos libations répétées, (dieu) juste en ta puissance, donne-nous des troupeaux de vaches ; puise de tes deux mains au trésor de tes immenses largesses, fais notre joie, et apporte-nous l’abondance.

8. Héros (divin), viens avec plaisir à nos libations ; fais notre force et notre opulence. Nous avons que tu possèdes de nombreuses richesses ; nos vœux s’élèvent vers toi. Sois notre protecteur.

9. Ô Indra, tes enfants, que voici, t’ont préparé des offrandes de toute espèce. Noble Arya, tu sais quelle est la richesse des hommes qui ne te servent point. Apporte-nous cette richesse.


HYMNE II.

À Indra, par Gotama.

(Mètres : Pankti et Djagatî.)

1. Ô Maghavan, approche-toi pour écouter nos chants. Ne te montre pas sourd à nos vœux. Dès l’instant que tu combles nos vœux, tu obtiens aussitôt notre reconnaissance. Indra, attelle promptement tes deux coursiers.

2. Les prêtres, brillants d’un pieux éclat, ont prodigué les mets et les libations sacrés ; ils ont fait asseoir (au foyer), et dans tous leurs atours, les épouses (des dieux)[377] ; ils ont, dans les plus beaux hymnes, célébré ta grandeur. Indra, attelle promptement tes deux coursiers.

3. Ô Maghavan, nous voulons t’honorer, toi qui jettes sur toute la nature un regard (de protection). Attiré par nos chants, viens près de tes serviteurs avec ton char rempli de richesses. Indra, attelle promptement tes deux coursiers.

4. Qu’il se trouve porté sur ce char, d’où découlent tant de biens, d’où provient la richesse des troupeaux, l’homme qui te présente le vase rempli (d’offrandes), et nommé hâriyodjana[378]. Indra, attelle promptement tes deux coursiers.

5. Ô Satacratou, attache à ton char et le coursier de droite et le coursier de gauche, et viens, près de ton épouse chérie, goûter la douceur de nos libations. Indra, attelle promptement tes deux Coursiers.

6. Oui, ma prière attelle (à ton char) tes deux coursiers à la crinière azurée. Que tes bras les dirigent, et viens près de nous. Enivre-toi de nos douces libations. Heureux de notre hommage, ô dieu qui portes la foudre, savoure ici avec ton épouse les plaisirs (que nous t’offrons).


HYMNE III.

À Indra, par Gotama.

(Mètre : Djagatî.)

1. Il est riche en chevaux, il est le premier pour ses troupeaux de vaches, le mortel que tu aides de tes secours, ô Indra ! Tu viens à lui avec tes vastes trésors, comme les eaux vont naturellement à l’Océan.

2. Oui, comme les eaux (coulent vers la mer), les déesses aussi viennent au lieu du sacrifice ; elles ont vu sur la terre poindre et s’étendre la lueur du foyer. Les Dévas, tournés vers l’orient, honorent le (dieu) ami des saintes cérémonies et serviteur des autres dieux ; ils cherchent à lui plaire, comme des amants (à leurs bien-aimées)[379].

3. À cette double libation que verse en ton honneur la cuiller du sacrifice, tu as ajouté l’hommage des hymnes. Pieux et recueilli, (le prêtre) s’occupe de ton culte ; une heureuse force s’attache à celui qui t’adore et te sacrifie.

4. Les Angiras, jadis, auteurs de rites religieux, ont allumé le feu sacré et introduit les offrandes ; ils ont enlevé à Pani ce troupeau (céleste)[380] qu’il gardait comme son bien, et qui sert à la prospérité de nos coursiers et de nos vaches.

5. Atharvan[381], le premier, avait enseigné le moyen d’ouvrir par les sacrifices la voie (aux vaches célestes), à l’heure où naît le soleil, leur bien-aimé et le gardien des œuvres pieuses, à l’heure où le fils de Gavi[382], Ousanas, se présente en même temps pour détourner ces vaches. Alors nous invoquons l’immortel (Indra), né pour repousser (les Asouras).

6. Quand, jaloux d’obtenir une heureuse postérité, (le chef de famille) fait préparer le pur cousa, ou bien qu’il charge le prêtre de chanter auprès d’un brillant autel l’hymne poétique ; quand la pierre (du mortier) résonne comme la voix d’un chantre sacré, c’est alors qu’Indra se plaît à venir à nos fêtes.


HYMNE IV.

À Indra, par Gotama.

(Mètres : Anouchtoubh, Ouchnich, Gâyatrî, Trichtoubh, Vriatî et Panktî.)

1. Les libations sont versées pour toi, ô Indra puissant et vainqueur ! Viens. Que la force te remplisse, comme le soleil (remplit) le ciel de ses rayons.

2. Partout où les poëtes chantent ses louanges, partout où les mortels lui offrent des sacrifices, les deux coursiers d’Indra transportent ce (dieu), dont la vigueur est insurmontable.

3. Vainqueur de Vritra, monte sur ton char ; la prière vient d’atteler tes chevaux. Que ton attention se tourne du côté de la pierre (du mortier) qui résonne (pour toi).

4. Bois, ô Indra, ce breuvage excellent, immortel, enivrant, dont la pure rosée coule pour toi dans le foyer sacré.

5. Honorez donc Indra, et chantez ses louanges. Qu’il s’enivre de nos libations. Vénérez sa force éclatante.

6. Il n’est pas de plus habile écuyer que toi, ô Indra, quand tu attelles tes chevaux. Il n’est personne qui égale ta force, personne qui puisse te surpasser, aurait-il les meilleurs coursiers.

7. Celui qui seul distribue la richesse au mortel qui l’honore, qui domine sans contestation, c’est Indra. Oh, viens !

8. Quand donc Indra voudra-t-il briser l’impie, comme on brise de son pied une plante épineuse ? Quand voudra-t-il écouter nos prières ? Oh, viens !

9. Celui qui, entouré de dévots serviteurs, t’honore de ses libations, ô Indra, tu lui donnes une force terrible. Oh, viens !

10. Les blanches (vaches du ciel) boivent cette douce rosée partout répandue. Elles s’unissent au bienfaisant Indra, et, brillantes, bondissant de joie, elles s’étendent sur son domaine.

11. Heureuses de le toucher, elles se colorent de teintes diverses ; elles apprêtent le soma (versé en son honneur) : ces vaches bien-aimées d’Indra aiguisent aussi son arme foudroyante, et elles s’étendent sur son domaine.

12. Elles vénèrent avec respect la force de ce (dieu) prudent ; elles le secondent dans ses œuvres nombreuses, et, prévoyant sa pensée, elles s’étendent sur son domaine.

13. L’invincible Indra, avec les os de Dadhyantch[383], a terrassé quatre-vingt-dix-neuf[384] ennemis.

14. Il a cherché la tête de cheval (de Dadhyantch) cachée dans les montagnes, et l’a trouvée dans le lac Saryanâvân[385].

15. Et (ces os merveilleux), on les aurait pris pour les feux du rapide Twachtri, alors éteints, comme s’ils avaient été au séjour (glacé) de Tchandramas[386].

16. Qui donc aujourd’hui attache au char (d’Indra) ces chevaux qu’attelle le sacrifice, chevaux vigoureux, brillants, invincibles, portant au front une arme aiguë, frappant (leurs ennemis) au cœur, et répandant la joie (parmi leurs amis) ? Honneur et vie à celui qui célèbre leurs services !

17. Quel est celui qui fuit, qui tremble (devant le dieu) ? qui ressent l’atteinte de ses coups ? Qui (au contraire) éprouve le bonheur de sa présence ? qui l’invoque pour son fils, pour son éléphant, pour sa fortune ? qui, pour sa propre personne ou pour sa famille ?

18. Quel est celui qui, (pour plaire à Indra), célèbre Agni, et, à des époques fixes, l’honore par des holocaustes et des libations de beurre ? À qui les dieux apportent-ils les fruits du sacrifice ? Qui, par ses offrandes et ses hommages pieux, s’attire la protection (d’Indra) ?

19. Oh, viens ! Maghavan, dieu puissant, honore le mortel (qui t’honore). Le bonheur ne vient que de toi. Indra, je t’adresse ma prière.

20. Ô toi qui es notre refuge, que jamais tes dons et tes secours ne viennent à nous manquer ! Ami des hommes, accorde à leur sollicitude tous les trésors (dont tu disposes).


HYMNE V.

Aux Marouts, par Gotama.

(Mètres : Djagatî et Trichtoubh.)

1. Comme des femmes à la brillante démarche, les enfants de Roudra s’avancent, célébrés pour leurs hauts faits ; car les Marouts ont développé le ciel et la terre ; héros destructeurs, ils se plaisent à nos sacrifices.

2. Couverts d’une humide rosée, ces enfants de Roudra croissent dans le ciel, où ils établissent leur demeure. Soumis avec respect au noble (Indra), ces fils de Prisni[387] développent leur force et amassent de riches trésors.

3. Nés de la Terre[388] quand ils séparent de leurs ornements, ils jettent sur leurs corps d’éclatantes couleurs ; ils renversent tous leurs ennemis, et sur leur chemin coule la (pluie qui est) le beurre (des campagnes).

4. Honorés par nos sacrifices, ils brillent, et abattent sous leurs glaives ce que la force la plus grande ne saurait abattre. Marouts ! quand à vos chars vous attelez vos daims, vous volez, aussi prompts que la pensée, en répandant la pluie.

5. Ô Marouts ! quand à votre char vous attelez vos daims, amenant le nuage pour fertiliser nos champs, alors les gouttes d’eau, perçant comme la peau de ce (nuage) bienfaisant, viennent inonder la terre.

6. Que vos rapides coursiers vous transportent ; venez d’un pas léger, et les bras (chargés de présents). Asseyez-vous sur le cousa ; une large place vous y est faite ; ô Marouts ! rassassiez-vous de nos douces offrandes.

7. Forts de leur propre puissance, ils grandissent ; ils s’établissent au ciel, et s’y étendent. Quand Vichnou[389] vient prendre sa part de nos enivrantes libations, eux, comme des oiseaux, arrivent aussi sur le cousa qui leur est cher.

8. Tels que des héros, de rapides guerriers, des combattants avides de gloire, ils font éclater leur courage. Tous les êtres craignent les Marouts ; et quand ils déploient leur vaillance, ils brillent comme des rois.

9. Saisissant la foudre, arme admirable, étincelante d’or et garnie de mille pointes, (arme) qu’a fabriquée l’habile ouvrier Twachtri, Indra se distingue dans le combat ; il frappe Vritra, et lance des torrents de pluie.

10. (Non moins courageux), les Marouts ont avec force enlevé une source, et fendu une haute montagne[390] ; (dieux) bruyants et généreux, ils opèrent, dans l’ivresse du soma, des (merveilles) dignes d’être célébrées.

11. Oui, ils ont, par la route des airs, enlevé une source, et en ont formé un bassin en faveur de Gotama, pressé par la soif : ils sont ainsi venus à son secours, et le zèle de ces brillants protecteurs a comblé les vœux du prophète.

12. Donnez au serviteur qui vous célèbre ces biens qui vous appartiennent, et qui sont de trois espèces[391]. Marouts, répandez ces biens sur nous ; (dieux) bienfaisants, accordez-nous une heureuse opulence et une nombreuse famille !


HYMNE VI.

Aux Marouts, par Gotama.

(Mètre : Gâyatrî.)

1. Brillants Marouts, celui dont vous visitez la maison, et dont le soma vous fait descendre du ciel, peut se glorifier d’avoir de puissants protecteurs.

2. Venez prendre votre part de nos sacrifices, ô Marouts, et entendez la voix suppliante du prêtre !

3. Celui qui vous honore par des offrandes, et dont le prêtre attire votre attention, verra ses étables remplies de vaches.

4. Voici un homme de cœur, dont le cousa, dans les jours de fête, est couvert de libations toutes prêtes, et dont on vante les hymnes et les offrandes.

5. Que les Marouts écoutent favorablement la prière ; qu’ils acceptent aussi les offrandes de ce (mortel) que sa position élève au-dessus de tous les autres, et même jusqu’au soleil.

6. Grâce à votre sage protection, ô Marouts, nous avons pu vous honorer par d’abondantes libations.

7. Ô Marouts, ô vous qui êtes dignes de nos sacrifices, qu’il soit fortuné le mortel dont vous agréez les offrandes !

8. Héros doués d’une force véritable, accomplissez le vœu de celui qui vous implore en chantant vos louanges, et vous faisant des libations de beurre.

9. Manifestez cette force véritable que vous possédez, et d’un (trait) puissant et lumineux percez le Rakchasa.

10. Repoussez au sein des ténèbres l’obscurité, qui n’en doit pas sortir. Chassez tous nos ennemis, et faites-nous la lumière que nous désirons.


HYMNE VII.

Aux Marouts, par Gotama.

(Mètre : Djagatî.)

1. Terribles et robustes, bruyants, invincibles, forts par leur union, amis de nos offrandes, honorés et dignes du rang suprême, (les Marouts) brillent sous leurs parures comme les nuages sous les feux des étoiles.

2. Quand, par toutes les routes de l’air, vous avez, tels que des oiseaux, rassemblé sur vos chars flottants (l’onde) voyageuse, alors les (nuages), trésors (de la pluie), se fondent en eau : ô Marouts, envoyez à celui qui vous honore ce beurre (de la terre) aussi doux que le miel.

3. Lorsque, pour le bien (du monde), ils attellent (leur char), la terre, semblable à une épouse séparée de son époux, tremble sous leurs pas qui l’ébranlent ; car (les Marouts), se faisant un jeu de leurs violences, et armés de traits resplendissants, prouvent leur force en remuant le (monde).

4. Venez, troupe jeune et légère, amenée par vos daims rapides ; souverains environnés de force, vous êtes vrais dans vos promesses, bienfaisants et irréprochables : accueillez notre prière, et répandez vos biens sur nous.

5. C’est en vertu de notre naissance, comme disciples de notre vieux père[392], que nous chantons (cet hymne). Notre voix, qui célèbre le soma, s’élève (vers les Marouts). Dans les sacrifices que les poëtes offrent en l’honneur d’Indra, (ces dieux) ont obtenu d’entendre aussi invoquer leurs noms.

6. Pour le salut (du monde), ils savent aux ondes (bienfaisantes) mêler l’influence des rayons lumineux ; honorés par les poètes, célébrés par leurs chants, légers et intrépides, les Marouts ont mérité la haute demeure que l’on distingue par leur nom[393].


HYMNE VIII.

Aux Marouts, par Gotama.

(Mètre : Pankti.)

1. Ô Marouts, venez sur vos chars étincelants, lumineux, garnis de traits aigus, et traînés par de rapides coursiers. Accourez, tels que des oiseaux, et comblez heureusement nos vœux en nous accordant une abondante nourriture.

2. Quel (mortel ces dieux) veulent-ils favoriser ? Pour qui viennent-ils avec ces coursiers jaunes et rougeâtres qu’ils attachent à leur char ? Leur (char) est brillant comme l’or, et retentit du bruit des armes. Le fracas de leurs roues fait frémir la terre.

3. Le long de vos corps retentissent vos belles armures. (Les mortels) élèvent vers vous leurs offrandes, comme les arbres (élèvent leurs têtes vers le ciel). Généreux Marouts, ils amassent pour vous dans le mortier les libations abondantes qu’ils vous réservent !

4. Les enfants de Gotama, pressés par la soif, ont pendant plusieurs jours célébré cette pieuse cérémonie, accompagnée de libations ; ils ont accompli l’œuvre sainte (en l’honneur des Marouts), qui, pour les désaltérer, ont par les airs enlevé une source[394].

5. Ô Marouts, l’hymne que nous vous adressons contient les mêmes sentiments que celui qu’autrefois vous a fait entendre Gotama, quand il vous aperçut, nobles vainqueurs, courant çà et là sur vos chars d’or et brandissant vos armes de fer.

6. Ô Marouts, la voix qui s’élève aujourd’hui vers vous, vous chante avec non moins de raison que celle qui vous célébra (jadis). Oui, c’est avec justice que nous vous exaltons dans ces (vers), tenant en nos mains les mets sacrés.


HYMNE IX.

À tous les dieux, par Gotama.

(Mètres : Djagatî et Trichtoubh.)

1. Célébrons sans trouble, et dans la paix du recueillement, nos saintes cérémonies. Qu’elles soient efficaces pour nous, et que les dieux, amis constants de notre bonheur, restent à nos côtés, et nous protègent chaque jour !

2. Que l’heureuse faveur des dieux, que les bienfaits des dieux justes soient avec nous. Puissions-nous obtenir l’amitié des dieux ! que les dieux prolongent notre vie !

3. Suivant l’antique coutume, nous invoquons Bhaga, Mitra, Aditi, Dakcha, Asridh, Aryaman, Varouna, Soma, les deux Aswins[395]. Que l’heureuse Saraswatî nous donne la joie !

4. Que la guérison de nos maux nous soit assurée par Vâyou, par la Terre, qui est la mère (commune) ; par le Ciel, qui est le père ; par l’influence de ces mortiers qui préparent le soma et apportent la joie ! Et vous, adorables Aswins, exaucez aussi notre vœu !

5. Nous appelons à notre secours le maître souverain des êtres animés et inanimés, ce roi[396] qui se plaît à nos prières. Que Poûchan[397] soit pour nous une source intarissable de richesses, et, invulnérable lui-même, qu’il nous sauve, nous garde et nous protége !

6. Qu’il nous protége, le grand et glorieux Indra ! Qu’il nous protége, le magnifique Poûchan ! Qu’il nous protége, Arichtanémi, fils de Târkcha[398] ! Que Vrihaspati[399] nous protége !

7. Que les Marouts à la marche brillante, que ces fils de Prisni, amenés par leurs daims, viennent à nos sacrifices ; que tous les dieux, sages[400] et resplendissants comme le soleil, (que ces dieux) dont Agni est la langue[401] accourent ici pour nous défendre !

8. Ô dieux dignes de nos sacrifices, que nos oreilles, que nos yeux n’entendent, ne voient que des choses heureuses ! Que nos membres soient pleins de force, et, pour prix de nos hommages, que nous obtenions de jouir de toute la vie que le ciel nous accorde !

9. Ô dieux, donnez-nous cent ans d’existence ! Et quand vous aurez courbé nos corps sous le poids de la vieillesse, quand nos fils seront devenus nos soutiens[402], n’allez pas nous retrancher la moitié de notre vie !

10. Aditi, c’est le ciel ; Aditi, c’est l’air ; Aditi, c’est la mère, le père et le fils ; Aditi, ce sont tous les dieux et les cinq espèces d’êtres[403] : Aditi, c’est ce qui est né et ce qui naîtra.


HYMNE X.

À tous les dieux, par Gotama.

(Mètres : Gâyatrî et Trichtoubh.)

1. Que Mitra, que Varouna, que le sage Aryaman, nous dirigent dans la bonne voie, et avec les autres dieux se plaisent à nos sacrifices.

2. Les dieux sont les dépositaires des trésors, et chaque jour ils poursuivent sans trouble leurs œuvres brillantes.

3. Immortels, qu’ils nous accordent le bonheur, à nous qui sommes mortels, et qu’ils repoussent nos ennemis !

4. Que nos pas soient heureusement conduits par Indra, les Marouts, Poûchan, Bhaga et (les autres) également dignes de nos hommages !

5. Que nos prières nous procurent des vaches fécondes ! Poûchan, ô Vichnou, ô Vâyou[404], comblez-nous de vos bénédictions.

6. Pour l’homme qui offre le sacrifice, doux est le souffle des vents, douce est l’onde des fleuves. Que les plantes (de la terre) soient douces pour nous !

7. Que la Nuit et les Aurores soient douces pour nous ! Qu’il soit doux, l’Air qui environne la Terre ! qu’il soit doux, le Ciel notre père !

8. Qu’il soit doux pour nous, le dieu qu’on appelle Vanaspati[405] qu’il soit doux, le soleil ! Que les vaches[406] soient douces pour nous !

9. Favorables nous soient Mitra et Varouna ! favorable, Âryaman ![407] favorables, Indra et Vrihaspati ! favorable, Vichnou aux grands pas[408] !


HYMNE XI.

À Soma, par Gotama.

(Mètres : Pankti, Gâyatrî, Ouchnih, Trichtoubh.)

1. Ô Soma[409], tes services sont appréciés par notre esprit. Tu nous conduis dans la meilleure des voies. Sous ta direction, ô dieu appelé Indou[410], nos pères, pieux et sages, ont obtenu la faveur des dieux.

2. Ô Soma, saint dans les choses saintes, généreux dans les choses généreuses, abondant dans les choses abondantes, tu es opulent, tu es grand, tu es le précepteur des hommes.

3. Tes œuvres sont celles du royal Varouna ; ton influence, ô Soma, est étendue et profonde. Pur comme l’aimable Mitra, comme Aryaman, ô Soma, tu donnes l’accroissement (aux êtres).

4. L’influence que tu possèdes au ciel, sur la terre, sur les nuages, les plantes et les eaux, ô Soma, roi débonnaire et clément, daigne l’exercer en notre faveur, et accepte nos holocaustes !

5. Ô Soma, tu es le maître des saints, tu es roi et vainqueur de Vritra, tu es l’agent de notre bonheur.

6. La mort ne nous atteindra pas, (si) ton désir est que nous vivions, ô Soma, toi qui aimes nos louanges, et qui es Vanaspati[411].

7. Ô Soma, tu donnes à l’homme qui offre le sacrifice, qu’il soit jeune ou vieux, une part convenable dans les biens de la vie.

8. Roi Soma, défends-nous contre tous les méchants ; l’ami (d’un dieu) tel que toi ne peut périr.

9. Ô Soma, accorde-nous ces secours protecteurs dont tu entoures tes fidèles.

10. Agrée ce sacrifice et cet hymne, et viens, ô Soma, augmenter notre bien-être !

11. Par nos chants nous savons augmenter ta gloire, ô Soma ! Viens nous visiter avec bonté.

12. Ô Soma, accrois notre richesse, détourne de nous la maladie, agrandis nos trésors, double notre opulence ; sois pour nous un véritable ami !

13. Soma, sois heureux dans notre cœur, comme la vache dans les pâturages, comme le père de famille dans sa maison.

14. Divin Soma, un (dieu) sage et bienfaisant, (tel que toi), s’attache au mortel qui met son bonheur dans ton amitié.

15. Ô Soma, délivre-nous de l’imprécation ! garde-nous contre le mal ! sois pour nous un diligent ami !

16. Croîs donc, ô Soma ! apparais dans toute la plénitude de ta force, et réunis en toi tous les biens !

17. Croîs, heureux Soma, et pare-toi de toutes tes splendeurs ! Sois un ami qui nous ouvre la source de l’abondance et de la gloire !

18. Vainqueur de tes ennemis, qu’en toi se réunissent la douceur, l’abondance et la force des aliments ! Croissant, ô Soma, pour l’immortelle ambroisie, deviens pour nous dans le ciel le trésor de la plus précieuse nourriture !

19. Tous ces biens, que l’on offre ici en holocauste, viennent de toi : que (Agni) enveloppe (de ses flammes) notre sacrifice ! Soma, toi qui augmentes notre opulence et qui fais notre salut, toi qui es la force de nos héros et la mort de nos ennemis, viens visiter nos demeures.

20. À celui qui l’honore, Soma donne des vaches, de légers coursiers, des fils courageux et habiles, distingués dans leur ménage, dans les sacrifices, dans les assemblées, soumis à leur père.

21. Ô Soma, soyons heureux d’un (dieu tel que toi), qui, invincible à la guerre, comble nos vœux dans les combats, qui nous donne la prospérité avec les eaux (de la pluie), qui protège le sacrifice, et qui, croissant au milieu des offrandes, possesseur d’une brillante demeure, se montre glorieux et triomphant.

22. Ô Soma, c’est toi qui as produit toutes les plantes, les eaux et les vaches, toi qui as étendu le vaste ciel, toi qui dans ta lumière as enseveli l’obscurité.

23. Dieu fort, ô Soma, que ta divine prudence nous accorde la part de richesses (que nous désirons) ! Combats pour nous ; personne ne peut lutter contre toi. Tu es le maître de la force, et règnes sur les deux partis : donne-nous la supériorité dans la bataille.


HYMNE XII.

À l’Aurore et aux Aswins, par Gotama.

(Mètres : Djagatî, Trichtoubh et Ouchnih.)

1. Les Aurores élèvent leur drapeau, et, dans la région orientale du ciel, annoncent la lumière. Pareilles à des guerriers qui brillent sous leurs armes, s’avancent les vaches[412] (célestes), ces nourrices (du monde) aux couleurs empourprées.

2. Les rayons enflammés s’élancent sans obstacle, et attellent (au char du matin) ces vaches rougeâtres et dociles. Les Aurores remplissent leur antique fonction, et bientôt les teintes vermeilles (de leurs coursiers) se fondent dans les teintes dorées de la lumière.

3. Ouvrières diligentes, elles couvrent au loin (le monde) d’un même réseau lumineux, et apportent l’abondance à l’homme pieux et libéral, qui n’épargne ni les sacrifices ni les libations.

4. Comme la danseuse, l’Aurore révèle toutes ses formes ; elle découvre son sein, comme la vache découvre sa mamelle féconde ; et, de même que celle-ci donne son lait, l’Aurore distribue au monde entier sa lumière en dissipant les ténèbres.

5. Ses lueurs éclatantes se distinguent ; elle s’avance par degrés, et met en fuite l’obscurité. Elle illumine sa forme, comme (les prêtres) au moment du sacrifice illuminent le bûcher; et la fille du ciel donne à ses clartés des teintes variées.

6. Nous venons de traverser l’océan de cette nuit. L’Aurore se lève, elle ramène la vie. Telle qu’un seigneur puissant, elle brille et sourit, belle, bienveillante, ennemie (des ténèbres) pour notre bonheur.

7. Fille du ciel, elle resplendit et inspire l’hymne sacré. Elle est, pour les fils de Gotama, un objet de louanges. Aurore, tu donnes une opulence qui peut s’enorgueillir de ses enfants, de ses serviteurs, de ses chevaux, de ses vaches !

8. Aurore, puissé-je obtenir cette abondante richesse que relèvent la gloire et le nombre des enfants, des serviteurs, des chevaux ! (déesse) éclatante et fortunée, qui produis la fertilité, et qui brilles d’une gloire merveilleuse !

9. La déesse, poursuivant sa marche, et d’un large regard embrassant tous les mondes, luit et fait lever tout ce qui respire. Vers elle monte la voix de tous les êtres intelligents.

10. Antique, renaissant chaque jour, elle brille constamment des mêmes couleurs ; mais aussi, telle qu’une chasseresse qui frappe et abat les habitants de l’air, l’Aurore attaque la vie des mortels.

11. La voilà qui ouvre les portes du ciel, et force (la Nuit) sa sœur à se cacher. Elle consume les âges de la vie humaine, et se colore des feux du (Soleil) son amant.

12. Comme (le berger répand) ses troupeaux (dans la plaine), la belle déesse répand (ses rayons dans les champs de l’air) ; telle qu’une mer profonde, elle remplit tout de sa grandeur. Elle maintient les œuvres divines du soleil, et se pénètre de ses rayons, qu’elle reflète.

13. Aurore, toi que nous honorons par nos offrandes, apporte-nous cette variété de biens qui nous permette d’élever nos fils et nos petits-fils.

14. Brillante Aurore, toi que célèbrent nos hymnes, toi qui es riche en vaches et en chevaux, lève-toi aujourd’hui pour notre bonheur.

15. Aurore, toi que nos offrandes honorent, attelle aujourd’hui tes coursiers rougeâtres, et apporte-nous toute espèce de prospérités.

16. Ô Aswins, couple secourable, dirigez votre char vers notre demeure, où règnent la richesse de l’or et la fécondité des vaches !

17. Ô Aswins, vous qui, pour le genre humain, amenez la lumière au ciel et donnez le signal de l’hymne sacré, apportez-nous l’abondance !

18. Dieux secourables et bienfaisants, montés sur un char d’or, que (vos coursiers), éveillés par l’Aurore, vous amènent à nos libations !


HYMNE XIII.

À Agni et à Soma, par Gotama.

(Mètres : Anouchtoubh, Trichtoubh, Djagatî et Gâyatrî.)

1. Agni et Soma[413], (dieux) bienfaisants, écoutez mon invocation. Agréez mes prières, soyez bons pour votre serviteur.

2. À celui qui vous adresse aujourd’hui cet hymne respectueux, accordez, Agni et Soma, une heureuse abondance de serviteurs, de vaches, de chevaux.

3. Agni et Soma, que pendant toute sa vie il possède une grande force et une belle famille, celui qui vous honore par ses invocations et ses holocaustes !

4. Agni et Soma, on connaît votre puissance. Elle a éclaté, quand vous avez enlevé à Pani les vaches (célestes) dont il était le gardien[414] ; quand vous avez donné la mort au fils de Brisaya[415], et que vous avez fait briller pour tous la lumière unique (du soleil).

5. C’est vous, Agni et Soma, qui, unissant vos efforts, avez placé au ciel[416] ces (astres) étincelants ; vous, Agni et Soma, qui avez délivré les fleuves enchaînés de l’odieuse imprécation lancée contre eux[417].

6. Mâtariswan[418] vient du ciel animer l’un de vous (de son souffle) ; l’autre est tiré du mortier par l’épervier (poétique)[419] . C’est vous, Agni et Soma, qui, croissant par la prière, avez, pour le sacrifice, fondé un large emplacement.

7. Agni et Soma, venez prendre votre part de notre holocauste, et daignez l’avoir pour agréable. (Dieux) bienfaisants et fortunés, soyez nos protecteurs, et comblez de bonheur celui qui vous sacrifie.

8. Agni et Soma, protégez la piété de (l’homme) qui honore les dieux avec une âme dévouée et des libations de beurre ; gardez-le du mal, et accordez une grande prospérité au peuple fidèle.

9. Agni et Soma, vous à qui nous adressons les mêmes offrandes et les mêmes invocations, recevez nos prières : vous êtes grands parmi les dieux.

10. Agni et Soma, donnez la gloire et la richesse à celui qui fait couler en votre honneur ce beurre sacré.

11. Agni et Soma, que nos holocaustes vous soient agréables ! venez ensemble auprès de nous.

12. Agni et Soma, prenez nos coursiers sous votre protection ; que nos vaches se multiplient, et donnent leur lait pour nos libations. Accordez-nous la force avec la richesse. Que l’opulence devienne le prix de notre sacrifice !


HYMNE XIV.

À Agni, par Coutsa.

(Mètres : Trichtoubh et Djagatî.)

1. Comme (l’ouvrier) prépare un char (pour le guerrier), que votre imagination prépare cet hymne pour (le dieu) qui possède tous les biens, et qui mérite nos hommages ! Que sa prudence nous soit propice dans cette réunion ! Ô Agni, que ton amitié ne nous soit pas inutile !

2. Il est heureux, celui dont tu favorises les sacrifices. Il vit en paix, et possède la puissance. Sa force croit sans cesse, et la douleur ne l’atteint pas. Ô Agni, que ton amitié ne nous soit pas inutile !

3. Laisse-nous allumer ta flamme : accomplis nos vœux. Par toi les dieux obtiennent l’holocauste qui leur est offert. Amène ici les Adityas que nous invoquons. Ô Agni, que ton amitié ne nous soit pas inutile !

4. Pour te rappeler notre souvenir, nous voulons, à chaque parwan[420], entretenir ton foyer et l’apporter des libations. Et toi, exauce nos vœux en prolongeant nos jours. Ô Agni, que ton amitié ne nous soit pas inutile !

5. Les enfants d’Agni[421] sont les pasteurs des peuples ; ils marchent, et leurs rayons conduisent et les hommes et les animaux[422]. Orné de couleurs variées, c’est toi qui appelles l’Aurore ; tu es grand. Ô Agni, que ton amitié ne nous soit pas inutile !

6. Par ta naissance tu es le principal sacrificateur, le prophète, le chantre, le purificateur, le pontife. Sage et instruit, tu remplis tous les offices du prêtre. Agni, que ton amitié ne nous soit pas inutile !

7. Également beau de tout côté, de loin comme de près, tu brilles avec éclat, et ton regard, ô dieu, perce l’obscurité de la nuit. Ô Agni, que ton amitié ne nous soit pas inutile !

8. Ô dieux, que le char de l’homme qui vous sacrifie soit le premier (dans les combats) ; que nos imprécations soient funestes à nos ennemis ! Écoutez et accomplissez notre vœu. Ô Agni, que ton amitié ne nous soit pas inutile !

9. Frappe de mort nos ennemis, quels qu’ils soient, éloignés ou voisins ; qu’ils tombent sans gloire avec leurs funestes pensées ! Ouvre une route facile à celui qui te loue et te sacrifie. Ô Agni, que ton amitié ne nous soit pas inutile !

10. Lorsqu’à ton char tu attelles tes (coursiers) rougeâtres, aussi rapides que le vent, tes frémissements sont pareils à la voix du taureau. Tu enveloppes le bûcher d’une bannière de fumée. Ô Agni, que ton amitié ne nous soit pas inutile !

11. Les oiseaux tremblent à ce bruit ; et quand tes flammes, dévorant l’herbe sèche, se sont fermement établies, alors la voie est ouverte à ton char. Ô Agni, que ton amitié ne nous soit pas inutile !

12. Voilà un (père de famille) qui sacrifie à Mitra et à Varouna. Descendez (aussi du ciel), vous, Marouts, dont la colère est si terrible. Apaise-les en notre faveur, et que leur souffle nous devienne propice. Ô Agni, que ton amitié ne nous soit pas inutile !

13. Tu es le dieu des dieux, un ami admirable, le trésor des trésors, superbe dans le sacrifice. Reçois-nous sous ta puissante protection. Ô Agni, que ton amitié ne nous soit pas inutile !

14. Tu aimes à te voir placé dans un foyer brûlant, honoré par des libations et chanté dans nos hymnes. Rempli de douceur, tu accordes à ton serviteur des trésors et des richesses. Ô Agni, que ton amitié ne nous soit pas inutile !

15. Il n’est coupable d’aucune négligence dans son devoir religieux, celui que tu combles de tes dons, celui que tu remplis d’une heureuse force, dieu opulent et indestructible. Accorde-nous de la richesse et de la famille.

16. Dieu qui sais où est le bonheur, Agni, prolonge ici-bas notre vie. Qu’ils nous protègent également, Mitra, Varouna, Aditi, la Mer, la Terre et le Ciel !




LECTURE SEPTIÈME

HYMNE I.

À Agni, par Coutsa.

(Mètre : Trichtoubh.)

1. Deux (mères)[423] de couleur différente et marchant d’un pas rapide, enfantent chacune un nourrisson. Du sein de l’une naît (Agni appelé) Hari[424] et honoré par les libations ; du sein de l’autre naît (le Soleil, surnommé) Soucra[425], à la flamme éclatante.

2. Dix jeunes (ministres)[426], infatigables, font sortir du sein (de l’Aranî), où il est renfermé, ce Twachtri[427] aux flammes aiguës ; ils amènent au jour ce (dieu) qui a plusieurs demeures, et qui, plein de gloire, vient briller parmi les hommes.

3. On célèbre sa triple naissance[428] ; il naît au sein des libations, dans le soleil, au milieu des ondes (aériennes). Il indique, il dispose successivement la région de l’orient et la variété des saisons terrestres.

4. Qui de vous a vu (le dieu), quand il se cache (au milieu des eaux) ? Nourrisson tout à l’heure, le voilà qui, par la vertu du sacrifice, produit maintenant ses propres mères. Ainsi (Agni), grand et sage, honoré par nos libations, engendre l’onde du nuage, et renaît lui-même au sein de (l’onde) des œuvres (saintes)[429].

5. Il croît et se manifeste avec clarté dans les eaux (du sacrifice) ; il s’élève ensuite glorieux au sein des (ondes) voyageuses. (Le Ciel et la Terre) tremblent devant Twachtri[430] sortant de son berceau, et vénèrent ce lion (des batailles).

6. Tous les deux le vénèrent, tels que deux serviteurs ; ils le suivent comme les vaches suivent leurs nourrissons. Et lui, il est le maître de la force ; et les (prêtres), commençant par la droite[431] leurs cérémonies, l’honorent de leurs holocaustes.

7. Pareil à Savitri, il étend au loin ses bras[432], et, terrible, il travaille à former son double vêtement[433]. Il emprunte partout les vapeurs qui composent son corps éblouissant, et il donne à ses nourrices fécondes de nouveaux habillements.

8. Quand ce dieu sage et protecteur élève ainsi dans les airs sa forme brillante, se mêlant aux ondes voyageuses, il couvre au loin la voûte céleste d’une armée de nuages qu’il soutient et qu’il a rassemblée.

9. Tu ressembles à un roi grand et victorieux, dont les splendeurs s’étendent par tout le ciel qu’il aurait pour palais. Ô Agni, ô toi qui t’environnes de feux d’une nature glorieuse et invincible, défends-nous, sois notre protecteur !

10. (Agni) fait du nuage un torrent qui arrose les airs ; il couvre la terre de flots limpides ; dans son sein il conserve tous les germes de l’abondance ; il pénètre dans les plantes nouvelles.

11. Ô Agni, (dieu) purifiant, que notre foyer recueille et nourrit, brille, et pourvois magnifiquement à nos besoins ! Qu’ils nous protègent également, Mitra, Yarouna, Aditi, la Mer, la Terre et le Ciel !


HYMNE II.

À Agni, par Coutsa.

(Mètre : Trichtoubh.)

1. Agni, à peine enfanté par la Force, a déjà toute la figure et la sagesse de l’âge mûr. Que les ondes (du sacrifice) et la prière achèvent de perfectionner (ce dieu), leur ami ! Que les Dévas conservent Agni le bienfaiteur !

2. Il fut l’objet des antiques chants d’Ayou[434] ; il a propagé la race de Manou par sa force, qui soutient le ciel et les eaux. Que les Dévas conservent Agni le bienfaiteur !

3. Ô peuples, venez donc, et louez avant tous ce fils de la Force qui accomplit le sacrifice, et qui, honoré par nos invocations et nos hymnes, est notre soutien et notre généreux protecteur. Que les Dévas conservent Agni le bienfaiteur !

4. Que ce pasteur des peuples, qui est le maître du bonheur, le père du Ciel et de la Terre, et qui, tel que les dieux du vent, nous amène tous les biens, aplanisse les voies devant mon fils ! Que les Dévas conservent Agni le bienfaiteur !

5. La Nuit et l’Aurore, qui mutuellement se détruisent leur couleur, s’approchent pour nourrir celui qu’elles ont tour à tour enfanté[435]. Entre le ciel et la terre, il brille d’un vif éclat. Que les Dévas conservent Agni le bienfaiteur !

6. Qu’il vienne et soit avec nous, (ce dieu) source d’opulence et de biens, héraut du sacrifice, protecteur prêt à combler nos vœux ! Gardiens de son immortalité, que les Dévas conservent Agni le bienfaiteur !

7. Il fut autrefois, il est aujourd’hui le trésor de toute richesse, le siége de ce qui est né et de ce qui naît, le gardien de tout ce qui existe. Que les Dévas conservent Agni le bienfaiteur !

8. Bienfaiteur, qu’il nous accorde des biens (toujours si) fugitifs ; bienfaiteur, qu’il nous prodigue la richesse ; bienfaiteur, qu’il nous donne une maison forte et abondante ; bienfaiteur, qu’il nous octroie une longue vieillesse !

9. Ô Agni, (dieu) purifiant, que notre foyer recueille et nourrit, brille, et pourvois magnifiquement à nos besoins. Qu’ils nous protègent également, Mitra, Varouna, Aditi, la Mer, la Terre et le Ciel !


HYMNE III.

À Agni, par Coutsa.

(Mètre : Gâyatrî.)

1. Que notre faute soit effacée, ô Agni ! purifie notre fortune. Que notre faute soit effacée !

2. Nous demandons, en t’offrant le sacrifice, de beaux champs, de la prospérité, des richesses. Que notre faute soit effacée !

3. Si le premier des chantres (divins) ici présents, si nos chefs de famille s’avancent (pour t’honorer), que notre faute soit effacée !

4. Ô Agni ! si ces chefs de famille, si nous-mêmes nous nous avançons avec respect, puissions-nous obtenir la victoire ! Que notre faute soit effacée !

5. Si les rayons lumineux du puissant Agni s’avancent de toute part, que notre faute soit effacée !

6. En effet, te voilà, toi dont la face est tournée de tous les côtés, te voilà embrassant de toute part (nos offrandes). Que notre faute soit effacée !

7. Ô toi, dont la face est tournée de tous les côtés, sois pour nous comme le navire sur lequel nous passions à travers nos ennemis. Que notre faute soit effacée ! 8. Daigne, comme sur un vaisseau, nous faire traverser l’océan (de la vie, et nous conduire) au bonheur. Que notre faute soit effacée !


HYMNE IV.

À Agni, par Coutsa.

(Mètre : Trichtoubh.)

1. Soyons les amis de Vêswânara[436] ; il est le roi vénéré des mondes. Né d’ici-même, il a l’œil ouvert sur toute la nature. Vêswânara est le rival du soleil.

2. On implore Vêswânara, on le sent partout, au ciel, sur la terre, dans les plantes, (dans l’Aranî), d’où le tire la violence. Qu’Âgni nous défende contre nos ennemis et la nuit et le jour !

3. Ô Vêswânara, que ce sacrifice te soit agréable ! Que l’opulence devienne notre compagne ! Qu’ils nous protègent également, Mitra, Varouna, Aditi, la Mer, la Terre et le Ciel !


HYMNE V.

À Agni, par Casyapa.

(Mètre : Trichtoubh.)

1. Faisons des libations au (dieu) qui connaît tous les biens. Qu’il consume la richesse de notre ennemi ! Qu’Agni nous arrache à tous les dangers, et nous fasse traverser le malheur, comme sur un vaisseau (on traverse) la mer !


HYMNE VI.

À Indra, par les cinq Richis.

(Mètre : Trichtoubh.)

1. Que le (dieu) bienfaisant, qui habite avec la Force, que le roi de la terre et du vaste ciel, riche en présents et digne d’être invoqué au moment du danger, qu’Indra, accompagné des Marouts, vienne à notre secours !

2. Que ce (dieu), qui, le plus généreux de tous pour ses amis fidèles, est dans tous les combats fort et vainqueur de Vritra ; que (ce dieu), dont la marche est aussi rapide que celle du soleil, qu’Indra, accompagné des Marouts, vienne à notre secours !

3. Que le (dieu) qui triomphe de ses ennemis et qui se distingue par ses promesses, qui, dans ses voies puissantes, insurmontables, enlève en quelque sorte au ciel sa semence féconde ; qu’Indra, accompagné des Marouts, vienne à notre secours !

4. Il est parmi les Angiras[437] le plus grand, parmi les bienfaiteurs le plus généreux, parmi les amis le plus dévoué, le premier parmi les êtres dignes d’être loués et célébrés. Qu’Indra, accompagné des Marouts, vienne à notre secours !

5. Que Ce (dieu) puissant, qui dans le combat soutient le choc de ses ennemis, et qui fait descendre la pluie féconde[438] de concert avec les Roudras qui sont comme ses enfants, habitants du même séjour que lui ; qu’Indra, accompagné des Marouts, vienne à notre secours !

6. Qu’il abatte la colère (de nos ennemis) ; et après (ces combats) qui l’enivrent (d’un juste orgueil), qu’il fasse luire aujourd’hui le soleil à nos yeux, lui qui est le maître de la piété, lui qu’implorent nos prières ! Qu’Indra, accompagné des Marouts, vienne à notre secours !

7. Les (Marouts), ses auxiliaires, au moment de ses luttes héroïques l’encouragent par leurs clameurs ; les hommes le reconnaissent comme le dépositaire de tout bonheur. Il est le seul maître de toute œuvre de miséricorde. Qu’Indra, accompagné des Marouts, vienne à notre secours !

8. Dans les poursuites qui demandent de la force, c’est lui, c’est ce héros qu’implorent les héros, c’est lui aussi qu’invoque l’homme qui veut la richesse. C’est lui qui, au sein de l’obscurité, fait briller la lumière. Qu’Indra, accompagné des Marouts, vienne à notre secours !

9. De sa main gauche contenant ses ennemis, il reçoit de la droite nos offrandes. L’hymne sacré sait émouvoir sa générosité. Qu’Indra, accompagné des Marouts, vienne à notre secours !

10. Il peut aujourd’hui, et chacun le reconnaît, (il peut) donner des villages, des chars, des peuples entiers. Par des actions d’éclat il triomphe de ses vils (adversaires). Qu’Indra, accompagné des Marouts, vienne à notre secours !

11. Que ce (dieu), qu’implore notre piété, arrive seul ou avec les (Marouts) ses parents, pour répandre (sur la terre) les trésors de la pluie, c’est pour le bonheur de nos enfants. Qu’Indra, accompagné des Marouts, vienne à notre secours !

12. Ce (dieu) terrible et effrayant est armé de la foudre ; vainqueur des Dasyous, il possède mille qualités éminentes ; il est grand, il est digne de commander au monde. (Pur) comme le soma, il protège par sa force les cinq classes d’êtres[439]. Qu’Indra, accompagné des Marouts, vienne à notre secours !

13. Sa foudre retentit au loin, brillant d’un éclat céleste, féconde en bienfaits, aussi efficace que bruyante. Les bienfaits et les dons sont sur ses pas. Qu’Indra, accompagné des Marouts, vienne à notre secours !

14. Que (le dieu) dont la puissance infinie protège avec gloire le ciel et la terre, qu’il enveloppe de toute part, heureux de nos sacrifices, soit notre défenseur ! Qu’Indra, accompagné des Marouts, vienne à notre secours !

15. Que ce (maître) dont les dieux n’égalent pas les qualités divines, dont les mortels et les eaux ne sauraient mesurer la puissance, par sa force souverain de la terre et du ciel, qu’Indra, accompagné des Marouts, vienne à notre secours !

16. Pour le bonheur de Ridjrâswa[440] et la joie du peuple de Nahoucha[441], apparaît la forme (du dieu, forme) céleste, resplendissante, azurée. Attelés au timon, (ses coursiers) traînent son char, rempli de ses heureux présents.

17. Ô généreux Indra, accepte cet hommage que t’adresse la voix des enfants de Vrichâgiri[442], de Ridjrâswa assisté des autres (Richis), d’Ambarîcha, de Sahadéva, de Bhayamâna, de Sourâdhas !

18. Appelé par la prière, il vient attaquer les redoutables Dasyous, et les terrasse d’un coup mortel. Aidé de ses brillants auxiliaires, et armé de sa foudre, il délivre la terre, le soleil et les eaux.

19. Qu’Indra soit chaque jour notre protecteur. Puissions-nous, exempts d’infortune, jouir de ses bienfaits ! Qu’ils nous protègent également, Mitra, Varouna, Aditi, la Mer, la Terre et le Ciel !


HYMNE VII.

À Indra, par Coutsa.

(Mètres : Djagatî et Trichtoubh.)

1. Faites offrande de vos hymnes et de vos libations à ce (dieu), auteur de tout bien, qui, avec Ridjiswan[443], a tué les épouses enceintes de Crichna[444]. Nous avons besoin de ce protecteur généreux, dont la main est armée du tonnerre. C’est lui, accompagné des Marouts, que nous appelons à notre secours.

2. Cet Indra qui, enflammé de colère, a brisé Vritra, frappé Sambara et Piprou l’impie, détruit Souchna[445] sous ses propres ondes ; c’est lui, accompagné des Marouts, que nous appelons à notre secours.

3. Cet Indra qui, par sa mâle vertu, produit le ciel et la terre, qui commande à Varouna et au Soleil, qui fait à son gré couler les fleuves ; c’est lui, accompagné des Marouts, que nous appelons à notre secours.

4. Cet Indra qui est le pasteur souverain des chevaux et des vaches, qui, comblé de nos hommages, s’affermit dans toutes ses œuvres, qui renverse l’impie malgré sa force ; c’est lui, accompagné des Marouts, que nous appelons à notre secours.

5. Cet Indra qui est le maître de tous les êtres animés, qui jadis rendit les vaches (célestes) au sage (Vrihaspati)[446], qui vainquit et renversa les Dasyous ; c’est lui, accompagné des Marouts, que nous appelons à notre secours.

6. Cet Indra qu’invoquent également les forts et les faibles, l’homme qui fuit et l’homme qui triomphe, que tous les mondes adorent avec respect ; c’est lui, accompagné des Marouts, que nous appelons à notre secours.

7. Il vient, brillant et annoncé par les Rendras. La voix (de la prière) et celle de ces Rendras étend et fortifie sa puissance. Cet Indra, dont l’hymne raconte et célèbre les exploits ; c’est lui, accompagné des Marouts, que nous appelons à notre secours.

8. (Ô dieu) allié des Marouts, que tu sois en ce moment heureusement retenu dans ton séjour supérieur, ou dans la partie inférieure (du ciel), viens ici vers notre sacrifice ! toi qui possèdes les véritables richesses, c’est toi que nous désirons, toi pour qui nous offrons cet holocauste.

9. Ô Indra, (dieu) fort et ami de nos hommages, pour toi nous versons ce soma, pour toi nous offrons cet holocauste. (Viens) donc sur ton char brillant, accompagné de la troupe des Marouts, (viens) jouir de nos libations, et assister, sur cette couche de cousa, à notre sacrifice.

10. Oui, viens avec tes coursiers jouir de nos libations, ô Indra ! Que ta bouche, que tes lèvres s’ouvrent (à la douceur de nos offrandes). (Dieu) à la noble face, que tes chevaux t’amènent vers nous, et que nos holocaustes comblent tes désirs !

11. Gardiens d’un sacrifice dans lequel on unit l’éloge des Marouts à celui d’Indra, puissions-nous jouir des bienfaits (de ces dieux) ! Qu’ils nous protègent également, Mitra, Varouna, Aditi, la Mer, la Terre et le Ciel !


HYMNE VIII.

À Indra, par Coutsa.

(Mètres : Djagatî et Trichtoubh.)

1. J’offre cette grande prière à toi, (dieu) grand, parce que ton âme se plaît à l’hymne du poëte. Pour développer, pour accroître la force du victorieux Indra, que les Dévas se livrent avec lui aux joies du sacrifice !

2. Les sept fleuves[447] sont les témoins de sa puissance ; le ciel, la terre et l’air, (les témoins) de sa forme merveilleuse. Pour nous donner le bonheur de te voir et d’avoir foi en toi, ô Indra, le soleil et la lune apparaissent tour à tour.

3. Ô Maghavan, dirige vers nous, pour notre satisfaction, ton char victorieux, qui, dans le combat, cause notre félicité. Indra, toi qu’au moment du danger invoque notre prière, ô Maghavan, accorde-nous le bonheur, à nous qui te sommes dévoués !

4. Puissions-nous, avec un auxiliaire tel que toi, remporter la victoire ! Protège notre cause, et conserve-nous en toute occasion. Indra, ouvre-nous le chemin de la prospérité ! Maghavan, détruis les forces de nos ennemis !

5. Ô toi qui possèdes la richesse, tous ces hommes ici présents te célèbrent et implorent ton appui. (Viens) nous apporter tes biens, monte sur ton char victorieux. Indra, tu es ferme et constant dans tes affections.

6. Le bras d’Indra triomphe pour la délivrance des vaches (célestes) ; il est tout puissant, infini, indépendant, incomparable pour sa force. En toute occasion son secours remplace le nombre, et il donne la prospérité. Voilà pourquoi les hommes l’invoquent pour obtenir la richesse.

7. Ô Maghavan, tes bienfaits répandus sur notre peuple suffisent à des centaines, à des milliers de personnes. Notre prière est grande, et essaye de mettre en relief ta grandeur immense. Dieu qui détruis les villes (des Asouras), tu peux bien frapper de mort nos ennemis !

8. Telle qu’un triple cordage, ta force est sans égale ; roi des hommes, tu conserves les trois mondes, les trois feux[448], tout cet univers. Indra, par ta nature tu ne saurais avoir d’ennemis.

9. Nous t’invoquons le premier parmi les dieux. Tu es notre soutien dans les combats. Qu’Indra rende notre char de bataille terrible comme le sien, capable de fendre les rangs de nos ennemis, et de briller à l’attaque avant tous les autres.

10. Tu triomphes, et tu ne nous envies pas les fruits de la victoire, ô Maghavan, quelle que soit l’importance du combat. Tu es redoutable, et nous t’invitons à nous secourir. Indra, viens nous seconder quand nous t’invoquons !

11. Qu’Indra soit chaque jour notre protecteur. Puissions-nous, exempts d’infortune, jouir de ses bienfaits ! Qu’ils nous protègent également, Mitra, Varouna, Aditi, la Mer, la Terre et le Ciel !


HYMNE IX.

À Indra, par Coutsa.

(Mètres : Djagatî et Trichtoubh.)

1. Les sages ont autrefois ressenti les effets de ta puissance souveraine, et redoutable pour tes ennemis. Comme étendard, tu déploies à la fois sur la terre le feu de notre sacrifice, dans le ciel le feu du soleil.

2. C’est Indra qui étend et soutient la terre, lui qui de sa foudre frappe (les Asouras), et répand les ondes ; lui, Maghavan, qui terrasse Ahi, tue Rôhina[449], et brise sous ses coups les membres (de Vritra).

3. Ce (dieu) qui soutient les êtres, plein de confiance en sa force, apparaît pour détruire les villes des Dasyous. maître sage et armé de la foudre, lance ton trait sur le Dasyou, et augmente la force et la gloire de l’Arya[450] !

4. Quand un mortel prodiguant les libations et les hymnes honore Maghavan, alors (le dieu), armé de sa foudre, court frapper le Dasyou, et, pour son serviteur, il va conquérir ce renom mémorable qui doit durer autant que les âges humains.

5. Voyez donc les effets infinis de la puissance de (ce dieu) ; ayez foi en la force d’Indra ; c’est à lui que nous devons les vaches, les chevaux, les plantes, les eaux, les forêts.

6. Versons le soma en l’honneur du (dieu) puissant, libéral et généreux, qui possède la force de la justice, qui, noble héros, sait, tel que le brigand du grand chemin, dresser une embûche à l’impie[451], et distribuer ses dépouilles.

7. Ô Indra, le haut fait dont tu peux te glorifier, c’est d’avoir avec ta foudre réveillé Ahi, qui s’endormait[452]. Tu triomphes, et ta joie est partagée par tous les dieux, par leurs (saintes) épouses[453], et par ceux à qui leur vitesse donne des ailes[454].

8. Quand tu frappais Souchna, Piprou, Couyava, Vritra, ô Indra, tu brisais aussi les villes de Sambara[455]. Qu’ils nous protègent également, Mitra, Varouna, Aditi, la Mer, la Terre et le Ciel !


HYMNE X.

À Indra, par Coutsa.

(Mètre : Trichtoubh.)

1. Ô Indra, nous t’avons préparé ton siége au sacrifice ; viens, comme un coursier hennissant, occuper ta place. (Viens) à nos libations, poussant, excitant les chevaux ailés qui te transportent et le jour et la nuit.

2. Ces hommes viennent à Indra, implorant son secours. Qu’il daigne diriger leurs voies ! Que les Dévas (par leurs prières) détournent la colère de l’Asoura ; qu’ils amènent pour notre salut (le dieu) protecteur !

3. Voilà que Couyava, s’emparant du trésor des nuages, réserve pour lui seul l’onde écumante. Ses deux épouses[456] se baignent dans ce lait (céleste). Qu’elles soient frappées, et viennent grossir le cours de la Siprâ[457].

4. Le séjour d’Ayou[458], voisin (de ses ondes), en est submergé. Cependant le héros (céleste) éclate, épuisant le flanc (des nuages). L’Andjasî, la Coulisî et la Vîrapatnî[459] se gonflent, et portent dans leur sein le lait (tombé du ciel).

5. Quand nous apercevons la marche du Dasyou et qu’il se dirige vers notre demeure comme s’il en connaissait le chemin, ô Maghavan, alors défends-nous contre ses attaques. Ne nous dédaigne pas, comme le débauché (dédaigne) les richesses (qu’il prodigue).

6. Ô Indra, permets-nous de jouir du soleil et des eaux ! Donne-nous une vertu que les autres puissent vanter. Conserve le fruit que renferme le sein (de nos épouses). Nous avons foi en ta grande puissance.

7. Oui, je le confesse, j’ai foi dans un (dieu) tel que toi. Que ta libéralité nous comble de biens ! Indra, que nous invoquons avec ferveur, ne nous livre pas à l’indigence, et satisfais largement à notre faim et à notre soif.

8. Garde-toi de nous frapper, ou de nous délaisser. Ne nous enlève pas nos douces jouissances. Maghavan, ô Sacra, ne brise pas l’œuf qui contient (nos espérances) ! ne brise pas ces vases (de nos affections), ces tendres enfants qui se traînent sur leurs genoux !

9. Viens donc vers nous. On dit que tu aimes le soma. Nous t’en avons préparé : bois-en jusqu’à l’ivresse : remplis tes larges entrailles. Nous t’appelons, daigne nous écouter comme un père !


HYMNE XI.

À tous les dieux, par Coutsa.

(Mètres : Trichtoubh, et Mahâvrihatî.)

1. Tchandramas[460], poursuivant son vol à travers les vagues de l’air, s’avance dans le ciel. Ô rayons à la trace dorée, (l’œil)[461] ne peut trouver votre voie. Ciel et Terre, voyez ce que je suis.

2. Qui demande, obtient. La femme a obtenu un mari. Le désir des deux époux s’est enflammé ; et la femme a conçu un germe précieux de cet amour[462]. Ciel et Terre, voyez ce que je suis.

3. Dévas, que l’heureux aliment destiné à ce brillant (nourrisson) n’aille point tomber sans effet ! Ne soyons pas réduits à perdre ce (fils) fortuné, digne de nos libations ! Ciel et Terre, voyez ce que je suis.

4. Je m’adresse, avant tout, au dieu protecteur du sacrifice. (Agni) notre messager peut bien dire (aux autres dieux) : « Qu’est devenu le fruit de nos sacrifices passés ? Quel est votre nouveau favori ? » Ciel et Terre, voyez ce que je suis.

5. Ô dieux, qui habitez ces trois mondes qu’enveloppe la lumière céleste, où est pour vous la justice ou l’injustice ? Qu’est devenu le prix de notre ancienne piété ? Ciel et Terre, voyez ce que je suis.

6. Qu’avons-nous retiré de notre sacrifice ? Où est la forme de Varouna ? Sur quelle route est le grand Aryaman ? Comment pourrons-nous triompher de nos ennemis ? Ciel et Terre, voyez ce que je suis.

7. C’est moi qui, plus d’une fois, ai versé le soma et chanté des hymnes en votre honneur ; et c’est moi que surprend le malheur, tel que le loup (surprend) la biche altérée. Ciel et Terre, voyez ce que je suis.

8. Des douleurs poignantes[463], pareilles à des rivales jalouses, me déchirent de tout côté. Ô Satacratou, moi qui t’ai célébré, la peine me dévore, de même que les rats se dévorent la queue[464]. Ciel et Terre, voyez ce que je suis.

9. Ma demeure est l’endroit même où brillent les sept rayons lumineux[465]. Tel est l’espoir du fils des Eaux, de Trita[466] : il chante pour obtenir sa délivrance. Ciel et Terre, voyez ce que je suis.

10. Les cinq (dieux) qui donnent l’abondance[467] et qui se tiennent au centre du monde, après être venus, au milieu des autres, briller avec tant de gloire, sont retournés (dans leur séjour). Ciel et Terre, voyez ce que je suis.

11. Les (rayons) d’Agni aux ailes légères siégent seuls sous cette voûte céleste qui embrasse tout : ils écartent de sa route le loup[468] qui traverse les grandes ondes. Ciel et Terre, voyez ce que je suis.

12. Ô dieux, à vous j’adresse cette prière nouvelle, qui est faite pour vous plaire. Voilà que les ondes (du sacrifice) s’approchent d’Agni ; voilà que le soleil a rempli sa carrière. Ciel et Terre, voyez ce que je suis.

13. Ô Agni, tu es l’allié des Dévas, et cette alliance doit être célébrée par eux. Viens t’asseoir à notre foyer, comme jadis à celui de Manou, et, sage entre tous, fais le sacrifice aux dieux. Ciel et Terre, voyez ce que je suis.

14. Oui, qu’Agni, sage entre tous, vienne, en qualité de sacrificateur, s’asseoir à notre foyer, comme jadis à celui de Manou ; que ce dieu, prudent parmi les autres dieux, les appelle à nos holocaustes. Ciel et Terre, voyez ce que je suis.

15. Ce (dieu) sauveur accomplit l’œuvre sacrée ; nous l’invoquons, lui qui peut nous conduire dans la bonne voie ; il tire du cœur la prière, il est digne de nos louanges. Naisse donc le sacrifice ! Ciel et Terre, voyez ce que je suis.

16. Cet Aditya qui a été fait pour être avec tant de gloire le voyageur céleste, ô Dévas, n’est pas encore arrivé. Ô mortels, vous ne le voyez pas ! Ciel et Terre, voyez ce que je suis.

17. Trita, tombé dans un puits, appelait ainsi les dieux à son secours. Vrihaspati[469] l’a entendu, et l’a sauvé généreusement du danger. Ciel et Terre, voyez ce que je suis.

18. Le loup[470] au poil rougeâtre m’a vu sur la route. Aussitôt il s’est levé, comme l’ouvrier dont on frappe le dos. Ciel et Terre, voyez ce que je suis.

19. Par la vertu de cet hymne, puissions-nous, aidés d’Indra et secondés de tous nos guerriers, être vainqueurs dans le combat ! Qu’ils nous protégent également, Mitra, Varouna, Aditi, la Mer, la Terre et le Ciel !


HYMNE XII.

À tous les dieux, par Coutsa[471].

(Mètres : Djagatî et Trichtoubh.)

1. Nous appelons à notre secours Indra, Mitra, Varouna, Agni, la cohorte des Marouts, Aditi. (Dieux) généreux, qui êtes notre refuge, sauvez-nous du mal, comme on sauve un char d’un précipice !

2. Ô Adityas, venez au sacrifice qui s’offre pour tous les dieux ! Soyez nos protecteurs, quand il s’agit de frapper nos ennemis. (Dieux) généreux, qui êtes notre refuge, sauvez-nous du mal comme on sauve un char d’un précipice !

3. Soyons aussi protégés des Pitris[472], qui reçoivent nos justes hommages, et de ces deux divinités[473], dont nos sacrifices augmentent la grandeur, et qui ont enfanté les dieux. (Dieux) généreux, qui êtes notre refuge, sauvez-nous du mal, comme on sauve un char du précipice !

4. J’honore par mes offrandes (le dieu surnommé) Narâsansa[474], et riche en présents. Nous invoquons par nos hymnes Poûchan, qui est le recours des héros. (Dieux) généreux, qui êtes notre refuge, sauvez-nous du mal, comme on sauve un char du précipice !

5. Ô Vrihaspati[475], accorde-nous de marcher toujours dans la bonne voie ! Nous te demandons cette part de bonheur qui convient aux enfants de Manou. (Dieux) généreux, qui êtes notre refuge, sauvez-nous du mal, comme on sauve un char du précipice !

6. Le Richi Coutsa[476], tombé dans le malheur, a invoqué le secours d’Indra, le vainqueur de Vritra et l’époux de Satchî. (Dieux) généreux, qui êtes notre refuge, sauvez-nous du mal, comme on sauve un char du précipice !

7. Que la divine Aditi nous défende avec les autres dieux ! Que le dieu[477] infatigable, qui conserve tout, nous conserve aussi ! Qu’ils nous protègent également, Mitra, Varouna, Aditi, la Mer, la Terre et le Ciel !


HYMNE XIII.

À tous les dieux, par Coutsa.

(Mètre : Trichtoubh.)

1. Le sacrifice s’accomplit pour le plaisir des dieux. Ô Adityas, soyez-nous favorables ! Que votre bonté se tourne vers nous, (cette bonté) qui comble de biens les malheureux !

2. Que les dieux viennent à notre secours, célébrés par les chants des Angiras ! Pour notre bonheur, qu’Indra nous donne la force, les Marouts le souffle des vents, Aditi les Adityas !

3. Qu’Indra, Varouna, Agni, Aryaman, Savitri, nous accordent les aliments qui nous sont nécessaires ! Qu’ils nous protégent également, Mitra, Varouna, Aditi, la Mer, la Terre et le Ciel !


HYMNE XIV.

À Indra et à Agni, par Coutsa.

(Mètre : Trichtoubh.)

1. Ô Indra et Agni, sur ce char magnifique du haut duquel vous voyez tous les mondes, venez ensemble, et buvez du soma qui a été préparé.

2. Le soma que je vous offre à boire est aussi abondant que cet univers est large, profond, étendu. Ô Indra et Agni, qu’il suffise à vos désirs !

3. Vous avez avec gloire associé vos noms. Ensemble vous avez tué Vritra. Ensemble, ô Indra et Agni, venez vous asseoir (à notre sacrifice). Dieux généreux, goûtez du soma que vous verse le père de famille.

4. Ainsi les feux sont allumés pour vous ; le beurre, les coupes et le lit de cousa sont préparés en votre honneur ; les libations sont prodiguées ; ô Indra et Agni, venez ici pour notre bonheur.

5. Ô Indra et Agni, ces prouesses, ces manifestations vigoureuses, ces anciens témoignages d’une heureuse amitié, daignez les renouveler pour nous, et buvez du soma qui a été préparé !

6. J’ai déjà dit, en vous honorant avec respect, que ce soma était destiné à ces (dieux) qui sont notre vie[478]. Comptant sur ma parole, venez, et buvez du soma qui a été préparé.

7. Ô vous, dignes de nos sacrifices, Indra et Agni, en quelque demeure que vous soyez en ce moment, retenus par les plaisirs que vous a préparés la prévoyance d’un saint prêtre ou celle d’un prince[479], venez ici, (dieux) généreux, et buvez du soma qui a été préparé.

8. Ô Indra et Agni, que vous soyez chez les enfants d’Yadou, de Tourvasa, de Drouhyou, d’Anou ou bien de Poûrou[480], venez ici, (dieux) généreux, et buvez du soma qui a été préparé !

9. Ô Indra et Agni, que vous soyez dans le monde inférieur, intermédiaire ou supérieur[481], venez ici, (dieux) généreux, et buvez du soma qui a été préparé !

10. Oui, Indra et Agni, que vous soyez dans le monde supérieur, intermédiaire ou inférieur, venez ici, (dieux) généreux, et buvez du soma qui a été préparé !

11. Ô Indra et Agni, que vous soyez dans le ciel ou sur la terre ; que vous soyez dans les nuages, dans les plantes ou dans les ondes, venez ici, (dieux) généreux, et buvez du soma qui a été préparé !

12. Ô Indra et Agni, que vous soyez dans l’enivrement des offrandes qu’on vous présente au lever du soleil, ou bien au milieu du jour, venez ici, (dieux) généreux, et buvez du soma qui vous est préparé !

13. Ô Indra et Agni, buvez de ce soma, et accordez-nous tous les biens ! Qu’ils nous protègent également, Mitra, Varouna, Aditi, la Mer, la Terre et le Ciel !


HYMNE XV.

À Indra et à Agni, par Coutsa.

(Mètre : Trichtoubh.)

1. Ô Indra et Agni, je désire la fortune, et c’est vous que j’invoque avec la confiance qu’inspirent des parents ou des amis. Je n’ai pas d’autre protecteur que vous : c’est pour vous que j’ai préparé cet hymne et ces offrandes.

2. Je sais que vous êtes plus généreux qu’un amant ou qu’un frère de fiancée. Je vous offre donc ce soma, ô Indra et Agni, et je vous fais l’hommage d’un hymne nouveau.

3. Craignant de voir couper la chaîne (de leur race), et souhaitant de conserver le pouvoir viril de leurs pères, ces chefs de famille veulent, par leurs libations, se concilier la faveur d’Indra et d’Agni. Ces (dieux) terribles (pour leurs ennemis) s’approchent de ceux qui les louent.

4. Pour vous plaire, ô Indra et Agni, la sainte prière vous implore, et vous verse le soma. Entraînés par vos chevaux[482], (dieux) aux bras magnifiques, aux belles mains, accourez ; et, dans nos ondes (sacrées), enivrez-vous de douceurs.

5. Ô Indra et Agni, je sais quelle est votre force quand il s’agit de frapper Vritra, et de distribuer ses trésors. (Dieux) sages, venez donc vous asseoir sur le cousa de notre sacrifice, et savourer le soma.

6. Dans les combats, vous êtes plus forts que tous les hommes ; vous êtes plus étendus que la terre et le ciel, plus grands que les mers et les montagnes. Indra et Agni, vous êtes au-dessus de tous les autres êtres.

7. Ô Indra et Agni, (dieux) armés de la foudre, soyez prodigues de vos présents ; couvrez-nous de votre protection. C’est sous l’influence de ces mêmes rayons du soleil que nos pères sont arrivés au comble de leurs vœux.

8. Ô Indra et Agni, (dieux) qui brisez les villes (des Asouras), et armez vos bras de la foudre, sauvez-nous dans les dangers ! Qu’ils nous protègent également, Aditi, la Mer, Mitra, Varouna, la Terre et le Ciel !

HYMNE XVI.

Aux Ribhous, par Coutsa.

(Mètres : Djagatî et Trichtoubh.)

1. J’ai tout préparé pour l’œuvre (sainte) ; un nouvel hymne est chanté en l’honneur (des êtres divins). Cette mer (de soma) est versée pour tous les dieux. Ô Ribhous[483], réjouissez-vous de nos hommages !

2. Ô fils de Soudhanwan, ô vous qui, comme moi, descendez d’Angiras, vous n’aviez pas votre part aux offrandes[484] ; vous vous êtes rendus, pour vous la procurer, dans la demeure du généreux Savitri : vous comptiez (avec raison) sur vos mérites.

3. Et Savitri vous a donné l’immortalité, quand vous êtes venus vous mettre au service du (dieu) qui ne peut rester caché. C’est alors que la coupe d’Asoura[485], qui contenait les offrandes et qui était unique, vous l’avez divisée en quatre parties[486].

4. Prêtres accomplissant les saintes cérémonies avec diligence, quoique mortels, les Ribhous ont obtenu l’immortalité. Ces fils de Soudhanwan, (établis) dans le disque solaire et brillants comme l’astre du jour, sont invoqués par nos prières.

5. Les Ribhous ont partagé la coupe du sacrifice, comme avec un instrument tranchant on partage la terre. Loués et puissants à l’égal (des autres dieux), ils obtiennent, parmi les mortels, les offrandes qu’ils ont désirées.

6. Ainsi, en l’honneur de ces princes de l’air, nous offrons, par le moyen de la science, la prière, comme, par le moyen de la cuiller (sacrée), on offre le beurre du sacrifice. Les Ribhous, s’unissant aux vives clartés du père (de la nature), s’élèvent dans l’air pour alimenter le soleil.

7. Ribhou est pour nous un maître dont la force est toujours nouvelle : Ribhou nous accorde des aliments et des trésors ; il est notre refuge, notre bienfaiteur. Ô dieux, puissions-nous, avec votre secours et dans un jour favorable, attaquer les armées des impies !

8. Ô Ribhous, vous avez de la peau (d’une vache morte) couvert une vache (nouvelle), et rendu ainsi une mère au jeune veau[487]. Nobles fils de Soudhanwan, dans une pieuse intention vous avez donné la jeunesse à votre père et à votre mère, accablés sous le poids des ans[488].

9. Ô Indra, viens avec les Ribhous ! Donne-nous notre part dans les aliments que tu dispenses (aux hommes), accorde-nous l’abondance de tous les biens divers. Qu’ils nous protègent également, Mitra, Varouna, Aditi, la Mer, la Terre et le Ciel !


HYMNE XVII.

Aux Ribhous, par Coutsa.

(Mètres : Djagatî et Trichtoubh.)

1. Les Ribhous[489], savants ouvriers, ont construit (pour les Aswins) un char dont les roues sont merveilleuses. Ils ont donné pour le char d’Indra des coursiers qui répandent le trésor de l’abondance. Ils ont rendu la jeunesse à leurs parents. Ils ont pour un jeune veau créé une nouvelle mère.

2. En faveur de notre sacrifice, donnez-nous une nourriture abondante ; en faveur de nos hommages et de nos offrandes, accordez-nous une opulence que soutiennent de nombreux enfants. (Faites) que nous soyons entourés d’un peuple de héros. Pour notre bonheur, entourez-nous de force et de puissance.

3. Nobles Ribhous, donnez-nous la richesse, donnez-nous des chars, des chevaux ; donnez-nous la victoire. Que chaque jour on vante notre puissance, et que, seuls ou aidés de nos amis, nous soyons forts dans les combats.

4. J’appelle à notre secours Indra (appelé) Ribhoukchas, les Ribhous, les Vâdjas[490], les Marouts, Mitra et Varouna, les Aswins. Qu’ils viennent boire notre soma, et qu’ils nous donnent la richesse, la piété, la victoire !

5. Que Ribhou, par la force, nous prémunisse contre le danger ; que Vâdja le victorieux nous sauve ! Qu’ils nous protégent également, Mitra, Varouna, Aditi, la Mer, la Terre et le Ciel !


HYMNE XVIII.

Aux Aswins, par Coutsa.

(Mètres : Djagatî et Trichtoubh.)

1. Je chante en premier lieu le Ciel et la Terre[491], et Agni, resplendissant d’un si bel éclat au moment du sacrifice. La puissance avec laquelle vous faites dans le danger triompher un parti, montrez-la encore, ô Aswins, et secourez-nous !

2. Pour obtenir vos faveurs, des (serviteurs) dévoués, les mains chargées d’offrandes, s’approchent de votre char, et semblent vouloir entendre votre parole. La puissance avec laquelle vous accueillez la prière au moment du sacrifice, montrez-la encore, ô Aswins, et secourez-nous !

3. Par la force de la divine ambroisie, vous exercez sur ce peuple un généreux empire. Nobles protecteurs, la puissance avec laquelle vous avez su donner du lait à une vache stérile[492], montrez-la encore, ô Aswins, et secourez-nous !

4. La puissance avec laquelle se distingue entre les êtres rapides et légers celui qui a deux mères[493], et qui, glorieux de la majesté de son fils, parcourt (le monde) ; avec laquelle un sage[494] a été doué d’une triple science, montrez-la encore, ô Aswins, et secourez-nous !

5. La puissance avec laquelle vous avez ramené à la lumière du jour et Rébha et Bandana[495] enfermés dans les ténèbres d’un puits ; avec laquelle vous avez sauvé Canwa,[496] qui demandait la guérison de ses maux, montrez-la encore, ô Aswins, et secourez-nous !

6. La puissance avec laquelle vous avez protégé Antaca[497] blessé et plongé dans un gouffre, Bhoudjyou[498], Carcandhou et Vayya[499], montrez-la encore, ô Aswins, et secourez-nous !

7. La puissance avec laquelle vous avez rendu Soutchanti[500] riche et puissant ; avec laquelle vous avez apaisé en faveur d’Atri[501] le brillant et fortuné (Agni) ; avec laquelle vous avez sauvé Prisnigou et Pouroucoutsa[502], montrez-la encore, ô Aswins, et secourez-nous !

8. (Dieux) bienfaisants, la puissance avec laquelle vous avez fait voir et marcher Parâvridj[503] aveugle et boiteux ; avec laquelle vous avez délivré un passereau dévoré[504], montrez-la encore, ô Aswins, et secourez-nous !

9. La puissance avec laquelle vous avez rendu l’onde[505] aussi douce que le miel ; avec laquelle, (dieux) toujours jeunes, vous avez sauvé Vasichtha[506], conservé Coutsa[507], Sroutarya et Narya[508], montrez-la encore, ô Aswins, et secourez-nous !

10. La puissance avec laquelle vous avez, dans la bataille qui procure mille trésors, soutenu la marche chancelante de l’opulente Vispalâ[509] ; avec laquelle vous avez protégé votre serviteur Vasa, fils d’Aswa[510], montrez-la encore, ô Aswins, et secourez-nous !

11. La puissance avec laquelle vous avez, (dieux) généreux, ouvert le doux trésor (de la pluie) au fils d’Ousidj, à Dîrghasravas[511], devenu marchand ; avec laquelle vous avez protégé votre serviteur Cakchîvân[512], montrez-la encore, ô Aswins, et secourez-nous !

12. La puissance avec laquelle vous avez rempli la Rasa[513] d’une onde impétueuse ; avec laquelle vous avez poussé à la victoire un char privé de ses chevaux, et rendu à Trisoca[514] ses vaches (enlevées), montrez-la encore, ô Aswins, et secourez-nous !

13. La puissance avec laquelle vous avez, à l’horizon lointain, débarrassé le soleil (des ténèbres) qui l’environnaient ; avec laquelle vous avez augmenté les domaines de Mandhâtri[515], et conservé le sage Bharadwâdja[516], montrez-la encore, ô Aswins, et secourez-nous !

14. La puissance avec laquelle vous avez, dans les combats contre Sambara, protégé le grand Atithigwa[517], Divodâsa[518] submergé[519]; avec laquelle vous avez, dans le sac d’une ville, sauvé Trasadasyou[520], montrez-la encore, ô Aswins, et secourez-nous !

15. La puissance avec laquelle vous avez apaisé la soif du célèbre Vamra[521], sauvé Cali[522] au moment de son mariage, défendu Prithi[523] privé de son cheval, montrez-la encore, ô Aswins, et secourez-nous !

16. La puissance avec laquelle, ô (dieux) vaillants, vous avez arraché au danger Sayou[524], Atri[525] et l’antique Manou ; avec laquelle, en faveur de Syoûmarasmi[526], vous avez su lancer des flèches, montrez-la encore, ô Aswins, et secourez-nous !

17. La puissance avec laquelle vous avez, dans le combat, fait briller, comme un feu artistement dressé, Patharvan[527], remarquable par son ventre ; avec laquelle vous avez protégé Saryâta[528] dans la bataille, montrez-la encore, ô Aswins, et secourez-nous !

18. La puissance avec laquelle, entrant dans la pensée des Angiras, vous avez marché les premiers pour délivrer les vaches prisonnières[529] ; avec laquelle vous avec comblé de biens l’héroïque Manou, montrez-la encore, ô Aswins, et secourez-nous !

19. La puissance avec laquelle vous avec délivré les épouses de Vimada[530] ; avec laquelle vous avez fait largesse (de vaches) rougeâtres, et donné à Soudas[531] une merveilleuse opulence, montrez-la encore, ô Aswins, et secourez-nous !

20. La puissance avec laquelle vous avez, ô (dieux) bienfaisants, secondé votre serviteur, protégé Bhoudjyou et Adhrigou[532], et accordé à Ritasthoubh[533] le bonheur et la gloire, montrez-la encore, ô Aswins, et secourez-nous !

21. La puissance avec laquelle vous avez soutenu Crisânou[534] dans un combat ; sauvé, en excitant sa vitesse, le cheval d’un jeune (héros)[535], et donné à des abeilles un miel agréable, montrez-la encore, ô Aswins, et secourez-nous !

22. La puissance avec laquelle vous avez, dans une rencontre de guerriers, défendu Nara[536] qui combattait pour ses troupeaux de vaches ; avec laquelle, lui accordant et des terres et des enfants, vous avez sauvé ses chars et ses chevaux, montrez-la encore, ô Aswins, et secourez-nous !

23. La puissance avec laquelle vous avez, ô (dieux) dignes de cent sacrifices[537], protégé Coutsa, fils d’Ardjouna[538] Tourvîti[539] et Dabhîti[540], sauvé Dhwasanti[541] et Pourounchati[542], montrez-la encore, ô Aswins, et secourez-nous !

24. Ô Aswins, (dieux) secourables et généreux, rendez fécondes en résultats et notre parole et notre pensée. Je vous appelle à notre aide, quand le jour ne luit pas encore. Daignez augmenter notre bonheur, et nous accorder l’abondance !

25. Jour et nuit, ô Aswins, veillez sur nous, et comblez-nous de vos faveurs ! Qu’ils nous protègent également, Mitra, Varouna, Aditi, la Mer, la Terre et le Ciel !




LECTURE HUITIÈME

HYMNE I.

À l’Aurore, par Coutsa.

(Mètre : Trichtoubh.)

1. La plus douce des lumières se lève ; elle vient de ses rayons colorer partout la nature. Fille du Jour[543], la Nuit a préparé le sein de l’Aurore, qui doit être le berceau du Soleil.

2. Belle de l’éclat de son nourrisson[544], la blanche Aurore s’avance ; la noire déesse a disposé son trône. Toutes deux alliées au Soleil, (l’une comme sa fille, l’autre comme sa mère), toutes deux immortelles, se suivant l’une l’autre, elles parcourent le ciel, l’une à l’autre s’effaçant tour à tour leurs couleurs.

3. Ce sont deux sœurs qui poursuivent sans fin la même route ; elles y apparaissent tour à tour, dirigées par le divin (Soleil). Sans se heurter jamais, sans s’arrêter, couvertes d’une douce rosée, la Nuit et l’Aurore sont unies de pensée et divisées de couleurs.

4. Ramenant la parole et la prière[545], l’Aurore répand ses teintes brillantes ; elle ouvre pour nous les portes (du jour). Elle illumine le monde, et nous découvre les richesses (de la nature) ; elle visite tous les êtres.

5. Le monde était courbé par le sommeil ; tu annonces que le temps est venu de marcher, de jouir de la vie, de songer aux sacrifices, d’augmenter sa fortune. L’obscurité régnait. L’Aurore éclaire au loin l’horizon, et visite tous les êtres.

6. Richesse, abondance, honneur, sacrifices, voilà des biens vers lesquels tout ce qui respire va marcher à la lumière de tes rayons ; l’Aurore va visiter tous les êtres.

7. Fille du ciel, tu apparais, jeune, couverte d’un voile brillant, reine de tous les trésors terrestres ; Aurore, brille aujourd’hui fortunée pour nous.

8. Suivant les pas des Aurores passées, tu es l’aînée des Aurores futures, des Aurores éternelles. Viens ranimer tout ce qui est vivant, Aurore ! viens vivifier ce qui est mort !

9. Aurore, c’est toi qui allumes le feu du sacrifice, toi qui révèles (au monde) la lumière du soleil, toi qui éveilles les hommes pour l’œuvre sainte. Telle est la noble fonction que tu exerces parmi les dieux.

10. Depuis combien de temps l’Aurore vient-elle nous visiter ? Celle qui arrive aujourd’hui imite les anciennes qui nous ont lui déjà, comme elle sera imitée de celles qui nous luiront encore ; elle vient, à la suite des autres, briller pour notre bonheur.

11. Ils sont morts, les humains qui voyaient l’éclat de l’antique Aurore ; nous aurons leur sort, nous qui voyons celle d’aujourd’hui ; ils mourront aussi, ceux qui verront les Aurores futures.

12. Toi qui repousses nos ennemis, qui favorises les sacrifices, née au moment même du sacrifice[546]; loi qui inspires l’hymne et encourages la prière ; toi qui amènes les heureux augures et les rites agréables aux dieux, bonne Aurore, sois-nous aujourd’hui favorable.

13. Dans les temps passés l’Aurore a brillé avec éclat ; de même aujourd’hui elle éclaire richement le monde ; de même dans l’avenir elle resplendira. Elle ne connaît pas la vieillesse, elle est immortelle ; elle s’avance, ornée sans cesse de nouvelles beautés.

14. De ses clartés elle remplit les régions célestes ; déesse lumineuse, elle repousse la noire déesse. Sur son char magnifique traîné par des coursiers rougeâtres, l’Aurore vient, éveillant (la nature).

15. Elle apporte les biens nécessaires à la vie de l’homme, elle déploie un étendard brillant ; elle nous appelle, pareille aux Aurores qui l’ont toujours précédée, pareille aux Aurores qui la suivront toujours.

16. Levez-vous ; l’esprit vital est venu pour nous. L’obscurité s’éloigne, la lumière s’avance ; elle prépare au soleil la voie qu’il doit parcourir. Nous allons reprendre les travaux qui soutiennent la vie.

17. Le ministre du sacrifice élève la voix pour célébrer en vers les lumières de l’Aurore. Loin des yeux de celui qui te loue, repousse l’obscurité ; Aurore, bénis, en les éclairant de tes rayons, le père de famille et ses enfants.

18. Le mortel qui t’honore voit briller pour lui des Aurores qui multiplient ses vaches et lui donnent des enfants vigoureux. Puisse celui qui t’offre ces libations accompagnées de la prière (qui résonne) comme un vent (favorable), puisse-t-il obtenir des Aurores fécondes en beaux coursiers !

19. Mère des dieux[547], œil de la terre[548], messagère du sacrifice, noble Aurore, brille pour nous ; approuve nos vœux, et répands sur nous ta lumière. Toi qui fais la joie de tous, rends-nous fameux parmi les nôtres.

20. Les biens divers qu’apportent les Aurores sont le partage de celui qui les honore et qui les chante. Qu’ils nous protègent également, Mitra, Varouna, Aditi, la Mer, la Terre et le Ciel.


HYMNE II.

À Roudra, par Coutsa.

(Mètres : Djagatî et Trichtoubh.)

1. Nous adressons l’offrande de ces prières au puissant Roudra[549], qui est le refuge des hommes ; (à Roudra), qui est distingué par sa chevelure[550]. Bien portant soit en ce canton tout (être aimé), bipède ou quadrupède ! Que tout ce qui vit y soit exempt de mal !

2. Sois bon pour nous, ô Roudra, et fais notre félicité ! Nous t’honorons, nous te bénissons, toi qui es le refuge des hommes. Et cette part de bonheur que Manou, notre père, nous a assurée par ses sacrifices, ô Roudra, que nous l’obtenions par toi !

3. Par la vertu du divin sacrifice, que nous obtenions ta faveur, ô Roudra, toi qui es le refuge des hommes, et qui donnes la pluie. Viens vers notre peuple pour faire son bonheur : puissions-nous, sains et bien portants, t’offrir notre holocauste !

4. Nous appelons à notre secours le sage et brillant Roudra, ce (dieu) à la marche oblique[551], qui consomme le sacrifice. Qu’il écarte loin de nous la colère du ciel ! C’est sa faveur que nous souhaitons.

5. Nous invoquons, en l’honorant, le sanglier[552] céleste, aux formes rougeâtres, ce (dieu) éblouissant, distingué par sa chevelure. Sa main nous présente de précieux spécifiques. Qu’il nous donne nourriture, vêtement et maison !

6. En l’honneur du père[553] des Marouts, et pour augmenter la gloire de Roudra, nous chantons cet hymne, que rien n’égale en douceur. (Dieu) immortel, accorde-nous la nourriture des mortels. Sois bon pour moi, pour mon fils et mon petit-fils.

7. Épargne parmi nous le vieillard et l’enfant, le père et le fils. Épargne celui et celle qui nous ont donné le jour ; ô Roudra, abstiens-toi de frapper les personnes qui nous sont chères !

8. Ô Roudra, grâce pour nos fils et nos petits-fils ! grâce pour nos gens, pour nos vaches et nos chevaux ! Dans ta colère, ne frappe pas nos guerriers. Nous t’invoquons sans cesse, et t’offrons l’holocauste.

9. Comme le pasteur (soumis devant son maître) je t’honore et t’adresse mes hommages. Père des Marouts, accorde-moi le bonheur. Ta faveur est le bien le plus admirable ; voilà pourquoi nous implorons ta protection.

10. Ô toi, qui es le refuge des hommes, éloigne de nous ta (colère), qui tue les vaches et les hommes ! Que ta bénédiction soit avec nous ! Ô dieu, sois notre bienfaiteur et notre patron ! conserve-nous, toi qui règnes sur un double domaine[554] !

11. C’est à Roudra que nous adressons cet hymne, en implorant son secours. Que ce (dieu) accompagné des Marouts, écoute notre prière ! Qu’ils nous protègent également, Mitra, Varouna, Aditi, la Mer, la Terre et le Ciel !


HYMNE III.

Au Soleil, par Coutsa.

(Mètre : Trichtoubh.)

1. Le magnifique flambeau des dieux, l’œil de Mitra, de Varouna et d’Agni, le Soleil, âme de tout ce qui existe, a rempli le ciel, la terre et l’air.

2. Comme l’époux suit sa (jeune) épouse, le Soleil suit aussi la divine et brillante Aurore, à l’heure où les prêtres, attendant pour honorer les dieux les moments favorables, adressent à leur digne (protecteur) un hommage digne de lui.

3. Les chevaux du Soleil, nobles, rapides, brillants, s’élancent dans leur route, dignes, comme lui, de nos hommages. Baissant la tête sous le joug, ils s’attachent à la voûte céleste, et s’empressent de commencer leur révolution entre la terre et le ciel.

4. Et telle est la fonction divine, la fonction sublime du Soleil. À la moitié de sa course circulaire, il retire en lui-même ses rayons ; et quand il dételle les chevaux de son char, la nuit couvre l’univers de son voile.

5. Ainsi, pour nous faire jouir de la vue de Mitra et de Varouna, le Soleil manifeste sa forme à la face du ciel. Sans relâche, ses coursiers nous ramènent sa figure, tantôt brillante, tantôt noire.

6. Divins rayons du Soleil levant, délivrez-nous de toute faute honteuse. Qu’ils nous protègent également, Mitra, Varouna, Aditi, la Mer, la Terre et le Ciel !


HYMNE IV.

Aux Aswins, par Cakchivan.

(Mètre : Trichtoubh.)

1. Je prépare comme un lit[555] d’honneur aux (dieux) véridiques. Je produis le chant (sacré), de même que le vent produit (l’onde) du nuage. Ce sont les Aswins qui, sur un char et à travers les armées (ennemies), amenèrent une épouse au jeune Vimada[556].

2. Vous marchez avec fermeté, avec vitesse, appelés par les dieux ; (divinités) véridiques, l’âne (attelé à votre char), dans vos combats qui enrichissent Yama[557], terrasse des milliers d’ennemis.

3. Ô Aswins, Tougra[558], tel que l’homme qui va mourir et qui se défait de son trésor, avait confié à la mer (son fils) Bhoudjyou. Vous avez sauvé ce Bhoudjyou sur votre propre vaisseau, (sur un vaisseau) aérien qui s’élève au-dessus des eaux.

4. (Dieux véridiques), au bout de trois jours et de trois nuits vous avez, sur votre triple char[559], ailé, rapide, porté sur cent roues et attelé de six coursiers, ramené Bhoudjyou, de l’élément humide, sur le rivage de la terre ferme.

5. Telle fut votre prouesse sur la mer immense, incertaine, insaisissable ; et vous avez, ô Aswins, déposé dans son palais Bhoudjyou, monté sur votre navire aux cent gouvernails.

6. Ô Aswins, le cheval blanc que vous avez une fois donné au cavalier (que vous chérissez), est pour lui une continuelle bénédiction. Ce fut là, de votre part, un don merveilleux et mémorable. Nous devons souhaiter pour nous le coursier de votre serviteur Pédou[560].

7. Ô maîtres, l’enfant de Padjra[561], Cakchîvân, chanta vos louanges, et obtint de vous la sagesse. Vous avez du sabot d’un étalon, comme d’un filtre, tiré des centaines de vases[562] de liqueur.

8. Vous avez par (une onde) fraîche éteint l’incendie (qui dévorait Atri)[563]; vous avez donné à ce Richi une nourriture qui a relevé ses forces. Aswins, il était renfermé dans une horrible (prison) ; vous l’en avez retiré, et vous l’avez comblé d’un bonheur qui charme tous les sens.

9. (Dieux) véridiques, vous avez de ses fondements soulevé un puits, et, lui donnant un escalier facile, vous avez satisfait la soif de Gotama : vous avez ouvert pour lui comme une source abondante de félicité[564].

10. (Dieux) véridiques et secourables, Tchyavâna était vieux : vous l’avez dépouillé de son corps comme d’une (ancienne) cuirasse. Vous l’avez rendu jeune ; il était sans famille, vous lui avez donné de jeunes épouses[565].

11. Maîtres véridiques, il est de vous un trait qui doit être célébré, exalté par nos louanges ; une action qui doit nous faire désirer votre protection. Sachant que Bandana (avait été jeté dans un puits), tel qu’un trésor que l’on a caché à la vue de tous, vous l’en avez retiré[566].

12. Ô Maîtres ! je veux aussi révéler (aux mortels qui désirent) la fortune, une de vos œuvres difficiles : (ma voix est) comme le tonnerre (qui annonce) la pluie. C’est à vous que Dadhyantch, fils d’Atharvan, a offert le miel de ses chants ; c’est par vous que sa tête de cheval a opéré des merveilles[567].

13. (Dieux) puissants et véridiques, (dieux) aux grands bras, Pourandhi[568] vous invoqua dans l’hymne du sacrifice. Comme (le disciple entend la voix) de son maître, vous avez entendu la prière de cette femme qui avait pour époux un eunuque : ô Aswins, vous lui avez donné (un fils), Hiranyahasta.

14. (Dieux) véridiques, un passereau courait le risque d’être dévoré par un loup : vous l’avez arraché de sa gueule[569]. (Dieux) aux grands bras, un Richi[570] a chanté vos louanges, et vous l’avez rendu à la lumière.

15. Tel que l’aile d’un oiseau, le pied de l’épouse de Khéla avait été cassé dans un combat. Aussitôt vous avez donné à Vispalâ une jambe de fer, qui devait la porter dans la bataille suivante[571].

16. Ridjrâswa mettait en pièces cent béliers, (pour les offrir) à une louve ; son père le rendit aveugle. Vous lui avez restitué la vue, (dieux) véridiques et secourables, (dieux) médecins[572].

17. La fille du Soleil[573], portée au but par la vitesse de votre cheval, monta triomphante sur votre char, et les cœurs de tous les dieux l’y suivirent. (Déités) véridiques, soyez entourées de ses trésors lumineux !

18. Ô Aswins, lorsque, invoqués par le Bharadwâdja Divodâsa[574], vous visitiez sa maison, votre char apportait la richesse et l’abondance à votre ami, (ce char) que traînaient un bœuf et un squale attelés ensemble[575].

19. (Dieux) véridiques, qui amenez avec vous la richesse, la puissance, la force, qui donnez de brillants enfans et de vaillants vassaux, vous êtes venus combler de vos dons la fille de Djahnou, qui trois fois par jour vous offrait votre part du sacrifice[576].

20. Djâhoucha[577] était de toute part environné d’ennemis : (dieux) véridiques et exempts de vieillesse, vous l’avez, pendant la nuit, enlevé par la voie de l’air qui était libre, et votre char a facilement franchi les montagnes (célestes).

21. Ô Aswins ! vous avez protégé Vasa[578], et lui avez accordé mille jouissances qui se renouvelaient chaque jour. Défenseurs généreux et redoutables, vous avez, avec Indra, détruit les ennemis de Prithousravas[579].

22. Le fils de Ritchatca, Sara[580], avait soif : vous avez pour lui soulevé l’eau du fond d’un puits. (Dieux) véridiques, pour Sayou[581] fatigué, vous avez rempli la mamelle d’une vache stérile.

23. (Dieux) véridiques, le juste Viswaca, fils de Crichna, implora votre secours et célébra vos louanges. Grâce à vous, il a revu son fils, Vischnâpwa, comme (un pasteur revoit) sa brebis perdue[582].

24. Rébha[583] enchaîné, blessé, avait été jeté dans l’eau. Pendant dix nuits et neuf jours il souffrit cruellement au milieu des flots, d’où vous l’avez retiré, comme avec la cuiller du sacrifice on puise le soma.

25. Ô Aswins ! j’ai chanté vos hauts faits. Que mes désirs soient comblés ! Faites de moi un maître riche en vaches, puissant en vassaux ! Que je jouisse longtemps de la lumière, et que j’arrive à la vieillesse, comme (le soleil) à son couchant.


HYMNE V.

Aux Aswins, par Cakchivan.

(Mètre : Trichtoubh.)

1. Ô Aswins, l’antique sacrificateur[584] vous honore, et vous invite à vous enivrer de nos douces libations. Le lit de cousa est préparé pour vous ; les chants sont prêts. (Dieux) véridiques, venez goûter nos mets et nous apporter vos dons !

2. Puissants Aswins, sur ce char, merveilleusement attelé, plus rapide que la pensée, qui vous amène vers les hommes et qui vous conduit à la demeure du mortel religieux, venez vers notre maison !

3. Le pieux Atri, quand il était de ce monde[585], fut jeté dans une horrible prison : ô maîtres généreux, vous l’avez délivré avec sa famille, brisant les prestiges magiques de son cruel ennemi, triomphant (de ses ruses)[586].

4. Comme un coursier (tombé dans un abîme), le pieux Rébha[587] avait été, par ses ennemis, précipité dans les flots. Maîtres généreux, vous l’avez secouru et retiré tout meurtri. La mémoire de vos antiques prouesses ne périt pas.

5. Tel que (l’homme) endormi dans le sein de Nirriti[588] tel que le soleil enseveli dans l’obscurité, tel que l’or fait pour briller et enfoui dans la terre, tel était Bandana[589]. Ô secourables Aswins, vous l’avez relevé dans sa chute !

6. Maîtres véridiques, au nombre des bienfaits que vous semez sur votre route, il en est un qui doit être célébré par Cakchîvân[590], l’enfant de Padjra. Vous avez, pour un mortel, tiré du sabot d’un cheval des centaines de vases de liqueur[591].

7. Puissants Aswins, vous avez rendu au fils de Crichna, à Viswaca, Vichnâpwa (qu’il avait perdu)[592]. Ghochâ avait vieilli dans la maison de son père ; vous lui avez donné un époux[593].

8. Par vous, Syâva[594] a obtenu la brillante Rousatî, et Canwa[595] la lumière. Ô généreux Aswins, votre gloire, c’est d’avoir rendu l’usage de l’ouïe au fils de Nrichada[596].

9. Ô Aswins, répandant vos bienfaits sous toutes les formes, vous avez amené à Pédou[597] un cheval léger et invincible, (cheval) glorieux, auteur de mille biens, qui terrasse l’ennemi et sauve (son maître).

10. Bienfaisants Aswins, vos actions méritent d’être célébrées, et l’hymne de la louange retentit au ciel et sur la terre. À la voix des enfants de Padjra[598], venez, avec vos dons, vers le sage qui vous présente son offrande.

11. Véridiques Aswins (dieux) protecteurs, touchés de la prière de son fils, vous avez nourri le sage (Bharadwâdja)[599]. Célébrés par la voix d’Agastya, vous avez relevé Vispalâ[600].

12. Quel est encore le lieu, ô fils du Ciel, (divinités) généreuses, protectrices de Sayou[601], (quel est le lieu) où, arrivant à la voix du fils de Cavi[602], vous avez, ô Aswins, au bout de dix jours, retiré (Rébha englouti dans les flots), comme un vase plein d’or enfoui dans la terre[603] ?

13. Véridiques Aswins, vous avez, par votre puissance, rendu la jeunesse au vieux Tchyavâna[604]. La fille du Soleil a environné votre char de ses trésors de lumière[605].

14. (Dieux) toujours jeunes, Tougra a dû renouveler pour vous les louanges des anciens hymnes ; car vous aviez, des flots de la mer, recueilli sur vos coursiers ailés et rapides (son fils) Bhoudjyou[606].

15. Généreux Aswins, le fils de Tougra vous invoqua ; élevé au-dessus de l’Océan, il le traversa sain et sauf. Sur votre char merveilleux, aussi prompt que la pensée, vous l’avez transporté heureusement.

16. Ô Aswins, le passereau vous a invoqués : vous l’avez délivré de la gueule du loup. Sur votre (char), vous avez gravi le haut de la montagne (céleste) ; et (l’être) qui remplit tout a vu son fils expirer sous l’influence d’un fluide mortel[607].

17. Ridjrâswa immolait cent béliers à une louve ; son père impitoyable lui avait ôté la lumière. Ô Aswins, vous avez rendu les yeux à Ridjrâswa. Oui, par vous un aveugle a recouvré la vue[608].

18. « Ô Aswins, maîtres généreux, » s’était écriée cette louve, implorant votre appui pour un aveugle ; « Ridjrâswa m’a immolé cent et un béliers : il est pour moi comme un jeune amant. »

19. Adorables Aswins, votre protection est grande et salutaire ; vous avez relevé (l’homme) fatigué. Pourandhi[609] vous a appelés ; (vous l’avez entendue, dieux) généreux, et vous êtes venus à son secours.

20. Secourables Aswins, en faveur de Sayou[610] vous avez rempli les mamelles d’une vache maigre et stérile. Vous avez, par votre puissance, amené à Vimada sa jeune épouse, fille de Pouroumitra[611].

21. Secourables Aswins, c’est vous qui, avec la charrue, avez semé l’orge ; vous qui avez tiré (de la terre) la nourriture de l’homme ; c’est vous qui, frappant de la foudre le Dasyou, avez fait briller la lumière pour l’Arya.

22. Ô Aswins ! c’est à vous que Dadhyantch, fils d’Atharvan, dut sa tête de cheval. Le doux savoir, aimé de Twachtri, ce pieux Richi l’employa pour vous, et vos louanges sont devenues comme les guides du sacrifice[612].

23. Sages et véridiques Aswins ! j’implore sans cesse votre faveur ; exaucez toutes mes prières ; accordez-nous de grandes richesses, des enfants et de la gloire.

24. Puissants, bienfaisants Aswins, vous avez donné à l’épouse d’un eunuque un fils (nommé) Hiranyahasta[613]. Ô Aswins, Syâva, trois fois déchiré, a été par vous rappelé à la vie[614].

25. Voilà, ô généreux Aswins, vos anciennes prouesses, que les mortels ont célébrées. Nous aussi nous chantons vos louanges : pour prix de nos sacrifices, donnez-nous la force et la domination !


HYMNE VI.

Aux Aswins, par Cakchivan.

(Mètre : Trichtoubh.)

1. Généreux Aswins, que votre char vienne ici amené sur l’aile de l’épervier (poétique)[615], (ce char) rempli de richesses et de plaisirs, plus rapide que la pensée de l’homme, orné de trois siéges, aussi prompt que le vent.

2. Sur ce char à trois roues, à trois siéges, rapide et roulant dans les trois mondes[616], venez, ô Aswins, engraissez nos vaches, nourrissez nos chevaux, augmentez notre vaillante race !

3. Secourables Aswins, venez, sur votre char rapide et impétueux, écouter l’hymne du poëte. Les anciens sages n’ont-ils pas célébré votre empressement à soulager la misère des (mortels) ?

4. Véridiques Aswins, qu’ils vous amènent ici, ces éperviers (poétiques)[617], légers et rapides, attelés à votre char, lesquels, pareils à des vautours aériens et impétueux comme les flots, vous conduisent vers le sacrifice !

5. Ô maîtres, la jeune et aimable fille du Soleil[618] vient de monter sur votre char. Que dans leur course circulaire vos chevaux ailés, superbes, rapides, brillants, vous amènent près (de nous) !

6. Généreux protecteurs, par votre puissance vous avez sauvé Bandana[619], délivré Rebha[620], transporté à travers l’Océan le fils de Tougra[621], rendu Tchyavâna[622] à la jeunesse.

7. Atri se trouvait au milieu du feu : ô Aswins, vous lui avez donné soulagement et nourriture[623]. Touchés de sa prière, vous avez rendu le jour à Canwa, plongé dans les ténèbres[624].

8. Le vieux Sayou[625] vous implora ; ô Aswins, vous avez pour lui rempli la mamelle d’une vache. Vous avez délivré du danger un passereau[626], et rendu une jambe à Vispalâ[627].

9. Ô Aswins, vous avez donné à Pédou un cheval blanc, vigoureux, terrible, aimé d’Indra, redoutable en ses hennissements, frappant, immolant son ennemi, auteur étonnant de mille biens[628].

10. Puissants Aswins, ô vous dont la naissance est si fortunée, nous vous appelons à notre secours ; nous vous prions. Venez vers nous, pour notre bonheur, avec votre char chargé de richesses, et daignez accueillir nos chants.

11. (Dieux) véridiques, poussés par l’énergie nouvelle de l’épervier (poétique)[629], venez vers nous. Heureux de votre bonheur, ô Aswins, je vous appelle, en vous offrant l’holocauste au lever de l’éternelle Aurore !


HYMNE VII.

Aux Aswins, par Cakchivan.

(Mètre : Djagatî.)

1. Pour obtenir les biens de la vie, j’appelle votre char merveilleux et rapide comme la pensée, (ce char) attelé de coursiers légers, digne de nos honneurs, orné de mille bannières, portant la pluie et d’abondants trésors, chargé d’opulence et de richesses.

2. À l’arrivée de ce char, la Prière s’élève, et fait résonner l’hymne (sacré). De tout côté les Invocations arrivent. Je vous invite à notre holocauste, et nos compagnons se joignent à nous (pour vous honorer). Ô Aswins, Oûrdjânî[630] vient de monter sur votre char.

3. Lorsque d’innombrables guerriers, jaloux des biens que procure la victoire, se rassemblent sur le champ de bataille, alors, sur la voûte inclinée du ciel, on aperçoit votre char qui s’approche du maître que vous favorisez.

4. C’est vous qui, sur vos chevaux ailés, avez rapporté Bhoudjyou[631] submergé ; c’est vous qui l’avez ramené à ses parents au sein de leur demeure lointaine. (Dieux) protecteurs, c’est vous qui avez généreusement secouru Divodâsa[632].

5. Pour soutenir votre gloire, vos nobles (coursiers) ont transporté votre char au but (assigné par les dieux) ; et la beauté, qui était le prix du combat, venant à vous comme à des amis, vous accepta pour époux[633].

6. Vous avez délivré Rébha[634] des ennemis qui l’entouraient, Atri[635] des feux qui l’environnaient, et que vous avez éteints par une onde fraîche. Vous avez, pour secourir Sayou[636], rempli la mamelle d’une vache. Vous avez donné de longs jours à Bandana[637].

7. Bandana était accablé par l’âge : 6 (dieux) secourables et puissants, vous l’avez restauré, comme un (vieux) char. Pour prix de ses hymnes, du sein qu’il a fécondé vous avez fait naître un saint homme. À celui qui vous honore accordez aujourd’hui votre secours.

8. Un fils était loin de son père, et tristement abandonné[638]. Il vous a invoqués ; vous êtes accourus, et par d’heureux secours vous avez exaucé les vœux qu’il vous adressait en sa détresse.

9. L’abeille a recouvré par vous son miel agréable. Le fils d’Ousidj[639] compose en votre honneur de doux chants, et vous invoque en vous enivrant de soma. Vous avez écouté la prière de Dadhyantch, et la tête de cheval vous a célébrés[640].

10. Ô Aswins, vous avez donné à Pédou[641] un (coursier) blanc, objet de mille désirs pour les guerriers ; (coursier) brillant et sauveur, invincible dans les combats, distingué dans toutes ses œuvres, et terrassant ses ennemis avec la force d’Indra.


HYMNE VIII.

Aux Aswins, par Cakchivan.

(Mètres : Gayâtrî, Ouchnih, et Vrihatî.)

1. Ô Aswins, quel hommage est digne de vous ? quel (mortel est capable) de vous plaire ? Comment vous honorera-t-il, l’homme faible et ignorant (de sa nature) ?

2. Oui, l’homme est ignorant, et vous êtes sages. Tout autre que vous est insensé. Mais que l’homme s’adresse pieusement à vous ; aussitôt, pour un simple mortel, vous exercez votre puissance invincible.

3. Vous êtes sages, et nous vous invoquons ; vous êtes sages, inspirez notre prière en ce jour. Un serviteur dévoué vous honore et vous sacrifie.

4. Je ne m’adresse pas à des dieux impuissants ; (nous attendons), généreux (Aswins), le prix de nos invocations et de nos sacrifices. Conservez-nous forts et vigoureux.

5. Qu’il vous plaise, cet hymne qui retentit avec éclat dans la bouche de celui qui voudrait imiter Bhrigou[642], (cet hymne) que le fils de Padjra[643] vous adresse (aujourd’hui) ! Qu’il vous plaise aussi le sage qui joint (à sa prière) l’offrande sacrée !

6. Écoutez l’hymne que chantait en votre honneur (un homme) errant dans les ténèbres[644], (hymne) que j’ai répété en recouvrant la vue par votre protection, ô Aswins, auteurs de tout bien !

7. C’est vous qui donnez, comme c’est vous qui ôtez la puissance. Vous êtes notre refuge ; soyez nos gardiens, et délivrez-nous des brigands sans conscience.

8. Ne nous livrez pas à notre ennemi. Ne souffrez pas que nos vaches nourricières, éloignées de leurs veaux, soient chassées de nos demeures.

9. Que vos amis vous trouvent favorables à leurs vœux ! Que nous obtenions de vous abondance de nourriture, abondance de vaches !

10. Voilà le char des Aswins riches et bienfaisants. (Ce char) est sans chevaux[645], et j’espère qu’il me procurera l’abondance.

11. (Char divin), chargé de richesses, signale pour nous ton pouvoir !… (Le voyez-vous) ? ce char fortuné avance du côté de ceux qui ont préparé le soma.

12. Il est deux choses qui passent vite : le sommeil et les mauvais riches. Dans ce moment, je ne connais ni l’une ni l’autre de ces deux choses.


HYMNE IX.

À Indra, par Cakchivan.

(Mètre : Trichtoubh.)

1. Quand donc (le dieu) qui protège les hommes et qui donne la richesse voudra-t-il écouter la voix des pieux Angiras ? Lorsqu’il sort de son palais, (ce roi) digne de nos sacrifices, pour visiter le peuple qui l’honore, son pouvoir se manifeste au loin.

2. Ce maître puissant, voulant pourvoir à notre nourriture, amène ce riche troupeau de vaches (divines) ; le ciel en est assiégié. Le souverain (des dieux) contemple ces ténèbres qu’il a fait naître ; et l’épouse du coursier devient la mère de la vache[646].

3. Qu’il vienne (écouter) notre antique invocation, celui qui donne aux Aurores leur lumière, celui qui chaque jour est le bienfaiteur des Angiras ses serviteurs. Il s’est fait une arme dont les coups foudroyants sont rapides ; pour les quadrupèdes utiles à l’homme, pour l’homme lui-même, il a couvert le ciel (de nuages).

4. Enivré de la douceur du soma, c’est toi qui, pour le sacrifice, as jadis rendu (aux Angiras) ce fameux troupeau de vaches qui leur avait été enlevé[647]. Car toutes les fois que (le dieu) aux trois têtes[648] apparaît dans le combat, il brise les portes de l’ennemi des enfants de Manou.

5. (Oui, rien ne te résiste, ô dieu) merveilleusement rapide, quand le père et la mère de famille[649], soutiens (du sacrifice), t’ont présenté le lait (des libations) et le trésor fécond des offrandes ; quand (les prêtres) ont fait couler en ton honneur la brillante liqueur, et le breuvage que donne la vache nourricière.

6. (Le dieu) vainqueur vient d’apparaître : qu’il excite nos transports de joie. Il brille, tel que le soleil qui suit l’aurore. Qu’offert par nous sans réserve, et accompagné de nos chants, le soma jaillisse de la cuiller sacrée jusque sur le foyer.

7. Quand Agni s’enflamme au bûcher du sacrifice, alors que le Soleil s’occupe à garnir les plaines célestes de vaches (merveilleuses)[650], toi, cependant, tu brilles d’un éclat serein pour les travaux de l’homme qui pousse son char, ou qui conduit ses troupeaux, ou qui voyage avec célérité.

8. Habitant des vastes régions de l’air, arrête ici tes chevaux ; combats l’ennemi qui convoite nos richesses, animé par cette boisson agréable, légère, fortifiante, que nos mortiers expriment pour ton bonheur.

9. C’est toi, ô (Indra) digne de tant d’hommages, qui as lancé contre le nuage le trait de fer que t’avait du ciel apporté Ribhou, quand, en faveur de Coutsa[651], tu frappais Souchna de coups innombrables.

10. (Ô dieu) armé de la foudre, quand le soleil, au départ de la nuit, perçait le nuage qui le pressait, et cherchait à se débarrasser des chaînes dont Souchna avait tout couvert les airs,

11. Alors, en te voyant à l’œuvre, ô Indra, le ciel et la terre, vastes, forts, inébranlables, se livraient à la joie. De ta foudre puissante tu terrassais Vritra, qui se cachait au sein des ondes et se nourrissait de la substance des nuages.

12. Ô Indra, toi qui es l’ami des hommes, dirige vers nous ces coursiers vigoureux et rapides comme le vent, que tu conserves pour atteler à ton char. (Prends) ta foudre, que le fils de Gavi, Ousanas[652], t’a donnée ; arme qui fait notre joie, et qu’il a aiguisée pour être fatale à Vritra et te donner la victoire.

13. Ô Indra, arrête ici un instant tes brillants coursiers, de même que le fameux Étasa retint le char du soleil[653]. Rejetant les impies (Asouras) au delà des quatre-vingt-dix fleuves[654], détruis leurs œuvres.

14. Ô Indra, (dieu) foudroyant, sauve-nous de la triste pauvreté, de la défaite dans la bataille ! Nous demandons l’abondance, la gloire, l’honneur des sacrifices ; donne-nous de l’opulence, des chars, des chevaux.

15. Que ta protection ne nous abandonne pas, (dieu) de la puissance et de la richesse ! accorde-nous l’abondance ! Ô Maghavan, multiplie nos vaches ! Pères de famille dévoués à ta grandeur, puissions-nous jouir d’un bonheur constant !




SECTION DEUXIÈME.

LECTURE PREMIÈRE.
HYMNE I.
Aux Viswas, par Cakchîvan.
(Mètre : Trichtoubh.)

1. Humbles et respectueux, présentez vos libations, vos mets, votre sacrifice au (dieu) terrible[655] qui amène la pluie. Que, du haut des airs, (vienne) Marout, qui donne la vie[656] ; je le chante avec ses guerriers, (qu’il lance) sur la terre et le ciel comme (les flèches) d’un carquois.

2. Telles que les deux épouses (d’un même maître), l’Aurore et la Nuit, se multipliant (pour nous, viennent) augmenter les biens de celui qui les invoque dès le matin. Ainsi qu’une jeune fille développant son voile, (l’Aurore) se dore à nos yeux des splendeurs du soleil.

3. Que (le dieu) qui marche autour (du monde)[657], et revêt des formes diverses[658], nous soit propice ! Qu’il nous soit aussi propice, le Vent qui donne les eaux fécondes ! Ô Indra, ô Parvata[659], empressez-vous pour nous ! Que tous les dieux nous comblent de biens !

4. Allons ! en l’honneur de la blanche (Aurore), moi, fils d’Ousidj[660], je présente ces liqueurs et ces mets. Rendez-vous propice le fils des eaux[661] ; faites que ces (vénérables) mères[662] soient favorables au vertueux Ayou[663].

5. Moi, fils d’Ousidj, comme Ghochâ[664] quand elle fut affligée de la lèpre, je vous offre une prière suppliante. Pour vous, et en l’honneur du généreux Poûchan, je fais dresser le foyer d’Agni.

6. Mitra et Varouna, écoutez mes invocations. Écoutez (la prière qui s’élève vers vous) en ce lieu, de tout côté[665]. Que Sindhou[666], avec ses ondes, nous entende, et, sensible à nos vœux, nous accorde ses heureux dons !

7. Je chante (vos louanges), ô Mitra et Varouna ! Parmi les biens que vous apportez, que Padjra[667] doive à votre faveur des centaines de vaches. Qu’il se complaise dans ses chars renommés ; que (les dieux viennent) l’environner d’un bonheur continuel.

8. Mes chants vous recommandent le (maître) généreux ici présent. Nous autres, (simples) mortels[668], puissions-nous avoir des richesses et une bonne lignée ! Le chef qui, au milieu des Padjras, se distingue par sa libéralité, est aussi prodigue[669] pour moi de chevaux et de chars.

9. Ô Mitra et Varouna, le chef qui vous refuse ses libations, adressant ailleurs son hommage, (se déclare) votre ennemi. Dans son sein réside le mal, tandis que celui qui se conforme au devoir du sacrifice obtient ce qu’il désire.

10. Qu’un adversaire puissant se présente ; le (chef pieux) est fort dans ses œuvres ; ses hommes sont plus robustes, ses ressources plus grandes. Il va, comblé de biens, toujours ferme dans les combats, toujours héroïque (dans ses actions).

11. Qu’ainsi marchent les hommes. Vous, rois (célestes) qui aimez l’ambroisie (du sacrifice), écoutez l’invocation de leur chef. Accourez du haut des airs ; car vos bienfaits sont promis à nos hymnes, et donnent la grandeur au maître des chars.

12. Puissions-nous partager la force de ce chef pour lequel je vous ai invoqués, en récompense des offrandes que nous vous présentons à dix reprises[670]. Que les Viswas, pour lesquels nous allumons ce foyer (sacré), nous accordent leurs dons ; que l’abondance soit le prix de nos sacrifices.

13. Avec joie nous présentons ces offrandes que portent dix personnes. Que (notre chef) ait les chevaux et les rayons (de gloire) qu’il désire. Que les seigneurs ici présents soient vainqueurs, et donnent à leurs gens de riches parures.

14. Que les Viswas nous accordent de l’or pour nos pendants d’oreille, des pierres précieuses pour nos colliers. Que la prière du maître[671], montant vers eux, appelle sur nous deux[672] les vaches[673] (fécondes).

15. Que les quatre fils de Masarsâra, que les trois (enfants) du roi vainqueur Ayavasa, ne (puissent prévaloir sur nous). Ô Mitra et Varouna, faites heureusement briller, tel que celui du soleil, votre char aux larges formes !


HYMNE II.

À l’Aurore, par Cakchivan.

(Mètre : Trichtoubh.)

1. Le large char de l’heureuse déesse est attelé ; les dieux immortels[674] sont placés sur ce char. La noble habitante des airs est sortie du sein des ténèbres, pour parer le séjour humain.

2. La première du monde entier, elle se lève, et répand glorieusement au loin ses bienfaits. Toujours jeune, toujours nouvelle, l’Aurore renaît pour éveiller (la terre) ; elle vient la première à l’invocation du matin.

3. Quand aujourd’hui tu dispenses le bonheur aux hommes, ô divine Aurore bénie parmi les mortels, les (prêtres) purs de péché s’adressent au Soleil, (et s’écrient) : Voici Damoûnas[675] ! Voici le divin Savitri (qui vient) à nous !

4. L’immortelle visite nos demeures, et du haut des airs recueille nos hommages. Libérale et brillante, elle va sans cesse distribuant les plus riches de ses trésors.

5. Sœur de Bhaga, parente de Varouna, pieuse Aurore, sois louée en premier lieu. Qu’il aille à l’occident exercer sa mauvaise influence, celui qui contient le mal ; et devenons vainqueurs de lui par la vertu du char de l’heureuse (déesse).

6. Que de saintes prières retentissent : voici les feux qui étincellent. Les rayons de l’Aurore nous découvrent d’enviables trésors, couverts par les ténèbres.

7. Par des retours successifs, vont et reviennent le Jour et la Nuit sous des formes différentes. Celle-ci est (comme) une caverne qui enveloppe le monde d’obscurité. L’Aurore brille sur son char resplendissant.

8. Toujours semblables à elles-mêmes, aujourd’hui et demain les (Aurores) embrassent la longue région de Varouna. Exemptes de reproche, (placées) à trente yodjanas[676] (de distance du soleil), elles accomplissent l’une après l’autre leur révolution.

9. L’Aurore sait quel hommage lui est réservé au point du jour, et elle naît, blanchissant de ses rayons la noirceur (de la nuit). (Comme) la femme vient (à son époux), elle arrive constamment chaque jour au lieu du sacrifice près de celui qui l’honore.

10. Telle qu’une vierge aux formes légères, ô déesse, tu accours vers le dieu du sacrifice[677]. Jeune et riante, tu devances (le soleil), et dévoiles ton sein brillant.

11. Pareille à la jeune fille que sa mère vient de purifier, tu révèles à l’œil l’éclatante beauté de ton corps. Aurore fortunée, brille par excellence ! aucune des Aurores passées ne fut plus belle que toi.

12. Riches en chevaux, en vaches, en biens de toute espèce, s’unissant par les œuvres aux rayons du soleil, les Aurores s’en vont pour revenir, heureuses et toujours adorables.

13. Daigne agréer le rayon de (notre) sacrifice, et accomplis en nous ton œuvre fortunée. Aurore, sois propice à notre invocation ; brille aujourd’hui pour nous ! Puissions-nous être heureux et opulents !


HYMNE III.

À l’Aurore, par Cakchivan.

(Mètre : Trichtoubh.)

1. L’Aurore naît en même temps qu’Agni s’allume. Le soleil se lève ; l’Aurore a préparé le large (berceau) de l’astre lumineux. Voici le divin Savitri (qui vient) à nous, et répand les biens nécessaires à tous les êtres animés.

2. Consolidant les œuvres divines, déterminant les âges humains, l’aînée des (Aurores) futures brille, semblable aux (Aurores) passées, aux (Aurores) éternelles.

3. Cette fille du Ciel apparaît, vêtue de rayons lumineux, semblable (à l’astre) qu’elle précède. Elle suit le chemin du sacrifice, comme si elle le connaissait déjà, sans s’égarer dans les régions célestes.

4. Son sein brille comme des feux éclatants. Semblable à Nodhas[678], elle nous montre des trésors précieux. Pourvoyeuse (vigilante), elle éveille les (hommes) endormis ; ainsi se présente la plus ancienne des (Aurores) futures.

5. Dans la moitié orientale du vaste ciel, cette mère de vaches[679] (lumineuses) élève son étendard. Elle s’étend, elle s’avance, placée entre les deux (grands) parents (de la nature), qu’elle charme également.

6. Ainsi grandissant à la vue, elle ne fait acception de personne ; sa forme élégante et légère brille également pour le petit comme pour le grand.

7. Telle que l’homme qui n’a pas de frère, elle semble monter sur son char pour semer ses bienfaits sur sa route. L’Aurore, richement vêtue, est comme l’épouse amoureuse qui étale en riant aux regards de son époux les trésors de sa beauté.

8. Sœur (prévoyante), elle a préparé à sa sœur aînée[680] un (nouveau) berceau, et en partant elle semble l’appeler de son regard. À son lever, les rayons du soleil ornent son cortége, tels que les compagnes (d’une jeune mariée).

9. À la suite de ces sœurs (qui sont nées) dans les anciens jours, une autre arrive, suivant son aînée. Que ces Aurores nouvelles, comme leurs devancières, se lèvent heureusement pour nous !

10. Opulente Aurore, éveille ceux qui t’honorent ; que les avares, qui marchandent ton culte, restent dans leur sommeil. Riche et pieuse Aurore, lève-toi favorablement pour ceux qui l’adressent leurs offrandes et leurs chants, toi qui vieillis (les choses humaines).

11. La jeune (Aurore) vient à l’orient, et attelle (à son char) la troupe des vaches rosées. À son lever apparaît aussitôt le (divin) étendard[681], et Agni brille dans les demeures (des hommes).

12. À l’apparition de (la déesse) qui apporte leur nourriture, les oiseaux et les hommes sortent de leurs demeures. Aurore divine, aux mortels assemblés pour ton culte tu dispenses de nombreuses richesses.

13. Vénérables Aurores, mon hymne vous a célébrées. Vous avez désiré mon offrande, et en avez profité. Ô déesse, que par votre secours nous obtenions des biens innombrables !


HYMNE IV.

Action de grâces[682], par Cakchîvân.

(Mètres : Trichtoubh et Djagatî.)

1. (Récit.) Dès le matin (Swanaya) vient, et dès le matin il prodigue les trésors. (Cakchîvân) accepte et conserve ses dons avec reconnaissance. Enrichi par ces présents et entouré d’une maison nombreuse, il verra, pendant de longues années, croître sa fortune et sa race.

2. (Le père de Cakchîvan parle.) Qu’il ait de belles vaches, de bons chevaux, beaucoup d’or. Indra, assure une heureuse existence à celui qui vient à toi dès le matin, et semble te faire une chaîne de ses bienfaits[683].

3. Aujourd’hui, agité dès le matin par le désir, j’ai revu l’enfant de mon amour[684], comblé d’honneur et porté sur un char magnifique. Prodigue le jus de la plante (sacrée), et par tes chants augmente la gloire de celui qui abat les forces de l’envieux !

4. (Le poëte parle.) Les libations, vaches fécondes, apportent leur lait à celui qui prépare et à celui qui doit accomplir le sacrifice. Par les soins de ces deux hommes[685], coulent de toutes parts des flots de beurre mêlés aux mets (sacrés).

5. L’homme bienfaisant se prépare une place dans le ciel, et se range parmi les dieux. Pour un tel homme, les ondes célestes font descendre leur beurre (nourrissant) ; pour lui, une offrande est toujours féconde.

6. Les hommes généreux ont une destinée miraculeuse ; leurs soleils brillent au ciel ; ils ont part à l’ambroisie, et prolongent leur existence.

7. Puissent ces hommes généreux être exempts de fautes malheureuses ! Puissent les maîtres vertueux n’éprouver aucun désastre ! Autour d’eux qu’ils trouvent un protecteur ! Que les chagrins n’habitent point avec celui qui est libéral !


HYMNE V.

Action de grâces (Suite), par Cakchîvan.

(Mètres : Trichtoubh et Djagatî.)

1. La reconnaissance m’inspire de vives expressions en l’honneur de Bhâvya[686], habitant le Sindhou[687] ; de ce prince invincible et ami de la gloire, qui m’a donné des richesses pour mille sacrifices.

2. De ce roi puissant j’ai reçu cent nichcas[688] (d’or), cent chevaux bien dressés, cent taureaux ; et moi, Cakchîvân, j’ai porté jusqu’au ciel la gloire immortelle de (ce prince) généreux.

3. Swanaya l’a ordonné, et à ma suite se sont rangés dix chars noirs, qui chacun portait une femme ; mille soixante vaches les accompagnaient. Tels sont les biens que Cakchîvân reçut pour le charme de ses jours[689].

4. Les quarante chevaux blancs attelés aux dix chars viennent en tête de la ligne des vaches. Enivrés d’orgueil et ornés de ceintures, les Padjras rassemblent ces chevaux tout brillants d’or.

5. Mais en premier lieu j’ai reçu pour vous[690] trois chevaux et huit vaches de prix. Les Padjras, qui sont mes bons parents, montés sur leurs chars, ont voulu, comme par un cortége populaire, honorer ma gloire.

6. (Româsa, fille de Swayana, épouse de Cakchîvân, parle à son beau-père.) — Il m’a acceptée pour femme, et je tiens à lui comme (l’écuyer) au fouet qu’il serre (dans sa main). Mon époux m’accorde la jouissance de mille biens précieux.

7. Daignez me permettre de vous approcher. Ayez pitié de ma faiblesse. Je serai toujours Româsa[691], c’est-à-dire la brebis des Gandhâras.


HYMNE VI.

À Agni, par Paroutchhépa.

(Mètre : Atyachtî[692].)

1. Je chante Agni le sacrificateur, (Agni) bienfaisant et riche, l’enfant de la Force appelé Djâtavédas ; oui, Djâtavédas, qui est comme notre prêtre ; ce dieu qui préside aux bons sacrifices, qui, de sa flamme qu’il dresse et dirige vers les dieux, saisit le beurre frémissant et entoure d’un vif éclat l’offrande pieuse.

2. Toi, le plus grand des sacrificateurs, le premier des Angiras, nous voulons, dans nos sacrifices, l’invoquer par de saintes prières, oui, par de pures et saintes prières ; toi qui tournes autour du ciel, pontife des humains, orné d’une chevelure brillante, (dieu) libéral que doit respecter ce peuple ; oui, que pour son bonheur doit respecter ce peuple.

3. Resplendissant avec l’éclat de l’or, (Agni) détruit le mal ; oui, comme la hache il détruit le mal. Devant lui, tout ce qui est fort s’écoule ainsi que l’eau. Repoussant tout ce qui est robuste, il lutte ; il n’est pas ébranlé ; oui, tel que l’archer vigoureux, il n’est pas ébranlé.

4. (Le serviteur fidèle), préparant la (demeure) solide[693] de ce (dieu) sage et prévoyant, fait briller les feux de l’aranî, et pour obtenir sa protection il honore Agni ; oui, il l’honore par une offrande pour obtenir sa protection. Ainsi que l’eau, Agni pénètre tout ; son ardeur déchire ; les plus solides aliments, il les consume avec force ; oui, il consume avec force les plus solides (aliments).

5. Non loin du foyer, nous déposons la nourriture destinée à ce (dieu), qui, dans les ombres de la nuit, brille mieux que le jour lui-même ; oui, pour l’homme diligent, mieux que le jour lui-même. Son existence, qui fut un instant comme éclipsée, devient pour celui qui fait des libations une espèce de rempart solide. (Mortel) pieux et (mortel) négligent, les feux protégent tout le monde ; immortels, ils animent tout ; oui, les (feux) immortels animent tout.

6. Ainsi Agni, résonnant, comme le puissant Marout, dans ces campagnes où tant d’œuvres s’accomplissent, exerce sa charge de sacrificateur ; oui, au milieu de luttes pénibles, il exerce sa charge de sacrificateur. Il reçoit les holocaustes et les dévore, étendard du sacrifice, objet de vénération. De ce (dieu) qui aime et répand le plaisir, que tous les hommes suivent la voie ; oui, qu’ils suivent sa voie pour arriver au bonheur.

7. Quand placés autour de lui[694], brillant de ses clartés, poursuivant leurs chants et leurs prières et attisant (son ardeur), les Bhrigous invoquent (Agni) ; oui, quand les Bhrigous invoquent (Agni) et lui présentent leurs offrandes, le dieu s’élève avec pureté ; maître et gardien des trésors, il protége ses serviteurs, ses amis, avec une haute sagesse ; oui, il les protége avec une haute sagesse.

8. Nous t’invoquons, toi, seigneur de tout ce peuple ; toi, également bon pour tous ; à toi, notre père de famille, (nous demandons) le bonheur ; oui, à toi, qui portes les paroles de la piété, (nous demandons) le bonheur. (Nous t’invoquons), toi, l’hôte des mortels, sur qui nous fondons notre espérance comme sur un père ; et tous ces (saints) ministres présentent (pour toi) ces aliments, ces holocaustes ; oui, (pour toi) et pour les (autres) dieux.

9. Ô Agni, plein de force et de splendeur, tu nais pour le service des dieux ; oui, comme un seigneur opulent pour le service des dieux. Tu t’enivres (de nos libations) pour mieux briller ; tu n’agis que pour faire preuve de force. Tes serviteurs t’honorent, (dieu) immortel ; oui, (ils t’honorent) avec la promptitude (de la confiance), (dieu) immortel.

10. Au grand, au vigoureux Agni, qui, comme l’habitant de vos étables, s’éveille avec l’aurore, rendez gloire ; oui, rendez gloire à Agni, au moment où le (père de famille) chargé d’offrandes, dans toutes les demeures, fait entendre sa prière ; où, devant lui, pareil à (l’antique) Rébha, vient élever sa voix le plus grand des chantres (divins), le plus grand des sacrificateurs.

11. Agni, toi qui te fais voir près de nous, compagnon des dieux, apporte nous avec bienveillance de grandes richesses ; oui, avec bienveillance. Tu réjouis nos yeux, tu nous combles de biens : fais beaucoup, (dieu puissant), en notre faveur, en faveur de (la mère de famille) ici présente[695], (dieu) magnifique, fais beaucoup en faveur de tes chantres. Sois terrible (pour nos ennemis), et, par ta force, détruis leur puissante lignée.


HYMNE VII.

À Agni, par Paroutchhépa.

(Mètre : Atyachtî.)

1. Il naît sous la forme de Manou[696], le premier des pontifes, Agni, sacrificateur de l’ordre des Ousidjs[697] ; oui, sacrificateur d’un ordre qui nous appartient[698]. Agissant partout avec empressement, il est pour celui qu’il aime comme un seigneur opulent. Pontife invincible, il s’asseoit au foyer du sacrifice ; oui, il s’entoure d’un cordon (lumineux) au foyer du sacrifice.

2. Nous adressons à ce maître des sacrifices un culte solennel, des invocations pieuses, et accompagnées d’holocaustes en l’honneur des dieux ; oui, accompagnées d’holocaustes. De sa flamme il enveloppe et consume les aliments qui lui sont offerts, ce dieu que Mâtariswan est venu de loin, oui, de loin, faire briller pour Manou[699].

3. Aussitôt il embrasse le (vase) de terre qui le reçoit, et, tel qu’un taureau généreux, il lui communique en grondant la semence (lumineuse) ; oui, en grondant, la semence (lumineuse)[700]. Le dieu ouvre ses cent yeux, et se jette sur le bois du bûcher ; et Agni, peu à peu gagnant les places voisines, s’étend aux places plus éloignées.

4. Pontife diligent, Agni, dans toutes les demeures, accomplit le sacrifice ; oui, par sa vertu, il accomplit le sacrifice. Par sa vertu, ce (dieu) sage donne à celui qui l’alimente la connaissance de toute la nature. Ainsi, hôte (de l’homme), nourri du beurre sacré, chargé (de nos offrandes), il naît, oui, il naît pour s’appeler Védhas[701].

5. Lorsque, dans les rayons du puissant Agni, viennent à tomber, avec un bruit comparable à celui des Marouts, les aliments, oui, les aliments destinés à (ce dieu) rapide ; alors il vient, par sa munificence, récompenser la piété. Invoqué par nous, il nous sauve du mal ; oui, invoqué par nous, (il nous sauve) de la méchanceté et du péché.

6. (Dieu) universel, immense, infatigable et protecteur, il tient (tous les biens) dans sa main droite. Qu’il les répande sur nous comme en passant ; oui, qu’il les répande en quelque sorte au gré de nos besoins. Tu portes l’holocauste à celui d’entre les dieux qui le désire. Pour l’homme pieux, Agni ouvre la voie du bonheur ; oui, il ouvre les portes (des trésors).

7. Le fortuné Agni, placé dans sa demeure humaine, est au milieu des sacrifices comme un monarque désirable ; oui, il est au milieu des sacrifices comme un monarque chéri. Il règne sur les holocaustes que reçoit le (foyer) de terre ; il nous protége contre la maligne influence de Varouna[702]; oui, contre la maligne influence du grand dieu.

8. Ils chantent Agni sacrificateur, maître de la richesse, ami bienveillant ; ils célèbrent (le dieu) infatigable ; oui, ils célèbrent (le dieu) qui porte les holocaustes. Âme de tous les êtres, connaissant la nature entière, sacrificateur digne lui-même de sacrifices, (dieu) aimable et sage, les Dévas (mortels)[703] l’appellent à leur secours, et l’honorent par leurs riches offrandes, oui, par leurs riches offrandes et par leurs chants.


HYMNE VIII.

À Indra, par Paroutchhépa.

(Mètre : Atyachtî.)

1. Ô Indra, ce char du sacrifice[704], chargé d’offrandes, que tu conduis, (dieu) rapide et irréprochable ; oui, (ce char) que tu conduis, daigne le diriger pour notre bien, et accueille, (dieu) irréprochable et protecteur, notre prière accompagnée d’offrandes ; oui, notre prière qui ressemble à celle des (anciens) sages.

2. Écoute-nous, ô Indra, toi qui, dans toutes nos luttes, nous combles de les bienfaits ; toi qui, invoqué par tes serviteurs, les délivres de leur fardeau et affliges (leurs ennemis), qui donnes la gloire aux héros et l’abondance aux sages ; les maîtres (de la terre) te célèbrent, (dieu) rapide et impétueux ; oui, rapide comme un coursier.

3. Tu répands les libérales faveurs sur celui qui est libéral envers toi ; tu viens, ô héros, vers le mortel qui vient à toi ; oui, ce mortel, tu le protéges. Indra, je t’adresse cet hymne, à toi, au Ciel, au glorieux Roudra, à Mitra, à Varouna, (je l’adresse) accompagné d’offrandes ; oui, je (l’adresse), accompagné d’offrandes, au (dieu) qui fait notre bonheur.

4. Nous désirons qu’Indra accueille notre sacrifice et le vôtre, (Indra) qui est la vie de tous, invincible auxiliaire ; oui, invincible auxiliaire dans les combats. Dans toutes nos luttes protége-nous, souviens-toi de nos hommages. Nul ennemi ne peut te vaincre : tu es au-dessus de tout ennemi, oui, tu es au-dessus de tout.

5. Brise les forces de nos adversaires. Comme les feux brillants de l’aranî, qu’ils soient puissants tes secours ; oui, (dieu) formidable, tes formidables secours. Tu nous guides, comme autrefois Anénas[705]; ô héros, tu nous animes. Tu protéges tous les (domaines) de Poûrou. Tu viens près de nous pour emporter, oui, pour emporter nos offrandes.

6. Je veux aussi adresser mon hymne à l’heureux Soma[706], qui, comme (les autres), digne de notre invocation, s’empresse d’accourir à notre prière ; oui, vainqueur des Rakchasas, accourt à notre prière. Qu’il vienne donner la mort à l’ennemi dont la folie nous outrage. Que le méchant tombe ; oui, qu’il tombe et disparaisse.

7. Ô (maître) opulent, chantons dans un hymne pieux, chantons le (dieu) riche et fort ; oui, le (dieu) aimable et fort. Prions et honorons par nos offrandes ce (dieu) que les sages ont de la peine à fléchir ; oui, prions Indra, offrons-lui de purs sacrifices.

8. Indra déploie pour vous et pour nous ses glorieux secours qui repoussent nos ennemis, oui, qui brisent nos ennemis. L’armée de cet avide (adversaire) qui s’avançait pour nous perdre, a été frappée ; oui, accablée de ses traits, cette armée terrible n’a pu supporter ses coups.

9. Indra, viens vers nous avec l’opulence qui t’environne ; arrive par une route tranquille, oui, par une route libre de tout ennemi. Protége-nous de loin, protége-nous de près. Conserve-nous de loin par tes secours ; oui, conserve-nous toujours de près par tes secours.

10. Accorde-nous, Indra, une opulence triomphante. Tu es formidable, et la grandeur t’environne pour notre salut ; oui, (elle t’environne) comme un ami pour notre salut. Sauveur puissant, immortel protecteur, attaque tout autre char que le nôtre. (Dieu) qui portes la foudre, frappe ; oui, (dieu) qui portes la foudre, frappe notre ennemi.

11. Indra, pour prix de nos louanges, sauve-nous du mal ; tu peux arrêter nos ennemis ; oui, tu es dieu, et tu peux arrêter nos ennemis. Frappe le criminel Rakchasa, et conserve le sage qui me ressemble. C’est à cette condition que t’a engendré un père (généreux)[707] ; ô toi, notre refuge, il t’a engendré pour tuer les Rakchasas ; oui, (c’est pour cela qu’il t’a engendré), ô toi notre refuge.


HYMNE IX.

À Indra, par Paroutchhépa.

(Mètres : Atyachtî et Trichtoubh.)

1. Indra, viens à nous de l’extrémité de l’horizon, comme (Agni) ici présent (vient) à nos sacrifices, comme ce roi protecteur des hommes pieux ; oui, comme le protecteur des hommes pieux (vient) dans nos demeures. Nous t’invoquons en te présentant nos mets et nos libations, ainsi que des enfants invoquent leur père, pour obtenir de toi notre nourriture ; oui, (dieu) tout-puissant, pour obtenir de toi notre nourriture.

2. Ô Indra, bois ce soma limpide que le pilon a exprimé du trésor (de la graine), comme le taureau altéré, oui, comme le taureau boit (l’eau) du puits. Qu’à cette source d’ivresse (divine) qui t’excite et te soutient, tes chevaux t’amènent, ainsi que les Jours, oui, ainsi que les Jours (amènent) le Soleil.

3. C’est par lui qu’a été ouvert cet antre céleste, qui semble être le nid de l’oiseau (divin), et qui est creusé au sein d’une voûte, oui, d’une voûte sans bornes. Armé de la foudre, Indra, le plus grand des Angiras, a voulu forcer l’étable des vaches (divines). Il va, pour nous rendre l’abondance, oui, pour nous rendre l’abondance, il va ouvrir les portes (de cet antre).

4. Indra prenant dans ses mains l’arme tranchante de la foudre, l’aiguise pour la lancer ; oui, il l’aiguise pour en frapper Ahi. Indra, ton attaque est pleine de force et de puissance ; et, ainsi que le bûcheron (fend) un arbre, avec ta vigueur tu fends les nuages ; oui, tu les fends comme avec une hache.

5. Indra, c’est toi qui donnes l’essor à ces rivières qui courent vers la mer comme des chars, oui, comme des chars de combat. Fortes de ton secours, elles forment un courant inépuisable ; telles que les vaches donnant à Manou un lait abondant, oui, donnant au genre (humain) un lait abondant.

6. Les enfants d’Ayou[708], avides de biens, et pareils au sage ouvrier qui fabrique un char, ont préparé pour toi cet hymne ; oui, ils l’ont préparé pour obtenir de toi le bonheur. Ils te chantent, ô (dieu) sage, comme vainqueur dans les combats, aussi rapide que le coursier, afin que tu leur accordes la force et les biens ; oui, les biens de toute espèce.

7. En faveur de Poûrou, de Divodâsa, tu as brisé les quatre-vingt-dix villes[709]. Pour ton serviteur Atithigwa, ô danseur[710] (céleste), avec ta foudre, oui, pour ton serviteur Atithigwa, tu les as vaillamment (brisées). Tu as enlevé Sambara de sa haute montagne ; ta puissance nous comble de biens, oui, nous comble de biens de toute espèce.

8. Indra protége dans les combats l’Arya qui fait des sacrifices ; il a pour lui mille secours dans toutes les batailles ; oui, dans ces batailles qui sont une source de gloire. En faveur de Manou, il a soumis les impies à l’obéissance ; il a donné la mort (à l’ennemi) qui a la peau noire[711]. Malgré son habileté, tout être cupide est consumé par lui ; oui, tout être nuisible est consumé par lui.

9. Sous la forme du disque solaire, il a paru aux yeux (de ses ennemis). prodige de puissance ! seigneur resplendissant, il pousse en même temps, oui, il pousse le cri (de mort)[712]. Cependant, de l’extrémité de l’horizon, accourait Ousanas[713] pour les secourir. (Ô dieu) prudent, tu t’empresses de donner aux hommes tous les biens ; oui, tu t’empresses de leur procurer une longue vie.

10. Touché de nos hymnes nouveaux, (dieu) généreux qui brises les villes (célestes), conserve-nous par tes secours puissants ! Du haut des airs, ô Indra, tu grandis avec les chants de tes serviteurs, comme le ciel avec les feux du jour.


HYMNE X.

À Indra, par Paroutchhépa.

(Mètre : Atyachtî.)

1. Le Ciel, le (divin) Asoura[714], s’incline devant Indra ; devant Indra (s’incline) la grande Terre avec ses dons brillants ; oui, avec ses dons brillants, où se déploie sa munificence. Tous les dieux, compagnons de sa félicité, reconnaissent Indra pour leur chef. Que pour Indra soient tous les sacrifices humains ; oui, que pour lui soient les sacrifices humains.

2. Dans tous les sacrifices, c’est toi seul qu’invoquent également les hommes divisés pour le bien qu’ils demandent ; oui, divisés pour la félicité qu’ils veulent obtenir. Tu es pour nous comme le vaisseau que nous chargeons de notre bonheur. Tu es notre maître, et les hommes honorent Indra par leurs sacrifices ; oui, ils l’honorent par leurs louanges.

3. Des couples[715] (de serviteurs dévots), jaloux de ta protection, ont préparé ce sacrifice en ton honneur, pour obtenir que le nombre de leurs troupeaux s’augmente. Indra, ils ont en toi une confiance sans réserve ; oui, une confiance sans réserve. Quand tu veux exaucer les vœux d’un père et d’une mère de famille dont le désir est d’avoir des troupeaux et de la richesse, alors tu fais briller ta foudre qui répand l’abondance, et qui est ta compagne ; oui, Indra, ta compagne habituelle.

4. Les Poûrous, ô Indra, ont connu ta valeur, quand tu as détruit les villes (célestes) de l’automne ; oui, quand tu les as brisées et détruites. Maître de la force, ô Indra, tu abats l’homme impie. Tu es le sauveur de la terre, de l’air, l’heureux (libérateur) de ces ondes, oui de ces ondes.

5. Pour célébrer ta puissance, ô (dieu) généreux, les enfants d’Ousidj ont répandu ces libations enivrantes ; car tu sais protéger tes amis ; oui, tu sais les protéger. Tu as combattu avec vaillance en leur faveur. Ils ont obtenu tous les biens qu’ils ont souhaités ; oui, ils les ont obtenus.

6. Accepte les louanges et l’holocauste que ramène en ton honneur le retour de l’aurore, ainsi que ces offrandes ; oui, ces offrandes qui provoquent ta générosité. Indra, (dieu) libéral et armé de la foudre, s’il est vrai que tu veuilles la mort de nos ennemis, écoute ma prière, de moi qui suis le plus jeune ; oui, le plus jeune de tes sages (serviteurs).

7. Indra, protége-nous, et fais le bonheur de celui (qui t’est dévoué). Quant à l’homme qui est notre ennemi, ô héros célèbre partant de naissances, frappe ce mortel ; oui, frappe ce mortel de ton tonnerre. Frappe celui qui nous veut du mal. Prête à notre voix une oreille attentive. Comme on écarte d’une route tout obstacle, chasse devant nous notre ennemi ; oui, chasse notre ennemi.


HYMNE XI.

À Indra, par Paroutchhépa.

(Mètre : Atyachtî.)

1. Ô Maghavan, si tu es avec nous, nous pouvons compter sur d’abondantes dépouilles. Avec ton secours, ô Indra, puissions-nous vaincre nos ennemis et sauver nos amis ! Ici près, en ce jour, viens protéger celui qui t’offre des libations et t’honore par ce sacrifice. Puissions-nous te trouver favorable au moment du danger ; oui, grâce à nos offrandes, te trouver favorable au moment du danger !

2. Quand, au jour du danger, cherchant la gloire, (un homme) invoque Indra avec dévotion vers le lever de l’aurore ; quand pour l’honorer, oui, pour l’honorer, il fait un sacrifice, alors, voulant récompenser sa piété, le dieu sensible aux prières frappe la tête (de ses ennemis). Puissions-nous, (ô Indra), recevoir tes heureux bienfaits ; oui, les bienfaits d’une heureuse (divinité) !

3. À toi, suivant l’antique usage, ces brillantes offrandes ! Lorsqu’un sacrifice a lieu, tu viens au foyer, oui, tu viens prendre ta place. Distingue nos feux, dont les rayons brillent entre le ciel et la terre. C’est ainsi qu’Indra mérita le nom de Gavéchana[716]; oui, le nom de Gavéchana que lui donnent ses protégés.

4. Ce fut sans doute jadis une œuvre mémorable de ta part, quand, dirigeant les Angiras, tu leur ouvris, Indra, oui, tu leur ouvris la retraite (des vaches célestes). Tu nous conduis aussi comme eux : tu combats et tu triomphes avec ceux qui t’offrent des libations. Tu renverses l’impie ; oui, l’impie, malgré toute sa rage.

5. Lorsqu’un chef héroïque, au moment du combat, rassemble ses gens pour le sacrifice, (ces hommes) avides de butin doivent triompher ; oui, (ces hommes) avides de butin doivent obtenir la victoire. Leur chef est entouré d’une nombreuse lignée : sa force dans les batailles le fait honorer. Puissent leurs hommages, avec la faveur d’Indra, leur procurer aussi bien celle des dieux ! oui, puissent ces hommages arriver jusqu’aux dieux !

6. Ô vous, Indra et Parvata[717], combattez devant nous ; et celui qui voudrait nous opprimer de ses armes, abattez-le ; oui, abattez-le avec la foudre. Ô héros, si tu viens dans notre maison décidé à confondre l’étranger, que ton arme, habile à frapper de tout côté, oui, (que ton arme) frappe nos ennemis de tout côté !


HYMNE XII.

À Indra, par Paroutchhépa.

(Mètres : Trichtoubh, Anouchtoubh, Gâyatrî, Atyachtî.)

1. Par le moyen du feu sacré, je veux purifier le ciel et la terre ; je veux brûler les méchants, et les régions qui ne reconnaissent point Indra. S’ils osent sortir, que nos ennemis soient frappés ; qu’ils jonchent de leurs cadavres les abords de leur retraite.

2. (Dieu) qui portes la foudre, marche vers tes ennemis ; et de ton pied, oui, de ton grand pied étendu, foule leurs têtes !

3. Brise, ô Mâghavan, la force de ces ennemis au sein de leur vile retraite ; oui, au sein de leur grande et vile retraite.

4. Tu as paru, et cinquante trois[718] de ces (ennemis) ont été détruits. C’est là ce qui fait ta gloire ; oui, c’est là ce qui fait ta gloire.

5. Indra, frappe toute cette troupe rougeâtre et terrible de Pisâtchas. Éloigne la race des Rakchasas.

6. Frappe, ô Indra, vaillamment et par-dessous[719]. Entends-nous ; le ciel et la terre ont brillé ; ô (dieu) qui portes la foudre, ils ont tremblé ; oui, ils ont tremblé à la vue de tes feux, ô (dieu) qui portes la foudre. Puissant, fort et terrible, tu marches armé. Nul ne pourrait te donner la mort, ô héros invincible, accompagné de tes auxiliaires ; oui, de tes vingt et un[720] auxiliaires.

7. Par ses libations (l’homme) assure le salut de sa maison ; par ses libations et ses sacrifices il abat les ennemis qui l’entourent ; oui, il abat les ennemis des dieux. Par ses libations et ses offrandes, il obtient l’abondance, la sécurité et des milliers de biens. À celui qui fait des libations Indra accorde une fortune convenable ; oui, une fortune convenable.


HYMNE XIII.

À Vâyou, par Paroutchhépa.

(Mètre : Atyachtî.)

1. Vâyou, que tes rapides coursiers t’amènent ici vers nos offrandes et vers nos libations du matin ; oui, vers ces libations de soma présentées le matin. Que la voix élevée de la Prière soit entendue de toi ; et, sur le char que traînent tes coursiers, viens, ô Vâyou, vers celui qui t’offre, oui, vers celui qui t’offre ce sacrifice.

2. Réjouis-toi, Vâyou, de ces heureuses boissons que nous te présentons en sacrifice, de ces (boissons) soignées qui brillent, oui, qui brillent de (doux) rayons. Quand de pieux compagnons s’assemblent pour le sacrifice autour d’un maître généreux, tes coursiers à l’instant viennent aussi frémir auprès de lui, pensant à sa libéralité ; oui, ils viennent, pensant à sa libéralité.

3. Vâyou attelle à son char deux coursiers légers, tantôt rouges, tantôt jaunâtres, et porteurs vigoureux ; oui, porteurs excellents et vigoureux. Puissant pour la destruction, il éveille la Prière qui semble endormie ; il éclaire le ciel et la terre, et fait entendre sa voix ; oui, il fait entendre sa voix en l’honneur de l’Aurore.

4. Pour toi, les pures Aurores, à l’horizon, étendent leurs voiles brillants, où se peignent rapidement leurs rayons ; oui leurs rayons naissants. Pour toi, la vache (céleste), au lait abondant, cède tous ses trésors. Dans les régions du ciel, tu fais naître de ses mamelles, oui, de ses mamelles tu fais naître les Marouts.

5. Pour toi, ces (Marouts) brillants, purs et rapides, formidables dans leur ivresse (divine), travaillent avec ardeur à la création des eaux ; oui, ils viennent travailler à cette création. L’homme s’empresse de t’honorer de ses dons et de ses louanges, et te prie d’éloigner le mal. Et toi, touché de son hommage, tu le protéges contre tout ennemi ; oui, tu le protéges contre les forces des Asouras.

6. Ô Vâyou, sois honoré avant tous, et reçois le premier l’offrande de nos libations ; oui, reçois nos libations. Ainsi, exauce les vœux d’un peuple innocent ; que toutes ces vaches, qui dépendent de toi, fassent descendre sur nous leur lait doux et béni ; oui, leur lait doux et béni.


HYMNE XIV.

À Vâyou et à Indra, par Paroutchhépa.

(Mètre : Atyachtî.)

1. Le gazon sacré est disposé ; viens à notre sacrifice avec tes innombrables coursiers, toi qui conduis et cent et mille attelages. Les Dévas (terrestres) ont avec soin préparé la libation du matin pour le Déva (céleste). Des boissons aussi douces que le miel t’attendent ; oui, elles t’attendent pour étancher ta soif (divine).

2. Pour toi ce soma a été pressé ; pour toi il a été purifié, et dans le vase qui le contient il revêt d’admirables couleurs ; oui, il revêt de brillantes couleurs. Voilà ce que t’offrent les enfants d’Ayou et les Dévas (mortels). Vâyou, amène tes coursiers ; viens te joindre à nous ; oui, le plaisir t’appelle, viens te joindre à nous.

3. Avec tes cent, avec tes mille coursiers, ô Vâyou, viens jouir de notre sacrifice ; oui, viens jouir de nos holocaustes. À toi ce soma solennel et brillant aux rayons du soleil ! (Tes serviteurs) ont remis aux prêtres (ces boissons), que pour toi, ô Vayou, ils ont préparées avec un zèle empressé ; oui, avec un zèle empressé.

4. Que votre char, traîné par vos coursiers, ô Vâyou, (ô Indra), vous amène à notre secours, et venez jouir de ces mets heureusement disposés ; oui, venez jouir de nos holocaustes. Buvez de ces douces boissons, (goûtez) de ces nourritures. C’est pour vous qu’on les a préparées ce matin. Ô Vâyou, ô Indra, venez, accompagnés de l’heureuse opulence : oui, venez accompagnés de l’opulence.

5. Pour vous, on a commandé ces prières et ces sacrifices ; pour vous, on a exprimé cette liqueur légère et vive ; oui, vive comme le rapide coursier. Soyez à nous, et buvez de ces libations ; venez ici pour nous secourir. Ô Indra, ô Vayou, enivrez-vous de ces boissons ; oui, enivrez-vous, vous qui donnez l’abondance.

6. À vous ces boissons qu’ils ont su rendre limpides ! (Vos serviteurs) les ont remises aux prêtres, après les avoir préparées avec un zèle empressé ; oui, avec un zèle empressé. Pour vous, ces liqueurs ont passé à travers le filtre ; elles se sont épurées pour vous sur les poils (de la vache) ; oui, sur ces poils formant un crible serré[721].

7. Ô Vâyou, néglige ceux qui sont endormis. La maison où résonne la pierre (du mortier), c’est celle où vous devez venir ; oui, où Indra et vous devez venir. La prière s’entend ; le beurre consacré coule. Pour combler tous nos vœux, venez à notre sacrifice ; oui, Indra et vous, venez à notre sacrifice.

8. Venez ici prendre nos libations, aussi douces que le miel. Placés près de l’Aswattha[722], que nos (prêtres) remportent sur vous cette victoire ; oui, qu’ils remportent cette victoire. Nos vaches (terrestres) ont donné leur lait ; (les gâteaux) d’orge ont été cuits. Vâyou, tes vaches (célestes) ne doivent point faillir ; oui, elles ne doivent point faillir.

9. (Et en effet), faisant retentir l’air de leurs mugissements, les voilà qui arrivent, tes robustes taureaux ; oui, tes robustes et larges taureaux. On les voit dans les plaines (du ciel), tantôt immobiles, tantôt rapides, se répandre au loin comme les rayons du soleil, et déployer une force que rien ne peut dompter ; oui, que deux bras ne suffisent pas à dompter.


HYMNE XV.

À Mitra et Varouna, par Paroutchhépa.

(Mètres : Atyachtî et Trichtoubh.)

1. Offrandes choisies et abondantes, holocauste, prière, présentez à ces (dieux) immortels et bienfaisants, oui, (présentez à ces dieux) bienfaisants le plus doux des hommages. Unis par leur royauté (sainte), et honorés par nos libations de beurre, ils sont célébrés dans tous nos sacrifices. Car leur puissance est partout triomphante ; oui, leur divinité est partout triomphante.

2. La jeune et éternelle voyageuse a paru dans l’espace. La voie du feu (sacré)[723] s’est entourée de rayons ; oui, l’œil de Bhaga[724] s’est entouré de rayons. Le siége céleste de Mitra, d’Aryaman et de Varouna se couvre de lumière. Que Mitra et Varouna reçoivent une large part d’hymnes ; oui, une large part d’hymnes, de prières et d’offrandes.

3. Ils embrassent Aditi, couverte de lueurs brillantes ; (Aditi) qui soutient la terre, source féconde de félicité. Ils éveillent le ciel pour le lever de la lumière ; oui, pour le lever de la lumière. Adityas forts et resplendissants, ils sont les maîtres des biens. Mitra, avec Varouna et Aryaman, excite l’émulation des hommes ; oui, l’émulation et les travaux des hommes.

4. Que le soma soit agréable à Mitra et à Varouna. Que, dans nos libations, cette (double) divinité ait sa part ; oui, qu’elle ait sa part comme les autres dieux. Que tous les dieux l’honorent, honorés aujourd’hui aussi bien qu’elle. Faites ce que nous demandons ; oui, (déités) royales et justes, faites ce que nous demandons.

5. L’homme qui sert Mitra et Varouna ne connaît point d’ennemi. (Ces dieux) protégent contre le mal, oui, ils protégent contre le mal le mortel qui leur est dévoué. Âryaman défend l’homme droit et pieux qui, par ses hymnes et ses louanges, augmente la pompe, oui, augmente la pompe de leurs sacrifices.

6. J’adore le Firmament, le Ciel et la Terre, Mitra ; (j’adore) Varouna, qui fait pleuvoir (l’abondance) ; oui, (Varouna) qui répand le bonheur et fait pleuvoir (l’abondance). Chante Indra, Agni, le brillant Aryaman, Bhaga. Puissions-nous vivre longtemps, et jouir, avec le secours de Soma[725], oui, jouir d’une nombreuse famille !

7. Confiants dans le secours des dieux et la puissance d’Indra, glorieux protégés des Marouts prions (toujours). Qu’Agni, Mitra et Varouna nous viennent en aide. Puissions-nous ainsi jouir du bienfait de la richesse !




LECTURE DEUXIÈME.

HYMNE I.

À Mitra et à Varouna, par Paroutchhépa.

(Mètre : Atisaknarî.)

1. Nos libations sont prêtes. Venez tous deux ! Sous le pressoir ont coulé ces liqueurs, auxquelles se mêle le lait de nos vaches, et qui causent une aimable ivresse ; oui, une aimable ivresse. Rois célestes, venez ici près de nous. À vous, Mitra et Varouna, ces brillantes libations qu’accompagne, oui, qu’accompagne le lait de nos vaches !

2. Accourez ! voici des liqueurs soigneusement exprimées, voici du lait caillé ; oui, du lait caillé : c’est pour vous. Au lever de l’aurore, au moment où brillent les rayons du soleil, cette libation est faite en l’honneur de Mitra et de Varouna ; oui, elle est faite en l’honneur du feu sacré.

3. C’est pour vous, ô héros, que cette vache a épuisé ses mamelles ; c’est pour vous que le pressoir, oui, que le pressoir à rendu ce soma pétillant. Venez donc ici près de nous pour goûter de cette boisson. Elle est à vous, ô Mitra et Varouna ! les ministres du sacrifice ont pour vous, oui, pour votre soif distillé ce soma.


HYMNE II.

À Pouchan, par Paroutchhépa.

(Mètre : Atyachtî.)

1. Je chante la grandeur de Poûchan, célèbre par ses nombreuses naissances ; mais, auprès de sa puissance, la louange n’est rien ; oui, la louange n’est rien. Je souhaite la prospérité ; et j’implore l’heureux secours du dieu qui, honoré par nous, daigne accueillir, oui, accueillir notre sacrifice.

2. Poûchan, je veux par mes chants presser ta marche. Viens, et sois pour nous comme le chameau qui nous emporte ; oui, qui nous emporte loin des méchants. Divinité puissante, moi mortel, je demande ton amitié ; donne à ceux qui te louent, oui, donne-leur la force dans les combats.

3. Poûchan, quand tes chantres sont devenus tes amis, alors ils sont forts de ta puissance ; ils peuvent compter sur ton secours ; oui, ils peuvent compter sur ta protection. Nous demandons que tu charges de richesses ce char encore nouveau[726]. Sois bon pour nous, ô toi que nous comblons de louanges, et marche avec nous ; oui, marche avec nous dans les combats.

4. Sois bon, et reconnaissant de ce (char) que nous te donnons. Accorde tes bienfaits à ceux qui t’expriment leurs besoins, ô (dieu) dont les chevaux sont immortels ; oui, dont les chevaux sont immortels. Illustre protecteur, nous t’environnons d’honneurs et de louanges. Ô Poûchan, je ne suis pas de ceux qui dédaignent ton pouvoir ; je suis loin de blâmer ou de repousser ton amitié.


HYMNE III.

Aux Viswadévas, par Paroutchhépa.

(Mètres : Atyachtî, Trichtoubh, Vrihâtî.)

1. Invoquons (les dieux) ! D’abord ma prière implore Agni. Nous honorons votre force divine, ô Indra et Vâyou ; oui, nous l’honorons. Quand, près du foyer lumineux, la Prière accomplit son œuvre, puissent nos hommages monter vers les dieux ; oui, puissent-ils monter rapidement vers eux !

2. Ô Mitra et Varouna, lorsque près du feu sacré s’est élevé vers vous un hommage impie que vous adressait la passion, oui, que vous adressait la passion capricieuse du sacrificateur, nous n’avons revu dans nos demeures votre (char) d’or qu’au prix de nos prières, de nos adorations, de nos libations ; oui, de nos libations de soma.

3. Ô Aswins, les enfants d’Ayou vous honorent par leurs louanges ; ils semblent porter leurs cantiques jusqu’à vos oreilles ; oui, ils portent jusqu’à vous leurs holocaustes. À vous sont toutes les richesses, tous les biens, (dieux) qui possédez toute chose. (Nobles protecteurs), elles sont surchargées de biens ; oui, elles sont surchargées, les roues de votre char d’or.

4. On vous entend, (dieux) secourables ; vous montez au ciel. À votre char sont attelés des coursiers qui ne sauraient faillir, oui, qui ne doivent point faillir dans les voies célestes. Nous voulons, (dieux) secourables, vous affermir encore sur ce char d’or. Comme des voyageurs, vous traversez le ciel, où vous apparaissez, oui, où vous apparaissez pour régner.

5. Trésor de puissance, servez-nous nuit et jour par vos œuvres puissantes. Que vos dons ne faillissent jamais, pas plus que les nôtres !

6. Indra, tu es généreux, et ces libations te sont aussi généreusement offertes, jus limpides qui, dans le pressoir, ont fendu pour toi, oui, ont fendu pour toi (les grains qui les contenaient). Qu’ils t’enivrent, et te disposent à répandre sur nous tes dons nobles, riches et variés ! Célébré par nos chants, élevé par nos hymnes, viens, ô (dieu) bienfaisant, oui, viens auprès de nous.

7. Et toi, Agni, exauce nous ! Objet de nos chants, dis aux dieux dignes de nos sacrifices, oui, à (ces dieux) brillants et dignes de nos sacrifices : « Quand les Dévas donnèrent une vache[727] aux Angiras, Aryaman en a reçu le lait, et c’est (Agni) sacrificateur qui le lui a donné, à lui et aux autres dieux. Je donne encore le lait de la vache d’aujourd’hui à Aryaman et aux autres dieux. »

8. Que vos dons généreux soient pour nous durables ! Qu’ils ne périssent jamais entre nos mains ; oui, qu’ils ne périssent jamais ! Ô Marouts, tous ces biens variés, et d’âge en âge toujours nouveaux, par votre force rendez-les immortels en nous. Confirmez-les d’une manière invincible.

9. Avant moi Dadhyantch, Angiras, Priyamédha, Canwa, Atri et Manou ont vu le jour, oui, avant moi ils ont vu jour. Dans les Dévas (terrestres) ils se sont perpétués. Ayons confiance en ces (Dévas). Avec les hymnes qu’ils enseignent, j’invoque Indra et Agni ; oui, j’invoque Indra et Agni avec leurs hymnes.

10. Que le sacrificateur fasse son œuvre ! Que les dévots apportent leurs riches offrandes. (Agni), maître du sacrifice[728] reçoit avec ardeur les libations ; oui, les libations de toute espèce. Nous entendons la mesure du vers et la voix (du prêtre, qui retentit) au loin. Les boissons, sortant du pressoir, ont été par le (père de famille) intelligent, oui, par le (père de famille) intelligent, disposées en différentes places.

11. Ô dieux puissants, qui, au nombre de onze, régnez au ciel ; qui, au nombre de onze, restez sur la terre ; qui, au nombre de onze[729] habitez les ondes, ayez ce sacrifice pour agréable.


HYMNE IV.

À Agni, par Dîrghatamas.

(Mètres : Trichtoubh et Djagatî.)

1. Pour celui qui réside dans le lieu saint[730], qui habite nos demeures, pour le brillant Agni, apporte le foyer, lequel est, pour ainsi dire, le trône (du dieu). Ainsi que d’un vêtement, couvre de la prière (Agni) pur et lumineux, au char resplendissant, (Agni) qui tue les ténèbres.

2. Il naît sous deux formes[731] ; il reçoit (ici-bas) une triple nourriture[732], et cette nourriture ensuite va augmenter le corps de (l’astre) qui roule autour du monde. Sous une de ces formes, il est près de nous, et il croît de ce que sa langue consume. Sous l’autre forme, il inonde (de rayons) bienfaisants ses serviteurs, que (d’en haut) il couvre de sa protection.

3. Marquées de teintes noires et vivement agitées l’une contre l’autre, ses deux mères[733] produisent leur nourrisson, lequel tourne vers l’orient sa langue[734], qui dans sa marche tremblante, rapide, tortueuse, réclame de grands soins, et s’engraisse des libations de son père[735].

4. Arrivent les (flammes) vives et légères, salutaires à Manou quand il veut poursuivre son œuvre[736], traçant un noir sillon, s’avançant d’un pas inégal et pressé, poussées par le vent et précipitant leur course fougueuse.

5. Bientôt Agni prend une forme noire, large, énorme ; ses (flammes) en tremblant courent çà et là. De proche en proche il gagne du terrain ; soufflant, frémissant, il s’avance avec bruit.

6. Il s’attache aux branches, comme la parure (au bras). Il vient en mugissant, tel que le taureau qui court vers ses maîtresses. Il soumet à sa force tous les corps, et apparaît terrible, insaisissable, ayant l’air d’agiter ses cornes menaçantes.

7. Agni, se concentrant ou se divisant, embrasse les branches ; et quand une fois ils se sont bien connus mutuellement, (le dieu) ne les quitte plus. Cependant les flammes s’augmentent, s’élèvent et changent la face divine des deux aïeuls (du monde[737]).

8. Ces flammes, en se courbant, forment autour d’Agni une espèce de chevelure. Tantôt elles semblent se dresser, tantôt tomber et mourir. (Agni) revient les sauver de leur perte ; il fait entendre son grand souffle, et les rappelle à la vie.

9. (Agni), dévorant les libations que répand sur lui le maître du sacrifice, prend une vigueur nouvelle et poursuit son triomphe. L’un augmente la nourriture du (dieu) qui marche toujours ; l’autre la consume, et laisse après lui un noir sentier.

10. Agni, brille dans nos (demeures) riches en offrandes ! qu’on entende ton souffle, généreux Damoûnas[738] ! Brille en répandant tes flammes, qui sont comme tes nourrissons ; et, pour nous couvrir dans les combats, deviens notre cuirasse.

11. Ô Agni, que cet hymne que nous avons composé pour toi soit à tes regards plus précieux que tel autre hymne qui n’a pas eu de succès ! que cette partie de ton corps, qui brille pure et lumineuse, nous procure les biens que nous désirons !

12. Ô Agni, pour que notre maison traverse heureusement (ce monde), tu peux nous donner un vaisseau dont les rames marchent sans jamais s’arrêter, (un vaisseau) qui transporte à l’abri du naufrage nos guerriers, nos princes, notre peuple.

13. Agni, accepte cet hymne. Que le Ciel et la Terre, que les Mers, avec leurs ondes impétueuses, le reçoivent aussi ! Que les rougeâtres (Aurores) nous accordent de longs jours, et une heureuse quantité et d’orge et de vaches !


HYMNE V.

À Agni, par Dîrghatamas.

(Mètres : Atyachtî et Trichtoubh.)

1. Le dieu, en prenant une forme apparente, se distingue par sa substance lumineuse, qu’il doit à la Force dont il est né[739]. Une fois produit, il est fortifié par la Prière, et les voies du sacrifice le soutiennent et l’accompagnent.

2. Les offrandes constituent une de ses formes[740]. Nos libations la perpétuent dans le foyer où il réside. Une autre de ses formes existe au sein des sept heureuses mères[741]. Une troisième est le (Soleil même), souverain des dix (régions célestes)[742], que (les prêtres) engendrent et nourrissent[743] pour extraire le lait de (ses rayons) généreux.

3. Quand les seigneurs et maîtres du sacrifice ont, par le moyen de la Force, tiré Agni de l’asile où gisait sa forme auguste ; quand ils l’ont, suivant l’antique usage, alimenté du miel des libations, Mâtariswan vient dans le foyer exciter son ardeur.

4. Cependant les diverses offrandes du père (de famille) sont apportées, et Agni monte rapidement dans les branchages du bûcher. Ce n’est plus alors la jeune et faible lueur qui brillait, quand ses deux (mères) venaient de lui donner le jour.

5. Bientôt il pénètre dans les (branches) encore intactes, et qui sont (comme) ses mères[744]; il s’étend, il s’élargit. Il envahit d’abord les plus élevées, et, toujours pressé, il va plus bas en attaquer de nouvelles.

6. Alors (les hommes) par leurs offrandes et leurs hommages honorent (Agni) sacrificateur, qui est comme Bhaga dans les régions célestes, en le voyant avec force et avec majesté s’approcher des Dévas (immortels), et venir recueillir les louanges des humains.

7. Mais voici que l’adorable (Agni) a changé de forme ; agité par le vent, il a courbé sa taille, et produit en résonnant des espèces de tourbillons. Toujours brillant, il brûle en divisant ses voies, et en laissant des traces noires de son passage.

8. Partant comme un char, il se dresse en crêtes rougeâtres, dont il va frapper le ciel. Aussitôt, loin de sa clarté, fuient les ténèbres, de même que les oiseaux se cachent des chaleurs du soleil.

9. Par toi, ô Agni, apparaissent et Varouna qui aime le beurre consacré, et Mitra, et le bienfaisant Aryaman. Dans tes œuvres successives, tu sembles te multiplier ; tu t’entoures d’autres êtres, comme la roue de ses rayons.

10. Agni, en faveur de l’homme qui t’adresse des hymnes et de précieuses libations, (dieu) toujours jeune, tu viens à cette fête, célébrée en l’honneur des dieux. Enfant de la Force, source de tout bien, (dieu) nouveau, nous t’honorons comme Bhaga dans l’œuvre du sacrifice.

11. (Maître des pieuses cérémonies), rends-nous favorable Damoûnas, (ce dieu) notre soutien, qui est pour nous tel qu’un riche trésor, ou tel que le généreux Bhaga. Celui qui sait gouverner les deux mères d’Agni, ainsi que les rênes (d’un char), doit savoir aussi diriger, au moment du sacrifice, les louanges qui s’adressent aux dieux.

12. Qu’il nous entende, le (dieu) sacrificateur, aux belles clartés, aux chevaux rapides, au char magnifique ! que l’heureux et prudent Agni se rende à nos vœux, et nous conduise rapidement vers le bonheur et la richesse !

13. Nous avons célébré Agni, qui, par la vertu de ses feux puissants, est vraiment roi souverain. Que nos princes, que nous-mêmes, nous propagions notre race, comme le soleil grossit le nuage !


HYMNE VI.

À divers dieux, surnommés Apris[745], par Dîrghatamas.

(Mètre : Anouchtoubh.)

1. Agni, (surnommé) Samiddha[746], amène aujourd’hui les dieux vers celui qui lève la cuiller (des libations). Fais que ces abondantes offrandes soient une source de biens pour le serviteur qui a préparé le soma.

2. (Agni, appelé) Tanoûnapât[747], accueille, comme dignes de toi, et le beurre et le miel du sacrifice, que te présente un prêtre tel que moi, serviteur qui te comble de louanges.

3. Il aime la rosée et le miel du sacrifice, le dieu brillant et purificateur, (le dieu) admirable, (nommé) Narâsansa[748], qui trois fois[749], du haut du ciel et parmi les Dévas[750], reçoit nos hommages.

4. Agni, (célébré sous le nom) d’Ilita[751], amène ici le bon et magnifique Indra. (Dieu) à la langue brillante, c’est à toi que s’adresse cette prière.

5. Levant la cuiller (des libations), et jonchant la terre de gazon (sacré) en l’honneur de leur pieux sacrifice, (les mortels) présentent à Indra l’hommage le plus dévoué et le plus solennel.

6. Ouvrez-vous pour laisser passer les Dévas[752], Portes magnifiques et divines[753], vous que la piété sanctifie et que tant de vœux environnent, vous qui purifiez (les hommes) !

7. Ô Nuit, ô Jour (déités) fortunées et douées tant de beauté, augustes mères[754] du sacrifice, venez vous asseoir sur cet heureux gazon.

8. Couple sage et divin de sacrificateurs[755], ornés d’une langue brillante et amis des prières, daignez aujourd’hui présider à notre solennité, qui donne le bonheur et réjouit les dieux.

9. Que la brillante Hotrâ[756], placée parmi les Dévas, et Bhâratî[757], parmi les Marouts[758], qu’Ilâ et la grande Saraswatî, toutes dignes de nos hommages, viennent se placer sur notre gazon.

10. Que Twachtri[759] se joigne à nous dans notre foyer, et que, pour notre bonheur, pour l’accroissement de nos richesses, il prenne sa part de ces nombreuses et opulentes offrandes, pour lesquelles rien n’a été négligé !

11. Ô Vanaspati[760], sois bienveillant, et aide-nous à honorer les dieux ! Que le sage Agni, (noble) Déva parmi les Dévas, reçoive nos holocaustes !

12. Offrez l’holocauste à Indra, assisté de Poûchan, des Marouts, des Viswadévas, de Vâyou, et orné des beautés de la Swâhâ[761] et de la Gâyatri[762].

13. Indra, viens à notre fête ; prends ces holocaustes offerts avec la Swâhâ. Viens, et entends l’invocation de ceux qui t’implorent dans le sacrifice.


HYMNE VII.

À Agni, par Dîrghatamas.

(Mètre : Trichtoubh.)

1. J’apporte à Agni, au fils de la Force[763] une offrande riche et nouvelle, l’hommage de la prière. L’enfant des ondes[764] est notre sacrificateur qui vient, au moment favorable, s’asseoir avec ses trésors à notre foyer de terre.

2. À peine né, il s’élève au-dessus du foyer, et apparaît au gré de Mâtariswan[765]. Il s’enflamme avec force, et remplit de son éclat le ciel et la terre.

3. Ses splendeurs immortelles éblouissent les regards ; sa belle tête se couronne de lueurs éclatantes. Les flots lumineux d’Agni sont comme une substance onctueuse qui coule et s’étend sans interruption.

4. Cet Agni, source de tout bien, que les Bhrigous ont avec majesté établi sur le foyer de terre, et qui, tel que Varouna, règne souverainement sur la richesse, tu peux, dans ta propre demeure, le fléchir par tes chants.

5. Tel que la voix des Marouts ou le choc d’une armée, ou la foudre divine, il ne connaît point de supérieur. Agni, de ses dents aiguës, attaque, blesse, dévore les branches, ainsi que le guerrier fait de ses ennemis.

6. Qu’Agni accomplisse nos vœux, et que les biens, dont il est le maître, comblent tous nos désirs ! Que par ses bienfaits il prévienne nos prières ! Telle est la requête que j’adresse au (dieu) qui a la face brillante.

7. Le (serviteur fidèle), allumant (le feu du foyer), honore comme un ami cet Agni, qui reluit sous le beurre consacré, et qui porte le fardeau de vos offrandes. Brillant, invincible, il exauce la prière qui s’illumine des feux du sacrifice.

8. Agni, hâte-toi de nous défendre ; accorde-nous un secours prompt, favorable et puissant. Né pour nous au sein du sacrifice, entoure-nous d’une protection que rien ne puisse faire trembler, fléchir ni sourciller.


HYMNE VIII.

À Agni, par Dîrghatamas.

(Mètre : Djagatî.)

1. Il vient, le sacrificateur, pour remplir son office : il reçoit la prière qui s’élève pure et intelligente. Couvert de nos offrandes, il s’approche des cuillers (de la libation), qui s’abaissent[766] vers le foyer (où il repose).

2. Tous les vases du sacrifice sont disposés autour du sanctuaire où siége le dieu. Ainsi placé dans le voisinage des ondes (sacrées)[767], qu’il boive les libations dont il est entouré[768] !

3. Quand (Agni) veut atteler son char[769], ses deux mères[770] travaillent d’abord par des efforts mutuels à lui donner un corps. Bientôt ce (dieu) qu’il faut invoquer comme Bhaga, et destiné à transporter nos offrandes, forme ses rayons, c’est-à-dire les rênes qui serviront à diriger ce char.

4. Ces deux mères, qui restent ensemble, gardent également dans leur sein leur fruit, qui, fidèlement conservé, naît jour et nuit[771], toujours jeune, toujours en mouvement, et immortel à travers les âges humains.

5. Dix ouvriers[772] différents délivrent ces deux mères. C’est ce dieu que, mortels, nous appelons à notre secours. Il tend son arc, et lance ses flèches[773] : qu’on vienne à lui, il possède tous les biens qu’on peut désirer.

6. Agni, tu règnes au ciel ; tu règnes sur la terre, dont tu es comme le pasteur. Nous invitons à venir avec toi, sur ce gazon sacré, ces deux êtres[774] grands et aussi beaux que l’or, qui suivent une marche oblique, et que nous aimons à invoquer.

7. Agni, accueille avec plaisir notre prière, toi qui portes l’offrande et, heureux de nos hommages, es né du sacrifice ; toi qui es accessible à tous, aimable et magnifique, et qui brilles à nos yeux comme une demeure où règne l’abondance.


HYMNE IX.

À Agni, par Dîrghatamas.

(Mètre : Trichtoubh.)

1. Priez-le ; il vient, il (nous) entend, il s’avance plein de sollicitude, il s’avance rapidement. Pour lui sont les bénédictions, pour lui les offrandes. Il est le maître de l’abondance, de la force, de la splendeur.

2. Il faut le prier : nul n’est trompé dans son attente, quand il est constant dans sa demande. Une première, une seconde prière peut être repoussée. L’homme qui ne se rebute pas doit compter sur la puissance d’Agni.

3. C’est pour lui que sont préparés ces vases (du sacrifice) ; c’est pour lui que sont composés ces hymnes[775] : que lui seul entende toutes mes paroles. Il nous comble de biens, il nous met à l’abri du danger, il accomplit les vœux du sacrifice, il nous donne un secours infaillible, il nous aime de l’amour d’un nourrisson : qu’il reçoive et exauce (notre prière).

4. Quand vous êtes assemblés, il vient près de vous ; il naît avec les qualités qui appartiennent à sa nature. Il promet le plaisir et le bonheur à son dévoué serviteur, quand ses hymnes viennent le charmer au sein du foyer qu’il habite.

5. Telle est la forme qu’a revêtue (ce dieu) désirable et accessible, (ce dieu) qui pénètre dans le bois du bûcher. Le sage Agni, ami de la justice et du sacrifice, a révélé aux mortels ce qui doit leur être utile.


HYMNE X.

À Agni, par Dîrghatamas.

(Mètre : Trichtoubh.)

1. Chante Agni aux trois têtes[776], aux sept rayons[777], placé entre les deux grands parents[778], et remplissant de ses clartés tout ce monde ou mobile ou inanimé.

2. Un généreux seigneur a rapproché ces deux (mères d’Agni)[779]. Le (dieu) immortel a paru disposé à nous secourir. Ses pieds reposent dans le vase de terre ; ses flammes sucent la mamelle (qui le nourrit).

3. Deux vaches[780] complaisantes s’approchent à la fois du nourrisson encore faible ; elles lui tracent les voies qu’il doit suivre ; elles satisfont à tous ses besoins.

4. Les sages, affermis dans la science et chargés de garder le (dieu), le guident avec empressement dans sa demeure inébranlable. Remplis de sollicitude, ils regardaient autour d’eux pour retrouver leur rapide (élève). À leurs yeux le soleil a paru[781].

5. Charme de nos regards, trésor de toutes les régions célestes, (Agni) est pour les pauvres mortels un objet de louange. En passant par ces divers enfantements, il est le (dieu) magnifique, que tous considèrent avec admiration.


HYMNE XI.

À Agni, par Dîrghatamas.

(Mètre : Trichtoubh.)

1. Agni, quand donc tes feux purifiants donnent-ils la vie et l’abondance ? C’est quand les Dévas (mortels), te présentant les deux filles du sacrifice[782], aiment à faire retentir les airs du sâman[783].

2. Jeune (dieu) qui portes la swadhâ[784], écoute la prière dont je t’offre le magnifique tribut. L’un de tes dévoués serviteurs répand des libations, l’autre fait entendre ses chants. Moi j’adore ton corps[785], ô Agni !

3. Tes rayons protecteurs, ô Agni, ont vu ma cécité[786], et m’ont délivré du mal. Le (dieu) qui possède tous les biens a protégé ces (hommes) pieux. Les ennemis qui avaient le dessein de nous nuire ont échoué dans leur projet.

4. Ô Agni, notre perfide adversaire va, dans sa haine, méditer notre perte. Sois notre conseiller, notre maître. Adoucis ta voix pour nous parler.

5. Si un mortel, confiant dans sa force, vient attaquer un autre mortel, ton serviteur, pour prix de ses hymnes, défends celui-ci. Agni, protége-nous contre tout oppresseur !


HYMNE XII.

À Agni, par Dîrghatamas.

(Mètre : Trichtoubh.)

1. Que Mâtariswan[787] vienne agiter (Agni) sacrificateur, qui revêt toutes les formes et honore tous les dieux, (Agni) qui est pour nous comme le bonheur, beau, varié dans ses beautés, (Agni) établi parmi les enfants de Manou.

2. Il est invulnérable, celui qui lui prodigue offrandes et prières. Agni est ma cuirasse, voilà ce que disent (ses serviteurs). Qu’il ait pour agréables toutes les œuvres de celui qui lui adresse des hymnes et des sacrifices !

3. Après avoir reçu Agni sur son siége immortel, et l’avoir entouré d’hommages, les hommes religieux savent encore le conduire et lui donner, sous le jet des libations, la vivacité des chevaux qui entraînent un char.

4. Le (dieu) secourable, avec ses dents, dévore les nombreux aliments (qu’on lui présente) ; il brille dans le bois, et répand au loin ses lueurs. En même temps le vent vient souffler dans les airs ses étincelles, qui ressemblent à la flèche homicide de l’archer.

5. Si, dans le sein qui le porte, de cruels ennemis ne peuvent le blesser, il n’a rien à craindre des aveugles ténèbres. De nobles gardiens se succèdent pour le protéger[788].


HYMNE XIII.

À Agni, par Dîrghatamas.

(Mètre : Anouchtoubh virât.)

1. Il est arrivé le maître de l’opulence, le souverain libéral, et qui siége au trône du roi des trésors. Il paraît, et la coupe (des libations) l’honore.

2. Ce (dieu) libéral, qui, recevant les aliments que lui donnent, à l’exemple des hommes, le Ciel et la Terre, en forme pour nous une espèce de libation vitale, réside dans le foyer, et y consume les offrandes.

3. Sage, rapide comme le vent léger, il vient illuminer la ville humaine, aussi brillant que le soleil, et animant tous les corps.

4. Né deux fois[789], il allume les trois feux, il illumine les trois mondes, sacrificateur et pontife souverain au siége des libations.

5. Le voilà le sacrificateur qui, né deux fois, possède tous les biens les plus précieux. (Dieu) mortel[790], nous sommes ses heureux enfants auxquels il réserve ses dons.


HYMNE XIV.

À Agni, par Dîrghatamas.

(Mètre : Ouchnih.)

1. Père de famille, je t’invoque et te présente de nombreuses offrandes. Ô Agni, je te regarde comme mon maître, et j’ai recours à ta puissante protection.

2. Rejette la prière du riche qui refuse de te reconnaître comme maître et de t’offrir des présents, de celui aussi qui chante rarement tes louanges : tous les deux sont des impies.

4. Ô sage, grand est le mortel (qui honore Agni) ! il a dans le ciel une place distinguée[791]. Puissions-nous, ô Agni, être remarqués parmi tes serviteurs !


HYMNE XV.

À Mitra et à Varouna, par Dîrghatamas.

(Mètre : Djagatî.)

1. Le Ciel et la Terre se sont rougis des feux du (dieu) adorable et bon, tuteur de tous les êtres, que par leurs œuvres, leur piété, leurs prières, les (prêtres), prodiguant les offrandes et les invocations, ont enfanté, pour être leur ami, au milieu des sacrifices et des libations[792].

2. Agréez tous deux les présents et le soma de Pouroumîlha, que vous présentent ces dévots serviteurs qui sont pour vous comme des amis, Pouroumîlha vous appelle : (dieux) généreux, écoutez (la voix) d’un père de famille.

3. Les hommes vous comblent de louanges. C’est à votre force héroïque, ô (dieux) généreux, qu’il faut attribuer la naissance du Ciel et de la Terre[793], quand vous vous portez vers le feu du sacrifice, quand vous venez prendre la part que vous fait l’homme religieux dans ses invocations et son œuvre (pieuse).

4. (Dieux) qui donnez la vie[794], cette enceinte (sacrée) doit vous être chère ; vous aimez le sacrifice, et vous en êtes l’ornement. Du haut du ciel, par un secours puissant et opportun, vous nous aidez à traîner notre fardeau : tel (à un char) on attelle un taureau.

5. Vous arrivez avec grandeur sur cette terre, et vous vous approchez de la coupe (de nos libations). (Voyez comme) ces vaches (du sacrifice[795]), et pures et fécondes, (brillent) dans leur pâturage. On entend leur bruit dans les airs ; elles tendent vers le soleil, telles que les Aurores bienfaisantes.

6. Pour votre sacrifice les (flammes) s’élèvent, présentant l’apparence d’une belle chevelure. Mitra et Varouna, daignez venir en ces lieux. Descendez, accueillez nos vœux. Vous régnez sur la prière du sage.

7. Quand le sage, prodiguant et l’offrande et la louange, vous honore par ses invocations et ses sacrifices, (homme) accompli dans la science de prier, alors vous vous approchez de lui, vous agréez ses présents, vous approuvez ses vœux et comblez ses désirs : vous venez vers nous.

8. Ô (dieux) qui aimez le sacrifice, vous êtes les premiers dans nos offrandes et nos libations : nous sommes unis à vous de cœur. L’hymne et la prière sont d’accord pour vous exalter. Votre âme invincible peut se satisfaire magnifiquement.

9. Vous recevez de superbes présents ; ô (dieux) vaillants, vous jouissez d’une opulence, d’une grandeur que relèvent mille prestiges de puissance. Ni les cieux avec les jours, ni les mers, ne connaissent rien d’égal à votre divinité, rien qui mérite les hymnes et les libations qu’on vous adresse.


HYMNE XVI.

À Mitra et à Varouna, par Dîrghatamas.

(Mètre : Trichtoubh.)

1. Vos vêtements sont amples et magnifiques. Quand vous les quittez, vous le faites avec sagesse, et ils ne se trouvent jamais déchirés. Triomphez de tout ce qui est mauvais ; car vous êtes, ô Mitra et Varouna, unis avec la bonté.

2. L’estime que l’on peut faire des hommes n’est jamais complète. Tel est juste et prudent, il aime les sages ; mais il est cruel. Tel autre se fait craindre et abuse de sa force pour opprimer un plus faible que lui[796]. Ô dieux, un tel reproche ne peut vous être adressé.

3. La première des (déités) douées d’un pied (léger), en est bientôt privé[797]. Mitra et Varouna, qui dirait la même chose de vous ? Votre enfant porte le fardeau de ce monde, soutenant ce qui est bon, repoussant ce qui est mauvais[798].

4. Nous voyons bien cet époux des jeunes (Aurores) s’avancer, poursuivre sa révolution, et couvrir ces espaces élevés et vastes, demeure de Mitra et de Varouna.

5. Mais, au moment de sa naissance, il était sans chevaux et sans rayons, (ce soleil), qui, rapide et retentissant, marche au plus haut des cieux. Que (les hommes) fassent de brillants apprêts, et qu’en l’honneur de Mitra et de Varouna ils allument le feu du sacrifice et chantent des hymnes.

6. Que les vaches donnent le lait de leurs mamelles pour mon sacrifice. Que le sage (Agni) obtienne toutes les libations qu’il désire ; que sa bouche (sacrée) touche (à mes holocaustes), et n’épargne rien de mes offrandes[799].

7. Ô Mitra et Varouna, puissé-je vous rendre agréables les honneurs que je vous rends, et mériter votre protection, ô dieux (favorables) ! Que notre piété nous donne la victoire dans les combats ! Que la pluie divine (de vos faveurs) nous serve à traverser heureusement (la vie) !


HYMNE XVII.

À Mitra et à Varouna, par Dîrghatamas.

(Mètre : Trichtoubh.)

1. Nous éprouvons une grande joie à vous honorer par nos holocaustes et nos invocations, ô Mitra et Varouna, (ô dieux) dont le beurre de nos offrandes relève l’éclat, tandis que nos prêtres, par leurs cérémonies, semblent vouloir vous exalter.

2. J’ai préparé des hymnes, ô Mitra et Varouna, et, attelant le char de votre sacrifice, j’apporte des vers harmonieux : cependant le père de famille fournit pour votre solemnité les holocaustes et les présents.

3. Que la vache donne tout son lait pour le sacrifice, ô Mitra et Varouna, en faveur du mortel qui vous présente cet holocauste, au moment où (le dieu) qui reçoit les offrandes[800], tel qu’un sacrificateur humain, vous honore et vous fête en ce jour.

4. Allons ! au milieu de ce peuple transporté de joie, que les vaches, que les ondes divines vous fournissent des libations ! Allons ! l’antique maître, (Agni), et pour nous et pour (le père de famille) ici présent, se charge de vous les offrir. Prenez votre part (du sacrifice), et buvez du lait de la vache[801].


HYMNE XVIII.

À Vichnou, par Dîrghatamas.

(Mètre : Trichtoubh.)

1. Je chante les exploits de Vichnou qui a créé les splendeurs terrestres, qui par ses trois pas[802] a formé l’étendue céleste, (Vichnou) partout célébré.

2. C’est pour sa force que je chante Vichnou, redoutable comme le lion, semant la terreur sur ses pas, habitant la hauteur ; (Vichnou) dont les trois vastes pas embrassent tous les mondes.

3. Que ma prière touche vivement ce généreux Vichnou qui habite la hauteur, et se trouve partout célébré ; qui, incomparable, a mesuré en trois pas cette large et longue demeure !

4. Ses trois pas immortels sont marqués par de douces libations et d’heureuses offrandes. C’est Vichnou qui soutient trois choses[803] : la terre, le ciel, tous les mondes[804].

5. Puissé-je arriver à cette demeure de Vichnou[805], où vivent dans les plaisirs les hommes qui lui ont été dévoués ! Celui qui fait des libations en l’honneur de Vichnou aux larges pas devient son ami[806] dans cette région supérieure.

6. Nous souhaitons que vous alliez tous deux[807] dans ce séjour où paissent des vaches légères, aux cornes merveilleusement allongées[808]. Là brille la demeure suprême de ce (dieu) libéral et partout célébré.


HYMNE XIX.

À Vichnou et Indra, par Dîrghatamas.

(Mètre : Djagatî.)

1. Apportez vos libations et vos mets en l’honneur de Vichnou et du grand héros qui aime les prières, (en l’honneur de ces dieux) invincibles, qui se placent sur le dos des montagnes (célestes), comme sur un excellent coursier.

2. En votre honneur, ô Indra et Vichnou, (dieux) puissants par vos œuvres, Soutapas a formé cette brillante réunion. Et, pour récompenser un mortel, vous donnez l’essor à la flèche d’Agni, le magnifique archer[809].

3. Nos libations augmentent la puissante vigueur de Vichnou. (Soutapas) rapproche les deux mères qui doivent heureusement produire (Agni)[810]. Et alors le (dieu) obtient trois noms : l’un inférieur, celui de fils ; l’autre supérieur, celui de père ; et le troisième, qu’il possède dans la région lumineuse[811] du ciel.

4. C’est cette vigueur de Vichnou que nous chantons : (Vichnou) est maître, sauveur, bienfaiteur libéral. En trois pas il parcourt le monde, pour y répandre au loin et la vie et sa gloire.

5. Deux des stations de ce dieu touchent au domaine des mortels. La troisième est inaccesible à tous, même à l’oiseau qui vole.

6. Il fournit quatre-vingt-quatorze carrières[812], pareilles à la roue qui tourne. Son large corps a été par les poëtes divisé en plusieurs parties. Toujours jeune et florissant, il vient à notre appel.


HYMNE XX.

À Vichnou, par Dîrghatamas.

(Mètre : Djagatî.)

1. Sois facile comme un ami, heureux de nos libations de beurre, magnifique, accessible et généreux. C’est ainsi, ô Vichnou, que la louange sera célébrée par le sage, et que le riche offrira l’holocauste en ton honneur.

2. L’homme qui honore Vichnou antique et nouveau, (Vichnou) qui embrasse tout et qui naît pour le bonheur du monde, (l’homme) qui chante la grande naissance du grand (dieu), obtient certainement l’abondance.

3. Chantres éclairés, célébrez l’avénement de ce (dieu) antique, enfant du sacrifice, et, reconnaissant sa puissance, dites : « Ô Vichnou, tu es grand, et nous implorons ta bonté. »

4. Que le royal Varouna, que les Aswins prennent leur part du sacrifice offert à, ce Vichnou, qui soutient tout, et que les Marouts accompagnent. Vichnou a développé la force suprême qui fait briller le jour, et, uni aux (Marouts) ses amis, il a ouvert le pâturage (céleste).

5. Que le divin Vichnou, plus puissant que le puissant Indra, daigne se joindre à lui ! que le (dieu) sage qui siége en trois stations se plaise à notre sacrifice, et permette à l’Arya, qui le lui offre, d’en recueillir le fruit !


HYMNE XXI.

Aux Aswins, par Dîrghatamas.

(Mètre : Djagatî.)

1. Agni s’éveille sur son (siége) de terre ; le Soleil arrive ; la grande et brillante Aurore apparaît avec éclat. Les Aswins attellent leur char. Le divin Savitri a enfanté les deux parties de l’univers.

2. Ô Aswins, pendant que vous attelez vos généreux coursiers, versez sur nos champs le beurre et le miel. Accueillez nos prières, et secourez-nous dans les combats. Puissions-nous obtenir les riches dépouilles de nos ennemis !

3. Qu’il marche en avant, ce char des Aswins, attelé de rapides coursiers, chargé de biens savoureux, objet de tant de louanges ; (ce char) à trois roues et à trois siéges, magnifique et garni de toute espèce de richesses ; qu’il apporte le bonheur et pour nous et pour tous les êtres animés !

4. Ô Aswins, amenez-nous la force, et agitez sur nous votre fouet, d’où s’épand une douce abondance. Prolongez notre vie, effacez nos fautes, frappez nos ennemis, soyez toujours avec nous.

5. Vous portez la fécondité au sein des mères ; vous êtes au centre de tous les mondes. Généreux Aswins, on vous doit (ici) la présence d’Agni, des ondes (sacrées) et du bûcher.

6. Vous connaissez la médecine et la vertu des plantes ; vous êtes aussi habiles à conduire les chars. (Dieux) terribles, vous êtes les maîtres de la richesse. (Protégez) celui qui vous offre, avec sa prière, le don de son holocauste.




LECTURE TROISIÈME.

HYMNE I.

Aux Aswins, par Dîrghatamas.

(Mètres : Trichtoubh et Anouchtoubh.)

1. (Dieux) protecteurs et terribles[813], sages, puissants et généreux, venez à nous, et comblez-nous de vos dons. Secourez-nous, si vous aimez le fils d’Outchathiya[814], si vous voulez qu’on n’accuse pas votre puissance.

2. Eh ! qui voudrait vous prier, (dieux) protecteurs, si vous receviez, dans l’enceinte du sacrifice, nos adorations (en les laissant stériles) ? Rendez nos prières fécondes, vous qui êtes capables de remplir nos vœux.

3. S’il est vrai que votre char a présenté au fils de Tougra[815], au milieu de la mer, un terrain solide, je puis venir vers votre appui protecteur, comme un prince (vient) vers sa forteresse, dont les chemins lui sont ouverts.

4. Que l’hymne du fils d’Outchathya fasse son salut ! que je ne sois pas la pâture de ces deux êtres qui marchent toujours[816] ! que je n’aille pas me brûler au feu de ce foyer où sont jetées dix espèces d’offrandes[817], pendant que votre serviteur, les membres enchaînés, mange la terre[818] !

5. Que les Eaux, les meilleures des mères, ne viennent pas me submerger, pendant que (mes) serviteurs m’ont ainsi placé sur la terre, tout garrotté (par l’âge) ! Trêtana[819], pour me servir, a raffermi ma tête, mais frappé ma poitrine d’un de ses rayons.

6. Le vieux Dîrghatamas, entouré des siens dans la dixième dizaine de son âge[820], est encore votre prêtre ; il monte avec vous sur le char du sacrifice, et verse pour vous les libations.


HYMNE II.

Au Ciel et à la Terre, par Dîrghatamas.

(Mètre : Djagatî.)

1. Ciel et Terre, (dieux) grands et sages, que le sacrifice amplifie, je vous loue dans nos cérémonies, vous qui, distingués par vos œuvres, accordez vos brillantes faveurs aux dévas (terrestres), dont vous êtes les enfants[821].

2. Par ces offrandes, j’honore la bienfaisance d’un père et la force incomparable d’une mère. Ces deux aïeuls, fiers de leur heureuse fécondité, font et maintiennent l’immortalité de leur nombreuse progéniture.

3. Ces Dévas, renommés par leurs œuvres et chargés de libations[822], ont produit pour la prière du matin les deux grandes mères (d’Agni). Et vous, fidèles à votre devoir de soutenir tous les êtres, animés et inanimés, vous gardez la demeure de leur incomparable enfant.

4. Ces Dévas sages et intelligents ont formé les deux sœurs jumelles, sorties d’un même sein[823] et demeurant ensemble. Ce sont eux qui, habiles et éclairés, ont mesuré, dans l’espace céleste, cette étendue sans cesse nouvelle.

5. Au moment où naît Savitri, nous demandons aujourd’hui les présents d’élite que dispense ce dieu. Et vous, Ciel et Terre, soyez bienveillants pour nous et accordez-nous la richesse et des centaines de vaches.


HYMNE III.

Au Ciel et à la Terre, par Dîrghatamas.

(Mètre : Djagatî.)

1. Entre le Ciel et la Terre, auteurs de toute félicité, trésors de bonté, habiles à soutenir les mondes, (êtres) intelligents et bien nés, marche le brillant Soleil, dieu chargé de conserver deux autres dieux.

2. Grands, larges et distincts, le père et la mère gardent les mondes (intermédiaires). Le Ciel et la Terre se font distinguer par leurs beautés, au moment où leur père apparaît, donnant des formes à tout.

3. Ce feu (céleste), enfant (du sacrifice), purifiant ces deux aïeuls, éclaire les mondes de ses puissants rayons ; et son lait brillant nourrit tous les jours la vache féconde et le taureau vigoureux[824].

4. Parmi les Dévas travailleurs, le plus laborieux c’est celui qui a enfanté le Ciel et la Terre, auteurs de tous les biens ; celui qui, puissant en œuvres, a mesuré ces deux mondes ornés de brillantes couleurs, et les a fondés sur des colonnes impérissables.

5. Ciel et Terre, que nous avons chantés, accordez-nous des biens convenables à votre grandeur. Donnez-nous de vastes domaines, où puisse s’étendre notre peuple. Que nous obtenions de vous une puissance enviée !


HYMNE IV.

Aux Ribhous, par Dîrghatamas[825].

(Mètres : Trichtoubh et Djagatî.)

1. (Les Ribhous parlent.) « Ô toi, le meilleur et le plus jeune d’entre nous, que viens-tu nous annoncer ? qu’avons-nous dit ? Nous ne blâmons pas le vase des libations, que nous trouvons fort distingué, ô Agni[826] notre frère. Nous avons contesté la nature supérieure du vase. »

2. (Agni parle :) « De ce vase, qui est unique, faites-en quatre. Voilà ce qu’ont dit les Dévas ; voilà pour quel motif je viens vers vous. Enfants de Soudhanwan, si vous agissez ainsi, vous serez dignes de partager avec les Dévas les honneurs du sacrifice. »

3. Ô (Ribhous), vous avez répondu favorablement à l’ambassade d’Agni, (et il a ajouté :) « Il vous faut construire le char rapide[827] (du sacrifice). Et en même temps, frères, formez une vache[828] ; rendez à la jeunesse ces deux vieillards[829]. Eh bien ! allons ! »

4. Ô Ribhous, quand vous eûtes exécuté cet ordre, vous avez demandé : « Où est aujourd’hui l’envoyé qui nous est venu trouver ? » Cependant Twachtri, en voyant les quatre vases qui avaient été faits, se montra au milieu des femmes (chargées des apprêts du sacrifice).

5. « Mort, » s’écriait Twachtri, « mort à ceux qui ont blâmé le vase qui sert aux libations des Dévas ! Ils inventent des invocations nouvelles ; il faut, pour ces invocations, que la mère de famille leur fournisse de nouvelles libations. »

6. Cependant Indra a reçu de vous deux chevaux, les Aswins un char, Vrihaspati des vaches de toute forme[830]. Ribhou, Vibhwan et Vâdja, vous êtes venus vous joindre aux Dévas dont les œuvres sont excellentes, et vous avez réclamé une part dans le sacrifice.

7. De la peau (d’une vache morte) vous en avez fait une vivante. Par vos opérations, vous avez rendu ces deux vieillards à la jeunesse. Fils de Soudhanwan, d’un cheval vous avez tiré un autre cheval, et, les attelant à votre char, vous êtes venus vers les Dévas.

8. (Ô Dévas !) vous leur avez dit : « Buvez de ces libations ; buvez de cette boisson purifiée avec le moundja[831]. Fils de Soudhanwan, si vous le voulez, vous pouvez encore vous enivrer des liqueurs offertes dans le troisième sacrifice[832]. »

9. « Les libations sont abondantes, » dit un (des assistants). « Le feu est ardent, » dit un autre. Plusieurs autres s’occupent de la vache (du sacrifice), ou, avec les formules d’usage, remplissent les coupes.

10. Celui-ci apporte le riz, l’eau, (les boissons faites du lait de) la vache ; celui-là dispose les chairs qui sortent de la cuisine. Un autre emporte les ordures. Enfin, assistés de leurs enfants, le père et la mère de famille prennent leur place.

11. Ô généreux Ribhous, c’est à vos bons offices que nous devons la verdure dans les lieux élevés, les eaux dans les lieux inférieurs. Tant que vous dormez au sein de ce (dieu), qui ne peut rester caché[833], vous demeurez inconnus au monde.

12. Mais quand, mêlés (au soleil), vous parcourez les airs, alors les vénérables pères et mères de famille[834] vous honorent partout. Malheur à celui qui arrête votre bras[835] ! Gloire à celui qui vous chante !

13. Fortunés Ribhous, vous avez fait cette question : « (Ô dieu), qui ne peux rester caché, quel est donc celui qui a éveillé ce monde, et nous (a donné le signal ? » (Le dieu) vous a dit que c’était le chien[836] qui rompt le silence de la nuit. Et, dans l’astre qui parcourt l’espace, vous avez éclairé le monde.

14. Les Marouts vont dans le ciel, Agni sur la terre, le vent dans l’air, Varouna dans les eaux et les mers, vous désirant partout, vous enfants de la Force[837].


HYMNE V.

Sacrifice du cheval, par Dîrghatamas.

(Mètres : Trichtoubh et Djagatî.)

1. Que Mitra, Varouna, Âryaman[838], Vâyou[839], Indra, Ribhoukchas[840] et les Marouts, ne réclament rien de nous, pendant que nous allons chanter dans le sacrifice les vertus du rapide cheval, né des Dévas[841].

2. Quand on amène la victime prisonnière, ce beau (cheval), magnifiquement orné, qu’on frappe avant lui un bouc de couleurs diverses[842] ! C’est là une offrande aimée d’Indra et de Poûchan.

3. Ce bouc est conduit devant le rapide cheval, destiné à Poûchan et aux Viswadévas. C’est aussi pour Twachtri, une offrande agréable et précieuse à lui présenter avec le coursier.

4. Quand donc les enfants de Manou mènent trois fois autour (du foyer) ce cheval, qui, dans le moment propice, doit être immolé aux dieux, alors ce bouc, leur annonçant le sacrifice, marche le premier consacré à Poûchan.

5. Que le prêtre sacrificateur, habile dans la science (divine), la coupe à la main et l’hymne à la bouche, s’approche d’Agni, qui l’éclaire de ses rayons. Par l’appareil d’un brillant sacrifice et par le choix de nos offrandes, sachons plaire (aux dieux).

6. Vous qui coupez les poteaux ou qui les portez, vous qui attachez au poteau l’anneau du cheval, ou qui apportez sa nourriture, venez, nous avons besoin de vos soins.

7. Tels sont mes vœux : que ce (coursier), à la croupe flexible[843], vienne heureusement combler les espérances des dieux ! que les sages Richis l’accueillent avec joie ; pour le bonheur des Dévas, qu’il devienne leur ami[844] !

8. Quand on attache d’une courroie et ton pied et ta tête, ou quand on te met dans la bouche de l’herbe à manger, ô coursier, que tout cela soit d’un favorable augure parmi les Dévas !

9. Quand la mouche s’attache à tes chairs, ou quand le bois, la hache, les bras du victimaire et ses ongles sont humectés, ô coursier, que tout cela soit d’un favorable augure parmi les Dévas !

10. Quand l’oûvadhya, qui est l’odeur de la viande crue, sort du ventre de la (victime), que les ministres du sacrifice achèvent leur œuvre, qu’ils fassent cuire les chairs, et accomplissent le vritapâca[845] !

11. Ô victime, quand de ton ventre cuit au feu d’Agni, la broche vient à sortir, que rien ne tombe à terre, ni sur le gazon. Que tout soit donné aux Dévas qui l’attendent.

12. Si ceux qui voient le cheval cuit, disent : « Il sent bon, coupez-en un morceau ! » accueillez la demande de quiconque voudra de cette chair.

13. Cependant on a apporté les vases destinés à recevoir les chairs ou les sauces qui les arrosent, les marmites, les chaudrons, les plats, les instruments de cuisine, et on les place autour du cheval.

14. La manière dont tu marches, dont tu te couches, dont ton pied est attaché, ton port, la façon dont tu bois, dont tu manges, ô coursier, que tout cela soit d’un favorable augure parmi les Dévas !

15. Que le feu ne vienne pas, en frémissant, t’apporter une odeur de fumée ; que le vase (qui te reçoit) ne sente rien. Les Dévas agréent l’offrande du cheval quand elle est pure, parfaite, et accompagnée d’invocations.

16. Quand on étend sur le cheval une couverture toute d’or, quand on lui attache et la tête et le pied, ce sont là autant de choses qui doivent être de bon augure parmi les Dévas.

17. Quand dans ton écurie, tu hennis fortement, et qu’on te frappe avec le pied ou avec le fouet, ô coursier, je détruis toutes ces choses avec la prière, comme dans les sacrifices on épuise les libations avec la cuiller.

18. La hache tranche les trente-quatre côtes du rapide cheval, ami des Dévas. Laissez entières les autres parties, ô victimaire, que chaque membre soit convenablement paré !

19. Un seul homme doit frapper le brillant[846] cheval, deux autres doivent le retenir : telle est la règle. Les membres[847] que, suivant l’usage, je dois offrir en sacrifice, je les mets sur le plat des Pindas[848], et je les jette au foyer d’Agni.

20. (Ô coursier), quand tu vas (vers les dieux), ne te chagrine pas de ton sort. Que la hache ne s’appesantisse pas longtemps sur ton corps. Qu’un barbare et indigne victimaire n’aille pas, par ignorance, taillader tes membres avec le fer.

21. Ce n’est pas ainsi que tu dois mourir : la souffrance n’est pas faite pour toi. C’est par des voies heureuses que tu vas vers les dieux. Pour te porter, tu as les deux coursiers (d’Indra), les deux biches (des Marouts), et le char léger (des Aswins) traîné par un âne.

22. Que le cheval (sacrifié) nous procure de nombreuses vaches, de bons coursiers, des guerriers, des enfants, une abondante opulence. Toi qui es pur et sain, rends-nous (purs et sains) ; que le cheval, honoré par l’holocauste, nous donne la puissance.


HYMNE VI.

Au cheval du sacrifice[849], par Dîrghatamas.

(Mètre : Trichtoubh.)

1. À peine es-tu né, que tu fais entendre ta voix en sortant de la mer[850] (des libations), ou plutôt de la corruption (corporelle). Tes bras[851], (dieu) brillant, ressemblent aux ailes de l’épervier. Ô cheval, ta naissance est grande, et digne de nos louanges.

2. Yama[852] l’a remis à Trita[853], et celui-ci lui a donné un char. Sur ce char, Indra a monté le premier. Gandharva[854] a pris les rênes qu’il emprunte au Soleil. Les Vasous ont orné le cheval.

3. Ô cheval, tu es Yama, tu es Aditya, tu es Trita, par suite d’un mystérieux accord. À des moments marqués tu te trouves arrosé de soma : car on te reconnaît dans le ciel trois stations.

4. Oui, on te reconnaît trois stations dans le ciel, comme aussi tu en as trois dans les ondes (célestes), et trois dans l’océan de l’air[855]. Mais j’aime surtout, ô cheval, à te voir, ainsi que Varouna, revenir dans le lieu où tu nais[856].

5. Ô cheval, ce sont là tes relais ; c’est là que sont les impressions de tes pieds, ô bienfaiteur (du monde) ! C’est là que j’ai vu tes rênes[857] fortunées, que vénèrent les gardiens du feu sacré.

6. Je t’ai reconnu de loin : c’était bien toi-même volant vers nous du haut du ciel. J’ai vu une tête (divine) s’avancer rapidement par des routes faciles où la poussière est inconnue.

7. J’ai vu ici ta forme merveilleuse ; elle paraissait animée du désir de recueillir nos offrandes dans cette enceinte sanctifiée. Quand un mortel prépare pour toi les mets (du sacrifice), tu viens, (comme le coursier) affamé à l’herbe (qu’on lui présente).

8. Ô coursier (divin), après toi (arrivent) les mortels, et leurs chars, et leurs vaches, et le bonheur (que donnent) les jeunes filles. Tous les êtres recherchent ta faveur ; les dieux voudraient égaler ta force.

9. Sa crinière est d’or ; ses pieds, rapides comme la pensée. Indra (lui-même) est descendu, et les dieux sont réunis pour consommer l’holocauste de celui qui le premier a monté ce cheval[858].

10. Des coursiers[859] héroïques, divins, aux membres élancés, au ventre ramassé, tels que des cygnes qui volent en troupe, s’élancent à travers les routes de l’air.

11. Ô coursier, ton corps marche, mais ta pensée est rapide comme le vent. Les poils de ta crinière[860] s’étendent partout, et se jouent dans les branches de la forêt.

12. Le cheval est arrivé au lieu du sacrifice, l’air pensif, et l’âme soumise aux dieux. Devant lui est mené le bouc enchaîné à ses destins. Arrivent aussi les sages et les chantres.

13. Le cheval occupe la place principale, en face du père et de la mère (du sacrifice). Comblé d’honneurs, qu’il aille vers les dieux. Que son serviteur reçoive les biens les plus précieux.


HYMNE VII.

Aux Viswadévas, par Dîrghatamas.

(Mètres : Djagatî, Pankti et Anouchtoubh.)

1. Le (dieu) ici présent, notre fortuné patron, notre sacrificateur, a un frère[861] qui s’étend au milieu (de l’air). Il existe un troisième frère[862] que nous arrosons de nos libations de beurre. C’est lui que j’ai vu maître des hommes, et armé de sept rayons.

2. Sept[863] rênes servent à diriger un char qui n’a qu’une roue, et que traîne un seul cheval qui brille de sept rayons. La roue a trois moyeux[864], roue immortelle, infatigable, d’où dépendent tous ces mondes.

3. (Ou bien) ce char, qui a sept roues, est traîné par sept chevaux, et monté par sept personnages[865]. Sept sœurs[866] sont rassemblées (sur ce char), où sont placées aussi sept espèces de vaches (fécondes)[867].

4. Qui a vu, à sa naissance, (cet être) prendre un corps pour en donner à ce qui n’en a pas ? Où était l’esprit, le sang, l’âme de la terre ? Qui s’est approché de (ce dieu) sage, pour lui faire cette question ?

5. Faible, ignorant, je veux sonder ces mystères divins. Pour s’élever jusqu’à la connaissance de ce tendre nourrisson (qui enfantera l’année), les poëtes ont développé déjà les sept trames (de leurs chants)[868].

6. Ignorant et inhabile, pour arriver à la science j’interroge ici les poëtes savants. Quel est donc cet (être) incomparable qui, sous la forme de (l’astre) immortel, a fondé ces six mondes lumineux ?

7. Qu’il le dise, l’homme instruit dans le mystère du (dieu) fortuné qui traverse les airs ! Les vaches (célestes)[869] prennent le lait de celui dont la tête est si noble ; elles couvrent sa face, et avec leur pied elles tirent leur breuvage.

8. Au moment du sacrifice, la mère a d’abord, (avertie) par la prière, accueilli le père. Celui-ci, (conduit aussi par la prière), s’est uni à elle. Et la mère, dans l’orifice qu’elle porte, reçoit le germe du fruit qu’elle désire[870]. Cependant (les prêtres) poursuivent leurs adorations et leurs hymnes.

9. La mère a enfanté, et son fruit grandit au milieu des flots de la libation. Le (nourrisson, tel qu’un jeune) veau, a mugi après la vache[871] (du sacrifice). Dans les trois états[872] où il apparaît, il revêt diverses formes.

10. Toujours unique, quoique ayant trois mères et trois pères[873], il s’élève. Cependant (les prêtres) ne restent pas inactifs, et chargent le (dieu) resplendissant de leurs prières, qui sont riches en savoir, mais qui ne peuvent arriver partout[874].

11. La roue d’Agni, pourvue de douze rayons, tourne dans le ciel sans jamais s’arrêter. Ô Agni, sept cent vingt jumeaux[875] trouvent une place (sur le char).

12. On donne le nom de Pourichin[876] à leur père, quand il se trouve dans la partie méridionale du ciel ; et (ce père) y a cinq pieds[877] et douze formes[878]. Dans la partie septentrionale, il porte le nom Arpita[879], et sous une forme différente (il est porté sur son char), qui a sept roues[880] et six rayons[881].

13. La roue à cinq rayons[882] tourne donc avec tous les mondes. L’essieu, quoique chargé, n’est jamais fatigué ; le moyeu est parfaitement attaché, et doit durer sans connaître la vieillesse.

14. Garnie d’une jante immortelle, la roue tourne ; à l’extrémité du joug sont attelés dix porteurs[883]. L’œil du soleil s’avance, couvert de splendeur ; en lui s’élèvent tous les mondes.

15. Du dieu sont nés six couples de Richis. Une septième naissance leur a donné, dit-on, un frère unique[884]. Chacun a sa place distincte, d’où il dépense ses biens ; chacun a sa forme différemment brillante.

16. D’autres représentent comme de pieuses femmes ceux auxquels je donne un caractère masculin. L’homme qui a des yeux peut voir ce que ne comprendra pas l’aveugle. L’enfant qui est sage et qui pense sait bien faire cette distinction ; il est (dans ce cas) le père de son père[885].

17. La vache (du sacrifice) se lève, soutenant son nourrisson de son pied, qui tour à tour va de bas en haut, ou de haut en bas[886]. Agitée et remuante, tantôt elle sort en s’étendant d’une moitié, tantôt elle s’augmente et se gonfle intérieurement.

18. Celui qui connaît le père (du monde), avec ses (rayons) inférieurs, sait aussi connaître tout cet (univers) à l’aide des (rayons) supérieurs. Marchant sur les pas de nos poëtes, qui peut ici célébrer ce dieu ? D’où est née l’âme (du monde[887]) ?

19. Il est (des êtres), dit-on, qui viennent vers nous et s’en retournent, (des êtres) qui s’en retournent et qui reviennent. Indra, ô Soma, les (mondes) éthérés portent vos œuvres comme (un char) son fardeau.

20. Deux esprits jumeaux[888] et amis hantent le même arbre[889] ; l’un d’eux s’abstient de goûter (le fruit de cet arbre appelé) pippala, l’autre le trouve doux et le cueille.

21. Le seigneur[890], maître de l’univers et rempli de sagesse, est entré en moi, faible et ignorant, dans ce lieu où les esprits[891] obtiennent, avec la science, la jouissance paisible de ce fruit, doux comme l’ambroisie.

22. On appelle donc pippala le doux fruit de cet arbre sur lequel viennent les esprits qui en aiment la bonté, et où les (dieux) produisent toutes leurs merveilles. Ceci est un mystère pour celui qui ne connaît pas le père (du monde).

23. Que les (poëtes) observent et connaissent bien le sujet mystérieux et immortel qu’ils doivent traiter, soit dans leurs Gâyatrîs et leurs Trichtoubhs, soit dans leurs Djagatîs[892].

24. Avec la Gâyatrî se compose l’Arca[893] ; avec l’Arca, le Sâman[894] ; avec le Trichtoubh, le Vâca[895] ; avec le Vâca, l’(Anou) Vâca[896]. Les sept mesures poétiques se composent de l’Akchara, qui forme deux ou quatre Pâdas[897].

25. Avec la Djagatî, (le poëte) a consolidé l’océan céleste ; avec le Rathantara[898], il a suivi le soleil dans sa révolution. La Gâyatrî a, dit-on, les trois foyers[899] ; de là vient qu’elle l’emporte en force et en grandeur.

26. J’invoque donc cette vache féconde. Qu’elle donne son lait à celui qui doit le recueillir[900] ! Que Savitri obtienne la meilleure des libations ! que notre feu brille d’une nouvelle force ! que ma prière retentisse !

27. L’épouse des foyers (d’Agni), au milieu des prières, mugit après son nourrisson qu’elle recherche, et s’approche de lui[901]. Que cette vache donne son lait pour les Aswins ; qu’elle croisse pour notre plus grand bonheur !

28. La vache, en mugissant, vient vers son nourrisson, dont l’œil est à peine ouvert, et lui lèche la tête[902]. Elle étend sur lui sa langue chaude ; son mugissement se prolonge pendant qu’elle lui prodigue son lait.

29. Cependant le nourrisson fait aussi entendre sa voix ; il se couche sur sa nourrice, qui mugit toujours, étendue qu’elle est sur le pâturage. Et c’est ainsi que, par ses œuvres, (la vache du sacrifice) parvient à former (le dieu) mortel : elle se fait lumière, et lui donne un corps.

30. L’être actif reposait donc ; il revient à la vie, et s’établit au sein de nos demeures. Il était mort ; la vie lui est donnée par les libations. L’(être) immortel était dans le berceau de l’(être) mortel.

31. J’ai vu le gardien (du monde), suivant ses voies diverses, à son lever, dans sa station inaccessible, et à son coucher. Tantôt s’unissant aux rayons lumineux, tantôt les quittant, il va et revient dans les mondes intermédiaires.

32. L’homme agit, et, sans le savoir, n’agit que par ce (maître) ; sans le voir, il ne voit que par lui. Enveloppé dans le sein de sa mère et sujet à plusieurs naissances, il est au pouvoir du mal[903].

33. Le Ciel est mon père, il m’a engendré. J’ai pour famille tout cet entourage céleste. Ma mère, c’est la grande Terre. La partie la plus haute de sa surface[904], c’est sa matrice ; c’est là que le père féconde le sein de celle qui est son épouse et sa fille[905].

34. Je te demande où est le commencement de la terre, où est le centre du monde ; je te demande ce que c’est que la semence du coursier fécond ; je te demande quel est le premier patron de la parole (sainte).

35. Cette enceinte sacrée est le commencement de la terre ; ce sacrifice est le centre du monde. Ce soma est la semence du coursier fécond. Ce prêtre est le premier patron de la parole (sainte).

36. Déchirant le sein de leur mère, sept rejetons de Vichnou[906] se présentent, disposés à remplir le devoir qui leur est prescrit. Sages dans leurs pensées et dans leurs œuvres, ils nous entourent de tout côté.

37. Je ne sais à quoi ressemble ce monde. Je suis embarrassé, et vais comme enchaîné dans ma pensée. Quand le premier-né du sacrifice arrive vers moi, alors je prends ma part de la parole sainte.

38. Entraîné par le désir des offrandes, de l’orient il passe au midi. L’(être) immortel est dans le berceau de l’(être) mortel. Les deux (esprits) éternels vont et viennent partout : seulement les (hommes) connaissent l’un sans connaître l’autre.

39. Ces stances portent en tête un titre qui annonce qu’elles sont consacrées aux Viswadévas. Celui qui ne connaît pas l’être (que je chante), ne comprendra rien à mon hymne. Ceux qui le connaissent ne sont pas étrangers à cette réunion.

40. Ô (vache)[907] respectable, nourrie d’une herbe grasse, sois heureuse, et rends-nous heureux ! Goûte la douceur d’un bon pâturage, et, dans ta course, bois d’une onde pure.

41. La vache, en mugissant, attire les ondes (de la libation) ; elle se montre sur un pied, sur deux, sur quatre, sur huit, sur neuf. Elle peut avoir telle forme, qu’elle offrira jusqu’à mille mamelles[908].

42. Par elle coulent les ondes (célestes) ; par elle vivent les quatre régions du ciel ; par elle s’ouvrent d’intarissables sources ; par elle tout ce monde existe.

43. Mais je viens d’apercevoir une épaisse fumée, sortant de la partie inférieure du foyer. On a répandu sur le feu le brillant soma. C’étaient là les premiers devoirs à remplir.

44. Nos yeux distinguent trois (feux) à la belle chevelure. L’un, dans l’astre qui roule au ciel, échauffe (la terre) ; l’autre préside aux sacrifices. Du troisième nous ne voyons que la voie, et non la forme[909].

45. Les enfants de prêtres[910], qui sont instruits, connaissent les quatre sujets qu’embrasse la parole (sainte). Les hommes ne distinguent pas trois (de ces sujets mystérieux) mêlés à ce monde ténébreux[911]. Ils donnent au quatrième le nom de tourîya[912].

46. L’esprit divin qui circule au ciel, on l’appelle Indra, Mitra, Varouna, Agni. Les sages donnent à l’être unique plus d’un nom : c’est Agni, Yama, Mâtariswan.

47. Mais les chevaux ailés[913] l’emportent sur le char noir (de la nuit) et les vapeurs qui couvrent le ciel. Ils sortent de la demeure d’Agni, et la terre est aussitôt arrosée d’un beurre (abondant).

48. Qui dira ce que c’est que les douze rayons, la roue unique, les trois moyeux ? Sur cette espèce de char sont élevés à la fois trois cent soixante écuyers[914] qui sont en quelque sorte immobiles dans leur mobilité.

49. Ô Saraswatî, tu viens de nous ouvrir ton sein fortuné qui renferme tant de choses précieuses, qui contient tant de biens, de trésors, et de présents magnifiques,

50. Que les Dévas (mortels) ajoutent sacrifices sur sacrifices : tels sont leurs premiers devoirs. Par ces œuvres généreuses ils obtiennent le ciel, où sont les anciens Dévas, les Sâdhyas[915].

51. L’onde (céleste) descend égale à l’onde (de nos libations). Si les nuages réjouissent la terre, c’est que les feux (d’Agni) ont réjoui le ciel.

52. J’appelle à notre secours le divin et grand habitant de l’air, celui qui produit et les eaux et les plantes, l’illustre maître des ondes, qui dispense la pluie au moment convenable.


HYMNE VIII.

Aux Marouts, par Agastya.

(Mètre : Trichtoubh.)

1. Quel éclat ces Marouts qui parcourent, qui habitent ensemble (les espaces de l’air), répandent par tout (le monde) ! Que veulent-ils ? d’où viennent-ils, généreux et riches, chercher les offrandes ?

2. Quel est celui qui, par ses hommages, plaît à ces (divinités) ? qui, par son sacrifice, attire les Marouts ? Par quelle prière parviendrons-nous à retenir ces (dieux), qui, comme des éperviers, parcourent les airs ?

3. (Les Marouts parlent.) « Indra, maître des hommes pieux, d’où viens-tu, grand et unique ? Que veux-tu ? Toi qui es notre compagnon, tu peux nous répondre avec bonté. Ô dieu, traîné par des coursiers azurés, dis-nous ce que tu nous veux. »

4. (Indra parle.) « Les cérémonies, les prières, les hymnes, les libations, les offrandes, tout est à moi. Je porte la foudre. Des invocations, des chants se sont fait entendre. Mes chevaux m’amènent. Voilà ce que je veux ici. »

5. (Les Marouts parlent.) « Et nous, sur les puissants coursiers que voici, plaçant nos corps légers et brillants, nous joignons nos splendeurs aux tiennes. Et tu veux, Indra, t’approprier notre offrande ? »

6. (Indra parle.) « Et comment cette offrande serait-elle pour vous, ô Marouts, quand vous reconnaissez ma supériorité en réclamant mon secours pour la mort d’Ahi ? Je suis grand, fort et redoutable, et de mes traits, funestes à tous mes ennemis, j’ai tué Ahi. »

7. (Les Marouts parlent.) « Tu as beaucoup fait, (dieu) généreux, en venant nous seconder de la force héroïque. Mais, ô puissant Indra, nous pouvons aussi beaucoup, quand, nous autres Marouts, nous voulons prouver notre vaillance. »

8. (Indra parle.) « Marouts, j’ai tué Vritra, et je n’ai eu besoin que de ma colère et de ma force d’Indra. C’est moi qui, la foudre à la main, ai ouvert un chemin à ces ondes qui font le bonheur de Manou[916]. »

9. (Les Marouts parlent.) « Maghavan, nous n’attaquons pas ta gloire. Personne, ô dieu, quand on connaît tes exploits, ne peut se croire ton égal. Aucun être, présent ou passé, ne saurait te valoir. Tu es grand : fais ce que tu dois faire. »

10. (Indra parle.) « Ma force est assez grande pour que, seul, je puisse exécuter ce que je veux tenter. Je suis redoutable, ô Marouts ; je sais ce que j’ai à faire, moi Indra, maître de vous tous.

11. « Ô Marouts, l’éloge que vous avez fait de moi m’a flatté, et surtout votre attention à me laisser votre part du sacrifice. Indra est généreux, et fêté par de nombreux hommages. Soyez mes amis et développez vos corps (légers).

12. « Ainsi brillant à mes côtés, prenez dans les offrandes et dans les hymnes la part conforme à votre rang. Marouts, vos couleurs sont merveilleuses. Resplendissons ensemble, et couvrez-moi (de vos corps) comme vous l’avez fait jusqu’à présent. »

13. (Le poëte parle.) « Quel est celui qui vous chante en ce moment, ô Marouts ? Soyez-nous agréables, et venez vers des amis. D’un souffle propice favorisez nos vœux. Possesseurs de biens variés, daignez visiter notre sacrifice.

14. « Si la science d’un sage nous a, comme un artiste habile, façonnés au culte pompeux que nous vous rendons, ô Marouts, traitez avec bonté l’homme qui, par ses prières et ses chants, vous a honorés.

15. « Ô Marouts, cet éloge et cet hymne d’un respectable poëte s’adressent à vous. Il a voulu vous plaire. Venez avec l’abondance, en étendant vos réseaux. Que nous connaissions la prospérité, la force et l’heureuse vieillesse ! »




LECTURE QUATRIÈME.

HYMNE I.

Aux Marouts, par Agastya.

(Mètre : Trichtoubh.)

1. Le généreux (Agni) a donné le signal ; chantons l’hymne du matin en l’honneur d’une race impétueuse. Ô puissants et rapides Marouts, que la marche accroisse votre éclat ; que l’élan du combat augmente vos forces !

2. Acceptant la douce libation sans cesse renouvelée, comme (un père adopte) un nouveau-né, ils se livrent à leurs jeux au milieu des sacrifices, terribles (pour leurs ennemis). Ces enfants de Roudra viennent protéger celui qui les honore ; et, forts de leur nature, ils se gardent de fouler aux pieds celui qui a pour eux des holocaustes.

3. À l’homme qui leur offre des sacrifices, ces immortels auxiliaires donnent la richesse et le bonheur. Ces fortunés Marouts, comme disposés (dans les airs), répandent sur lui et la lumière et le lait.

4. Votre course est libre et puissante, et votre force sert d’appui aux mondes. Tout, dans la nature, est frappé d’épouvante ; les palais (mêmes sont ébranlés). Votre char brille de la lueur de vos armes étincelantes.

5. Quand, montés sur leurs chars éclatants, ils font résonner les montagnes, ou bien qu’amis des hommes, ils envahissent les airs, chacun frémit sur leur route. Le feu, placé sur le foyer comme sur un char, délaisse les plantes (qui l’alimentent).

6. Terribles Marouts, soyez bons et bienfaisants pour nous, et comblez nos vœux. Dès que votre trait lumineux et meurtrier pénètre quelque part, il tue les animaux comme une flèche bien lancée.

7. Chargés de présents et de biens, heureux de nos louanges et de nos sacrifices, ils arrivent à la voix de l’hymne pour goûter la libation : ils connaissent les antiques exploits du héros (Indra, et ils veulent l’imiter).

8. Avec vos cent bras, protégez contre le mal et contre la défaite cette nation que vous avez déjà défendue, ô Marouts ! Terribles, forts et resplendissants, préservez sa gloire du blâme que pourraient lui infliger ses enfants.

9. Ô Marouts, tous les biens, tous les trésors désirables sont placés sur vos chars. Vos bras infatigables sont chargés d’ornements. L’essieu de vos chars ploie sur les roues.

10. De riches présents reposent sur vos bras généreux ; sur votre poitrine pendent de beaux colliers d’or, sur vos épaules des guirlandes. Comme l’oiseau ouvre ses ailes, le tranchant de la foudre ouvre et répand le dépôt de vos richesses.

11. Grands et puissants par votre grandeur, maîtres resplendissant au loin, tels que des astres attachés au ciel, élevant le ton de votre voix, ô Marouts, vous êtes heureux de mouiller vos langues à nos libations ; et, unis à Indra, vous recevez partout nos louanges.

12. Telle est votre grandeur, ô généreux Marouts ! Que vos dons soient durables comme l’œuvre d’Aditi ! Indra peut bien faire descendre ses largesses sur la nation pieuse que vous favorisez.

13. Immortels Marouts, vous avez conservé l’antique alliance qui fut tant célébrée. Pour le bonheur de Manou, les prêtres, par leurs prières et leurs œuvres, se sont jadis associés à vous[917].

14. Ô Marouts, venez rapidement avec vos biens confirmer pour longtemps nos espérances. Et quand ces gens ont dans leur demeure préparé des offrandes, que, par ces sacrifices, j’obtienne ce qu’ils ont désiré.

15. Ô Marouts, cet éloge et cet hymne d’un respectable poëte s’adressent à vous. Il a voulu vous plaire. Venez avec l’abondance, en étendant vos réseaux. Que nous connaissions la prospérité, la force et l’heureuse vieillesse !


HYMNE II.

À Indra et aux Marouts, par Agastya.

(Mètre : Trichtoubh.)

1. Ô Indra, que traînent des coursiers azurés, tu as des trésors de force et d’abondance mille fois célébrés, des trésors de richesse et de fécondité : qu’ils viennent à nous pour notre bonheur !

2. Que les Marouts accourent aussi vers nous avec leurs plus belles formes, couvrant le ciel de leur large et mouvante magie ; et que leurs coursiers apportent les richesses qu’ils ont amassées au bord de la mer.

3. À ces nuages se mêle la lueur dorée de l’éclair, pareille à un glaive acéré ; avide de cette substance qui engraisse (la terre), elle la pénètre et s’unit à elle, comme la femme qui recherche la société de son époux, comme la parole (sainte) qui se joint à la pompe du sacrifice.

4. Les brillants Marouts, par une espèce d’union conjugale avec la Nue, lui font porter l’onde dont ils arrosent le (monde). Ces dieux terribles ont l’air de séparer le ciel et la terre ; mais ils sont leurs amis et augmentent leur beauté.

5. Ainsi animée dans leurs embrassements de leur souffle vital, que la Nue fasse notre joie, pénétrée des généreux (Marouts) ! Qu’elle aille, les cheveux épars, sur le char, comme la fille du soleil sur celui de son père, et que son corps soit aussi resplendissant que le ciel lui-même !

6. Que ces jeunes (époux) fassent prendre place dans nos sacrifices à leur jeune (épouse), forte et empreinte de leur éclat ; dans le moment même où l’hymne entonne, ô Marouts, votre éloge accompagné de libations et d’holocaustes.

7. Je chante la grandeur réelle des Marouts ; elle est vraiment digne de nos louanges, quand la (Nue) féconde, ou d’elle-même ou forcément, nous apporte ses germes précieux.

8. On ne peut accuser Mitra et Varouna de faiblesse. Aryaman donne la mort aux impies. Si nous voyons aussi tomber ce qui était ferme et inébranlable, ô Marouts, c’est votre tourbillon qui grossit.

9. Ô Marouts, de loin ou de près, votre force est pour nous infatigable. Comme la mer, elle croît et grandit, et remporte sur ses ennemis une victoire incontestée.

10. Puissions-nous aujourd’hui nous dire les amis d’Indra ! Puissions-nous demain, comme nous l’avons fait jadis, l’appeler à notre secours ! Que (ce dieu appelé) Ribhoukchas[918] nous accorde chaque jour sa protection ; qu’il soit avec ses serviteurs !

11. Ô Marouts, cet éloge et cet hymne d’un respectable poëte s’adressent à vous. Il a voulu vous plaire. Venez avec l’abondance, en étendant vos réseaux. Que nous connaissions la prospérité, la force et l’heureuse vieillesse !


HYMNE III.

Aux Marouts, par Agastya.

(Mètres : Djagatî et Trichtoubh.)

1. Vous accourez d’une ardeur égale à tous les sacrifices. Amis des Dévas, vous accueillez les prières qu’ils vous adressent successivement. Venez pour le bien de la terre et du ciel ; par des chants harmonieux je vous appelle à notre secours.

2. Les Marouts naissent d’eux-mêmes, et se donnent une forme : impétueux et forts, ils produisent (pour nous) l’abondance et la prospérité. Ils se multiplient comme les flots des ondes (célestes) ; et si elles sont des vaches fécondes, ils en sont les taureaux.

3. Tels que les libations aux rayons joyeux, et si douces au cœur, tels que les rites (sacrés), ils apparaissent (pour notre joie). Les bracelets résonnent comme en se jouant sur leurs membres, et dans leurs mains brille le glaive.

4. Ces immortels, unissant leurs efforts, descendent rapidement du ciel. Leur fouet a retenti de lui-même. Les Marouts ont fait briller leurs armes, et, robustes combattants, ils ont ébranlé les plus forts obstacles.

5. Ô Marouts qui pour lance avez l’éclair, qui donc, au milieu (des airs), vous détache, de même que la langue sépare les deux mâchoires ? Vous arrivez du ciel comme pour nous apporter notre nourriture, aussi fidèlement empressés que le cheval chargé chaque jour (de nos provisions).

6. Que devient, ô Marouts, ce grand monde supérieur ? que (devient) cette terre où vous descendez, quand vous agitez tout comme des brins d’herbe, et qu’avec la foudre vous envahissez l’océan de lumière ?

7. Ô Marouts, votre libéralité, qui s’épuise en largesses, est pleine de force, d’éclat et de splendeur. C’est pour nous un fruit heureusement mûr. Elle met (nos maux) en poussière. Belle comme la sainte donation, elle est sûre d’être partout victorieuse ; elle est féconde, et pleine de votre esprit vital.

8. Les mers s’arrêtent étonnées, quand, au bruit de la foudre, (les Marouts) mêlent leur voix de tempête. L’éclair sourit de les voir arroser la terre du beurre des (nuages).

9. C’est Prisni[919] qui a enfanté pour le grand combat l’armée brillante des rapides Marouts. Ils engendrent la Nue, dont ils prennent la forme, et cherchent de tout côté l’offrande qu’ils désirent, (et que leur doit la piété).

10. Ô Marouts, cet éloge et cet hymne d’un respectable poëte s’adressent à vous. Il a voulu vous plaire. Venez avec l’abondance, en étendant vos réseaux. Que nous connaissions la prospérité, la force et l’heureuse vieillesse !


HYMNE IV.

À Indra, par Agastya.

(Mètre : Trichtoubh.)

1. Indra, s’il est vrai que tu couvres (les hommes) ici présents d’une protection aussi grande que tu es grand toi-même, (dieu) prudent, accorde-nous, dans ta sagesse, les biens des Marouts, (ces biens) que tu estimes.

2. Qu’ils secondent ton œuvre universelle, ô Indra, (ces dieux) qui connaissent et poursuivent l’intérêt des mortels, cette terre riante des Marouts, qui nous livrent les dépouilles heureuses de leurs combats.

3. Indra, tu as lancé ton trait, et aussitôt les Marouts nous ont jeté l’onde. Cependant Agni, brillant sur son foyer, embrasse les offrandes, comme les eaux embrassent une île.

4. Indra, donne-nous ces richesses ; qu’elles soient un présent de ta puissante munificence. (Dieu) rapide (comme le vent), jouis des louanges qu’on t’adresse et des offrandes (qu’on te présente), de même que l’estomac (se plaît) au miel (qu’on lui donne).

5. En toi, Indra, (se trouvent) les biens les plus désirables, et dignes de plaire à l’homme pieux. Qu’ils nous favorisent aussi, ces dieux Marouts qui semblent aimer le mouvement !

6. Viens, Indra, et amène près de ce foyer de terre ces nobles héros qui nous envoient la pluie surtout quand ces (grandes masses) aux larges bases sont, en quelque sorte, leurs trophées arrachés à l’ennemi sur le champ de bataille.

7. Il approche, on l’entend, le bruit de ces terribles et rapides Marouts, qui viennent par leurs clameurs, au milieu du combat, ranimer un mortel, comme on ranime un débiteur par la remise de sa dette.

8. Avec ta sagesse ordinaire, Indra, et pour le bien de tous, frappe avec les Marouts ces vaches (célestes) qui refusent de donner leur lait. Ô dieu, tu es célébré par les louanges des Dévas. Que nous connaissions la prospérité, la force et l’heureuse vieillesse !


HYMNE V.

À Indra, par Agastya.

(Mètres : Vrihatî et Anouchtoub.)

1. Personne parmi nous ne connaît (aujourd’hui), personne ne connaîtra demain tout ce qu’il y a d’admirable (en ce dieu). Ce que l’on peut dire ou penser d’un autre, se trouve surpassé (par ses exploits).

2. (Agastya parle.) « Indra, pourquoi veux-tu nous détruire ? Les Marouts sont tes frères ; apaise-les par ta sagesse ; ne nous rends pas victimes de leur attaque. »

3. (Indra parle.) « Agastya, mon frère[920] et mon ami, de quoi nous accuses-tu ? Nous connaissons tes intentions. Tu n’as pas l’envie de nous faire des offrandes. »

4. (Agastya reprend.) « Que l’on établisse promptement la place de l’holocauste ; que l’on allume le feu. (Maître et maîtresse de maison), préparez le sacrifice qui fait couler l’ambroisie.

5. « Maître des Vasous, tu commandes aux Vasous ; maître des Mitras, tu soutiens les Mitras. Indra, entends-toi avec les Marouts, et viens, suivant l’usage, goûter nos holocaustes. »


HYMNE VI.

Aux Marouts, par Agastya.

(Mètre : Trichtoubh.)

1. Je viens vers vous avec une invocation. (Dieux) rapides, mon hymne sollicite votre bienveillance ; qu’une (offrande) agréable, qu’une (louange) flatteuse apaise votre colère, ô Marouts ! Donnez l’essor à vos coursiers.

2. Divins Marouts, accueillez cet hymne que le cœur a préparé et que notre respect vous adresse. Accourez ; soyez touchés de notre hommage, et accordez-nous le prix qu’il mérite.

3. Que les Marouts, loués par nous, nous prodiguent leurs présents ; que Maghavan, sensible à nos louanges, nous donne le bonheur. Ô Marouts, que tous les jours soient pour nous pleins d’honneur, de plaisir, de prospérité et d’envie !

4. Ô Marouts, je suis suppliant et tremblant dans la crainte que nous inspire le puissant Indra. Ces holocaustes ont été préparés pour vous. Nous nous sommes hâtés de vous honorer ; donnez-nous le bonheur.

5. Avec cette même force qui anime, au lever des éternelles (Aurores), les vénérables vaches[921] (du ciel), que (le dieu) bienfaisant et fort, que le terrible maître de la puissance, avec les terribles Marouts, nous envoie l’abondance !

6. Ô Indra, gouverne ces êtres puissants ! sois avec les Marouts bon et clément ! (Dieu) vainqueur, sois libéral envers ceux qui ont largement pourvu (à ton sacrifice) ! Que nous connaissions la prospérité, la force et l’heureuse vieillesse !


HYMNE VII.

Aux Marouts, par Agastya.

(Mètre : Gâyatrî.)

1. Que votre arrivée nous apporte l’abondance et la force, ô Marouts bienfaisants, qui brillez dans la nue !

2. Ô bienfaisants Marouts, vous prenez votre arme étincelante ; et aussitôt vous nous envoyez l’eau du nuage.

3. (Dieux) bienfaisants, anéantissez les gens de Trinascanda[922], et ranimez-nous à la vie !


HYMNE VIII.

À Indra, par Agastya.

(Mètre : Trichtoubh.)

1. Que l’hymne soit chanté en l’honneur du voyageur céleste. Honorons cette (forme visible du dieu), qui grandit et apporte le bonheur. Les vaches (lumineuses) et immortelles, qui siégent sur le gazon sacré, viennent de couvrir la demeure éthérée.

2. Entouré d’abondantes libations, accompagnant ses dons d’invocations (pieuses), empressé dans son œuvre comme le cerf altéré, le mortel entonne l’hymne, et présente l’holocauste, heureux de joindre à sa prière deux espèces d’offrandes[923].

3. Le sacrificateur est arrivé dans l’enceinte (sacrée), faisant le tour des offrandes préparées. Il vient avec les libations[924], et le vase de terre qui contient le germe du feu. Cependant le cheval qui porte les (offrandes) a henni[925]. La voix de la vache[926] (du sacrifice) s’est élevée, comme un messager, entre le ciel et la terre.

4. Pleins de respect pour les dieux, les (mortels) ont fait ces brillants et nombreux préparatifs en l’honneur d’Indra. Que ce (dieu) aux rayons resplendissants, à la marche rapide, au char magnifique, tel que les Aswins, daigne nous favoriser !

5. Célèbre donc par tes louanges cet Indra, plein de grandeur, cet héroïque Maghavan, qui, porté sur son char, attaque et combat avec courage, et, vainqueur généreux, triomphe des ténèbres et de l’obscurité !

6. Quand, avec grandeur, il apparaît ainsi aux yeux des hommes, le ciel et la terre paraissent lui servir de ceinture. (Le dieu), charmé de nos offrandes, pénètre comme dans un vaste palais, où le Ciel semble le suivre et l’accompagner.

7. Vois, Indra, ces hommes saisis du même transport que le père de famille, t’entourant de leurs hommages et t’honorant par leurs offrandes, toi, héroïque combattant, soutien des bons et guide merveilleux.

8. Quand ils aiment à s’enivrer (pieusement) de ces ondes divines que renferme le vase des libations, c’est qu’ils pensent que ces boissons font ta joie. Toutes les voix de la prière s’accordent pour te louer. Tu daignes dans ta (bienveillante) pensée, embrasser les mortels qui t’offrent ces présents.

9. Puissions-nous gagner l’amitié d’Indra, et mériter sa protection par les louanges de nos poëtes ! Puisse Indra, honoré par nous, s’empresser d’accueillir nos chants et nos sacrifices !

10. Qu’une rivalité s’établisse entre nos poëtes pour le chanter. Ayons pour ami Indra, dont la main porte la foudre. Fiers de cette amitié, (les hommes), ici, au milieu des sacrifices, t’honorent comme un prince dont on aime l’empire.

11. Quelle que soit son imperfection, notre sacrifice doit toucher Indra, notre prière doit arriver jusqu’à lui. Qu’elle soit (pour ce dieu) ce qu’est pour un homme altéré le voisinage d’un lac, ce qu’est pour le pèlerin le terme de son long voyage.

12. Nous n’avons garde, ô puissant Indra, d’oublier ici, dans les sacrifices que nous t’offrons, les dieux (Marouts, qui te secondent) dans les combats. La voix (de la prière) célèbre ces Marouts unis au grand (dieu) qui nous prodigue ses biens, et qui reçoit nos holocaustes.

13. Ô Indra, c’est pour toi que nous avons composé cet hymne. Dieu porté sur des coursiers azurés, que notre piété t’engage à nous visiter ! Prends en main nos intérêts. Que nous connaissions la prospérité, la force et l’heureuse vieillesse !


HYMNE IX.

À Indra, par Agastya.

(Mètre : Trichtoubh.)

1. Roi des dieux, Indra, protège les hommes ! (Dieu) qui donnes la vie[927] conserve-nous. Maître des hommes pieux, et magnifique en présents, tu nous sauves. Tu es juste, puissant et protecteur.

2. Tu as vaincu ces tribus bruyantes et belliqueuses, dont les sept[928] villes élevées en automne ont été heureusement détruites par toi, ô Indra ! (Dieu) irréprochable, tu as frappé les ondes mouvantes. En faveur du jeune Pouroucoutsa[929] tu as donné la mort à Vritra.

3. (Ô Dieu) si souvent invoqué, viens au ciel, entouré de ces Nues que la victoire a rendues tes épouses. Tel qu’un lion, protège dans son foyer l’impétueux Agni, dévorant (l’holocauste) et accomplissant les œuvres (saintes).

4. Pour ta gloire et au bruit de ta foudre puissante, ô Indra, que ces (ennemis) périssent dans le sein même qui les a conçus[930] ! Que (le dieu) précipite les ondes, après s’être soumis par le combat les vaches (célestes) ; et que, porté sur ses coursiers azurés, il fasse sur nous pleuvoir l’abondance !

5. Si Coutsa[931] est ton favori, conduis vers lui tes coursiers fortunés, qui ont la vitesse du vent. Que dans le combat il prenne une roue du soleil, et que son bras armé de la foudre triomphe de ses ennemis.

6. Indra, tu donnes la mort aux adversaires de tes amis. Exalté par nos hymnes, (ô dieu) traîné par des coursiers azurés, (tu frappes) les impies. Ceux qui pensent (au pouvoir) d’Aryaman[932] reçoivent de toi la vie, et l’avantage d’une heureuse lignée.

7. Le poëte, ô Indra, a chanté pour célébrer tes louanges, et tu as fait de la terre un lit pour le lâche (Asoura). Maghavan a rempli de ses dons les trois (mondes) ; en faveur de Douryona, il a, dans le combat, frappé Couyavâtch[933].

8. Ces offrandes sont pour toi, Indra : ces libations nouvelles sont pour entretenir ta force et ta puissance[934]. En brisant en morceaux les villes (célestes) des impies, tu as détruit l’arme du méchant.

9. (Dieu) plein de mouvement, tu as donné le mouvement aux ondes, et elles ont coulé comme des torrents. Héros (divin), fais passer heureusement à Tourvasa et à Yadou[935] cette mer que tu as remplie.

10. Pasteur des hommes, sois toujours bon et indulgent pour nous. Donne-nous le pouvoir de dompter tous nos ennemis. Que nous connaissions la prospérité, la force et l’heureuse vieillesse !


HYMNE X.

À Indra, par Agastya.

(Mètres : Anouchtoubh et Trichtoubh.)

1. Enivre-toi, (héros) porté sur des coursiers azurés ! Pour toi a été versée cette boisson enchanteresse, digne d’être bue par un (dieu) tel que toi. Pour toi, maître de l’abondance, cette abondante liqueur qu’accompagnent des biens et des présents infinis !

2. Indra, reçois de nous cette boisson enchanteresse, abondante, généreuse, puissante, riche en trésors, victorieuse, immortelle.

3. Héros et bienfaiteur, favorise le vœu d’un mortel. Dans ta puissance brûle l’impie Dasyou, comme le feu brûle le vase qui le contient.

4. Seigneur rempli de sagesse, lance avec force la roue du Soleil ; et sur les chevaux du Vent amène Coutsa pour donner la mort à Souchna.

5. Ces boissons qu’on te présente sont fortifiantes ; toutes ces offrandes sont magnifiques. (Dieu) libéral en chevaux, jouis de nos présents ; qu’ils t’encouragent à tuer Vritra, et nous attirent tes faveurs.

6. Indra, tu as fait le bonheur de tes chantres anciens ; tu as été pour eux ce que l’eau est pour l’homme altéré. Je t’offre cette prière. Que nous connaissions la prospérité, la force et l’heureuse vieillesse !


HYMNE XI.

À Indra, par Agastya.

(Mètres : Anouchtoubh et Trichtoubh.)

1. Généreuse boisson, enivre Indra, pour que notre vœu se trouve exaucé : pénètre-le. Tu arrives, menaçante pour l’ennemi qui a disparu devant toi.

2. Comble de louanges cet (Indra), qui est incomparable parmi les sages. Tel que le (laboureur) tirant l’orge (de ses sillons), il amène à sa suite l’abondance.

3. Tout est dans ses mains ; il est le trésor des cinq espèces d’êtres[936]. Arrête notre ennemi ; sois comme la foudre qui frappe les choses célestes.

4. Détruis l’homme qui s’abstient de faire des libations, de même que le méchant (Asoura) qui ose t’attaquer ! Donne-nous le bien de cet (Asoura) : tel est l’espoir du père de famille.

5. Compagne des hymnes chantés en l’honneur de cet Indra qui habite et le ciel et l’air, (heureuse) boisson, sauve dans les combats celui qui présente ces offrandes !

6. Indra, tu as fait le bonheur de tes chantres anciens ; tu as été pour eux ce que l’eau est pour l’homme altéré. Je t’offre cette prière. Que nous connaissions la prospérité, la force et l’heureuse vieillesse !


HYMNE XII.

À Indra, par Agastya.

(Mètre : Trichtoubh.)

1. (Qu’il vienne) cet Indra partout adoré, cet ami des hommes, ce bienfaiteur des nations, ce roi du peuple. Charmé de nos louanges et de nos offrandes, viens avec puissance auprès de moi ; attelle tes généreux coursiers.

2. Monte donc, Indra, sur ces coursiers attachés au sacrifice, nobles (coursiers) qui répandent la richesse, et traînent un char chargé de trésors. Viens vers nous avec eux. Nous t’invoquons, Indra, en faisant des libations de soma.

3. Monte sur ton char, source pour nous de prospérité : un abondant soma est versé en ton honneur, de douces offrandes sont présentées. Bienfaiteur de la terre, attelle tes généreux coursiers, et viens rapidement auprès de moi.

4. Vois, Indra, ce sacrifice préparé pour les dieux, cette réunion, ces chants, ce soma. Ô Sacra, viens t’asseoir sur ce gazon qui jonche la terre, et bois (de nos liqueurs). Amène ici tes chevaux azurés.

5. Content de nos louanges, accours ici, ô Indra ! (écoute) les chants de notre respectable poëte. Pour prix de nos hymnes, puissions-nous obtenir secours et sécurité ! Que nous connaissions la prospérité, la force et l’heureuse vieillesse !


HYMNE XIII.

À Indra, par Agastya.

(Mètre : Trichtoubh.)

1. Ô Indra, si cet hymne arrive jusqu’à toi, accorde ton secours à ceux qui te chantent. Ne trompe pas les vœux des (serviteurs) qui t’exaltent. Que j’obtienne de toi tout ce que peut souhaiter un homme !

2. Certainement le royal Indra ne saurait laisser inutiles ces sacrifices qu’avec tant de dévouement vous lui offrez sur ce foyer. Des libations fortifiantes ont coulé pour lui. Indra viendra, fidèle à notre amitié, et (avec lui) ses compagnons ailés.

3. Qu’Indra accompagné des Marouts, que ce héros vainqueur dans les combats écoute l’invocation du poëte qui le supplie. Qu’il pousse son char près de son serviteur ; qu’il vienne avec empressement recueillir ses prières.

4. Qu’ainsi, goûtant avec les Marouts de nos offrandes qu’il aime et qu’il désire, Indra triomphe de nos ennemis. Dans un pieux accord unissant toutes les voix, l’hymne du sacrificateur, au sein de cette assemblée, vous recommande ces offrandes.

5. Ô magnifique Indra, puissions-nous, aidés de toi, vaincre de superbes ennemis ! Tu es notre sauveur ; augmente notre fortune. Que nous connaissions la prospérité, la gloire et l’heureuse vieillesse !


HYMNE XIV.

Lopâmoudrâ et Agastya, par Agastya.

(Mètres : Trichtoubh et Vrihatî.)

1. (Lopâmoudrâ[937] parle.) « Les soins qu’exigent les libations[938] m’ont longtemps occupée ; les nuits, les aurores se sont succédé pour moi dans la fatigue. Le travail mine la beauté. Qu’en ce moment les maris se réunissent à leurs épouses.

2. « Les anciens, accomplissant les rites sacrés, conversaient avec les dieux. Leur vigueur se consumait, mais elle ne s’éteignait pas. Qu’en ce moment les épouses se réunissent à leurs maris. »

3. (Agastya parle.) « Mes fatigues ne sont pas vaines ; et si les dieux me gardent, nous pouvons promptement surmonter nos ennemis. Oui, nous pouvons vaincre même des centaines d’adversaires, si nous savons bien réunir ensemble les épouses et leurs maris.

4. « Cependant, que le désir exprimé par la voix d’une amie ne naisse pas ainsi témérairement. Lopâmoudrâ est imprudente, et elle engage vivement un mari prudent. Il est essoufflé, et elle l’épuise.

5. « Buvez promptement de ce soma ; buvez-en de tout votre cœur, je vous en prie. Si ce soma est arrivé, c’est à nous que vous le devez. Qu’ainsi vous plaise un mortel dont les désirs sont pressants ! »

6. (Le poëte parle.) « Agastya, qui demandait de la fortune, de la famille, de la puissance, fut comme le laboureur qui cultive son champ avec soin. Le terrible Richi pratiqua l’une et l’autre méthode[939], et parmi les Dévas il obtint d’heureuses bénédictions. »


HYMNE XV.

Aux Aswins, par Agastya.

(Mètre : Trichtoubh.)

1. Vos chevaux parcourent les mondes ; votre char se promène à travers les airs. Vos roues sont surchargées (de biens) ; et lorsque vous venez boire le soma, vous vous unissez aux Aurores.

2. Quand vous arrivez pour remplir votre office utile aux humains, (office) respectable où votre coursier rapide suit deux carières différentes ; quand votre (sœur)[940] se présente à la prière de tous, (le sacrificateur) vous invoque, vous qui aimez la douceur (des libations), et il vous appelle à partager ses offrandes.

3. Vous avez à une vache stérile rendu le lait, tel qu’elle le donnait auparavant[941], tandis que, retiré au sein de son bûcher, comme le voleur (au sein d’une caverne), le pur (Agni) recevait les holocaustes offerts en votre honneur, (dieux) aux belles formes.

4. En faveur d’Atri[942] vous avez fait le feu aussi doux que le miel, aussi froid que l’eau. Nobles Aswins, c’est pour vous ces offrandes de toute espèce, et ces douces libations qui semblent aller vers vous avec la rapidité d’un char.

5. (Dieux) secourables, je vous adresse cet hymne, et vous invite à recevoir mes présents, comme le faisait le malheureux fils de Tougra[943]. (Dieux) adorables, par le fait de votre grandeur le vieillard faible (est délivré) du mal ; il embrasse, avec vous, la terre et les eaux.

6. (Dieux) bienfaisants, quand vous attelez vos coursiers, vous accordez l’abondance à notre prière. Tel qu’un souffle agréable, que le père de famille pénètre jusqu’à vous ; qu’il soit à vos yeux comme le (serviteur) soumis qui reçoit d’un grand le prix de sa fidélité.

7. Pieux Aswins, il est arrivé quelquefois à vos chantres de conclure des marchés ; le traité fut toujours honorablement tenu. (Dieux) justes et généreux, vous avez bu nos libations : des dieux sont équitables.

8. Ô Aswins, chaque jour vous recevez nos libations accompagnées de diverses prières. C’est Agastya, célèbre parmi les directeurs des hommes, qui est ici comme un collecteur de l’impôt, et qui vous engage vivement à payer le vôtre.

9. Quand avec grandeur vous poussez votre char, vous apparaissez à nos yeux tels que le sacrificateur (divin) institué par Manou. Accordez à ceux qui vous honorent une belle race de chevaux. (Dieux) véridiques, que la richesse nous accompagne !

10. Ô Aswins, nous demandons aujourd’hui par nos hymnes qu’il vienne vers nous, votre char toujours rempli de biens nouveaux, (ce char) dont la roue est infatigable, et qui fait le tour du ciel. Que nous connaissions la prospérité, la force et l’heureuse vieillesse !


HYMNE XVI.

Aux Aswins, par Agastya.

(Mètre : Trichtoubh.)

1. (Dieux) amis, (dieux) avides de nos sacrifices, nous avons donné nos libations. Quand nous donnerez-vous l’abondance et la richesse ? Ces offrandes sont pour vous. Méritez nos louanges, maîtres de l’opulence et gardiens des nations.

2. Qu’ils viennent vos coursiers purs et divins, nourriciers (des hommes), légers, élancés, rapides comme le vent, prompts comme la pensée. Remplis d’éclat, qu’ils vous amènent ici, ô Aswins !

3. (Dieux) superbes et doués d’un cœur généreux, qu’il arrive pour notre bonheur, votre char aussi large que la terre, (ce char) au vaste siége, rapide, empressé, adorable !

4. Vous avez deux fils, nés à deux époques différentes, et qui, avec des vertus particulières, ont des corps purs et irréprochables. L’un, du haut du ciel, où il règne en vainqueur, est l’auteur de tout don précieux ; l’autre y déploie sa douce et agréable forme[944].

5. Que nos hymnes comblent nos vœux ; que votre char azuré vienne vers nos demeures ! Ô brillants Aswins, que le mouvement de l’un (de vos fils), encouragé par nos offrandes et nos chants, développe les splendeurs des mondes (intermédiaires) !

6. Votre char, chargé de douces libations, va répandant avec largesse une heureuse abondance. Que la marche de l’autre (de vos fils) fasse grossir l’onde des rivières ; que nos offrandes donnent l’essor à ces sources célestes !

7. Sages et constants Aswins, que trois fois l’hymne vienne confirmer votre gloire ! Pour prix de ses louanges, soutenez celui qui vous prie, dans la bonne comme dans la mauvaise voie. Écoutez mon invocation.

8. L’éloge que nous faisons de votre forme brillante sur ce gazon trois fois amassé, contribue au bonheur de vos serviteurs. (Dieux) remplis de bonté, que votre libéralité, qui ne demande qu’à verser ses faveurs sur les enfants de Manou, soit pour nous telle qu’une vache au lait abondant !

9. (Le père de famille), l’holocauste à la main, semble vous orner de ses dons, et vous célèbre, comme le matin la Prière (célèbre) Agni. Je vous chante et vous invoque, en prodiguant les offrandes. Que nous connaissions la prospérité, la force et l’heureuse vieillesse !


HYMNE XVII.

Aux Aswins, par Agastya.

(Mètres : Djagatî et Trichtoubh.)

1. C’est bien ! redoublez de zèle et de soin. Voici le char tout rempli de richesses !… Hommes sages, livrez-vous à la joie. (Dieux) qui vous plaisez à nos prières, purs et vénérables, enfants du ciel, qui avez été le trésor de Vispalâ[945], venez au secours de (l’homme) pieux.

2. Aussi grands qu’Indra, aussi prompts que les Marouts, magnifiques auxiliaires, impétueux écuyers, habiles à presser les coursiers, vous menez un char rempli de biens délicieux. Venez avec lui, ô Aswins, près de votre serviteur.

3. Que faites-vous, (dieux) secourables ? Que pouvez-vous attendre ? Je vois la fortune de celui qui s’abstient de l’holocauste. Enlevez à cet avare sa puissance et sa vie : faites la gloire du sage qui célèbre vos louanges.

4. Détruisez ces chiens qui aboient ; tuez nos ennemis. Aswins, voilà vos exploits ! Rendez les chants de votre poëte féconds pour nous en biens. (Dieux) véridiques, ayez égard à mes hymnes.

5. C’est vous qui, au milieu des mers, avez fait un jour en faveur du fils de Tougra[946] un vaisseau animé, ailé, sur lequel, (dieux) à la marche fortunée, vous l’avez, écoutant sa prière, élevé dans l’air et tiré des vastes ondes.

6. Le fils de Tougra était tombé dans les eaux, englouti au sein d’une immense obscurité. Quatre vaisseaux dépêchés par les Aswins, et descendant au fond des mers, ont ramené (le malheureux) sur le rivage.

7. Au sein de la mer s’éleva un arbre qu’embrassa le fils de Tougra suppliant. Tel que la feuille qui s’envole de dessous les pas précipités du lion, tel vous l’avez, ô Aswins, soulevé pour votre gloire.

8. Dieux véridiques, qu’il arrive jusqu’à vous, cet hymne que chantent en votre honneur (des serviteurs dévoués). En récompense des sacrifices et des libations que nous vous offrons aujourd’hui, que nous connaissions la prospérité, la force et l’heureuse vieillesse !


HYMNE XVIII.

Aux Aswins, par Agastya.

(Mètre : Trichtoubh.)

1. Généreux (Aswins), (touchés de) nos prières, attelez ce char rapide qui a trois siéges et trois roues, (ce char) formé de trois métaux[947], sur lequel, comme l’oiseau sur ses ailes, vous arrivez à la demeure de (l’homme) pieux.

2. Pendant que votre char aux belles roues se dirige vers le lieu (du sacrifice), pendant que vous vous arrêtez pour (recevoir) notre offrande, ô vous qui connaissez les moments favorables, que notre hymne, dieux magnifiques, célèbre votre beauté ! Vous accompagnez l’Aurore, fille du Ciel.

3. Montez donc sur ce char aux belles roues, qui, rempli d’holocaustes, aime à visiter le sacrifice, et sur lequel vous venez, ô dieux véridiques, avides de nos offrandes, dans la demeure où nous vous honorons, mon fils et moi.

4. Ne soyez pas exposés aux injures triomphantes de l’impie et de sa compagne. Ne nous livrez pas à l’abandon et à la ruine. C’est pour vous, (ô dieux) secourables, cette part dans nos offrandes, cet hymne, ces trésors de libations.

5. Secourables (Aswins), Gotama, Pouroumilha, Atri[948], l’holocauste à la main, implorent votre protection. Comme le voyageur qui suit avec exactitude la route indiquée, (dieux) véridiques, venez à mon invocation.

6. Puissions-nous traverser cette mer de ténèbres ! Que cet hymne, ô Aswins, soit accueilli de vous ! Arrivez ici par les voies que suivent les dieux. Que nous connaissions la prospérité, la force et l’heureuse vieillesse !




LECTURE CINQUIÈME.

HYMNE I.

Aux Aswins, par Agastya.

(Mètre : Trichtoubh.)

1. Nous voulons, au lever de l’aurore, vous invoquer aujourd’hui, vous (invoquer) demain. Voici (Agni) qui vous porte la prière du père de famille ; ô (dieux) véridiques, partout présents, fils du Ciel, (favorisez un serviteur) plus dévoué que Soudas[949] !

2. (Dieux) pleins de libéralité, prenez plaisir à nos offrandes. Exterminez ceux qui marchandent vos faveurs, et enivrez-vous des flots (de notre soma). Prêtez à nos prières et à nos vœux une oreille attentive, héros capables de les exaucer.

3. Ô Poûchan, pour obtenir les trésors de la fille du Soleil[950], que les coursiers des (Aswins) les transportent aussi rapides que la flèche ! (Dieux), les prouesses qui vous ont distingués au sein des ondes (célestes), sont justement célébrées. Votre âge est aussi ancien que celui de l’infatigable Varouna.

4. Que vos présents soient pour nous agréables comme le miel. (Dieux) adorables et bienfaisants, exaucez la prière du poëte. Vos serviteurs, pour obtenir l’abondance et une heureuse lignée, vous présentent ces joyeuses libations.

5. Magnifiques Aswins, c’est pour vous que cet hymne a été composé, pour vous ces prières et ces invocations. Venez dans notre demeure ; protégez-nous, mes enfants et moi ; (dieux) véridiques, goûtez les plaisirs que vous offre Agastya !

6. Puissions-nous traverser cette mer de ténèbres ! Que cet hymne, ô Aswins, soit accueilli de vous ! Arrivez ici par les voies que suivent les dieux. Que nous connaissions la prospérité, la force et l’heureuse vieillesse !


HYMNE II.

Au Ciel et à la Terre, par Agastya.

(Mètre : Trichtoubh.)

1. De ces deux (divinités), quelle est la plus ancienne ? Quelle est la moins âgée ? Comment sont-elles nées ? Ô poëtes, qui le sait ? Elles sont faites pour porter le monde, tandis que le Jour et la Nuit roulent comme deux roues.

2. Toutes deux, tranquilles et sans mouvement, contiennent des êtres doués de mouvement et de vie. Tels que des parents (gardent) sans cesse à leurs côtés un enfant (chéri), ô Ciel et Terre, gardez-nous contre le mal !

3. Je demande que vous me fassiez jouir d’Aditi[951]. Que cette faveur adorable soit exempte de toute crainte ; qu’elle soit constante, inaltérable et à jamais fortunée ! Ô Ciel et Terre, accordez cette (grâce) à votre chantre. Ô Ciel et Terre, gardez-nous contre le mal !

4. (Divinités) heureuses et secourables, nous sommes à vous, Ciel et Terre qui avez les dieux pour enfants[952]. Vous marchez tous deux avec l’escorte divine des Journées et des Nuits. Ô Ciel et Terre, gardez-nous contre le mal !

5. Sœurs toujours jeunes et semblables à elles-mêmes, elles se suivent, placées aux côtés de leurs parents, et glissant dans le centre du monde. Ô Ciel et Terre, gardez-nous contre le mal !

6. J’invoque dans le sacrifice, en implorant le secours des dieux, ces deux (divinités), mères grandes, larges, solides, remplies de beauté, et qui renferment l’immortalité. Ô Ciel et Terre, gardez-nous contre le mal !

7. J’invoque, par ma prière et dans ce sacrifice, (ces divinités) grandes, larges, étendues, dont les bornes sont immenses, heureuses, bienfaisantes, qui contiennent (le monde). Ô Ciel et Terre, gardez-nous contre le mal !

8. Si nous avons commis quelque faute contre les dieux, contre nos amis, nos enfants ou notre père, que cette prière nous fasse obtenir notre pardon. Ô Ciel et Terre, gardez-nous contre le mal !

9. Louées par nous et favorables aux mortels, que ces deux (divinités) me sauvent ; qu’elles s’entendent pour me secourir et me protéger. En faveur d’un (serviteur) plus dévoué que Soudas, les Dévas vous présentent avec joie les nombreuses offrandes du père de famille.

10. Pieux et recueilli, j’ai commencé par adresser cette prière au Ciel et à la Terre. Vous, notre père et notre mère, vous toujours irréprochables, préservez-nous du mal, et soyez nos protecteurs.

11. Ciel et terre, notre père et notre mère, accordez-nous la grâce que je vous demande. Descendez près des Dévas pour nous secourir. Que nous connaissions la prospérité, la force et l’heureuse vieillesse !


HYMNE III.

Aux Viswadévas, par Agastya.

(Mètre : Trichtoubh.)

1. Que Viswânara[953], que le divin Savitri accourent heureusement à notre sacrifice, attirés par la voix des hymnes[954]. (Venez) renouveler votre jeunesse et vous enivrer de nos libations. (Venez) à notre prière faire le bonheur du monde entier.

2. Qu’ils se rendent vers nous les invincibles Viswadévas, Mitra, Aryaman, Varouna leur compagnon ; que les Viswadévas deviennent pour nous une source de prospérité ; qu’ils nous accordent une force accompagnée du triomphe !

3. M’unissant à vos transports, je m’empresse de chanter Agni, qui est votre hôte chéri. Pour nous rendre favorable le glorieux Varouna, que le père de famille, si fameux par sa générosité, prodigue les offrandes.

4. Tel que la vache aux mamelles pleines, je vous appelle avec anxiété, vous (Viswadévas), (et vous), Nuit et Aurore. Dans un même jour et comme dans une seule mamelle, je rassemble le lait de la louange que je destine à plusieurs.

5. Qu’Ahirboudhnya[955] nous envoie l’abondance. De même que la vache vient à son nourrisson, de même vers lui s’avance la Libation, dont nous honorons le fils des Ondes[956] et que transportent les (vents) généreux, aussi rapides que la pensée.

6. Que Twachtri vienne aussi vers nous, et qu’il partage la joie des maîtres du sacrifice. Que le puissant Indra, l’ennemi de Vritra et l’ami des hommes, se rende à notre sacrifice.

7. Que nos Prières, attelées au char (du sacrifice), s’approchent d’Indra comme la vache de son veau, et caressent leur nourrisson. Que nos Invocations, comme de tendres épouses, plaisent au meilleur des dieux.

8. Que vers nous arrivent les robustes Marouts ; qu’ils accourent d’un commun accord, poussant entre le ciel et la terre leurs coursiers couverts de rosée, dieux rapides, bons et protecteurs pour leurs amis, intraitables pour leurs ennemis.

9. Lorsque, pour célébrer leurs prouesses, à la prière d’un homme pieux, les poëtes composent un hymne, alors ces (dieux) n’ont plus de colère que pour chasser les mauvais jours ; ils n’ont plus de force que pour fertiliser le désert.

10. Honorez aussi pour votre avantage les Aswins ; honorez Poûchan, car ces (dieux) sont doués de puissance. Invoquez le clément Vichnou, le Vent, Ribhoukchas[957] ; que les dieux nous accordent la félicité !

11. (Dieux) adorables, c’est pour vous que s’allume la flamme de ce (sacrifice) : qu’elle soit une source de vie, une cause de stabilité, (cette flamme) que les Dévas disposent dans la vue d’obtenir la fortune ! Que nous connaissions la prospérité, la force et l’heureuse vieillesse !


HYMNE IV.

Au Dieu de l’offrande[958], par Agastya.

(Mètres : Gâyatrî et Anouchtoubh.)

1. Je chante (le dieu) des offrandes, qui est le soutien et la force du monde : c’est par la puissance de ce (dieu) que Trita[959] a déchiré les membres de Vritra.

2. Douce (divinité) des offrandes, aussi douce que le miel, nous t’honorons ; protége-nous.

3. (Divinité) des offrandes, viens à nous ; montre-toi, par tes heureux secours, bonne, propice, amie, secourable, utile et constante.

4. À toi, (divinité) des offrandes, sont ces douces émanations qui montent dans les airs, ces esprits qui semblent se réfugier dans le ciel.

5. Ils sont à toi, (divinité) des offrandes ; ils sont à toi, divinité suave ; car c’est toi qui les donnes. Ceux qui respirent ces vapeurs s’en vont la tête levée[960].

6. (Divinité) des offrandes, tu es l’amour des grands dieux. Rien n’est beau que sous ton étendard. C’est avec ton secours qu’(Indra) a tué Ahi.

7. (Divinité) des offrandes, quand les montagnes (célestes) viennent briller de ta substance, alors, douce divinité, redescends vers nous après les avoir suffisamment nourries.

8. Si nous avons, autour de nous, diminué l’heureuse abondance des ondes et des plantes, deviens Vâtâpi[961] ; gonfle-toi pour nous.

9. Ô Soma[962], si nous t’avons donné la pure substance de nos vaches, deviens Vâtâpi ; gonfle-toi pour nous.

10. Ô plante (qui dois servir pour nos libations)[963], prends la forme de nos gâteaux (sacrés)[964] ; large, salutaire, aérienne, deviens Vâtâpi ; gonfle-toi pour nous.

11. (Divinité) des offrandes, comme la vache offre son lait pour l’holocauste, nous t’offrons aussi, toi-même en même temps que la Prière, pour que tu fasses le bonheur des dieux, pour que tu fasses aussi le nôtre.


HYMNE V.

À Agni, par Agastya.

(Mètre : Trichtoubh.)

1. (Dieu) mille fois vainqueur, les Dévas[965] viennent de t’allumer aujourd’hui ; tu règnes avec splendeur. Sois notre sage messager, et transporte nos holocaustes.

2. Tanoûnapât[966] arrive dans son foyer ; le sacrifice est couvert du miel (des offrandes), il reçoit des milliers de (pieux) présents.

3. Invoqué par nous, (dieu) digne d’être célébré, amène les (autres) dieux que doivent honorer nos sacrifices. Agni, tu nous accordes des biens innombrables.

4. (Les prêtres) ont étendu et tourné vers l’orient ce cousa, dont la vertu est si prodigieuse : (ils l’ont dirigé) vers le côté où vous régnez, ô Adityas !

5. Ô roi et souverain seigneur, les libations ont coulé vers les portes (de votre domaine), si hautes, si puissantes, si nombreuses, si abondantes.

6. Que les deux Crépuscules viennent prendre leur place (à notre sacrifice), beaux et brillants des lueurs (d’Agni).

7. Qu’en premier lieu les deux sacrificateurs divins, sages, à la douce parole, viennent ici exercer leur saint ministère[967].

8. Bhâratî, Ilâ, Saraswatî[968], vous que j’invoque toutes à la fois, envoyez-nous la fortune.

9. Twachtri[969], habile à créer les formes, façonne tous les animaux. (Ô dieu), accorde-nous l’accroissement de nos troupeaux !

10. Ô maître du bûcher[970], donne aux dieux les aliments qu’ils réclament de toi. Qu’Agni procure aux holocaustes une douce saveur.

11. Agni est le premier des Dévas, et se trouve honoré par la Gâyatrî. Il aime les offrandes de la Swâhâ[971].


HYMNE VI.

À Agni, par Agastya.

(Mètre : Trichtoubh.)

1. Agni, conduis-nous à la richesse par le meilleur des chemins, ô dieu qui connais tout ce qui est convenable ! Éloigne de nous le mal, qui suit une route oblique. Puissions-nous obtenir le plus beau fruit des hommages que nous te rendons !

2. Agni digne de nos louanges, fais-nous traverser heureusement tous les dangers. Donne-nous, et à mon fils et à ses enfants, une large jouissance de toute espèce de prospérités.

3. Agni, défends-nous contre les maladies ; qu’elles tombent sur les hommes que tu ne protéges pas. Ô dieu digne de nos sacrifices, (viens) avec tous les immortels dans ton foyer, et fais notre bonheur.

4. Agni, brille sur ton trône, et accorde-nous une protection continuelle ! (Dieu) puissant et toujours jeune, que ton poëte puisse être rassuré et aujourd’hui et demain sur tes sentiments !

5. Agni, ne nous abandonne pas à l’adversité ; (ne nous livre pas) à l’ennemi habile à changer le bien en mal, (Dieu) puissant, ne nous mets point à la discrétion d’un tel homme, qui ne voudrait que nous attaquer, nous blesser, nous perdre.

6. Agni, né du sacrifice, un serviteur qui t’est dévoué honore ta forme visible par des hymnes et des offrandes. Ô dieu, (protège-nous) contre quiconque voudrait nous nuire par ses discours ou par ses actions : tu es l’ennemi de tous ceux qui suivent les voies obliques.

7. Agni, (dieu) sage et digne de nos sacrifices, tu visites avec empressement les deux espèces d’hommes qui t’implorent[972]. Viens exaucer les vœux des fils de Manou, et, prenant nos offrandes, sois avec nous comme avec les enfants d’Ousidj[973].

8. Sur le puissant Agni (et il est l’enfant de la prière), faisons nos invocations. Puissions-nous, et nous et les Richis (ici présents), obtenir des biens innombrables ! Que nous connaissions la prospérité, la force et l’heureuse vieillesse !


HYMNE VII.

À Vrihaspati[974], par Agastya.

(Mètre : Trichtoubh.)

1. Exalte par tes hymnes l’admirable Vrihaspati, bon et généreux (dieu) à la douce langue, qui brille d’un aimable éclat, et dont les dieux, aussi bien que les mortels, répètent les louanges.

2. Autour de Vrihaspati se rassemble cette foule de prières, diversifiées suivant les circonstances et recueillies par la piété. Vrihaspati est l’ornement et le maître des offrandes. Il est comme l’âme du sacrifice.

3. Que l’hymne, les invocations, les mètres sacrés soient pour lui ce que les rayons sont pour Savitri. Elle n’est point à redouter la puissance de (ce dieu), qui, formidable comme l’animal sauvage, est doux et bon malgré sa force.

4. Sa louange, comme un coursier (rapide), parcourt le ciel et la terre. Qu’il prenne et porte nos offrandes, (ce dieu) qui pense au bonheur (des hommes). Les coups de Vrihaspati, aussi terribles que ceux de l’animal sauvage, vont frapper le ciel, obscurci par Ahi.

5. Ô dieu, les Padjras qui t’honorent par des libations de beurre, malgré leurs fautes, vivent heureusement. Ô Vrihaspati, tu ne donnes pas tes biens à l’impie ; tu aimes l’homme qui t’apporte des offrandes.

6. Tu es la voie verdoyante de l’heureux voyageur ; tu es aussi l’ami empressé de l’infortuné. Couvre de ta protection les (hommes) vertueux qui nous aiment ; ils se présentent pour obtenir tes secours.

7. Comme (le sujet) va vers son maître, comme les fleuves coulent vers la mer, de même les hymnes (se dirigent) vers Vrihaspati. Ce (dieu) est sage, et, tel que le vautour au milieu des airs, il voit et les ondes et le moyen d’y arriver.

8. Ainsi Vrihaspati est grand, fort, puissant et généreux. Loué par nous, qu’il nous accorde une heureuse fécondité parmi les hommes, parmi les vaches. Que nous connaissions la prospérité, la force et l’heureuse vieillesse !


HYMNE VIII.

Aux Âpris du Soleil[975], par Agastya.

(Mètres : Anouchtoubh, Pankti, Vrihati et Djagatî.)

1. (L’être) qui marche est comme arrêté au sein de noires vapeurs. Les Ténèbres[976] ont enveloppé les deux flambeaux lumineux[977].

2. Mais voici que (l’Aurore) vient, et détruit ces Ténèbres ; elle arrive de l’extrémité du ciel, elle les abat et les réduit en poussière.

3. Les Saras, les Cousaras, les Darbhas, les Sêryas, les Môndjas, les Verinas[978], tout se trouvait invisible, et enveloppé de ces Ténèbres.

4. Les vaches étaient retirées dans leurs étables, les hôtes des forêts dans leurs repaires ; les hommes étaient engourdis, tous enveloppés par ces Ténèbres.

5. Mais ces Ténèbres ont été trahies par le matin, telles que des voleurs. Ô Ténèbres, vous avez vu la lumière[979], et tous êtes sorties de votre sommeil.

6. Vous avez le Ciel pour père, la Terre pour mère, Soma[980] pour votre frère, Aditi pour sœur. Ô Ténèbres, vous avez vu la lumière ; levez-vous, et rentrez heureusement (dans votre séjour).

7. Mutilées, coupées par morceaux, effilées comme des aiguilles, allez, ô Ténèbres, et délivrez-nous de votre présence !

8. À l’orient le Soleil se lève à la vue de tous ; il tue les Ténèbres, il dévore toutes ces noires vapeurs, issues de génies malfaisants[981].

9. Oui, le Soleil se lève pour détruire beaucoup (de maux) ; c’est Aditya venant avec les Vents se montrer à tous, et tuer les Ténèbres.

10. (Couchoumbhaca parle.) « Que ces vapeurs à ma voix s’étendent sur le Soleil, telles que ces tentes dont est couverte la demeure de l’homme qui distribue de douces liqueurs[982]. Comme le Soleil, que nous soyons immortels ! Le (dieu) que portent des coursiers azurés, de ces ondes unies au Soleil dans le séjour céleste, t’a formée, douce liqueur d’immortalité[983] !

11. « Tel qu’un magnifique oiseau, (il s’élève) et absorbe tes vapeurs. Comme le Soleil, que nous soyons immortels ! Le (dieu) que portent des coursiers azurés, de ces ondes unies au Soleil dans le séjour céleste, t’a formée, douce liqueur d’immortalité !

12. « Que ses vingt et une (flammes) aux teintes variées[984] dévorent la substance de ces vapeurs. Ces (flammes) ne meurent point ; comme elles, que nous soyons immortels ! Le (dieu) que portent des coursiers azurés, de ces ondes unies au Soleil dans le séjour céleste, t’a formée, douce liqueur d’immortalité[985] !

13. « J’appelle tous ces quatre-vingt-dix torrents que forment ces vapeurs. Le (dieu) que portent des coursiers azurés, de ces ondes unies au Soleil dans le séjour céleste, t’a formée, douce liqueur d’immortalité !

14. « Ainsi (d’un côté) les vingt et une flammes aux nuances de paon, (de l’autre) les sept sœurs aux flots rapides, de même que des urnes reçoivent l’eau, se saisissent de tes ondes, (douce liqueur d’immortalité)[986] !

15. « Moi, Couchoumbhaca[987], avec la foudre je fends ces vapeurs, et elles roulent en ondes jusque dans les régions du ciel les plus éloignées. »

16. Ainsi parla Couchoumbhaca : nous avons redit ses paroles. Le venin du scorpion[988] est devenu innocent. Ô scorpion, ton venin est innocent !


HYMNE IX.

À Agni, par Gritsamada, fils de Sounahotra, de la famille d’Angiras.

(Mètre : Djagatî.)

1. Agni (dieu), pur et lumineux, maître des hommes, tu nais environné de splendeurs, de libations, de coupes, de bois et de plantes.

2. Pour (l’homme) qui veut honorer les dieux aux jours favorables, ô Agni, tu diriges l’holocauste, les libations, les cérémonies, et surveilles le feu. Tu es le héraut, le prêtre, le pontife ; tu es pour nous un maître de maison.

3. Tu es pour les hommes pieux le généreux Indra ; tu es l’illustre Vichnou, toujours adorable ; tu es le pontife opulent, le maître de la chose sacrée, le soutien de tous les êtres, le compagnon de toutes les prières.

4. Agni, tu es le royal Varouna, tu es Mitra si ferme dans ses œuvres, (dieu) secourable, et digne de nos chants. Tu es Aryaman, le maître de la piété, un reflet, une forme (du Soleil) ; dans le sacrifice tu es, ô dieu, un bienfaiteur.

5. Agni, tu es Twachtri ; les (Prières) sont tes épouses, et ton serviteur trouve en toi un ami puissant, un parent fidèle qui fait sa force. Magnifique et vivement empressé, tu donnes et de nombreux et de vaillants coursiers.

6. Agni, tu es Roudra qui règne dans les airs, et dispenses la vie[989] ; tu es la force des Marouts et le maître des offrandes. Tes coursiers rougeâtres sont aussi rapides que les vents. En toi réside la prospérité ; tu es Poûchan, et tu sais protéger tes serviteurs.

7. Agni, pour (l’homme) qui t’honore, tu es Dravinodâs[990]. Tu es le divin Savitri, et l’auteur de toute opulence. Roi des hommes, tu es Bhaga, tu règnes par la richesse, et tu gardes dans ta demeure celui qui te vénère.

8. Agni, le peuple t’adore, dans son foyer, comme son souverain, comme un roi bienveillant. (Dieu) aux brillantes clartés, tu es le maître de tout ; en toi sont rassemblés d’innombrables trésors.

9. Agni, ô toi dont le corps s’entoure de tant d’éclat, les hommes par leurs offrandes (l’honorent) comme un frère, par leurs œuvres ils te servent comme un père. Tu es le fils de celui qui te révère : tu es pour nous un ami fidèle, et un patron dévoué.

10. Agni, tu es Ribhou, vénérable et (vivant) près de nous ; tu es le maître de l’abondance et de la féconde prospérité. Tu brilles et tu brûles. C’est toi qui ordonnes le sacrifice, c’est toi qui l’offres.

11. Divin Agni, tu es Aditi pour ton serviteur. Tu es Hotra, tu es Bhâratî. Ton bonheur est dans nos hymnes. Tu es l’éternelle Ilâ, pour nous combler de biens. Maître de l’opulence, tu as donné la mort à Vritra, et tu es Saraswatî.

12. Agni, ton serviteur trouve par toi la plus belle des existences. Dans tes splendeurs si éclatantes, si désirables, se rencontrent toutes les beautés. Tu nous donnes la nourriture et le salut, ô grand (dieu) ! tu es riche, magnifique, partout présent.

13. Prudent Agni, tu es les Adityas. Les dieux ont pris ta bouche et ta langue (pour être leur bouche et leur langue). C’est par toi que, dans les sacrifices, ils reçoivent les offrandes. C’est par toi que les dieux mangent l’holocauste.

14. Oui, c’est par toi, Agni, que tous les dieux, immortels et bienfaisants, mangent l’holocauste. Par toi les mortels goûtent le fruit de la libation. Dieu pur, tu produis les plantes dont tu portes en toi le germe.

15. Généreux Agni, parmi tous ces dieux que tu rassembles, tu excelles, tu domines avec majesté. Par un effet de ta grande puissance, que l’offrande, présentée dans notre sacrifice, profite également et au ciel et à la terre !

16. Agni, tu nous conduis vers le bonheur, et nous, et les chefs de famille qui donnent à tes chantres d’excellentes vaches et de beaux chevaux. Pères d’une heureuse lignée, puissions-nous chanter longtemps encore dans le sacrifice !


HYMNE X.

À Agni, par Gritsamada[991].

(Mètre : Djagatî.)

1. Augmentez par le sacrifice la grandeur d’Agni, qui possède tous les biens ; honorez-le par l’holocauste, l’offrande et le chant, cet (Agni) qui s’enflamme sous nos abondantes libations, brillant sacrificateur et guide invincible dans la voie du bonheur.

2. Agni, les Nuits et les Aurores t’appellent, comme les vaches dans les pâturages appellent leur nourrisson. Tel que (l’astre), voyageur céleste, (dieu) magnifique, tu brilles dans ton foyer, et pendant la nuit et pendant le jour, qui appartient à l’homme.

3. Les Dévas ont placé Agni dans la région de l’air pour y accomplir une œuvre merveilleuse, et pour y voyager entre le ciel et la terre. Resplendissant d’un pur éclat, il est pour nous tel qu’un char rempli de trésors ; c’est un ami digne d’être partout célébré.

4. Le couvrant de leurs libations, ils lui ont donné pour demeure la voûte céleste ; et là, étincelant comme l’or, voyageur aérien[992], il agite ses membres rayonnants, et, salutaire comme une onde (pure), il glisse entre les deux grands parents (du monde).

5. Que ce (dieu) sacrificateur préside à toutes nos cérémonies ! Les enfants de Manou l’honorent par des chants et des holocaustes. Que ses mâchoires ardentes s’ouvrent pour saisir les plantes (qui l’alimentent) ; ainsi que le firmament chargé d’étoiles, qu’il poursuive aussi sa course entre le Ciel et la Terre.

6. Dieu opulent et libéral, brille pour notre bonheur, et accorde-nous la richesse ! Orne pour nous le Ciel et la Terre ! Agni, (prends) les holocaustes de l’homme pour les remettre aux dieux.

7. Donne-nous, Agni, quelque chose de grand ; donne-nous les biens par milliers. Ouvre-nous les portes de l’abondance et de la renommée. Rends le Ciel et la Terre favorables à notre prière ! Que les Aurores brillent pour nous d’un éclat fortuné !

8. Que lui-même allume, après les charmantes Aurores, ses splendides rayons, et qu’il brille pour notre bonheur, cet Agni que Manou entoure de ses offrandes et de ses hommages, ce roi du peuple, cet hôte gracieux d’Ayou[993] !

9. Ainsi, ô le premier des immortels étincelants de lumières, que notre hymne, à nous autres mortels, porte son fruit ! Que (la prière) du sacrifice soit pour l’homme pieux comme une vache féconde dont il puisse tirer, selon ses désirs, des biens nombreux et variés !

10. Pour prix de nos offrandes et de nos prières, puissions-nous obtenir la force et la victoire ! Que notre puissance, difficile à vaincre, brille heureusement parmi les cinq espèces d’êtres[994] !

11. Puissant Agni, ne nous oublie pas. Tu es digne des hommages que viennent t’apporter de généreux chefs de famille. Ils s’approchent, les mains pleines d’offrandes, des feux du sacrifice qui s’élèvent de ton foyer, pour obtenir la perpétuité de leur race.

12. Agni, possesseur de tout bien, prends sous ta protection et tes chantres et les pères de famille. Donne-nous l’opulence ; donne-nous la richesse, accompagnée de la gloire et de l’abondance ; donne-nous une nombreuse postérité.

13. Agni, tu nous conduis vers le bonheur, nous et les chefs de famille qui donnent à tes chantres d’excellentes vaches et de beaux chevaux. Pères d’une heureuse lignée, puissions-nous chanter longtemps encore dans le sacrifice !


HYMNE XI.

À Agni[995], par Gritsamada.

(Mètres : Trichtoubh et Djagatî.)

1. Agni (surnommé) Samiddha, placé sur le foyer, se présente à tous les mondes. Antique sacrificateur, dieu pur et sage, qu’Agni daigne, en l’honneur des dieux, accomplir l’œuvre sacrée !

2. Que le (dieu appelé) Narâsansa, s’entourant de lueurs éclatantes, les étende magnifiquement sur les trois mondes : qu’arrosant l’holocauste de libations de beurre, et le sanctifiant par la prière, il honore les (dieux) au moment du sacrifice.

3. Agni (qu’on nomme) Ilita, daigne écouter notre prière, et honore les dieux, établis aujourd’hui par l’enfant de Manou à la première place. Amène ici la troupe des Marouts. Prêtres, rendez hommage à l’inébranlable Indra, qui siége sur le gazon sacré.

4. Ô dieu, un large lit de ce cousa qui donne la force et qui ne porte que des fardeaux sacrés, a été étendu dans ce sanctuaire. Sur ce (cousa) humide d’un beurre purifié, venez vous asseoir. Vasous, Viswadévas, et vous, adorables Adityas.

5. Qu’elles s’ouvrent de toute leur largeur ces Portes divines (de l’enceinte sacrée, ces Portes) que nous invoquons, et dont nous ne nous approchons qu’avec un pieux respect. Que ces larges et vénérables Portes soient célébrées, et qu’elles purifient pour nous une race forte et glorieuse.

6. Nos œuvres, par la vertu de (ce maître) éternel, ne peuvent être que louables. Vous, Nuit et Aurore, arrosées par nos libations ; vous qui, d’un mutuel accord, venez successivement couvrir (le monde) de votre grand voile, fécondes (nourricières), (accourez) à notre sacrifice.

7. Couple de sacrificateurs divins, doués de science et de beauté, (je vous invoque) en premier lieu. Accompagnant de prières votre œuvre pieuse, vous honorez les dieux au moment convenable, et vous embellissez de vos feux le saint foyer de terre dans les trois places consacrées.

8. Ô Saraswatî, qui composes pour nous la prière ; ô divine Ilâ, ô Bhâratî vive et empressée, venez toutes trois prendre votre part de l’offrande, et vous asseoir sur ce pur et salutaire gazon.

9. (Un dieu) rapide et fort, riche en aliments précieux, et ne portant que de saints fardeaux, Twachtri, le désiré des autres dieux, vient de naître avec sa sombre beauté : qu’il entre au séjour qui l’attend, pour y former notre race[996]. Ainsi se poursuive la libation en l’honneur des dieux !

10. Agni (appelé) Vanaspati est près de nous, recevant l’holocauste et le purifiant par la prière. Sage et divin sacrificateur, qu’il apporte, pour plaire aux dieux, l’offrande trois fois arrosée de libations.

11. Je répands le beurre (sacré) ; le beurre est la matrice d’Agni ; Agni est enfermé dans le beurre ; le beurre forme son rayon. (Dieu) généreux, apporte successivement les offrandes, enivre (tes hôtes), et transmets-leur l’holocauste accompagné de la Swâhâ.


HYMNE XII.

À Agni, par Somahouti, fils de Bhrigou.

(Mètre : Trichtoubh.)

1. J’invoque pour vous le brillant Agni, l’hôte du peuple ; Agni (honoré) par des hymnes et des offrandes, ce dieu possesseur de tous les biens, qui est un ami et un soutien pour tous les êtres, même pour les dieux.

2. Les Bhrigous, honorant Agni, l’ont établi au séjour des ondes (célestes) ; et, en second lieu, au milieu du peuple d’Ayou. Que le maître des dieux, qu’Agni aux rapides coursiers triomphe de tout.

3. Les Dévas, destinés à disparaître, ont constitué Agni au milieu de la race humaine comme un ami véritable. Qu’il répande donc ses flots de lumière, et que de son foyer il comble de biens son serviteur !

4. On aime à honorer ce dieu, qui est comme votre bien ; on aime à le voir grandir, et produire ses lueurs. Sur la ramée il agite ses flammes, comme le cheval attelé à un char agite ses crins.

5. Au moment où mes chantres célèbrent la grandeur (d’Agni), (le dieu) prête aux enfants d’Ousidj[997] une couleur aussi éclatante que la sienne[998]. Les offrandes donnent à sa flamme des teintes variées, et sa jeunesse semble à chaque instant se renouveler.

6. S’acharnant sur le bois qu’il dévore, il brille ; il court comme l’eau, il résonne comme un char. Il trace en brûlant un noir sentier. Il plaît comme un ciel qui sourit entre ses nuages.

7. Puis il s’étend, et va brûler la terre ; il se lance ainsi que le troupeau sans pasteur. Agni, en jetant des flammes, consume, noircit, dévore les plantes.

8. Quand, le matin, nous implorons ton secours ; quand, dans le troisième sacrifice[999], nous t’adressons nos prières, donne-nous, ô Agni, de vaillants compagnons, une heureuse abondance, une belle famille et de vastes richesses !

9. Agni, pour que les enfants de Gritsamada, qui t’honorent dans ton foyer, puissent vaincre leurs voisins, qu’ils aient de braves guerriers, que par toi ils obtiennent des succès ! Donne aux chefs de famille et à ton chantre ce fruit de leurs œuvres.


HYMNE XIII.

À Agni, par Somahouti.

(Mètre : Anouchtoubhî.)

1. Il vient de naître (le dieu) qui présente l’holocauste[1000] et qui annonce (le sacrifice), le père dont le secours peut sauver ceux qui ont été ses pères[1001]. Qu’il nous accorde une opulence capable de nous donner la victoire. Puissions-nous devenir forts pour prix de nos offrandes !

2. Avec lui, chef du sacrifice, sont sept guides resplendissants[1002] ; et le (dieu) qui purifie l’offrande[1003] fait lui-même le huitième, venant, être divin, en qualité de Manou[1004].

3. Si des prières sont adressées au (dieu) qui supporte (l’œuvre pieuse )[1005], alors il les prend et les embrasse toutes, comme la jante embrasse la roue d’un char.

4. Avec la sainte cérémonie est né le saint héraut (du sacrifice)[1006], qui en suit sagement les diverses parties, comme (l’oiseau parcourt) les branches (d’un arbre).

5. Les (rayons), vaches lumineuses du dieu qui dirige (les pieuses pratiques)[1007] embrassent sa forme brillante, et se colorent aux feux des trois sœurs[1008] qui sont accourues au sacrifice.

6. Si la sœur de celui qui contient (les libations)[1009] se présente portant le beurre (sacré), le (dieu) occupé des rites salutaires[1010] se réjouit en voyant arriver ces (offrandes), où l’orge (tombe) comme la pluie.

7. Que le (dieu) qui observe le moment favorable[1011] serve volontairement de prêtre à son serviteur. Puissions-nous recueillir le fruit des hymnes et des sacrifices que nous avons préparés !

8. Puisse-t-il satisfaire tous ces (dieux) que nous avons à honorer, ce sacrifice que nous venons, ô sage Agni, d’accomplir en toi !


HYMNE XIV.

À Agni, par Somahouti.

(Mètre : Gâyatrî.)

1. Agni, accueille nos feux et nos offrandes. Exauce nos prières.

2. Enfant de l’offrande, toi que notre hymne a fait naître, puisse notre piété obtenir de toi promptement le fruit du sacrifice !

3. (Dieu) magnifique et opulent, digne de nos louanges, nous voulons t’honorer par nos chants.

4. Maître généreux, possesseur libéral de la richesse, écoute-nous, et combats nos ennemis.

5. Du haut du ciel donne-nous la pluie ; entoure-nous d’une abondance constante, d’une fécondité sans bornes.

6. Héraut (divin) et toujours jeune, sacrificateur digne lui-même de nos sacrifices, je t’invoque, j’implore ton secours. Accours à notre voix.

7. Sage et prudent Agni, tu viens à nous par une double naissance[1012] ; tu es le messager (des dieux). Ta nature t’a fait notre ami.

8. (Dieu) sage et empressé, exauce nos vœux ; accomplis successivement nos sacrifices, et viens te placer sur ce cousa.


HYMNE XV.

À Agni, par Somahouti.

(Mètre : Gâyatrî.)

1. Agni, qui portes (nos offrandes)[1013], (dieu) protecteur et toujours jeune, amène-nous l’heureuse et brillante opulence, si enviée de tous.

2. Puissions-nous n’être sujets à la haine ni d’un dieu ni d’un mortel ! Épargne-nous l’une et l’autre de ces deux inimitiés.

3. Puissions-nous avec toi braver toutes ces inimitiés, comme on brave des pluies d’orage !

4. Agni, (dieu) pur et purifiant, (dieu) digne de nos hommages, tu brilles au loin au milieu de nos invocations et de nos libations de beurre.

5. Agni, qui portes (nos offrandes), tu nous appartiens, toi que nous honorons au milieu des flammes, des libations et des hymnes[1014].

6. Antique sacrificateur, noble enfant de la Force, (dieu) admirable, reçois nos offrandes et nos libations de beurre.


HYMNE XVI.

À Agni, par Somahouti.

(Mètre : Gâyatrî.)

1. Chante, comme pour lui donner plus de force, le glorieux et libéral Agni, porté sur son char rapide.

2. Heureux et invincible conducteur, en faveur du serviteur qui l’invoque, il renverse l’ennemi, et montre sa face resplendissante.

3. Il vient dans ses foyers, le matin et le soir, déployer ses rayons et recevoir nos louanges, (dieu) dont l’œuvre ne périt point.

4. Tel qu’un soleil, il étale ses splendides clartés, et pare (le monde) de ses flammes impérissables.

5. (Les prêtres) par leurs hymnes ont exalté le brillant Agni, qui dévore (les offrandes) et renferme toutes les richesses.

6. Nos intentions sont pures, et nous demandons pour nous l’alliance d’Agni, de Soma, des dieux. Puissions-nous être vainqueurs de nos ennemis !




LECTURE SIXIÈME.

HYMNE I.

À Agni, par Gritsamada.

(Mètre : Gâyatrî.)

1. Le sacrificateur, sage, éclairé, brillant et robuste, est venu s’asseoir à sa place. C’est Agni, qui possède la science des œuvres invincibles, qui se distingue entre tous par sa position, qui peut tout porter, et qui agite sa langue purifiante.

2. (Dieu) libéral, nous t’invoquons, et tu deviens pour nous un sauveur, un bienfaiteur. Brillant Agni, garde-nous avec tendresse, et veille sur nos personnes et sur nos enfants !

3. Agni, nous voulons t’honorer dans ta première naissance ; nous voulons encore te chanter dans ta seconde demeure[1015]. J’adresse mon hommage au foyer dont tu sors ; tes flammes reçoivent nos holocaustes.

4. Agni, honore les dieux par l’holocauste qui leur est dû, et hâte-toi de recevoir les offrandes qu’ils désirent. Tu es le maître de la richesse et le gardien de la parole sainte.

5. Noble Agni, tu nais tous les jours, et tu as un double séjour que rien ne saurait détruire. Rends celui qui te chante célèbre entre tous ; fais-le opulent, et père d’une heureuse famille.

6. Que ce (dieu) libéral, et digne de tous nos hommages, daigne donc sacrifier heureusement pour nous aux dieux au milieu de sa flamme éblouissante ! Agni, tu es pour nous un gardien, un protecteur invincible. Brille avec tout ton éclat, (brille) avec toute ta richesse !


HYMNE II.

À Agni, par Gritsamada.

(Mètre : Trichtoubh.)

1. Il faut en premier lieu invoquer Agni, que Manou a allumé dans notre foyer, et qui y siége comme un père ; (dieu) immortel et sage, admirable et fort, s’entourant de splendeurs et captivant tous nos hommages.

2. Que le resplendissant Agni entende mon invocation ; que (ce dieu) immortel et sage accueille toutes nos prières. Deux chevaux, tantôt noirs, tantôt rougeâtres, traînent son char, et ce char est placé en différents endroits[1016].

3. Dans (l’aranî) qui s’éveille[1017], que le (prêtre) engendre un fils généreux. Qu’Agni naisse dans cette heureuse matrice, et prenne ensuite diverses formes. Dans (l’aranî) endormie, ce (dieu) sage séjourne pendant la nuit, et voile ses splendeurs.

4. Couvrez de l’holocauste et du beurre sacré cet Agni qui habite tous les mondes. Il grandit sous les offrandes, il monte, il s’élargit en poussant (une fumée) qui vole, qui serpente. C’est un (dieu) fort qui se fait voir au loin.

5. Il s’élance de tout côté. Je lui jette la rosée d’une humble prière. Qu’il l’accueille, cet Agni, trésor des mortels, miracle de beauté, géant lumineux qu’il n’est pas permis de toucher.

6. Toi qui as la vertu de triompher (du mal), reçois notre hommage. Sois notre messager, et puissions-nous, comme Manou, faire écouter notre voix ! Cet Agni qui brille de tout son éclat, et qu’arrosent nos libations aussi douces que le miel, je l’invoque, la prière à la bouche, la coupe (sacrée à la main).


HYMNE III.

À Indra, par Gritsamada.

(Mètres : Trichtoubh et Virât.)

1. Indra, écoute notre prière : tu dispenses les trésors, ne nous regarde pas comme tes ennemis. Nos offrandes sont abondantes, et vont vers toi pour augmenter ta grandeur, comme les ondes vers l’Océan.

2. Envoie-nous ces grands nuages qui grossissent autour d’Ahi. Ô héros, que ce soit pour nous autant de sources fécondes ! Exalté par nos hymnes, frappe l’immortel Asoura, qui s’enorgueillit de ses dépouilles.

3. Invincible Indra, tu aimes ces hymnes et ces chants dans lesquels on te célèbre avec les enfants de Roudra. Ces brillants éloges, que tu ambitionnes, semblent venir à ta rencontre.

4. Oui, nous célébrons ta force merveilleuse : nous mettons dans tes mains la foudre étincelante ; nous te représentons, Indra, grandissant avec nos éloges, et dispersant avec le Soleil les troupes des Asouras.

5. Ahi se cachait au sein du nuage ; le sombre magicien se renfermait dans cette humide retraite. Il arrêtait les eaux et encombrait le ciel. Ô héros, tu as avec force frappé Ahi.

6. Louons donc, ô Indra, tes anciennes prouesses ; louons aussi les nouvelles. Chantons la foudre qui brille en tes mains ; chantons tes chevaux qui annoncent le soleil.

7. Tes chevaux, excités par nos libations, ont henni en sentant le beurre consacré. Indra, la terre leur répond, et prolonge ce bruit. Le nuage, qui marchait, s’est arrêté.

8. Le nuage se tient (dans l’air) comme attentif ; puis, répondant à la voix des (ondes qui sont ses) mères, il se remet en marche. Cependant les (Marouts) ont porté sur la plage lointaine la voix d’Indra, et ils en ont multiplié les sons.

9. Le grand Indra, en frappant le nuage endormi, frappe le magicien Vritra. Le ciel et la terre ont frémi de crainte sous le coup retentissant de la foudre du (dieu) généreux.

10. Oui, la foudre du (dieu) généreux a retenti, quand (Indra), ami des hommes, a percé l’ennemi du genre humain. Avide de nos libations, il a détruit les magies de l’imposteur, enfant de Dânou.

11. Bois donc, magnanime Indra, bois notre soma. Que nos libations enivrantes fassent ta joie. Qu’elles emplissent, qu’elles élargissent tes flancs. Qu’elles comblent tous les vœux d’Indra.

12. Indra, puissions-nous avoir une place dans ton cœur ! Les sages veulent t’honorer par une prière convenable. Oui, jaloux d’obtenir ton secours, nous t’adressons cet hommage. Maître de la richesse, nous nous donnons à toi.

13. Nous nous donnons à toi, Indra ; et, désirant ta protection, nous doublons nos offrandes. Ô dieu, accorde-nous cette richesse que nous souhaitons ; qu’elle soit accompagnée d’abondance et de force !

14. Donne-nous une maison, un ami ; donne-nous, Indra, les biens que répandent les robustes Marouts. Car ces Marouts, qui partagent ta joie et ton ivresse, viennent aussi boire le soma présenté (aux dieux).

15. Qu’ils viennent donc, ces compagnons de tes plaisirs ! Indra, bois le soma qui fait ton bonheur et ta force. Deviens notre protecteur au milieu des combats ; et avec les grands et adorables (Marouts) découvre la face du ciel.

16. (Dieu) sauveur, ceux qui se montrent généreux envers toi, ou qui par des hymnes célèbrent tes bienfaits, te préparant sur le cousa une espèce de demeure ; ô Indra, ils sont sûrs de ta protection, et obtiennent l’abondance.

17. Pendant les terribles tricadrous[1018], héroïque Indra, bois notre soma avec volupté ; qu’il coule sur ta barbe. Viens, avec tes chevaux azurés, prendre heureusement ta part des libations.

18. Magnanime Indra, affermis cette force avec laquelle tu as terrassé le fils de Dânou, qui s’avançait comme l’araignée. (De ta main droite) révèle la lumière à l’Arya, et de ta main gauche, Indra, terrasse le Dasyou.

19. Nous voulons aussi honorer tes heureux auxiliaires, (les Marouts), qui, avec (toi, que nous aimons à surnommer) Arya[1019], ont abattu tout l’orgueil des Dasyous. Par amitié pour Trita[1020], tu as détruit ce monstre merveilleux formé par l’art de Twachtri[1021].

20. En faveur de ce Trita, qui te charmait par ses libations, tu as sous ta grandeur écrasé Arbouda[1022]. Comme le soleil fait rouler son disque, Indra a fait rouler sa foudre[1023], et, accompagné des Angiras, il a percé Bala.

21. Ô Indra, que cette riche offrande attire tes bienfaits sur celui qui te chante ! Comble de tes dons ceux qui t’honorent. Ne les afflige pas en leur dérobant une partie de tes faveurs. Puissions-nous, avec force, chanter longtemps encore dans les sacrifices !


HYMNE IV.

À Indra, par Gritsamada.

(Mètre : Trichtoubh.)

1. Le dieu qui est né le premier, et qui, justement honoré, a par ses œuvres orné les autres dieux ; qui, par sa force et sa puissance, fait trembler le ciel et la terre : peuples, c’est Indra[1024].

2. Celui qui a consolidé la terre ébranlée, qui a frappé les nuages irrités[1025], qui a étendu les espaces de l’air et affermi le ciel : peuples, c’est Indra.

3. Celui qui, en donnant la mort à Ahi, a déchaîné les sept fleuves[1026] ; qui a délivré les vaches prisonnières de Bala[1027] qui, terrible dans les combats, entre deux nuages, a enfanté Agni[1028] : peuples, c’est Indra.

4. Celui qui a ranimé tous les êtres ; qui a renvoyé dans sa caverne[1029] (ténébreuse) le vil Asoura ; qui, tel que le chasseur, vainqueur d’innombrables ennemis, s’empare de leurs dépouilles : peuples, c’est Indra.

5. (Les Asouras) se demandent : Où est-il ? et, en le voyant si redoutable, ils se disent : Ce n’est pas lui. Cependant il détruit ses ennemis, qui se partageaient entre eux les richesses. Ayez foi en lui, peuples, c’est Indra.

6. Celui qui mérite la prière et du riche et du pauvre, du prêtre et du poëte qui le supplient ; qui, distingué par sa belle face, est le gardien du soma que lui présente la coupe (sacrée) : peuples, c’est Indra.

7. Celui à qui appartiennent les chevaux, les vaches, les bourgs, tous les chars ; qui a produit le Soleil et l’Aurore, et qui conduit les ondes : peuples, c’est Indra.

8. Celui que semblent provoquer avec leurs clameurs deux armées de nuages, ses ennemis, l’une supérieure, l’autre inférieure[1030] ; celui que les (Âswins), portés sur le même char, appellent à plusieurs reprises : peuples, c’est Indra.

9. Celui qui donne la victoire aux combattants ; que les guerriers appellent à leur secours ; qui a tout formé à son image, et qui communique le mouvement aux êtres inanimés : peuples, c’est Indra.

10. Celui qui n’est méchant que pour frapper sans relâche le pécheur et l’impie ; qui ne saurait pardonner à l’insolence, et qui terrasse le Dasyou : peuples, c’est Indra.

11. Celui qui, à notre quarantième libation[1031], a tué Sambara, l’habitant des nuages ; qui a frappé à mort Ahi, l’enfant de Dânou, Ahi que nous voyions grossir et s’arrêter languissamment : peuples, c’est Indra.

12. Celui qui, orné de sept rayons, généreux et rapide, a donné l’essor aux sept fleuves ; qui, armé de la foudre, a frappé Rohin[1032] escaladant le ciel : peuples, c’est Indra.

13. Celui devant qui se courbent le ciel et la terre ; dont les montagnes (célestes) redoutent la puissance ; qui, après avoir bu le soma, se trouve affermi, et arme son bras de la foudre : peuples, c’est Indra.

14. Celui qui couvre de sa protection l’homme que recommandent ses libations, ses offrandes, ses hymnes, ses prières ; qui se sent exalté par nos sacrifices, notre soma, nos présents : peuples, c’est Indra.

15. (Dieu) invincible, tu accorderas l’abondance à l’homme qui te fait des libations et des offrandes : car tu es juste. Puissions-nous, Indra, être tes amis, avoir la fortune en partage, et renouveler chaque jour notre sacrifice !


HYMNE V.

À Indra, par Gritsamada.

(Mètre : Trichtoubh.)

1. La saison (des pluies) est la mère de la plante (du soma) ; (la plante) naît et croît rapidement au milieu des eaux dont elle est entourée. Elle pousse des branches qui s’emplissent de suc. Mais ce qui donne au soma cet accroissement[1033], voilà ce que d’abord il faut chanter.

2. Des ruisseaux de jus coulent de toute part, et se rendent vers un même vase[1034] qui les contient. Ils ne suivent tous qu’une même voie. Ô toi qui as fait cela, c’est toi que d’abord il faut chanter.

3. Un homme accompagne de sa voix les offrandes ; un autre vient qui se charge des œuvres, et qui consomme les objets du sacrifice ; par les ordres d’un troisième[1035] tout s’exécute. Ô toi qui as fait cela, c’est toi que d’abord il faut chanter.

4. Les assistants font part aux êtres divers des heureux fruits du sacrifice. Ils vont à la richesse, qui devient pour eux comme un fardeau trop pesant. (Agni), habile à briser les liens des choses, broie sous ses dents les offrandes du père de famille. Ô toi qui as fait cela, c’est toi que d’abord il faut chanter.

5. Toi qui as découvert la terre à la face du ciel ; toi qui, par la mort d’Ahi, as donné l’essor aux fleuves (célestes) ; toi, être divin, que les Dévas ont formé avec leurs louanges, comme avec les eaux on forme la nourriture (des hommes), c’est toi qu’il faut chanter.

6. Toi qui donnes les aliments ; qui, de la (tige) humectée que tu as grossie, tires le grain aussi doux que le miel ; qui es un trésor pour ton serviteur, c’est toi qu’il faut chanter.

7. Toi qui, pour manifester ta suprême générosité, as produit les fleurs et les plantes salutaires ; qui as formé les diverses lumières du ciel ; qui as étendu des espaces larges comme toi, c’est toi qu’il faut chanter.

8. Toi qui, pour détruire le riche Nârmara[1036], et nous enrichir de la dépouille des Asouras, as produit la bouche invincible de la foudre ; qui aujourd’hui encore te distingues par mille exploits, c’est toi qu’il faut chanter.

9. Toi qui, pour le bonheur d’un serviteur dévoué, prodigues par milliers les secours et les bienfaits ; qui, en faveur de Dabhîti[1037], as frappé les Dasyous, et l’as délivré de prison ; qui (toujours) t’es montré accessible (aux prières), c’est toi qu’il faut chanter.

10. Toi dont la force est attestée par toutes les rivières ; qui, auteur de tout bien, reçois l’offrande de notre reconnaissance ; qui as étendu les six (mondes intermédiaires), et qui entoures de ta protection les cinq espèces d’êtres[1038], c’est toi qu’il faut chanter.

11. (Dieu) héroïque, ta force est justement célébrée, car par tes prouesses tu (nous) procures l’abondance. Tu as enlevé la richesse du puissant Djâtoûchthira[1039]. Voilà tout ce que tu as fait, ô Indra ; c’est toi qu’il faut chanter.

12. Tu as jadis rendu le passage d’un fleuve facile pour Tourvîti[1040] et pour Vayya[1041], en enchaînant sa violence. Parâvridj[1042], aveugle et boiteux, était submergé ; tu l’as, pour ta gloire, retiré des eaux. C’est toi qu’il faut chanter.

13. Toi qui es notre refuge, accorde-nous ces richesses qui se trouvent accumulées en toi. Indra, comblés chaque jour de tes dons précieux, pères d’une heureuse lignée, puissions-nous chanter longtemps encore dans les sacrifices !


HYMNE VI.

À Indra, par Gritsamada.

(Mètre : Trichtoubh.)

1. Prêtres, apportez le soma pour Indra. Tirez des vases les offrandes enivrantes. Le dieu fort aime toujours à se rassasier de ce soma. Donnez au généreux (Indra) ce qu’il désire.

2. Prêtres, (au dieu) qui de sa foudre a brisé, comme un arbre, Vritra, l’assembleur de nuages, apportez le soma qu’il souhaite. Indra mérite qu’on le rassasie de soma.

3. Prêtres, (au dieu) qui a tué Dribhîra[1043], qui a délivré les vaches célestes et terrassé Bala, apportez le soma. Comme le vent est enveloppé de l’air, comme un vieillard est couvert de vêtements, couvrez aussi Indra (de vos libations).

4. Prêtres, cet Indra qui a détruit Ourana[1044] fier de ses quatre-vingt-dix-neuf bras, qui a renversé Arbouda[1045], charmez-le par l’offrande de votre soma.

5. Prêtres, à cet Indra qui donna la mort à Swasna, à Souchna, à Asoucha aux membres mutilés, à Piprou, à Namoutchi, à Roudhicrâs[1046], offrez les mets sacrés.

6. Prêtres, à cet Indra qui a de sa foudre brisé les cent villes de Sambara remplies de trésors, qui a détruit les cent et les mille auxiliaires de Vartchin[1047], apportez le soma.

7. Prêtres, à ce dieu qui, dans le voisinage de la terre, détruisant ces cent et ces mille (ennemis), protégeait les hommes de Coutsa[1048], d’Ayou[1049], d’Atithigwa[1050], apportez le soma.

8. Prêtres, ce que vous pouvez désirer, vous l’obtenez aussitôt d’Indra. Apportez au grand Indra votre soma aux purs rayons, et offrez-le-lui en sacrifice.

9. Prêtres, offrez à Indra l’heureux (soma) ; purifié au feu du vénérable (Agni), qu’il soit présenté à (un dieu) non moins vénérable. Indra aime ce qui vient de vos mains : donnez-lui le soma enivrant.

10. Prêtres, comme la mamelle de la vache s’emplit de lait, que le secourable Indra s’emplisse de vos libations. Je connais la vertu secrète de notre soma : la faveur de l’adorable (Indra) est encore acquise à celui qui lui rend cet hommage.

11. Prêtres, cet invincible Indra, qui est le roi des biens célestes, des biens de l’air, des biens terrestres, honorez-le par vos offrandes d’orge, et ne négligez pas les libations.

12. Toi qui es notre refuge, accorde-nous ces richesses qui se trouvent accumulées en toi. Ô Indra, comblés chaque jour de tes dons précieux, pères d’une heureuse lignée, puissions-nous chanter longtemps encore dans les sacrifices !


HYMNE VII.

À Indra, par Gritsamada.

(Mètre : Trichtoubh.)

1. Je chante les grandes actions d’un (dieu) grand, les œuvres justes d’un (dieu) juste. Pendant les tricadrous[1051] il boit notre soma, et dans son ivresse Indra a tué Ahi.

2. Dans l’espace il a établi ce vaste firmament ; entre le ciel et la terre il a étendu l’air ; il a consolidé la terre, et lui a donné une large surface. Dans l’ivresse que lui cause le soma, voilà ce qu’a fait Indra.

3. Comme autant de places (pour le sacrifice), il a mesuré la région de l’orient et les autres ; il a de sa foudre ouvert le cours des fleuves, et les a lancés par de longues voies. Dans l’ivresse que lui cause le soma, voilà ce qu’a fait Indra.

4. (Les Asouras) emportaient Dabhîti[1052] ; il les a enveloppés, et a d’un feu resplendissant allumé sa foudre. Il a donné à Dabhîti des vaches, des chevaux, des chars. Dans l’ivresse que lui cause le soma, voilà ce qu’a fait Indra.

5. (Des Richis) voyageaient, et ne pouvaient traverser un fleuve débordé[1053]. Il a calmé les flots agités, et a fait passer heureusement (ces Richis) à l’autre rivage ; puis il les a comblés de richesses. Dans l’ivresse que lui cause le soma, voilà ce qu’a fait Indra.

6. L’onde s’élevait (au ciel), il l’a frappée avec force ; et, tandis que des coups rapides de sa foudre il réduisait en poussière (humide les nuages) paresseux, il formait le char de l’Aurore. Dans l’ivresse que lui cause le soma, voilà ce qu’a fait Indra.

7. Dans une réunion de jeunes filles apparut le sage Parâvridj[1054] ; le boiteux marchait, l’aveugle voyait. Dans l’ivresse que lui cause le soma, voilà ce qu’a fait Indra.

8. Célébré par les Angiras, il a percé Bala ; il a forcé les portes de la montagne ; il a donné la liberté aux ondes que les Asouras avaient amassées. Dans l’ivresse que lui cause le soma, voilà ce qu’a fait Indra.

9. Il a endormi, pour les frapper, Tchoumouri et le dasyou Dhouni[1055] ; il a sauvé Dabhîti[1056], et avec une bruyante joie il a dépouillé (ces Asouras) de leurs richesses. Dans l’ivresse que lui cause le soma, voilà ce qu’a fait Indra.

10. Ô Indra, que cette riche offrande attire tes bienfaits sur celui qui te chante ! Comble de tes biens ceux qui t’honorent ; ne les afflige pas en leur dérobant une partie de tes faveurs. Puissions-nous, avec force, chanter longtemps encore dans les sacrifices !

HYMNE VIII.

À Indra, par Gritsamada.

(Mètres : Trichtoubh et Djagatî.)

1. Pour vous je porte l’hymne au meilleur des êtres, comme (on porte) l’holocauste au brûlant Agni. Nous appelons à notre secours le victorieux, l’invincible Indra, (Indra) toujours jeune, (toujours) honoré.

2. Que deviendrait cet univers sans Indra ? En lui se trouvent réunies toutes les forces. Dans ses flancs il porte le soma, dans son corps la grandeur et l’énergie, dans sa main la foudre, dans sa tête la puissance.

3. Ta vertu royale n’a rien de supérieur au ciel et sur la terre ; ton char, Indra, ne (peut être arrêté) par les mers ni par les montagnes. Personne ne saurait s’emparer de ta foudre, quand tes rapides (coursiers) te font parcourir tant d’yodjanas[1057].

4. À ce (dieu) redoutable, vainqueur, généreux, éternel, tous apportent le sacrifice. (Mortel) sage et libéral, honore (Indra) par le don de l’holocauste. Indra, bois le soma avec le généreux Agni !

5. Le flot de la libation coule avec libéralité, et va désaltérer (le dieu) libéral, qui répand la nourriture avec abondance. Couple généreux de prêtres[1058], le pressoir aussi généreux, en faveur du libéral (Indra), exprime un abondant soma.

6. Généreuse aussi est ta foudre, généreux ton char, tes chevaux, tes armes. Généreux Indra, tu es le maître d’une généreuse ivresse. Sois heureux de notre abondant soma.

7. Au moment du combat, je viens avec la prière du sacrifice, et j’ose compter sur toi : car tu aimes nos louanges. Tu seras pour nous tel qu’un vaisseau (dans le naufrage). Daigne souvent entendre nos vœux ! Nous apportons nos libations à Indra comme à une source de richesses.

8. Éloigne-nous du mal, comme la vache, dans le pâturage, protége son nourrisson. Satacratou, puissions-nous être avec nos prières aussi fortunés que le taureau avec la vache qu’il féconde !

9. Ô Indra, que cette riche offrande attire tes bienfaits sur celui qui te chante ! Comble de tes biens ceux qui t’honorent ; ne les afflige pas en leur dérobant une partie de tes faveurs. Puissions-nous, avec force, chanter longtemps encore dans les sacrifices !


HYMNE IX.

À Indra, par Gritsamada.

(Mètres : Trichtoubh et Djagatî.)

1. Tels qu’Angiras, chantez les louanges du dieu dont les prouesses nouvelles sont aussi magnifiques que les anciennes, lorsque, enivré de notre soma, il rassure et délivre toutes les vaches (célestes) que la violence a rassemblées.

2. Qu’il soit encore pour nous tel qu’il fut pour son antique adorateur, dont il augmenta la grandeur et la force ! Qu’il soit le héros qui, dans les combats, lui a servi de cuirasse, et qui sur sa tête a courageusement soutenu le ciel !

3. Ainsi jadis tu as déployé ta puissante vigueur, quand, sollicité par la prière, tu as, en présence de ton serviteur dévoué, manifesté ta grandeur. Fuyant à la vue de ton char traîné par des coursiers azurés, les cruels Asouras se sont dispersés de tous côtés.

4. C’est lui qui, par sa force souveraine, a jadis fondé tous les mondes ; qui a porté la lumière par toute l’étendue du ciel et de la terre, et qui, dissipant les ténèbres, a repoussé leur funeste influence.

5. Il a, par la vigueur de son bras, abaissé ces montagnes (célestes) qui s’avançaient dans les airs[1059] et a fait couler leurs ondes dans la région inférieure. Il a raffermi la terre, qui soutient tout ; et, par sa puissante magie, a prévenu la chute du ciel.

6. Ses deux bras ont paré le monde ; en père (prévoyant), il l’a couvert de toute espèce de créatures ; pour son bonheur, il a, au milieu du bruit de sa foudre, frappé Crivi[1060], et l’a couché sur la terre.

7. Tel que la fille pieuse qui habite avec son père et sa mère, et attend d’eux la subsistance à laquelle son dévouement lui donne des droits, tel je viens te demander une part (dans tes bienfaits). Secours-moi, et, dans tes présents, n’aie d’autre mesure que celle de la forme immense sous laquelle tu nous apparais.

8. Indra, nous voulons t’invoquer comme notre défenseur ; Indra, tu nous donnes l’abondance pour fruit de nos travaux ; Indra, daigne varier pour nous tes bienfaits ; généreux Indra, accorde-nous la richesse.

9. Ô Indra, que cette riche offrande attire tes bienfaits sur celui qui te chante ! Comble de tes biens ceux qui t’honorent ; ne les afflige pas en leur dérobant une partie de tes faveurs. Puissions-nous, avec force, chanter longtemps encore dans les sacrifices !


HYMNE X.

À Indra, par Gritsamada.

(Mètre : Trichtoubh.)

1. Dès le matin, voilà qu’on attelle un char[1061] pur et nouveau ; il a quatre jougs[1062], trois fouets[1063], sept guides[1064], dix roues[1065]. Destiné au bonheur de l’homme, qu’il soit poussé par les vœux et les prières !

2. Que ce char soit préparé pour Indra une première, une seconde, une troisième fois[1066] ! Qu’il soit chargé des offrandes de Manou[1067] ! D’autres encore enfantent le nourrisson destiné à un autre (foyer). Ce (char), qui apporte l’abondance et la victoire, peut être attelé par d’autres que nous.

3. Avec les paroles d’une prière nouvelle, j’ai attelé au char d’Indra deux coursiers qui doivent le traîner. Que tous les autres sages qui te sacrifient n’aient pas, comme moi, le bonheur de te plaire !

4. Indra, viens avec deux chevaux, viens avec quatre, viens avec six. Écoute notre voix. Accours à notre soma avec huit, avec dix[1068] coursiers. (Dieu) libéral, cette libation est pour toi, ne trompe pas notre espoir !

5. Viens à nous avec vingt, avec trente coursiers ; attelle (à ton char) quarante chevaux. Indra, à cet excellent char mets cinquante, soixante, soixante-dix coursiers, et viens boire notre soma.

6. Viens à nous, traîné par quatre-vingts, quatre-vingt-dix, cent chevaux. Ce soma qui est dans nos coupes a été versé pour toi : tu peux t’enivrer de ce breuvage.

7. Indra, accours à ma prière ; attelle tous les chevaux au joug de ton char. Beaucoup de tes serviteurs doivent t’invoquer ; (dieu) invincible, préfère notre sacrifice.

8. Que mon amitié pour Indra ne soit point brisée ; que ses dons soient pour nous un lait (précieux) ! Sous la protection de son bras vaillant, au milieu de nos œuvres pieuses, puissions-nous être vainqueurs !

9. Ô Indra, que cette riche offrande attire tes bienfaits sur celui qui te chante ! Comble de tes dons ceux qui t’honorent ; ne les afflige pas en leur dérobant une partie de tes faveurs. Puissions-nous, avec force, chanter longtemps encore dans les sacrifices !


HYMNE XI.

À Indra, par Gritsamada.

(Mètre : Trichtoubh.)

1. De ces offrandes que présente un sage habile dans la pratique des libations, qu’Indra s’emplisse à satiété. C’est près de ce soma que jadis se plaisaient, que grandissaient et Indra et les saints personnages occupés de la chose sacrée.

2. Ivre de ce doux breuvage, Indra, la foudre à la main, a percé Ahi qui retenait les ondes ; et l’on a vu ces eaux, traversant les airs comme un oiseau, courir alimenter les fleuves.

3. Le grand Indra, en tuant Ahi, a ouvert la route de ces ondes vers l’Océan. Il a produit le soleil et retrouvé les vaches célestes ; de ce qui formait la nuit, il a fait ce qui convient au jour.

4. L’incomparable Indra a comblé Manou de ses bienfaits ; pour son serviteur il a tué Vritra. Les hommes, à l’envi l’un de l’autre, redemandaient le soleil : Indra les a tous satisfaits.

5. Étasa, généreux envers Indra, lui apportait de riches offrandes, et le traitait avec la libéralité qu’un père a pour son fils. Le dieu, reconnaissant de ses libations et de ses louanges, a fait obtenir à un mortel la victoire sur le Soleil[1069].

6. En faveur de Coutsa[1070], porté sur le même char que lui, le brillant Indra a frappé Souchna, Asoucha, Couyava[1071]. Pour plaire à Divodâsa[1072], il a brisé les quatre-vingt-dix-neuf villes de Sambara.

7. Ainsi nous voulons, Indra, célébrer tes louanges, et te présenter nos offrandes comme pour satisfaire ta faim. Puissions-nous obtenir ton amitié, qui est l’objet de nos désirs ! Puissions-nous voir émousser le trait de l’impie Asoura !

8. Invincible Indra, tels que le voyageur qui prépare ses provisions, les enfants de Gritsamada ont préparé cet hymne pour toi. Pour prix de leurs œuvres pieuses et de leurs louanges, que (tes serviteurs) obtiennent l’abondance, la force, la stabilité, le bonheur !

9. Ô Indra, que cette riche offrande attire tes bienfaits sur celui qui te chante ! Comble de tes dons ceux qui t’honorent ; ne les afflige pas en leur dérobant une partie de tes faveurs. Puissions-nous, avec force, chanter longtemps encore dans les sacrifices !


HYMNE XII.

À Indra, par Gritsamada.

(Mètre : Trichtoubh.)

1. Indra, nous t’apportons nos offrandes : daigne écouter nos vœux ! Ainsi, l’homme qui veut recueillir sa moisson se prépare un char. Nous (venons), brillants (des feux du sacrifice), la louange et la prière à la bouche, demander la faveur de ces dieux, aussi bons que toi.

2. Indra, tes secours protégent ceux qui, comme nous, te sont dévoués. Tu es le maître et le défenseur de tes serviteurs. Ton cœur est avec celui qui t’honore.

3. Indra, toujours jeune, (toujours) digne de nos invocations, est l’heureux ami et le gardien des hommes. Il accorde son secours à celui qui le loue, qui le prie, qui l’honore par des libations et des hymnes.

4. Ainsi je chante, je célèbre Indra, qui jadis a causé le salut (de ses amis) et la mort (de leurs adversaires). Qu’il écoute la prière du mortel qui l’implore aujourd’hui, et qu’il lui donne la richesse qu’il désire !

5. Indra a entendu la voix des Angiras ; sensible à leurs hommages, il a suivi leurs pas. Loué par eux, il a délivré les Aurores et le Soleil, et a dissipé l’obscurité dont Asna[1073] encombrait (le ciel).

6. Oui, que ce dieu célèbre, que cet Indra si renommé se lève en faveur de Manou ! Déployant sa force et sa vigueur, qu’il abaisse la tête du brigand, ennemi de ses serviteurs !

7. Qu’Indra, vainqueur de Vritra, brise ses villes au ventre noir, et fasse tomber (les ondes) prisonnières ; que, pour Manou, il devienne le père de la terre et des eaux ! Qu’il exauce les vœux de l’homme qui lui sacrifie !

8. Les Dévas ont donné la force à Indra, pour qu’il nous envoie l’eau. Si dans ses bras ils placent la foudre, c’est pour qu’il frappe les Dasyous, et qu’il brise leurs villes de fer[1074].

9. Ô Indra, que cette riche offrande attire tes bienfaits sur celui qui te chante ! Comble de tes dons ceux qui t’honorent ; ne les afflige pas en leur dérobant une partie de tes faveurs. Puissions-nous, avec force, chanter longtemps encore dans les sacrifices !


HYMNE XIII.

À Indra, par Gritsamada.

(Mètres : Trichtoubh et Djagatî.)

1. À l’adorable Indra, qui, toujours vainqueur, par droit de conquête possède tout, la richesse, le bonheur, les hommes, la terre, les chevaux, les vaches, les ondes, apportez l’heureux soma.

2. Au grand Indra, conquérant, généreux, invincible, vaillant et sage ; à cet admirable (Indra) qui porte victorieusement (le monde), et dont il est difficile de soutenir les atteintes, faites vos adorations.

3. Triomphant, il protége ses serviteurs ; guerrier, il attaque, il ébranle ses ennemis. Qu’il reçoive à son gré nos libations, lui qui peut combler nos vœux, manifester sa force, et défendre le peuple ! Je dois célébrer les hauts faits d’Indra.

4. Prompt à donner, généreux, il est le fléau de son ennemi. Grand et profond (en ses desseins), il possède une sagesse immense. Il peut envoyer le bonheur ou la mort. Ferme, étendu, digne de nos sacrifices, Indra a heureusement produit les Aurores.

5. Les Sages, enfants d’Ousidj, élevant la voix de la prière, ont, par le sacrifice, ouvert la route au (dieu) qui précipite les ondes. Assis près (du foyer sacré), chantant (les louanges) d’Indra et lui adressant leurs offrandes, ils ont obtenu les secours qu’ils réclamaient, et (recouvré) les vaches (célestes).

6. Indra, donne-nous les biens les plus précieux ; accumule sur nous l’abondance, la prospérité, l’ornement des richesses, l’accroissement de la famille, la douceur des chants (du sacrifice), et la sérénité des jours !


HYMNE XIV.

À Indra, par Gritsamada.

(Mètres : Achtî et Atisakwari.)

1. Pendant les tricadrous[1075], que le grand, que le resplendissant (Indra) vienne, à son gré, avec Vichnou, prendre nos offrandes d’orge et boire le soma ! Qu’il s’enivre de nos breuvages pour pouvoir accomplir sa grande œuvre, (ce dieu) vaste et grand ! Que cette sainte et divine liqueur s’unisse au saint et divin Indra !

2. Armé d’une force éclatante, qu’il combatte, et qu’il triomphe de Crivi, exalté par la puissance de (notre soma) ; qu’il remplisse le ciel et la terre ! Que ses flancs contiennent la meilleure part de (nos offrandes) ! Que cette sainte et divine liqueur s’unisse au saint et divin Indra !

3. Né avec la puissance, avec la force, tu veux notre bonheur ; ta vigueur grandit avec tes victoires ; (dieu) sage, (dieu) généreux, tu apportes à celui qui te loue l’objet de ses désirs. Que cette sainte et divine liqueur s’unisse au saint et divin Indra !

4. Ô Indra, danseur (céleste), elle est véritablement digne de louange, cette œuvre antique et solennelle que tu accomplis dans le ciel en faveur des hommes, quand, avec ta force divine, tu nous rends la vie en nous rendant les eaux ! Que la puissance d’Indra triomphe de tous les impies ! Que Satacratou accepte nos libations et nos offrandes !


HYMNE XV.

À Indra, par Gritsamada.

(Mètres : Trichtoubh et Djagatî.)

1. Nous invoquons le prince des troupes (divines), le sage des sages, le (dieu) le plus chargé d’offrandes, le plus grand des rois, le maître des choses sacrées. Viens t’asseoir dans ton foyer, et (prouve) par ta protection que tu nous as entendus.

2. Ô maître du sacrifice (Vrihaspati), ô toi qui donnes la vie, les dieux sages ont obtenu par toi la part qui leur revient dans les sacrifices. Comme le soleil par sa lumière enfante les rayons, toi, tu es le noble père de toutes les œuvres saintes.

3. Détruisant le mal et les ténèbres, tu montes sur le char brillant du sacrifice, ô Vrihaspati ; (sur ce char) redoutable qui triomphe de tes ennemis, qui tue les Rakchasas, fend les nuages, et apporte le bonheur.

4. Tu conduis dans une bonne voie, tu sauves le peuple qui t’honore, et que le mal ne saurait atteindre. Ô Vrihaspati, tu accables l’impie, tu anéantis les menaces de sa colère : tel est le privilége de ta grandeur.

5. Jamais le mal ni la douleur n’attaquent ce (peuple) ; jamais les ennemis ni les hommes à double langage ne l’oppriment. Tu détruis, ô maître de la chose sacrée, tous les adversaires de la nation dont tu es le généreux gardien.

6. Tu es notre pasteur et notre guide, (dieu) prudent, et en ton honneur nous faisons entendre des prières et des hymnes. Ô Vrihaspati, toi qui nous défends contre nos ennemis, fais qu’ils soient victimes de leur propre malice !

7. Le brigand effronté, le mortel plein de haine qui vient nous attaquer, malgré notre innocence, ô Vrihaspati, éloigne-le de notre route ; et, en faveur de ce sacrifice, assure la sécurité de notre marche !

8. (Dieu) sauveur, nous t’invoquons comme le protecteur de notre race, notre défenseur, notre ami. Ô Vrihaspati, repousse les contempteurs des dieux ; que nos ennemis n’obtiennent aucun succès !

9. Ô maître de la chose sacrée, puissions-nous, par ta bienfaisante faveur, obtenir les biens qui font l’envie des mortels ! Détruis ces impies qui, de loin ou de près, nous poursuivent de leur haine.

10. Ô Vrihaspati, avec un compagnon aussi généreux que toi, nous sommes sûrs d’avoir toujours l’abondance. Que le méchant, qui aspire à la victoire, ne devienne pas notre maître. Par l’effet de nos prières, puissions-nous jouir d’une bonne renommée et du triomphe !

11. Ô maître de la chose sacrée, tu es prompt à donner, généreux, ardent au combat, courageux assaillant, vainqueur intrépide ; tu es juste, et débiteur équitable. Tu abats l’homme violent et superbe.

12. Un (mortel) impie, qui attaque notre gloire, terrible, orgueilleux, désire notre perte. Vrihaspati, que son trait n’arrive pas jusqu’à nous ! Brisons la fureur de ce méchant que sa force enorgueillit.

13. On t’implore dans les combats, et tu mérites les hommages qu’on t’adresse. Tu vas au milieu de la mêlée, et tu donnes les dépouilles (de tes ennemis). Que Vrihaspati, comme un char destructeur, passe sur les armées de notre adversaire, qui comptait sur la victoire.

14. Fais sentir l’ardeur de tes rayons aigus à ces Rakchasas qui ont osé mettre en doute ta force triomphante. Prouve la vérité de nos chants ; ô Vrihaspati, tue l’insolence de tes censeurs !

15. Ô Vrihaspati, enfant du sacrifice, donne-nous cette abondante opulence, dont un maître de maison[1076] puisse se faire honneur, qui, parmi le peuple, se recommande par son éclat et sa grandeur, et qui se distingue par sa force !

16. Ne nous livre pas à ces brigands, à ces ennemis malfaisants, qui, tapis dans leurs repaires, guettent le moment de saisir leur proie. Vrihaspati, au fond du cœur ils convoitent l’offrande réservée aux dieux. Qu’ils apprennent qu’il n’est rien de supérieur à toi.

17. Le sage créateur[1077] de l’univers t’a enfanté pour envelopper tous les mondes. Le maître de la chose sacrée aime à contracter des dettes envers (le père de famille) qui allume le feu divin ; il s’acquitte avec son créancier, quand il donne la mort à Vritra.

18. Ô Angiras[1078], pour ta gloire est survenu le nuage, quand tu as ouvert la prison qui renfermait les vaches (célestes). Vrihaspati, associé à Indra, tu as fendu cette mer d’ondes (salutaires) que couvraient de noires ténèbres.

19. Ô maître de la chose sacrée, toi qui conduis ce (monde), entends mon hymne, et prends ma race sous ta protection ! Qu’il soit fortuné pour nous, ce saint appareil que chérissent les dieux ! Pères d’une heureuse lignée, puissions-nous chanter longtemps encore dans les sacrifices !




LECTURE SEPTIÈME.

HYMNE I.

À Indra et à Brahmanaspati[1079], par Gritsamada.

(Mètres : Trichtoubh et Djagatî.)

1. Maître (du monde), reçois cette offrande. Nous voulons t’honorer par un hymne nouveau et solennel. Un de tes amis, ô Vrihaspati, en versant la libation et (en l’invoquant) pour nous, commence cet éloge. Daigne exaucer notre prière.

2. Celui qui par sa force a abattu les insolents Rakchasas ; qui dans sa colère a déchiré les nuages ; qui a fait avancer la masse immobile (des eaux), et a pénétré au sein de la montagne où étaient cachés des trésors, c’est le maître de la chose sacrée.

3. Cette œuvre devait être celle du plus grand des dieux. Par lui la force a été brisée, la vigueur est devenue mollesse ; il a délivré les vaches célestes ; par la vertu du sacrifice il a frappé Bala, dissipé les ténèbres et montré la lumière.

4. Le maître de la chose sacrée a ouvert par sa puissance ce (nuage) étendu, dont la force semblait dure comme la pierre, et qui renfermait le miel (de l’abondance). Tous les brillants (Marouts)[1080] ont bu cette onde, et l’ont en même temps répandue (sur la terre).

5. Ces mondes éternels ouvrent pour vous leurs portes aux mois et aux années. (Le Jour et la Nuit) se suivent sans interruption. Voilà les œuvres utiles du maître de la chose sacrée.

6. Les Panis avaient amassé et caché dans leur caverne un riche trésor : les sages (Angiras), connaissant leur injustice, se sont rendus à l’endroit (où la victoire les attendait), et ils en sont revenus maîtres de précieuses dépouilles[1081].

7. Oui, ces justes avaient vu l’injustice ; ils ont pris le grand chemin (du sacrifice) ; le feu a été soufflé, et les sages (Angiras) ont, de leurs mains, placé dans son foyer (le dieu) dont on ne soupçonnait pas l’existence.

8. Le maître de la chose sainte porte un arc, dont le sacrifice est la corde : il lance ses traits rapides partout où il veut. Les (Prières) ses épouses sont comme les flèches dont il perce les Rakchasas, et qui, placées sous l’œil de l’habile (archer), attendent le long de son oreille l’ordre du départ[1082].

9. Le maître de la chose sacrée mérite nos louanges ; il est notre compagnon, notre guide, notre pontife. Il combat avec nous. Lorsqu’en sa qualité de sacrificateur il reçoit et porte les offrandes avec les prières, le Soleil s’échauffe des feux du sacrifice.

10. Vrihaspati donne la pluie, et ses présents sont les plus beaux, les plus grands qu’on puisse obtenir. Ces dons du plus aimable, du plus opulent (des dieux) font le bonheur des prêtres, des pères de famille, de tout le peuple.

11. Le maître de la chose sainte, dans son séjour inférieur, s’étend avec force de tous côtés, et il aime à soutenir la fortune des grands. Dieu, il s’élève vers les dieux, et protége au loin tous les êtres.

12. Tous nos hommages s’adressent à toi et à Maghavan. Les ondes (et tous les autres êtres) ne sauraient entraver vos œuvres. Ô Indra et Brahmanaspati, venez tous deux avec une égale rapidité, à nos offrandes et à nos holocaustes !

13. Les dociles coursiers nous ont entendus. Le sage, accoutumé à nos cérémonies, offre nos prières et nos libations. Ennemi des Rakchasas, cède à ton désir, et viens ici contracter une dette, ô maître de la chose sacrée, que ces mortels assemblés honorent par leurs présents.

14. Le maître de la chose sacrée a reçu de nous, suivant son désir, de justes hommages. Ces (dieux) réunis feront de grandes œuvres. C’est lui qui a délivré les vaches (célestes), et qui les a précipitées du ciel. C’est sa puissance qui a brisé (le nuage), et l’a lancé comme un large torrent.

15. Ô maître de la chose sacrée, puissions-nous chaque jour posséder une heureuse et abondante opulence ! Donne à des héros des héros pour enfants, (dieu) puissant, et reçois mon invocation et mon offrande !

16. Ô maître de la chose divine, toi qui conduis ce (monde), entends mon hymne, et prends ma race sous ta protection ! Qu’il soit fortuné pour nous, ce saint appareil que chérissent les dieux ! Pères d’une heureuse lignée, puissions-nous chanter longtemps encore dans les sacrifices !


HYMNE II.

À Brahmanaspati, par Gritsamada.

(Mètre : Djagatî.)

1. L’homme qui allume le feu sacré, et qui accomplit les saintes pratiques, perdra ceux qui veulent sa perte. L’homme qui offre l’holocauste prendra de rapides accroissements. Il verra son fils lui donner des petits-fils, celui que le maître de la chose sacrée regarde comme son ami.

2. Avec ses gens il perdra les gens qui veulent sa perte. Il verra croître la fécondité de ses vaches, et connaîtra tous les biens. Il verra se multiplier ses fils et ses petits-fils, celui que le maître de la chose sacrée regarde comme son ami.

3. La digue a plus de force que le fleuve, l’homme plus que l’eunuque, le mortel pieux plus que ses ennemis. Agni donne plus de vigueur à l’action de celui que le maître de la chose sacrée regarde comme son ami.

4. Les (ondes) célestes se détachent (du nuage) pour lui. Parmi ceux qui honorent (les dieux), il est toujours le premier pour ses vaches. Il possède une force indomptable et triomphe par sa puissance, celui que le maître de la chose sacrée regarde comme son ami.

5. Pour lui coulent toutes les ondes ; en lui se concentrent des biens aussi nombreux que durables. Heureux sous la protection des dieux, il croît en prospérité, celui que le maître de la chose sacrée regarde comme son ami.


HYMNE III.

À Brahmanaspati, par Gritsamada.

(Mètre : Djagatî.)

1. Le chantre (des dieux) perdra ceux qui veulent le perdre. L’homme pieux triomphera de l’impie. L’observateur (des saintes pratiques) vaincra sur le champ de bataille le héros invincible. Le bon serviteur recueillera la dépouille du méchant.

2. Homme, sacrifie, et préviens tes ennemis. Prépare-toi un triomphe sur tes adversaires. Offre l’holocauste pour t’assurer une heureuse fortune. Nous invoquons le secours du maître de la chose sacrée.

3. Il se trouve dans l’abondance de tous les biens avec ses gens, son peuple, sa famille, ses enfants, ses guerriers, celui qui, plein de foi, honore avec l’holocauste le père des dieux, le maître de la chose sacrée.

4. Le maître de la chose sacrée conduit dans une heureuse voie l’homme qui veut lui plaire par ses libations de beurre. Il le délivre du mal ; il le protége contre le méchant et l’assassin. Pour lui il est un (dieu) généreux et admirable.


HYMNE IV.

Aux Adityas, par Courma, fils de Gritsamada.

(Mètre : Trichtoubh.)

1. La coupe (sacrée à la main), je présente aux royaux Adityas cette prière, accompagnée de libations de beurre. Écoutez-nous, Mitra, Aryaman, Bhaga, Varouna, Dakcha[1083], Ansa, (divinité) multiple.

2. Que Mitra, Aryaman, Varouna, attachés à la même œuvre, accueillent aujourd’hui cet hymne, Adityas brillants, purifiés par l’onde sacrée), saints, irréprochables, invincibles.

3. Ces Adityas grands, profonds, indomptables, ardents au combat, couverts d’yeux innombrables, voient, au milieu du monde, et le bien et le mal. Leur brillante royauté sait, de sa hauteur, se rapprocher de nous.

4. Ces divins Adityas, gardiens du monde entier, soutiennent tous les êtres animés et inanimés ; pleins de grandes pensées, conservant l’esprit vital, et débiteurs équitables (envers les mortels).

5. Ô Adityas, faites que je connaisse votre secours : qu’il me seconde merveilleusement dans la crainte que m’inspirent les Rakchasas ! Ô Aryaman, Mitra et Varouna, sous votre direction que j’évite le malheur, comme (on évite) des fossés (dangereux) !

6. Ô Aryaman, Mitra et Varouna, la route que vous ouvrez est bonne, agréable, sans épines. Ô Adityas, menez-nous par cette route, et prêtez-nous un secours tout-puissant !

7. Qu’Aditi, qui a pour fils ces royaux (Adityas), éloigne nos ennemis ; qu’Aryaman (nous conduise) par d’heureux chemins. Puissions-nous compter sur la grande protection de Mitra et de Varouna ! puissions-nous avoir des compagnons courageux, et rester invincibles !

8. Ils contiennent les trois mondes[1084], les trois atmosphères[1085], les trois œuvres[1086] saintes. Avec le sacrifice, ô Adityas, votre gloire est grande ; elle est éclatante, ô Aryaman, Varouna et Mitra !

9. En faveur du mortel juste ils soutiennent les trois feux divins, et brillent de l’éclat de l’or, purifiés par l’onde (sacrée), invincibles, chantés par la piété ; leur œil toujours ouvert ne succombe jamais au sommeil.

10. Ô Varouna, ô toi qui donnes la vie[1087], tu es roi des dieux et des mortels. Accorde-nous de voir la lumière pendant cent automnes. Que notre vie soit heureuse et pleine !

11. (En ce moment) je ne distingue rien[1088], ni le midi, ni le septentrion, ni l’orient, ni l’occident. Ô (dieux) qui constituez (le monde), est-ce donc l’imprudence ou la sagesse qui préside à vos conseils ? Que je sois rassuré par la lumière.

12. L’homme qui honore les royaux (Adityas), chefs du sacrifice, voit sans cesse augmenter sa fortune. Il va, riche et renommé, porté sur un char, répandant ses largesses, et vanté dans les sacrifices.

13. Brillant et invincible, possesseur de gras pâturages et d’abondantes récoltes, entouré d’une belle famille, il est favorisé de pluies heureuses. Il n’a à craindre ses ennemis ni de loin ni de près, celui que les Adityas daignent diriger.

14. Ô Aditi, ô Mitra et Varouna, pardonnez-nous les fautes que nous avons pu commettre ! Pour prix de nos offrandes, Indra, donne-nous la jouissance d’une lumière tranquille : épargne-nous les longues et mortelles nuits !

15. Le ciel et la terre s’entendent pour combler de biens votre serviteur. La pluie tombe pour lui du haut des airs, et augmente sa prospérité. Il va, dans les combats, conquérant deux heureuses demeures, qui lui sont également assurées[1089].

16. Ô Adityas dignes de nos hommages, puissé-je, comme un écuyer sur son char, passer à travers les embûches magiques que tend votre ennemi, à travers ces chaînes que prépare sa haine ! Que (des dieux) invincibles comme vous nous prennent sous leur vaste protection !

17. Ô royal Varouna, que je n’aie point à déplorer la perte d’un ami, d’un parent tel que toi riche et magnifique, ni la funeste ruine de ma fortune ! Pères d’une heureuse lignée, puissions-nous chanter longtemps encore dans les sacrifices !


HYMNE V.

À Varouna, par Courma.

(Mètre : Trichtoubh.)

1. Mon hommage s’adresse au sage et puissant Aditya, qui par sa grandeur s’élève au-dessus de tous les êtres, à ce dieu qui fait la joie de son adorateur. Je veux chanter la gloire de l’illustre Varouna.

2. Ô Varouna, puissions-nous être heureux de te servir, de te prier, de te louer ! Chaque jour, au lever des fécondes Aurores, nous te chantons, allumant en ton honneur les feux d’Agni.

3. Ô Varouna, toi qui es notre guide, nous nous plaçons sous la protection d’un (dieu) qui est entouré de tant de puissance et orné de tant de louanges. Fils d’Aditi, dieux invincibles, ayez pitié de vos amis.

4. Déjà de tout côté l’Aditya, soutien (du monde), a fait naître le feu du sacrifice ; en l’honneur de Varouna s’épandent les libations. Sans fatigue, sans relâche, elles coulent, et vont rapidement, comme pour le nourrir, au sein du (dieu) qui tourne autour (de la terre)[1090].

5. Délivre-moi des liens du mal. Ô Varouna, puissions-nous recueillir le fruit de notre sacrifice ! Que cette toile qu’a tissue la prière ne soit pas déchirée ! Que le résultat de nos œuvres passées ne se trouve pas perdu !

6. Ô Varouna, ô roi juste, éloigne ma crainte, et traite-moi avec faveur ! Délivre-moi du mal, comme (on délivre la vache) de son veau. Personne ne saurait te faire baisser les yeux.

7. Varouna, toi qui donnes la vie, ne m’accable pas de ces traits destinés à l’impie. Ne nous laisse pas aller jusqu’aux frontières extrêmes de la lumière. Assure notre vie en brisant nos ennemis.

8. Ô Varouna, toi qui si souvent as manifesté ta puissance, nous t’avons jadis adressé nos hommages ; nous venons encore te les adresser. (Dieu) invincible, nos œuvres s’appuient sur toi comme sur un roc solide.

9. Acquitte les dettes que tu as contractées avec moi. Ô roi, je ne demande pas le fruit de ce qu’un autre a pu faire ! Ô Varouna, bien des aurores doivent encore se lever, pour lesquelles je te prie de nous conserver !

10. Ô royal Varouna, qu’un parent ou un ami ait pu m’épouvanter en songe ; qu’un brigand, qu’un malfaiteur ait le dessein de me nuire, protége-moi contre eux !

11. Ô royal Varouna, que je n’aie point à déplorer la perte d’un ami, d’un parent, tel que toi riche et magnifique, ni la funeste ruine de ma fortune ! Pères d’une heureuse lignée, puissions-nous chanter longtemps encore dans les sacrifices !


HYMNE VI.

Aux Viswadévas, par Courma.

(Mètre : Trichtoubh.)

1. Rapides Adityas, qui êtes fermes dans vos œuvres, éloignez de moi le mal, comme la malheureuse mère éloigne d’elle son fruit illégitime. Varouna et Mitra, et vous, dieux, qui m’entendez, je vous appelle à mon secours ; c’est à vous qu’un sage demande le bonheur.

2. Dieux secourables, vous êtes la sagesse et la force mêmes : faites disparaître nos ennemis ; soyez, et aujourd’hui et dans la suite, pleins de bonté et de pitié pour nous.

3. Ô Vasous, que ne pouvons-nous pas, aidés aujourd’hui de votre secours, et sûrs à jamais de ce même secours ? Ô Mitra et Varouna, ô Aditi, Indra, et vous, Marouts, accordez-nous votre bénédiction !

4. Ô dieux, qui êtes nos amis, écoutez favorablement mon invocation : que votre char arrive promptement à notre sacrifice ; que nous trouvions les autres dieux fidèles, comme vous, dans leur amitié !

5. Je suis sans doute coupable envers vous de bien des fautes ; mais vous m’aimez comme un père aime (le fils) qu’il a perdu. Ô dieux, loin de moi les chaînes et les maux ! Ne faites pas de moi ce que (le chasseur) fait d’un oiseau qu’il livre à un enfant.

6. Venez aujourd’hui, dieux adorables ; je suis tremblant de crainte : que votre bonté me rassure. Sauvez-nous de la méchanceté du brigand ; sauvez-nous de ses atteintes cruelles. Venez, et soyez honorés !

7. Ô royal Varouna, que je n’aie point à déplorer la perte d’un ami, d’un parent, tel que toi riche et magnifique, ni la funeste ruine de ma fortune ! Pères d’une heureuse lignée, puissions-nous chanter longtemps encore dans les sacrifices !


HYMNE VII.

À Indra et autres, par Gritsamada.

(Mètre : Trichtoubh.)

1. En l’honneur de Savitri, auteur de la lumière ; en l’honneur d’Indra, vainqueur d’Ahi, les ondes (du sacrifice) coulent sans relâche. Chaque jour voit ce torrent se renouveler. (Qui sait) à quelle époque il a commencé ?

2. En faveur du sage qui apporte ici une offrande pour obtenir (l’eau) de Vritra, Aditi dit à son fils : « Les ondes rapides, qui se creusent une voie, doivent chaque jour, pour ce mortel, couler heureusement. »

3. (Vritra) s’élève et s’arrête dans l’air ; (Indra) prend sa foudre pour lui donner la mort. (L’ennemi) vêtu du nuage s’est avancé, et Indra, de ses traits aigus, l’a percé.

4. Ô Vrihaspati, ta foudre brûlante a consumé les forces de l’Asoura, qui tenait le nuage fermé. De ton (arme) victorieuse tu as frappé jadis cet (Asoura), ô Indra ; frappe également notre ennemi.

5. Envoie du haut du ciel cette foudre dont tu as, excité par nos chants, terrassé ton rival. Augmente, ô Indra, le nombre de nos enfants, le nombre de nos troupeaux.

6. Certes, vous pouvez faire la fortune de celui dont vous approuvez le sacrifice. Par l’espoir de vos bienfaits, vous engagez votre dévot serviteur, ô Indra et Soma ! Protégez-nous donc, et donnez-nous la sécurité au milieu de nos craintes.

7. (Indra) n’est point capable de nous accabler de travaux, de fatigues, de vexations. (Il ne nous contraindra jamais) à dire : « Abstenez-vous de lui offrir le soma ! » mais il me préviendra de ses secours, de ses présents, de ses bontés ; il me donnera des troupeaux de vaches pour prix de nos libations.

8. Ô Saraswatî, sauve-nous ! Unie aux Marouts, tu peux victorieusement repousser nos ennemis. Indra a donné la mort à ce chef de brigands qui osait l’insulter, et s’avançait avec l’apparence de la force.

9. Ô Vrihaspati, surveille l’ennemi caché qui veut notre mort, et perce-le d’un trait aigu. Tu as des armes contre ceux qui nous attaquent ; ô roi, environne-les de tes (feux) meurtriers !

10. Ô héros, accomplis avec les héros qui nous appartiennent les œuvres merveilleuses dont tu es capable ! (Nos ennemis) sont depuis longtemps éblouis par les fumées (de l’orgueil). Donne-leur la mort, et que leurs dépouilles soient à nous.

11. Avec des libations et des chants, j’implore votre puissance, ô Marouts, ô race divine ! Puissions-nous obtenir une fortune soutenue par une vaillante race de fils et de guerriers, (une fortune) de plus en plus mémorable !


HYMNE VIII.

Aux Viswadévas, par Gritsamada.

(Mètres : Trichtoubh et Djagatî.)

1. Ô Mitra et Varouna, accourez vers notre char[1091], et unissez-vous aux (autres) Adityas, aux Roudras, aux Vasous. Venez avec l’empressement de l’oiseau sauvage, que la faim attire près de nos habitations.

2. Ô dieux, accourez tous de concert vers ce char qu’en présence du peuple nous chargeons de présents, au moment où les rayons (de nos libations), prenant leur essor, vont dans l’air se rencontrer, sur les hauteurs de la terre, avec les rayons (du soleil).

3. Que le sage Indra, honoré par nos sacrifices, (vienne) du ciel avec la troupe des Marouts. Qu’il monte sur ce char avec ces heureux auxiliaires, pour répandre sur nous ses abondantes faveurs.

4. Que le dieu amour de la terre, que Twachtri vienne avec ses épouses goûter les joies (du sacrifice), et précipiter la marche de ce char. (Qu’il soit dans cette œuvre secondé par) Ilâ, Bhaga, le Ciel et la Terre entourés de tant d’éclat, Poûchan aux sages pensées, et les puissants Aswins.

5. (Venez) aussi pousser notre char, heureuses et divines jumelles, Aurore et Nuit, qui donnez le mouvement à tous les êtres animés. Je vous chante, ainsi que la Terre ; et avec mon hymne je vous présente la triple offrande de la prière, des mets sacrés et du soma.

6. Pour vous, nous voulons chanter un hymne tel que celui des (anciens) Ousidjs[1092]. Qu’Ahirboudhnya[1093], Adja[1094], Ecapâd[1095], Trita[1096], Ribhoukchâs[1097], Savitri, reçoivent nos offrandes. Que le fils des Ondes (sacrées)[1098], à la marche rapide, prenne plaisir à notre prière.

7. (Dieux) adorables, tels sont les souhaits que je forme ; les enfants d’Ayou les expriment dans un hymne composé en votre honneur. Ils désirent l’abondance et la force. Tels qu’un coursier emporte un char, que les dieux aussi emportent nos vœux (pour les exaucer) !


HYMNE IX.

Aux Viswadévas, par Gritsamada.

(Mètres : Anouchtoubh et Djagatî.)

1. Ô Ciel et Terre, je vous honore par cette prière : protégez le serviteur qui vous implore ! (Dieux), objets de tant de louanges, un enfant d’Ayou, l’offrande à la main, accumule ici pour vous les présents.

2. Garde-nous chaque jour contre les attaques secrètes d’un mortel (dangereux, ô Indra) ! Ne nous abandonne pas au milieu de nos traverses ; ne nous prive pas de nos amis. Sois toi-même uni à nous par ce lien d’amitié. Nous venons à toi, te demandant le bonheur.

3. Sois clément pour nous, et amène la vache (céleste), bienfaisante et grasse, partageant ses membres entre nous. Ô (dieu) partout invoqué, je t’implore, toi qui marches rapidement, et dont nos voix pressent le pas.

4. J’adresse également l’hommage de ma prière à l’adorable Râcâ[1099]. Écoute-nous, heureuse (déesse), et sois sensible à nos vœux. Que l’aiguille avec laquelle tu couds notre vêtement d’honneur, n’aille point se briser. Fais que nous ayons pour rejeton un héros généreux et digne d’être chanté.

5. Ô belle Râcâ, viens aujourd’hui à nous avec toutes ces faveurs, tous ces présents que tu réserves à ton favori ! Que ta bonté, heureuse (déesse), se manifeste à nous par mille bienfaits.

6. Ô Sinîvâlî[1100], toi dont le sein est destiné à grossir, et qui es la sœur des dieux, accepte notre holocauste, et donne-nous, ô déesse, une race (fortunée) !

7. À cette (déesse) aux beaux bras, aux doigts charmants, mère féconde de biens innombrables, à Sinîvâlî, protectrice du peuple, offrez l’holocauste.

8. J’invoque Goungoû[1101], Sinîvâlî, Râcâ ; j’appelle à mon secours Indrânî[1102] ; je demande la bénédiction de Varounânî[1103].


HYMNE X.

À Roudra, par Gritsamada.

(Mètre : Trichtoubh.)

1. Ô père des Marouts, viens prendre notre offrande. Ne nous prive pas de la vue du soleil. Que l’homme qui nous attaque te trouve pour adversaire. Ô Roudra, que notre race se multiplie !

2. Que les plantes salutaires données par toi, ô Roudra, prolongent mes jours jusqu’à cent hivers ! Repousse loin de nous les méchants, les fautes, et les diverses maladies si variées.

3. Ô Roudra, tu es, par ta richesse, le premier des êtres, le fort des forts. Ta main est armée de la foudre. Tu nous fais traverser heureusement le fleuve du mal. Préserve-nous des atteintes du méchant.

4. Ô Roudra, nous ne voulons pas t’indisposer par des hommages (imparfaits), par des hymnes inconvenants, par un partage (indiscret) de nos invocations. Donne, par le moyen des plantes (salutaires), la force à nos guerriers. Tu es, en effet, le médecin des médecins.

5. J’invoque Roudra, qui se plaît à recevoir nos holocaustes et nos louanges. Charmé de nos libations et de nos hymnes, que ce (dieu) beau et fort accueille notre prière.

6. Que (ce dieu) bienfaisant, uni aux Marouts, exauce les vœux que je lui adresse en même temps que ces brillantes offrandes. Je veux honorer Roudra ; et, de même que l’homme brûlé par le soleil se réfugie à l’ombre, de même je viens, fort de mon innocence, me mettre à l’abri de votre protection.

7. Qu’est devenue, ô Roudra, cette main bienfaisante et légère dont tu guéris (les maux humains) ? Tu effaces les torts causés par les autres dieux : généreux (défenseur), sois clément pour moi.

8. Au (dieu) protecteur, libéral, et qui se revêt de couleurs blanches, j’adresse cet hymne solennel. Pénétrés d’une profonde vénération, nous chantons l’éclatante et adorable puissance de Roudra.

9. Roudra, terrible à la fois et bienfaisant, apparaît, multipliant les formes de ses membres d’or, solides et brillants. L’esprit vital est inhérent à ce (dieu), maître du monde qu’il soutient.

10. Avec une majesté digne de toi tu portes un arc et des flèches, un adorable collier orné diversement ; tu protéges avec honneur tout ce vaste univers. Ô Roudra, personne n’est plus puissant que toi.

11. Chante donc ce (dieu) jeune et renommé, porté sur un char (brillant), fléau (de ses ennemis), terrible et redoutable comme le lion. Ô Roudra, favorise le chantre qui te loue ! Que tes compagnons exterminent tout autre que nous.

12. Je m’approche de toi, ô Roudra, et je te salue avec le respect qu’un jeune fils a pour son père. Je célèbre le (dieu) magnifique et maître de la piété. Pour prix de nos éloges, accorde-nous des plantes salutaires.

13. Ô bienfaisants Marouts, ces plantes qui viennent de vous, pures, salutaires, merveilleuses, (ces plantes) que Manou notre père a préférées, je les demande pour nous à l’heureux Roudra.

14. Que le trait de Roudra nous épargne. Que la fureur de ce (dieu) brillant aille s’exercer ailleurs. Sois généreux pour nous, comble-nous de biens solides, et protége notre race.

15. Dieu fort, libéral et prudent, retiens ta colère et tes coups. Écoute notre invocation, ô Roudra ! sois sensible à nos hommages. Pères d’une heureuse lignée, puissions-nous chanter longtemps encore dans le sacrifice !


HYMNE XI.

Aux Viswadévas, par Gritsamada.

(Mètres : Anouchtoubh et Djagatî.)

1. Les Marouts amènent la pluie ; et, doués d’une force victorieuse, aussi redoutables que des lions, adorables pour leur puissance, brillants de vives clartés, amis des libations, ils soufflent la tempête, et poussent les vaches (célestes).

2. De même que les airs s’animent du feu des étoiles, ces terribles (combattants), qui lancent la pluie, s’illuminent du feu des éclairs. Ô Marouts ornés d’un collier d’or, Roudra vous a enfantés dans le sein brillant et fécond de Prisni[1104].

3. Ils lancent leurs rapides coursiers, qui semblent se couvrir d’écume, et ils se précipitent par les brèches qu’ils font au (nuage) retentissant. Ô Marouts à la face dorée, pressez vos daims légers, et venez, d’un concert unanime, recueillir nos offrandes.

4. En échange de ces offrandes, ils nous apportent les trésors des mondes (supérieurs), prodiguant à leur ami tous leurs bienfaits et leurs constantes faveurs, dirigeant (vers lui) sans hésitation leurs daims rapides, et chargés du fardeau des biens qu’ils répandent.

5. Ô Marouts, animés tous d’un même esprit, et armés de traits resplendissants, (venez) avec ces vaches brillantes qui frémissent sous le bruit (du tonnerre) ; et, suivant une heureuse voie, accourez à nos enivrantes libations comme les cygnes à leurs lacs favoris.

6. Ô Marouts, remplis des mêmes sentiments, venez à nos offrandes avec un zèle égal à celui qui nous amène à l’hymne du sacrifice. De même que vous remplissez la mamelle de la vache céleste, de même rendez la prière féconde pour votre chantre.

7. Ô Marouts, faites que le char de ce sacrifice suive chaque jour une heureuse carrière. Donnez l’abondance à vos chantres ; (donnez) au maître de maison la richesse, la prudence, le bonheur et la force invincible.

8. Quand les Marouts, parés de leurs colliers d’or, attellent leurs coursiers à leur char, et se disposent à répandre leurs trésors, comme la vache dans le pâturage donne son lait à son nourrisson, ils versent leurs bienfaits sur le peuple qui offre l’holocauste.

9. Ô Marouts, qui pouvez consolider (notre bonheur), défendez-nous contre le mortel dangereux qui médite notre perte ! Ô Roudras, percez-le de votre trait brûlant ; détruisez l’arme de ce perfide !

10. Ô Marouts, telle est votre puissance, telle est votre bonté, lorsque, en faveur de vos amis, vous pressez la mamelle de Prisni[1105] ; ou bien lorsque vous (venez), invincibles fils de Roudra, venger Trita[1106] qui vous invoque, et perdre les ennemis qui l’outragent.

11. Pleins de confiance dans la vertu de nos libations, nous vous invoquons, grands et puissants Marouts. Élevant la coupe (des offrandes) et chantant vos louanges, nous venons demander les nobles faveurs de ces (dieux) à la face dorée et au cœur généreux.

12. Les Angiras[1107] les premiers, ont offert le sacrifice. Que les (Marouts)[1108] viennent à nous avec l’Aurore. Voilà que l’Aurore, de ses lueurs rougeâtres, repousse la Nuit, et précède l’astre éclatant qu’entoure la troupe des vaches (célestes).

13. Les Roudras, parés de leurs ornements rougeâtres et retentissants, s’étendent au milieu des régions lumineuses. Avec une force rapide, ils pénètrent au sein des nuages, et s’y revêtent d’une forme magnifiquement brillante.

14. Ils sont nos protecteurs ; nous venons leur apporter nos hommages et réclamer leurs secours. Ceux que Trita appelait autrefois sous le nom des cinq sacrificateurs[1109], je les presse également d’accourir à notre aide.

15. Ô Marouts, cette protection qui fait passer votre serviteur à travers le fleuve du mal, qui le délivre des atteintes de son ennemi, qu’elle descende vers nous ; que votre faveur devienne pour nous comme une vache nourricière !


HYMNE XII.

À Agni (appelé l’enfant des Ondes)[1110], par Gritsamada.

(Mètre : Trichtoubh.)

1. Je me présente avec des offrandes et des hymnes. Qu’il reçoive et mes libations et mes prières, ce fils des Ondes (sacrées), qui se plaît au bruit de nos fêtes et dont la marche est si rapide, et qu’il nous accorde le bonheur et la beauté !

2. Nous voulons lui adresser cette prière, qui est bien l’œuvre de notre cœur : qu’il daigne l’écouter. L’enfant des Ondes (sacrées), par sa grandeur et sa force vitale, a donné naissance à tous les mondes dont il est le maître.

3. Parmi les Ondes, les unes vont avec lui, les autres viennent à lui : toutes le traitent comme le feu Oûrva[1111]. Les Ondes pures environnent leur enfant, pur comme elles, et brillant avec éclat.

4. Les Ondes, jeunes et respectueuses, viennent l’honorer comme le jeune (héritier du trône). Le voilà : richement orné de ses aigrettes éclatantes, il resplendit à nos yeux ; ou bien il attend, pour se manifester, la libation du beurre sacré.

5. À ce dieu clément trois déesses[1112] offrent la nourriture. Elles se présentent à lui avec les libations, et il est allaité par des Ondes nouvellement nées[1113].

6. Telle est la naissance de ce (dieu), connu par sa rapidité[1114]. Qu’il défende les seigneurs contre l’ennemi qui prétend attaquer leur félicité. Jamais l’avarice ni l’impiété ne peuvent se flatter d’obtenir la faveur de l’invincible (Agni) par de mesquines offrandes.

7. Le (dieu) accepte et fait fructifier une pieuse offrande ; il a toujours dans sa demeure une vache féconde, dont il nous donne le lait. Cet enfant des Ondes (sacrées) agit avec puissance, et brille, au milieu des Ondes mêmes, pour le bonheur du serviteur qui a été généreux envers lui.

8. Le dieu éternel et juste, qui, au milieu de ces Ondes, brille avec tant d’éclat et de pureté, reçoit des autres éléments les branches, les plantes, les substances qui forment sa nourriture.

9. L’enfant des Ondes (sacrées) s’élève dans la région voisine (de l’air), et s’établit au milieu des (rayons) agités qui se couvrent d’une enveloppe lumineuse. Les grandes (flammes) s’amassent autour de lui, supportant dans leur sein doré la grandeur suprême (du dieu).

10. Et cet enfant des Ondes (sacrées), au corps, aux couleurs, aux formes dorées, étend au loin son ventre doré, d’où s’échappe l’or de ses rayons bienfaisants. On lui accorde la nourriture (qu’il réclame).

11. Cependant ce grand et beau corps dans lequel est renfermé l’enfant des Ondes, croît et s’augmente. Les jeunes (libations) allument ses couleurs dorées, le beurre (sacré) est sa nourriture.

12. À cet ami que nous avons ici-bas, adressons des sacrifices, des invocations, des holocaustes. Je lui élève un trône, que je compose de ramée ; je le nourris d’offrandes, je l’honore par des hymnes.

13. Ainsi, ce (dieu) généreux a trouvé un berceau dans ces (Ondes saintes) ; enfant, il y est nourri ; elles le touchent de leurs flots caressants. Et l’enfant des Ondes, entouré de vives couleurs, semble briller ici-bas avec le corps de l’astre céleste.

14. Sur le siége élevé où il se tient environné chaque jour de doux rayons, les Libations viennent d’elles-mêmes apporter au fils des Ondes leur tribut de boissons, d’offrandes et de beurre sacré.

15. Ô Agni, qui occupes une si belle demeure et qui peux nous protéger, je viens vers toi, (t’implorant) et pour ce peuple et pour ses maîtres. Qu’il soit fortuné pour nous, ce saint appareil que chérissent les dieux ! Pères d’une heureuse lignée, puissions-nous chanter longtemps encore dans le sacrifice.


HYMNE XIII.

À divers dieux, par Gritsamada.

(Mètre : Djagatî.)

1. Le (Soma) vient à toi avec ces offrandes que fournit la vache. Nos hommes ont tiré de leurs mortiers de pures libations. Bois de ce soma que te présente notre coupe, accompagné des invocations Swâhâ et Vachat, ô Indra, toi qui es notre premier maître.

2. Ô (Marouts), (venez) vous mêler à nos sacrifices ; (venez) du ciel briller ici avec vos daims, vos traits et vos parures. Chers et vaillants fils d’un (dieu) qui soutient le (monde), placez-vous sur ce gazon, et buvez le soma, contenu dans ce vase[1115].

3. (Dieux) qui méritez nos invocations, accourez promptement vers nous ; prenez place sur ce gazon, et livrez-vous au plaisir. Goûte aussi le même bonheur, ô Twachtri, avec les dieux et leurs épouses. (Viens) entouré de cette troupe vénérable.

4. (Dieu) sage et sacrificateur, amène ici les dieux. Commence l’œuvre sainte, accepte nos offrandes, et brille dans tes trois foyers. Reçois le doux breuvage du soma ; bois, et, dans ta demeure sainte, sois satisfait de ton partage.

5. Ce (soma) doit augmenter la vigueur de ton corps. Cette coupe, entre tes mains, a toujours fait ta force, ta grandeur. Maghavan, c’est pour toi que ce (soma) est versé ; c’est à toi que nous l’offrons. Réjouis-toi de cette sainte offrande, et bois.

6. Couple (divin)[1116], reçois mon sacrifice, et entends mon invocation. Le prêtre est à sa place, et poursuit les antiques prières. Royales (divinités), l’offrande vous est présentée. Le sacrificateur l’a dit : Buvez de notre doux soma.




LECTURE HUITIÈME.

HYMNE I.

À divers dieux, par Gritsamada.

(Mètre : Djagatî.)

1. Bienfaisant (Agni), que la coupe du sacrifice fasse ton bonheur. Prêtres, le dieu veut des libations complètes ; apportez-lui ce soma qu’il désire. (Dieu) riche et libéral, bois à la coupe de l’Hotri[1117] avec les Ritous[1118].

2. Je lui fais aujourd’hui la demande que déjà je lui ai adressée ; car il mérite d’être invoqué, ce (dieu) qui est le premier parmi les êtres bienfaisants. Les prêtres te présentent le doux soma ; (dieu) riche et libéral, bois à la coupe du Potri avec les Ritous.

3. Que les coursiers qui t’amènent soient couverts des flots onctueux des libations. Bon et puissant Vrihaspati, prends des forces. Apparais avec grandeur, approche de notre soma ; (dieu) riche et libéral, bois à la coupe du Nechtri avec les Ritous.

4. Le (dieu) s’est désaltéré à la coupe de l’hotri ; il s’est enivré à celle du potri ; il a savouré nos offrandes à celle du nechtri. Que ce (dieu) riche et libéral, ami de ceux qui le traitent avec libéralité, boive à cette quatrième coupe[1119], pure et immortelle.

5. (Divins Aswins), venez ici, montés sur ce char destiné à des héros tels que vous. Prenez nos holocaustes et nos douces libations. Venez donc, et buvez de ce soma, vous qui êtes des trésors d’abondance.

6. Jouis, ô Agni, de ce foyer que nous avons allumé ; jouis de nos invocations, de nos hommages, de nos hymnes ; et, dans la saison (convenable), ô (dieu) conservateur, goûte et fais goûter à tous les autres dieux nos holocaustes, objets de vos désirs.


HYMNE II.

À Savitri, par Gritsamada.

(Mètre : Trichtoubh.)

1. Le divin Savitri, qui travaille constamment à la création (du monde)[1120], (Savitri) qui porte (tous les êtres), vient de se lever pour son œuvre. Il dispense aux Dévas ses faveurs. Qu’il comble de ses bénédictions le maître de ce sacrifice !

2. Le dieu, qui s’élève pour le bonheur du monde, étend au loin ses longs bras. Et, pendant qu’il poursuit sa carrière, sous lui se jouent et les Ondes purifiantes, et le Vent qui tourne (autour de la terre).

3. (Savitri), dans sa course, se dépouille de ses rayons. Il permet au voyageur de se reposer des fatigues de la marche, et prévient le désir de ceux qui oseraient implorer le secours d’Ahi[1121]. La Nuit poursuit l’œuvre de Savitri.

4. Partageant de moitié avec lui, (la Nuit) s’occupe à tisser sa toile immense. Cependant le sage comprend que la puissance du Créateur n’est pas éteinte. En effet, quittant (son sommeil), Savitri a reparu, et le dieu infatigable vient pour marquer les divisions du temps.

5. Les feux d’Agni naissent tous les matins dans chaque demeure ; et la mère de Savitri[1122] remet à son fils l’illustre fonction (d’éclairer le monde), sur le signal que vient de lui donner Agni.

6. Il marche vers le terme de sa carrière, vainqueur de tous ses ennemis, et désiré de tous les êtres animés. Alors il quitte la tâche, dont l’autre moitié ne regarde plus le divin Savitri.

7. On te demande, (ô dieu !) on cherche avec inquiétude, dans les plaines désertes de l’air, l’habitant céleste qui devrait s’y trouver. Mais (on se dit que) la forêt (quoique silencieuse) n’est pas privée d’oiseaux, et que rien ne saurait détruire les œuvres du divin Savitri.

8. Cependant Varouna[1123], dans l’obscurité, à travers les voies heureuses de l’air, retourne à l’endroit où il doit renaître. Les oiseaux, les animaux, sont tous dans les retraites diverses que leur a assignées Savitri.

9. Quel être peut-il craindre, celui dont l’œuvre ne peut être ébranlée ni par Indra, ni par Varouna, Mitra, Aryaman, ni par Roudra ? Honneur au divin Savitri, dont j’implore humblement la protection !

10. Nous présentons nos offrandes au sage Bhaga, digne objet de nos méditations. Que le (dieu) que célèbrent nos hymnes, (noble) époux des chastes Prières[1124], nous accorde son secours. Pour obtenir le bonheur et réunir sur nous tous les biens, puissions-nous être les amis du divin Savitri !

11. Que tes faveurs désirables nous arrivent du ciel, de l’air, de la terre ! Que ce bonheur s’étende sur les serviteurs de Savitri, sur le maître de maison qui l’honore de ses offrandes, et sur le poëte qui le chante !


HYMNE III.

Aux Aswins, par Gritsamada.

(Mètre : Trichtoubh.)

1. (Ô dieux), tels que deux lourdes pierres, tombez (sur) notre ennemi ! Tels que deux vautours volant vers l’arbre qui leur présente une proie, (venez) vers nous ! (Venez) tels que deux prêtres souvent célébrés dans le sacrifice ; tels que deux hérauts bienveillants partout invoqués.

2. Vaillants (Aswins), accourez vers votre serviteur, tels que deux écuyers qui, le matin, pressent leur char ; tels qu’un couple de chevreaux ; tels que deux beautés brillantes ; tels que deux époux intelligents.

3. Venez avant tout autre, et soyez pour nous tels que deux cornes puissantes, deux sabots rapides. Accourez vers nous avec le Jour, tels que deux tchacravâcas[1125] vigoureux ; tels que deux robustes conducteurs de chars.

4. Faites-nous traverser (le danger), tels que deux vaisseaux. Soyez pour nous tels que deux jougs, deux moyeux, deux roues, deux jantes de char. Tels que deux chiens, nos gardes fidèles, tels que deux cuirasses, défendez-nous contre le mal.

5. Arrivez tels que deux vents impétueux, deux rivières rapides, deux yeux clairvoyants. Agissez pour notre plus grand bien, tels que deux mains adroites ; tels que deux pieds, menez-nous au bonheur.

6. Soyez pour nous tels que deux lèvres qui ne portent que du miel à la bouche. Tels que deux mamelles, augmentez nos forces vitales. Tels que deux nez, soyez les gardiens de notre corps. Tels que deux oreilles, écoutez bien pour nous.

7. Tels que deux bras, soyez notre force. Tels que le ciel et la terre, rendez-nous les airs favorables. De même qu’on aiguise une hache sur la pierre, de même, ô Aswins, sachez rendre notre prière plus persuasive.

8. Ô Aswins, les enfants de Gritsamada vous adressent ces offrandes, ces prières, ces hymnes. (Dieux) vaillants, daignez les recevoir avec plaisir. Pères d’une heureuse lignée, puissions-nous chanter longtemps encore dans le sacrifice !


HYMNE IV.

À Soma et à Pouchan, par Gritsamada.

(Mètre : Trichtoubh.)

1. De Soma et de Poûchan sont nés la Richesse, et le Ciel, et la Terre. À peine ces deux gardiens du monde voyaient-ils le jour, que les Dévas les entouraient de leur pieuse ambroisie.

2. Que (les Dévas) honorent ces dieux à leur naissance ; que ces dieux dissipent les ténèbres abhorrées. Qu’avec Soma et Poûchan, Indra produise au sein des jeunes vaches (célestes) un lait abondant.

3. Soma et Poûchan, (dieux) magnifiques, lancez votre char aussi large que l’air, (ce char) à sept roues[1126], que rien n’arrête, qui est partout, que la Prière attelle, et qui brille de cinq rayons[1127].

4. L’un a pris place dans le ciel, l’autre sur la terre et dans l’air[1128]. Que ces (dieux) répandent sur nous de riches trésors de gloire et d’opulence !

5. L’un a créé tous les mondes[1129] ; l’autre va surveillant l’univers. Ô Soma et Poûchan, accueillez ma prière ; que par vous nous soyons vainqueurs de tous nos ennemis !

6. Que Poûchan, partout présent, reçoive ma prière. Que Soma, maître de l’opulence, nous accorde la richesse ; que l’invincible et divine Aditi nous conserve. Pères d’une heureuse lignée, puissions-nous chanter longtemps encore dans le sacrifice !


HYMNE V.

À divers dieux, par Gritsamada.

(Mètres : Gâyatrî, Anouchtoubh, Vrihatî.)

1. Ô Vâyou, presse tes coursiers, et viens, sur tes mille chars, boire de notre soma.

2. Ô Vâyou, viens avec tes coursiers. Ce brillant (soma) a été versé pour toi. Visite la demeure de celui qui t’offre ces libations.

3. Indra et Vâyou, accourez avec vos coursiers ; et buvez aujourd’hui, ô vaillants (héros), et ce jus (du soma), et ces (libations) que produit la vache.

4. Mitra et Varouna, ce soma a été versé pour vous, dont nos sacrifices augmentent la grandeur. Entendez ici mon invocation.

5 Rois cléments, (ces dieux) siégent dans une demeure suprême, solide, et soutenue par mille colonnes.

6. Nobles princes, Adityas honorés par nos libations de beurre, maîtres de la richesse, protégez tous deux votre pieux (serviteur).

7. Véridiques et terribles[1130] Aswins, venez par un chemin où règnera l’abondance en vaches et en chevaux, où les dieux ne manqueront pas de libations.

8. (Apportez-nous), généreux bienfaiteurs, une fortune que ne puisse détruire, ni de loin ni de près, un mortel méchant et maudit.

9. Vénérables Aswins, apportez-nous une opulence abondante et variée.

10. Que le sage et puissant Indra repousse loin de nous la crainte d’un vainqueur dangereux.

11. Qu’Indra nous protége ; que le mal ne vienne pas nous surprendre par derrière. Que le bonheur soit devant nous.

12. Que le sage Indra triomphe de tous ses ennemis, et qu’il établisse la tranquillité dans toutes les régions du ciel.

13. Ô Viswadévas, accourez ; entendez mon invocation, et prenez place sur ce gazon.

14. Cet abondant soma, aussi doux que le miel, vous est offert par les enfants de Sounahotra[1131]. Buvez de cette enivrante et heureuse (liqueur).

15. Glorieux compagnons d’Indra, ô divins Marouts, qui possédez les trésors de Poûchan, écoutez tous mon invocation.

16. Ô le premier des êtres parlants[1132], ô la meilleure des mères et des déesses, ô Saraswatî, nous sommes comme des gens maudits. Ô mère, donne-nous ta bénédiction.

17. En toi, divine Saraswatî, sont toutes les ressources (de l’homme). Accueille les hommages des Sounahotras. Ô déesse, donne-nous une heureuse postérité.

18. Ô Saraswatî, qui possèdes la justice et l’abondance, accepte ces hommages et ces prières que te présentent, de préférence aux autres dieux, les enfants de Gritsamada.

19. Que (le Ciel et la Terre) viennent aussi partager la joie de ce sacrifice. Nous vous invoquons tous les deux, ainsi qu’Agni, chargé de porter nos offrandes.

20. Ô Ciel, ô Terre, dirigez, au gré des dieux, ce sacrifice que nous offrons aujourd’hui, (sacrifice) qui doit être une source de biens, et monter dans les airs.

21. Qu’en votre présence les dieux fortunés et dignes de nos hommages se placent ici aujourd’hui pour boire le soma.


HYMNE VI.

À Indra, surnommé Capindjala, par Gritsamada.

(Mètre : Trichtoubh.)

1. (Le Capindjala)[1133] par son cri annonce l’avenir. Il lance sa voix comme le pilote lance son navire. Oiseau, sois pour nous d’un bon augure. Qu’il ne t’arrive aucun accident.

2. Échappe à l’épervier et aux oiseaux (de proie). Que l’archer, armé de sa flèche, ne t’aperçoive pas. Fais-nous entendre, du côté du midi[1134], ta voix de bon augure.

3. Oiseau de bon augure, pousse ton heureux cri à la droite de nos foyers[1135]. Garde-nous de la domination d’un voleur ou d’un méchant. Pères d’une heureuse lignée, puissions-nous chanter longtemps encore dans le sacrifice !


HYMNE VII.

À Indra, surnommé Capindjala, par Gritsamada.

(Mètres : Djagatî, Atisakvarî, Achtî.)

1. Pareils aux chantres de nos sacrifices, les Capindjalas viennent, par des accents de bon augure, nous annoncer un temps favorable. L’oiseau se plaît à répéter deux cris[1136], de même que ceux qui chantent nos hymnes emploient la Gâyatrî et le Trichtoubh.

2. Oiseau, comme notre chantre, tu as aussi ton hymne ; et ainsi que l’enfant du prêtre[1137], au moment de la libation, tu fais retentir ta voix. Avec l’empressement de l’étalon qui s’approche de ses amantes, oiseau, parle-nous favorablement ; oiseau, parle-nous pour notre bonheur !

3. Oiseau, si tu nous parles, ne nous parle que favorablement. Reste silencieux pour écouter notre prière. En t’éloignant, résonne comme un carcari[1138]. Pères d’une heureuse lignée, puissions-nous chanter longtemps encore dans le sacrifice[1139] !


HYMNE VIII.

À Agni, par Viswâmitra.

(Mètre : Trichtoubh.)

1. Ô Agni, tu as voulu que dans le sacrifice je t’apportasse (les offrandes). Reçois donc ce soma que je te présente avec ardeur. J’allume tes feux en l’honneur des dieux, j’emplis la coupe (sacrée) ; je te chante. Ô Agni, orne ton corps (de tous ses rayons).

2. Nous avons mis en marche le sacrifice : que l’hymne se poursuive. Que l’on entoure Agni de (saints) aliments et d’invocations. Les chants du poëte ont quelquefois attiré (les dieux) du haut du ciel. On a tenté par des chants les désirs du puissant (Agni).

3. Ce (dieu) sage, pur et fort, est, par sa naissance, notre parent. Il contient le bonheur du ciel et de la terre. Les Dévas, par l’œuvre (des libations), ses sœurs[1140], ont obtenu Agni brillant au milieu des ondes.

4. Les sept sources[1141] (célestes) augmentent la grandeur de cet heureux enfant à la flamme blanchâtre. De même que les cavales accourent vers leur jeune poulain, les Dévas viennent soigner les formes d’Agni naissant.

5. Cependant (Agni) élève dans l’air ses membres resplendissants ; de ses nobles rayons il purifie le sacrifice. Il se revêt de lumière, et de la substance des libations se fait de larges et magnifiques ornements.

6. Il s’approche sans les blesser, sans en être blessé, des (Libations), filles du ciel, dont les unes sont couvertes, les autres dépouillées d’un vêtement (d’écume). Et ces sept mères, éternelles et toujours jeunes, sorties d’un même sein, élèvent le même nourrisson.

7. Les flammes d’Agni s’étendent sous mille formes, du milieu du beurre (consacré), sous le flot des autres libations. Cependant à ses côtés sont les vaches nourricières[1142] ; à quelque distance reposent ensemble les deux illustres mères du dieu incomparable[1143].

8. Ainsi fortifié, brille, ô Agni, et recueille toutes les formes rapides et lumineuses. Des torrents de beurre et de libations sont versés sur ce dieu généreux, qui croit au milieu des hymnes.

9. Quelquefois (Agni) s’enferme de lui-même dans la mamelle que le père[1144] (de la nature a préparée pour la terre). Il en fait jaillir des flots de lait. Il existe dans cette retraite avec les (Vents), ses heureux amis, et les Ondes, filles du ciel ; et il y règne en maître.

10. C’est lui encore qui naît comme père, comme créateur (des mondes). (Astre) unique, il pompe et amasse les ondes. Généreux et pur, il engendre les deux grands époux[1145]. (Ô dieu), garde (le Ciel et la Terre) ; fais qu’ils soient favorables aux enfants de Manou.

11. Ainsi s’étend (Agni) au sein immense de l’air. Et c’est aux ondes, c’est à nos offrandes qu’il doit sa grandeur. Entouré des soins des (Libations) ses sœurs, Agni, ami de la demeure humaine[1146], siége au foyer du sacrifice.

12. Le grand et vigoureux Agni, en faveur de celui qui prodigue les libations, amène et soutient les grands nuages ; (dieu) invincible, noble foyer de lumière, c’est lui qui est le père des vaches (célestes) et le nourrisson des Ondes (sacrées).

13. Cet illustre nourrisson des Ondes et des plantes[1147], qui revêt tant de formes, est né de l’heureuse Aranî. Les Dévas s’assemblent pour prier le (dieu) fort et digne de tant d’honneurs, et ils le célèbrent dans son berceau.

14. De larges rayons, brillants comme des éclairs, enveloppent Agni, centre de clartés. Le foyer où il repose est comme la caverne (du lion) ; et ses flammes y puisent d’immortels aliments, de même qu’au sein d’un profond volcan[1148].

15. Je t’apporte des holocaustes ; je te loue, je chante ton amitié, et demande ta bienveillance. Viens avec les dieux protéger ton chantre, et garde-nous contre les forces de nos ennemis.

16. Ô Agni, dirige tes serviteurs dans la bonne voie, et rends-les possesseurs de tous les biens. Pour prix de nos sacrifices et de nos abondantes offrandes, puissions-nous vaincre les armées des impies !

17. Tu as été, Agni, le héraut des dieux, et tu as pris une heureuse part à toutes nos cérémonies. Tu aimes tous les mortels, et chéris leur demeure ; tu donnes un char aux dieux, et tu les accompagnes de tes honneurs.

18. Le roi immortel des mortels est sur son trône, et poursuit l’œuvre du sacrifice. Agni, arrosé de notre beurre (sacré), brille avec splendeur, et surveille toutes nos cérémonies.

19. (Dieu) grand et secourable, viens à nous avec tes heureuses amitiés, avec tes nobles secours. Accorde-nous une opulence pleine d’abondance et de renommée, de triomphe, de bonheur et de gloire.

20. Antique Agni, j’ai chanté tes naissances éternelles, tes naissances toujours nouvelles. En l’honneur d’un dieu généreux, nous avons célébré ces grands sacrifices. Nous avons multiplié les naissances du dieu qui possède tous les biens.

21. Pour multiplier les naissances du dieu qui possède tous les biens, les enfants de Viswâmitra ont perpétué leurs feux. Puissions-nous obtenir la bienveillance et l’heureuse amitié de l’adorable (Agni) !

22. Dieu robuste et magnifique, réjouis-toi de notre sacrifice, et fais-le agréer aux autres dieux. (Divin) sacrificateur, apporte-nous une heureuse abondance. Ô Agni, donne-nous une grande richesse.

23. Ô Agni, en échange de nos invocations, fais que la terre[1149] soit à jamais libérale pour nous, et féconde en troupeaux. Que nous ayons une belle lignée d’enfants et de petits-enfants. Ô Agni, que ta bonté soit avec nous !


HYMNE IX.

À Agni, par Viswâmitra.

(Mètre : Djagatî.)

1. En l’honneur d’Agni, dont le sacrifice augmente la grandeur, en l’honneur du (dieu appelé) Vêswânara, nous composons l’hymne qui coule comme un beurre purifié. De même que la hache façonne un char, de même la prière du maître de maison et du prêtre orne doublement le (dieu) sacrificateur.

2. C’est (Agni) qui éclaire le ciel et la terre, (Agni), le fils mémorable des deux mères[1150]. L’immortel Agni porte l’holocauste et reçoit les offrandes, (dieu) invincible, hôte du peuple, trésor de lumière.

3. Par l’œuvre d’une force victorieuse et par leur sagesse, les Dévas ont, dans le sacrifice, engendré Agni. Plein d’espoir en sa bonté, je chante ce grand (dieu), resplendissant de lumière et rapide comme le coursier.

4. Nous demandons la faveur inestimable de ce (dieu) bienfaisant, (faveur) honorable qu’il n’accorde qu’à la prière du poëte. Nous adorons Agni, qui a comblé de biens les Bhrigous, qui aime (nos hommages), qui n’agit qu’avec sagesse, et qui brille d’une splendeur divine.

5. Pour obtenir le bonheur, les mortels, placés sur leurs siéges de cousa, honorent Agni et l’entourent de leurs offrandes. Élevant la coupe (du sacrifice, ils chantent) le lumineux agent de tous les dieux, terrible (pour ses ennemis), et capable de faire reccueillir à ses serviteurs le fruit de leurs œuvres.

6. Pur et brillant Agni, (noble) sacrificateur, les mortels voulant t’honorer par de saintes cérémonies, autour de ton foyer, qu’ils ont dignement préparé, sont placés sur des siéges de cousa. Accorde-leur le bonheur.

7. C’est Agni qui a rempli le ciel et la terre. Si la grande lumière est née, c’est que dans le sacrifice on a constitué Agni. Entouré de nos offrandes, le (dieu) sage est amené avec honneur pour l’œuvre sainte, tel que le coursier dont on a préparé la nourriture.

8. Adorez (le dieu) qui brille dans nos cérémonies, et qui se charge de l’holocauste ; honorez (le dieu) domestique qui possède tous les biens. Le sage Agni est le conducteur qui dirige le char du grand sacrifice et le pontife des dieux.

9. Les Ousidjs[1151] immortels ont purifié trois foyers pour le grand Agni, qui tourne autour (de la terre). L’un de ces foyers a été placé par eux dans ce (monde) mortel pour nous y protéger. Les deux autres sont dans le monde voisin[1152].

10. Les offrandes des hommes ont donné de la splendeur au précepteur, au maître du peuple, comme (le frottement) donne du tranchant à la hache. Il pénètre dans les lieux les plus hauts, dans les demeures les plus basses ; mais son berceau est toujours dans ce monde[1153].

11. Le (dieu) libéral et ami de tous les hommes[1154], en naissant, brille dans divers foyers où il rugit comme le lion. Sa force immortelle se développe, et il y dispense à ses serviteurs et la richesse et l’opulence.

12. Cependant, célébré par l’hymne pieux, l’ami des hommes prend son antique route, et s’élève dans l’air sous la voûte céleste. Comme autrefois, il verse ses bienfaits sur tous les êtres ; et, toujours animé de la même vigueur, il poursuit sa voie circulaire.

13. Nous invoquons aussi, pour en obtenir un bien nouveau, Agni, habitant de l’air et transporté par Mâtariswan[1155], (dieu) juste, sage, adorable, digne de nos louanges, suivant (au ciel) des routes diverses, et orné d’une chevelure éblouissante[1156].

14. Nous invoquons humblement Agni, qui nous éclaire dans la voie (du sacrifice), (dieu) affable et bienfaisant, brillant héraut du Soleil. Il éveille l’Aurore, il est la source de la lumière céleste, invincible (divinité) que nous n’abordons qu’avec d’abondantes offrandes.

15. Sacrificateur généreux et pur, ami sincère de la demeure (humaine), sage adorable, char (divin) comblé de nos trésors, (dieu) remarquable pour sa beauté et donné à (l’homme) par Manou[1157], nous venons toujours l’implorer pour obtenir la richesse.


HYMNE X.

À Agni, par Viswâmitra.

(Mètre : Djagatî.)

1. Les sages, en l’honneur du puissant, de l’adorable Vêswânara, célèbrent des sacrifices et accumulent les offrandes. L’immortel Agni honore les dieux. Qui pourrait troubler ses fonctions éternelles ?

2. Entre le ciel et la terre, il va, comme brillant messager (des dieux), où il siége comme sacrificateur et pontife des enfants de Manou. Agni, excité par les Dévas et riche du trésor de nos prières, orne de ses splendeurs la vaste salle (du sacrifice).

3. Que les sages, par leurs cérémonies, augmentent la grandeur d’Agni, le héraut de nos pompes sacrées, le directeur de nos œuvres saintes. Le (dieu) à qui s’adressent ces hommages et ces prières est celui qui, par ses bienfaits, peut combler les vœux de son serviteur.

4. Agni, père des sacrifices, auteur de la vie[1158], mesure aux sages (le fruit de leurs œuvres), et assure la récompense de ceux qui le chantent. Sous des formes variées, il occupe le ciel et la terre. (Les hommes) ont souvent éprouvé sa prudente amitié, et célèbrent ses louanges.

5. Les Dévas ont, dans son foyer, établi Agni, l’ami des hommes, le magnifique (Agni) au char superbe, aux formes brillantes, entouré des Ondes (sacrées), auteur de la lumière, (dieu) partout présent et protecteur, défenseur puissant et lumineux.

6. Agni, de concert avec les Dévas et les enfants de Manou, devient le ministre d’un sacrifice où se présentent, avec la prière, les offrandes de toute espèce. Monté sur son char, il va, entre (le ciel et la terre), accomplissant les vœux des mortels ; (dieu) rapide, ami de nos demeures, fléau de ses ennemis.

7. Agni, fais la gloire (de tes serviteurs) en leur accordant de nobles enfants et une longue vie ; augmente nos forces, et donne-nous l’abondance ; accrois l’opulence de (l’homme) généreux. Tu es digne de tous les hommages, (dieu) vigilant, et prêtre[1159] des Dévas et des sages mortels.

8. Maître du peuple, hôte magnifique, directeur de la prière et pontife[1160] de nos sacrificateurs, âme des saintes cérémonies, possesseur de tous les biens, (les hommes) le célèbrent, et cherchent par leurs hommages à exalter sa grandeur.

9. Agni, dieu resplendissant et bon, entoure tous les êtres de sa puissance. Son char est couvert de trésors ; ses œuvres sont fortunées, et notre devoir est de venir l’orner de nos louanges dans le foyer où il réside.

10. Ami de tous les hommes, je chante tes rayons, qui font de toi, ô (dieu) sage, un centre de lumière. À peine né, tu as rempli les mondes, le ciel et la terre, ô Agni ! Tu enveloppes tout de ta grandeur.

11. Les œuvres de cet ami des hommes sont pour nous une source de biens. Ce (dieu) sage se contente, pour accorder ses faveurs, de la bonne intention. Agni est né pour développer la grandeur de nos deux grands parents, du Ciel et de la Terre, dont la fécondité est si admirable.


HYMNE XI.

À Agni et autres dieux, par Viswâmitra.

(Mètre : Trichtoubh.)

1. Accueille nos diverses offrandes. Que la puissance de tes flammes toujours croissantes soit pour nous une source de bonheur et de richesses. Dieu, amène les dieux au sacrifice ; ami bienveillant, ô Agni, protége tes amis.

2. Cet Agni, que les Dévas honorent trois fois chaque jour, est aussi Varouna et Mitra. (Dieu appelé) Tanoûnapat[1161], fais que ce sacrifice, où coule sur toi avec révérence le beurre (consacré), devienne pour nous aussi doux que le miel.

3. Une flamme merveilleuse s’unit au (dieu) sacrificateur. C’est lui d’abord, c’est le généreux (Agni) que doivent honorer nos offrandes, que doivent célébrer nos invocations. Digne de nos hommages, qu’il soit ensuite chargé de ceux que nous envoyons aux dieux.

4. (Agni) s’est rendu à votre[1162] sacrifice. Il arrive, il se dresse ; ses aigrettes se lèvent, ses splendeurs s’étendent. (Le dieu) sacrificateur est sur son trône de lumière. Nous avons jonché la terre du gazon préparé pour les dieux.

5. Que (nos prêtres) commencent le sacrifice, offrant avec la prière les sept[1163] holocaustes, et accomplissant tous les rites. Que les (Dévas), revêtus d’une forme humaine, et nés au sein de nos cérémonies[1164], soient présents à nos libations sacrées.

6. L’Aurore et la Nuit, qui marchent de concert sous des formes diverses, viennent sourire à nos hymnes ; qu’ils nous protégent, ainsi que Mitra, Varouna, Indra avec les Marouts, et nous accordent leur brillant appui.

7. J’invoque, en premier lieu, le couple divin de sacrificateurs[1165]. Les (prêtres), avec les sept offrandes et l’invocation de la Swadhâ, implorent (Agni), qu’ils célèbrent sous le nom de Rita[1166] ; et, gardiens des rites (sacrés), brillants des feux (de ce dieu), ils l’honorent par leurs cérémonies.

8. Que sur ce gazon viennent se placer les trois déesses[1167] : Saraswatî avec les Sâraswatas, Bhârati avec les Bhâratis, Ilâ avec les Dévas, Agni avec les enfants de Manou ; que tous ils se livrent ensemble à la joie du sacrifice.

9. Divin Twachtri, prends plaisir à nous accorder une félicité parfaite. C’est par toi que naissent les héros forts et actifs, qui aiment à servir les dieux et à leur offrir la coupe du sacrifice.

10. Ô Vanaspati, honore les dieux ! Qu’Agni nous serve de ministre et purifie l’holocauste. Lui qui connaît les naissances des dieux, qu’il soit notre sacrificateur plein de justice et de bonté.

11. Viens, Agni, et entoure-toi de lumière. Viens avec Indra et les autres dieux, montés sur le même char rapide. Que sur notre gazon se placent Aditi, mère d’heureux enfants, et Swâhâ. Que les dieux immortels se livrent au plaisir.


HYMNE XII.

À Agni, par Viswâmitra.

(Mètre : Trichtoubh.)

1. Le sage Agni pressent l’aurore, et s’éveille, en suivant la route tracée par les prêtres. Il brille, il prend des forces aux yeux de ses serviteurs empressés ; il se charge des offrandes, et brise les portes des ténèbres.

2. Par les hymnes, les invocations, les prières de ses chantres, l’adorable Agni s’élève avec splendeur. Il aspire à s’environner d’un plein éclat, et, messager (des dieux), il brille au milieu des feux de l’aurore.

3. Agni a été placé parmi les enfants de Manou pour y être le nourrisson des Ondes (sacrées) et l’agent du sacrifice. Ami désirable et digne d’être adoré, il apparaît comme sur un trône. Il est sage, et attend avec justice nos invocations et nos holocaustes.

4. Le brillant Agni, c’est Mitra. Oui, c’est Mitra et Varouna, sacrificateur, et possesseur de tous les biens. C’est Mitra, prêtre, héraut rapide, hôte des demeures (humaines), compagnon des ondes et des montagnes (célestes).

5. Le grand Agni occupe sur la terre une place suprême. Il occupe (dans le ciel) le char du soleil voyageur. Il se mêle, au sein des airs, avec le (dieu) aux sept têtes[1168]. Il garde le sacrifice dont les flammes font le bonheur des dieux.

6. Ce dieu puissant, qui connaît tous les besoins (des créatures), s’est donné à nos hommages un grand et noble titre. Quand un voile sombre, pendant le sommeil de (l’astre) voyageur, a couvert son heureux séjour, c’est Agni qui en devient le patron vigilant.

7. Il s’empresse de venir dans son foyer qui l’attend ; l’offrande du beurre (sacré) et les chants l’y accueillent. Agni, pur et purifiant, brillant et magnifique, chaque jour naît de ses deux mères[1169].

8. À sa naissance, il est soutenu par les plantes et les branches, auxquelles le beurre (sacré) donne plus d’ardeur. Les ondes (des libations) coulent en cascades éblouissantes. Qu’Agni nous garde, ainsi placé entre les deux grands parents[1170] !

9. Les chants continuent : la flamme grandit, et avec elle la forme resplendissante d’Agni, qui, du vase de terre où elle réside, s’élève jusqu’au ciel. Que ce dieu adorable, (ami de l’homme), messager (céleste), aussi rapide que Mâtariswan, amène les dieux pour le sacrifice.

10. Le grand Agni est le premier parmi les êtres qui brillent : ses lueurs éclairent la voûte (céleste), aussitôt qu’(appelé) par les Bhrigous, Mâtariswan a de son souffle allumé la flamme du (dieu) qui se cachait, et qui va porter les holocaustes.

11. Ô Agni, en échange de nos invocations, fais que la terre soit à jamais libérale pour nous, et féconde en troupeaux ! Que nous ayons une belle lignée d’enfants et de petits-enfants ! Ô Agni, que ta bonté soit avec nous !


HYMNE XIII.

À Agni, par Viswâmitra.

(Mètre : Trichtoubh.)

1. Ministres de nos cérémonies, excités par les sons de la prière, pour honorer les dieux dirigez vers eux (la cuiller du sacrifice)[1171] ; chargée de nos offrandes, riche de nos trésors, arrosée de beurre (sacré), et portant à Agni le (saint) holocauste, elle se porte du côté de l’orient.

2. À peine né, tu t’es dressé pour recevoir nos hommages ; et, remplissant le ciel et la terre, tu as couvert de ta lumière tout l’espace qui les sépare. Que tes feux, ornés de sept langues, soient célébrés par nous.

3. Le Ciel, la Terre, tous les dieux, te demandent qu’en ta qualité de sacrificateur tu apparaisses dans ton foyer, dès l’instant que les enfants de Manou, animés d’un saint zèle et chargés d’offrandes, célèbrent tes brillants rayons.

4. (Dieu) grand et désiré, (Agni) est fermement assis dans sa demeure, et dans l’immensité du Ciel et de la Terre. Et, pour un maître si grand, le Ciel et la Terre, époux immortels, puissants et invincibles, sont deux vaches dont le lait est intarissable.

5. Agni, tu es grand, et tes œuvres sont grandes. Tu as par ta vertu étendu le Ciel et la Terre. À ta naissance, (dieu) généreux, tu as été le héraut et le guide des mortels.

6. Attelle donc et soumets à ton frein les deux chevaux du sacrifice, chevaux rougeâtres, couverts du beurre (sacré), et ornés d’une belle chevelure. Dieu, amène tous les dieux. Possesseur de tous les biens, bénis tous nos sacrifices.

7. Que tes rayons, qui ont accompagné l’Aurore, brillent pleinement ensuite avec le soleil ! Ô Agni, reçois la libation qui tombe sur le bois de ton foyer ! Les Dévas célèbrent par leurs chants le sacrificateur digne de leurs honneurs.

8. Que les dieux[1172], qui se jouent dans les espaces de l’air, ou qui existent au sein des splendeurs du soleil, et ceux qui nous protégent sur la terre[1173], tous également avides de nos holocaustes et de nos sacrifices, ô Agni, viennent rapidement sur leur char !

9. Sur le même char qu’eux, viens aussi, ô Agni ! Que les autres puissantes (divinités) se fassent conduire ici avec un habile empressement. Amène, avec leurs épouses, les trente-trois dieux[1174], et enivre-les des douceurs de la Swadhâ.

10. (Agni), sacrificateur, honore le Ciel et la Terre ; et ses hommages, accueillis avec plaisir, augmentent la grandeur de ces (dieux) immenses. S’approchant avec respect, les deux grands parents, saints et justes, semblent s’arrêter pour jouir des œuvres de celui qui est né dans le sacrifice.

11. Ô Agni, en échange de nos invocations, fais que la terre soit à jamais libérale pour nous, et féconde en troupeaux ! Que nous ayons une belle lignée d’enfants et de petits-enfants ! Ô Agni, que ta bonté soit avec nous ! ----



SECTION TROISIÈME.

LECTURE PREMIÈRE.
HYMNE I.
À Agni, par Viswâmitra.
(Mètre : Trichtoubh.)

1. Les sept[1175] splendeurs (d’Agni), dont le dos commence à blanchir[1176], viennent de s’élancer du foyer où il reposait, et elles ont pénétré les grands parents[1177]. Étendus autour (de nous), ces deux ancêtres s’avancent de concert, pour perpétuer le temps.

2. (Agni) s’est entouré de ses vaches lumineuses[1178] ; (le dieu) bienfaisant s’élance sur ses célestes montures, qui portent le miel des (offrandes). (Ô Agni), tu daignes habiter la demeure du sacrifice ; tu fais rouler (tes flammes) ; cependant autour de toi s’élève la voix (de la Prière)[1179].

3. Le maître sage et opulent est monté sur ses coursiers, qu’il a rendus dociles. Son dos noir s’est revêtu (des rayons) qui partent du foyer, et ses membres se sont développés.

4. Les Libations donnent de la force aux grandes (Lumières), enfants de Twachtri, et servent de char au (dieu), impérissable soutien (du monde, Agni), de son trône étendant au loin ses membres brillants, s’unit au Ciel et à la Terre, comme (l’époux s’unit) à son épouse.

5. (Les sages) aiment à honorer (ce dieu) grand, libéral et bienfaisant, et ils bénissent son empire. L’air s’illumine de leurs feux éclatants ; leur hymne a son prix ; leur prière a son mérite.

6. En même temps qu’ils invoquent les deux grands parents, que nos Seigneurs nous procurent aussi la protection (d’Agni). Qu’en faveur de celui qui le chante, (ce dieu) qui sème (la lumière) apporte ses clartés dans les lieux qu’environnait la nuit.

7. Sept sages avec cinq prêtres[1180] gardent le foyer où repose le (dieu), aussi rapide que l’oiseau. Ils s’approchent avec bonheur, répandent (la libation), et, Dévas immortels, accomplissent les rites en l’honneur des Dévas (célestes).

8. J’honore, avant tout, les deux sacrificateurs divins[1181]. Chargés de leurs sept offrandes, les (prêtres) se plaisent à présenter la Swadhâ. Ils chantent le (dieu) qu’ils appellent du nom de Rita[1182], et, brillants gardiens des rites sacrés, ils poursuivent leur œuvre.

9. Sous les libations qui s’épandent en l’honneur d’un (dieu) rapide et libéral, ses rayons, aux formes changeantes, s’affaissent et s’agitent. Dieu sage et sacrificateur, sois heureux, et amène ici les grands dieux avec le Ciel et la Terre.

10. (Dieu de la) richesse, accorde-nous l’abondance. Que les Aurores, accompagnées de douces prières et d’heureuses splendeurs, se lèvent avec magnificence ! Ô Agni, excuse les fautes des Grands qui ont su faire grandir tes larges feux.

11. Ô Agni, en échange de nos invocations, fais que la terre[1183] soit à jamais libérale pour nous, et féconde en troupeaux ! Que nous ayons une belle lignée d’enfants et de petits-enfants ! Ô Agni, que ta bonté soit avec nous !


HYMNE II.

À Agni, par Viswâmitra.

(Mètres : Trichtoubh et Anouchtoubh.)

1. Ô Vanaspati[1184], les saints ministres du sacrifice répandent sur toi leur miel divin. Deviens ici même notre bienfaiteur, soit que tu lèves ta tête superbe, soit que tu reposes au sein de ta mère[1185].

2. Ô toi[1186], placé à l’orient du foyer, sois (pour nous) une source d’abondance intarissable ; (donne-nous) une forte lignée. Éloigne nos ennemis, et dresse-toi pour notre grande félicité.

3. Dresse-toi, ô Vanaspati, sur le sol du sacrifice, et présente-nous d’heureuses dimensions. Fais la gloire de celui qui apporte ici ses offrandes.

4. Le voilà qui vient[1187], le (dieu) jeune, richement vêtu, ceint (de lumière), préférable à tous. Il naît ; les vénérables sages, pleins d’un saint recueillement et d’une vénération profonde, le font apparaître.

5. Il est né ; il croît au milieu des hommages des mortels, pour nous donner des jours sereins. Les sages accomplissent leurs œuvres de purification, et pour la sainte prière le prêtre élève sa voix.

6. Ô Vanaspati, que ces bois divins[1188], que les ministres du sacrifice ont plantés et que la hache a taillés, nous procurent une heureuse fortune, une nombreuse famille !

7. Que ces branches coupées et plantées en terre, vers lesquelles s’élèvent les vases (des libations), que tous (ces bois) qui prennent une nature divine et ornent le champ du sacrifice concourent à notre bonheur !

8. Que les Adityas, les Roudras, les Vassous, merveilleux directeurs, le Ciel et la Terre, l’Espace[1189], l’Air viennent avec joie participer à nos cérémonies ; que les Dévas[1190] élèvent l’enseigne du sacrifice !

9. Tels que des cygnes qui volent en troupe, que les poteaux s’élèvent entourés de blanches lueurs. Placés par nos sages du côté de l’orient, que ces Dévas[1191] suivent la route des Dévas.

10. Ainsi que la corne sur la (tête du) taureau, ces poteaux apparaissent, sur la terre, garnis de leurs anneaux. Invoqués par les prêtres au milieu du sacrifice, qu’ils soient notre défense sur les champs de bataille.

11. Ô Vanaspati, monte, élève-toi sur tes cent rameaux ! Puissions-nous aussi donner à notre (famille) mille rameaux, (ô dieu) que la hache brillante a disposé pour le grand bonheur (du monde) !


HYMNE III.

À Agni, par Viswâmitra.

(Mètres : Vrihatî et Trichtoubh.)

1. Ô dieu, nous mortels, tes amis, nous t’appelons à notre secours, toi enfant des Ondes[1192], bienfaiteur brillant, sauveur irréprochable.

2. Tu aimes nos offrandes, et tu viens vers les Ondes, qui sont tes mères. Ô Agni, nous ne pouvons plus supporter ton absence[1193]. Tu es en ces lieux, et cependant loin de nous.

3. Ton désir est de satisfaire nos vœux : car tu es bon. Vois ces (prêtres), sur l’attachement desquels tu peux compter. Pour ton service les uns sont debout, les autres sont assis[1194].

4. Ce (dieu) prêt à combattre nos ennemis et leurs troupes innombrables, les Dévas[1195] immortels et cléments l’ont retrouvé dans les ondes, comme le lion (dans sa caverne).

5. Tel qu’un fugitif, Agni se cachait ; les Dévas l’ont cherché avec de violents efforts[1196], et Mâtariswan l’a ramené de la contrée lointaine.

6. Les mortels t’ont reçu des Dévas, ô (Agni), qui portes les holocaustes. Par ta puissance, ô (dieu) humain[1197] et toujours jeune, tu protéges tous les sacrifices.

7. Ainsi ton œuvre, ô Agni, est pour ton humble serviteur une source de bonheur, quand, au moment du crépuscule, tous les êtres vivants sont rassemblés autour de ton foyer.

8. Invoquez le dieu ami des sacrifices, qui siége (dans le foyer) et s’entoure d’une flamme pure. Honorez le messager rapide, actif, antique et vénérable.

9. Que les trois mille trois cent trente-neuf[1198] Dévas honorent Agni. Qu’ils répandent pour lui le beurre (consacré), qu’ils étendent le gazon, et qu’ils le fassent asseoir sur son siége de sacrificateur.


HYMNE IV.

À Agni, par Viswâmitra.

(Mètre : Ouchnih.)

1. Les sages, ô Agni, te (reconnaissent) pour le roi des hommes ; mortels, ils allument pour le sacrifice le feu d’un dieu.

2. Ô Agni, ils te chantent dans leurs cérémonies, comme prêtre et sacrificateur. Gardien des choses saintes, brille sur ton trône.

3. Ô Agni (surnommé) Djâtavédas, celui qui nourrit tes feux obtient une puissante famille, une fortune florissante.

4. Qu’il vienne, cet Agni, l’étendard des sacrifices ; que, pour le (bonheur de) celui qui offre l’holocauste, les Dévas répandent sur lui leurs sept libations.

5. À Agni, sage et sacrificateur, qui semble porter les feux allumés par les sages, apportez l’hymne antique et solennel.

6. Que nos hymnes augmentent (la gloire) d’Agni. Que ce (dieu) brillant et digne de nos hommages naisse pour (nous apporter) l’abondance et la richesse.

7. Agni, (dieu) vénérable, honore les dieux dans le sacrifice en faveur du serviteur qui les invoque. Sacrificateur né pour notre bonheur, tu règnes sur nos ennemis.

8. (Dieu) purificateur, brille pour nous ; que nous obtenions par toi une brillante et forte famille. Deviens pour tes adorateurs une source de bénédictions.

9. Nos prêtres remplis de sagesse s’éveillent (dès le matin) pour allumer tes feux, ô toi qui portes l’holocauste, (dieu) immortel, que la Force a fait grandir.


HYMNE V.

À Agni, par Viswâmitra.

(Mètre : Gâyatrî.)

1. Agni, sacrificateur, pontife, surveillant des saintes cérémonies, connaît tous nos rites sacrés.

2. Prêtre immortel, Agni porte l’holocauste, et, messager chargé des offrandes, il s’unit à la Prière.

3. Étendard du sacrifice, l’antique Agni apparaît avec la Prière. Ses rayons triomphent des (ténèbres).

4. Les Dévas ont enfanté Agni, fils toujours nouveau de la Force, possesseur de tous les biens et agent du sacrifice.

5. Agni est l’invincible chef des races humaines, rapide, impétueux, toujours jeune.

6. Agni soutient tous les assauts ; il ne saurait être vaincu, et il fait la force des Dévas. Il est l’auteur de toute abondance.

7. Le mortel qui l’honore par l’offrande des mets sacrés s’approche (heureusement) du trône où brille (un dieu) purificateur.

8. Puissions-nous, sages (et dévoués), réunir les faveurs d’Agni, qui possède tous les biens !

9. Ô Agni, nous demandons l’abondance et la précieuse richesse. Voilà pour quel motif les Dévas s’adressent à toi.


HYMNE VI.

À Indra et Agni, par Viswâmitra.

(Mètre : Gâyatrî.)

1. Indra et Agni, traversez l’air pour venir, à la voix de notre prière, partager nos copieuses libations. Buvez, provoqués par nos hymnes.

2. Indra et Agni, le Sacrifice marche, animé par le chant du poëte. (Appelés) par la Prière, buvez de nos libations.

3. Par l’hommage du sacrifice, par la voix du poëte, j’honore Indra et Agni. Qu’ils viennent se rassasier de notre soma.

4. J’invoque Indra et Agni, invincibles triomphateurs, terribles vainqueurs de Vritra, auteurs d’abondants bienfaits.

5. Les poëtes, savants dans les rites sacrés, vous célèbrent par leurs hymnes. Ô Indra et Agni, je vous apporte mon offrande.

6. Indra et Agni, unissant vos efforts, vous avez ébranlé les quatre-vingt dix villes, épouses du brigand (céleste)[1199].

7. Indra et Agni, autour de vous agissent les Rites divins, suivant avec respect les voies du sacrifice.

8. Indra et Agni, avec vous habitent la Force et l’Abondance. C’est vous qui lancez les eaux (sur la terre).

9. Indra et Agni, (animés) par nos offrandes, vous ornez les mondes célestes, et votre force se fait partout sentir.


HYMNE VII.

À Agni, par Richabha, fils de Viswâmitra.

(Mètre : Anouchtoubh.)

1. En l’honneur du divin Agni fais entendre tes plus beaux chants. Qu’il vienne avec les dieux, et, objet de notre profonde vénération, qu’il se place sur notre gazon.

2. Plein de justice, il est le maître du ciel et de la terre ; les (Dévas) secondent et augmentent sa force. Chargés d’holocaustes, (les prêtres) le chantent, et par leurs offrandes cherchent à obtenir son secours.

3. C’est lui qui est le sage directeur de nos (prêtres), l’instituteur des sacrifices. Honorez donc Agni, qui est l’auteur, le distributeur de tout bien.

4. Que pour prix de nos hommages Agni nous accorde ses dons les plus heureux. Que par lui nous arrive une florissante moisson des biens du ciel, de la terre et des eaux[1200].

5. Les (prêtres), en chantant leurs hymnes, allument les feux de cet Agni, sacrificateur resplendissant, et souverain maître des hommes, et ils le disposent pour ses œuvres merveilleuses.

6. Ô toi que les Dévas appellent avec ferveur, garde-nous au milieu de nos cérémonies et de nos chants. Brille heureusement pour nous, ô Agni, toi dont les Marouts[1201] augmentent la splendeur, et qui es riche de mille trésors.

7. Ô Agni, accorde-nous une opulence ornée de mille biens, douée de gloire et d’éclat, entourée de famille ; (accorde-nous) une force et une puissance qui jamais ne puissent décroître.


HYMNE VIII.

À Agni, par Richabha.

(Mètre : Trichtoubh.)

1. Le (dieu) sage, prudent et juste, prêtre et sacrificateur, apparaît, pour notre bonheur, au milieu de nos cérémonies : l’enfant de la Force, Agni, au char brillant, à la chevelure enflammée, sur son trône terrestre, se revêt de toute sa force.

2. Je t’adresse mon hommage, à toi qui peux m’entendre, (dieu) juste et fort. Exauce-moi. Sage, tu amènes (les dieux) sages comme toi. Digne de nos adorations, viens t’asseoir sur notre cousa, au milieu de nous, et prêt à nous secourir.

3. Toutes chargées d’offrandes, que l’Aurore et la Nuit arrivent par les routes du vent. Au moment où (nos prêtres) jettent le beurre de l’holocauste sur l’antique (Agni), qu’elles viennent dans notre demeure, placées sur le devant de leur char.

4. Puissant Agni ! Mitra, Varouna, les Viswas, les Marouts t’honorent avec bonheur, lorsque tu t’élèves tout resplendissant, ô fils de la Force, et répandant, (comme) le soleil, tes rayons parmi les hommes.

5. Nous approchons de toi avec vénération, tendant nos bras pour te présenter aujourd’hui l’offrande que, tu désires. En ta qualité de prêtre, ô Agni, fais agréer aux dieux notre culte respectueux, notre prière innocente.

6. Enfant de la Force, un dieu tel que toi est pour nous une source toujours pleine de secours et d’abondance ; accorde-nous des biens sans nombre ; ô Agni, fais aussi que nous soyons justes et bons.

7. Ô dieu sage et fort, mortels que nous sommes, nous avons accompli pour toi l’œuvre du sacrifice. Souviens-toi de tous ceux qui ont chargé le char de tes offrandes. Immortel Agni, consomme entièrement notre (holocauste).


HYMNE IX.

À Agni, par Outkila, fils de Cata.

(Mètre : Trichtoubh.)

1. Développe tes brillantes clartés et détruis nos ennemis, les Rakchasas et les Maladies. Que je me trouve couvert par la protection du grand et heureux Agni, et placé sous la direction d’un (dieu) digne de nos hommages.

2. Sois notre gardien. Entends notre prière, et au lever de l’aurore, et à l’apparition du soleil. Comme un père aime sa postérité, chéris nos hymnes, ô toi, Agni, dont le corps est resplendissant.

3. Généreux Agni, œil de la nature, brille, au milieu de l’obscurité, de toute ta splendeur ; sois notre refuge et notre conducteur ; délivre-nous du mal ; (dieu) toujours jeune, donne-nous l’opulence que nous désirons.

4. Brille, invincible et généreux Agni ; force pour nous toutes les villes (célestes), et donne-nous leurs trésors. Tu possèdes tous les biens, et tu connais l’art de diriger (les hommes). Tu es le guide du sacrifice, (que nous regardons comme) un noble et riche protecteur.

5. Chanté par nous, (dieu) brillant et sage, porte vers les (autres dieux) nos nombreuses offrandes ; qu’ils en jouissent sans partage. Sois comme un char tout comblé de richesses ; ô Agni, que par toi le Ciel et la Terre, doués de tant de beautés, reçoivent les mets (sacrés).

6. Généreux Agni, rassasie ta soif, goûte nos offrandes. Rends-nous favorables le Ciel et la Terre, auteurs de tous les biens. Avec les (autres) dieux, dieu de lumière, viens (à nous), et que la folie d’un mortel ne cause point notre perte.

7. Ô Agni, en échange de nos invocations, fais que la terre soit à jamais libérale pour nous, et féconde en troupeaux ! que nous ayons une belle lignée d’enfants et de petits-enfants ! Ô Agni, que ta bonté soit avec nous !


HYMNE X.

À Agni, par Outkila.

(Mètre : Vrihatî.)

1. Agni est le maître d’une félicité pleine de grandeur et de force. Il est le maître d’une opulence riche en vaches, féconde en enfants. Il est le maître de la puissance qui détruit un ennemi.

2. Vaillants Marouts, attachez-vous à ce (dieu) qui répand l’abondance et le bonheur. Que ces (Marouts), habitués à vaincre leurs ennemis sur les champs de bataille, nous fassent chaque jour triompher de nos adversaires.

3. Agni, généreux et riche en bienfaits, augmente notre fortune ; donne-nous la force, l’abondance, la santé, la vigueur. Multiplie notre famille.

4. Le (dieu) qui a fait tous les mondes, qui, au milieu des Dévas, forme et accomplit les rites (sacrés), vient, dans cette société toute divine, écouter nos hymnes et nous apporte la force.

5. Agni, ne nous abandonne point à l’ignorance, et à la faiblesse des hommes sans cœur. Ô fils de la Force, que nos vaches soient sauvées et notre honneur garanti. Éloigne nos ennemis.

6. Heureux et opulent Agni, tu es le maître d’une abondance large et féconde. Fais-nous jouir d’une grande, d’une glorieuse affluence de richesses et de félicité.


HYMNE XI.

À Agni, par Cata, fils de Viswâmitra.

(Mètre : Trichtoubh.)

1. Agni, objet commun de tous les hommages, remplit ses fonctions suprêmes, et reçoit d’onctueuses libations. Déployant sa chevelure de flamme, prenant une forme sous (l’effusion) du beurre (sacré), purificateur et prêtre, (il vient) pour honorer les dieux.

2. Agni, ô toi qui possèdes tous les biens, reçois cet holocauste, et offre-le à la Terre et au Ciel : honore les dieux. Tel que Manou[1202], dirige aujourd’hui notre sacrifice.

3. Agni, ô toi qui possèdes tous les biens, tu as trois aliments[1203] ; tu as trois mères qui concourent à ton lever[1204]. Avec elles rends aux dieux les honneurs qu’ils attendent ; (dieu) sage, fais le bonheur de l’homme qui offre le sacrifice.

4. Agni, ô toi qui possèdes tous les biens, nous te célébrons, nous t’adorons, (dieu) noble, brillant, honorable. Les Dévas t’ont fait pour être le messager (du sacrifice), la terreur de l’ennemi, le porteur de l’holocauste, le dépositaire de l’ambroisie.

5. Que, placé près de (ton foyer) le matin et dans deux autres (moments)[1205] un homme religieux et fortuné veuille te vénérer en te présentant la Swadhâ ; ô (dieu) sage, remplis en sa faveur les divers devoirs du prêtre. Dans la sainte cérémonie consomme notre sacrifice.


HYMNE XII.

À Agni, par Cata.

(Mètre : Trichtoubh.)

1. Agni, sois bienveillant pour nous ; viens tel qu’un ami, et dans ton amitié sois bon comme un père et une mère. Les hommes sont exposés à beaucoup de maux : brûle les ennemis qui se déclarent contre nous.

2. Agni, brûle les ennemis qui nous menacent ; réduis en cendres l’orgueil de notre adversaire impie. (Dieu) prudent et protecteur, brûle les (êtres) dépourvus de sagesse. Que tes rayons immortels soient vainqueurs.

3. Agni, j’implore ta faveur, et je t’offre ce beurre (sacré) pour obtenir la puissance et la force. Je t’adore, et mesurant mes hommages à ma fortune, j’emploie la sainte prière et j’attends de toi mille faveurs.

4. Enfant de la Force, allume tes feux en entendant nos louanges ; donne à tes serviteurs, (donne), Agni, aux enfants de Viswâmitra une riche et abondante opulence. Nous demandons le bonheur, et arrosons ton corps de nombreuses libations.

5. Agni, généreux bienfaiteur, comble-nous de tes dons précieux en récompense de cet éclat brillant dont nous t’entourons. (Vois, en effet, comme) tes bras s’étendent magnifiquement dans le foyer de ton heureux serviteur, (comme) tes formes se déploient.


HYMNE XIII.

À Agni, par Gathin.

(Mètre : Trichtoubh.)

1. J’honore dans le sacrifice Agni, prêtre sage et savant, héraut habile dans la louange. Que pour la fête que nous célébrons en l’honneur des dieux il nous serve de pontife, et qu’il reçoive nos offrandes pour nous accorder la richesse et l’abondance.

2. Ô Agni, tournant (avec respect) vers ma droite[1206], j’ouvre et célèbre pour toi cette fête où sont prodigués les holocaustes, les mets, les offrandes, le beurre (consacré). Avec tes dons et tes trésors viens à notre sacrifice.

3. Ton serviteur t’apporte une âme dévouée. Donne-lui une heureuse famille. Puissions-nous, ô Agni, tenir de toi une mâle puissance, de la gloire et des richesses.

4. Ô Agni, tes serviteurs se sont plu à nourrir l’éclat de tes rayons divins. Amène donc les dieux à cette fête, où, prêtre toujours jeune, tu déploies aujourd’hui ta force merveilleuse.

5. Les Dévas, dans cette assemblée sainte, t’ont pris pour sacrificateur, et ils ont versé sur toi la libation. Éveille-toi, Agni, notre sauveur, et répands sur nous tes bienfaits.


HYMNE XIV.

À Agni, par Gathin.

(Mètre : Trichtoubh.)

1. Le (prêtre), apportant (l’holocauste) et ses hymnes, invoque le matin Agni, l’Aurore, les Aswins, (le dieu appelé) Dadhicrâs[1207]. Qu’ils nous entendent, ces dieux brillants, heureux de nos hommages et amis de nos sacrifices.

2. Ô Agni, enfant du Sacrifice, tu as trois aliments[1208], trois foyers[1209], trois langues[1210] avides de libations, trois corps[1211]. Avec ces (corps) sauve-nous ; écoute nos prières.

3. Immortel Agni, dieu qui possèdes tous les biens et qui aimes la Swadhâ, tes rayons sont innombrables. Bienfaiteur de tous les êtres et ami des malheureux, (les Dévas) ont rassemblé en toi les (splendeurs) magiques qui distinguent les Asouras[1212].

4. Agni est comme Bhaga[1213] ; il est le chef des troupes divines, le dieu juste, le gardien des saisons. Il donne la mort à Vritra ; antique et possesseur de toute science, il peut faire traverser à son serviteur tous les maux (de la vie).

5. J’appelle ici Dadhicrâs, Agni, la divine Aurore, Vrihaspati, le brillant Savitri, les Aswins, Mitra et Varouna, Bhaga, les Vasous, les Roudras, les Adityas.


HYMNE XV.

À Agni, par Gathin.

(Mètres : Trichtoubh, Anouchtoubh et Vrihatî.)

1. (Ô Dieu) qui possèdes tous les biens, présente notre sacrifice aux Immortels. Prends cet holocauste, Agni sacrificateur, siége le premier (sur notre cousa), et goûte à nos onctueuses libations de beurre.

2. (Agni) purificateur, pour toi coulent ces onctueuses libations de beurre. Remplis ton office, et pour l’honneur des dieux, reçois nos offrandes les plus précieuses.

3. À toi, sage et généreux Agni, ces libations de beurre ! Illustre prophète, tes feux s’allument. Sois le conservateur de notre sacrifice.

4. Rapide et puissant Agni, pour toi coulent ces onctueuses libations de beurre. À la voix de nos poëtes, viens entouré d’une grande lumière. (Dieu) sage, prends cet holocauste.

5. Nous élevons (nos coupes pleines) d’onctueuses et brillantes libations, et nous les vidons en ton sein. (Agni) protecteur, ces libations coulent sur ton corps. Reçois-les pour les transmettre aux dieux.


HYMNE XVI.

À Agni, par Gathin.

(Mètres : Trichtoubh et Anouchtoubh.)

1. Voici Agni qui reçoit la libation de soma. Indra prend pour lui cette libation, et la verse dans ses entrailles. Ô (Dieu) qui possèdes tous les biens, telles qu’un coursier rapide, nos liqueurs (vives) et abondantes arrivent jusqu’à toi au milieu de nos louanges.

2. Adorable Agni, ta forme est au ciel, sur la terre, dans les plantes, dans les ondes[1214]. Cette lumière éclatante que tu as jetée sur l’étendue de l’air se développe comme un océan. Elle forme l’œil du monde.

3. Agni, tu t’élèves dans la mer du ciel[1215] ; tu vas interpeller les dieux qui peuvent être superbes. Les Ondes, placées au delà comme en deçà du monde brillant du soleil, s’approchent avec vénération.

4. Que les Feux de nos foyers s’élèvent à l’envi l’un de l’autre sur le lit de terre qui les contient. Pleins d’innocence et de bonté, qu’ils se plaisent à notre sacrifice, et (qu’ils dévorent) nos abondantes offrandes.

5. Ô Agni, en échange de nos invocations, fais que la terre soit à jamais libérale pour nous, et féconde en troupeaux ! que nous ayons une belle lignée d’enfants et de petits-enfants ! Ô Agni, que ta bonté soit avec nous !


HYMNE XVII.

À Agni, par Dévasravas et Dévavâta, fils de Bharata.

(Mètres : Vrihatî et Trichtoubh.)

1. Tiré (de l’Aranî), établi sur (le foyer), Agni, jeune et sage, conduit le Sacrifice. L’impérissable Agni (assis) sur ce bûcher périssable y reçoit l’ambroisie (de la libation).

2. Les deux fils de Bharata, Dévasravas et Dévavâta, ont heureusement extrait (de l’Aranî) le généreux Agni. Ô Agni, vois la riche abondance de nos offrandes. Sois chaque jour notre directeur.

3. (Dieu) antique, cher nourrisson, dix ministres[1216] l’ont engendré au sein de ses mères[1217]. Ô Dévasravas, fais l’éloge d’Agni, enfanté par Dévavâta, et qui se met au service des hommes.

4. Avec l’espoir de jours favorables et sereins, je t’ai placé sur ce noble trône de terre (que consacre le nom) d’Ilâ[1218]. Brille avec toute ta pompe, ô Agni, dans ces lieux qu’habitent les enfants de Manou, aux bords de la Drichadwati, de l’Apayâ et de la Saraswatî[1219].

5. Ô Agni, en échange de nos invocations, fais que la terre soit à jamais libérale pour nous, et féconde en troupeaux ! Que nous ayons une belle lignée d’enfants et de petits-enfants ! Ô Agni, que ta bonté soit avec nous !


HYMNE XVIII.

À Agni, par Viswâmitra.

(Mètres : Anouchtoubh et Gâyatrî.)

1. Agni, triomphe des armées, éloigne les ennemis. Par ta force invincible tu renverses tes adversaires. Brille pour celui qui t’apporte son offrande.

2. Agni, tes feux sont allumés sur (le foyer) de terre[1220]. Pontife immortel, ami du Sacrifice, réjouis-toi de nos hommages.

3. Agni, éveille-toi avec éclat. Enfant de la Force, je t’appelle ; viens t’asseoir sur mon cousa.

4. Agni, avec tous tes Feux divins, ministres des sacrifices, accomplis le vœu de nos prières.

5. Agni, donne à ton serviteur une opulence forte et brillante. Fais-nous riches en enfants.


HYMNE XIX.

À Agni, par Viswâmitra.

(Mètre : Virât.)

1. Agni, tu es sage et prudent ; tu possèdes tous les biens. Tu es fils du Ciel, fils de la Terre[1221]. Honore ici tous les dieux.

2. Le sage Agni donne des forces (à l’homme) ; il est l’ornement (du monde), et transmet aux Immortels nos offrandes. (Dieu) opulent, amène ici vers nous tous ces dieux.

3. Le prévoyant Agni illumine le Ciel et la Terre, divins et immortels parents de la Nature. Il est magnifique ; il règne, environné d’offrandes et de mets (sacrés).

4. Agni et Indra, venez ici, dans la demeure de votre serviteur, qui a préparé les libations. (Venez) boire son soma, dieux cléments.

5. Agni, enfant de la Force, (dieu) possesseur de tous les biens, tes feux s’allument sans relâche dans le séjour des Ondes (divines)[1222]. Tes (clartés) secourables embellissent les mondes.


HYMNE XX.

À Agni, par Viswâmitra.

(Mètres : Djagatî et Trichtoubh.)

1. Enfants de Cousica[1223], l’âme pleine de vénération, et (les mains) chargées d’offrandes, priant, et animés par l’espoir, nous invoquons Agni (surnommé) Vêswânara[1224], dieu juste, maître du bonheur, bienfaisant, rapide, digne de notre amour.

2. Nous appelons à notre secours l’adorable, le brillant Agni, (que nous nommons) Vêswânara, Mâtariswan[1225], Vrihaspati[1226]; (nous invitons) à cette fête, que Manou[1227] prépare pour les dieux, l’hôte sage et actif qui daigne écouter (nos prières).

3. Tel que le coursier hennissant qui s’enflamme aux feux de ses cavales, Vêswânara est d’âge en âge allumé par les enfants de Cousica. Qu’Agni, éveillé au milieu des Immortels, nous accorde une heureuse génération d’enfants vigoureux et de chevaux excellents.

4. Que les Feux rapides s’avancent, unis à l’éclat et à la force. Que les Marouts attellent leurs daims[1228]. Ces (dieux) invincibles et maîtres de tous les biens ébranlent les montagnes (célestes), et répandent au loin les Ondes.

5. Les Marouts sont ornés des richesses d’Agni[1229]. Invoquons ces vainqueurs irrésistibles, ces protecteurs brillants et formidables. Les généreux enfants de Roudra nous apparaissent sous la forme de la pluie ; ils font entendre leur voix pareille au rugissement du lion.

6. Unissant nos voix pieuses, nous chantons la splendeur d’Agni, ou la force des Marouts. Les sages (Marouts), portés sur leurs montures[1230] aux couleurs variées, et chargés de présents, arrivent à nos sacrifices.

7. Agni naît (et s’écrie) : Je suis Djâtavédas[1231] ; le beurre (sacré) forme mon œil[1232], l’ambroisie de la libation ouvre ma bouche. Ma splendeur est triple[1233] ; c’est moi qui ai mesuré le monde[1234] ; je suis le feu toujours nouveau, l’holocauste, l’adoration. »

8. De trois sources diverses[1235] (Agni) verse ses rayons les plus purs. Par sa sagesse il engendre la Prière (du matin) et la Lumière. Ses lueurs forment et agrandissent le Soleil ; il fait apparaître le Ciel et la Terre.

9. Ô Ciel et Terre, conservez cet (Agni), source intarissable (de bienfaits), qui viennent sur nous en forme de pluies fécondantes, sage gardien de nos prières, (ami) véridique initié à toutes nos œuvres, heureux à l’approche des deux grands parents[1236].


HYMNE XXI.

À Agni, par Viswâmitra.

(Mètre : Gâyatrî.)

1. Voilà que pour vous (s’avancent) les Mets (divins), brillants des feux (du foyer), avec la Cuiller (du sacrifice). Entouré des Libations, (Agni) monte vers les dieux.

2. J’adresse mon hymne à Agni, sage pontife, opulent bienfaiteur.

3. Divin Agni, puissions-nous dignement célébrer ta fête, et, remplis de force, vaincre nos ennemis !

4. Les feux d’Agni s’allument pour le sacrifice. Nous invoquons (le dieu) purificateur, adorable, à la brillante chevelure.

5. Agni s’entoure de larges splendeurs ; le beurre (sacré) compose sa forme ; immortel, saintement invoqué, il transporte l’holocauste du sacrifice.

6. Confondant leurs efforts, les (prêtres) apportent l’holocauste et la prière, élèvent la cuiller (sacrée) et honorent Agni en l’appelant à leur secours.

7. Dieu prêtre, immortel, il vient avec pompe pour présider au sacrifice et pour le consommer.

8. Sage et fort, il siége parmi les mets (qui donnent la force) ; il est amené au milieu des saintes cérémonies : il accomplit le sacrifice.

9. L’élu du monde devient le fruit de la Prière. La fille de Dakcha[1237] reçoit le père, en qui est le germe de tous les êtres.

10. Oui, (la fille) de Dakcha, Ilâ[1238], te reçoit, enfant de la Force, élu du monde, brillant Agni, avide (de nos libations).

11. Les sages, adorateurs (d’Agni), au sein du sacrifice, allument et nourrissent les feux de celui qui fait mouvoir (le monde), et précipite les eaux.

12. Je chante le sage et puissant Agni, l’enfant[1239] des Mets (sacrés), qui brille et dans le sacrifice et dans le ciel.

13. Il s’enflamme, ce généreux Agni, (dieu) éclatant, adorable, digne de nos louanges, ennemi des ténèbres.

14. Le magnifique Agni, tel qu’un coursier (rapide), lance ses rayons, et transporte les dieux. Les (hommes) l’honorent par leurs holocaustes et leurs hymnes.

15. Chargés de présents, ô généreux Agni, nous allumons les feux resplendissants d’un (dieu) libéral en ses bienfaits[1240].


HYMNE XXII.

À Agni, par Viswâmitra.

(Mètres : Gâyatrî, Ouchnih, Trichtoubh et Djagatî.)

1. Agni, (nommé) Djâtavédas, reçois avec plaisir nos offrandes et nos holocaustes du matin, ô (Dieu) qui récompenses la prière.

2. Pour toi, Agni, l’offrande a été clarifiée, et préparée soigneusement ; (Dieu) toujours jeune, reçois-la avec plaisir.

3. Ô Agni, prends cette offrande consacrée par nos invocations, et composée ce matin. Tu es le fils de la Force, siégeant dans le sacrifice.

4. Sage Djâtavédas, dans le milieu du jour, reçois avec plaisir notre hommage. Agni, tu es grand ; les prêtres par leurs œuvres élèvent ta fortune.

5. Agni, fils de la Force, dans le troisième sacrifice[1241] aime notre offrande consacrée par la prière. Au milieu des dieux immortels, éveillé par nos louanges, accepte nos libations précieuses.

6. Agni, possesseur de tous les biens, développe tes feux, et reçois avec plaisir et notre invocation et notre offrande composée ce matin.


HYMNE XXIII.

À Agni, par Viswâmitra.

(Mètres : Anouchtoubh, Djagatî et Trichtoubh.)

1. Voici le moment d’agiter (l’Aranî), le moment d’enfanter (Agni). Apporte la reine du peuple[1242] et, suivant l’antique usage, travaillons à produire (son fils).

2. Le (dieu) qui possède tous les biens est dans les deux pièces de l’Aranî ; il y est comme l’embryon au sein de sa mère, cet Agni que, chaque jour, les enfants de Manou, en s’éveillant, doivent honorer avec l’hymne et l’holocauste.

3. (Prêtre) intelligent, pousse (la pièce supérieure) dans la pièce inférieure ; et qu’à l’instant (l’Aranî) fécondée enfante (le dieu) qui remplit tous les vœux. (Cependant) reçue sur une poignée (de feuilles), l’étincelle rougeâtre a brillé, et le fils d’Ilâ[1243] a paru sur le foyer.

4. Ô Agni, possesseur de tous les biens, nous te plaçons sur le sein d’Ilâ[1244], sur le trône de terre, pour te charger de nos holocaustes.

5. Prêtres pieux, travaillez à produire (le dieu) sage, prudent, véridique, immortel et charmant. Enfantez Agni, le héraut du sacrifice, le premier des êtres adorables.

6. Agité avec force, il se lance comme un coursier rapide, et vient sur le bûcher briller avec éclat. Invincible dans sa voie comme le char des Aswins, il sort de la pierre qui le contient en dévorant les plantes.

7. Agni est né ; ses feux s’animent ; fort, sage, bienveillant, il est chanté par les poëtes, et les Dévas ont établi pour le sacrifice ce (dieu) adorable, qui connaît tout et qui porte l’holocauste.

8. Siége donc sur ton trône, sacrificateur intelligent, et porte notre sacrifice dans le lieu où il doit être récompensé. Agni, honore les dieux, et présente-leur l’holocauste. Réserve pour ton serviteur une large part dans tes bienfaits.

9. Ô mes amis, augmentez la masse de cette fumée. Apportez sans relâche les mets qui nourrissent cet Agni fort et victorieux, par lequel les dieux obtiennent le triomphe sur les Dasyous.

10. Voilà le berceau[1245] où, dans le moment favorable, tu brilles après ta naissance. Reconnais-le, ô Agni, et viens t’y placer, pour te montrer sensible à nos vœux.

11. Tant qu’il n’est encore qu’un embryon[1246], on l’appelle Tanoûnapât[1247]. Une fois né, il est Narâsansa[1248]. Il devient Mâtariswan[1249] dès qu’il s’étend au sein de l’air, et dans sa marche se fait le créateur de Vâyou.

12. Prudent Agni, produit et placé convenablement par des (prêtres) habiles, rends-toi propice à leurs travaux. Honore les dieux au nom de leur fidèle serviteur.

13. Les Immortels ont enfanté un mortel invincible, lui sauveur vigoureux et redoutable. Dix frères[1250], unissant leurs efforts, ont avec bruit applaudi à sa naissance.

14. Qu’il brille sans interruption au sein de sa mère[1251] (Ilâ), le (dieu) sacrificateur chargé des sept offrandes. Il ne meurt point ; pour notre bonheur il naît chaque jour des entrailles de l’Aranî[1252].

15. Des enfants de Cousica, nos anciens[1253], prêtres aussi savants que guerriers redoutables, pareils à une avant-garde de Marouts, ont su pourvoir et aux prières et aux offrandes. Ils ont dans chaque maison allumé les feux d’Agni.

16. En ce jour et dans le cours de ce sacrifice, nous aussi, ô pontife intelligent, nous t’honorons. Daigne accourir vers nous, daigne nous favoriser. Tu nous connais, (dieu) sage, viens à notre soma.




LECTURE DEUXIÈME.

HYMNE I.

À Indra, par Viswâmitra.

(Mètre : Trichtoubh.)

1. Ô Indra, tes amis t’appellent ; leur coupe est remplie de soma ; ils ont pour toi des libations et des offrandes. (Par toi) ils peuvent repousser l’attaque de leurs ennemis. Il n’est personne (au-dessus de toi).

2. Ta brillante demeure ne doit pas être éloignée. Viens, traîné par tes deux coursiers azurés. Nous sacrifions en l’honneur d’un (dieu) fort et généreux. (Pour lui) nos coupes s’épuisent sur les feux d’Agni.

3. Indra est beau[1254], magnifique, victorieux, entouré d’une nombreuse armée, terrible en ses œuvres infinies. Quand tu apparais au milieu des mortels, attaqué et menaçant, (dieu) puissant, quelles sont alors tes prouesses !

4. Seul tu ébranles ce qui est inébranlable ; tu vas étouffant ce qui apporte l’obscurité. En te voyant poursuivre ton œuvre, le Ciel et la Terre, les Montagnes (aériennes) se sont arrêtées comme stupéfaites.

5. (Dieu) que tous les êtres invoquent, tu es le vainqueur de Vritra. Seul, par la force de ton bras, tu donnes la sécurité et la confiance. Ô magnifique Indra, l’immensité du ciel et de la terre dans ta main, ce n’est jamais qu’une simple poignée.

6. Indra, apparais sur la voûte (du ciel) avec tes chevaux azurés ; que ta foudre aille frapper tes ennemis. Tue ceux qui sont et devant et derrière toi ; (tue) ceux qui fuient. Que par toi le bien soit partout ; que (ta puissance) se fasse partout sentir.

7. Le mortel qu’un maître tel que toi favorise reçoit une fortune toute nouvelle pour lui. Ô Indra, toi que tant d’êtres invoquent, ta bonté, provoquée par nos offrandes, devient libérale ; tes dons sont innombrables.

8. Ô Indra, toi que le monde implore, tu as déjà pulvérisé ce Counârou[1255], lourd et immobile, privé de bras et accompagné de Dânou[1256] (sa mère). Ô Indra, tu as tué par ta force Vritra, dont la grandeur devenait menaçante, et dont les pieds ont été tranchés.

9. Ô Indra, la terre était une masse confuse et mobile ; c’est toi, Indra, qui as étendu son immensité, et qui l’as fixée sur sa base. (Dieu) généreux, tu as consolidé le ciel et l’air. Qu’elles coulent aussi, les ondes qui te doivent leur naissance.

10. Bala laissait flétrir (les plantes)[1257], et, retenant les vaches (célestes), se renfermait par crainte de son antique ennemi. Indra, élargissant les voies, a rendu la liberté à ces vaches, et leurs mugissements s’élevèrent avec bruit vers celui que le monde implore.

11. Seul, Indra emplit le Ciel et la Terre, ce couple si opulent. Noble héros, pousse dans les airs tes rapides chevaux, et de ton char laisse tomber sur nous l’abondance.

12. Chaque jour (le dieu) porté sur les chevaux azurés[1258] engendre ces régions célestes qu’à son ordre parcourt le Soleil. Dès qu’il a ouvert les voies, aussitôt le Soleil lance ses coursiers. Telle est (l’œuvre) d’Indra.

13. Au moment où la Nuit s’enfuit et que l’Aurore apparaît, le monde veut voir la grande, la magnifique Lumière. Elle arrive avec pompe, et chacun peut alors connaître les œuvres nombreuses et admirables d’Indra.

14. La grande Lumière est sur son trône ; la Vache (céleste)[1259] arrive, portant dans ses mamelles un lait abondant. En elle est renfermée toute espèce de douceur. C’est encore là un bienfait d’Indra.

15. Indra, sois fort ; des ennemis ont voulu entraver ta marche. Sois bon pour celui qui te sacrifie, pour celui qui te chante et pour tes amis. Extermine ces mortels atrabilaires, envieux, haineux, qui contre nous s’arment de la flèche.

16. De vils ennemis font entendre leurs cris. Frappe-les de ta foudre brûlante. Coupe à la racine, arrache, brise, tue le Rakchasa, ô Maghavan, et triomphe.

17. Oui, Indra, déracine cet arbre de Rakchasa ; coupe-le par la moitié ; abats-en la cime. Que, surpris et stupéfait, cet impie périsse sous le coup de ton arme rapide.

18. Maître du monde, sois notre bienfaiteur ; que tes chevaux t’amènent à nos abondantes libations, et (pour nous récompenser) rends-nous possesseurs d’une large fortune. Indra, que Bhaga[1260] soit pour nous l’auteur d’une nombreuse famille.

19. Donne-nous la protection de ce brillant Bhaga ; nous avons confiance en ta libéralité. Tel que la bouche d’un volcan[1261], notre désir s’étend. Remplis-le, toi qui es le maître des biens.

20. Satisfais ce désir ; amplifie-le en nous accordant des vaches, des chevaux, des richesses admirables. Jaloux de posséder tes faveurs, les sages, enfants de Cousica, t’adressent leurs offrandes et leurs prières.

21. Maître des vaches (aériennes), déchire pour nous leur sein fécond. Rassemble sur nous toutes les ressources de l’abondance. Céleste bienfaiteur, tu es juste et fort. Ô Maghavan, toi qui donnes un lait (divin), ne nous oublie pas.

22. Appelons à notre secours, au sein de ce sacrifice, le grand et magnifique Indra, le plus noble des héros au milieu du combat, aussi clément que terrible, vainqueur de ses ennemis sur le champ de bataille et couvert de leurs dépouilles.


HYMNE II.

À Indra, par Viswâmitra.

(Mètre : Trichtoubh.)

1. Le sage, père (d’Ilâ)[1262], voulant produire celui qui fait l’éclat du sacrifice, a dit : « Qu’Agni devienne par ma fille mon petit-fils ! » Et aussitôt dans le sein de cette fille, par la vertu d’un père aussi puissant, la libation est devenue féconde[1263].

2. En effet, le vœu de la jeune mère n’a pas été trompé ; elle a conçu. Le maître a déposé en elle un germe fertile ; et si à l’un des auteurs de sa naissance[1264] le pieux Agni doit la vie, à l’autre il doit ses formes splendides.

3. Agni est né ; il s’élève sous les effusions de la coupe (sacrée) ; il produit lui-même de brillants enfants[1265]. Grande est cette famille, grand est son éclat, grand est son emploi dans les sacrifices d’Indra.

4. Les (troupes) victorieuses (des Marouts) se rassemblent autour (d’Indra), disposé à combattre. La nouvelle s’est répandue que le grand astre sortait des ténèbres. Les Aurores l’ont su, et elles accourent. Indra seul est le maître des vaches (célestes).

5. Les sept[1266] sages ont, dans leur prudence, découvert que ces vaches étaient renfermées dans l’antre oriental. Leur pensée s’est tournée du côté (d’Indra). Ils ont suivi toute la voie du sacrifice, et (le dieu), connaissant leurs œuvres pieuses, a pénétré dans l’antre.

6. C’est Saramâ, qui, sachant que la montagne était brisée, a fait sortir l’antique (troupeau) qui nous donne la vie. C’est (Saramâ), pourvue de pieds légers[1267], qui la première entendit le mugissement des (vaches) immortelles, et qui dirigea les recherches.

7. Le plus sage (des dieux) s’est présenté, jaloux de prouver son amitié. La montagne a ouvert son sein devant le héros bienfaisant. Le mortel (ennemi des Asouras), uni aux jeunes (Marouts), a distribué (aux hommes) ces riches dépouilles. Angiras[1268] lui adresse un hommage (de reconnaissance).

8. Modèle et prince de tous les êtres, il connaît tout ce qui est né. Il a donné la mort à Souchna. Ami prudent et dévoué, du haut du ciel où il gouverne les vaches (divines), qu’il délivre ses amis de tout mal.

9. Les Angiras[1269], dans leur désir d’obtenir les vaches (célestes), viennent s’asseoir (sur le cousa), chantent des hymnes, et font couler les libations immortelles. Ils reviennent souvent prendre leur place dans le sacrifice où chaque mois réclame leur offrande.

10. À la vue de ce lait que leur verse cette vache antique, et qu’ils ont obtenu par leurs œuvres, (les Angiras) ont tressailli de joie. Leurs chants ont amené la lumière qui éclaire le ciel et la terre, ont constitué le monde, et assuré aux hommes la jouissance des vaches (célestes).

11. Indra, le vainqueur de Vritra, accompagné des Marouts, et excité par les hymnes et les holocaustes, a formé les vaches (célestes). C’est pour lui[1270] que la vache (du sacrifice), large et féconde, fait couler le miel savoureux du beurre consacré.

12. En l’honneur du bienfaisant (Indra) les pieux Angiras célèbrent avec pompe une grande et brillante fête. Assis (sur le cousa), ils couvrent d’une colonne de (fumée) les deux parents (du monde) ; ils élèvent une flamme majestueuse.

13. Au moment où s’opère la séparation du Ciel et de la Terre, que la grande prière consolide l’univers qui s’agrandit. Qu’Indra, célébré par nos hymnes respectueux, réunisse en lui toutes les forces les plus indomptables.

14. Ton amitié est grande, ô Maghavan ; je veux que le vainqueur de Vritra soit fort. (Vois) les puissantes cavales qui vont te porter. Nous te présentons, au nom du père de famille[1271], et ces hymnes et ces offrandes. Ne nous oublie pas, ô gardien des vaches (célestes).

15. Le prévoyant Indra donne à ses amis la jouissance de toute cette nature, animée et inanimée. Il a, secondé des Marouts, produit avec splendeur le Soleil, l’Aurore, et Agni sous ses diverses formes.

16. Cet (Indra) qui est tout, et (que l’on appelle aussi) Damoûnas[1272]. c’est encore lui qui a créé toutes les Ondes (du sacrifice), venant à l’envi étaler leurs suaves beautés, prodiguer leurs douces faveurs, et s’offrant soir et matin à l’action purifiante des (trois) divinités[1273].

17. Par la vertu puissante de Soûrya se succèdent le Jour et la Nuit, opulents et dignes de nos hommages. Cependant autour de toi, magnanime Indra, (se rassemblent) pour repousser (tes adversaires) (les Marouts), tes nobles et invincibles amis.

18. Vainqueur de Vritra, sois le maître des prières et des hymnes, la vie qui anime tout, le bienfaiteur qui nourrit le (monde). Viens à nous ; sois (toujours) grand, et fais-nous sentir tes heureuses amitiés et tes généreux secours.

19. Tel qu’Angiras, je vénère et je chante (le dieu) antique. Je lui adresse cet hommage. Ô Maghavan, attaque la multitude impie de tes ennemis, et fais-nous jouir du bonheur.

20. Nous avons préparé de pures libations ; que leurs ondes, heureusement pour nous, coulent par toi à pleins bords ! Ô Indra, monte sur ton char, et défends-nous contre l’ennemi. Rends-nous promptement possesseurs de vaches (fécondes).

21. Que le vainqueur de Vritra, maître des vaches (célestes), nous fasse connaître ces vaches (divines). Sous la splendeur de ses rayons qu’il fasse disparaître les noirs (Asouras). Qu’il préside aux prières de notre sacrifice ; qu’il force et qu’il nous ouvre toutes les portes (du ciel).

22. Appelons à notre secours, au sein de ce sacrifice, le grand et magnifique Indra, le plus noble des héros au milieu du combat, aussi clément que terrible, vainqueur de ses ennemis sur le champ de bataille, et couvert de leurs dépouilles.


HYMNE III.

À Indra, par Viswâmitra.

(Mètre : Trichtoubh.)

1. Indra, maître du soma, bois ce brillant breuvage que nous te présentons vers le milieu du jour. Ô Maghavan, tu aimes nos offrandes ; pousse tes coursiers de notre côté ; ouvre la bouche, et enivre-toi de nos liqueurs.

2. Bois, Indra, de ce soma étincelant où se confondent la farine d’orge et le beurre[1274]. Nous te l’offrons pour ton plaisir. Avec la troupe des Marouts, qui donne le signal à l’hymne sacré, viens te livrer à la joie ; uni à ces enfants de Roudra, bois à longs traits.

3. Ô Indra, ces Marouts qui t’honorent augmentent ta gloire ; ils font ta force et ta puissance. (Dieu) à la face majestueuse, au bras armé de la foudre, accompagné des Roudras, bois (ce que nous t’offrons) dans notre sacrifice du milieu du jour.

4. Ces Marouts, qui sont la force d’Indra, nous envoient le miel (céleste) qu’il a préparé. Secondé par eux, (le dieu) a su distinguer par quel côté il peut ouvrir le flanc impénétrable de l’orgueilleux Vritra.

5. Tel que Manou, ô Indra, tu fais l’honneur de notre sacrifice. Bois ce soma, pour perpétuer la force. (Dieu) que transportent des chevaux azurés, avec les rapides et adorables (Marouts), amène-nous les Ondes (célestes) ; car les Ondes dépendent de toi.

6. Quand tu donnes la mort à Vritra, alors tu lances les Eaux pareilles à des coursiers animés au combat. Oui, Indra, de ton trait rapide (tu frappes) cet impie (Vritra), qui semble endormi, et qui retient prisonnières les (Ondes) divines.

7. Avec une vénération profonde nous honorons le grand et magnifique Indra, (Indra) toujours jeune, généreux, immortel. Le ciel et la terre peuvent se mesurer ; la grandeur d’Indra est infinie.

8. Les œuvres d’Indra sont merveilleuses et innombrables : tous les dieux ne sauraient les détruire. Noble héros, il soutient la Terre et le Ciel ; il enfante le Soleil et l’Aurore.

9. Bienveillant Indra, tel est ton pouvoir : il éclate dès l’instant de ta naissance, quand tu as bu notre soma. Tu es fort ; et les mondes, les jours, les mois, les automnes ne sauraient user ta vigueur.

10. À peine es-tu né, Indra, à peine as-tu goûté de notre soma, que la joie te pénètre au sein de ta céleste demeure. Dans ce (dieu), qui remplit le ciel et la terre, que l’on reconnaisse l’antique protecteur des œuvres (pieuses).

11. Tu as donné la mort au violent Ahi qui enchaîne les eaux, ô (athlète) robuste, né pour tant de combats. Le ciel, en effet, ne voit alors que la moitié de ta grandeur, et l’autre partie de ton corps disparaît, assise qu’elle est sur la terre[1275].

12. Ô Indra, que ce sacrifice offert en ton honneur, que ces flots de soma versés pour toi puissent t’agréer. Touché de ces hommages, que tu mérites, conserve ton serviteur, et que nos prières aiguisent ta foudre pour la mort de Vritra.

13. Par mes offrandes je veux me concilier la faveur d’Indra. Puissé-je le rendre attentif à mes hymnes, et le gagner par mes libations, lui qui grandissait et grandit toujours aux chants d’autrefois, d’hier, d’aujourd’hui !

14. L’inspiration (poétique) qui me pénétre naît pour la gloire d’Indra, que je chante avant l’apparition du jour, dans ces lieux mêmes où, prêtres et pères de famille,[1276] ils t’invoquent tous, et te prient de venir, comme sur un vaisseau, les délivrer du mal.

15. Le vase de soma est plein. La Swâhâ semble ouvrir son limpide trésor pour t’inviter à boire. Que les Libations, pour satisfaire la soif d’Indra, s’approchent de lui en tournant vers leur droite[1277].

16. Ni la mer profonde, ô Indra si souvent invoqué, ni l’obstacle des montagnes ne peut t’arrêter. Excité par tes amis, tu peux même briser le robuste Oûrva, détenteur des vaches (célestes).

17. Appelons à notre secours, au sein de ce sacrifice, le grand et magnifique Indra, le plus noble des héros au milieu du combat, aussi clément que terrible, vainqueur de ses ennemis sur le champ de bataille, et couvert de leurs dépouilles.


HYMNE IV.

En l’honneur d’Indra, par Viswâmitra.

(Mètres : Trichtoubh et Anouchtoubh.)

1. (Récit.) Descendant avec vitesse du sommet des montagnes, et emportées à l’envi l’une de l’autre, telles que deux cavales impétueuses, pressant leurs rives avec rapidité, comme deux vaches lèchent (le petit dont elles ont été séparées), la Vipâsâ[1278] et la Soutoudrî[1279] roulent leurs flots abondants.

2. (Viswâmitra parle[1280].) Lancées par Indra et suivant une pente rapide, vous courez à la mer, de même que deux conducteurs de char. Vous vous précipitez l’une vers l’autre, et dans cette mutuelle rencontre vos vagues brillantes s’enflent et se grossissent.

3. Je m’approche de la (Soutoudrî), la plus large des rivières. Nous nous présentons devant la grande et heureuse Vipâsâ. Pressant vos rives comme deux vaches lécheraient leurs petits, vous allez ensemble au réservoir qui vous est commun.

4. (Les Rivières parlent.) Le lait (des vaches célestes) a grossi nos flots, et nous allons toutes au réservoir que nous a préparé le Dieu. Nous ne pouvons arrêter notre course obligée. Que désire le sage qui interpelle les Rivières ?

5. (Viswâmitra parle.) Arrêtez un instant votre course à ma voix, (à la voix de celui) qui offre le soma, ô pieuses Rivières. Fils de Cousica, j’ai besoin de votre secours, et j’adresse à Soutoudrî une instante prière.

6. (Les Rivières parlent.) Indra, dont le bras est armé de la foudre, nous a ouvert une route. Il a frappé Vritra, qui renfermait les ondes. Que le divin Savitri, aux mains brillantes, nous conduise. C’est sous sa direction que nous roulons nos flots grossis.

7. On célèbre partout la force d’Indra, dont le bras puissant a percé Ahi. La foudre (du dieu) a frappé les compagnons (de l’Asoura), et les Ondes ont avec empressement suivi leur cours.

8. Chantre (des dieux), ne prends pas en mal nos paroles. Que tes chants passent jusqu’aux derniers âges. Ô prêtre, charme-nous par tes hymnes. Ne nous donne pas une mauvaise renommée parmi les hommes. Salut à toi !

9. (Viswâmitra parle.) Sœurs[1281], écoutez bien le prêtre, je viens à vous de loin sur un char léger. Calmez votre fougue ; donnez-moi un passage facile. Car, ô Rivières, la force de votre courant renverse nos chars.

10. (Les Rivières parlent.) Prêtre, nous entendons tes paroles. Tu viens à nous de loin sur un char léger. Nous te saluons, comme l’épouse respectueuse ; nous te vénérons, comme la jeune fille devant un mortel (respectable).

11. (Viswâmitra parle). Les Bharatas[1282] ont demandé à te traverser, (ô Soutoudrî) ; accueille aussi ma tribu, amie des vaches (célestes), et dirigée par Indra. Suivez votre cours ordonné : j’honore votre bonté, (Rivières) dignes de nos hommages.

12. Les Bharatas, amis des vaches (célestes), ont traversé déjà ces rivières, et le sage (leur conducteur) a honoré leur bonté. Gonflez-vous donc, Rivières bienfaisantes, emplissez vos mamelles fécondes, et marchez rapidement.

13. Que les rênes (de nos coursiers) s’élèvent au-dessus (de vos ondes), ô Rivières. Ne touchez pas à leurs jougs. Que deux (Rivières) aussi respectables que vous ne deviennent pour nous la cause d’aucun désastre ; qu’elles nous soient propices.


HYMNE V.

À Indra, par Viswâmitra.

(Mètre : Trichtoubh.)

1. Indra brise les villes de ses ennemis, et abat leur audace. Trésor d’opulence, il enrichit son serviteur. Excité par la prière, il grandit ; il répand ses nombreux bienfaits, et remplit le ciel et la terre.

2. J’invoque ton secours, (dieu) magnifique et fort ; j’élève la voix en l’honneur d’un immortel. Ô Indra, tu es le prince des nations humaines et des tribus divines.

3. Le puissant Indra a vaincu Vritra ; tel qu’un bouclier, il nous a protégés contre la magie (des Asouras). Terrible en sa colère, il a coupé les membres de son ennemi caché dans le nuage ; il a délivré les vaches (prisonnières) des nocturnes (brigands).

4. Indra donne le bonheur, enfante la lumière, triomphe avec les pieux (Angiras), et combat à la tête de son armée. En faveur de Manou il a élevé le brillant étendard des jours, et pour le grand combat il a préparé l’astre resplendissant.

5. Indra, tel qu’un héros vaillant, se distingue par mille actions d’éclat, et pénètre dans les rangs épais de ses ennemis. C’est lui qui inspire au poëte ces hymnes[1283] magnifiques, et qui les teint de vives couleurs.

6. De nobles (chantres) célèbrent les nobles exploits de cet Indra, (exploits) admirables et sans nombre. Fort de ses divines magies, il a brisé la puissance des Dasyous malfaisants.

7. Dans ses illustres combats Indra va conquérir la richesse pour les Dévas, maître des hommes pieux et ami des sages dont il remplit les vœux. Près du foyer du père de famille qui l’honore, les prêtres renommés pour leur science célèbrent ses exploits dans leurs hymnes.

8. Les (chantres) religieux louent avec enthousiasme cet Indra vainqueur et magnifique, qui donne le bonheur, qui dispense les Ondes divines, qui crée le Ciel et la Terre.

9. Indra a donné des chevaux (aux Marouts) ; il a formé le soleil et la vache d’abondance[1284]. Il a ouvert de riches trésors, et, en même temps qu’il frappait les Dasyous, il a sauvé la tribu[1285] des Aryas.

10. Indra a donné les plantes et les jours ; il a donné les arbres[1286] et l’air. Il a brisé Bala, et a ôté la voix (aux Asouras). Il a dompté les forts.

11. Appelons à notre secours, au sein de ce sacrifice, le grand et magnifique Indra, le plus noble des héros au milieu du combat, aussi clément que terrible, vainqueur de ses ennemis sur le champ de bataille, et couvert de leurs dépouilles.


HYMNE VI.

À Indra, par Viswâmitra.

(Mètre : Trichtoubh.)

1. Les chevaux sont attelés à ton char, arrête-toi. Viens vers nous, comme le Vent (court) vers ses cavales. Ô Indra, nous t’invitons à boire notre libation ; nous donnons la Swâhâ pour satisfaire à ta soif.

2. En l’honneur du (dieu) que le monde invoque, j’ai attelé à son char ses deux coursiers rapides. Qu’ils nous amènent Indra à ce sacrifice où nous accumulons les offrandes.

3. Pousse près de nous ces (chevaux) qui répandent l’abondance, et nous protégent contre l’ennemi. Sois notre défenseur, ô (dieu) bienfaisant, et emporte notre Swadhâ[1287]. Envoie tes chevaux rougeâtres ; qu’ils viennent manger ici, et (toi-même) nourris-toi également chaque jour de nos beignets[1288].

4. Avec la Prière, j’attelle pour le sacrifice tes chevaux rapides, amis de (l’homme), charmés de nos libations. Sage et prévoyant Indra, monte sur ton char solide et fortuné, et viens (boire) notre soma.

5. Que d’autres par leurs sacrifices n’aillent point attirer tes coursiers bienfaisants et superbes. Viens ; nous nous empressons de t’honorer par de continuelles libations.

6. Ce soma est pour toi ; approche-toi des offrandes que ce (père de famille) renouvelle sans relâche, et bois avec bonté. Ô Indra, présent à notre sacrifice, assis sur ce gazon, fais descendre cette liqueur dans ta vaste poitrine.

7. Pour toi ce gazon a été étendu, ô Indra, ce soma a été versé ; cette orge a été préparée pour tes chevaux. Viens donc en notre demeure, tout-puissant bienfaiteur, (viens) accompagné des Marouts. L’holocauste est disposé pour toi.

8. Ô Indra, (les plantes) des montagnes, les Ondes, (le lait) des vaches, (et les soins) de nos prêtres, tout a concouru à former ce (soma), aussi doux que le miel. Viens, (dieu) grand et bon, sage et prévoyant, suis la route que t’indiquent nos hymnes, et bois de ce (soma).

9. Ô Indra, que les Marouts que tu aimes et qui font ta gloire, t’accompagnent à notre fête. Transportés tous d’un même désir, ô Indra, buvez de ce soma par la langue d’Agni.

10. Adorable Indra, par la langue d’Agni, prends et la Swadhâ et toutes nos libations. Ô Sacra, accepte l’holocauste quête présente la main du prêtre et du sacrificateur.

11. Appelons à notre secours, au sein de ce sacrifice, le grand et magnifique Indra, le plus noble des héros au milieu du combat, aussi clément que terrible, vainqueur de ses ennemis sur le champ de bataille, et couvert de leurs dépouilles.


HYMNE VII.

À Indra, par Viswâmitra.

(Mètre : Trichtoubh.)

1. Viens, (Indra), avec les (Marouts), tes fidèles auxiliaires ; accepte l’offrande que nous te présentons. Indra croît au milieu des libations ; il grandit par l’effet de nos œuvres pieuses, et obtient de la renommée.

2. Des libations, aux reflets étincelants, ont été préparées ; c’est par elles qu’Indra acquiert la puissance, la fécondité, la grandeur. Ô Indra, reçois nos prières. Bois de cette (liqueur) ardente que te verse notre coupe.

3. Bois et grandis. Ô Indra, c’est pour toi que sont répandues ces premières liqueurs. Comme tu buvais les antiques libations, bois aujourd’hui les nôtres, (dieu) digne de nos éloges et de nos hymnes.

4. Il est grand, il est victorieux. Enhardi par la louange, il se revêt pour le combat d’une force terrible et capable de tout réduire en poussière. La terre ne saurait l’égaler en grandeur, (le dieu surnommé) Haryaswa[1289], quand le plaisir du soma le transporte.

5. Il est grand, il est terrible ; il croît pour la force, et la louange du poëte étend sa puissance. Indra est pour nous tel que Bhaga[1290] ; les vaches (célestes) qu’il nous envoie sont une source d’abondance, de fertilité, de richesse sans bornes.

6. Quand les rivières s’enflent et grossissent, les Ondes, telles que des chars, s’emportent vers la mer. Ainsi s’élance Indra, puisant une force nouvelle dans ce soma brillant que nous lui versons.

7. Les rivières vont à la mer : les (prêtres viennent) à Indra, lui apportant le soma étincelant et limpide. Ils l’ont avec leurs doigts (diligents) extrait de la plante ; ils ont reçu dans leurs vases ce miel (de la libation), et l’ont purifié à travers le filtre.

8. La poitrine d’Indra est comme un lac qui contient le soma ; elle suffit à de nombreuses libations. Quand Indra a consommé nos premières offrandes, disposé à frapper Vritra, c’est le soma qu’il demande (encore).

9. Comble-nous de tes dons. Que personne (en libéralité) ne l’emporte sur toi. Nous savons que tu es le maître des trésors ! Ô Indra, ô Haryaswa, que nous sentions toute la plénitude de ta bonté !

10. Magnifique Indra, toi qui aimes notre soma, fais-nous part de tes précieuses, de tes innombrables richesses. Accorde-nous cent automnes d’existence, dieu à la face majestueuse, (donne-nous) une forte postérité.

11. Appelons à notre secours, au sein de ce sacrifice, le grand et magnifique Indra, le plus noble des héros au milieu du combat, aussi clément que terrible, vainqueur de ses ennemis sur le champ de bataille, et couvert de leurs dépouilles.


HYMNE VIII.

À Indra, par Viswâmitra.

(Mètres : Gâyatrî et Anouchtoubh.)

1. Ô Indra, nous t’invitons à prendre cette force qui terrasse Vritra et triomphe dans les batailles.

2. Indra (nommé) Satacratou[1291], que les prêtres sachent rendre ton âme, ton regard attentif.

3. Ô Indra, ô Satacratou, contre les attaques de nos ennemis nous appelons de toutes nos voix ta puissance.

4. Nous glorifions par nos louanges le nom d’Indra, que le monde honore et qui est le soutien des hommes.

5. Ô Indra, toi que tous les mortels implorent, je t’invoque au milieu des combats. Frappe Vritra, et donne-nous ses dépouilles.

6. Sois vainqueur dans les batailles. Ô Indra, ô Satacratou, nous t’appelons. Donne la mort à Vritra.

7. Ô Indra, triomphe, sur le champ de bataille, de ces ennemis robustes, si rapides dans leurs mouvements, si renommés pour leurs richesses.

8. Ô Indra, ô Satacratou, bois ce soma qui donne la vigueur et la victoire. Veille pour nous, et viens à notre secours.

9. Ô Indra, ô Satacratou, je célèbre en toi cet empire que tu exerces sur les cinq espèces d’êtres[1292].

10. Reçois, ô Indra, nos abondantes offrandes. Prends une force invincible. Nous aimons à augmenter ta vigueur.

11. Viens à nous, ô Sacra, des régions voisines ; (viens) des régions lointaines. Des lieux qui sont ta demeure, viens ici, ô Indra, toi qui portes la foudre.


HYMNE IX.

À Indra, par Viswâmitra.

(Mètre : Trichtoubh.)

1. Tel que l’ouvrier (façonne le bois), toi, prépare la Prière. Comme le coursier chargé d’un fardeau précieux, approche-toi chargé de l’offrande. Je veux célébrer les hauts faits (d’Indra), et, dans mon heureuse inspiration, contempler les sages (Dévas)[1293].

2. Adresse-toi donc à ces races de sages (Richis). L’âme élevée, le cœur pieux, ils ont formé le Ciel. Que tes Prières, aussi rapides que la pensée, grandissent et viennent ici accomplir leur devoir.

3. C’est dans le sacrifice que ces (sages) par leurs œuvres mystérieuses ont donné de la force au Ciel et à la Terre ; qu’ils les ont étendus et fondés sur de larges bases ; qu’ils en ont maintenu et consolidé tout le vaste ensemble.

4. Tous ces (sages) ont placé (Indra) sur son char et l’ont entouré de splendeur. Le (dieu) va tout revêtu de lumière, et brillant par lui-même : il porte le grand nom de fécond Asoura[1294]. Il a toutes les formes, et s’élève aussi au-dessus des (Ondes) immortelles (en qualité de Varouna).

5. Ce (dieu) puissant, antique et premier-né, a enfanté ces Ondes abondantes qui lui appartiennent. Rois fils du Ciel, vous puisez votre force dans les prières du brillant sacrifice.

6. Ô rois, vous êtes l’ornement des trois assemblées dans lesquelles nos nombreuses libations vous honorent. Oui, je vous vois des yeux de l’âme, Indra, tu apparais dans le sacrifice ; tu t’approches de ces flammes[1295] dont le vent agite la chevelure.

7. Sous les noms divers qu’ils ont donnés à ce (maître) bienfaisante, les (Richis) lui ont mesuré le lait de la vache (du sacrifice). Prenant tour à tour chaque énergie[1296] divine, ces (sages) magiciens en ont fait une forme dont ils ont revêtu Indra.

8. Il n’est personne qui ne soit à l’abri sous cette forme d’or de Savitri[1297], que ma Prière a créée. Comme une femme (embrasse) ses enfants, elle enveloppe le Ciel et la Terre, qui s’étendent au loin dans l’immensité. Tel est le fruit de nos hymnes.

9. Quand le vieux (prêtre) accomplit (le sacrifice), quand le seigneur traite les dieux, soyez auprès de nous, (Indra et Varouna). Le monde voit les œuvres variées de ce (divin) magicien, (de cet Indra) aussi bon[1298] qu’il est fort.

10. Appelons à notre secours, au sein de ce sacrifice, le grand et magnifique Indra, le plus noble des héros au milieu du combat, aussi clément que terrible, vainqueur de ses ennemis sur le champ de bataille, et couvert de leurs dépouilles.


HYMNE X.

À Indra, par Viswâmitra.

(Mètre : Trichtoubh.)

1. La Prière, qui part du cœur et qu’embellit l’imagination, s’élève vers le grand Indra. Elle s’éveille pour le sacrifice, et s’écrie : « Indra, écoute ce qui m’est inspiré pour toi. »

2. La Prière semble naître du Ciel avec l’Aurore ; elle s’éveille pour faire entendre sa voix dans le sacrifice. Antique, fortunée, connue de nos pères, elle prend (au matin) ses vêtements argentés.

3. La (Prière), placée sur la langue (du prêtre), enfante deux jumeaux[1299]. À peine sont-ils nés, que ces jumeaux rassemblent les formes des choses ; ils tuent les ténèbres, avant-coureurs de (l’Astre) lumineux.

4. Qui peut blâmer ces (Richis)[1300] qui furent nos pères sur la terre, et qui combattirent pour nous donner les vaches (célestes) ? C’est Indra, qui, fameux par ses nobles prouesses, a délivré pour eux ces vaches fécondes.

5. Indra, et ses amis, les pieux (Angiras), habiles à chanter sur des mesures de neuf syllabes[1301], ont suivi les vaches dans la (prison) où elles étaient couchées. Bienfait inestimable ! Avec les dix (Angiras) qui chantent sur des mesures de dix syllabes, il a découvert le Soleil, qui habitait les ténèbres.

6. Il a découvert ce breuvage aussi doux que le miel que donne la vache (céleste) au large sabot, au pied rapide. Bienfaiteur opulent, il a de sa main droite saisi le mystérieux (Asoura), caché au sein des eaux.

7. Daigne arracher aux ténèbres l’Astre lumineux. Puissions-nous vivre tranquilles à l’abri du mal ! Ô dieu, dont notre soma augmente la grandeur, accepte les libations et les prières d’un serviteur riche en offrandes.

8. Que l’astre lumineux vienne pour le sacrifice éclairer le Ciel et la Terre. Puissions-nous être délivrés du mal ! Que les Vasous nous aident à traverser heureusement (la vie), et augmentent la fortune du mortel qui les honore.

9. Appelons à notre secours, au sein de ce sacrifice, le grand et magnifique Indra, le plus noble des héros au milieu du combat, aussi clément que terrible, vainqueur de ses ennemis sur le champ de bataille, et couvert de leurs dépouilles.




LECTURE TROISIÈME.

HYMNE I.

À Indra, par Viswâmitra.

(Mètre : Gâyatrî.)

1. Puissant Indra, nous t’invoquons en versant le soma en ton honneur. Prends nos offrandes, aussi douces que le miel.

2. Indra, toi que le monde célèbre, viens chercher le soma de notre sacrifice. Bois, consomme ce (breuvage) agréable.

3. Indra, maître honoré des hommes pieux, prends avec tous les dieux l’holocauste dont nous t’adressons l’hommage.

4. Indra, maître des hommes pieux, c’est vers ton séjour que se dirigent ces libations, ces liqueurs fortunées.

5. Indra, remplis ta poitrine de ce soma choisi et versé pour toi. Ces breuvages étincellent en ton honneur.

6. Bois, honorable Indra, nos libations. C’est un miel dont le flot doit t’arroser. Pour toi ces mets ont été préparés.

7. Les offrandes abondantes du sacrificateur enveloppent Indra. Ce (dieu) boit le soma, et il grandit.

8. Viens à nous des lieux ou lointains ou prochains que tu habites. (Dieu) qui donnes la mort à Vritra, écoute nos prières.

9. Indra, que l’on t’invoque de loin, de près[1302] au milieu (du jour), viens toujours au milieu de nous.


HYMNE II.

À Indra, par Viswâmitra.

(Mètre : Gâyatrî.)

1. Indra, qui portes la foudre, je t’invoque et t’honore. Viens vers nous avec tes chevaux pour boire notre soma.

2. Choisissant un moment favorable, notre sacrificateur a étendu le gazon (sacré). Dès le matin les mortiers ont travaillé.

3. Héros qui aimes la Prière, le sacrifice commence. Place-toi sur notre gazon, et reçois l’offrande.

4. Réjouis-toi de nos libations, de nos hymnes et de nos chants, honorable Indra, toi qui donnes la mort à Vritra.

5. Les Prières viennent flatter le grand Indra, l’ami de notre soma, le maître de la Force, de même que la vache (avec sa langue flatte) son veau.

6. Que ton corps profite des mets que nous t’offrons, et s’agrandisse heureusement. N’expose pas ton serviteur au blâme.

7. Indra, toi qui es notre appui, sois à nous, comme nous sommes à toi. Nous te chantons en te présentant l’holocauste.

8. Ne lance pas loin de nous les chevaux que tu chéris. Viens à nous, Indra, toi qui emportes la Swadhâ, et réjouis-toi.

9. Que (tes chevaux) aux longs crins, et arrosés de beurre sacré, t’amènent ici, ô Indra, sur ton char fortuné. Assieds-toi sur notre gazon.


HYMNE III.

À Indra, par Viswâmitra.

(Mètre : Gâyatrî.)

1. Ô Indra, avec les chevaux attelés à ton char, approche-toi de ce soma que nous t’avons versé, et auquel nous avons mêlé le beurre (sacré).

2. Viens, Indra, goûte à ces liqueurs que nous avons disposées sur le gazon et extraites des mortiers. Satisfais pleinement ta soif.

3. Que ma Prière s’élève ainsi vers Indra, et l’invite à boire le soma.

4. Oui, par nos hymnes et par nos chants nous invitons Indra à boire le soma. Qu’il vienne avec empressement.

5. Indra, pour toi ces libations de soma. Satacratou, trésor de (riches) offrandes, reçois dans ton sein ces (libations).

6. (Dieu) sage, nous savons que dans les combats tu remportes la victoire et te charges d’opulentes dépouilles. Nous venons donc implorer tes bontés.

7. Bois, ô Indra, ce breuvage que nous avons tiré de nos mortiers, et dans lequel nous avons confondu l’orge et le beurre.

8. Indra, daigne recevoir ce soma que je te présente, et qu’il réjouisse ton cœur.

9. Enfants de Cousica, nous avons besoin de ton secours, ô antique Indra, et nous te convions à boire nos libations.


HYMNE IV.

À Indra, par Viswâmitra.

(Mètre : Trichtoubh.)

1. Élevé sur ton char, viens à nous, et approche-toi de ce soma, qui brille en ton honneur. Dirige vers notre gazon tes deux nobles coursiers. Ces prêtres t’invoquent en t’apportant l’holocauste.

2. Viens avec tes chevaux, (noble) Arya[1303], vers ce peuple qui te présente de nombreuses offrandes. C’est toi, Indra, qu’appellent nos Prières et nos Hymnes, qui se complaisent dans ton amitié.

3. Divin Indra, pousse ici tes rapides coursiers ; aime à visiter notre sacrifice, où s’accumulent les offrandes. Avec le beurre et les mets (sacrés), dans ce lieu où sont disposés les doux breuvages et les liqueurs enivrantes, je t’invoque par la prière.

4. Qu’ils t’amènent donc vers nous, ces coursiers superbes, magnifiques, bienfaisants et chargés d’un si noble fardeau ! Qu’Indra se plaise à notre sacrifice, où l’orge a été prodiguée, et ami (fidèle), qu’il écoute les chants de son ami !

5. Ô Maghavan, honoré par notre soma, (protége) en moi le pasteur du peuple et le roi, (protége) en moi le Richi qui verse la libation. Fais-moi part de ton immortelle opulence.

6. Que ces grands coursiers attelés à ton char, Ô Indra, t’amènent à notre fête. Compagnons du magnifique (ennemi de Vritra), purs de toute souillure, ils traversent le ciel et embellissent les régions de l’air.

7. Indra, bois de ce généreux (soma) que versa notre mortier, et que te porte l’épervier[1304] (poétique), fidèle à ton désir. Enivré de cette liqueur, tu agites la nature, et tu ouvres les portes de l’étable (céleste).

8. Appelons à notre secours, au sein de ce sacrifice, le grand et magnifique Indra, le plus noble des héros au milieu du combat, aussi clément que terrible, vainqueur de ses ennemis sur le champ de bataille, et couvert de leurs dépouilles.


HYMNE V.

À Indra, par Viswâmitra.

(Mètre : Vrihatî.)

1. Ô Indra, qu’il te soit agréable, ce soma extrait de nos mortiers. Aime à venir vers nous avec tes chevaux. Monte sur ton char azuré.

2. Par amour pour (notre soma), tu amènes l’Aurore, tu allumes le Soleil ; sage et prévoyant, ô Indra, ô Haryaswa, tu donnes (au monde) sa brillante parure.

3. Azurée est la voûte du ciel, azurée est la surface de la terre ; et c’est Indra qui a consolidé ces deux (grands corps) azurés, entre lesquels lui, le (dieu) azuré[1305], circule pour les entretenir.

4. Haryaswa, bienfaisant et azuré, en naissant illumine le monde entier. Il porte dans ses bras une arme azurée, sa foudre aux teintes azurées.

5. Oui, (dans ses bras) Indra (tient) sa foudre empourprée, ardente, enveloppée de traits éblouissants. Avec ses chevaux il a, en même temps, fait sortir le soma de nos mortiers et les vaches (célestes de leur prison).


HYMNE VI.

À Indra, par Viswâmitra.

(Mètre : Vrihatî.)

1. Viens, ô Indra, avec tes chevaux[1306] qui font notre joie, et dont les poils sont nuancés comme la plume de Paon. Ne sois pas dans ta route arrêté (par d’autres mortels), comme l’oiseau par le filet du chasseur. Que ces (mortels) soient pour toi tels qu’une terre aride.

2. Indra, toi qui détruis Vritra, qui brises Bala, qui forces les villes (célestes) et amènes les eaux, tu montes sur ton char à l’arrivée de tes deux coursiers, et tu renverses les plus fermes remparts.

3. De même que (l’eau remplit) la mer profonde, toi, tu remplis les vœux du sacrificateur. Tu es comme le bon pasteur qui pourvoit aux besoins de ses vaches. Ce que le gazon est pour la vache, le ruisseau pour le lac, (tu l’es également pour nous).

4. Donne-nous des enfants, des richesses. Sois (comme le père), qui laisse (à son fils) une partie de sa fortune. De même que le croc agite l’arbre pour en faire tomber le fruit mûr, ô Indra, secoue sur nous tes trésors pour combler nos vœux.

5. Indra, tu es riche et brillant, glorieux et prospère. Ô (dieu) que le monde chante, croîs en vigueur, et deviens, pour nous la source de la plus heureuse abondance.


HYMNE VII.

À Indra, par Viswâmitra.

(Mètre : Trichtoubh.)

1. (Dieu) guerrier, généreux, brillant, terrible, jeune, ferme et vainqueur, tu es immortel et glorieux ; tu portes la foudre. Ô Indra, tu es grand, et grandes sont tes prouesses.

2. Oui, tu es grand par tes œuvres, (dieu) magnifique, libéral et redoutable. Tu résistes à toutes les attaques. Seul roi du monde, combats et détruis tes ennemis.

3. Dans sa splendeur infinie, il se déploie partout et l’emporte sur les autres dieux. Indra boit notre soma, et devient plus fort que le Ciel, la Terre, la vaste et grande Atmosphère.

4. Le redoutable Indra est comme un réservoir large et profond, qui s’étend au loin pour recueillir nos prières. Les libations du matin pénètrent en lui, comme dans une (vaste) mer.

5. Le Ciel et la Terre te sont dévoués, et conservent, comme une mère garde son fruit, ce soma que les prêtres, ô généreux Indra, te présentent, et qu’ils ont purifié pour ta soif.


HYMNE VIII.

À Indra, par Viswâmitra.

(Mètre : Trichtoubh.)

1. Généreux Indra, associé avec les Marouts, bois ce soma ; prends notre Swadhâ. Enivre-toi, et combats. Verse dans ta poitrine ces flots de miel savoureux. Tu es au ciel le roi des libations.

2. Accompagné des Marouts, bois joyeusement avec eux notre soma, sage héros, vainqueur de Vritra. Frappe nos ennemis, éloigne les méchants ; fais que nous soyons partout redoutés.

3. Indra, gardien des Ritous, bois avec eux et avec les (autres) dieux tes amis le soma que nous t’offrons. Les Marouts, que tu aimes et qui t’honorent, ont donné la mort à Vritra, et ont augmenté ta force.

4. Avec ces sages Marouts qui t’accompagnent, et qui te secondaient quand Ahi fut tué, lorsque Sambara a été mis à mort et les vaches (célestes) retrouvées, (avec ces Marouts) qui font ta joie, ô Indra, ô Maghavan, amené par tes chevaux (azurés), bois notre soma.

5. Cet Indra, ami des Marouts, bienfaiteur grand et magnanime, maître céleste, triomphateur terrible et puissant, c’est lui que nous devons appeler sans cesse à notre secours.


HYMNE IX.

À Indra, par Viswâmitra.

(Mètre : Trichtoubh.)

1. Que le (dieu) aimable et généreux, qui vient de naître, protége (le sacrificateur) chargé pour lui d’offrandes et de libations. Bois à ton gré, et avant tous les autres, ce doux et merveilleux soma qui t’appartient.

2. À peine es-tu né que tu désires le jus de la plante que produit la montagne[1307] : tu bois la liqueur du soma. Ta jeune mère, l’épouse du père commun, dans sa haute demeure, t’allaite de ce (breuvage)[1308].

3. Indra s’approche de sa mère, et lui demande sa nourriture ; d’une mamelle féconde sort devant ses yeux le soma piquant. (Alors Indra) satisfait son désir ; il court ensuite au combat, et, dans la mêlée, (le dieu) aux larges membres se distingue par ses hauts faits.

4. Terrible vainqueur et fort dans sa victoire, il se revêt de toutes les formes qu’il veut. Par sa nature même Indra l’emporte sur Twachtri[1309] ; et le soma déposé dans les vases (du sacrifice), il le ravit et le boit.

5. Appelons à notre secours, au sein de ce sacrifice, le grand et magnifique Indra, le plus noble des héros au milieu du combat, aussi clément que terrible, vainqueur de ses ennemis sur le champ de bataille, et couvert de leurs dépouilles.


HYMNE X.

À Indra, par Viswâmitra.

(Mètre : Trichtoubh.)

1. Célèbre le grand Indra, qui est l’espoir des mortels, ami du soma, et que les Dévas connaissent comme le maître de l’univers, le héros des batailles, le vainqueur des puissances ténébreuses.

2. Intrépide combattant, traîné par ses coursiers azurés, il brille à la tête des armées, et personne ne peut le surmonter. Seigneur suprême, avec ses vigoureux alliés, il étend ses conquêtes, et s’empare des richesses du Dasyou.

3. Fort sur le champ de bataille, et impétueux comme le coursier, il a conquis le ciel et la terre. Magnifique et pareil à Bhaga, il est digne de nos invocations et de nos holocaustes. Il est l’auguste gardien de nos prières, et le trésor de notre abondance.

4. Maître du ciel et de l’air, écoute notre voix. Tu marches droit comme un char élevé ; les (riches) Vasous te servent de monture. Tu couvres les Nuits d’un voile ; tu es le père du Soleil ; tu donnes (aux mortels) la portion qui leur revient, comme la Prière (donne aux dieux) la libation.

5. Appelons à notre secours, au sein de ce sacrifice, le grand et magnifique Indra, le plus noble des héros au milieu du combat, aussi clément que terrible, vainqueur de ses ennemis sur le champ de bataille, et couvert de leurs dépouilles.


HYMNE XI.

À Indra, par Viswâmitra.

(Mètre : Trichtoubh.)

1. Ce soma est pour Indra ; qu’Indra prenne notre swâhâ. Viens, (dieu) rapide et bienfaisant, accompagné des Marouts. Que nos offrandes remplissent la vaste capacité d’Indra ; que nos holocaustes satisfassent aux besoins de son (large) corps.

2. (Dieu) à la face majestueuse, j’attelle à ton (char) rapide tes deux fidèles coursiers ; brille dès le matin, plein de confiance en leur légèreté. Que tes chevaux te retiennent ici. Bois de ce soma que nous t’avons préparé.

3. Pour assurer la force et la suprématie d’Indra, les prêtres ont, par leurs chants et leurs offrandes, honoré ce (dieu) bienfaisant et sauveur. Ô toi, qui aimes nos libations, viens avec plaisir boire le soma, et envoie-nous souvent les vaches (célestes).

4. Satisfais à nos désirs en nous donnant des vaches et des chevaux ; étends notre opulence et nos richesses. Telles sont les prières, telles sont les offrandes qu’apportent à Indra les sages et fortunés enfants de Cousica.

5. Appelons à notre secours, au sein de ce sacrifice, le grand et magnifique Indra, le plus noble des héros au milieu du combat, aussi clément que terrible, vainqueur de ses ennemis sur le champ de bataille, et couvert de leurs dépouilles.


HYMNE XII.

À Indra, par Viswâmitra.

(Mètres : Djagatî, Trichtoubh et Gâyatrî.)

1. Par de longues prières invoquons le magnifique Indra, qui comble les humains de ses douces faveurs. (Dieu) immortel et toujours croissant en grandeur, il est digne de nos louanges et chaque jour nos hymnes le célèbrent et l’implorent.

2. Nos voix s’élèvent de tout côté vers ce héros puissant, vers cet Indra, ce Satacratou, étendu comme une mer (immense) : il nous donne l’abondance, perce les villes (célestes), et nous envoie l’Onde. Il est rapide, resplendissant, vainqueur et fortuné.

3. Le poëte le célèbre pour obtenir la richesse. Indra aime la pure louange ; il se plaît dans la demeure d’un pieux serviteur. Chante donc (cet Indra) qui accable et tue ses ennemis.

4. Ô le plus noble des héros, les prêtres t’honorent par leurs chants et leurs hymnes. Pour augmenter sa force, ce magicien, qui se revêt de toutes les formes, vient prendre nos offrandes. Seul, il brille, (seul) il règne sur ce monde.

5. Il commande, et l’abondance descend chez les mortels ; la terre produit de nombreuses richesses. Pour Indra les cieux, les plantes, les eaux, les bois, les races (humaines) deviennent des dépôts de trésors (précieux).

6. Pour toi, ô Indra, que traînent deux coursiers azurés, pour toi ces offrandes, ces prières, ces sacrifices ! Accepte-les. Accorde-nous toujours ton appui, toi qui es pour nous un parent, un ami, un protecteur. Donne l’abondance à tes serviteurs.

7. Indra, toi que les Marouts accompagnent, viens ici boire de nos libations de soma, comme tu l’as fait pour Saryata[1310]. (Noble) héros, les prêtres t’honorent par leurs sacrifices, dans leurs saintes et pompeuses cérémonies.

8. Satisfais à ton désir, ô Indra, et viens ici avec les Marouts tes amis boire le soma que nous t’avons versé. (Dieu) que le monde implore, tu nais, et tous les Dévas te vénèrent et t’arment pour le grand combat.

9. Dans le soin de nous donner les Ondes, les Marouts, riches en bienfaits, secondent Indra notre protecteur. Vainqueur de Vritra, visite avec eux la maison de ton serviteur, et bois le (soma) qu’il a préparé.

10. Ce soma a été extrait de nos mortiers avec empressement, ô maître adorable de la richesse ; tu peux en boire.

11. Refais ton corps avec ces liqueurs, avec ces offrandes disposées pour toi. Tu aimes le soma ; que le nôtre te réjouisse.

12. Indra, (vaillant) héros, puise dans notre sacrifice, pour le bonheur (du monde, la force nécessaire) à tes lianes, à ta tête, à tes bras.


HYMNE XIII.

À Indra, par Viswâmitra.

(Mètres : Gâyatrî, Djagatî et Trichtoubh.)

1. Ô Indra, reçois dès le matin (le soma) que nous t’offrons avec ces beignets, ce plat de caillé, ce gâteau, et ces hymnes.

2. Reçois, ô Indra, et consomme ces offrandes, ces mets. L’holocauste est préparé pour toi.

3. Accepte nos offrandes, écoute nos prières ; (sois pour nous) comme l’époux pour sa jeune épouse.

4. (Dieu) toujours invoqué, reçois nos offrandes dans le sacrifice du matin. Ô Indra, ta puissance est grande.

5. Indra, daigne agréer nos beignets et nos offrandes dans le sacrifice de midi. Cependant le prêtre, qui célèbre tes louanges, s’agite avec la majesté du taureau, et poursuit le cours de sa prière.

6. Dans le troisième sacrifice, (ô dieu) sage que le monde glorifie, accepte nos beignets, nos offrandes et nos invocations. Honorons par nos œuvres (saintes) et nos holocaustes celui qui est entouré des Ritous et des Vâdjas[1311].

7. Nous offrons ce plat de caillé et ces beignets au (dieu) compagnon de Poûchan et possesseur des coursiers azurés. Héros sage, vainqueur de Vritra, ami des Marouts, mange ce gâteau, et bois ce soma.

8. Apportez promptement les beignets et les offrandes pour le plus illustre des héros. Que chaque jour, ô superbe Indra, cet hommage te soit rendu ; et qu’avec le soma tu sentes croître tes forces.


HYMNE XIV.

À Indra, par Viswâmitra.

(Mètres : Gâyatrî, Djagatî et Trichtoubh.)

1. Ô Indra et Parwata[1312], sur votre large char, apportez cette abondance fortunée qui produit une forte race. Ô dieux, acceptez l’holocauste de nos sacrifices. Que votre grandeur s’accroisse dans la joie de nos prières et de nos hymnes.

2. Ô Maghavan, arrête-toi ici. Ne va pas plus loin. Prends de ce soma que nous te versons. Ô Indra, époux de Satchî[1313], par la douceur de notre voix puissions-nous (t’amener), comme un fils amène son père par le pan de son vêtement !

3. Ô prêtre, je chante : unis-toi à mes efforts. Faisons ensemble agréer à Indra ces offrandes. Assieds-toi sur ce gazon du (père de famille) qui sacrifie. Que mon hymne nous rende Indra propice !

4. Ô Maghavan, (ici est Satchî, ton)[1314] épouse : c’est donc ici ta demeure et le lieu de tes amours. Qu’attelés (à ton char), tes coursiers t’y amènent. Nous répandons pour toi le soma, et Agni, l’envoyé (des dieux), te convie.

5. Arrive, ô Maghavan ; approche-toi, Indra, notre frère. Le prêtre et le père de famille[1315] ont tout disposé. (Viens) dans ce lieu, où peut se reposer ton large char, où tu peux dételer ton coursier hennissant.

6. Viens, Indra, à ces libations, à ce soma, à cette demeure qui est la tienne. Car tu y trouveras une épouse, une amante fortunée. Ici ton large char peut se reposer ; ici tu peux dételer ton coursier au sein d’une pieuse abondance.

7. Ici sont les Bhodjas[1316], les Angiras de formes différentes, les enfants du Ciel[1317], les (fils) valeureux du (divin) Asoura[1318]. Ils donnent à Viswâmitra, pour prix de ses mille sacrifices, des biens (précieux) et une (longue) existence.

8. Maghavan se revêt de mille formes ; il entoure son corps d’apparences magiques. Trois fois, dans sa course, il descend un instant du Ciel, à la voix de notre prière, ami de la justice et avide de soma.

9. Ce (dieu) grand et sage, père des Dévas et recevant d’eux sa force, a les yeux ouverts sur les (œuvres) des hommes. C’est lui qui calma les flots d’une rivière impétueuse, quand Viswâmitra (revenait) chargé des présents de Soudas[1319]. Indra fut alors bon pour les enfants de Cousica.

10. Tels que des cygnes, faites entendre la voix de l’hymne. Aimez le bruit du mortier qui résonne avec la prière au milieu des libations et du sacrifice. Enfants de Cousica, sages richis, surveillants des œuvres pieuses, vous prenez avec les dieux le miel savoureux du soma.

11. Arrivez, enfants de Cousica, hâtez-vous, et, dans l’espoir de l’opulence, donnez carrière au cheval de Soudas[1320]. Le roi (des cieux) a frappé Vritra à l’orient, à l’occident, au nord. Que le sacrifice ait lieu sur le noble foyer de terre.

12. J’ai chanté Indra, et le Ciel et la Terre. L’œuvre sainte de Viswâmitra garde la race de Bharata[1321].

13. Les enfants de Viswâmitra ont fait entendre leur prière en l’honneur d’Indra, qui porte la foudre. (Qu’Indra) nous donne la richesse.

14. Que font tes vaches (célestes) chez les Kîcatas[1322] ? (Ce peuple) ne fait point couler la libation ; il n’allume point le feu (sacré). Donne-nous le bien de (l’impie) usurier ; assure-nous la part du vil Nîtcha[1323].

15. Celle qui nous a été donnée par Djamadagni[1324], celle qui détruit l’ignorance, la Prière, fille du Soleil[1325] vient, en élevant sa voix, disposer au milieu des Dévas l’ambroisie de l’immortelle offrande.

16. Oui, que la Prière vienne promptement apporter l’abondance à ces (fidèles), et la répandre parmi les cinq classes d’êtres[1326]. Qu’elle soit à nos côtés (pour nous protéger et) nous procurer une vie nouvelle, celle que m’ont donnée les vieux enfants de Djamadagni.

17. Que les deux chevaux (de notre char)[1327] soient forts ; que notre essieu soit solide. Que le timon ne soit point brisé, ni le joug rompu. Qu’Indra nous préserve des chutes par deux chambrières. Ô (dieu), dont le char a des roues admirables, viens à notre secours.

18. Indra, donne la force à nos corps ; la force à ce qui traîne notre char ; la force et la vie à notre fils et à notre petit-fils. Car tu es le possesseur de la force.

19. Mets plus de dureté dans la moelle du Khadira[1328] ; que le bois de la Sinsoupâ[1329] résiste à la fatigue de la course. Essieu vigoureux, sois de plus en plus solide, et ne nous laisse par tomber de notre char.

20. Que les bois, aimés de Vanaspati[1330], n’aillent point nous trahir ni nous blesser. Bénédiction sur nos maisons ! Le char est lancé. Bénédiction et salut !

21. Ô Indra, ô vaillant Maghavan, viens à notre secours, et sois aujourd’hui pour nous un auxiliaire puissant. Que l’homme qui nous hait tombe par terre ; que celui que nous haïssons perde la vie[1331].

22. La hache peut être brûlée ; le simbala[1332] peut être abattu ; la marmite, heurtée du pied, perd son liquide et ne jette plus qu’une (vaine) vapeur. Ô Indra, (qu’il en soit de même de notre ennemi).

23. Sans s’inquiéter de sa flèche, (on a vu) des hommes s’emparer du chasseur, et le mener comme il aurait mené sa proie. On ne fait pas rire le faible aux dépens du plus fort ; on ne met pas l’âne avant le cheval[1333].

24. Indra, les fils de Bharata ne veulent point de rapprochement (avec leurs ennemis). Déjà ils lancent leur cheval, aussi rapide que la roue ; déjà pour le combat ils tendent fortement la corde de leur arc.


HYMNE XV.

Aux Viswadévas, par Pradjapati, fils de Viswâmitra.

(Mètre : Trichtoubh.)

1. (Les prêtres) ne cessent d’offrir leur hommage au (dieu) grand, adorable, digne de louanges. Que l’immortel Agni nous entende, (entouré) soit de nos splendeurs domestiques, soit de ses rayons divins !

2. Honore le grand Ciel et la Terre, ô sage vénérable ; accède au désir qui me sollicite. Dans les sacrifices que font (les enfants) d’Ayou, dans ces éloges que l’on adresse au Ciel et à la Terre, les pieux Dévas tressaillent de joie.

3. Ô Ciel et Terre, agréez notre sacrifice : qu’il soit pour nous avantageux et prospère. Ô Agni, j’adore le Ciel et la Terre, et me présente avec l’offrande pour obtenir leur faveur.

4. Ciel et Terre, source de toute piété, les anciens sages vous ont honorés. C’est vous aussi qu’avec raison les prêtres aujourd’hui vénèrent dans leurs assemblées et au moment du combat.

5. Qui connaît ici-bas, qui peut dire la voie que suivent les Dieux ? Nous voyons bien leurs stations inférieures ; mais leur œuvre se poursuit dans des régions supérieures et mystérieuses.

6. (Agni), sage et surveillant nos œuvres, dans son foyer lumineux[1334], voit autour de lui le Ciel et la Terre heureux du beurre (sacré) dont ils sont arrosés. Dans l’œuvre commune qu’ils accomplissent, ils lui préparent plusieurs demeures, qui sont comme autant de nids pour l’oiseau (voyageur).

7. À la fois unis et séparés, éloignés et voisins, ils veillent au poste solide qui leur est assigné. Et jeunes, dans cette carrière qu’ils fournissent ensemble, ils se disent : Soyons époux.

8. Et aussitôt tous les êtres apparaissent au jour. Sans peine (le Ciel et la Terre) ont produit les grands dieux. Cet ensemble d’êtres animés et inanimés se met en mouvement, oiseaux, quadrupèdes, animaux de toute forme, de toute espèce.

9. Je chante en ce jour cette création antique, perpétuelle, de notre père, de notre grand aïeul, dans ces lieux où, à la face (du Ciel et de la Terre), les Dévas, célébrant leurs louanges, montent, chacun sur son char, pour suivre la voie large et variée du sacrifice.

10. Ciel et Terre, je vous adresse ces chants. Puissions-nous être entendus des sages et jeunes Adityas, de Mitra et de Varouna, de ces héros brillants, dont la poitrine se remplit de la douce libation, et auxquels Agni sert de langue !

11. Savitri, à la main d’or[1335], à la douce langue, vient trois fois du ciel dans nos sacrifices. Ô Savitri, sois chanté parmi les Dévas, et envoie-nous le fruit que nous attendons du sacrifice.

12. Dieu bienfaisant et riche, juste et doué d’une main brillante, que Twachtri nous apporte son secours. Compagnons de Poûchan, ô Ribhous, faites notre joie. Élevant leurs coupes, (les prêtres) ont commencé leur sainte cérémonie.

13. Enfants du sacrifice, que les Marouts, guerriers au char brillant, au glaive meurtrier, à la marche rapide, ainsi que Saraswatî, nous entendent ! Que ces (dieux) impétueux et dignes de nos hommages nous accordent une opulence soutenue par une forte race !

14. Que l’hymne solennel, comme s’il s’agissait de Bhaga[1336], vienne, au moment du sacrifice, au-devant de Vichnou, héros si souvent éprouvé. C’est lui qui est le (dieu) aux larges pas ; pour lui les louanges sont (comme) de jeunes mères, qui entretiennent ses forces.

15. Indra, paraissant dans la plénitude de sa force, a rempli de sa grandeur le Ciel et la Terre. Ô (dieu) qui brises les villes (célestes), qui donnes la mort à Vritra, qui renverses les armées, rassemble et amène-nous une grande quantité de tes vaches (divines).

16. Ô Aswins, (dieux) véridiques, vous êtes (mes protecteurs), mes pères, et j’aime à vous donner le nom de parents. Unis par la naissance, vous vous êtes fait tous deux un beau nom. Vous êtes pour nous les dispensateurs de la richesse, et, flattés de nos hommages, vous ouvrez les trésors que vous gardez.

17. Vous aussi, sages Viswadévas, vous avez un grand et beau nom : car vous êtes dans Indra. Ô (dieu) que le monde invoque, montre-toi notre ami, avec les Ribhous que tu aimes. Vous tous, agréez notre prière et comblez nos vœux.

18. Honorons encore Aryaman, Aditi. (Célébrons) les œuvres impérissables de Varouna. Éloignez de notre voie les accidents qui nous priveraient de postérité. Que nos chants nous procurent et des enfants et des troupeaux !

19. Que le messager des dieux, qui se plaît à naître sous tant de formes, proclame dans le sacrifice la pureté de nos cœurs ! Que nous soyons entendus de la Terre, du Ciel, des Eaux, du Soleil, des Étoiles, de la vaste Atmosphère !

20. Qu’elles nous entendent, ces vastes et solides Montagnes[1337] (du ciel), qui aiment nos holocaustes, et qui nous envoient la pluie. Qu’Aditi nous entende avec les Adityas ! Que les Marouts nous accordent la prospérité !

21. Que notre voie soit toujours facile et marquée par l’abondance ! Ô Dieux, faites couler votre miel sur les plantes. Ô Agni, ne me retire pas la part que tu m’as donnée dans ton amitié. Que j’obtienne une opulente et solide abondance !

22. Goûte nos holocaustes ; viens à nous, et répands ton éclat sur nos offrandes. Prends ta part dans nos mets. Ô Agni, tu peux dans les combats vaincre tous ces ennemis. Sois bon, et chaque jour apporte-nous ta lumière.


HYMNE XVI.

Aux Viswadévas, par Pradjapati.

(Mètre : Trichtoubh.)

1. Quand les Aurores se lèvent le matin, (l’être) grand et immortel naît au foyer[1338] où siége la Vache (du sacrifice). (Le poëte) célèbre les œuvres divines. Grande et souveraine est l’énergie[1339] des Dieux.

2. Ô Agni, (nous ne voulons pas) être blâmés des Dévas, ni de nos ancêtres, habiles dans la science (divine). Placé entre (le Ciel et la Terre, tu es) la lumière (du sacrifice) pour ces deux mondes antiques[1340]. Grande et souveraine est l’énergie des Dieux.

3. Mes désirs sont nombreux et pressants. J’ai allumé les feux des antiques cérémonies. Agni brille ; chantons (le dieu à qui l’on donne le nom de) Rita[1341]. Grande et souveraine est l’énergie des Dieux.

4. Le roi qui brille, toujours le même, en plusieurs lieux, repose au sein (de l’Aranî). On l’apporte sur le bois du foyer ; là, de ses deux mères l’une porte son nourrisson, l’autre s’approche (pour l’allaiter)[1342]. Grande et souveraine est l’énergie des Dieux.

5. Attaché à la ramée supérieure, il gagne la ramée inférieure, et pénètre au sein des branches. Ces jeunes mères conçoivent Agni, et l’enfantent en rompant leur ceinture. Grande et souveraine est l’énergie des Dieux.

6. Cependant le nourrisson, couché près de ses deux mères, se lève promptement ; il se débarrasse de ses langes, et il marche seul[1343]. Alors ont lieu les œuvres de Mitra et de Varouna. Grande et souveraine est l’énergie des Dieux.

7. Ainsi ce (dieu), chéri de ses deux mères, brillant sacrificateur dans nos saintes cérémonies, se dresse en pointe, tout en se reposant sur une large base. Les (prêtres) au doux langage lui présentent les hommages qui lui sont agréables. Grande et souveraine est l’énergie des Dieux.

8. Comme devant le héros qui combat, tout le monde, en s’approchant de lui, baisse le front (avec respect). Entouré des (saintes) Prières, il va travaillant à rendre parfaite la Vache (du sacrifice). Grande et souveraine est l’énergie des Dieux.

9. Messager (divin), il se nourrit de la substance des (branches) qu’il consume ; il grandit, et s’élève avec splendeur entre (le Ciel et la Terre). Il manifeste pour nous les diverses formes, et (d’en haut) jette sur nous ses regards. Grande et souveraine est l’énergie des Dieux.

10. (Sous le nom de) Vichnou, (il se fait le grand) pasteur ; il s’empare du poste le plus élevé dans l’air. Agni connaît tous les mondes. Grande et souveraine est l’énergie des Dieux.

11. Deux êtres jumeaux, dont l’un est environné de lumière et l’autre de ténèbres, produisent la variété des formes. Ce sont deux sœurs ; l’une est noire, l’autre est brillante. Grande et souveraine est l’énergie des Dieux.

12. Il est aussi deux vaches, la mère et la fille, nourrices fécondes qui vivent l’une par l’autre. Je les célèbre toutes deux dans ce séjour de Rita[1344], entre (le Ciel et la Terre). Grande et souveraine est l’énergie des Dieux.

13. La vache (de la Libation) vient en mugissant, au milieu des coupes (sacrées), lécher le nourrisson d’Ilâ et lui donne la mamelle. Ilâ s’engraisse du lait de Rita[1345]. Grande et souveraine est l’énergie des Dieux.

14. Quant à (la vache, nommée) Padya[1346], elle revêt toute espèce de forme et, restant debout, elle lèche (doucement) le jeune nourrisson. J’honore par mes chants le lieu où siége Rita. Grande et souveraine est l’énergie des Dieux.

15. Au milieu (des airs), comme sur un sol ferme, marchent deux nobles (êtres), l’un secrètement, l’autre à découvert. La route qu’ils suivent leur est commune, et cependant diffère d’apparence. Grande et souveraine est l’énergie des Dieux.

16. Allons, pressez les vaches (du sacrifice)[1347], ces nourrices chargées de lait, à la mamelle lourde et traînante. Qu’elles soient toujours nouvelles, toujours jeunes. Grande et souveraine est l’énergie des Dieux.

17. Quand, au milieu de cet autre troupeau de vaches (célestes), Indra mugit tel qu’un taureau, c’est qu’il jette en leur sein une semence (féconde). Indra est roi, il est le maître des nuits et des jours[1348]. Grande et souveraine est l’énergie des Dieux.

18. Chantons, ô peuples, les excellents chevaux du vaillant (Indra). Les Dévas les connaissent, et dix attelages les ramènent six fois[1349]. Grande et souveraine est l’énergie des Dieux.

19. Le dieu (qui s’appelle) Twachtri et Savitri revêt toutes les formes. Il enfante comme il embellit diversement les êtres. Tous les mondes lui appartiennent. Grande et souveraine est l’énergie des Dieux.

20. C’est lui qui a su appareiller ces deux vases qui forment le monde ; c’est lui qui les a remplis de trésors. Partout est célébré le héros qui possède la richesse. Grande et souveraine est l’énergie des Dieux.

21. Il soutient tout, et il daigne habiter près de nous cette terre, comme un roi ami et bienfaisant. Avec lui viennent les vaillants (Marouts), ses gardes fidèles. Grande et souveraine est l’énergie des Dieux.

22. Ô Indra, la terre produit pour toi ces plantes efficaces et pures, ces eaux, ces trésors. Puissions-nous être tes fortunés amis ! Grande et souveraine est l’énergie des Dieux.




LECTURE QUATRIÈME.

HYMNE I.

Aux Viswadévas, par Pradjapati.

(Mètre : Trichtoubh.)

1. Les magiques artifices (des Asouras) ne sauraient prévaloir contre les œuvres sages, fermes, souveraines des Dieux, ni contre la (grandeur) bienfaisante du Ciel et de la Terre. Les Montagnes (célestes) ne subissent pas (toujours) leur domination.

2. L’être qui brille seul (au ciel), amène constamment le char des six (Ritous) ; pour nourrir ses feux, accourent les Vaches (lumineuses). Avec lui viennent rapidement les trois mondes, disposés les uns au-dessus des autres. (De ces trois mondes) deux sont invisibles, un seul est apparent[1350].

3. (Dieu) fécond et possédant toutes les formes, il produit chaque espèce d’êtres. Il presse successivement trois mamelles ; trois fois il répare sa vigueur par les libations[1351]. Ceint d’une triple force, il va, plein de grandeur, répandre au loin sa semence (divine), et enfante les (Aurores) perpétuelles.

4. À l’approche de l’Aurore, il s’éveille pour suivre sa voie accoutumée. Moi, j’invoque le beau nom des Adityas. Que les Ondes divines[1352] viennent jouer autour du (Dieu), et qu’elles répandent sur lui leurs libations diverses.

5. Il a trois foyers[1353]. Les Ondes sont trois fois présentées aux (dieux) sages, et dans les sacrifices brille le souverain roi, qui a mesuré les trois (mondes)[1354]. Trois vierges[1355], pures et désirables, viennent trois fois du ciel dans nos saintes assemblées.

6. Ô Savitri, trois fois chaque jour répands du haut du ciel tes dons précieux ; trois fois par jour (comble-nous de tes bienfaits). Accorde-nous une triple opulence[1356]. Bhaga, sauveur opulent, donne-nous des richesses et des trésors.

7. Trois fois du haut du ciel Savitri se montre libéral. Que Mitra et Varouna, ces deux rois aux mains brillantes, que les Ondes[1357], que le Ciel et la Terre, étendus et vastes, contribuent de leurs richesses aux générosités de Savitri.

8. Trois fois les airs s’enflamment de clartés vives et immortelles. On voit s’allumer les trois (feux) attachés au service du (grand) Asoura[1358]. Que les Dieux justes, rapides, invincibles viennent trois fois du ciel à notre sacrifice.


HYMNE II.

Aux Viswadévas, par Viswâmitra.

(Mètre : Trichtoubh.)

1. Qu’un (dieu) sage écoute ma Prière, qui se dirige vers lui comme une vache errante qui a perdu son gardien. Cette vache donne toujours un lait abondant, dont Indra et Agni sont amateurs.

2. Indra et Poûchan (dieux) aux mains brillantes, (à la semence) féconde, semblent avec plaisir venir du ciel goûter (ce lait) déposé (dans nos coupes). Puisque tous les dieux se plaisent avec notre (vache), ô Vasous, accordez-moi ici le bien que j’attends de vous.

3. Les vaches (de la Prière)[1359], ces épouses (d’Agni), veulent obtenir une preuve de la virilité (du dieu) ; elles reconnaissent que son germe a été fécondé, et elles accourent avec un empressement respectueux près de l’enfant (lumineux) qui fait apparaître les formes.

4. Je chante le Ciel et la Terre, qui étalent tant de beautés, et dans le sacrifice j’élève ma coupe avec ma prière. (Ô Agni), que tes (flammes), qui se dressent avec éclat, (ces flammes) que nous vénérons, soient pour Manou[1360] une source abondante de richesses.

5. Ô Agni, que ta langue, qui parmi les Dévas a mérité le nom d’Ouroutchi[1361], (cette langue) pleine de miel et d’intelligence, vienne flatter ici tous ces (dieux) que nous appelons à notre secours ; et porte-leur nos douces libations.

6. Divin Agni, opulent possesseur de tous les biens, ta providence si variée, si dévouée, est pour (l’homme) que tu combles de tes faveurs telle que l’eau de la montagne (céleste). Fais-nous sentir cette providence, cette sagesse qui veut le bien de tous.


HYMNE III.

Aux Aswins, par Viswâmitra.

(Mètre : Trichtoubh.)

1. La vache qui désire l’antique (Agni), apporte son lait[1362]. Le fils[1363] de l’heureuse (Aurore) s’élance entre (le Ciel et la Terre). La (déesse) toute resplendissante amène l’astre lumineux. L’éloge de l’Aurore a éveillé les Aswins.

2. Les Prières se levant avec le Sacrifice se présentent devant vous comme (des enfants) devant leurs pères, et poussent votre char merveilleux. Dédaignez pour nous l’invocation de l’avare (qui vous compte ses offrandes). Nous, nous prodiguons les holocaustes ; venez à nous.

3. (Dieux) secourables, avec votre brillant attelage, avec votre char rapide, (venez) ; écoutez les chants de votre poëte. Ô Aswins, (dieux) sages et impétueux, nos ancêtres vous ont, (comme nous), exposé leurs besoins.

4. Écoutez-nous, et dirigez votre course de ce côté. Tous les hommes invoquent les Aswins. Tels que des amis, ils vous offrent ces liqueurs savoureuses et mêlées au lait de la vache. Le Soleil est à l’horizon, (venez avec lui).

5. Ô Aswins, le monde se colore. (Dieux) riches et secourables, les hommes célèbrent vos louanges. Arrivez vers nous par les voies que suivent les dieux. Nous avons pour vous des trésors de libations.

6. Vaillants héros, votre amitié est pour nous (comme) un domicile antique et fortuné. Que vos bienfaits se répandent sur la fille de Djahnou[1364]. Heureux d’une amitié qui nous élève jusqu’à vous, nous voulons nous enivrer de vos douces liqueurs.

7. Jeunes et puissants Aswins, venez avec le Vent et vos chevaux partager notre joie. (Dieux) véridiques, doux et bienfaisants, buvez avec plaisir de notre soma nouveau.

8. Autour de vous, ô Aswins, les Offrandes viennent avec les Chants vous honorer de tout côté. Votre char, né dans le sacrifice et poussé par nos hymnes, parcourt maintenant le ciel et la terre.

9. Ô Aswins, le soma le plus savoureux a été versé pour vous. Venez, pour le boire, dans notre demeure. Votre char nous apporte une heureuse abondance, (ce char) qui aime à se rendre à l’appel (du père de famille) libéral de soma.


HYMNE IV.

À Mitra, par Viswâmitra.

(Mètre : Trichtoubh et Gâyatrî.)

1. Mitra, sensible à nos louanges, secourt les mortels. C’est Mitra qui soutient la Terre et le Ciel. Mitra regarde les hommes sans jamais fermer l’œil. Mitra est honoré par nos holocaustes et nos offrandes de beurre.

2. Ô Mitra, (divin) Aditya ! qu’il soit dans l’abondance, le mortel qui t’offre les dons du sacrifice. (L’homme) que tu protéges ne connaît ni la mort ni la défaite ; le mal ne le touche ni de loin ni de près.

3. Exempts de péché, heureux (des présents) d’Ilâ[1365], posant nos genoux sur la terre (sacrée), et poursuivant les rites pieux, puissions-nous obtenir la faveur de l’Aditya Mitra !

4. Il vient de naître, ce Mitra digne de nos hommages et de notre culte, ce roi sage et puissant. Puissions-nous posséder la faveur et l’heureuse amitié de ce (dieu) adorable !

5. C’est un grand Aditya que nous ne pouvons aborder qu’avec respect. Il protége les mortels, et mérite nos chants et nos adorations. À ce Mitra, digne objet de nos louanges, que (nos prêtres) offrent dans les feux d’Agni un holocauste qui lui plaise.

6. Le divin Mitra est le soutien des hommes ; son secours est fécond en bienfaits, et ses présents sont glorieux.

7. Mitra, en s’étendant, remplit le ciel de sa grandeur, et la terre de son opulence.

8. Les cinq espèces d’êtres[1366] honorent Mitra, qui par sa force triomphe de ses ennemis. Il est le soutien de tous les dieux.

9. Mitra, se mêlant aux Dévas et aux enfants d’Ayou, donne aux mortels assis sur le gazon (sacré) l’abondance qu’ils ont méritée par leurs œuvres pieuses.


HYMNE V.

Aux Ribhous[1367], et à Indra, par Viswâmitra.

(Mètre : Djagatî.)

1. Nobles fils de Soudhanwan, ô vous qui avez la puissance de confondre vos ennemis, voici nos prêtres[1368], qui sont vos parents par la (sainte) pensée ; avec le sacrifice ils renouvellent ces œuvres merveilleuses qui vous ont fait obtenir une part dans les offrandes.

2. Oui, par cet art avec lequel vous avez divisé la coupe (du sacrifice), par cette adresse pieuse avec laquelle vous avez recouvert d’une peau (nouvelle) une (vieille) vache, par cette (sainte) pensée avec laquelle vous avez formé les chevaux azurés (d’Indra), ô Ribhous, vous avez mérité le titre de dévas.

3. Les Ribhous ont acquis l’amitié d’Indra ; petits-fils de Manou[1369], pieux enfants de Soudhanwan, ils sont venus comme ouvriers (du sacrifice). Ils ont obtenu le nom d’Immortels par leur attention aux (saintes) cérémonies et aux œuvres religieuses.

4. Vous venez sur le même char qu’Indra à nos libations. Vous partagez avec lui l’offrande de vos serviteurs. Ô Ribhous, savants fils de Soudhanwan, rien n’est comparable à votre force et à vos bonnes actions.

5. Ô Indra, avec les Ribhous que nous comblons d’offrandes, reçois dans tes mains ce soma, qui est versé en ton honneur. Appelé par la prière dans la maison d’un fidèle serviteur, ô Indra, réjouis-toi, ainsi que ces nobles fils de Soudhanwan.

6. Ô Indra, accompagné des Ribhous et comblé de nos offrandes, (viens) à notre sacrifice. Ô toi que le monde célèbre, sois heureux avec Satchî[1370] (que nous avons parée à ton intention). Pleines d’un (pieux) empressement[1371], les Cérémonies s’agitent pour toi, et s’associent aux efforts des Dévas et de Manou[1372].

7. Ô Indra, toi qui donnes la force, viens avec les Ribhous, doués (comme toi) de la force, attiré à notre sacrifice par les louanges du poëte. (Viens) vers les enfants d’Ayou avec cent rapides et lumineux (coursiers)[1373] ; ô toi qui as mille moyens de nous rendre heureux, (reçois) nos holocaustes et nos offrandes.


HYMNE VI.

À l’Aurore, par Viswâmitra.

(Mètre : Trichtoubh.)

1. Aurore, forte, sage et opulente, reçois nos offrandes, et les chants du poëte. Déesse antique et (toujours) jeune, prévoyante et ornée de tous les biens, tu aimes à suivre nos sacrifices.

2. Aurore, déesse immortelle, brille sur ton char magnifique, et provoque la prière. Tu as la couleur de l’or. Que tes coursiers, robustes et soumis, t’amènent vers (nous).

3. Aurore, tu te dresses au-dessus de tous les mondes, et tu annonces l’(astre) immortel. Sans cesse nouvelle, viens d’une marche uniforme, faisant pour ainsi dire rouler ta roue dans la même ornière.

4. La riche épouse du Soleil, l’Aurore s’en va, telle qu’une femme qui déploie son voile. Elle produit la clarté ; bonne et fortunée dans ses œuvres, elle s’étend de l’extrémité du ciel à l’extrémité de la terre.

5. À vos yeux brille la divine Aurore ; portez-lui vos offrandes et vos hymnes. Honorée avec le miel (de vos libations), elle élève dans le ciel ses heureuses lumières, et charme nos regards par ses brillantes clartés.

6. Les rayons de la pieuse (déesse) se font sentir du haut des airs. De ses riches splendeurs elle colore le ciel et la terre. Ô Agni, tu reçois les dons de l’holocauste, et accueilles honorablement l’Aurore, qui s’avance avec pompe.

7. Dans le foyer (lumineux) où siége Rita[1374], ce (dieu) qui féconde les Aurores, essaye ses rayons, et s’empare de l’immensité du ciel et de la terre. La sublime magie de Mitra et de Varouna séduit les yeux, et resplendit de toute part.


HYMNE VII.

À l’Aurore, par Viswâmitra.

(Mètre : Trichtoubh et Gâyatrî.)

1. Que ces soins empressés que nous mettons à vous honorer ne soient pas perdus pour votre serviteur. Ô Indra et Varouna, où est la glorieuse assistance que vous donnez à vos amis ?

2. Ce noble seigneur, jaloux d’accroître sa fortune, ne cesse de vous appeler à son secours. Ô Indra et Varouna, avec les Marouts, avec le Ciel et la Terre, aimez à entendre mon invocation.

3. Ô Indra et Varouna, donnez-nous l’opulence ; (donnez-nous), ô Marouts, les richesses accompagnées de tous les biens. Que les épouses des dieux[1375] nous protégent ; qu’Hotrâ[1376], que Bhâratî[1377], avec leurs riches offrandes, viennent à notre secours.

4. Ô Vrihaspati, ami de tous les Dieux, agrée nos holocaustes, et accorde à ton serviteur des biens précieux.

5. Adorez et chantez Vrihaspati, qui brille au milieu des sacrifices. J’implore sa force invincible.

6. (Oui, adorez) Vrihaspati, bienfaiteur des hommes, indomptable, illustre, doué de toutes les formes.

7. Brillant et divin Poûchan, cet hymne nouveau est pour toi. C’est un hommage que nous te rendons.

8. Prends plaisir à ces chants que nous accompagnons d’offrandes. Aime notre prière, comme l’époux aime son épouse.

9. Qu’il soit notre sauveur, ce Poûchan, qui de son regard embrasse tous les mondes.

10. Nous adorons la noble lumière du divin Savitri, qui lui-même provoque nos prières.

11. Apportant avec nous l’offrande et la prière, nous demandons les bienfaits du divin Savitri, du (fortuné) Bhaga.

12. Par des sacrifices, par des hymnes, les prêtres, que la Sagesse dirige et que la Prière inspire, honorent le divin Savitri.

13. Soma[1378] vient ; il connaît la voie des Dévas ; il s’avance vers le trône de Rita, et prend la place qui lui a été préparée.

14. Soma nous donne, à nous et aux animaux, bipèdes ou quadrupèdes, l’abondance et la santé.

15. Soma prolonge notre vie, et dompte nos ennemis ; qu’il vienne s’asseoir à notre foyer.

16. Ô Mitra et Varouna, (dieux) puissants, jetez (votre) beurre sur nos vaches, (votre) miel sur les mondes.

17. Ô vous, dont les œuvres sont pures, dont nous exaltons la gloire, dont nos adorations et nos longues (prières) augmentent la puissance, vous régnez avec grandeur et avec force.

18. Chantés par Djamadagni, asseyez-vous au foyer du sacrifice. Agrandis par le sacrifice même, buvez le soma.


HYMNE VIII[1379].

À Agni, par Vamadéva.

(Mètres : Achtî, Atidjagatî, Ghriti et Trichtoubh.)

1. Animés d’un même esprit, que les Dévas, ô Agni, viennent te donner l’essor à toi, Déva puissant ; oui, par leurs œuvres, qu’ils te donnent l’essor. Honorez un Déva immortel au milieu des mortels ; enfantez un Déva sage et universel, oui, enfantez un Déva sage.

2. Ô Agni, amène vers les Dévas ton frère Varouna, qui par sa bonté mérite une part dans le sacrifice, oui, le grand (Varouna), qui mérite une part dans le sacrifice ; cet Aditya pieux, qui donne aux hommes le beurre (céleste), oui, ce royal (Varouna) qui donne aux hommes le beurre (céleste).

3. Généreux ami, amène vers nous ton rapide ami (Varouna) ; qu’il soit comme la roue d’un char arrivant sur une bonne voie ; oui, deviens pour nous cette heureuse voie. Ô Agni, reçois nos offrandes en l’honneur de Varouna, en l’honneur des Marouts resplendissants. (Dieu) brillant et généreux, fais le bonheur de mon fils et de mon petit-fils ; oui, fais notre bonheur, à nous-mêmes.

4. Sage Agni, tu as en notre faveur détourné la colère du divin Varouna. Tu es le plus grand des sacrificateurs, le premier de ceux qui présentent l’offrande ; (dieu) brillant, délivre-nous de toutes les inimitiés.

5. Ô Agni, prête-nous ton secours et viens à nous au lever de cette aurore. Donne-nous la faveur de Varouna. Accours avec tes présents, et répands tes douceurs sur notre sacrifice. Réponds à notre invocation, et viens à nous.

6. La vue de ce dieu fortuné au milieu des mortels est le plus beau, le plus merveilleux des spectacles. Elle est aussi désirable, aussi douce que le beurre pur et limpide qui vient de la vache inviolable.

7. Le divin Agni à trois naissances[1380] nobles, enviées, sublimes. Sous la voûte infinie (du ciel) environné de splendeur, qu’il vienne ce maître[1381] pur, magnifique et brillant.

8. Messager (des Dieux) et sacrificateur, il visite toutes les maisons, monté sur un char d’or, et agitant sa douce langue, poussant ses coursiers rougeâtres, beau, resplendissant, agréable comme la maison où règne l’abondance.

9. Parent du Sacrifice, il anime les enfants de Manou : ceux-ci le dirigent avec le grand frein (des cérémonies). Dieu, il habite la demeure d’un mortel ; il accomplit ses vœux et prend une part dans son opulence.

10. Que le prévoyant Agni nous conduise ; elle est pour lui, cette offrande que les Dévas lui ont réservée. Quand tous ces (Dévas) immortels ont accompli l’œuvre de la prière, alors le (prêtre), chantre brillant (du dieu), devient son père ; il l’enfante, et avec la libation il arrose le juste (Agni)[1382].

11. (Agni) naît d’abord dans nos maisons ; (il naît) au sein du ciel, qui devient son berceau ; (il naît) au centre même du nuage, n’ayant alors ni pieds ni tête,[1383] cachant tous ses membres, et se mêlant à la noire vapeur.

12. Que tu siéges au foyer du sacrifice, ou dans l’obscurité du nuage, l’hymne te donne une force immense, ô Agni ; tu es désirable, jeune, beau, brillant. Sept (ministres)[1384] empressés ont travaillé à la naissance d’un (dieu) généreux.

13. Nos ancêtres, enfants de Manou, sont aussi venus s’asseoir autour d’un semblable foyer. Les vaches nourricières, enfermées au sein de la montagne, ils les ont délivrées en appelant les Aurores.[1385]

14. Oui, nos (pères) ont honoré (Agni), et brisé les portes de la montagne. Que les autres célèbrent leur gloire. Jaloux de procurer la délivrance des vaches (célestes), ces (Angiras) ont chanté les actions (d’Agni) ; ils ont révélé la lumière du jour, et par leurs prières organisé le sacrifice.

15. Ces hommes pieux, pleins du désir de posséder les vaches (célestes), ont, par leurs paroles, dignes des dieux, ouvert cette large montagne qui retenait de tout côté ces malheureuses prisonnières ; (ils ont forcé) le cachot où se trouvait enfermé le troupeau (divin).

16. Ils ont inventé les premières formules d’adoration. Ils ont imaginé les vingt et une (mesures) qui plaisent à la vache, mère[1386] du sacrifice. C’est en entendant ces accents que s’est levé le troupeau (lumineux du matin) ; c’est alors que l’Aurore s’est montrée avec la glorieuse splendeur de (l’astre) voyageur.

17. Les sombres ténèbres sont anéanties ; le ciel se couvre de clarté ; les feux de la divine Aurore sont arrivés. Le Soleil s’est revêtu de larges rayons, et voit, au milieu des mortels, tout ce qui est droit, tout ce qui est tortueux.

18. Qu’à l’instant, dans toutes les demeures, les Dévas se réveillent pour chanter (Agni), et qu’ils affermissent le trône où brille sa précieuse lumière. Ô Mitra et Varouna, soyez sensibles à notre prière.

19. Je chante le resplendissant Agni, le sacrificateur chargé de toutes les offrandes, le pontife suprême. Que le jus limpide du soma coule doucement autour de lui, et qu’il se nourrisse comme à la pure mamelle des vaches (du sacrifice).

20. Agni est pour tous les dieux tel qu’Aditi[1387] ; c’est un hôte pour tous les enfants de Manou. Possesseur de tous les biens, qu’il soit le soutien, le refuge, le bienfaiteur des Dévas.


HYMNE IX.

À Agni, par Vamadéva.

(Mètre : Trichtoubh.)

1. Le juste Agni, prêtre et pontife, vient, immortel au milieu des mortels, Déva au milieu des Dévas, siéger (au foyer du sacrifice), afin d’y briller avec grandeur, afin de s’y charger des holocaustes de Manou.

2. Ô Agni, illustre enfant de la Force, tu viens de naître (dans notre sacrifice), et, messager (divin), tu te places entre la race humaine et la race céleste ; tu attelles (au char du sacrifice) tes mâles et brillants étalons[1388].

3. Je chante ces deux coursiers[1389], qu’enfanta le sacrifice, (ces coursiers) rouges, brillants et rapides en l’honneur desquels coulent les libations et le beurre (consacré). C’est toi qui les attelles, et qui vas, servant d’intermédiaire entre vous autres, dieux (adorés), et les mortels qui vous honorent.

4. Agni, tu as de bons coursiers, un beau char, tu es riche en présents. En faveur de ce peuple prodigue d’holocaustes, amène Aryaman, Varouna, Indra, Vichnou, les Marouts et les Aswins.

5. Agni, ô toi qui donnes la vie, que ce sacrifice nous procure des vaches, des brebis, des chevaux, de robustes amis, des hommes invincibles. Qu’il soit pour nous une source d’abondance, de vie et de gloire. Que nous ayons une nombreuse famille, et que notre opulence repose sur une large base.

6. Ô Agni, sois le puissant protecteur de l’homme qui, pour apporter l’aliment de tes feux, couvre son corps et son front de sueur. Délivre-le des atteintes du méchant.

7. Qu’il soit riche et ferme dans son bonheur, le serviteur fidèle et dévoué qui présente l’offrande pour satisfaire à tes désirs, qui t’arrose de ses heureuses libations, et qui t’amène comme hôte au sein de son foyer.

8. Assis sur ton trône, tu portes une ceinture dorée. Tel qu’un coursier, fais passer à travers le mal le serviteur qui à la fin du jour et au lever de l’Aurore chante la louange, et se concilie ta faveur par ses holocaustes.

9. Immortel Agni, qu’il ne perde pas son opulence, qu’il ne soit pas enveloppé dans les piéges du méchant, l’homme qui te loue, qui t’apporte l’offrande, et qui, élevant la cuiller (sacrée), accomplit les rites en ton honneur.

10. Ô Agni, le mortel dont toi, dieu toujours jeune, tu aimes et récompenses les offrandes, il doit voir son invocation heureusement exaucée, dussions-nous avoir contribué à la prospérité de ton serviteur !

11. Que ce dieu sage distingue entre les mortels les bons et les mauvais, comme (le coursier) sait distinguer sur son dos les fardeaux lourds ou légers. Qu’il nous accorde le partage d’une opulence soutenue par une nombreuse famille, et daigne nous conserver intact cet (heureux) partage.

12. (Agni) est sage, et les (prêtres), sages comme lui, et fermes (dans leur piété), le chantent, et l’établissent dans les demeures des enfants d’Ayou. De là, maître (de la maison)[1390] jette les yeux et lance tes rayons rapides vers ces (dieux) admirables qui méritent nos regards.

13. Agni, (dieu) brillant, et toujours jeune, qui sais diriger les hommes et combler leurs vœux, le sage qui te célèbre, t’honore en versant la libation. Apporte-lui le bonheur et l’abondance.

14. Ainsi, Agni, tandis que, dans le désir de te posséder, nous travaillons des pieds, des mains, de tout le corps, que les (prêtres) accomplissent aussi leur lâche, et ouvriers excellents, avec le secours des Dévas qu’ils forment Rita, comme le charpentier fait un char.

15. Oui, au lever de l’Aurore notre mère, réunis au nombre de sept sages, allons les premiers conquérir les rayons du sage (Agni). Soyons des Angiras, des enfants de l’Astre lumineux[1391], et par nos efforts brisons la montagne qui renferme nos trésors.

16. Oui, Agni, nous voulons, comme nos grands et antiques parents, travailler à l’œuvre du sacrifice. Ils sont partis chercher la lumière jusque dans sa source ; par la vertu de leurs hymnes, ils ont séparé le ciel et la terre, et ouvert la porte aux (vaches) matinales.

17. Ouvriers diligents, brillants Dévas, dans leur désir d’honorer les dieux ils en ont façonné les formes, ainsi que (l’ouvrier) façonne le fer, donnant à Agni la clarté, à Indra la grandeur, et ils ont amené autour d’eux le large troupeau des vaches (célestes).

18. Redoutable (Agni), quand (tes feux) nous révèlent ces races divines disposées près de nous, comme des troupeaux (répandus) sur une plaine fertile, que les libations s’épanchent en faveur des mortels, en faveur de l’enfant d’Ayou, du père de famille, que tu vois ici.

19. Nous avons accompli l’œuvre (sainte) ; nous avons travaillé en bons ouvriers. Que la brillante Aurore prenne son vêtement que teignent les feux de Rita, les larges lueurs d’Agni resplendissant de toute part, et les rayons de l’œil divin qui embellit (le monde.)

20. Sage et prudent Agni, nous avons ainsi célébré tes louanges. Accueille notre hymne. Lève-toi dans ta splendeur ; augmente notre opulence. (Dieu) magnifique, accorde-nous de grandes richesses.


HYMNE X.

À Agni, par Vamadéva.

(Mètre : Trichtoubh.)

1. Appelez à votre secours Agni, roi du sacrifice, pontife redoutable, prêtre juste du ciel et de la terre, revêtu des couleurs de l’or. Qu’il (fasse sentir à nos ennemis) l’atteinte imprévue de la foudre !

2. Ce foyer, que nous avons formé, est à toi ; il t’attend, beau et paré comme l’épouse qui désire son époux. Viens vers nous, orné de ta ceinture (lumineuse) ; place-toi sur ton trône, ô toi qui te distingues par tes bonnes œuvres ; les (Prières, tes épouses) se tournent vers toi.

3. Ô prêtre, adresse ton invocation au dieu sage, affable, qui nous écoute avec bonté. Que la louange de l’immortel (Agni) résonne comme la pierre (du mortier) qui prépare la douce libation.

4. Ô Agni, sois présent à notre fête. Dieu des sacrifices, préside à celui-ci, et sois pour nous une source de bonnes pensées. En quel (autre) lieu auras-tu des hymnes et des libations ? Dans quelle (autre) demeure trouveras-tu des amitiés (plus dévouées) ?

5. Quel reproche peux-tu faire à Varouna, ô Agni ? En quoi le Ciel est-il coupable ? Quelle est notre faute ? Que peux-tu dire contre le généreux Mitra, contre la Terre, contre Aryaman, contre Bhaga ?

6. Ô Agni, qui grandis dans nos foyers, que peux-tu dire contre le Vent qui est fort et bienfaisant, contre Roudra, qui voyage autour de la terre, dont il se rapproche, (Roudra) fidèle à la vérité et redoutable pour les hommes ?

7. As-tu plus de reproches à faire au grand Poûchan, qui fait l’ornement (du monde), qu’à Roudra, qui donne l’holocauste ? De quelle faute accuserais-tu Vichnou, célébré en tout lieu ? Ô Agni, quelle est la faute de la grande déesse du Temps[1392] ?

8. S’ils t’interrogeaient, que répondrais-tu à la troupe immortelle des Marouts, au puissant Soleil, à Aditi, au (Vent) rapide ? Ô dieu qui possèdes tous les biens, dans ta sagesse, achève de former tes rayons lumineux.

9. Je chante Rita[1393], qui se perpétue par lui-même. Ô Agni, voici à la fois la vache[1394] et le miel (du sacrifice). L’une est faible et noire, l’autre savoureux et brillant. Nourris la vache de ce lait vivifiant.

10. Par Rita, le mâle et généreux Agni a reçu sur son dos un lait fortifiant. (Le dieu), immobile jusqu’à ce moment, a commencé à marcher ; brillant, vigoureux et abondant, il a sucé la mamelle féconde (de la libation).

11. Par Rita, les Angiras ont ouvert la montagne, et sont revenus accompagnés des vaches (célestes). Ils se sont heureusement entourés des rayons de l’Aurore. Agni est né, et la Lumière s’est manifestée.

12. Par Rita, les Ondes, déesses immortelles, ont laissé couler leurs flots, aussi doux que le miel, ô Agni. Elles s’élancent avec la rapidité du cheval préparé pour la course.

13. Ne viens point au sacrifice que t’adresse un voisin malveillant, un mauvais parent. Ô Agni, ne reçois point la dette que prétendrait te payer un frère injuste. C’est ainsi que nous repoussons le présent d’un ennemi (qui se dit) notre ami.

14. Ô Agni, toi que nous honorons par nos sacrifices, accorde-nous ta protection. Content (de nos offrandes), défends-nous. Embrasse notre cause ; détruis le mal qui aspire à la force ; donne la mort au grand Rakchasa qui s’élève.

15. Ô vaillant Agni, sois favorable à nos hymnes. Accueille nos offrandes et nos prières. (Ô toi qui es devenu) Angiras[1395], aime nos cérémonies. Que nos chants montent vers les dieux et vers toi !

16. Ô prudent Agni, c’est en l’honneur d’un (dieu) éclairé comme toi que sont dirigées toutes ces pratiques, que sont conçues toutes nos prières. Sage et poëte, j’ai par des hymnes et des invocations poétiques célébré un (protecteur) assez sage pour m’entendre.


HYMNE XI.

À Agni, par Vamadéva.

(Mètre : Trichtoubh.)

1. Que tes rayons soient comme un large filet. Viens tel qu’un roi terrible, monté sur son éléphant. Déploie rapidement ton filet ; prends tes flèches, et de tes traits enflammés perce les Rakchasas.

2. Tes flèches volent avec légèreté. Atteins avec force, et brûle tes ennemis. Ô Agni, (excité par les libations) de la cuiller (sacrée), ne connaissant aucune chaîne, lance de tout côté tes feux, tes rayons, tes éclairs.

3. (Dieu) rapide et invincible, fais briller tes splendeurs, et deviens le défenseur de ce peuple. Ô Agni, ne laisse la victoire à aucun de tes ennemis, qui, de loin ou de près, puisse désirer notre mal.

4. Lève-toi, Agni. Étends (tes flammes), brûle tes ennemis de tes traits aigus. (Dieu) brillant, renverse et consume, comme un bois sec, celui qui nous poursuit de son inimitié.

5. Dresse-toi, ô Agni. Perce nos ennemis, et manifeste ta (force) divine. Brise la vigueur de nos adversaires. Parents et non parents, détruis-les tous.

6. Ô (Dieu) toujours jeune, il connaît ta bienveillance, celui qui chante la louange d’un prêtre actif (tel que toi). Tous ses jours sont sereins ; il a des richesses, de l’abondance, de la gloire. (Par toi) cet Arya voit ses portes ornées et brillantes.

7. Ô Agni, qu’il soit fortuné, qu’il soit comblé de biens, celui qui cherche à te plaire par des hymnes, par des offrandes continuelles. Que dans sa vie, que dans sa maison tout lui soit propice. Que son sacrifice lui soit prospère.

8. J’honore ta bonté. Vers toi s’élève la voix sonore de nos chantres. Pour prix de nos hommages accorde-nous d’excellents chevaux, de beaux chars. Que ta bienveillance de chaque jour soit constante et durable.

9. Ici, dans ce foyer où tu viens briller soir et matin, que chaque jour de nombreuses (offrandes) te soient présentées. Heureux de ta faveur et maîtres des biens de nos ennemis, puissions-nous toujours te vénérer avec le même cœur !

10. Ô Agni, l’homme qui, riche en or et possesseur de bons chevaux, s’approche de toi avec un char rempli de trésors, qui ne cesse de t’offrir une heureuse hospitalité, (cet homme) doit compter sur ta protection, sur ton amitié.

11. Je suis fort (contre mes ennemis) des chants que je tiens de ma famille, et que m’a transmis mon père Gotama. Daigne écouter ces chants, ô (dieu qu’on appelle) Damoûnas[1396], sacrificateur toujours jeune et distingué par tes bonnes actions.

12. Ô prudent Agni, que tes rayons protecteurs se rassemblent sur nous ; qu’ils nous conservent, (ces rayons) vigilants, actifs, fortunés, infatigables, innocents, toujours forts.

13. Ce sont tes Rayons, ô Agni, qui, trouvant que le fils de Mamatâ était aveugle, l’ont délivré de ce mal[1397]. (Le dieu), qui est le maître de tous les biens, protége les hommes vertueux ; l’ennemi malfaisant n’a jamais triomphé de lui.

14. Par toi comblés de biens, aidés de tes secours, puissions-nous, sous ta conduite, jouir de l’abondance ! (Ô dieu) honoré par de justes sacrifices, (dieu) qui ne dois rougir de rien, détruis (l’homme) à double langage, et ne nous abandonne jamais.

15. Ô Agni, nous voulons te plaire en allumant ces feux. Reçois le tribut de nos hymnes. Brûle les impies Rakchasas. Ô toi, qui es la gloire de tes amis, protége-nous contre la haine d’un ennemi envieux.




LECTURE CINQUIÈME.

HYMNE I.

À Agni, par Vamadéva.

(Mètre : Trichtoubh.)

1. Réunissant nos efforts, comment pouvons-nous travailler à donner au généreux Vêswânara[1398] ses larges rayons ? Eh ! n’a-t-il pas pour les recevoir (l’espace) qui est le lit immense destiné à ces flots de lumière ?

2. Célébrez donc le dieu qui, pour prix de mon offrande, me témoigne, à moi mortel, sa libéralité. Le sage et intelligent Agni, le grand et immortel Vêswânara, le premier des êtres (a été bon) pour son serviteur.

3. Le sage, bienfaisant et généreux Agni, (le dieu) placé entre le ciel et la terre[1399], doué de mille rayons féconds, de (mille) lueurs pénétrantes, me demande un grand hymne, une prière qui soit comme le pied mystérieux de la Vache (du sacrifice).

4. Que l’opulent Agni, de ses dents aiguës, de ses rayons brûlants, (déchire et) consume ceux qui attaquent les œuvres inébranlables de Mitra et de Varouna.

5. Les pécheurs, injustes et impies, qui vont (sans sacrifices) comme les femmes privées de la tutelle de leurs frères, comme les épouses séparées de leurs maris, ne peuvent enfanter que les ténèbres en ce lieu[1400].

6. Pour moi, ô Agni purificateur, je ne rejette pas (le sacrifice) comme un lourd fardeau. Reçois et exauce une prière que je fais pour toi, grande, longue et grave, et que j’accompagne d’offrandes efficaces et des sept libations[1401].

7. Qu’un sacrifice pur, et digne de celui que nous honorons, lui soit consacré ; que (ce sacrifice) réveille au foyer oriental[1402] (le dieu) brillant et merveilleux, et qu’il l’excite à commencer sa carrière.

8. Quel mystère ai-je à révéler ! On dit que la forme pure (d’Agni) repose dans son asile (sacré). Au moment où s’ouvre le pâturage des vaches (célestes), c’est lui qui les garde. Que (le sacrifice) élève vers l’orient le siége du (dieu) voyageur.

9. Quand la Vache[1403] féconde (du sacrifice) honore cette noble et antique race des grands (dieux), je reconnais, aux lueurs qui apparaissent au-dessus du saint foyer, que (le dieu) qui devait venir est arrivé dans sa demeure mystérieuse.

10. (Le dieu) brille donc entre les deux grands parents du monde. Chantez l’éclatant mystère de l’illustre (Agni). Que la langue de ce bienfaiteur resplendissant s’élève à la place d’honneur que donne sa mère, la Vache (du sacrifice).

11. J’invoque et j’adore Rita. Je demande, ô possesseur de tous les biens, que tu daignes accueillir mon sacrifice et mes louanges. Tu es le maître du monde, de tout ce qui existe de bon au ciel et sur la terre.

12. Ô sage possesseur de tous les biens, tu sais distinguer ce qu’il peut y avoir de bon, de précieux pour nous dans ce monde. Nous venons vers l’asile mystérieux où tu reposes avec gloire ; fais que nous n’ayons pas lieu de rougir de notre confiance.

13. Quelle limite veux-tu mettre à tes bienfaits ? Vers quelle félicité devons-nous courir, tels que les chevaux qui courent au pâturage ? Quand donc les Aurores, divines épouses de l’immortel Soûrya, étendront-elles leurs couleurs (dans le ciel) ?

14. On ne se contente pas de simples et faibles paroles, d’un pauvre discours sans fruit. Ô Agni, que peuvent te dire les hommes, quand ils sont aux prises avec le mal, et qu’ils sont désarmés[1404] ?

15. Pour le bonheur du père de famille, la splendeur du brûlant, du généreux, du bienfaisant (Agni) a éclaté sur son foyer. Vêtu de lumière, beau et entouré d’opulentes richesses, (ce dieu) a brillé comme un roi[1405].


HYMNE II.

À Agni, par Vamadéva.

(Mètre : Trichtoubh.)

1. Ô Agni, vénérable pontife, dresse-toi pour le sacrifice que nous offrons aux dieux. Tu exauces toutes les prières, tu remplis tous les vœux du sage.

2. Le fort et prudent Agni, la joie de nos cérémonies, s’est assis au milieu du peuple en qualité de sacrificateur. Il a, tel que Savitri, élevé sa brillante bannière, et, comme une large colonne, il étend sa fumée sous le ciel.

3. Que la (cuiller) remplie du beurre (consacré) se lève rapidement pour distribuer ses dons ; qu’elle se dirige vers la droite pour accomplir son œuvre sainte. Que le bois du bûcher monte comme la plante nouvelle, et que, bien disposé, il semble venir au-devant de la rosée des libations.

4. Cependant le gazon (sacré) est étendu, le feu est allumé, le prêtre est debout remplissant son office. Agni, le brillant sacrificateur, porte de tout côté ses pas comme le pasteur du troupeau, et remplit sa triple tâche[1406].

5. Agni, l’aimable et juste sacrificateur, le (dieu) aux douces paroles, s’avance doucement de toute part. Ses rayons ressemblent à des coursiers rapides. Tous les mondes tremblent devant ses splendeurs.

6. Ô Agni, (dieu) terrible et beau, quand tu déploies tes flammes, ta vue est fortunée. Les ténèbres ne sauraient couvrir ton éclat, et les impies (Rakchasas) ne peuvent blesser ton corps.

7. Agni est le père (de tous les êtres) ; rien ne peut arrêter ses bienfaits. Il crée sans obstacle le Ciel et la Terre. Tel qu’un ami heureusement disposé, (ce dieu) purificateur brille au milieu des enfants de Manou.

8. Dix sœurs[1407] s’entendent pour enfanter ensemble Agni, au milieu des humains ; comme de (tendres) mères, (elles ont produit ce dieu) qui se lève avec l’Aurore, dont la face resplendit, et dont la dent est aussi tranchante que la hache.

9. Ô Agni, voici tes coursiers rougeâtres ; ils sont arrosés du beurre (sacré) : leur marche est droite et rapide, leur pas léger, leur force mâle et généreuse. Ils se distinguent par leur empressement à venir au sacrifice offert en l’honneur des dieux.

10. Tes rayons, ô Agni, brillants et vainqueurs, s’élancent avec rapidité, intelligents comme l’épervier, retentissants comme les Marouts.

11. L’œuvre sainte est achevée, (dieu) de lumière ; l’hymne a été chanté pour toi. Accorde tes faveurs à ton serviteur. Les enfants de Manou, pleins de respect et d’espérance, ont établi, pour sacrificateur, Agni, l’objet des louanges d’Ayou[1408].


HYMNE III.

À Agni, par Vamadéva.

(Mètres : Djagatî, Anouchtoubh et Trichtoubh.)

1. Les prêtres viennent déplacer ici, en premier lieu, (Agni) le sacrificateur, le pontife, (le dieu) adorable et resplendissant, dont les Bhrigous, fameux par leurs œuvres[1409], ont sur le bûcher allumé des feux pour le bonheur des peuples.

2. Divin Agni, que tes flammes brûlent sans interruption. C’est pour cela que les mortels t’ont pris, et t’ont proposé au respect des nations.

3. En voyant (Agni) juste et prudent, pareil à un ciel environné d’étoiles, les enfants d’Ayou l’ont choisi pour être dans toutes les maisons le chef des sacrifices.

4. (Ils l’ont choisi) pour être le rapide messager du sacrificateur, le roi de tous les hommes, le héraut brillant pour les peuples.

5. Ils l’ont établi pour être le sacrificateur sage et perpétuel, le pontife aux sept rayons, aimable, éclatant et pur.

6. (Ils vont le chercher), cet (Agni) qui cache sa gloire au sein des (Ondes), mères éternelles, ou au sein des bois (de l’Aranî), qui se soumet à diverses naissances, qui siége dans le (foyer) mystérieux, (dieu) bienfaisant et avide de nos offrandes.

7. Quand les Dévas, au moment où le monde s’éveille, se livrent à leur joie (sainte) dans la demeure du sacrifice, non loin de cette mamelle qu’ils ont eux-mêmes emplie, que le grand et juste Agni, satisfait de nos holocaustes et de nos adorations, vienne prendre sa place à notre fête.

8. Qu’il remplisse, (dieu) prudent, son office de messager, placé entre le ciel et la terre, qu’il connaît également. Va donc, sage et brillant héraut ; grandis et monte jusqu’au ciel.

9. La trace de ton pas étincelant est noire. Ton front est radieux. Tes formes sont mobiles, sans cesser de jeter la même clarté. (L’Aranî ta mère), rompant sa ceinture, met au monde son fruit, et tu nais pour être notre messager.

10. Tu nais, et aussitôt tes rayons brillent au souffle du vent qui anime leur éclat. Agni tourne sa langue aiguë contre le bois du bûcher, et sous sa dent disparaissent les aliments solides qui le nourrissent.

11. Aussitôt que le grand Agni a dans ses flammes consumé les nourritures qu’il a reçues, il ne tarde pas à remplir sa mission. Il prend la force du vent ; il brise (tous les liens), et, tel que (le cavalier qui pousse son cheval), robuste et rapide, il lance en avant son irrésistible (rayon).


HYMNE IV.

À Agni, par Vamadéva.

(Mètre : Gâyatrî.)

1. J’invoque en votre faveur (Agni), le messager (des dieux), le possesseur de tous les biens, l’immortel chargé de nos holocaustes, le pontife suprême.

2. Le grand (Agni) connaît le trésor de nos offrandes. Il (connaît) aussi le chemin du ciel. Qu’il amène ici les dieux.

3. Dieu, il sait les honneurs que le serviteur des dieux leur rend à son foyer. Il donne à chacun la part qui lui revient dans les offrandes.

4. Sacrificateur, et messager des dieux, il est placé entre (le ciel et la terre), et sage, il monte vers les régions supérieures.

5. Puissions-nous par nos holocaustes plaire à Agni, nous qui avec tant de respect allumons ses feux !

6. Ceux qui honorent Agni méritent par leurs hommages d’être distingués pour leurs richesses et leur puissance.

7. Puissions-nous chaque jour voir venir à nous l’opulence si désirée ! Puissions-nous obtenir l’abondance !

8. Ce (dieu) sage est, par sa force, capable de percer (comme le chasseur) ce qu’il y a de plus léger parmi les enfants de Manou.


HYMNE IV.

À Agni, par Vamadéva.

(Mètre : Gâyatrî.)

1. Agni, sois-nous favorable. Tu es grand, toi qui viens ainsi visiter un peuple dévoué au service des dieux, et assis sur le gazon (sacré).

2. Immortel et invincible, parais au milieu des races humaines, et deviens le messager de tous.

3. (Agni) est promené autour de son foyer ; (dieu) sacrificateur, auteur de nos joies pieuses, source de toute pureté, il apparaît sur son trône.

4. Les épouses (des dieux arrivent) ; et Agni, dans le sacrifice et sur le foyer, siége comme prêtre et comme maître de maison.

5. Tu es pour les hommes le ministre de leurs sacrifices, et (tu offres) les holocaustes des enfants de Manou.

6. Tu te fais le messager du mortel, dont tu agrées la piété, et tu te charges de porter son holocauste.

7. Tu aimes notre sacrifice et nos cérémonies, ô Angiras. Écoute notre invocation.

8. Que ton char invincible se tienne autour de nous, prêt à protéger tes serviteurs.


HYMNE VI.

À Agni, par Vamadéva.

(Mètres : Pankti et Ouchnih.)

1. Ô Agni, nous voulons aujourd’hui par nos hymnes te glorifier, toi que, tel qu’un (bon) coursier, (nous chargeons de nos vœux), toi qui touches nos cœurs, et nous assistes comme (un compagnon) puissant[1410].

2. Ô Agni, sois le char qui transporte notre sacrifice heureux, bon, puissant, juste, abondant.

3. Engagé par nos louanges, viens à nous, ô Agni ; sois bienveillant, et fais briller toutes les clartés dorées.

4. Ô Agni, nous t’adressons aujourd’hui ces hymnes ; ils sont l’expression de notre dévouement. Ta flamme résonne comme la foudre céleste.

5. Ô Agni, ta vue, le matin et le soir, est remplie de douceurs. Tel que l’or, tu brilles près de nous pour notre bonheur.

6. Ton corps est sans tache, comme un beurre pur. Ô (dieu) qui portes l’offrande, ton éclat est celui de l’or le plus éclatant.

7. Pieux Agni, un ennemi perpétuel nous menace ; détourne sa haine loin du mortel qui t’honore.

8. Ô Agni, que l’amitié fraternelle qui existe entre nous et vous autres, dieux, nous soit favorable. Notre lien commun est ici sur ce foyer, près de cette mamelle (divine).


HYMNE VII.

À Agni, par Vamadéva.

(Mètre : Trichtoubh.)

1. Puissant Agni, ton heureuse lumière brille à l’approche du Soleil. L’ombre de la Nuit la rend encore plus vive, et sur sa forme qui se dresse coule l’offrande onctueuse.

2. Ô Agni, toi qui nais tant de fois, reçois mes louanges, et par ton œuvre volontaire accomplis mes vœux. (Dieu) resplendissant et pur, accorde-nous l’abondance de biens que te demandent tous les Dévas.

3. Agni, c’est toi qui donnes naissance à ces hymnes, à ces chants, à ces prières qui attendent une heureuse issue. De toi viennent la fortune et la beauté des races, biens précieux que tu accordes au mortel qui t’honore.

4. C’est par toi que naît ce grand et rapide coursier qui porte l’offrande et que lancent les Dévas ; c’est par toi, ô Agni, qu’il naît, ce coursier merveilleux, fort, juste, riche et impétueux.

5. Immortel Agni, c’est toi que les mortels religieux invoquent le premier dans leurs prières, toi, dieu à la langue caressante, prudent ennemi du mal, toi, maître de maison, (qu’ils surnomment) Damoûnas.

5. Si tu es notre protecteur, éloigne de nous l’ignorance, le péché et la folie. Ô divin Agni, enfant de la Force, heureux le Soir celui que tu aimes ! Il est gardé par ta bénédiction.


HYMNE VIII.

À Agni, par Vamadéva.

(Mètre : Trichtoubh.)

1. Sage Agni, possesseur de tous les biens, celui qui allume tes feux, et qui, élevant la coupe (sacrée), te présente trois fois par jour la libation, doit, par l’effet de ta puissance, regorger de biens et triompher (de ses ennemis).

2. Ô Agni, celui qui prend la peine d’apporter un aliment pour ta flamme, et qui honore ta splendeur en allumant tes feux vers le soir et au lever de l’Aurore, obtient de florissantes richesses et des forces victorieuses.

3. Agni est le roi de l’homme puissant et riche[1411]. Il est le maître de l’abondance et de la fortune ; flatté de l’offrande du mortel pieux, (ce dieu) toujours jeune ne cesse de le combler de biens.

4. Ô Agni toujours jeune, si, hommes que nous sommes, nous avons pu par ignorance commettre quelque faute, délivre-nous entièrement[1412] du péché. Ne laisse en nous aucune prise au mal.

5. Ô Agni, en face des dieux et des mortels nous avons commis de grandes fautes. Fais que nous n’en ressentions aucune peine, nous qui sommes tes amis. Donne le bonheur à nos fils et à nos petits-fils.

6. Adorables Vasous[1413], de même que vous avez délivré la Vache (du sacrifice) du lien qui l’attachait par le pied, de même aussi délivrez-nous du mal. Ô Agni, que notre vie se prolonge.


HYMNE IX.

À Agni, par Vamadéva.

(Mètre : Trichtoubh.)

1. Le bienveillant Agni nous montre à l’orient les présents des brillantes Aurores. Venez, ô Aswins, dans la maison de (l’homme) pieux. Le divin Soleil arrive avec la lumière.

2. Le divin Savitri va s’unir à la clarté qui se lève, lançant des jets lumineux, et pareil au taureau qui s’approche de la vache. Aussitôt que (les Dévas) ont placé le Soleil dans le ciel, Mitra et Varouna poursuivent leur œuvre.

3. Ce Soleil, que les soins constants des inébranlables Dévas ont formé pour être l’ennemi des ténèbres, sept grands coursiers le transportent, et le présentent au monde qu’il éclaire.

4. Porté par ces nobles coursiers, tu vas, ô Dieu, étendant sur le monde ta toile (radieuse), et le dépouillant de son vêtement noir. Les rayons que lance le Soleil repoussent au sein des eaux les voiles des ténèbres.

5. (Ce dieu) qui n’a point de guides, qui n’a pas de lien, comment fait-il pour monter, pour descendre sans tomber ? Qui peut savoir quelle force le maintient ? Compagnon de Rita, il est le gardien, le soutien de la voûte céleste.


HYMNE X.

À Agni, par Vamadéva.

(Mètre : Trichtoubh.)

1. Le divin Agni, possesseur de tous les biens, colore de ses rayons les brillantes Aurores. Véridiques (Aswins), vous que nos chants célèbrent partout, montez sur votre char, et venez à notre sacrifice.

2. Le divin Savitri siège dans l’astre lumineux qui se lève, et répand la clarté dans tous les mondes. Le soleil vivifie le ciel, la terre, l’air qu’il remplit de ses rayons.

3. Ses rougeâtres coursiers l’amènent. Avec la lumière arrive la grande et belle Aurore qui anime tout de ses splendeurs. La déesse, éveillant (l’homme) pour un utile travail, vient sur un char magnifique.

4. (Ô Aswins), que vos excellents et rapides coursiers vous amènent ici au lever de l’Aurore. Pour vous sont disposés ces vases remplis d’un doux soma. (Dieux) généreux, enivrez-vous des délices de notre sacrifice.

5. (Ce dieu) qui n’a point de guides, qui n’a point de lien, comment fait-il pour monter, pour descendre sans tomber ? Qui peut savoir quelle force le maintient ? Compagnon de Rita, il est le gardien, le soutien de la voûte céleste.


HYMNE XI.

À Agni, par Vamadéva.

(Mètre : Gâyatrî.)

1. Agni, le puissant sacrificateur, est promené autour de notre foyer, dieu adorable entre tous les dieux.

2. Agni semble porté sur un char, et visite notre triple sacrifice. Au milieu des dieux, qu’il reçoive nos offrandes.

3. Maître de l’offrande, que le sage Agni entoure l’holocauste (de ses rayons). Qu’il comble de biens son serviteur.

4. C’est lui dont les feux s’allument au foyer oriental en faveur de Srindjaya[1414], fils de Dévavâta ; lui qui par son éclat triomphe de ses ennemis.

5. Qu’un héros mortel commande à ce rapide et généreux Agni, dont la dent est si aiguë.

6. Chaque jour (les hommes) l’honorent, lui, chargé de biens comme un (noble) coursier, brillant comme un fils du Ciel[1415].

7. Le jeune fils de Sahadéva m’a éveillé et m’a proposé deux chevaux : j’ai aussitôt répondu à son appel.

8. Et aujourd’hui j’ai reçu du jeune fils de Sahadéva ces deux chevaux si beaux, si dociles.

9. Ô divins Aswins, que le jeune fils de Sahadéva soit sous votre protection ; que Somaca[1416] ait une longue existence.

10. Ô divins Aswins, faites que ce jeune fils de Sahadéva vive longtemps.


HYMNE XII.

À Indra, par Vamadéva.

(Mètre : Gâyatrî.)

1. Que le juste Maghavan, ami de notre soma, vienne vers nous. Que ses chevaux l’y amènent. Offrons-lui ces libations qui donnent la force ; et, chanté par nous, qu’il remplisse notre vœu.

2. Lance (les coursiers) comme pour un (heureux) voyage, et (viens) te réjouir aujourd’hui dans notre sacrifice. En l’honneur d’un (dieu) sage et maître de la vie, que le prêtre, avec un désir pareil à celui de la femme (qui attend son époux), commence l’hymne et la prière.

3. De même que le poëte forme (ses chants) mystérieux, le sacrificateur[1417] accomplit les rites et distribue le soma (aux dieux) qu’il vénère. Il enfante les sept rayons[1418] lumineux. Cependant, les (prêtres) avec le jour entonnent les hymnes qui font le bonheur (des hommes).

4. Quand le ciel apparaît aux premières lueurs du matin, quand les (Dévas) allument les feux du grand astre, c’est alors que le plus noble des héros chasse les noires ténèbres, et sa présence apprend aux mortels à distinguer les objets.

5. Indra, ami de notre soma, porte l’infini ; de sa grandeur il remplit le ciel et la terre. Au-dessus de tout s’élève celui qui domine les mondes.

6. Sacra connaît ce qui est bon pour les hommes ; secondé par les robustes (Marouts), il a envoyé les Ondes. Les prêtres (Angiras) par leurs saintes paroles ont (avec lui) brisé la caverne[1419], et ouvert le pâturage des vaches (célestes).

7. Ta foudre, pour nous sauver, a frappé Vritra, qui enveloppait les eaux. La Terre en a frémi de joie. Ô héros, ô maître victorieux, envoie-nous ces Ondes qui coulent de la mer (céleste).

8. Ô (dieu) partout invoqué, quand tu as fendu la montagne (aérienne), Saramâ t’avait d’abord révélé le trésor (enlevé). Tu es notre conducteur, et, chanté par les Angiras, tu brises la porte du pâturage (divin), et tu pourvois à notre existence.

9. Ô Maghavan, les prêtres t’implorent ; viens auprès du sage qui te chante pour le combler de tes bienfaits. Accours vers lui avec les (Marouts), tes alliés. Nous avons besoin de tes dons. Que le magicien impie, que le ravisseur (des Ondes) périsse sous tes coups[1420].

10. Viens dans notre demeure avec cette pensée qui tue le Dasyou. (Autrefois) Coutsa[1421] désira et obtint son amitié. Assis tous deux sur le même siége, vous aviez la même forme, et ta pieuse épouse elle-même hésita entre vous.

11. Tu vas donc, pour secourir Coutsa, assis sur le même char que lui, poussant les deux coursiers, aussi rapide que le vent. Le jour même que ce sage choisit pour une expédition, il attelle ses (chevaux) impétueux, et (vous partez ensemble) comme à la conquête d’un riche butin.

12. En faveur de Coutsa, tu as donné la mort au misérable Souchna ; tu as tué Couyava[1422] et ses mille compagnons. Avec l’arme de Coutsa détruis tous les Dasyous, et que le disque de Sourya s’élève librement.

13. Pour Ridjiswan[1423], fils de Vêdathin, tu as frappé Piprou, et le robuste Mrigaya. Tu as tué cinquante mille compagnons du noir (Rakchasa). Comme la vieillesse détruit la beauté, brise les villes (célestes).

14. Quand tu apparais avec ton corps en face du soleil, ta forme immortelle se distingue aisément. Tel qu’un éléphant sauvage, tu réduis en poussière la plus forte puissance ; tel qu’un lion terrible, tu repousses toutes les armes.

15. Les (mortels) avides de richesses viennent à Indra, et l’invoquent dans le sacrifice, comme s’ils attendaient de lui seul leur bonheur. Ils le chantent dans leurs hymnes, et lui demandent l’abondance. (Indra) est pour eux comme une demeure agréable ; il est comme la Fortune prospère.

16. Implorons donc pour vous cet Indra qui sait accueillir la prière, et qui fait tout pour le bonheur de l’homme. Il dispose des biens qui sont l’objet de nos désirs, et, à la voix d’un chantre tel que moi, il s’empresse d’apporter tous les trésors de l’abondance.

17. (Noble) héros, Arya (généreux), si, au milieu de l’étonnement général, la foudre en éclats vient à tomber, s’il s’élève un combat terrible, pense à nous et protége notre corps.

18. Garde le souvenir des prières de Vâmadéva ; sois un ami, un sauveur dans le combat. Nous accourons vers toi, qui es le plus sage des (dieux). Sois toujours pour celui qui te chante le sujet des plus magnifiques éloges.

19. Ô généreux Indra, puissions-nous tous avec ces hommes qui te sont dévoués, et par toi comblés de biens, vaincre nos ennemis sur le champ de bataille, et, brillants d’une splendeur toute céleste, passer dans la joie d’heureuses nuits et de nombreux automnes !

20. Enfants de Bhrigou, honorons le grand et généreux Indra ; construisons pour lui le char (du sacrifice). Qu’il garde contre tout danger nos amitiés, et que, terrible (pour nos ennemis), il protége et conserve nos corps.

21. Ô Indra, par toi que (nos pères) ont chanté et que nous chantons aussi, que (la maison) de ton serviteur soit remplie de biens, comme les rivières (sont remplies d’eau). (Dieu) traîné par des coursiers azurés, des rites nouveaux sont accomplis en ton honneur ; nous t’avons fait des offrandes de toute espèce. Que la Prière devienne pour nous telle qu’un char (fortuné) !


HYMNE XIII.

À Indra, par Vamadéva.

(Mètres : Trichtoubh, Virât et Écapada.)

1. Ô Indra, tu es grand. Le Ciel et la Terre sont grands aussi, et ils reconnaissent ta supériorité. Dans ta puissance tu as donné la mort à Vritra ; tu as délivré les Ondes englouties par Ahi.

2. À ta brillante naissance le Ciel a frémi, la Terre a tremblé par la crainte de ta colère. Les grandes montagnes (du ciel) sont frappées ; leur sein qui se fermait est ouvert, et les eaux coulent par torrents.

3. Le (dieu) puissant manifeste sa force ; il lance sa foudre avec violence, et perce la montagne (céleste). Enivré (de notre soma), de son tonnerre il frappe Vritra ; et les Ondes s’échappent avec rapidité, dépouillées de l’enveloppe qui les retenait.

4. Il peut se vanter d’avoir un noble fils, le sage resplendissant[1424] qui est ton père. Celui qui a fait Indra est le plus habile des ouvriers. (Quelle gloire) d’avoir donné la naissance au (dieu) qui est l’objet de tant de louanges, qui porte la foudre et qui ne saurait honteusement tomber de sa haute demeure !

5. Indra est le roi (suprême) qu’invoquent toutes les nations ; seul, il peut tout ébranler. Des transports de joie unanimes accueillent cette juste offrande que te présentent l’opulent (père de famille) et le déva qui te chante.

6. Nous lui devons, à ce grand (dieu), toutes ces libations ; nous lui devons ces offrandes qui portent le bonheur dans les sens. À ton tour, ô Indra, sois vraiment pour nous le maître de la richesse. Tu es le soutien de tous les êtres.

7. À peine es-tu né, ô Indra, que tu adoucis les souffrances des hommes. Ahi dormait en retenant les eaux : ô Maghavan, tu l’as déchiré avec ta foudre.

8. (Nous célébrons) le grand Indra, vainqueur et conquérant, impétueux et magnifique. Il ne connaît point de bornes ; il manie le tonnerre ; il a tué Vritra, et, doué de richesses, il s’appelle Maghavan, nous distribuant et la fortune et l’abondance.

9. Mais Maghavan, seul contre les ennemis qui l’entourent dans le combat, sait toujours obtenir la victoire. Il apporte avec lui l’abondance, et en fait ses largesses. Puissions-nous compter au nombre de ses amis !

10. La renommée le présente ainsi comme triomphateur. Il donne la mort à ses ennemis, et, pour prix du combat, il s’empare de leurs vaches. Quand Indra se livre à sa juste colère, tous les êtres tremblent, soit animés, soit inanimés.

11. Indra, par sa victoire, nous donne des chevaux, des vaches, de l’or ; Maghavan, par ses bienfaits, comble tous nos vœux. Le plus vaillant des héros au milieu de ces prêtres puissants, il distribue la richesse et apporte l’opulence.

12. Quelle distance existe entre la force du père et de la mère[1425] (du monde) et celle d’Indra, qui a tout engendré, et qui, par le moyen des nuages tonnants, vient, rapide comme le vent, rendre la vie à la nature épuisée !

13. Maghavan donne la richesse au pauvre ; il réduit en poussière le (pécheur) insensé. Armé de la foudre, il brille, il détruit ; mais aussi il établit solidement la fortune de son serviteur.

14. Il a brisé la roue de Soûrya, et empêché l’enlèvement d’Étasa[1426]. Le noir (nuage), qui fuyait incertain, (par toi) perce son enveloppe, et verse son onde au sein des airs.

15. C’est ainsi que dans la cérémonie de l’asiknî[1427], le sacrificateur (répand ses libations).

16. Sages que nous sommes, nous demandons l’amitié d’Indra. Nous voulons des vaches, des chevaux, d’abondantes moissons, des épouses. Nous invoquons celui qui donne des épouses et qui nous couvre d’une protection solide ; il est pour nous comme le seau qui sert à monter l’eau du puits.

17. Écoute-nous ; tu es notre sauveur, notre parent ; jette les yeux sur ceux qui l’offrent le soma, et fais leur bonheur. Tu es notre ami, notre père, le plus grand des pères ; tu as fait le monde. Donne l’abondance à celui qui te supplie.

18. Ô Indra, écoute-nous ; tu es le protecteur de ceux qui recherchent ton amitié. Montre-toi notre ami. Nous te chantons ; donne l’abondance à celui qui te chante. Dévoués à ton service, ô Indra, nous célébrons ta gloire, et nous t’honorons par ce sacrifice.

19. Oui, nous chantons le magnifique Indra, qui seul triomphe de nombreux ennemis incapables de soutenir son attaque. Le chantre (pieux) est son ami ; il est sous la protection de celui que ni les hommes ni les dieux ne sauraient vaincre.

20. Ainsi qu’il exauce nos vœux, ce magnifique Indra, objet de tant de louanges, protecteur invincible des hommes. Roi de tous les êtres, donne-nous cette riche abondance que (tu as coutume de donner) à celui qui te chante.

21. Ô Indra, par toi que (nos pères) ont chanté, et que nous chantons aussi, (que la maison) de ton serviteur soit remplie de biens, comme les rivières sont remplies (d’eau). (Dieu) traîné par des coursiers azurés, des rites nouveaux sont accomplis en ton honneur : nous t’avons fait des offrandes de toute espèce. Que la Prière devienne pour nous telle qu’un char (fortuné) !


HYMNE XIV.

À Indra, par Vamadéva.

(Mètre : Trichtoubh.)

1. (Un assistant parle à Vâmadéva.) Voici la voie ancienne que les dieux ont tous suivie pour arriver à l’existence. Que par la même voie naisse (Indra), déjà mûr pour la vie. Par des soins trop empressés ne cause pas l’avortement de la mère[1428].

2. (Vâmadéva répond.) Cette voie ne me semble pas encore ouverte. Les accouchements irréguliers sont malheureux. Tout ce que je dois faire n’est pas fait ; avec l’un il faut que j’emploie la force, avec l’autre, la prière[1429].

3. La mère se lève. Qu’(Indra) la voie et qu’il vienne. Que tout s’enchaîne et s’accomplisse avec ordre. Que dans la demeure de Twachtri[1430] Indra boive à la coupe consacrée le soma qui renferme tant de biens.

4. Eh quoi ! il a grandi, celui que (cette mère) a porté depuis des milliers de mois et pendant de nombreux automnes. Il n’est rien qui puisse lui être comparé sous le ciel parmi les choses qui sont nées ou qui doivent naître.

5. Méditant la mort (de Vritra), dans sa retraite mystérieuse la mère a fait Indra et l’a doué de force. Ainsi a paru ce dieu tout revêtu de splendeur ; à peine né, il a rempli le ciel et la terre.

6. Arrivent les Ondes retentissantes ; elles font entendre un bruit respectueux. Elles semblent dire : « Quel est ce prodige ? » Et bientôt elles percent la montagne qui les enveloppait.

7. En voyant (le coup qu’il a frappé), elles poussent un cri de surprise. « Si Indra a commis un crime, » (dit la mère,) « que les Ondes l’emportent. Mon fils, en tuant Vritra avec sa grande arme, a créé ces torrents. »

8. C’est au milieu de la joie des libations que ta jeune (mère) t’a mis au monde, que Couchavâ[1431] t’a dévoré, que les Ondes ont joué autour de ton berceau : c’est au milieu des libations qu’Indra s’est élevé avec puissance.

9. Au milieu de la joie des libations, ô Maghavan, Vyansa[1432] est venu percer tes mâchoires. En te sentant blesser, tu t’es redressé dans toute ta force, et tu as de ton arme brisé la tête du brigand.

10. Ainsi la Vache (du sacrifice) a enfanté le robuste et impétueux Indra, vaillant, généreux, incomparable. L’invincible nourrisson aspirait à marcher seul : sa mère lui a laissé sa liberté.

11. « Hélas ! » disait cette mère à ce héros, « mon enfant, tous ces dieux t’abandonnent. » Au moment de tuer Vritra, Indra s’écria : « Vichnou, tu es mon ami, tu peux poursuivre ta marche[1433]. »

12. Qui oserait prétendre à rendre ta mère veuve ? Qui concevrait la pensée de te tuer, soit endormi, soit éveillé ? Quel dieu te surpasserait dans le soin de faire notre bonheur, quand on te voit saisir par le pied ce père[1434] (de tous les Asouras), et lui donner la mort ?

13. Dans l’excès de la misère j’ai mangé de la chair de chien, et parmi les dieux je n’ai trouvé de protecteur (qu’Indra). J’ai vu ma femme humiliée. C’est (Indra) qui, (tel que) l’épervier, a daigné prendre le miel de mon sacrifice[1435].




LECTURE SIXIÈME.

HYMNE I.

À Indra, par Vamadéva.

(Mètre : Trichtoubh.)

1. Ô Indra, qui portes la foudre, tous les dieux protecteurs et dignes de nos hommages, le Ciel et la Terre t’invoquent en ce moment pour obtenir la mort de Vritra, toi (dieu) unique, grand, immense, magnifique.

2. Tu es pour les Dévas tel qu’(un jeune fils) pour des vieillards. Indra, sois un roi né au sein de la justice. Donne la mort à Ahi, qui emprisonne les ondes. Fends les nuages qui portent en leur sein l’abondance.

3. L’insatiable Ahi, lourd, ignorant, insensé, dormait près des sept torrents, dont il fermait la source. Ô Indra, tu l’as frappé de ta foudre au défaut de la jointure[1436].

4. Comme le vent par sa violence (trouble) l’eau, Indra par sa force a troublé l’air et la terre. Connaissant sa vigueur, il a brisé les corps les plus durs et abattu la tête des montagnes.

5. Tels que les femmes qui (courent) vers leur nourrisson, les Vents s’empressent vers toi, et vous marchez ensemble, pareils à des chars rapides. Tu as rempli les rivières, dompté les flots, lancé les ondes prisonnières.

6. En faveur du Vayya Tourvîti[1437] tu as donné à la grande terre l’abondance et la fertilité. L’onde a coulé (pour lui), ô Indra, et il a pu traverser les fleuves.

7. Indra a fait déborder le lit de cette rivière[1438] céleste, dont les ondes, jeunes et pieuses, doivent tomber (pour notre bonheur). Il a satisfait la soif de la terre altérée ; il nous a envoyé le lait des vaches (aériennes) qu’il a rendues fécondes.

8. En donnant la mort à Vritra, Indra a délivré les Ondes ; il a fait l’abondance des Aurores et la gloire des Automnes. Il a frappé les nuages amoncelés, et a ouvert la carrière des fleuves qui coulent sur la terre.

9. Ô (dieu) traîné par des coursiers azurés, pour tirer le fils d’Agroû[1439] de sa retraite, tu l’as fait dévorer par les fourmis. Malgré l’obscurité, Indra a vu Ahi ; il l’a saisi, et brisant (sur lui) le vase (qui contenait les fourmis), il est sorti. Les membres d’Ahi se sont contractés.

10. Sage et prudent monarque, le sage (Vâmadéva) a célébré tes antiques exploits ; (il a chanté) tes œuvres merveilleuses, telles que tu les accomplis pour ta gloire et pour le bonheur des hommes.

11. Ô Indra, par toi, que nos pères ont chanté et que nous chantons aussi, que (la maison) de ton serviteur soit remplie de biens, comme les rivières (sont remplies d’eau). (Dieu) traîné par des coursiers azurés, des rites nouveaux sont accomplis en ton honneur : nous t’avons fait des offrandes de toute espèce. Que la Prière devienne pour nous telle qu’un char (fortuné) !


HYMNE II.

À Indra, par Vamadéva.

(Mètre : Trichtoubh.)

1. Qu’Indra, de près ou de loin, entende nos vœux, et vienne à notre secours, ce roi terrible dont le bras est armé de la foudre, et qui, dans le combat, accompagné des puissants (Marouts), lutte avec force contre ses ennemis.

2. Qu’Indra vienne à nous avec ses coursiers ; qu’il s’approche pour nous protéger et nous combler de biens. Que le grand Maghavan avec sa foudre assiste à notre sacrifice, et nous livre la dépouille (de nos adversaires).

3. Indra, accepte nos hommages, et donne-nous la force. (Dieu) tonnant, puissions-nous, grâce à tes bienfaits, nous qui te chantons, de même que le chasseur (abat le gibier), gagner aussi avec toi la victoire !

4. Tu aimes, tu désires la Swadhâ ; approche-toi avec bienveillance de ces libations disposées par notre piété. Indra, bois de ce doux soma qu’on te présente. Prends plaisir à nos offrandes et à nos louanges.

5. Cet Indra, que nos Richis nouveaux célèbrent dans leurs chants tel que l’arbre chargé de fruits ou tel que le vainqueur pourvu de bonnes armes, (cet Indra) objet de tant d’hommages, je l’invoque avec la tendresse de l’époux pour son épouse.

6. Le grand et redoutable Indra s’élève au-dessus de tout, comme la montagne ; il semble né pour faire preuve de sa force. Que ce (dieu) formidable prenne sa foudre, source en même temps de terreurs et de biens, de même que le puits est le réservoir d’une eau abondante.

7. Aucun être au monde ne saurait t’arrêter ; aucun ne saurait détruire tes précieux bienfaits. (Dieu) fort et terrible, si souvent invoqué, et qui répands tes dons (sur la terre), accorde-nous la fortune.

8. Tu es le maître de l’opulence ; les hommes te doivent leur habitation. Tu as ouvert le pâturage où étaient retenues les vaches (célestes). Directeur dans la science (divine), tu portes aussi les armes dans les combats, et tu amènes avec toi une magnifique abondance de richesses.

9. La renommée dit avec quelle puissante sagesse ce grand (dieu) accomplit ses œuvres. Ennemi du mal, il comble de ses faveurs le serviteur qui chante sa gloire.

10. Ne nous afflige pas. Apporte-nous, donne au serviteur qui te présente ses offrandes, tous les biens qui dépendent de toi. Nous te louons, ô Indra, nous t’honorons par ces holocaustes nouveaux, par nos hymnes pieux.

11. Ô Indra, par toi que nos pères ont chanté et que nous chantons aussi, que (la maison) de ton serviteur soit remplie de biens, comme les rivières (sont remplies d’eau). (Dieu) traîné par des coursiers azurés, des rites nouveaux sont accomplis en ton honneur ; nous t’avons fait des offrandes de toute espèce. Que la Prière devienne pour nous telle qu’un char (fortuné) !


HYMNE III.

À Indra, par Vamadéva.

(Mètre : Trichtoubh.)

1. Qu’Indra vienne à notre secours. Que ce héros entende nos hymnes, et se rende à notre sacrifice. Qu’il brille comme le soleil, dans toute la plénitude de sa force, dans tout l’éclat de sa puissance invincible.

2. Chantez ici les exploits, (chantez aussi) les compagnons d’armes de ce (dieu) plein de gloire et de magnificence. Sa force puissante, secourable, victorieuse, règne sur les hommes qui l’honorent de leur culte.

3. Qu’Indra, accompagné des Marouts, vienne à notre secours du ciel ou de la terre, de l’air ou de l’onde ; qu’il (vienne) promptement, soit du séjour où brille le père de la lumière, soit des extrémités de l’horizon, soit du lieu où siége Rita.

4. Louons dans nos sacrifices cet Indra qui est le maître d’une opulence grande et solide ; qui par sa victoire nous donne tous les biens de la vie et introduit ses heureux serviteurs dans les plus fertiles pâturages.

5. Que le sacrificateur arrive, accumulant les offrandes et engendrant la Prière sainte ; riche en présents, par ses hommages et par ses hymnes qu’il appelle Indra dans nos demeures.

6. Quand, dans la maison d’un saint père de famille[1440], les (mortels), jaloux de l’honorer par la prière, s’assemblent autour du mortier (sacré) ; qu’alors le prêtre domestique[1441] du maître de maison arrive, et se charge, au milieu de nos périls, de porter (nos sacrifices).

7. La bénédiction est sur nous, quand le (dieu) magnifique, surnommé Bhârwara[1442], envoie sa force pour soutenir son serviteur ; quand, près du foyer sacré, dans la maison du père de famille, il préside, et donne le signal de la prière, du travail, de la joie.

8. Quand Indra ouvre les portes de la nue, il donne au lait céleste la rapidité du torrent. Si les (hommes) religieux lui apportent l’offrande, la maison se trouve pourvue de cerfs blancs[1443], et de gayals[1444].

9. Ô Indra, tes bras sont fortunés, tes mains bienfaisantes, apportant la richesse à celui qui te loue. Qu’attends-tu donc ? que tardes-tu à te livrer au plaisir de la libation, comme au bonheur de la bienfaisance ?

10. Indra est le maître équitable de l’opulence. Il a donné la mort à Vritra ; qu’il accorde la richesse au fils de Poûrou[1445]. (Dieu) si souvent invoqué, que ta force nous procure la fortune, et fais-nous jouir de ton secours divin.

11. Ô Indra, par toi que nos pères ont chanté et que nous chantons aussi, que (la maison) de ton serviteur soit remplie de biens, comme les rivières (sont remplies d’eau). (Dieu) traîné par des coursiers azurés, des rites nouveaux sont accomplis en ton honneur : nous t’avons fait des offrandes de toute espèce. Que la Prière devienne pour nous telle qu’un char (fortuné) !


HYMNE IV.

À Indra, par Vamadéva.

(Mètre : Trichtoubh.)

1. Si Indra aime et désire nos hommages, qu’il accepte ceux que nous lui offrons en ce jour. Le grand et robuste Maghavan, qui porte la foudre avec puissance, vient (et prend plaisir) à nos cérémonies, à nos éloges, à notre soma, à nos hymnes.

2. Le héros sage, terrible, généreux, lance avec son bras ses carreaux[1446] qui donnent la fertilité. En faveur de ses amis et pour leur fortune, il brûle la toison du nuage, et il en brise tous les nœuds[1447].

3. Le plus grand des dieux, il naît pour être le maître de la force et de l’abondance. Il porte dans ses bras sa foudre impatiente, et sa puissance fait trembler le ciel.

4. À la naissance de ce héros, les torrents et leurs rivages, le ciel et la terre ont frémi. Il soutient par sa vigueur les deux grands parents (du monde), et, en le suivant dans sa marche majestueuse, les vents ont applaudi.

5. Tu es grand, ô Indra ; tes actions sont grandes comme toi, et méritent d’être célébrées dans tous nos sacrifices. Héros sauveur et triomphant, de ta foudre victorieuse tu as avec force percé Ahi.

6. Toutes tes œuvres sont pleines d’équité et de puissance. Les vaches (célestes) ont ouvert leur mamelle féconde. Tu ne penses qu’à verser sur nous l’abondance, et, tremblantes devant toi, les Ondes se sont précipitées avec vitesse.

7. Ô Indra, ô (dieu) traîné par des coursiers azurés, ces sœurs divines ont célébré ta puissance, lorsque, enchaînées (par Vritra), elles se sont vues délivrées par toi, et ont pu fournir désormais leur longue carrière.

8. La plante du soma a été pilée dans le dessein de t’enivrer. Que cette piquante liqueur soit, avec nos éloges, comme la pointe d’un dard qui te stimule. Qu’elle soit comme le frein éclatant qui serve à diriger un (dieu) rapide et brillant.

9. (Dieu) puissant, augmente et consolide sans cesse notre force et notre vigueur. Frappe pour nous les ennemis qui méritent la mort. Brise le trait du mortel qui veut nous blesser.

10. Exauce-nous, ô Indra ; mesure-nous une abondance égale à nos désirs variés. Accomplis tous nos vœux, ô Maghavan, et souviens-toi de nous, toi qui peux donner tant de vaches.

11. Ô Indra, par toi que nos pères ont chanté et que nous chantons aussi, que (la maison) de ton serviteur soit remplie de biens, comme les rivières sont remplies d’eau. (Dieu) traîné par des coursiers azurés, des rites nouveaux sont accomplis en ton honneur ; nous t’avons fait des offrandes de toute espèce. Que la Prière devienne pour nous telle qu’un char (fortuné) !


HYMNE V.

À Indra, par Vamadéva.

(Mètre : Trichtoubh.)

1. Comment (Indra) peut-il augmenter la fortune de (l’homme) opulent ? Quel est le sacrificateur dont ce grand (dieu) ait aimé les cérémonies, dont il ait bu avec plaisir le soma, dont il ait agréé la demande, et qu’il ait récompensé par sa brillante munificence ?

2. Quel mortel a obtenu son amitié ? Qui a joui de ses faveurs ? Comment a-t-il fait sentir ses divers bienfaits ? Comment peut-il servir les intérêts d’un serviteur qui le chante, et accourir à son secours ?

3. Comment Indra entend-il (l’homme) qui l’invoque ? S’il l’entend, comment vient-il à son secours ? Quels sont ses antiques bienfaits ? Comment l’appelle-t-on le protecteur du chantre (qui le célèbre) ?

4. Comment (le mortel) accablé par ses ennemis, s’il chante ses louanges, peut-il recouvrer sa brillante fortune ? Comment le dieu aura-t-il la connaissance de mes hommages ? Et recevant mes offrandes, comment me témoignera-t-il son approbation ?

5. Comment et dans quel temps le dieu reconnaîtra-t-il l’amitié de l’homme (qui le vénère) au lever de cette Aurore ? Comment et dans quel temps fera-t-il éclater son attachement pour les amis qui ont placé en lui toutes leurs espérances ?

6. Qu’est-ce donc pour ses amis que cette victorieuse amitié ? Pouvons-nous nous vanter de t’avoir pour frère ? Toute la création constitue la forme d’Indra, voyageur (divin), (forme) riche et superbe, brillante et désirable comme le ciel le plus beau.

7. (Indra) a résolu de détruire la méchante Rakchasî[1448], qui méconnaît son empire, et pour la frapper il aiguise ses traits. Il aime la dette (de la reconnaissance), et ce (Dieu) terrible pousse vers nous les Aurores éloignées et inconnues, où les intérêts de cette dette doivent être payés.

8. Les libations de Rita éloignent le mal. L’œuvre de Rita tue le péché. L’hymne brillant de Rita éveille l’enfant d’Ayou, et vient ouvrir son oreille fermée.

9. Les formes de Rita sont belles, variées, fortes et durables. Avec Rita arrivent de nombreuses offrandes. Près de Rita, et à sa voix, accourent les vaches (brillantes)[1449].

10. Servez Rita ; honorez Rita. La splendeur de Rita est unie à la force et à l’abondance. À Rita sont soumis deux (êtres) forts, larges, profonds ; pour Rita deux vaches suprêmes donnent leur lait[1450].

11. Ô Indra, par toi que nos pères ont chanté, et que nous chantons aussi, que (la maison) de ton serviteur soit remplie de biens, comme les rivières (sont remplies d’eau). (Dieu) traîné par des coursiers azurés, des rites nouveaux sont accomplis en ton honneur ; nous t’avons fait des offrandes de toute espèce. Que la Prière devienne pour nous telle qu’un char (fortuné) !


HYMNE VI.

À Indra, par Vamadéva.

(Mètre : Trichtoubh.)

1. Quel hymne chanterons-nous pour nous attirer les bienfaits d’Indra, le fils de la Force ? Ô peuples, Indra est un (bon) pasteur ; c’est un héros qui donne à son chantre les biens de nos ennemis.

2. Pour obtenir la mort de Vritra, c’est lui qu’il faut invoquer, c’est lui qu’il faut honorer. Avec raison nous chantons cet Indra, équitable dans sa bienfaisance. Au moment du sacrifice, Maghavan répand ses bienfaits sur le mortel qui le sert par ses offrandes et ses libations.

3. Les guerriers l’invoquent dans le combat, (les prêtres) prennent des soins laborieux pour obtenir sa protection. Sacrificateurs et pères de famille, chacun s’empresse de venir à l’auteur de tout bien, et demande une heureuse postérité.

4. (Dieu) terrible, les hommes se réunissent pour accomplir l’œuvre (sainte), et se livrent à l’envi à de (pieux) travaux pour obtenir une onde (salutaire). Quand les nations se rassemblent pour le combat, il est un parti qui déploie une force digne d’Indra.

5. Cette force leur vient du sacrifice. Que l’offrande soit chauffée et macérée avec soin. Que le soma frappe de stérilité les vœux des impies, et réjouisse le généreux (Indra).

6. Indra aime le soma, et comble de ses biens celui qui lui en fait des libations. Il protége dans les combats, il considère comme un ami l’homme qui s’attache à lui avec dévouement.

7. Qu’un homme, en ce jour, verse, en l’honneur d’Indra, des libations de soma ; qu’il fasse cuire les gâteaux et griller les grains d’orge ; le dieu, accueillant les prières de son serviteur, lui accorde sa généreuse protection.

8. Si le belliqueux Arya prévoit l’approche de son ennemi, si le moment ; du combat est arrivé, que son épouse[1451], accompagnée de ceux qui versent le soma, donne des ordres pour que cette généreuse liqueur soit préparée.

9. Il est tel (mortel) qui, enchérissant sur le prix de sa marchandise, vient nous dire : « Je ne me trouve pas suffisamment payé. » Indra ne fait point de ces marchés frauduleux. Pauvres et riches, il nous traite tous avec bonne foi.

10. Qui veut pour dix vaches acheter cet Indra, qui est à moi ? Quand (le dieu) aura tué tes ennemis, je sais qu’il me reviendra toujours.

11. Ô Indra, par toi que nos pères ont chanté, et que nous chantons aussi, que (la maison) de ton serviteur soit remplie de biens, comme les rivières (sont remplies d’eau). (Dieu) traîné par des coursiers azurés, des rites nouveaux sont accomplis en ton honneur ; nous t’avons fait des offrandes de toute espèce. Que la Prière devienne pour nous telle qu’un char (fortuné) !


HYMNE VII.

À Indra, par Vamadéva.

(Mètre : Trichtoubh.)

1. Quel (homme), ami des mortels et serviteur des dieux, veut aujourd’hui solliciter l’amitié d’Indra ? Quel (homme), devant les feux d’Agni, la coupe de soma à la main, veut chanter les louanges d’un dieu protecteur et adorable ?

2. Quel (homme) offrant une prière respectueuse au (dieu) ami du soma, et s’unissant à lui par la pensée, veut obtenir les vaches (célestes) ? Qui désire s’attacher à Indra, et devenir l’ami, le frère, l’associé d’un (dieu) sage ?

3. Qui aujourd’hui se prépare l’assistance des dieux ? Qui célèbre les Adithyas, Aditi, l’astre lumineux ? De quel (mortel) les Aswins, Indra, Agni acceptent-ils volontiers les libations ?

4. Il verra Agni se charger de son holocauste et devenir son protecteur ; il verra longtemps le soleil se lever à l’orient, celui qui s’écrie : « Faisons des libations à Indra, le plus grand, le plus secourable des héros ! »

5. Un tel homme ne saurait succomber sous l’attaque de ses ennemis, quelque nombreux qu’ils soient. Aditi le couvrira de sa haute protection. Le favori d’Indra, c’est celui qui accomplit l’œuvre (sainte), qui s’unit à lui par la prière, qui suit avec constance la voie (du sacrifice), qui verse le soma.

6. Indra triomphe en héros pour l’homme qui mit avec constance la voie (du sacrifice), et qui verse la libation. Il lui accorde fidèlement le prix de ses travaux. Indra n’est ni le compagnon, ni l’ami, ni le parent de l’impie. Il donne la mort à celui qui n’a pour lui ni hymne ni sacrifice.

7. Indra, qui aime le soma, n’est point l’ami du riche, avare de libations. Il dépouille cet homme de sa fortune ; il cause sa ruine et sa mort. Il est (au contraire) tout dévoué à celui qui lui présente les libations et des offrandes.

8. Indra est invoqué par les grands, les petits, les hommes d’une classe intermédiaire ; par celui qui marche et celui qui se repose ; par celui qui garde sa maison et celui qui combat ; par tous ceux qui veulent l’abondance.


HYMNE VIII.

À Indra, par Vamadéva.

(Mètre : Trichtoubh.)

1. (Indra parle.) Je fus (jadis) Manou, et Soûrya[1452]. Je suis le sage Richi Cakchîvân[1453]. J’ai fait à ma ressemblance Coutsa, fils d’Ardjounî[1454]. Je suis le sage Ousanas[1455]. Voyez-moi.

2. J’ai donné la terre à l’Arya[1456], et la pluie au mortel qui me sert. J’ai amené les Ondes retentissantes. Les Dévas obéissent à ma pensée.

3. Dans le transport de ma douce ivresse, j’ai brisé d’un seul coup les quatre-vingt-dix-neuf[1457] villes de Sambara ; j’ai sauvé Atithigwa[1458] ainsi que Divodâsa au moment du sacrifice, (Divodâsa) digne d’avoir des centaines de villes[1459].

4. (Le poëte parle.) Tu es Marouta, et en cette qualité de voyageur ailé[1460], tu dois (aussi) l’emporter sur tous les oiseaux. Comme Syéna, ou épervier (céleste)[1461], tu dois l’emporter en vitesse sur tous les éperviers ; et l’on t’a vu, oiseau (rapide), quand la Swadhâ était privée du char (du Soleil), porter, pour plaire à Manou, l’holocauste que chérissent les dieux.

5. L’oiseau vient d’enlever (sa proie), et, tremblant[1462], il s’élève, aussi prompt que la pensée, par la voie large (des airs). Syéna (l’épervier) fuit avec le miel du soma qu’il a pris dans notre sacrifice.

6. Syéna (l’épervier), dans son vol droit et rapide, arrive d’une extrémité du ciel, tenant ce soma, source heureuse d’une (sainte) ivresse, et, encouragé par les Dévas, il le porte avec fermeté jusqu’à l’autre extrémité.

7. Syéna (l’épervier) a reçu et porté le soma au milieu de mille et mille sacrifices. Prudent et sage dans ses œuvres, enivré de ce soma, il a repoussé ses imprudents ennemis.


HYMNE IX.

À Indra, surnommé Syéna[1463], par Vamadéva.

(Mètres : Trichtoubh et Sakvarî.)

1. (Indra parle.) Je n’étais pas encore au jour ; mais je suivais avec attention la naissance successive de tous ces Dévas. Cent villes de fer me gardaient. J’en suis sorti avec rapidité ; me voici sous la forme de Syéna (l’épervier)[1464].

2. (Le poëte parle.) Le (dieu) ne m’a point laissé dans la peine (de l’attente). Il s’est montré avec splendeur et avec force. Par sa sagesse il a repoussé ses rapides ennemis ; par sa vitesse il a surpassé les vents.

3. Syéna (l’épervier) a du haut du ciel fait entendre sa voix ; le vol du sage (oiseau) a été reconnu, et l’archer Crisânou[1465], allant à lui par la pensée, lui a lancé une de ses flèches.

4. Syéna (l’épervier), dans sa course rapide, emportait le soma, comme Indra faisait de Bhoudjyou[1466], au-dessus des larges abîmes ; et l’aile du diligent oiseau traversait rapidement l’espace qui est (entre le ciel et la terre).

5. Que Maghavan, que l’héroïque Indra accepte ce vase plein d’une liqueur fortifiante, ces libations dans lesquelles est mêlé le lait blanc de la vache, ces offrandes brillantes ; qu’il prenne ce doux breuvage, et qu’il boive jusqu’à l’ivresse ; oui, qu’il boive jusqu’à l’ivresse.


HYMNE X.

À Indra et Soma, par Vamadéva.

(Mètre : Trichtoubh.)

1. Uni à toi, ô Soma, par une étroite amitié, Indra a fait couler les ondes en faveur de Manou. Il a frappé Ahi, déchaîné les sept torrents, ouvert les canaux fermés (par nos ennemis).

2. Uni à toi, Indra a brisé la roue de Soûrya[1467] ; car sa force est irrésistible. Mais en même temps cette roue qui est lancée dans l’espace, et sur qui repose la vie de tous, a été sauvée de la destruction.

3. Indra a combattu depuis le matin, depuis le milieu du jour ; de ses traits il a tué, (de ses feux), tel qu’Agni, il a brûlé des milliers de Dasyous, qui pensaient de leurs forts inaccessibles se faire une retraite inexpugnable.

4. Tu as donc, ô Indra, abattu ces vils Dasyous ; tu as soumis au joug ces tribus impies. (Ô Indra et Soma), détruisez, anéantissez vos ennemis ; tombant sous vos armes, qu’ils livrent leurs dépouilles (à vos serviteurs).

5. (Dieux) magnifiques et terribles, Indra et Soma, si par votre force vous parvenez à nous rendre ces vaches, ces chevaux, ces trésors, ces terres que nous retiennent (nos ennemis), ce sera de votre part une œuvre juste et louable.


HYMNE XI.

À Indra, par Vamadéva.

(Mètre : Trichtoubh.)

1. Viens à notre secours, Indra ; sois heureux de nos louanges et de nos offrandes, et arrive avec tes chevaux. Le père de famille a préparé pour toi de nombreuses libations, (pour toi) qui aimes nos chants et qui es juste dans tes bienfaits.

2. Il vient à notre sacrifice, (ce dieu) sage, qui connaît nos besoins, et que nous invoquons en versant la libation. Traîné par d’excellents coursiers, exempt de crainte, il partage avec les Marouts à la voix retentissante et nos louanges et nos breuvages enivrants.

3. (Ô poëte), rends attentives les oreilles d’Indra ; qu’il prenne des forces, qu’il se livre à la joie dans cette région (sublime) où il se plaît. Que nos libations le fassent grandir pour notre bonheur, et que de sa puissance nous tenions l’abondance et la sécurité.

4. Il vient vers le sage qui le célèbre et l’invoque en l’appelant à son secours ; et, la foudre à la main, (placé) sur le siége de son char, il dirige lui-même ses cent mille coursiers.

5. Ô magnifique Indra, puissions-nous, prêtres et pères de famille, pour prix de nos chants, devenir tes amis et obtenir tes secours ! Puissions-nous jouir d’une opulence brillante, glorieuse, abondante !


HYMNE XII.

À Indra, par Vamadéva.

(Mètres : Gâyatrî et Anouchtoubh.)

1. Personne n’est plus grand, n’est plus haut que toi, ô Indra, vainqueur de Vritra. Personne ne te ressemble.

2. Tous les hommes sont pour ainsi dire attelés à ton char. Avec raison on te proclame grand.

3. Ô courageux Indra, tu as eu même tous les dieux à combattre[1468], quand tu créais le Jour et la Nuit.

4. C’est alors qu’en faveur de tes (amis) malheureux tu as détaché une roue (du Soleil) ; qu’en faveur du valeureux Coutsa, tu as (frappé) Soûrya lui même[1469].

5. C’est alors que, seul, tu as lutté contre tous ces dieux ennemis. Ô Indra, tu as donné la mort aux plus nuisibles.

6. Oui, c’est alors qu’en faveur d’un mortel tu as frappé Soûrya, et par ta puissance protégé Étasa.

7. En effet, ô Maghavan, vainqueur de Vritra, tu es celui dont la colère est surtout redoutable. C’est toi qui, au sein des airs, as tué le fils de Danou[1470].

8. Ô Indra, il est de toi une action par-dessus tout virile. Une femme, la fille du Ciel, voulait malheureusement la mort ; tu la lui as donnée[1471].

9. Ô grand Indra, la fille du Ciel, l’Aurore se faisait grande. Tu l’as réduite en poudre.

10. L’Aurore tremblante, ainsi frappée par toi, (dieu) généreux, est tombée de son char réduit en poussière.

11. Et ce char tout brisé s’affaissa dans la Vipâsâ[1472], qui coule au loin (dans l’occident).

12. Ainsi tu as par ta puissance magique, ô Indra, arrêté une rivière débordée, la Vitasthânâ[1473].

13. Ainsi par ta valeur, tu as conquis les trésors de Souchna en brisant ses villes.

14. Ainsi tu as sous sa vaste montagne, ô Indra, écrasé Sambara, le plus illustre des Dasyous.

15. Ainsi tu as frappé les cent mille compagnons de Vartchin, rangés autour de lui comme les cinq rayons (autour d’une roue)[1474].

16. Ainsi Indra, (surnommé) Satacratou, a fait obtenir dans nos hymnes une place pour Parâvrikta, le fils d’Agroû[1475].

17. Ainsi l’époux de Satchî, le sage Indra, a transporté au delà d’une rivière Tourvasa et Yadou[1476], qui ne pouvaient la traverser.

18. Ainsi tu as sauvé sur les bords de la Sarayou ces deux nobles Aryas, et tu as donné la mort à Arna et à Tchitraratha[1477].

19. Ainsi tu as guéri, ô vainqueur de Vritra, deux malheureux, un aveugle et un boiteux. Une semblable faveur n’est accordée qu’à celui qui te loue.

20. En faveur de son serviteur Divodâsa, Indra a frappé cent villes formées d’une pierre merveilleuse[1478].

21. Pour protéger Dabhîti[1479], Indra, par son pouvoir magique, a percé de ses traits trente mille brigands.

22. C’est toi, ô vainqueur de Vritra, ô équitable Indra, qui es le maître des vaches (célestes), et qui fais mouvoir le monde.

23. Ô Indra, si tu as fait quelque action digne de toi, personne aujourd’hui n’oserait en détruire l’effet.

24. Ô (dieu) triomphant, qu’Aryaman, Poûchan, et Bhaga, que le dieu (surnommé) Caroulatî[1480], affermissent tous les biens qui viennent de toi.


HYMNE XIII.

À Indra, par Vamadéva.

(Mètre : Gâyatrî.)

1. Par quelle assistance, par quel acte de sagesse ce (dieu) toujours beau, toujours grand, nous témoignera-t-il son amitié ?

2. De quelle ivresse et sainte et glorieuse nos offrandes doivent-elles te pénétrer, pour te donner la force de briser la puissance (de nos ennemis) ?

3. Protecteur des amis qui chantent ta gloire, accorde-nous ton favorable appui.

4. Viens à nous, et que nos chants soient tels que des coursiers qui fassent rouler vers des mortels la roue de ton char.

5. Appuyé sur nos œuvres (pieuses), comme sur un pied solide, tu descends vers nous. Je t’honore avec le Soleil.

6. Ô Indra, quand nos prières s’élèvent vers toi, qu’elles soient ainsi qu’un char rapide pour toi et pour le Soleil.

7. Époux de Satchî[1481], on te célèbre comme magnifique, bienfaisant, entouré de splendeurs.

8. Tu combles sans cesse de tes faveurs celui qui te loue et t’offre des libations.

9. En vain tes ennemis insensés s’uniraient par centaines pour arrêter le cours de tes bienfaits ; ils ne pourraient contenir ta puissance.

10. Que tes cent, que tes mille renforts, que tous tes secours nous soient en aide.

11. Réserve-nous pour ton amitié, pour le bonheur, pour l’opulence brillante.

12. Chaque jour, ô Indra, accorde-nous l’appui de ta grande fortune, de ta (haute) puissance.

13. Que ton secours, toujours présent, soit comme (la flèche) de l’archer, qui brise (la porte) de ces pâturages où sont renfermées les vaches (célestes).

14. Que sous ta protection, ô Indra, notre char soit brillant et solide, accompagné d’une troupe nombreuse de chevaux et de vaches.

15. Ô Soleil, fais que notre gloire soit grande parmi les Dévas, étendue comme le ciel qui nous couvre.


HYMNE XIV.

À Indra, par Vamadéva.

(Mètre : Gâyatrî.)

1. Viens à nous promptement, ô vainqueur de Vritra ; approche-toi, grand Indra, avec tes nobles secours.

2. Actif et bienfaisant, tu sais suivant les besoins varier les ressources diverses de ton assistance.

3. Avec un petit nombre d’amis dévoués, tu t’avances vers le grand (ennemi), qui s’élance (pour t’attaquer), et ta force triomphe de lui.

4. Ô Indra, nous sommes à toi. Nous t’adressons nos hommages. C’est nous que tu dois sauver.

5. (Dieu) tonnant, viens à nous avec tes secours variés, sûrs et invincibles.

6. Ô Indra, nous sommes bien les amis d’un (dieu) tel que toi, riche en vaches excellentes, entouré d’une heureuse abondance.

7. Ô Indra, tu es le maître suprême de cette prospérité que donne la vache. Accorde-nous la richesse de la vie.

8. Eh ! qui peut s’opposer à tes volontés, ô Indra, quand, pour prix de leurs chants, tu veux combler tes serviteurs de tes dons ?

9. Ô Indra, les enfants de Gotama ont célébré tes louanges dans la vue d’obtenir l’abondance.

10. Nous chantons tes prouesses ; (nous disons) comment tu attaques et tu brises les villes des Dasyous.

11. Telles sont tes prouesses, ô sage Indra ; (tes serviteurs) les chantent, et versent des libations en ton honneur.

12. Ô Indra, les enfants de Gotama célèbrent tes louanges et reconnaissent ta grandeur. Donne-leur de la fortune et de la famille.

13. Tu es l’ami commun de tous les hommes, ô Indra ; c’est à ce titre que nous t’invoquons.

14. Ô Indra, toi, notre refuge, toi, passionné pour notre soma, viens vers nous, et enivre-toi de nos libations.

15. Que nos prières et nos louanges aillent jusqu’à toi, ô Indra. Dirige vers nous tes coursiers.

16. Consomme notre sacrifice. Aime nos voix, comme l’époux (aime la voix) d’une épouse bien-aimée.

17. Nous invoquons Indra, qui attelle à son char mille coursiers. (Voici pour lui) cent vases de soma.

18. Nous voulons et cent et mille de ces vaches qui t’appartiennent. Que tes bienfaits tombent au milieu de nous.

19. Nous te demandons dix vases remplis d’or. Ô vainqueur de Vritra, tu es si bienfaisant !

20. Tu es bienfaisant, ô Indra. Montre-nous ta générosité. Ne te borne pas à de minces bienfaits. Tu dois vouloir être libéral.

21. On célèbre partout ta bienfaisance, ô héros vainqueur de Vritra. Admets-nous au partage de tes richesses.

22. (Dieu) sage, (que nous regardons comme notre) enfant, je chante tes deux (coursiers) azurés. Ô toi, qui nous donnes les vaches (célestes), ne va pas les détruire avec tes (coursiers).

23. Tels que la marionnette sur le petit théâtre de bois nouvellement construit, tels brillent ces coursiers dans les voies (célestes).

24. Que j’aie un char traîné par des bœufs, ou que je marche à pied, (je souhaite) que ces généreux coursiers, dans leur voie (suprême), me soient en aide.




LECTURE SEPTIÈME.

HYMNE I.

Aux Ribhous, par Vamadéva.

(Mètre : Trichtoubh.)

1. J’envoie aux Ribhous[1482] mon hymne tel qu’un messager. J’invite la Vache (du sacrifice) à donner (en leur honneur) le lait de la libation. Rapides comme le vent, que (les Ribhous, habiles) ouvriers, s’élancent sans tarder dans la carrière céleste.

2. Que les Ribhous, embrassant le monde dans leurs œuvres éclatantes, achèvent de parer les deux (grands) parents ; qu’ils recherchent ensuite l’amitié des Dévas, et que dans leur sagesse ils apportent à l’homme pieux l’honneur et la prospérité.

3. Ce sont eux qui ont renouvelé la jeunesse de leurs deux ancêtres, faibles et desséchés comme deux poteaux. Que Vâdja, Vibhwan et Ribhou, aimés d’Indra, et fortifiés par le miel (du soma), soient les gardiens de notre sacrifice.

4. Toute l’année les Ribhous gardent la vache (sacrée)[1483] : toute l’année ils donnent à ses chairs un embonpoint nouveau ; toute l’année ils ont porté ses splendeurs ; et c’est par de telles œuvres qu’ils ont obtenu le titre d’Immortels.

5. L’aîné a dit : « Fais deux coupes. » Le second a dit à son tour : « Faisons-en trois. » Le plus jeune s’est écrié : « Fais-en quatre. » Ô Ribhous, Twachtri a approuvé votre parole.

6. « Bien, » ont dit les Ribhous, et ils ont fait ce qu’ils s’étaient proposé. Ils ont de cette manière accompli la Swadhâ. Twachtri, en voyant ces quatre coupes briller comme la lumière du jour, s’en est approché avec plaisir.

7. Cependant les Ribhous, durant douze jours, ont reçu l’hospitalité dans la demeure du (dieu) qui ne peut rester caché[1484]. (On pouvait les croire) endormis. Ils ont alors fertilisé la terre ; ils ont amené les Ondes ; (par eux) les plantes ont grandi dans les lieux desséchés, et les eaux ont rempli les vallées.

8. Les Ribhous ont formé le char (du sacrifice) qui roule heureusement, dirigé par le sage, et cette vache[1485] qui revêt toutes les formes et met tout en mouvement. Que ces utiles auxiliaires, que ces excellents ouvriers, doués d’une main fortunée, daignent nous préparer des trésors !

9. Ornés de leurs œuvres et des (fruits) de leur pensée, les dieux ont applaudi à leurs travaux. L’industrieux Vâdja s’est dévoué à tous les dieux, Ribhoukchas[1486] à Indra, Vibhwan à Varouna.

10. Les Ribhous, enivrés (du soma), ont créé pour Indra deux coursiers azurés, dociles au joug et chantés par la poésie. Ô Ribhous, donnez-nous l’éclat et tous les biens de l’opulence, et faites notre bonheur, comme (un ami fait le bonheur) de son ami.

11. Les Dévas ont en ce jour offert des libations et des breuvages enivrants à votre amitié, à la condition qu’elle ne se montrerait pas fatiguée. Ô Ribhous, dans ce troisième sacrifice, accordez-nous vos bienfaits.


HYMNE II.

Aux Ribhous, par Vamadéva.

(Mètre : Trichtoubh.)

1. Ô Ribhou, Vibhwan, Vâdja et Indra, venez à notre sacrifice, et (prenez votre part) dans nos offrandes. En ce moment la divine Prière vous présente la libation des jours (sacrés). Tous ces breuvages enivrants sont réunis pour vous.

2. (Naissez) à la vie, dont vous avez l’expérience. Des mets choisis vous sont présentés, ô Ribhous, et, de compagnie avec les Ritous, livrez-vous à la joie. Tous ces breuvages enivrants sont réunis pour vous, avec l’hymne (sacré). Envoyez-nous l’opulence, accompagnée d’une heureuse lignée.

3. Ce sacrifice, ô Ribhous, a été préparé pour vous, et vous l’avez reçu dans toute votre splendeur, tels qu’(autrefois) Manou. Devant vous se présente tout ce que vous pouvez aimer. Venez tous, ô vous que du nom de votre aîné (nous appelons) Vâdjas.

4. Et maintenant, généreux Ribhous, répandez vos bienfaits sur le mortel qui vous sert et vous honore. Buvez, ô Vâdjas, c’est pour vous, c’est pour votre plaisir que ce troisième sacrifice est célébré avec pompe.

5. Nobles Vâdjas, et toi, Ribhoukchas, venez à nous. Nous vous chantons pour votre munificence. Que les Libations, vers la fin des jours, aillent vers vous, comme les vaches vont à l’étable.

6. Enfants de la Force, appelés par nos hommages, venez à ce sacrifice. Compagnons d’Indra, et dispensateurs de la richesse, partagez ses plaisirs, et buvez de notre doux (soma).

7. Nous te louons, ô Indra ; viens avec Varouna, viens avec les Marouts te réjouir et boire de notre soma. Viens te réjouir (ici) avec les épouses (des dieux), admises, en premier lieu et dans les moments convenables, au partage de la libation, (avec ces épouses) qui possèdent de riches trésors.

8. Ô Ribhous, venez et partagez la joie de (nos sacrifices) avec les Adityas et les Parwatas[1487], avec le divin Savitri, avec les Ondes, qui possèdent (aussi) de riches trésors.

9. Les Ribhous ont donné leurs secours aux Aswins, et aux deux (grands) parents, et à la vache (qui était morte) : ils ont créé les deux chevaux (d’Indra), et formé des armures (pour les dieux) ; ils ont développé le Ciel et la Terre ; maîtres intelligents, ils se sont donné une belle postérité.

10. Ô Ribhous, vous possédez une opulence puissante en troupeaux, en denrées, en famille, en trésors ; vous puisez les premiers à la coupe joyeuse de nos libations. Accordez-nous vos bienfaits, à nous et à ceux qui vous chantent.

11. Ne vous éloignez pas. Nous voulons satisfaire votre soif dans ce sacrifice, ô généreux Ribhous. Ô Dévas, si vous désirez nos offrandes, nous vous invitons à vous livrer au plaisir avec Indra, avec les Marouts, avec nos brillants (protecteurs).


HYMNE III.

Aux Ribhous, par Vamadéva.

(Mètre : Trichtoubh.)

1. Ô Ribhous, fils de Soudhanwan, enfants de la Force, approchez ; ne vous éloignez pas. Dans ce sacrifice nous vous présentons nos offrandes. Que les breuvages qui réjouissent Indra viennent aussi faire votre bonheur.

2. Que les offrandes en l’honneur des Ribhous soient apportées. Que le soma soit versé dans les coupes. C’est vous qui, dans vos œuvres pieuses, dans vos heureux travaux, avez divisé en quatre parties la coupe unique (du sacrifice).

3. Vous avez divisé la coupe en quatre parties. « Ami, » avez-vous dit (à Agni), « fais cette distinction. » Ainsi, ô Vâdjas, ô Ribhous à la main industrieuse, vous êtes entrés dans la voie de l’immortalité, (vous avez obtenu) le rang de Dévas.

4. Quelle était donc la nature de cette coupe que votre sagesse a divisée en quatre parties ? Prenez ces libations qui inspirent la joie. Buvez, ô Ribhous, de ce doux soma.

5. Par votre adresse vous avez rendu la jeunesse aux deux (grands) parents. Par votre adresse vous avez fait une coupe qui devait servir aux dieux pour la libation. Par votre adresse vous avez formé les deux chevaux rapides qui traînent Indra, ô Ribhous honorés par des mets choisis.

6. Pour celui qui, vers la fin des jours, offre, pour votre plaisir, de nombreuses libations, dans les transports de votre joie, ô généreux Ribhous, formez une opulence forte et vigoureuse.

7. Ô Indra, traîné par des coursiers azurés, bois la libation du matin ; le sacrifice de midi est à toi tout entier. Bois (la libation du soir) avec les Ribhous, possesseurs de riches trésors et qui par leurs bonnes œuvres sont devenus tes amis.

8. Oui, par vos bonnes œuvres, vous vous êtes faits Dévas, et, tels que des éperviers, vous vous êtes placés dans le ciel. Fils de Soudhanwan, enfants de la Force, versez sur nous vos trésors, vous qui avez obtenu le titre d’Immortels.

9. Ô Ribhous à la main industrieuse, si par vos heureux travaux vous avez fait ce troisième sacrifice que nous accompagnons de riches offrandes, que ces libations soient pour vous. Buvez, et que tous vos sens se trouvent satisfaits.


HYMNE IV.

Aux Ribhous, par Vamadéva.

(Mètres : Trichtoubh et Djagatî.)

1. Il vient de naître, ce char magnifique qui, sans avoir besoin de rênes, ni de chevaux, roule sur ses trois roues[1488] au milieu des airs. Ô Ribhous, vous parez ainsi le ciel et la terre, et c’est là un grand témoignage de votre science divine.

2. C’est vous qui, dans vos sages méditations, avez fait ce char aux belles roues, incapable de s’éloigner de la route tracée. Ô Ribhous, (appelés aussi) Vâdjas, nous vous invitons aux libations de ce sacrifice.

3. Ô Ribhous, ô puissants Vâdjas, un titre noble et glorieux pour vous parmi les Dévas fut d’avoir rendu jeunes et vigoureux les deux (grands) parents vieux et infirmes.

4. Vous avez divisé une coupe unique en quatre parties ; vous avez par vos œuvres recouvert une vache d’une peau (nouvelle). Ce sont là vos titres de gloire ; c’est ainsi, ô Ribhous, ô Vâdjas, que vous avez obtenu parmi les Dévas le nom d’Immortels.

5. L’opulence la plus glorieuse, la plus abondante, est celle que donnent les Ribhous, celle que produisent les illustres Vâdjas. Elle devient un objet digne d’envie, elle mérite d’être célébrée dans les sacrifices, la (fortune)[1489] que forme Vibhwan et que vous protégez.

6. Il est fort et intrépide, il est sage et prudent, il est vaillant, (habile) archer et invincible dans les combats, il possède l’ornement de la richesse et les avantages d’une mâle famille, celui que protégent Vâdja et Vibhvan, celui que défendent les Ribhous.

7. Votre beauté s’est développée à nos yeux, et avec elle notre hymne. Ô Vâdjas, ô Ribhous, acceptez nos hommages. Vous êtes remplis de prudence, de sagesse, de science. C’est vous que nous invoquons dans ce sacrifice.

8. Écoutez nos prières ; vous savez quels sont les biens qui conviennent aux hommes. Ribhous, donnez-nous une riche et brillante opulence, une abondance forte et virile.

9. Accordez-nous de la famille et des richesses ; apportez-nous ici la gloire des héros. Donnez-nous, ô Ribhous, ces ressources fécondes et variées qui peuvent nous assurer sur tous les autres la supériorité.


HYMNE V.

Aux Ribhous, par Vamadéva.

(Mètres : Trichtoubh et Anouchtoubh.)

1. Ô divins Vâdjas, et toi, Ribhoukchas, venez à notre sacrifice par les voies que parcourent les dieux. Recevez le sacrifice offert par ces enfants de Manou, et dans votre reconnaissance donnez-nous des jours sereins.

2. Prenez à cœur ces sacrifices ; qu’ils plaisent aujourd’hui à votre âme : qu’ils se présentent formés (des libations) d’un beurre pur. Que ces liqueurs coulent abondamment pour vous, et qu’en vous charmant elles augmentent votre force et votre adresse.

3. Ô Vâdjas, ô Ribhouchchas[1490], (les offrandes) réservées aux dieux au moment du troisième sacrifice vous sont présentées, ainsi que l’hymne qui vous célèbre. Tel que Manou, je vous verse le soma, entouré du peuple et de ses chefs glorieux.

4. Fils (adoptifs) d’Indra, enfants de la Force, soyez robustes et bienfaisants : montés sur un char brillant, vous poussez de vigoureux coursiers, et votre face est dure comme le fer. Pour votre bonheur a été fondé ce dernier sacrifice.

5. Ô Ribhoukchas, nous vous demandons une opulence digne de vous, qui nous donne la force dans le combat et nous seconde (dans le péril), qui soit pleine de puissance et de générosité, et heureuse en bons coursiers.

6. Que le mortel que vous protégez, ô Ribhous, vous et Indra, soit distingué dans ses œuvres, libéral dans les sacrifices, fameux pour ses coursiers.

7. Ô Vâdjas, ô Ribhoukchas, enseignez-nous les voies du sacrifice. Sages honorés, (donnez-) nous la force d’être partout vainqueurs, de quelque côté du ciel (que vienne le mal)[1491].

8. Ô Ribhous, ô Ribhoukchas, et toi, ô Indra, et vous, (dieux) véridiques[1492], donnez-nous donc, à nous, (pauvres) mortels, des trésors, des chevaux et tout ce qui fait un homme magnifique.


HYMNE VI.

Au Soleil, appelé Dadhicrâs[1493], par Vamadéva.

(Mètre : Trichtoubh.)

1. Ô (Mitra et Varouna)[1494], parmi tous les dons que vous avez faits jadis à Trasadasyou[1495], et qu’il a légués aux enfants de Poûrou[1496], il en est un remarquable : c’est ce terrible (cheval), vigoureux[1497] vainqueur des Dasyous, et qui gagne (pour nous) des terres et des domaines.

2. Vous lui avez donné le cheval Dadhicrâs, auteur de tant de prouesses et gardien de tous les hommes, vif, rapide, impétueux, héros à la forme resplendissante, et, tel qu’un roi puissant, capable de déchirer ses ennemis.

3. Comme (l’eau descend) de la colline, tel il s’élance ; et tous les Poûrous le chantent et l’honorent. Il semble de ses pieds dévorer l’espace, héros aussi léger que le nuage, aussi rapide que le char, aussi prompt que le vent.

4. Dans les combats qu’il livre (contre les Dasyous) il se jette au plus épais de la mêlée, et disparaît au milieu des vaches (célestes)[1498]. Bientôt développant toute sa virilité, à la vue de nos sacrifices, il repousse nos ennemis et entoure (de sa protection) les œuvres d’Ayou[1499].

5. Ainsi, le voyant dans les batailles, les ennemis poussent un cri, comme à l’aspect du brigand qui dépouille (le voyageur), ou de l’épervier affamé qui s’abat sur un cadavre ou sur un troupeau.

6. Ainsi, dans l’ardeur d’attaquer cette (armée ennemie), il s’avance le premier à la tête des chars (de bataille). Paré de guirlandes, comme (un coursier) ami des peuples, il brille, battant la poussière et mordant son frein.

7. Ainsi, ce coursier fort et juste, au corps souple dans les combats, à l’attaque impétueuse contre les impétueux (Asouras), au pas rapide, forme un tourbillon de poussière qui s’élève au-dessus de son front orgueilleux.

8. Ainsi, ces assaillants terribles tremblent devant lui, comme si le ciel tonnait : il attaque mille ennemis à la fois, invincible, formidable et superbe.

9. Ainsi, les peuples célèbrent la force et la victoire de ce (coursier) rapide, qui remplit les vœux des mortels. Ainsi, c’est à lui que les combattants s’adressent : « Que Dadhicrâs arrive avec ses mille (compagnons) ! »

10. Dadhicrâs par sa puissance développe les cinq espèces d’êtres[1500], comme le soleil par ses rayons développe les ondes. Que ce coursier qui appointe avec lui et cent et mille présents, vienne à nous, et fasse tomber sur mes paroles le miel (de sa munificence).


HYMNE VII.

À Dadhicrâs, par Vamadéva.

(Mètres : Trichtoubh et Anouchtoubh.)

1. Louons le rapide Dadhicrâs. Honorons le Ciel et la Terre. Que les Aurores se lèvent pour me protéger ; et qu’elles me fassent éviter tous les maux.

2. Pieux serviteur, j’honore le grand Dadhicrâs, généreux, adorable, aussi brillant qu’Agni, sauveur dévoué que Mitra et Varouna ont donné aux enfants de Poûrou.

3. Qu’Aditi[1501] exempte de toute espèce de mal celui qui devant les feux d’Agni, au lever de l’Aurore, honore le coursier Dadhicrâs. Que celui-ci partage les joies de Mitra et de Varouna.

4. Si nous faisons en l’honneur du grand Dadhicrâs des libations et des offrandes, n’oublions pas aussi d’invoquer les Marouts. Demandons les bénédictions de Varouna, de Mitra, d’Agni, d’Indra dont le bras porte la foudre.

5. Avec un saint empressement les (hommes), prêtres et pères de famille, accourent au sacrifice et implorent (Dadhicrâs) à l’égal d’Indra. Mitra et Varouna, c’est vous qui nous avez donné ce coursier, bienfaiteur des mortels.

6. J’honore le coursier Dadhicrâs, robuste et vainqueur. Que nos bouches n’aient prononcé que des prières efficaces. Que nos jours soient heureusement prolongés !


HYMNE VIII.

À Dadhicrâs, par Vamadéva.

(Mètres : Trichtoubh et Djagatî.)

1. Honorons Dadhicrâs ; que toutes les Aurores me protégent. (Honorons) les Ondes, Agni, l’Aurore, le Soleil, Vrihaspati[1502] vainqueur, et fils d’Angiras.

2. Qu’il désire nos offrandes, ce coursier généreux, qui aime les combats, qui conquiert les vaches, qui se plaît dans nos pompes sacrées, et appelle vers nous l’abondance et les Aurores. Que Dadhicrâs, juste, prompt, impétueux, rapide, produise (pour nous) la fertilité, la force, le bonheur.

3. À la vivacité de ce Dadhicrâs, on dirait l’oiseau de proie qui frappe l’air de son aile empressée ; on dirait l’épervier qui plane dans le ciel. Tel est Dadhicrâs robuste et triomphant.

4. Ainsi, ce coursier poursuit sa carrière. Son col, son poitrail, sa bouche sont ornés de liens. Que Dadhicrâs achève son œuvre puissante, et qu’il s’élance dans les larges voies (du ciel).

5. (Dadhicrâs est l’être qu’on appelle) Hansa[1503], qui est notre soutien, et qui, siégeant au séjour de la lumière et dans l’air, siége encore, comme sacrificateur, dans le lieu saint, et, comme hôte, dans nos maisons ; qui, demeurant au milieu des hommes, s’établit à la meilleure des places, dans le sacrifice, sous la voûte céleste, né des ondes, des vaches (divines)[1504], de l’œuvre sainte, du mortier (sacré), enfin la Pureté même.


HYMNE IX.

À Indra et Varouna, par Vamadéva.

(Mètre : Trichtoubh.)

1. Ô Indra et Varouna, quel hymne, accompagné d’holocaustes, et tel (pour vous) que l’immortel sacrificateur, est capable d’obtenir votre faveur ? Ô Indra et Varouna, que cet hymne, parti de notre bouche et rempli de nos hommages et de nos prières, aille toucher votre cœur.

2. Ô dieux amis, Indra et Varouna, le mortel qui, pour obtenir votre bienveillance, vous a présenté ses offrandes, devient dans les combats le vainqueur de ses ennemis : il est renommé pour sa puissance.

3. Ô Indra et Varouna, vous répandez vos bienfaits sur les hommes qui vous louent ; vous répondez par votre amitié à l’amitié de ceux qui vous réjouissent par leurs libations et leurs offrandes.

4. Ô Indra et Varouna, (dieux) terribles, vous lancez la foudre lumineuse et puissante contre l’ennemi. Faites sentir votre force victorieuse à ce tyran superbe et cruel.

5. Ô Indra et Varouna, rendez notre prière féconde comme le taureau (féconde) la vache. Que cette Prière fasse couler sur nous son lait abondant, telle que sur le gazon une noble vache aux mille jets savoureux.

6. Ô Indra et Varouna, (dieux) brillants, donnez-nous des enfants et des petits-enfants, des terres, un éclat pareil à celui du soleil, une heureuse virilité. Venez ici à notre secours au moment de l’aurore.

7. Nous demandons les vaches (célestes), et nous réclamons votre antique secours, votre (constante) amitié, ô vous, amis fidèles et puissants, héros généreux et magnifiques : (soyez pour nous) comme deux pères.

8. Ô (dieux) bienfaisants, les Prières, dans leur ardeur de se joindre à vous, ont l’air de lutter entre elles pour vous prêter des forces. Nos Invocations et nos Chants viennent vers Indra et Varouna, comme les vaches (du sacrifice) vers le soma qui les embellit.

9. Oui, mes chants montent jusqu’à Indra et Varouna, et désirent leurs bienfaits. Tels (autour de leur seigneur) s’assemblent des serviteurs avides de richesses, de faibles femmes demandant leur nourriture.

10. Puissions-nous être possesseurs d’une opulence constante ! Puissions-nous avoir et des chevaux et des chars ! Que ces (dieux), dans leur course toujours propice, nous envoient des richesses et de (belles) montures !

11. Ô Indra et Varouna, soyez pour nous de généreux auxiliaires, et arrivez pour le combat qui nous promet d’abondantes dépouilles. Déjà les armes brillent dans cette mêlée. Puissions-nous recueillir les fruits de cette guerre !


HYMNE X.

À Indra et Varouna, par Trasadasyou[1505].

(Mètre : Trichtoubh.)

1. (Varouna[1506] parle.) Immortels, la royauté qui s’exerce sur nous tous se partage entre moi (et le dieu) Kchatriya[1507], auteur de toute existence. Les dieux coopèrent à l’œuvre de Varouna. Je suis le roi de mes collègues.

2. Je suis le roi Varouna ; en moi résident toutes les forces vitales. Les dieux coopèrent à l’œuvre de Varouna. Je suis le roi de mes collègues.

3. Je suis Indra et Varouna ; je suis ces deux mondes, grands, beaux, larges et profonds. Tel que Twachtri, j’ai dans ma sagesse donné le mouvement à toute la nature. J’ai soutenu le ciel et la terre.

4. J’ai répandu les eaux purifiantes ; j’ai placé l’être lumineux au foyer du sacrifice. Par le sacrifice (est né) le brillant fils d’Aditi, qui a développé les trois mondes.

5. Les chefs aux nobles coursiers et ardents aux combats, les guerriers, au milieu de la mêlée, m’invoquent. Je suis Maghavan, je suis Indra, je préside aux batailles, je soulève la poussière (de la plaine), doué d’une force victorieuse.

6. C’est moi qui ai fait cet univers. Personne ne peut résister à ma puissance divine et invincible. Quand je suis enivré du soma et (du bruit) des hymnes, les deux mondes, dans leur immensité, tremblent (devant moi).

7. (Le poëte répond.) Tous les mondes te connaissent. Ô sage Varouna, ce que tu dis de toi est vrai. On te célèbre comme vainqueur de tes ennemis ; (tu es) Indra, et tu as délivré les Ondes.

8. Après la mort du fils de Dourgaha[1508], nous avons eu pour pères les sept Richis. À l’épouse (de Pouroucoutsa) ils ont donné Trasadasyou, qui ressemble à Indra, et qui est vainqueur de Vritra et demi-dieu.

9. Ô Indra et Varouna, Pouroucoutsani[1509] vous a honorés par ses holocaustes et ses invocations. C’est ainsi qu’elle a obtenu de vous Trasadasyou, vainqueur de Vritra et demi-dieu.

10. En récompense de nos libations et de nos holocaustes, puissions-nous, heureux Dévas, jouir de la richesse, comme les vaches (jouissent) de l’herbe du pâturage ! Ô Indra et Varouna, écartez de nous (le mal), et donnez-nous chaque jour la vache (de l’abondance).


HYMNE XI.

Aux Aswins, par Pouroumilha et Djamilha, fils de Souhotra.

(Mètre : Trichtoubh.)

1. Quel dieu va nous entendre ? Parmi ces (protecteurs) dignes de nos sacrifices, quel est celui qui accueillera notre hymne ? En l’honneur de quelle (divinité) ferons-nous entendre cette sainte louange, qui va au cœur et qu’accompagne l’holocauste ?

2. Parmi les dieux quel est le mieux disposé à venir nous visiter ? Qui fera notre bonheur ? Quel est le plus fortuné ? Quel est ce char fameux et léger, traîné par de rapides coursiers, que la fille du Soleil[1510] a préféré ?

3. Au moment de l’aurore, vous venez vous unir aux Jours, comme Indra à la Puissance[1511]. (Êtres) divins, ailés, nés du Ciel, de quelle œuvre merveilleuse vous êtes chargés !

4. Quel éloge peut égaler votre mérite ? Ô Aswins ! par quelle prière vous inviterons-nous à venir ? Qui est capable de soutenir votre indignation ? Doux et nobles défenseurs, délivrez-nous.

5. Votre char couvre au loin le ciel, en roulant avec vous à travers l’océan (des airs). Que (nos prêtres) vous apportent leurs mets (consacrés) et leurs grains d’orge, et tâchent, ô doux (protecteurs), de mériter par le miel (de leurs libations) le miel (de vos bienfaits).

6. Que l’onde (des libations) arrose vos chevaux ; que ces coursiers ailés poursuivent avec splendeur leur carrière. Nous reconnaissons la présence de ce char rapide qui vous a rendus les maîtres de la fille du Soleil.

7. (Dieux) équitables et véridiques, si par mes sacrifices j’ai pu vous plaire, que notre prière devienne pour nous un trésor d’abondance ! Protégez votre chantre. Que notre désir arrive jusqu’à vous !


HYMNE XII.

Aux Aswins, par Pouroumilha et Djamilha.

(Mètre : Trichtoubh.)

1. Ô Aswins, nous voulons invoquer aujourd’hui votre char large et rapide, qui marche de concert avec la Vache (lumineuse) ; qui sur son banc (merveilleux) transporte la fille du Soleil ; (char) célébré dans nos hymnes, et chargé de biens et de richesses.

2. Divins Aswins, enfants du Ciel, ce sont les œuvres (saintes) qui vous donnent cette beauté. Les Offrandes embrassent votre forme, et les Hymnes vous placent sur votre char.

3. Qui va aujourd’hui vous honorer avec l’holocauste, et, demandant votre secours, vous convier par l’hymne (sacré) à boire le soma ? Qui, par ses invocations, appellera vos regards, ô Aswins, sur l’ancien ministre du sacrifice ?

4. Puissants et véridiques (Aswins), venez à nos cérémonies sur votre char d’or. Prenez le miel de notre soma, et versez vos bienfaits sur le peuple qui vous honore.

5. Oui, sur ce char d’or, (sur ce char) roulant venez à nous et du ciel et de la terre. Que d’autres, par leurs hommages, se gardent de vous prévenir. Ne sommes-nous pas vos plus anciens serviteurs ?

6. (Dieux) protecteurs, accordez-nous, à nous deux, une large opulence, soutenue par une forte famille. Ô Aswins, quand les Pouroumîlhas vous chantent, les Djamilhas chantent avec eux.

7. (Dieux) équitables et véridiques, si par mes sacrifices j’ai pu vous plaire, que notre prière devienne pour nous un trésor d’abondance ! Protégez votre chantre. Que notre désir arrive jusqu’à vous !


HYMNE XIII.

Aux Aswins, par Vamadéva.

(Mètres : Trichtoubh et Djagatî.)

1. L’astre lumineux se lève ; il s’attelle, le char[1512] qui roule autour du foyer où brille (Agni). Sur ce (char) sont placées les trois offrandes présentées au couple (divin) ; on y distingue aussi le quatrième vase des libations[1513].

2. Au lever de l’aurore, les Offrandes, aussi douces que le miel, s’élèvent rapides et légères ; leur vertu[1514] repousse les ténèbres qui les environnent, et projette au loin dans l’air des lueurs éclatantes.

3. Que votre bouche se plaise à goûter le miel de nos libations, et attelez votre char pour venir le prendre. (À votre tour) répandez aussi sur votre route, sur nos maisons, le miel dont vous portez vous-mêmes, ô Aswins, le vase agréable.

4. Avec vos coursiers aux ailes d’or, rapides, doux, innocents, s’éveillant avec l’aurore, humides de rosée, heureux (de notre soma) et disposés à faire des heureux, venez à nos sacrifices, comme les mouches (viennent chercher) le miel.

5. Ô bienfaisants Aswins, les Feux, avec leurs douces offrandes et leurs heureuses invocations, vous célèbrent le matin, (à cette heure) où, d’une main purifiée, sage et empressé, j’extrais du mortier le soma savoureux.

6. (Nos) rayons[1515], avec le jour, repoussent (les ténèbres), et projettent au loin dans l’air des lueurs éclatantes. Le Soleil attelle ses coursiers, et apparaît. (Ô Aswins), prenez la force de la Swadhâ, et suivez toutes les voies qui vous sont ouvertes.

7. Ô Aswins, dans mon hymne pieux j’ai célébré votre char immortel, qui, traîné par de superbes coursiers, vous transporte autour des mondes. Venez prendre nos holocaustes, et devenez nos sauveurs.


HYMNE XIV.

À Indra et Vayou, par Vamadéva.

(Mètre : Gâyatrî.)

1. Ô Vâyou, sois le premier dans nos saints jours à boire la douce libation. Tu mérites cette prérogative.

2. Appelé par nos innombrables désirs, attelle tes coursiers, ô Vâyou, assieds-toi sur le même char qu’Indra, et goûtez tous deux de notre soma.

3. Ô Indra et Vâyou, que vos mille coursiers vous amènent à nos mets (sacrés) et à nos libations de soma.

4. Ô Indra et Vâyou, montez sur ce char au siége d’or, qui touche le ciel et que célèbrent nos sacrifices.

5. Ô Indra et Vâyou, sur ce char large et solide approchez-vous de votre serviteur, et venez en ces lieux.

6. Ô Indra et Vâyou, ce soma (est prêt) ; (venez) dans la maison de votre serviteur vous réjouir avec les Dévas, et boire nos libations.

7. Ô Indra et Vâyou, dirigez-vous de ce côté, que vos (coursiers) soient lancés pour vous amener à nos libations de soma.


HYMNE XV.

À Indra et Vayou, par Vamadéva.

(Mètre : Anouchtoubh.)

1. Ô Vâyou, brillant (des feux du sacrifice), je te présente nos douces libations. (Sois) le premier (à les recevoir) dans ces saints jours. Ô dieu, nous te désirons ; attelle tes coursiers, et viens boire notre soma.

2. Ô Indra et Vâyou, vous méritez l’honneur de goûter de ces breuvages (sacrés). Ils coulent vers vous qui nous protégez, comme les ondes (coulent) vers la vallée.

3. Ô Indra et Vâyou, maîtres puissants de la Force, vous êtes portés sur le même char ; pressez vos coursiers pour venir à notre secours et à nos libations de soma.

4. Ô Indra et Vâyou, héros qui aimez à prendre votre part de nos sacrifices, donnez-nous, (donnez) à votre serviteur ces coursiers qui vous appartiennent, et qui font l’objet de tous les désirs.


HYMNE XVI.

À Vayou, par Vamadéva.

(Mètre : Anouchtoubh.)

1. Visite les sacrifices du père de famille, (sacrifices) nouveaux et riches en présents. Ô Vâyou, sur ton beau char, viens boire le soma.

2. Tu peux briser tes ennemis ; et, attelant tes coursiers, tu montes sur le même char qu’Indra. Ô Vâyou, sur ton beau char, viens boire le soma.

3. Les deux (corps) azurés qui contiennent tous les trésors et portent toutes les formes poursuivent leur carrière. Ô Vâyou, sur ton beau char, viens boire le soma.

4. Que tes quatre-vingt-dix-neuf coursiers[1516] aussi rapides que la pensée, t’amènent (ici). Ô Vâyou, sur ton beau char, viens boire le soma.

5. Ô Vâyou, attelle tes cent chevaux magnifiques. Ô Vâyou, sur ton beau char, viens boire le soma.

6. Ainsi, que ton char solide arrive avec tes mille présents. Ô Vâyou, sur ton beau char, viens boire le soma.


HYMNE XVII.

À Indra et Vrihaspati, par Vamadéva.

(Mètre : Gâyatrî.)

1. Ô Indra et Vrihaspati, dans votre bouche je place mon holocauste. En votre honneur (je chante) cet hymne et (verse) ce soma.

2. Ô Indra et Vrihaspati, pour vous je répands cette libation. Buvez, et que sa douceur vous enivre.

3. Ô Indra et Vrihaspati, vous aimez le soma ; venez ensemble dans ma maison boire celui que je vous offre.

4. Ô Indra et Vrihaspati, donnez-nous une opulence qui nous procure des centaines de vaches, des coursiers, des milliers de biens.

5. Ô Indra et Vrihaspati, nous avons versé le soma ; nous vous invitons par nos hymnes à venir le boire.

6. Ô Indra et Vrihaspati, buvez le soma dans la maison de votre serviteur. Venez en ces lieux, et livrez-vous à la joie.


HYMNE XVIII.

À Indra et Vrihaspati, par Vamadéva.

(Mètres : Trichtoubh et Djagatî.)

1. Vrihaspati a par sa force fixe les régions terrestres[1517] ; il siége avec bruit sur trois foyers ; sa langue caresse (nos libations) ; et ce sont les sages, brillant (des feux du sacrifice), les anciens Richis, qui l’ont élevé sur ce trône.

2. Ô Vrihaspati, (les prêtres) qui nous dirigent et qui, par le sacrifice, réjouissent ton cœur, ont la force de dissiper (nos ennemis). Ô Vrihaspati, garde le foyer de ce (père de famille), (foyer) large, inviolable, d’où par un chemin sinueux s’élance Agni[1518], et où abondent les offrandes.

3. Ô Vrihaspati, que ces (dieux) qui aiment le sacrifice viennent s’asseoir (ici) de la (région) élevée et lointaine (où ils demeurent). En ton honneur coulent ces flots abondants d’un jus savoureux et extrait du mortier, en même temps que l’hymne résonne.

4. Vrihaspati naît d’abord dans le noble berceau du grand être lumineux. Doué de sept bouches[1519], il a des existences variées ; et, brillant de sept rayons, il triomphe avec bruit des ténèbres.

5. Vrihaspati, resplendissant et excité par le chant des hymnes, frappe avec un frémissement sonore Bala, qui retient le nuage fécond. Il crie, et délivre ces vaches qui le désirent et fournissent à nos holocaustes.

6. Ainsi, par nos sacrifices, nos invocations, nos offrandes, honorons l’être bienfaisant qui est notre père et qui renferme en lui tous les dieux. Ô Vrihaspati, puissions-nous avoir une belle lignée, une forte famille ! Puissions-nous être maîtres de la richesse !

7. Il est sûr, par sa force et sa puissance, de l’emporter sur tous ses ennemis, le roi qui soutient (par ses offrandes) le (dieu) capable de tout soutenir, qui l’honore et le célèbre avant tous.

8. Il demeure bien établi dans sa maison, il voit Ilâ[1520] lui prodiguer toute espèce de biens, et son peuple obéir à ses commandements, le roi qui préfère à tous le (dieu) sacrificateur[1521].

9. Il est invincible, il réunit en sa personne les biens de ses ennemis et ceux de sa nation, le roi qui consacre sa richesse pour le (dieu) sacrificateur et disposé à nous secourir. Tous les Dévas le conservent.

10. Ô Indra et Vrihaspati, buvez notre soma ; source de tout bien, réjouissez-vous dans notre sacrifice. Que nos heureuses libations vous pénètrent. Accordez-nous une opulence que soutienne toute espèce de force.

11. Ô Indra et Vrihaspati, faites notre bonheur. Que votre bienveillance nous accompagne. Exaucez nos prières. Donnez l’éveil à nos hymnes. Détruisez les ennemis du père de famille et de vos serviteurs.





LECTURE HUITIÈME.

HYMNE I.

À l’Aurore, par Vamadéva.

(Mètre : Trichtoubh.)

1. Qu’à l’orient le grand astre, plein de lumière et de beauté, sorte du sein des ténèbres. Que les Aurores, brillantes filles du Ciel, fassent lever le genre (humain).

2. Que les magnifiques Aurores apparaissent à l’orient, comme les poteaux (sacrés) dans nos cérémonies. Pures et resplendissantes, qu’elles ouvrent, à leur lever, les portes du pâturage ténébreux.

3. Que les riches Aurores, en se levant aujourd’hui, éclairent les hommes pieux dans l’œuvre de leur libéralité (religieuse). Que les avares dorment, sans être éveillés, au sein des obscures ténèbres.

4. Divines et opulentes Aurores, puisse aujourd’hui vous satisfaire cet hymne perpétuel, ou le char (du sacrifice que nous attelons) pour vous, et sur lequel vous brillez avec éclat par les soins des Angiras aux sept bouches, (surnommés) Dasagwas et Navagwas[1522] !

5. Avec vos coursiers, amis de nos sacrifices, vous parcourez rapidement les mondes, ô divines Aurores, éveillant pour le mouvement les bipèdes et les quadrupèdes endormis.

6. Qu’est devenue l’Aurore antique qui a reçu la première l’hommage des Ribhous ? Dans leur cours brillant et fortuné, les Aurores ne sauraient être distinguées.

7. Oui, sans doute, il fut jadis d’heureuses Aurores, fécondes en bienfaits et justement honorées par le sacrifice, dans lesquelles le pieux sacrificateur a reçu le prix de ses chants, de ses hymnes, de ses louanges.

8. Les Aurores accourent de l’orient toujours semblables à elles-mêmes, toujours répandant les mêmes biens, toujours célébrées comme les divines messagères du sacrifice et de l’assemblée (pieuse), comme les guides qui amènent les vaches (célestes)[1523].

9. Elles vont donc, ces Aurores toujours pareilles, toujours ornées des mêmes couleurs, pures, vives, éclatantes et de leurs corps brillants voilant la noire immensité.

10. Lumineuses et divines filles du Ciel, donnez-nous une opulence accompagnée d’une heureuse famille. Éveillés par vous, que votre bienveillance nous rende les maîtres d’une forte puissance.

11. Filles du Ciel, brillantes Aurores, voilà les vœux que je vous adresse, moi, le héraut du sacrifice. Puissions-nous être glorieux au milieu des nations ! Que le Ciel, que la Terre divine nous accordent cette grâce !


HYMNE II.

À l’Aurore, par Vamadéva.

(Mètre : Trichtoubh.)

1. Guide fortuné et mère (féconde), la fille du Ciel se lève et apparaît à la place de sa sœur.

2. Belle, juste, brillante, l’Aurore (s’élance) telle qu’une cavale ; elle est la mère des vaches (célestes), et l’amie des Aswins.

3. Oui, tu es l’amie des Aswins. Oui, tu es la mère des vaches (célestes). Oui, Aurore, tu règnes sur la richesse.

4. Tu aimes les hymnes, et par nos chants nous t’éveillons pour avoir un appui contre nos ennemis.

5. Tes splendeurs fortunées apparaissent, et nous amènent les vaches (célestes). L’Aurore a rempli (le ciel) d’une vaste lumière.

6. Ô brillante Aurore, de tes voiles lumineux tu as couvert les ténèbres. Accepte notre offrande.

7. Ô Aurore, tu étends tes rayons sur le ciel. (Tu sèmes) dans les espaces de l’air où tu règnes tes lueurs étincelantes.


HYMNE III.

À Savitri, par Vamadéva.

(Mètre : Djagatî.)

1. Nous consacrons ce noble hommage au divin et sage Savitri, qui donne la vie[1524]. Que ce grand dieu, avec les rayons du jour[1525], nous accorde la protection dont il daigne honorer son serviteur.

2. Savitri est le soutien du Ciel, et le père du monde ; dans sa sagesse, il revêt sa cuirasse d’or ; il étend, il répand (ses rayons), et sa haute prudence enfante et propage le bonheur, que célèbrent nos chants.

3. Le divin Savitri remplit les mondes divins et les mondes terrestres ; il glorifie lui-même son œuvre. Il étend ses bras[1526] pour embrasser la nature ; il la pénètre, il la féconde de ses rayons.

4. Le divin Savitri, invincible et resplendissant, surveille les œuvres de ses créatures. Il tend ses bras vers les êtres qui couvrent le monde, et, ferme dans ses desseins, il est roi de ce vaste univers. »

5. Savitri a partagé l’air en trois mondes brillants[1527], qu’il entoure de sa grandeur ; il a étendu trois cieux, trois terres, et triple est l’œuvre par laquelle il nous prouve sa puissance.

6. Savitri est l’auteur et le maître de tous les êtres, animés et inanimés. Que ce dieu nous accorde sa triple protection, qui nous délivre du mal !

7. Qu’il vienne, le divin Savitri, avec les Ritous ; qu’il augmente notre maison ; qu’il nous donne avec l’abondance une heureuse lignée. Qu’il nous défende nuit et jour. Qu’il nous accorde une opulence fondée sur une nombreuse famille.


HYMNE IV.

À Savitri, par Vamadéva.

(Mètre : Trichtoubh.)

1. En ce moment du jour apparaît le divin Savitri, digne de nos hommages, digne de nos prières. (Invoquons) celui qui est le bienfaiteur des hommes, pour qu’il daigne nous ouvrir ses trésors.

2. En premier lieu, tu accordes aux Dévas, qu’honorent avec raison nos sacrifices, la plus belle des parts, l’immortalité. Mais, ô Savitri, tu sais aussi, pour plaire à ton serviteur, répandre sur la race humaine les biens qui lui sont nécessaires.

3. Si par notre ignorance, par la pauvreté de nos offrandes, par un orgueil naturel à l’homme, nous avons commis quelque faute contre la race divine, ô Savitri, devant les Dévas et les hommes, montre ici que nous sommes sans péché.

4. Que l’œuvre du divin Savitri, par laquelle il soutient tout le monde, n’éprouve aucune atteinte. Nous ne pouvons que louer la bonté de tout ce que fait (ce dieu) aux longs bras et sur cette large terre et dans le ciel immense.

5. Ô Savitri, tu produis toutes ces demeures (qui s’étendent) au-dessus de ces vastes nuages, ces mondes dont le plus élevé est celui d’Indra. Comme ils ont marché, ils s’arrêtent aussi à la volonté de leur créateur.

6. Trois fois par jour, ô Savitri, des libations ont lieu en ton honneur, et sont (pour les mortels) une source constante de bonheur. Qu’Indra, le Ciel et la Terre, la Mer avec les Ondes, Aditi avec les Adityas, nous accordent leur protection.


HYMNE V.

Aux Viswadévas, par Vamadéva.

(Mètres : Trichtoubh et Gâyatrî.)

1. Ô Vasous, qui de vous est notre sauveur, notre défenseur ? Ciel et Terre, Aditi, Varouna, Mitra, protégez-nous contre un mortel trop puissant. Ô Dieux, qui d’entre vous nous donnera dans le sacrifice les biens que nous demandons ?

2. Ô Que ces (dieux) qui illuminent les demeures orientales quand ils se lèvent, sages et sauveurs, reçoivent (nos présents), disposés à nous soutenir ; et immortels, équitables, qu’ils brillent avec éclat.

3. Je chante la grande Aditi, la Mer, la divine Swasti[1528] : qu’elles nous soient favorables. Aurore et Soir, Nuit et Jour, soyez à l’abri de tout danger et conservez-nous.

4. Qu’Aryaman, que Varouna connaisse la voie (de notre sacrifice) ; qu’Agni, maître de l’offrande (sainte), suive une route convenable. Ô Indra et Vichnou, célébrés par nos hymnes, accordez-nous une protection pleine de force ; (donnez-nous) le bonheur et la puissance.

5. J’invoque les secours de Parwata, des Marouts, de Bhaga, sauveur divin. Que le maître du mal[1529] (Varouna) nous délivre des dangers dont nous menacent nos semblables, et Mitra, des dangers que nous font courir nos amis.

6. Chantez le Ciel et la Terre avec Ahirboudhnya[1530] ; (chantez) ces deux divinités avec les (dieux) amis qui amènent les eaux[1531]. Jaloux de répandre leurs bienfaits, que ceux-ci, brillants et sonores, délivrent les rivières qui semblent pressées de courir à la mer.

7. Que la divine Aditi nous protége avec les Dieux. Qu’(Indra), dieu sauveur et vigilant, nous conserve. Nous ne pouvons dignement honorer ni Mitra, ni Varouna, ni Agni.

8. Agni est le maître de l’opulence, Agni (est le maître) du bonheur. Qu’il nous les donne en présent.

9. Aurore, bonne, riche et féconde, apporte-nous de nombreux trésors.

10. Que Savitri, Bhaga, Varouna, Mitra, Aryaman, Indra, viennent heureusement vers nous avec leurs richesses.


HYMNE VI.

Au Ciel et à la Terre, par Vamadéva.

(Mètres : Trichtoubh et Gâyatrî.)

1. Ô Ciel et Terre, (dieux) grands et bons, brillez au bruit de nos hymnes pieux, au moment où (Pardjanya), couvrant votre large surface, mêle ses mugissements au son des vents qui le poussent.

2. Dieux cléments et féconds, bons et justes, pères des dieux et dignes avec eux de nos sacrifices, directeurs de nos saintes cérémonies, arrêtez-vous ici au bruit de nos hymnes pieux.

3. Ce fut sans doute un excellent ouvrier celui qui, au milieu des mondes, a engendré le Ciel et la Terre, larges, beaux, brillants et profonds, uniques dans leur espèce[1532], et qui, dans sa puissante sagesse, leur a donné un mouvement commun.

4. Ô Ciel et Terre, je vous invite à partager notre joie[1533] et à venir prendre ces mets et ces offrandes que consacrent les épouses (des dieux)[1534]. Larges, étendus, adorables, protégez-nous. Que la Prière devienne pour vos serviteurs comme un char favorable.

5. Ô Ciel et Terre, nous vous apportons notre tribut d’hymnes et d’heureuses invocations.

6. Vous déployez à l’envi l’un de l’autre la force de votre corps pur et brillant, et vous méritez sans cesse votre part dans nos sacrifices.

7. Grands (dieux), vous accomplissez, vous réalisez, vous comblez les vœux de celui qui est votre ami. Venez vous asseoir à notre sacrifice.


HYMNE VII.

À divers dieux, par Vamadéva.

(Mètres : Anouchtoubh, Trichtoubh et Poura-Ouchnih.)

1. Avec le maître de la plaine[1535] pour ami, nous sommes sûrs de la victoire. Il donne à celui qui nous ressemble et vache, et cheval, et délices de tout genre.

2. Ô maître de la plaine, envoie-nous les eaux aussi douces que le miel, comme la vache nous cède son lait. Que les maîtres de la pureté[1536] nous donnent des ondes non moins pures que le beurre qui tombe en flots de miel.

3. Que les plantes, que les cieux, les ondes, l’air, soient pour nous aussi suaves que le miel.

Que le maître de la plaine ait pour nous la douceur du miel. Honorons-le avec innocence de cœur.

4. Que le bonheur soit sur nos animaux, sur nos hommes, sur nos charrues. Que nos rênes flottent avec bonheur ; qu’avec bonheur pique notre aiguillon.

5. Ô (dieux appelés) Souna et Sîra[1537], aimez nos prières, et versez sur elles ce lait que vous formez dans le ciel.

6. Approche-toi, ô (Terre) fortunée, (surnommée) Sîtâ[1538]. Nous t’honorons, pour que tu nous sois propice et fructueuse.

7. Qu’Indra féconde Sîtâ ; que Poûchan la décore. Que Sîtâ nous prodigue son lait pendant de longues années.

8. Qu’avec bonheur les socs labourent pour nous la terre ; qu’avec bonheur nos pasteurs conduisent les animaux. Qu’avec bonheur Pardjanya répande sur nous son miel ; qu’avec bonheur Souna et Sîra nous arrosent de leur lait.


HYMNE VIII.

À Agni, surnommé Ghrita, par Vamadéva.

(Mètres : Djagati et Trichtoubh.)

1. Un flot aussi doux que le miel sort du vase (des libations)[1539], et vient avec Soma remplir la fonction d’Amrita[1540]. Le titre mystérieux de Ghrita, c’est d’être la langue des dieux et le réservoir de l’ambroisie.

2. Proclamons la gloire de Ghrita, et dans notre sacrifice retenons-le par nos holocaustes. Que le (dieu) prêtre[1541] nous entende, et, pareil à un cerf blanc[1542] à quatre cornes[1543], produise l’œuvre (sainte).

3. Oui, il a quatre cornes, trois pieds[1544], deux cols[1545] et sept bras[1546]. Le dieu, comme un taureau attaché par trois liens[1547], mugit et apparaît aux mortels.

4. Ghrita a trois formes[1548], et caché par les Panis[1549], les Dévas l’ont retrouvé dans la vache (céleste). Indra a produit l’une de ces formes, Soûrya l’autre. L’ami (des hommes, Vâyou)[1550], a donné la troisième aux (Dévas), qui en ont fait la Swadhâ.

5. Les (Ondes) sortent du vase profond (des libations) ; leur foule est immense, et l’œil de Vritra lui-même ne saurait les distinguer. Je les vois, ces Ondes de Ghrita ; au milieu d’elles brille Vétasa[1551] aux rayons d’or.

6. Purifiées par la Prière et l’Adoration, ces Ondes coulent ainsi que des torrents. Ces Ondes de Ghrita sont aussi légères que la bête qui fuit devant le chasseur.

7. Les fleuves coulent rapidement vers la mer, non moins prompts que le Vent : ainsi vont les Ondes de Ghrita. Et lui, grossissant de leurs flots, fend les airs[1552] ainsi qu’un superbe coursier.

8. Telles que de charmantes épouses, comme si elles n’avaient qu’un cœur, les Ondes de Ghrita s’approchent en riant d’Agni et l’enflamment. Et le (dieu) possesseur de tous les biens les accueille avec amour.

9. Je les vois, ainsi que des vierges qui vont vers leur époux, se parer de tous les ornements. Dans le lieu où se font les libations du soma, où s’accomplit le sacrifice, là sont présentes les Ondes de Ghrita.

10. Venez vers l’endroit où se distribuent la louange et le beurre de la libation. Donnez-nous vos précieux trésors. Ô déesses[1553], dirigez notre sacrifice. Les Ondes de Ghrita sont ici présentes, aussi douces que le miel.

11. Le monde entier existe par toi. Le flot suave de tes splendeurs coule au vase des libations[1554], dans le cœur (de l’homme), dans toute la vie, dans les ondes (célestes) comme dans le foyer (solaire). Puissions-nous en jouir pleinement !


HYMNE IX[1555].

À Agni, par Boudha et Gavichthira, fils d’Atri.

(Mètre : Trichtoubh.)

1. Agni s’est éveillé au foyer qu’allument les hommes et à l’arrivée de l’Aurore, qui est la vache (bienfaisante du ciel). Tels que les branches qui s’étendent (sur l’arbre), les grands Rayons se répandent dans les airs.

2. Oui, Agni le sacrificateur s’est éveillé pour honorer les dieux ; il se dresse, et se présente le matin avec bonté. Ses feux s’allument, il brille, et sa force se développe à nos yeux. Le grand dieu se débarrasse des ténèbres.

3. Quand Agni vient comme s’enchaîner au milieu de nos cérémonies[1556], il revêt toute la splendeur de ces (rayons, qui sont) les vaches (du sacrifice). En même temps l’Aurore, avide de nos libations, attelle ses coursiers. (Agni) se lève devant elle, et lui porte la liqueur onctueuse que versent les coupes.

4. Les âmes des fidèles se portent vers Agni, comme les yeux vers le Soleil. Il est enfanté par l’Aurore et le Soir[1557] tous deux de couleur différente. Cependant au début des jours naît (celui que l’on appelle) le cheval blanc[1558].

5. Oui, au début des jours il naît, ce (dieu) doux et brillant ; il resplendit sur le bûcher qui l’a reçu. Agni, sacrificateur adorable, siége dans toutes les maisons, orné de sept rayons précieux.

6. Oui, Agni, sacrificateur adorable, siége au sein de sa mère[1559] sur un trône fortuné ; jeune, sage, juste, soutien (des êtres), il se plaît dans plus d’une demeure ; mais il brille (en ce moment) au milieu des hommes.

7. Agni, sage et bon, préside à nos sacrifices, et nous l’honorons lui-même par nos invocations. Par la vertu de l’holocauste, il a étendu le ciel et la terre ; et (les hommes) lui adressent le perpétuel hommage de leurs offrandes et de leurs libations.

8. Digne d’être honoré, il reçoit nos libations, dans sa propre demeure, sous le nom de Damoûnas[1560] : célébré par les poëtes, heureux hôte pour les mortels. Généreux et brillant Agni, nous te reconnaissons mille têtes, et par ta force tu surpasses tous les êtres.

9. Ô Agni, tu visites sans doute les autres (sacrifices) ; mais il n’en est aucun qui doive être pour toi plus agréable (que le nôtre, sacrifice) où l’hôte chéri de la race humaine nous apparaît beau, éclatant, adorable.

10. Ô Agni toujours jeune, les hommes, de loin comme de près, t’apportent leur offrande. Écoute la prière de celui qui t’invoque avec ardeur. Ô Agni, ta protection est grande, étendue, fortunée.

11. Brillant Agni, avec les (autres dieux) que nous honorons, monte aujourd’hui sur ton char large et resplendissant, et, dans ta sagesse, amène ici ces dieux par le vaste chemin de l’air, pour qu’ils goûtent à notre holocauste.

12. Faisons une invocation en l’honneur d’un (dieu) sage, fort, généreux et digne de nos hommages. De même que le Soleil éclaire le ciel, cet hymne respectueux de Gavichthira glorifie Agni.


HYMNE X.

À Agni, par Coumara, fils de Djara, et Vrisa.

(Mètres : Trichtoubh et Sakwarî.)

1. La jeune mère porte l’enfant royal[1561], mystérieusement caché dans son sein, et refuse de le remettre au père (du sacrifice). Les peuples ne voient plus la forme (du dieu), qui semble mort, et placé dans le lieu où il n’y a plus de plaisir.

2. « Ô jeune (mère), pour quel motif as-tu la malice de soustraire ainsi cet enfant royal ? » Et la reine alors a enfanté. Il a fallu de larges libations[1562] pour que ce germe grossît. Je l’ai vu à sa naissance, au moment où sa mère le mettait au monde.

3. Oui, ici près, j’ai vu (ce dieu) à l’aigrette d’or, aux couleurs brillantes ; (je l’ai vu) essayer ses traits. Et moi, j’ai répandu sur lui l’onction immortelle. Que peuvent contre moi les hommes qui ne connaissent ni Indra ni l’hymne (saint) ?

4. Je l’ai vu sortir de son asile secret, et bientôt s’environner de rayons, comme (un pasteur s’environne) de son riche troupeau. On ne lui avait pas ravi ses flammes. (Le dieu) vient de renaître ; les vieilles flammes ont rajeuni.

5. « Qui donc, pendant que j’étais mortel, a enlevé ces vaches[1563], qui se sont trouvées sans pasteur ? Que ceux qui les ont prises me les rendent. Que tout homme sage s’approche de mon troupeau. »

6. Des ennemis avaient rejeté au rang des mortels celui qui est le roi des êtres et l’espoir des nations. Que les prières d’Atri[1564] le délivrent. Que ses calomniateurs soient confondus.

7. Sounahsépa[1565] était attaché à mille poteaux. Tu l’as délivré, et il t’a chanté ; fais de même pour nous, ô Agni, ô sage sacrificateur, brise nos liens, et viens ici t’asseoir.

8. Tu peux être irrité ; mais reviens à ma prière. Si je m’adresse à toi, c’est par l’ordre du sage Indra, gardien des œuvres divines. Il t’a vu ; il me l’a dit, et je viens à toi, ô Agni.

9. Agni s’entoure d’une grande lumière, et par sa grandeur il a tout éclairé. Il dissipe la magie des impies qui suivent une mauvaise voie. Il aiguise ses cornes pour la perte du Rakchasa.

10. Que les lueurs frémissantes d’Agni s’arment dans l’air de pointes aiguës pour tuer le Rakchasa. Le dieu, dans sa joie triomphante, a des splendeurs qui repoussent et percent ses impies adversaires.

11. Ô divin Agni, ô toi qui nais (pour nous) tant de fois, sage et discret dans mes œuvres, j’ai composé cet hymne, qui est pour toi comme une espèce de char (d’honneur). Si tu es satisfait, envoie-nous des ondes qui nous apportent le bonheur.

12. Que (le dieu) magnifique, étendant ses cols nombreux et superbes, rassemble (en notre maison) la fortune de nos ennemis abattus. Les (Dévas) immortels[1566] ont ainsi invoqué Agni : qu’il couvre de sa protection Manou[1567], qui le reçoit sur son lit de gazon ; oui, qu’il couvre de sa protection Manou, qui le reçoit sur son lit de gazon.


HYMNE XI.

À Agni, par Vasousrouta, fils d’Atri.

(Mètre : Trichtoubh.)

1. Ô Agni, quand tu nais, tu es Varouna ; quand tu t’allumes, tu es Mitra. Enfant de la Force, tous les dieux sont en toi. Tu es Indra pour le mortel qui te sert.

2. Tu es Aryaman, quand, chargé de la Swadhâ, tu portes l’offrande mystérieuse des jeunes (libations). Celles-ci répandent sur toi, comme sur un tendre ami, le lait onctueux, au moment où tu viens consommer l’union de deux époux[1568].

3. Tu es Roudra, et à ta brillante naissance les Marouts font éclater leurs clameurs et ornent (les airs). Et quand le pas de Vichnou atteint une de ses stations (célestes), tu reçois avec ce dieu l’offrande mystérieuse des Vaches (du sacrifice).

4. Parés de tes riches rayons, ô dieu, les autres dieux ont obtenu par toi une part abondante d’ambroisie. Les enfants de Manou assis autour d’Agni sacrificateur lui présentent leurs hommages, et les prêtres l’invoquent en faveur d’Ayou.

5. Ô Agni, ô toi qui portes la Swadhâ, tu es le sacrificateur antique ; aucun n’est plus digne de nos respects et de nos chants, aucun n’est au-dessus de toi. Puisse l’homme appartenant au peuple dont tu es l’hôte obtenir par la vertu du sacrifice la faveur d’être, ô dieu, utile aux mortels !

6. Secondés par toi, entourés de richesses, habiles à t’éveiller par l’holocauste, ô Agni, ô enfant de la Force, puissions-nous, chaque jour, dans les combats comme dans les sacrifices, par les bienfaits de l’opulence, être utiles aux mortels.

7. Qu’(Agni) fasse retomber le mal sur celui qui nous veut du mal ! que celui-ci soit puni par sa propre faute ! Ô prudent Agni, frappe par sa méchanceté même le méchant qui nous tend des embûches.

8. Ô divin Agni, les anciens ont fait de toi, au lever de l’aurore, un messager (fidèle), et t’ont chargé de leurs holocaustes, dans ces jours où tu viens, entouré de riches offrandes, sur le foyer où les feux d’un dieu sont allumés par des mortels.

9. Remplis (les vœux du sacrificateur), qui est ton père. Ô fils de la Force, je compte sur toi. (Dieu) sage, mon enfant, délivre-moi. Ô Agni, dans ta prudente sollicitude, quand veux-tu nous regarder ? Quand daigneras-tu prendre la voie de notre sacrifice ?

10. Ô toi qui es notre refuge, ton père a pour l’honorer une foule de pratiques que tu dois aimer. Agni recherche avec empressement les offrandes variées du sacrificateur, et sa force en reçoit un heureux accroissement.

11. Ô Agni, toujours jeune, tu fais traverser à celui qui te chante tous les maux (de la vie). Des brigands, des ennemis ont apparu : que leurs mauvais projets soient confondus avant d’éclore.

12. Que ces louanges montent vers toi. Et si contre mon protecteur j’ai commis quelque faute, qu’Agni, profitant de nos hommages, ne nous livre pas à nos calomniateurs, ni à nos ennemis.


HYMNE XII.
À Agni, par Vasousrouta.
(Mètre : Trichtoubh.)

1. Ô Agni, roi et maître des richesses, je te célèbre dans le sacrifice. Nous désirons l’abondance. Puissions-nous l’obtenir de toi ! Puissions-nous vaincre les armées des mortels !

2. Que l’immortel Agni, notre père et notre seigneur, le brillant porteur de nos holocaustes, apparaisse avec éclat. Répands tes lueurs sur ces offrandes que reçoit (le feu) Gârhapatya[1569]. Viens à nous, et goûte à nos mets.

3. Vous avez (parmi vous) Agni le sage, le sacrificateur, le maître de la race humaine. Sa science embrasse tout. Il est pur et brillant, et son dos est humide du beurre (sacré). Il se plaît, au milieu des Dévas, à recevoir vos précieuses offrandes.

4. Ô Agni, aime à venir te réjouir avec Ilâ[1570], et enflamme les rayons du soleil. Ô toi qui possèdes tous les biens, visite notre foyer, et transporte les dieux pour venir manger l’holocauste.

5. Sage Damoûnas, hôte aimable de nos maisons, viens à notre sacrifice. Ô Agni, triomphe de tous nos ennemis, et enlève leurs dépouilles.

6. Perce le Dasyou de ton trait, et prépare toi-même la nourriture (qui doit fortifier) ton corps[1571]. Ô Agni, noble héros, enfant de la Force, fais le bonheur des dieux, et, nous, garde-nous dans le combat.

7. Ô Agni, (dieu) aux splendeurs pures et fortunées, nous voulons t’honorer par nos hymnes et nos holocaustes. Accorde-nous une opulence complète ; donne-nous tous les biens.

8. Ô Agni, ô enfant de la Force, qui siéges dans trois demeures, aime notre sacrifice et nos holocaustes. Puissions-nous, au milieu des Dévas, nous distinguer par notre piété ! Couvre-nous de ta triple protection.

9. Ô Agni, possesseur de tous les biens, comme on traverse la mer sur un vaisseau, fais-nous traverser toutes les difficultés et les embarras. Chanté par nous, comme autrefois par Atri, exauce-nous, toi qui es le gardien de nos corps.

10. Mortel, j’invoque un immortel ; je t’honore et de cœur et de bouche. Ô Agni, possesseur de tous les biens, mets en nous l’abondance ; que j’obtienne de toi avec mes enfants une immortelle vie.

11. Ô Agni, possesseur de tous les biens, tu donnes la félicité à l’homme pieux. Il obtient de toi une riche bénédiction en vaches, en chevaux, en guerriers, en enfants.


HYMNE XIII.
À Agni, et autres dieux, par Vasousrouta.
(Mètre : Gâyatrî.)

1. Au brillant Agni, (surnommé) Djâtavédas[1572], et Sousamiddha[1573], offre de copieuses libations de beurre.

2. Le (dieu) sage et invincible, dont le bras a la douceur du miel, (ce dieu appelé) Narâsansa[1574] favorise ce sacrifice.

3. Ô Agni, (nommé) Ilita[1575], amène ici sur ton char fortuné le magnifique Indra. Que cet ami vienne à notre secours.

4. (Dieu) brillant, étends-toi pour nous comme un doux tapis. Comble-nous de tes bienfaits.

5. Portes divines (de l’enceinte sacrée), ouvrez-vous pour laisser passer les (dieux) protecteurs. Complétez le sacrifice.

6. Nous honorons la Nuit et l’Aurore, grandes et belles, toutes deux mères de Rita, et source féconde d’abondance.

7. Divins sacrificateurs[1576], célébrés pour votre course aussi rapide que celle du Vent, rendez-vous tous deux au sacrifice des enfants de Manou.

8. Que les trois déesses, bonnes et fortunées, Ilâ, Saraswatî, Mahî[1577], viennent s’asseoir sur notre gazon.

9. Maître favorable, ô Twachtri, viens pour embellir (notre vie). Garde-nous dans les sacrifices.

10. Ô Vanaspati,[1578] apporte l’holocauste là où tu vois célébrer les mystères divins.

11. Swâhâ[1579] pour Agni et pour Varouna ! Swâhâ pour Indra ! Swâhâ pour les Marouts ! holocauste pour les dieux !


HYMNE XIV.
À Agni, par Vasousrouta.
(Mètre : Panktî.)

1. Je chante cet Agni qui est notre refuge, et vers lequel accourent, comme vers leur demeure, et les vaches (du sacrifice), et les rapides coursiers[1580], et les Dévas immortels. Apporte l’abondance à tes chantres.

2. Je chante cet Agni qui est notre refuge, et vers lequel accourent avec empressement et les vaches (du sacrifice), et les coursiers légers, et les fidèles de haute naissance. Apporte l’abondance à tes chantres.

3. Agni, qui voit tout, donne à ses serviteurs la force et le bonheur. Disposé à nous accorder la richesse, il vient avec joie vers l’offrande qu’on lui a préparée. Apporte l’abondance à tes chantres.

4. Divin Agni, nous allumons (ici) tes feux immortels, et en même temps dans le ciel resplendit ton admirable flambeau. Apporte l’abondance à tes chantres.

5. Ô Agni, maître d’une pure lumière, beau et secourable, chef du peuple, porteur des holocaustes, je te présente et l’hymne et l’offrande. Apporte l’abondance à tes chantres.

6. Parmi les Feux[1581], ceux (du sacrifice) contiennent les biens les plus précieux ; ils donnent la force, le plaisir ; ils reçoivent les libations diverses. Apporte l’abondance à tes chantres.

7. Ô Agni, tes rayons s’étendent, pareils à des coursiers qui d’un pas empressé iraient se mêler à la troupe des vaches (sacrées)[1582]. Apporte l’abondance à tes chantres.

8. Ô Agni, apporte à tes chantres une abondance heureuse et toujours nouvelle. Puissions-nous ressentir ta protection, nous qui te chantons, et qui dans chaque maison te prenons pour notre messager ! Apporte l’abondance à tes chantres.

9. Noble maître de la Force, tu aimes à recevoir dans ta bouche les deux coupes[1583] de beurre clarifié. Comble-nous de tes biens pour prix de nos chants. Apporte l’abondance à tes chantres.

10. C’est ainsi que (les enfants d’Atri) ont établi en l’honneur d’Agni une succession d’hymnes et de sacrifices. Que (ce dieu) nous accorde une forte lignée et une race de chevaux généreux. Apporte l’abondance à tes chantres.


HYMNE XV.
À Agni, par Icha, fils d’Atri.
(Mètres : Anouchtoubh et Panktî.)

1. Amis, apportez à la fois votre offrande et votre hymne à Agni, le plus grand des sacrificateurs, robuste enfant de la Force.

2. Où est ce (dieu) que les prêtres aiment à posséder dans leur foyer, dont ils allument les feux avec vénération, qui devient l’enfant des hommes ?

3. Quand nous lui présentons les mets (sacrés) et les holocaustes des fils de Manou, par la vertu de cette offrande il se revêt des rayons du sacrifice.

4. Il élève son étendard pour avertir au loin celui qui est dans (les ténèbres de) la nuit, et cependant (le dieu) pur et immortel dévore le bois (de son bûcher).

5. Sur ses rayons qui s’élancent (les prêtres) jettent l’enveloppe onctueuse de la libation ; ils semblent, comme sur le dos (d’un coursier), accumuler leurs précieux fardeaux[1584].

6. Tous les mortels le désirent : ils savent qu’il est leur soutien dans tous leurs besoins ; qu’en faveur d’Ayou il donne aux mets une douce saveur, aux maisons une opulente étendue.

7. Comme les bestiaux broutent (l’herbe des champs), Agni dévore les aliments secs qu’on lui donne, (dieu) à la barbe d’or, aux dents éclatantes, à la force invincible et souveraine.

8. Il brille tel que (l’antique) Atri[1585], tel qu’une hache (étincelante). Sa noble mère, soumise aux rites (du sacrifice)[1586], l’a mis au monde pour qu’il vînt prendre sa portion (des offrandes).

9. À toi, Agni, qui aimes la libation de beurre, (à toi) qui es notre soutien, appartient le bonheur. Accorde aux mortels ici présents la gloire et l’abondance. Songe à les protéger.

10. (Le dieu) invincible a reçu et l’hymne et l’offrande que tu lui as présentés. Ô Agni, puisse maintenant Atri triompher des Dasyous impies ! Puisse Icha triompher de ses ennemis !


HYMNE XVI.
À Agni, par Icha.
(Mètre : Djagatî.)

1. Antique Agni, auteur de toute force, les anciens, pour obtenir ton secours, ont allumé tes feux dans le sacrifice. Adorable soutien du monde, tu es Damoûnas, l’aimable, l’illustre maître du foyer.

2. Ô Agni, ô maître du foyer, les hommes t’ont choisi pour leur hôte antique. Tes formes sont variées, ta chevelure brillante, ton étendard élevé. Tu donnes à tes protégés la richesse et le bonheur, à tes ennemis la mort.

3. Ô fortuné Agni, les enfants de Manou te célèbrent. Tu estimes nos holocaustes, tu distingues nos hommages, tu répands sur nous les plus précieux des biens. Tantôt caché dans ton asile mystérieux, tantôt brillant à tous les regards, tantôt bruyant et sonore, tu es un heureux sacrificateur qui reluit sous nos libations de ghrita.

4. Ô Agni, tu es notre gardien, et nous venons vers toi, t’adressant toute espèce d’hommages, des prières, des chants, des invocations. Divin Angiras[1587], nous allumons tes feux ; aime les offrandes et les flammes d’un mortel.

5. Ô Agni, ô toi que nos pères ont toujours chanté, toi qui revêts tant de formes, tu répands l’abondance sur tes serviteurs. Tu règnes en maître puissant sur toutes les offrandes, et quand tu brilles, ta splendeur n’est effacée par personne.

6. Ô Agni toujours jeune, les Dévas, qui allument tes feux, t’ont fait leur messager et le porteur de leurs holocaustes. Ils t’invoquent comme le conquérant d’un vaste domaine, comme le réservoir du ghrita (sacré) ; ils t’ont donné pour être l’œil éclatant (du monde), qui vient éveiller la Prière.

7. Ô Agni, les (prêtres) brillant du reflet des flammes qu’ils ont allumées, t’invoquent en t’offrant leurs mets et leurs libations. Et toi, grandissant sur ces branches (qui brûlent), (sous ces libations, dont) tu es arrosé, tu t’établis en vainqueur sur ce foyer de terre que tu as conquis.


    rapporter à un dieu, ce serait plutôt à Agni, qui, en sa qualité de prêtre, accomplit les merveilles du sacrifice. Vrichan s’entend ici de celui qui verse la libation.

  1. Voir : section III, lecture iv, hymne 3 ; section IV, lecture v, hymne 1 ; section V, lecture vi, hymne 3.
  2. Voir : section IV, lecture i, hymne 10 ; section IV lecture ii, hymne 1.
  3. Il existe simultanément deux manières de diviser les Rig-Véda : ces deux manières se distinguent et en même temps se confondent assez pour qu’on ne puisse les indiquer à la fois sans inconvénient. Elles ont dû être introduites à des époques ou par des écoles différentes : l’une de ces divisions, que nous suivrons, est en huit sections, appelées achtacas ; un achtaca renferme huit chapitres ou lectures, adhyâyas. Chaque lecture contient une trentaine, plus ou moins, de vargas. Le varga est une réunion de vers ou distiques appelés rig, qui varient de trois jusqu’à huit. La subdivision par hymne, soûkta, n’appartient pas à ce système de division, mais à l’autre système, qui est celui des mandâlas. Il y a dix mandâlas partagés en anouvâcas. Chaque anouvâca contient un certain nombre d’hymnes ou soûktas. Nous n’avons pu admettre complètement l’une ou l’autre de ces deux divisions : nous avons pris la division par achtaca (section) et adhyâya (lecture) ; puis à la subdivision par vargas nous avons substitué celle qui se fait par soûktas (hymnes). Nous avons numéroté ces soûktas, suivant le nombre qu’en renferme chaque adhyâya.
  4. Agni, ignis, est le dieu du feu. Ce début du Rig-Véda, qui commence par un hymne à Agni, a donné lieu à la légende mythologique qui fait sortir le Rig-Véda de la bouche d’Agni. (Commentaire de Sâyana-Atchârya, copie de Paris, t. I, p. 5.)
  5. Hotri a une double signification, suivant qu’on le tire du mot hou, sacrifier, ou du mot hwé, invoquer, appeler.
  6. Le feu, allumé pour le sacrifice, donne aux dieux un signal auquel ils accourent.
  7. Ce mot angiras, comme beaucoup d’autres noms anciens, ne me paraît pas d’origine sanscrite. Cependant le commentateur cherche à l’expliquer, tantôt en le rapprochant du mot angâra, charbon, tantôt en lui donnant le sens d’anganasîla, doué d’ornement. C’est le nom d’un sage, père d’une famille sacerdotale. Une légende identifie le richi Angiras avec le feu. Comme le mot angiras peut signifier prêtre en général, il n’est pas étonnant qu’on l’applique à Agni.
  8. C’est là, à l’égard d’un dieu, un moyen de captation qui paraîtra indigne à notre civilisation. Nous en verrons plus d’un exemple dans le cours de cet ouvrage. N’est-ce pas là le caractère d’une de ces religions antiques, dans lesquelles on prend par son intérêt le dieu que l’on adore, et que l’on brise quand il ne se montre pas favorable ?
  9. Le mot rita offre un certain nombre de significations variées et embarrassantes. Comme adjectif, il veut dire pur, éclatant. Comme substantif, il s’emploie pour les choses et les substances qui peuvent avoir ces qualités, c’est-à-dire la lumière, le feu, le sacrifice, et, suivant le commentateur, l’eau ; au moral, la vérité, la justice. Obligé de choisir entre ces sens divers, et voulant mettre une certaine unité dans ma traduction, j’ai presque toujours préféré le sens de sacrifice, feu du sacrifice.
  10. Vâyou est le dieu du vent ou de l’air.
  11. Ces liqueurs étaient faites avec des grains qu’on laissait fermenter, ou avec le jus de l’Asclepias acida appelé soma.
  12. Indra est le dieu de l’éther, considéré comme le premier des éléments : c’est le ciel qui enveloppe le monde. Le nom d’Indra signifie roi.
  13. Ces mets se composaient de beurre (ghrita), de caillé (dadhi) mêlé de farine, de gâteaux. On les appelle ici du nom général de prayas ; ailleurs, du nom de vâdja.
  14. Mitra et Varouna sont deux formes du ciel, ou plutôt du soleil. Ce sont le soleil de jour et le soleil de nuit : car celui-ci est censé revenir, pendant les ténèbres, reprendre sa place à l’orient. Ces deux personnages réunis représentent le jour astronomique ; Mitra est le jour, et Varouna la nuit.
  15. Ou bien : exaucent la prière qui accompagne le beurre (du sacrifice). Dans l’autre version, le mot ghrita indique la pluie, qui est comme le beurre destiné à engraisser la terre.
  16. Les Aswins ou Cavaliers sont deux divinités par lesquelles se trouvent personnifiés deux états, deux apparences du ciel. Il est probable que ce sont les deux crépuscules. Le commentateur les a quelque part confondus avec le Ciel et la Terre, et même avec le Soleil et la Lune, d’après l’autorité d’Yâsca.
  17. Chez ces dieux, ce que le poëte appelle mains et bras, ce sont les rayons de lumière
  18. Traduction des deux mots dasra et nâsatya, qui sont les noms ordinaires des Aswins.
  19. Les offrandes étaient disposées, et les ministres du sacrifice assis sur des couches d’un gazon appelé varhis, cousa, darbha (Poa cynosuroïdes).
  20. Paraphrase indiquée par le commentaire pour rendre le mot Roudra. Je traduirais volontiers : suivant la route de Roudra, c’est-à-dire la voie de l’air.
  21. Vipra, le prêtre qui préside au sacrifice.
  22. J’essaye de rendre ainsi le mot hari.
  23. Le mot viswa signifie tout. Ce nom collectif désigne tous les dieux invoqués ailleurs séparément, et ne semble pas s’appliquer à une classe particulière de divinités.
  24. Traduction du mot composé éhimâyâsah, sur l’origine duquel les commentateurs semblent embarrassés. Ils racontent à ce sujet une petite légende ; ils disent que le feu, appelé Sôtchica, s’étant caché dans les eaux parce que ses trois frères avaient été tués, les Viswadévas le rappelèrent, en disant : Éhi, mâ yâsîh (Veni, ne abcas).
  25. Saraswatî est la déesse de la parole, vâg dévatâ. Elle est, dans le sacrifice, accompagnée de deux déesses, Ilâ et Bhâratî : Ilâ est la parole poétique, l’hymne ; et Bhâratî, la parole accompagnée du geste, l’action déclamatoire.
  26. Le commentateur voudrait que ce vers se rapportât à la rivière Saraswatî. Je n’ai pu partager son avis, et n’admets pas cette confusion de personnages. Ce drapeau qu’élève Saraswatî, il me semble que c’est le feu allumé pour le sacrifice. Le mythe de Saraswatî ne me paraît pas encore formé : Brahma n’est que le sacrifice ; et si Saraswatî était dite fille ou femme de Brahma, cela signifierait qu’elle naît du sacrifice ou qu’elle l’accompagne. On appelle Femmes des dieux les prières prononcées en leur honneur. Cependant Saraswatî est le nom de l’une des sept rivières citées souvent dans les hymnes.
  27. Je trouve cette idée dans le mot dasma, qui est au 6e vers de cet hymne, et j’emprunte le sens que je lui donne, non au commentaire qui en fait une épithète d’Indra, mais au Dictionnaire de M. Wilson.
  28. Littéralement : honoré par cent sacrifices. Le nombre cent est ici pour un nombre indéfini. Telle est l’explication donnée par le commentateur, qui en indique encore deux autres, représentées par les mots bahoucarman et bahoupradjna. On ne connaissait pas encore la fable qui suppose qu’Indra est dépossédé de son royaume céleste par celui qui a célébré cent sacrifices appelés aswamédhas.
  29. Vritra est un nom donné à l’ennemi d’Indra ; c’est l’obscurité des nuages, que dissipe la puissance du dieu. Indra fait la guerre aux Vritras, comme le Jupiter grec la fait aux Titans.
  30. Ce caillé porte le nom de dadhi
  31. Allusion à l’immensité du ciel, éclairé le matin par les rayons du jour.
  32. Le char que l’on prépare pour un dieu, c’est le sacrifice.
  33. Moyennant ces trois épithètes, le commentateur, tout plein d’idées modernes, forme ici un syncrétisme d’Indra avec le soleil, le feu et le vent ; il l’identifie aussi avec les étoiles qui brillent au firmament. Je ne vois en cet endroit qu’une description poétique du ciel, personnifié dans Indra, et représenté au moment de l’aurore.
  34. Cette invocation s’appelle Swadhâ.
  35. Les Marouts sont les vents : nous verrons, par la suite, que ce nom se donne à une classe de prêtres.
  36. Je n’ai pu adopter le sens du commentaire.
  37. On donne ici au vent le même nom qu’au feu, Vahni. L’idée est sans doute différente.
  38. Nous allons tâcher d’expliquer cette image, qui doit se représenter souvent. D’abord le mot vache, dans le langage poétique, est tout ce qui procure un avantage ; cet avantage est le lait que l’on retire de cette vache. On donnera donc ce nom au sacrifice, à la prière, à la terre, au nuage, à la libation, aux rayons du soleil, etc. Ici la vache doit être le nuage, ou plutôt la lumière, le rayon. Au sein de la nuit, représentée comme une vaste caverne, sont renfermés les rayons, enlevés et gardés par les Asouras, enfants de Bala, et nommés Panis. Vrihaspati, autrement Agni, le feu du sacrifice, réclame ces vaches : une chienne divine, nommée Saramâ, et qui n’est que la voix de la prière (vâg dévî), est envoyée à la découverte. Indra, le dieu du ciel qui commence à s’éclairer, marche, avec les Marouts et les Angiras (c’est-à-dire les prêtres), à la délivrance de ces vaches, et il brise la caverne où elles sont renfermées. De tous ces détails on a composé une légende, dont nous venons d’indiquer quelques traits et qui peut avoir quelque rapport avec la fable de Cacus. Les vaches que j’appelle célestes me semblent être ici les rayons du soleil : dans d’autres passages, ce mot désignera les nuages qui répandent sur la terre l’eau, qui est pour elle une espèce de lait. Je me trompe fort, si cette explication ne doit pas être aussi celle de l’histoire de la vache Io chez les Grecs, laquelle est donnée en garde à Argus, le Sahasrâkcha (millioculus).
  39. Le soleil, suivant le commentateur.
  40. J’estime que le véritable sens doit être : dociles à la voix du prêtre qui les attelle par la prière ; littéralement, attelés par la parole.
  41. Quelles sont ces cinq classes d’êtres ? Le commentateur pense que ce sont les quatre castes, auxquelles il ajoute les Nichâdas. Il explique de la même manière le mot pântchadjanya, qui se présentera plus loin. Mais je crois que les castes n’existaient pas encore à l’époque où ces hymnes furent composés, et, de plus, les Nichâdas n’étaient pas une caste. Yâsca suppose que par ces cinq classes il faut entendre les Gandharvas, les Pitris, les Dévas, les Asouras et les Rakchasas. Un autre auteur retrouve les cinq classes dans les Dévas, les Hommes, les Gandharvas, les Apsaras et les Serpents, ou bien dans les Dévas, les Hommes, les Pitris, les Quadrupèdes et les Oiseaux. D’un autre côté, les Indiens reconnaissent cinq éléments. Ne seraient-ce pas les êtres appartenant à chacun de ces éléments ? M. Wilson donne au mot pântchadjanya une étymologie qui a trait à cette explication. Je dois dire que la même idée se présente dans la 5e section, 8e lecture, et que ces cinq classes sont appelées enfants de Manou, pantcha Mânouchâh.
  42. Littéralement, à coups de poing : le commentateur indique le sens que j’ai adopté.
  43. Sousipra ; cette épithète est remarquable, et signifie ayant un beau nez ou de belles mâchoires. Quel rapport ont ces traits de beauté avec le caractère particulier d’Indra ?
  44. Traduction littérale.
  45. Le mot arih répond au mot latin herus. C’est le maître de la maison faisant les frais du sacrifice.
  46. Ce passage renferme le mot vansa, qui signifie roseau et famille. Le commentaire, expliquant ce mot dans le premier sens, dit que les sauteurs élèvent un roseau, qui est une espèce de mât de cocagne. Il me semble, à moi, que ce roseau doit être comme la hampe d’un drapeau. Dans le second sens, le commentaire pense que le vansa est une famille élevée par les vertus d’un père.
  47. Avant le jour du sacrifice, le chef de famille a dû envoyer sur les montagnes chercher le soma (Asclepias acida ou Sarcostema viminalis), recueillir le bois, et prendre toutes les dispositions pour les offrandes et le repas.
  48. Répétition exigée par la texte.
  49. Cousica est un roi de la race solaire. Il désira un fils dont la puissance fût égale à celle d’Indra ; Indra lui-même voulut bien naître de lui, et porta, dans cette incarnation, le nom de Gâdhi. Quelques auteurs forment du mot cousica un adjectif qui signifierait fils de Cousa, et alors le père de Gâdhi se nommerait Cousanâbha ou Cousâmbha. Côsica voudrait dire descendant de Cousa.
  50. Les nuages sont considérés par le poëte comme des villes habitées par les Asouras. Indra les frappe avec sa foudre, pour en faire sortir la pluie, que retiennent ces ennemis des dieux.
  51. Souchna est le nom d’un Asoura. Ce mot signifie desséchant. Par le mot magie, il faut entendre l’art avec lequel il crée ces apparences physiques qui séduisent nos yeux.
  52. Deux pièces de bois composent l’aranî, et du frottement de ces deux pièces de bois on tire le feu du sacrifice.
  53. Esprits immondes, ennemis des dieux et des hommes
  54. Ce passage doit faire allusion à la distinction des feux, qui sont au nombre de trois : Ahavanîya ou feu du sacrifice, Gârhapatya ou feu domestique, et Dakchina ou feu placé du côté du sud.
  55. Djouhoû est un vase de bois en forme de croissant. Je crois qu’ici ce mot s’emploie pour le vase du foyer même, qui est de terre.
  56. Cet hymne est consacré à une classe de divinités nommées Apris : ce sont des formes du dieu Agni, et des personnifications divines des choses qui concourent au sacrifice. Les ler, 2e, 3e, 4e, 10e et 11e distiques sont consacrés à Agni, sous les noms de Sousamiddha, Tanoûnapât, Narâsansa, Ilita, Twachtri, Vanaspati. Le 5e distique célèbre le gazon sacré ; le 6e, les portes de l’enceinte du sacrifice ; le 7e, la nuit et l’aurore ; le 8e, deux divinités qui doivent présider au sacrifice ; le 9e, Ila, Saraswatî et Bhârati, c’est-à-dire la poésie, l’éloquence et la déclamation ; le 12e, la Swâhâ, ou exclamation employée au moment de l’holocauste. Ces êtres ainsi divinisés deviennent comme les ministres du sacrifice offert en l’honneur d’une divinité principale : en cette qualité, ils portent le nom de Dévas.
  57. C’est-à-dire : bien enflammé.
  58. Ce mot Tanoûnapât reçoit plusieurs explications. Comme le mot napât ne peut guère s’expliquer, partout où je le vois, que par le sens d’enfant, de petit-fils, je conçois que le mot Tanoûnapât s’entende par enfant de son corps. Agni naît et vit aux dépens du bois, qui est comme son corps. Un autre sens qu’on lui donne est destructeur de son propre corps. Je crois devoir éloigner le sens de destructeur, qu’on donne à napât.
  59. Ce mot signifie chanté. Narâsansa, plus haut, signifie célébré par les hommes.
  60. Le nom de Manou est pris d’une manière générale pour signifier l’homme, ou d’une manière spéciale pour désigner le patriarche que les Indiens regardent comme le fondateur de leur race. Il me semble qu’on lui attribue, en plusieurs endroits, l’institution du culte du feu. L’expression Manourhita peut encore se traduire par constitué pour l’homme.
  61. La peinture que le poëte fait de ces deux divinités ne me permet guère de les identifier avec les Aswins. Ce sont, comme l’indique le commentaire, deux formes d’Agni, le feu de la terre et le feu de l’air. Ne serait-ce pas plutôt les deux sacrifices du matin et du soir ?
  62. Voy.  plus haut la note 1, p. 3, c. 1. Mahî, qui signifie grande, est une épithète de Bhârati.
  63. Twachtri est Agni considéré comme donnant la forme ; c’est le feu plastique. On lui attribue les objets d’art, il forge la foudre d’Indra : c’est le Vulcain de cette mythologie. Je suppose que Twachtri est la troisième forme d’Agni, répandue dans l’air et constituant la chaleur vitale.
  64. Mot à mot, maître du bois. C’est le feu présidant au bûcher du sacrifice, et même aux pièces de bois qui y sont employées, yoûpâgni.
  65. La swâhâ est une exclamation prononcée au moment de l’holocauste. On en fait une épouse d’Agni, car les prières sont les épouses des dieux.
  66. Canwa est un ancien sage, issu de race royale : rien en effet ne me semble, dans cet ouvrage, annoncer la distinction des castes. Canwa fut prêtre, et père de prêtres, mais non brahmane. Son père était Apratiratha (nommé peut-être aussi Ghora), descendant de Poûrou, prince de la dynastie lunaire. Il donna le jour à Médhâtithi, auteur de cet hymne, d’où sortirent les Canwas, dévoués au service des autels. Le commentateur regarde quelquefois le mot Canwa comme un nom commun, signifiant sage, prêtre.
  67. Personnages mythologiques au nombre de douze : ce sont les douze formes du soleil, regardées comme les fils d’Aditi.
  68. Le chamoû ou tchamasa est un vase qui contient le soma : c’est aussi la cuiller avec laquelle on le sert. Quelquefois ou emploie ce mot pour le filtre de peau à travers lequel on passe la boisson pour la clarifier, et même aussi peut-être pour le pressoir.
  69. Les épouses des dieux sont les prières particulières que l’on dit en l’honneur de chacun de ces dieux.
  70. Exclamation usitée au moment de l’holocauste.
  71. Dieux des saisons, au nombre de six.
  72. Le nom de cette coupe est potra : un des prêtres s’appelle potri.
  73. Ce mot signifie conducteur ; ce doit être un nom du dieu Agni.
  74. L’épouse d’Agni, c’est une prière, une invocation, comme Swâhâ.
  75. Le sacrifice a lieu trois fois par jour, le matin, à midi, et le soir : de là l’expression trichavana.
  76. L’expression est grâvahasta, lapidem manu tenens ; et le mot grâvan désigne sans doute les vases de terre employés dans les sacrifices. Ce pourrait bien être aussi les mortiers ou les pierres qui ont servi à nettoyer l’orge ou à écraser le soma : cependant le mortier paraît avoir été de bois.
  77. C’est-à-dire : qui donne la richesse ou la force.
  78. Cette coupe s’appelle nechtra ; un des prêtres, et Agni lui-même, porte le nom de nechtri, conducteur.
  79. Le mot tourîyram m’a semblé obscur. J’ai remarqué que le nom de Dravinodâs était invoqué quatre fois, et je me suis déterminé à ce sens.
  80. Voy. la note 4, p . 7, c. 1.
  81. Ces grains s’appellent dhânâh.
  82. Je me suis éloigné du sens donné par le commentateur, qui ne distingue pas les trois sacrifices.
  83. Gôra signifie un cerf blanc, gôramriga.
  84. Vritra est le nom principal sous lequel on personnifie le nuage qui couvre le ciel ; c’est donc l’ennemi d’Indra, qui le frappe de sa foudre, et envoie à la terre l’eau qu’il retenait.
  85. Épithète d’Agni, signifiant maître de la chose sacrée, du sacrifice.
  86. Cakchîvân est un saint Richi, regardé comme le fils putatif d’un roi de Calinga ou d’Anga, qui, accablé par l’âge, voulut se susciter à lui-même un fils de Dîrghatamas. La reine, rougissant de se prêter au vœu du roi, substitua à sa place son esclave Ousidj, qui enfanta Cakchîvân. Celui-ci épousa plus tard la fille du prince Swanaya, fils de Bhâvayavya, nommée Vrichayâ.
  87. Soma n’est pas le dieu Lunus ; c’est la libation du soma personnifiée.
  88. Nom d’Agni. Voy. note 4, p. 7, c. l.
  89. Autre nom d’Agni, signifiant maître de l’assemblée pieuse.
  90. Voy.  note 3, p. 7, c. 2.
  91. Ce sens a été pris dans le Dictionnaire de M. Wilson.
  92. Les Ribhous forment une classe de divinités. Suivant l’opinion de M. Nève, ce seraient d’anciens mortels élevés au rang des dieux. Fils de Soudhanwan, de la race d’Angiras, ils sont au nombre de trois : Ribhou, Vibhwan et Vâdja. Il est à croire qu’ils établirent des cérémonies religieuses, et changèrent quelques-uns des anciens usages. Peut-être fondèrent-ils une espèce de culte en l’honneur des rayons du soleil, avec lequel on les a personnifiés en leur qualité de dieux. La légende leur attribue d’avoir ressuscité une vache (c’est-à-dire le sacrifice), d’avoir rendu la jeunesse à leurs deux vieux parents (c’est-à-dire d’avoir ramené le sacrifice du matin, qui redonne la vie au ciel et à la terre), d’avoir fait des chevaux pour Indra, un char pour les Aswiris (c’est-à-dire d’avoir célébré des sacrifices en leur honneur), enfin d’avoir divisé en quatre parties la coupe de Twachtri (c’est-à-dire d’avoir établi quatre libations au lieu d’une). Je croirais que les Ribhous ne sont pas d’anciens Richis divinisés, mais que ce sont les rites eux-mêmes, les cérémonies déifiées. J’avoue que les hypothèses sont choses trop faciles, surtout avec l’instrument philologique ; j’en donnerai un exemple que me fournit le nom même des Ribhous. La grammaire nous apprend d’abord comment la voyelle ri se métamorphose en ar : ensuite la consonne bh, pour la valeur du son, correspond à ph ou f. Il résulte, de ces deux faits, que Ribhous se convertit tout naturellement en Arphous ; et ce mot rappelle aussitôt le nom d’Orphée, prêtre et poëte, qui a présidé à l’antique civilisation grecque.
  93. La coupe de bois du sacrifice, appelée tchamasa.
  94. Ou bien trois fois sept offrandes différentes. À l’occasion de ce vers, le commentateur explique que, dans le vase du sacrifice, il y a trois espèces d’offrandes, qu’il qualifie d’offrandes supérieures, d’offrandes du milieu, d’offrandes inférieures. Il distingue aussi trois classes (varga) de sacrifices : les haviryadjnas, les pâcayadjnas, les somasansthânas. Il cite des sacrifices appartenant à chacune de ces trois classes, sacrifices dans lesquels les Ribhous étaient probablement invoqués. Ailleurs, il dit qu’il y a sept offrandes appelées hotrâ, et accompagnées de l’exclamation vachat.
  95. Les Râkchasas, comme les Harpies, souillent et dévorent les mets des sacrifices.
  96. Le commentateur parle d’une étoile, Savanagraha, qui avertit que le moment des libations est venu.
  97. Savitri est un nom du Soleil.
  98. Les mains et bras de ces dieux, ce sont leurs rayons. On conte à ce sujet une légende. Dans un sacrifice, Savitri s’acquittait des fonctions de prêtre. Ses acolytes lui présentant une offrande appelée prâsitra, la main du prêtre se trouva coupée. On en fit une autre d’or, qu’on adapta à son bras. Voici l’explication de cette légende : le grand sacrifice accompli par le Soleil, c’est la fonction qu’il accomplit dans ce monde. L’offrande prâsitra, c’est le nuage qui intercepte et coupe les rayons du Soleil. Le Soleil, ce grand Papi, c’est-à-dire le grand buveur, ne peut manquer de recouvrer ces mains d’or qui ne lui ont été enlevées qu’un moment.
  99. Le mot napât se présente souvent, et on le traduit de diverses manières. Je n’ai pas cru que des auteurs pussent ainsi se jouer avec la langue, et donner à un même mot, suivant leur caprice, un sens différent. J’ai cherché pour le mot napât une signification uniforme, et qui convint à toutes les circonstances ; je me suis décidé pour le mot enfant, et j’ai rejeté toutes les explications ingénieuses qui menaient à un autre sens. Dans la circonstance présente, Savitri, c’est-à-dire le Soleil, est l’enfant des libations, dans ce sens que le sacrifice donne naissance au feu terrestre, et ensuite au feu céleste, qui est le Soleil. C’est ce qu’on verra développé plus loin dans beaucoup de passages.
  100. Nous avons vu, lecture 1, not. 4, p. 8, c. 2, que les épouses des dieux étaient les prières particulières que l’on dit en l’honneur de chacun d’eux.
  101. Hotrâ, dit le commentateur, est l’épouse d’Agni, surnommé Homanichpâda. C’est la personnification de l’invocation faite au moment de l’holocauste. Ce mot signifie encore hymne.
  102. Bhâratî est donnée comme l’épouse d’Aditya. Voyez encore, note 1, 1re col., pag. 3.
  103. Varoutrî est désigné par le commentateur sous le synonyme de Varanîya ; il semblerait que c’est la déesse qui préside à la prière par laquelle on demande une grâce, vara. Varoutrî est peut-être un nom d’Ilâ.
  104. Dhichanâ est la pensée, l’intelligence, l’esprit. Ce mot s’emploie pour signifier prière. Le commentaire confond Dhichanâ avec Saraswatî, appelée Vâgdévi, déesse de la parole. Voy. note 1, 1re col. pag. 3.
  105. Épouse d’Indra, de Varouna et d’Agni.
  106. Gandharva est, je crois, un nom d’Agni ; c’est quelquefois aussi une épithète du Soleil.
  107. Vichnou est un des noms du Soleil. Le texte porte le mot prithivi, qui s’emploie d’une manière générale pour signifier toute espèce de région, et d’une manière particulière pour signifier la terre. Le Soleil, en effet, semble partir de la terre, dont il peut se dire le fils.
  108. Le commentateur entend ici les sept espèces de mètres ou tchhandas qui servent à composer les hymnes. Ne serait-ce pas plutôt une allusion aux sept rayons que l’on donne à la lumière ? Le poëte n’a-t-il pas voulu représenter le Soleil avec une auréole de sept rayons ?
  109. Ce sol, c’est tantôt la terre, tantôt la voûte du ciel, puisque les trois endroits foulés par le Soleil sont l’orient, Samârohana ou la colline du levant ; en second lieu, le midi, Vichnoupada ou le méridien céleste ; et enfin, l’occident, Gayasiras ou les collines du couchant. Tels sont les trois pas ou stations de Vichnou, surnommé Trivicrama, qui ont donné naissance à une grande fiction pouranique.
  110. Autant qu’il me sera possible, je verrai, dans le mot Soûri, le maître de maison, le père de famille. Il doit être distingué du prêtre qui accomplit le sacrifice, dont l’autre a fait les frais.
  111. Vâyou, c’est le vent considéré comme le dieu de l’air.
  112. Ces mille yeux représentent l’extrême vigilance de ces dieux ; ou bien, comme l’éther et l’air semblent être le séjour des étoiles, ces yeux rappellent les astres innombrables qui tapissent la voûte céleste. On ne connaissait pas, à cette époque, la légende obscène racontée dans le Râmâyana sur l’origine de l’épithète Sahasrâkcha donnée à Indra.
  113. Nom du Soleil.
  114. Prisni est un nom donné à la Terre considérée comme une divinité ; c’est, en certains cas, un synonyme d’Aditi. Suivant les Indiens, les vents viennent de la terre, et par conséquent ils en sont comme les enfants. Le mot Prisni, au masculin, est un nom du Soleil. Je pense que Prisni, mère des vents, c’est plutôt le nuage, ou l’air chargé de nuages.
  115. Ce sont les six saisons, qu’on nomme Rilous. Les noms des six Rilous sont : le Vâsanta et le Grêchma, le Vârchica et le Sârada, l’Hêmantica et le Sêsira. En les accouplant ainsi deux par deux, on peut n’en compter que trois.
  116. Le commentaire entend ces mots des femmes qui assistent le père de famille dans les soins qu’il prend pour le sacrifice.
  117. Le mot déva signifie brillant, et ne répond pas au sens métaphysique que possède notre mot Dieu, lequel n’est pas traduit en sanscrit. Ce mot déva a plusieurs acceptions. Il s’emploie pour désigner les diverses personnifications de la substance divine se manifestant dans les éléments : en pareil cas je le traduis, avec regret, par dieu. Il se dit aussi pour distinguer les personnages remarquables dans l’ordre religieux ou dans l’ordre civil ; alors je le traduirai par déva, auquel j’ajouterai quelquefois l’épithète de mortel, lorsqu’il y aura opposition entre les dévas-dieux et les dévas-hommes. Le mot amrita (immortel) s’emploie également avec ces deux significations. Mais vous noterez que bien souvent le poëte donne le nom de Dévas à ces personnifications de cérémonies et de rites, qu’il fait agir comme des êtres réels et divins.
  118. Soma est la libation personnifiée. Ces eaux dont il est ici question se prennent quelquefois pour les différentes espèces de libations, et je pense que toutes ces invocations s’adressent aux Eaux considérées dans le sacrifice. Ainsi, au vers 17, lorsque le poëte parle des Eaux qui précèdent la naissance du Soleil (Oupasoûryé), et de celles qui l’accompagnent, il me semble qu’il désigne les libations du matin et celles de la journée. Au vers 18, les vaches désaltérées par ces Eaux, ce sont les rayons d’Agni. Dans le vers présent, il cite Soma et Agni, agents du sacrifice.
  119. L’imprécation, dans l’opinion des Indiens, est une arme terrible qui doit toujours produire son effet, même lorsqu’elle est injuste.
  120. Le mot Aditi qui se trouve dans ce vers est le nom de la déesse qui représente la nature entière, et quelquefois seulement la terre. De là on a imaginé que l’auteur de cet hymne, Sounahsépa, fils d’Adjîgaria, l’avait récité au moment où il allait être immolé aux dieux. Etre rendu à la grande Aditi pour revoir son père et sa mère, c’était être rendu à la terre pour aller dans un autre monde retrouver ses parents ; ces mots étaient en même temps un témoignage rendu à l’immortalité de l’âme. Je n’ai pas cru devoir adopter une traduction qui ne me paraît pas en harmonie avec l’ensemble de l’hymne. Le sacrifice se fait le matin, et le but de ce sacrifice, c’est d’amener heureusement le jour : l’auteur du jour, c’est le Soleil, qui révèle le ciel et la terre, appelés père et mère. Voilà ce que le poëte désire de revoir, et, à peine remis des anxiétés que donne la nuit, il demande une pleine jouissance de la nature ; c’est ce que signifie le mot Aditi, lequel se retrouve dans ce sens au dernier vers de cet hymne. On a encore voulu trouver dans ce vers le désir de Sounahsépa de recouvrer sa liberté et de revoir sa famille. J’ai aussi rejeté ce sens ; je me suis attaché à celui qui semblait ressortir de la composition tout entière. Je crois donc que être rendu à la grande Aditi, c’est rentrer en possession complète des biens que nous présente la nature au lever du soleil. Agni, qui préside au sacrifice, est le dieu qui rend ce service aux hommes.
  121. Nom du Soleil.
  122. Autre nom du Soleil.
  123. Il faut bien remarquer que l’auteur distingue le Soleil de Varouna, qui en est l’âme et le directeur.
  124. Nirriti est la divinité du mal. Pâpa dévatâ.
  125. Voilà le passage sur lequel on se fonde pour penser que cet hymne est celui que Sounahsépa récita lorsqu’il était prisonnier. Mais, en tous cas, la circonstance dont il est ici question est mentionnée comme déjà passée, et le reste de l’hymne ne semble pas avoir le but spécial qu’on lui suppose. Pour ma part, je pense que cet état de captivité de Sounahsépa, comme ailleurs l’état de cécité de certains personnages, n’est qu’une métaphore qui peint l’abattement de l’homme incapable d’agir pendant la nuit, et en quelque sorte lié ou aveuglé par les ténèbres. Le sacrifice du matin vient lui rendre sa liberté et la lumière.
  126. Ces mots sont la traduction du mot Asoura, dont l’explication la plus convenable m’a paru être celle que je donne ici. On voit pour quelle raison cette épithète est attribuée au Soleil et aux autres dieux ; l’Asoura est l’être doué de force et de mouvement, et communiquant la vie dont il est animé. Les nuages ont cette propriété ; et quand le poëte les a personnifiés, les êtres, ennemis des dieux et qui les animent, ont pu être appelés Asouras. Ce mot a fini même par désigner plus souvent les adversaires des dieux, les Titans indiens. Je suppose que, plus tard, dans la composition du mot Asoura, qu’on avait perdu de vue, on a cru trouver un a privatif, et qu’on a ainsi formé le mot Soura, qui signifie Dieu.
  127. J’entends par ces mots que l’obscurité qui règne au ciel, sur la terre, dans les airs, est une triple chaîne qui lie les hommes pendant la nuit.
  128. Le mot Aditi se trouve encore ici, et on le rend par salut, sécurité. Je sais que la même expression peut avoir différentes significations ; mais je n’aime pas que cette expression, dans des circonstances analogues, se trouve interprétée différemment. J’ai donné au mot Aditi le même sens que dans le premier vers. Être à Aditi, c’est, comme en français, être tout à la nature, jouir complètement de la nature. Aditi, dans les idées indiennes, me semble être l’ensemble de la matière organisée, et animée d’un souffle divin : ce mot signifie complet, et est en opposition avec le mot diti, qui veut dire divisé, incomplet. D’Aditi naissent les Adityas, ou formes du Soleil ; de Diti, les Dêtyas, êtres malfaisants qui animent les météores célestes, et font la guerre aux Adityas et aux autres dieux. Le sens du mot Aditi, comme je l’ai dit, peut être restreint à la signification de terre ; et Aditi est alors confondu avec Prithivî. Ce même mot Aditi, au masculin, est employé pour signifier l’ensemble des offrandes, le sacrifice.
  129. C’est un treizième mois de quelques jours, ajouté pour rendre l’année lunaire égale à l’année solaire.
  130. Varouna est une forme d’Agni ; le vers 10 le représente au sein des demeures humaines, où il est le dieu sacrificateur.
  131. Voy. la note 3, 1re col. pag. 15.
  132. On pourrait aussi traduire : qu’ils viennent s’asseoir sur notre cousa comme sur celui de Manou.
  133. Agni est appelé fils de la Force, parce que c’est par la violence du mouvement qu’on l’extrait de l’aranî. Voy. not. 2, 1re col. pag. 7. Cependant cette expression est employée pour d’autres personnages qu’Agni, et je pense qu’il ne faudrait y voir qu’une manière de représenter la force au superlatif : enfant de la Force serait synonyme de très-fort, très-robuste.
  134. Voy., pour la distinction des feux, not. 4, p. 7, 1re col.
  135. Cette image bizarre s’explique par l’apparence même de la flamme. Le commentateur dit quelque chose de plus : il ajoute que le feu, par l’influence de ses flammes, détruit les ennemis du dévot, comme le cheval, par le mouvement de sa queue, donne la mort aux mouches qui le piquent.
  136. On pourrait modifier cette traduction, si l’on suivait l’idée énoncée plus haut, note 3, sur la distinction des trois offrandes. Il est possible aussi que ces trois genres d’offrandes placées dans le vase du sacrifice aient un rapport symbolique avec l’éther, l’air et la terre.
  137. Le mortier s’appelle ici ouloûkhala. Voy. lecture i, note 6, col. 1, pag. 49. La pierre dont on vient de parler est le foyer destiné au feu du sacrifice.
  138. Figure peu décente. Le Dictionnaire de M. Wilson traduit ce mot par 1o mons Veneris, 2o the hip and loins.
  139. La mère de famille se chargeait des détails du sacrifice relatifs au ménage, des fleurs, du lait, du beurre, etc. Elle entrait dans la salle, et en sortait pour donner ses ordres au dehors.
  140. Voy. lecture i, note 2, col. 1, pag. 47. Avec le bois de sami on fait une pièce cubique de cinq pouces de diamètre, qui a une petite ouverture dans la partie supérieure. On y introduit un morceau d’aswattha, que deux personnes tirent et font tourner par le moyen d’une lanière.
  141. Vanaspati veut dire arbre. Il m’a semblé qu’ici ce mot signifiait un morceau de bois, et que ce morceau de bois, c’était le pilon.
  142. Tel est le sens extraordinaire que j’ai cru devoir donner au mot hari. Il faut se rappeler qu’il est formé de hri.
  143. Je suppose que le mortier est de bois, comme le pilon ; voilà pourquoi le mot vanaspati est au duel.
  144. Ce mot n’est pas dans le texte. Il est donné par les commentateurs, qui croient, les uns, que c’est un dieu ainsi nommé, les autres, que c’est ou un ministre du sacrifice, ou le père de famille lui-même.
  145. Le Soma, pressé par le pilon dans le mortier, était jeté dans un bassin (tchamou) (lecture i, note 3, col. 2 pag. 48) ; on le versait sur un filtre, qui était une peau de vache percée.
  146. Voy. lecture i, note 1, col. 2, pag. 45.
  147. Satchîvas est traduit ordinairement par puissant ou par sage. Mais comme on dit que Satchî est l’épouse d’Indra, et que les prières sont les épouses des dieux, je donnerais volontiers à Satchî le sens de prières : car satcha veut dire parler. Cependant j’expliquerais aussi ce mot par sagesse, reconnaissant la sagesse pour l’épouse d’Indra, comme Métis est celle de Jupiter.
  148. Le commentaire, en nous disant que ces deux personnages sont les messagères d’Yama ou de la mort, ne donne pas d’autres détails.
  149. Les deux Aswins représentent les deux crépuscules, ou plutôt le jour et la nuit. Leur char, c’est le ciel dont une partie est éclairée, et l’autre plongée dans l’obscurité. Il en résulte que le poëte dit qu’une des roues de ce char (une des deux surfaces célestes) est dans une région inaccessible, et l’autre dans notre atmosphère.
  150. Voy. lecture i, note 1, col. 2, pag. 1.
  151. Des deux pièces de l’aranî naît le feu, ce sont là les deux mères qu’on donne à Agni.
  152. Dans la nomenclature des cinq éléments, l’air est avant le feu. Je n’ai donc pu admettre le sens donné par le commentateur. Le Vent (Mâtariswan) aperçoit le feu naissant ; il vient de son souffle l’exciter, et augmenter sa force.
  153. Les anciens livres représentent Manou comme un homme pieux et ami des sacrifices. Voy. lecture i, note 2, col. 1, pag. 8. Le sacrifice du matin, auquel préside Agni, amène la naissance du Soleil, lequel éclaire et révèle le ciel à l’homme.
  154. Pouroûravas, petit-fils de Manou, est renommé, dans l’antique histoire de l’Inde, pour avoir organisé le culte du feu et pour avoir inventé l’aranî.
  155. Allusion à l’opération par laquelle on tire le feu de l’aranî.
  156. Le commentateur explique ce passage en représentant le feu âhavanîya porté à l’orient, et ensuite le feu garhapatya établi à l’occident.
  157. Il est ici question, suivant le commentateur, des bipèdes et des quadrupèdes. Ne serait-ce pas plutôt la nourriture solide et la nourriture liquide ?
  158. Comme au vers 4 de cet hymne, ce sont les deux pièces de l’aranî. On peut entendre qu’Agni brille entre le ciel et la terre, considérés comme père et mère du monde.
  159. Tout ce passage fait allusion à une légende dont les détails me sont inconnus. Il paraîtrait qu’Agni, incarné dans la famille d’Angiras, était devenu le prêtre protecteur de Manou et de ses descendants. Ilâ, fille de Manou et mère de Pouroûravas, l’eut à son service. Sous Nahoucha, petit-fils d’Ilâ, ce même Angiras exerça l’autorité et commanda les armées ; c’est l’opinion du commentateur, qui donne le mot sénâpati pour synonyme de vispati. Remarquez que le nom d’Ilâ, fille de Manou, est aussi le nom de la prière dans le sacrifice, et que la légende, sous ce rapport, pourrait bien être une allégorie ; car cette incarnation d’Agni n’est autre chose que sa naissance dans le sacrifice.
  160. Cet hymne est l’ouvrage d’Hiranyastoûpa, fils d’Angiras, et par conséquent d’Agni incarné dans cette famille.
  161. Allusion aux quatre points principaux de l’horizon, vers lesquels le feu lance à la fois ses clartés.
  162. Dans ces anciens temps on immolait quelquefois une vache, pour complaire aux hôtes que l’on recevait le jour d’un sacrifice solennel ; de là vient qu’un hôte se nommait Goghna. Nous verrons plus loin le sacrifice du cheval. Le commentateur indique un autre sens ; il ne s’agirait pas d’une victime vivante, pasou, mais d’une offrande, d’un présent fait à une personne vivante, par exemple, aux prêtres assistants.
  163. Soit à cause de sa générosité, soit à cause de son bonheur.
  164. Yayâti est le cinquième roi de la race lunaire.
  165. Ces grands exploits d’Indra sont des allégories toutes physiques. Ahi, c’est le nuage se développant comme un serpent ; Vritra c’est le nuage obscur qui voile le soleil, âvaraca.
  166. Voy. lecture i, note 5, col. 1, page 48.
  167. Les tricadrous sont, à ce qu’il paraît, trois sacrifices ; les jours où ils arrivent sont appelés tricadrouca, autrement âbhiplâvica. Le commentaire parle de ces trois sacrifices, qui se nommeraient djyotih, gôh, ayouh ; mais il ne donne pas d’autres détails. Le mot cadrou semblerait indiquer des cérémonies faites pendant un temps noir et couvert.
  168. Nom d’Indra, dispensateur des richesses.
  169. Le poëte donne à la mère de Vritra le nom de Dânou, comme qui dirait Donatrix. Je n’ose pas caractériser cet être allégorique. Serait-ce la vapeur dont se forme le nuage ?
  170. Voy. lecture i, note 7, col. 1, page 44. Ce mot Pani doit avoir le sens d’avare.
  171. C’est le nombre ordinaire par lequel on désigne en général les fleuves : tels le Gange et autres, dit le commentaire.
  172. Nombre défini pour un nombre indéfini.
  173. Cette armée, dit le commentateur, ce sont les nuages. Je croirais que le poëte désigne ainsi la troupe des Marouts.
  174. Les mots père de famille servent de traduction au mot Arya, que je regarde comme fort important. Mon opinion particulière est que la colonie indienne conduite par Manou, et qui s’est établie dans l’Aryâvartta, venait des contrées qui sont à l’occident de l’Indus, et dont le nom général était Arie, Ariane, Hiran. Le mot simple arya, et le mot de descendance, ârya, devaient être la dénomination générale des colons, qui devinrent propriétaires des terres. De là résulte que dans la langue ordinaire, le mot Arya, cessant d’être un nom de peuple, a conservé le sens de maître ; plus tard encore, le système des castes ayant été établi, les hommes attachés à la culture de la terre ont conservé la dénomination d’Arya, confondue avec celle de Vésya. Cependant les anciens habitants du sol indien avaient été repoussés sur les montagnes, et, contraints de vivre de déprédations, ils avaient reçu le nom de dasyou (brigand). Peut-être aussi devaient-ils ce nom à leur caractère barbare, qui contrastait d’une manière étonnante avec celui des Aryas, moral et religieux ; tellement que le mot arya ou ârya était devenu synonyme de bon, de respectable. À mesure que les colonies ariennes se sont multipliées, le nom du peuple s’est perdu, pour faire place à des dénominations nouvelles tirées des lieux ou des personnages ; mais je pense que comme le mot Hellène a désigné en général les peuples grecs, le mot Arya a longtemps aussi distingué les nations indiennes, et qu’on le trouve plus d’une fois avec cette signification dans les hymnes que je traduis. Ici Indra reçoit cette épithète : c’est une manière d’identifier le dieu avec la nation par le moyen d’un mot à double entente et cher à tous les souvenirs : Indra est maître, il est Arya. Tel est le nom que l’on donna dans la suite à la déesse Pârvatî ; elle fut aussi Arya.
  175. C’est-à-dire le Dasyou, comme tout à l’heure Indra était appelé Arya. On pourrait croire, en lisant cet hymne, que c’est un chant allégorique en l’honneur d’une victoire remportée sur les brigands de la montagne, sous la protection du dieu national Indra.
  176. Ainsi s’appellent les compagnons de Vritra. La mère de Vritra, Dânou, tire son nom du verbe , qui signifie donner. Le mot Sanaca a une étymologie analogue : san veut aussi dire donner. Serait-ce un simple effet du hasard, que le rapprochement de Dânou et de Danaé chez les Grecs ?
  177. Ce mot est la traduction de Navagwa, qui semble être le surnom d’une tribu d’Angirasas.
  178. Vritra est quelquefois appelé Souchna (le Desséchant), parce qu’en retenant les eaux il cause la sécheresse. Les mauvais génies ont des cornes comme les animaux sauvages, qu’au dernier vers de l’hymne précédent on appelle aussi Sringin. Voy. lecture i, note 1, col. 1, page 7.
  179. Voy. lecture i, note 2, col. 2, page 6.
  180. Poëte et Richi protégé par Indra, qui le prit un jour sur son char.
  181. Les noms de Dasadyou et de Switrâ, sa mère, ne me sont connus que par les détails que donne ici le poëte.
  182. Le nombre trois, ainsi répété, fait allusion sans doute au trichavana, ou aux trois moments de la journée où se font les sacrifices. La nuit, comme le jour, est partagée en trois époques.
  183. Le commentateur pense qu’il est ici question de Soma, dieu de la lune, et de l’une des constellations considérées comme ses épouses. Je crois que Soma est la libation, et que sa bien-aimée est la flamme d’Agni. Ces aliments dont est chargé le char des Aswins sont, ou les offrandes qu’on fait à ces dieux, ou les biens dont ils comblent les hommes.
  184. L’Aurore. Cependant ce pourrait être la Nuit, qui, succédant au Jour, peut être considérée comme la fille du Soleil.
  185. Jusqu’à quel point ces trois espèces de médicaments n’auraient-ils point de rapport avec les trois espèces de biens dont parle le vers 5, lecture ii, hymne 8 ?
  186. Ou bien : à celui pour qui je fais des libations ; car le mot soûnou a ces deux sens.
  187. Samyou, fils de Vrihaspati, est le type du bonheur. Ce mot signifie heureux.
  188. Ce sens est celui du commentaire ; mais on peut en trouver un tout autre. Ces mots signifient tout simplement : triplex auxilium ferte. Les trois humeurs du corps, suivant le système indien, sont le vâta, le pitta et le slechman, l’air, la bile et le phlegme.
  189. Le mot parâvatas me semble désigner la région qui est de l’autre côté de l’horizon, du côté opposé à celui où nous sommes.
  190. Ce sens est entièrement donné par le commentateur, qui suppose qu’il est ici question des trois Védis, désignés par les noms d’Echtica, de Pâsouca et de Sômica.
  191. Voy. lecture ii, note 3, col. 1, page 21. Ces sept rivières peuvent être aussi les sept espèces d’offrandes.
  192. Explication du commentaire.
  193. Ces trente-trois dieux sont, dit-on, les douze Adityas, les huit Vasous, les onze Roudras et les deux Aswins.
  194. L’opinion indienne est que le soleil ne quitte pas le ciel, mais qu’arrivé à l’occident avec une face lumineuse, il retourne par la même route à l’orient avec une face ténébreuse ; ce que l’auteur exprime par l’idée de rayons noirs, crichna radjas.
  195. Voir la note précédente.
  196. Suivant le commentateur, ces trois mondes (dyâvas) sont le dyouloca, le bhoûrloca et le monde d’Yama, où les âmes des morts se rendent par la route de l’air.
  197. Voy. lecture ii, note 2, col. 1, page 55. Ce mot asoura se traduit par les mots sarvéchâm prânada.
  198. On est au moment du sacrifice qui précède l’aurore.
  199. Les points cardinaux, si l’on compte le zénith et le nadir, sont au nombre de dix. Les huit points que l’on marque à l’horizon sont les quatre principaux (disas) et les quatre intermédiaires (pradisas). Le commentateur donne le nom de vidisas aux points intermédiaires.
  200. Voy. plus haut, lecture ii, note 3, col. 1, page 61.
  201. Voy. lecture ii, note 2, col. 1, page 52.
  202. Voy. lecture ii, note 3, col. 2, page 54.
  203. Plus haut, note 4, col. 2, page 63.
  204. Le texte porte Médhyâtîthi ; je crois que c’est le même que Médhâtîthi, fils de l’ancien Canwa. On dit aussi que Médhâtîthi et Médhyâtithi sont deux frères, fils de Canwa.
  205. Cette strophe renferme les noms de plusieurs personnages appelés râdjarchis. Yadou est un des cinq fils d’Yayâti, cinquième roi de la race lunaire. Tourvasou, appelé ici Tourvasa, était son frère. Je ne sais rien d’Ougvadéva ni des autres. Cette histoire antique cite plusieurs Vrihadrathas. Je pense que la mémoire de ces princes, renommés pour leur piété, est ici évoquée par le poète reconnaissant ; leurs mânes sont invités à venir siéger au sacrifice.
  206. Ces mauvais génies portent ici le nom d’Yâtoumâvân ; plus haut, au vers 10 de l’hymne précédent, c’était Yâtoudhânan.
  207. Ce Canwa, dont le nom est cité dans le cours de l’hymne, est-il le même que celui dont nous avons parlé, lecture i, note 1, col. 2, page 48 ? Le mot Ghora, qui signifie terrible, et qui est le nom de son père, peut avoir quelque analogie de sens avec le mot Apratiratha, qui implique l’idée d’invincible. Cependant je pense qu’il faut distinguer le fils de Ghora et le fils d’Apratiratha ; que ce dernier est un ancien Canwa, souche d’une famille sacerdotale, et père de Médhâtîthi ou Médhyâtîthi, ici mentionné, et que le fils de Ghora est un membre moins ancien de la famille des Canwas, lequel rappelle, dans cet hymne un des titres d’honneur de son aïeul. Le commentateur dit quelque part que le fils de Ghora devint fils de son propre frère Canwa.
  208. Ces vaches, comme nous le savons, ce sont les nuages ; leur lait, c’est la pluie.
  209. Le lieu de la naissance des Vents est la terre ; considérée comme leur mère, la terre porte le nom de Prisni. Voir lecture ii, note 5, col. 1, page 3. L’air, placé entre le ciel et la terre, reçoit les Vents.
  210. Voy. lecture ii. note 4, col. 2, page 14. Nirriti, déesse du mal, me semble être ici la Maladie ; la soif dont il est question, doit être celle de la fièvre. Voy. lecture i, note 1, col. 1, page 10.
  211. Le poète emploie ici le mot sloca pour désigner toute espèce de vers.
  212. Voy. lecture i, note 1, col. 1, page. 10.
  213. Nous ne ferons plus d’observation sur cette locution connue du lecteur, et qui se rapporte aux efforts que l’on fait pour extraire le feu de l’aranî. Voy. lecture ii, note 1, col. 12. page 16.
  214. Saraswatî ou Ilâ, appellée ici Sûnritâ. Voy. lecture i, note 1, col. 1, page 3.
  215. Le mot Ilâ est pris ici, par le commentateur, pour le nom de la fille de Manou. Voy. lecture ii, note 3, col. 2, page 19. Je crois qu’il est question de la déesse Ilâ ou Saraswatî.
  216. Le poëte suppose que c’est Agni lui-même qui fait la prière par la bouche du prêtre, hotrimoukhésthitah.
  217. Le commentateur fait rapporter toute cette strophe à Brahmanaspati. Les royaux protecteurs ici mentionnés, ce sont les Adityas.
  218. Je traduis le mot vimoutch par libation. Voy. lecture ii, note 3, col. 1, page 52. Le commentateur le traduit par nuage. Si Poûchan est une forme du soleil, je ne conçois pas qu’il soit l’enfant du nuage. Aussi le commentateur prétend-il qu’ici Poûchan, c’est la fécondité de la terre, qui est un effet de la pluie. Je n’ai pu adopter son explication.
  219. Roudra, dieu terrible et chef des vents, doit être l’air personnifié. C’est, sous d’autres noms, Vâyou, Mâtariswan, Marout.
  220. Voy. note 4, col. 1, page 63.
  221. Soma, comme nous l’avons déjà vu, est la libation personnifiée : on lui donne aussi le nom de Indou. Les deux mêmes noms s’appliquent encore à la lune.
  222. On explique ce mot de diverses manières. Djâtavedas est le dieu qui connaît les choses nées, ou dont le bien est né ; c’est-à-dire le dieu qui pénètre dans tous les êtres pour les animer, ou qui est l’auteur de tous les biens parmi les êtres. Je ne cite pas les autres explications.
  223. Prascanwa est le fils de Canwa, auteur de l’hymne précédent.
  224. Ou bien : un prêtre qui est un mortel comme nous. C’est le double sens aussi du mot Manouchvat, qui est dans le vers suivant.
  225. Voy. lecture iii, note 3, col. 2, page 63.
  226. Les Pourânas citent Priyavrata, mais non Priyamédha, comme fils de Manou Swâyambhouva.
  227. Atri est un ancien Richi, ainsi qu’Angiras.
  228. Viroûpa est un prince, fils d’Ambarîcha, et arrière-petit-fils de Manou.
  229. Le texte porte Sindhoumâtarâ : ce mot peut aussi signifier enfants de la mer ; le ciel, représenté par les Aswins, semble sortir de la mer, et le poëte peut la donner comme la mère de ces deux divinités.
  230. Les Aswins, naissant à l’horizon, sont censés devoir traverser une mer de vapeurs. Il est naturel que le poëte leur donne un vaisseau ; nous verrons même plus loin que ce vaisseau a cent rames.
  231. Le soleil n’est pas encore levé, et le ciel est à peine visible. Cependant les libations sont toutes préparées.
  232. Soudas est un fils de Tchyavâna. L’auteur l’appelle Soudas et non Soudâsa, comme portent les Pourânas. Ce mot signifie libéral ; le commentateur en fait un nom commun.
  233. Je suppose que l’auteur désigne ici les biens qui peuvent provenir de l’air par les pluies, et du ciel par la chaleur du soleil.
  234. Ce passage renferme le mot vridjanam, dont le sens est embarrassant parce qu’il est varié. Il me semble qu’en recourant à la racine vridj (couvrir), on arrive à se rendre compte des diverses significations de vridjanam : c’est la chose qui couvre, qui protège, qui défend ; c’est le ciel, le sacrifice, le combat. Dans un sens passif, c’est la chose dont il faut se garantir, comme le mal, la nuit.
  235. Ces vaches, nous le savons, sont les nuages qui rougissent au lever de l’aurore.
  236. Littéralement, le bipède.
  237. Ces chevaux, ce sont les rayons du soleil qui annoncent le jour. Voilà pourquoi le poëte leur donne le nom de Kétou.
  238. Le commentateur dit que le soleil, en un demi-clin d’œil, fait 2,202 yodjanas.
  239. Le mot visah semblerait indiquer qu’on désigne ici les Marouts, plebs divina.
  240. Turdus salica.
  241. Nauclea cadamba.
  242. Ce Savya, fils d’Angiras, est, dit-on, Indra lui-même. Angiras forma dans le sacrifice, le vœu d’avoir un fils semblable à Indra. Il lui naquit Savya. Voy. pag. 59, col. 2, note 3.
  243. La légende raconte qu’Indra, invoqué par Médhâtîthi, fils de Canwa, vint, sous la forme d’un bélier, boire le soma.
  244. Voy. lecture ii, note 1, col. 1, page 51.
  245. Voy. page 44, col. 1, note 7.
  246. Nom d’un ancien Richi. Renfermé par les Asouras dans une maison de travail et de peine (pîdayantragriha) qui avait cent portes, il souffrait de la chaleur : il fut miraculeusement rafraîchi par une pluie que lui envoya Indra ou les Aswins.
  247. Vimada, Râdjarchi, avait été choisi pour époux par la fille de Pouroumitra : ses rivaux voulurent lui enlever son épouse. Il fut protégé par Indra ou par les Aswins.
  248. Voy. page 61, col. 1, note 1. Dânou est la mère de Vritra, et son nom indique les biens dont le nuage est rempli. Le mot dânoumat pourrait se traduire par riche et opulent.
  249. Nous avons vu ailleurs qu’un de ces Asouras porte le nom de Souchna, ou le Desséchant. L’absence des nuages, retenus par lui, entraîne la sécheresse, et la perte des biens de la terre.
  250. Nom d’un Asoura.
  251. Qualification des Asouras.
  252. Nom d’un prince.
  253. Voy. page 61, col. 2, note 3.
  254. Voy. page 47, col. 1, note 1.
  255. Nom d’un Asoura.
  256. Nom d’un saint Richi.
  257. Nom d’un Asoura.
  258. Voy. page 61, col. 2, note 2.
  259. Nom d’un Richi, qui se trouva enterré sous une de ces fourmilières si hautes qu’elles ressemblent à des huiles.
  260. Ousanas, autrement appelé Soucra, est considéré comme le précepteur des Asouras. C’est le nom qu’on donne à la planète de Vénus. L’astre qui persiste le dernier dans le ciel semble vouloir résister à la puissance d’Indra.
  261. Sâryâta est un Râdjarchi, fils de Saryâti et petit-fils de Manou ; il donna sa fille à Tchyavâna.
  262. Voy. page 50, col. 1, note 2.
  263. On peut supposer que Vrichanaswa est le même que Vrihadaswa, prince de la dynastie solaire. Cependant cette légende me paraît allégorique : Vrichâswa est une épithète du soleil.
  264. Les Padjras sont une famille descendue d’Angiras ; ils firent des sacrifices pour obtenir des troupeaux.
  265. Le mot vrichabha signifie aussi taureau.
  266. Ce Savya, fils d’Angiras, est, dit-on, Indra lui-même. Angiras forma, dans un sacrifice, le vœu d’avoir un fils semblable à Indra. Il lui naquit Savya. Voy. pag. 59, col. 2, note 3.
  267. Nom d’un Asoura.
  268. Une légende raconte que, dans un sacrifice qui va être célébré en l’honneur des dieux, naît d’abord (c’est-à-dire est apporté) Agni, le feu du sacrifice, et, en second lieu, le mortier dans lequel on écrase les graines ; en troisième lieu, naît une autre personne : c’est Soma ou la libation, qui prend le nom de Trita. Trita est dans la coupe du sacrifice : les Asouras arrivent, et placent des gardes pour empêcher la consommation du sacrifice. Trita donne la mort à ces gardes.
  269. Voy. page 48, col. 1, note 5
  270. Yava ; ce mot est ici pour toute espèce de grains.
  271. Nom d’un Asoura.
  272. Nom d’un saint richi.
  273. Deux noms d’Asouras.
  274. Autre Asoura.
  275. Voy. plus haut, page 33, col. 1 ,note 8.
  276. J’ai mieux aimé ces nombres indéfinis que celui de 60,099. Voy. plus bas, page 78, col. 2, note 5.
  277. Nom d’un prince.
  278. Autre nom d’un prince.
  279. Voy. page 62, col. 2, note 2.
  280. Voy. Nom d’un saint richi.
  281. Ayou est un nom connu ; il y eut plusieurs princes de ce nom. Le plus célèbre fut le fils de Pouroûravas.
  282. Le texte dit Mahâradjâ.
  283. Indra porte ici le nom d’Asouva.
  284. Asoura, déjà nommé.
  285. Nom d’un prince.
  286. Voy. lecture iii, note 2, col. 1, page 65.
  287. Voy. lecture iii, note 2, col. 1, page 65.
  288. Voy. lecture iii, note 2, col. 1, page 63. Le commentaire dit que Tourvîti était de la famille des Vayyas.
  289. Deux sens sont présentés pour ce passage par le commentateur. Étasa est le nom d’un Richi, qui, porté sur son char, échappe au danger ; ou bien, Indra aurait, dans un combat, sauvé les chars et les chevaux des princes plus haut nommés ; car le mot étasa signifie cheval. J’ai choisi le premier sens : on retrouve ailleurs ce personnage d’Étasa. Il eut une querelle et par suite un combat avec Soûrya, fils de Swaswa, lequel, désirant un fils, fit un sacrifice au Soleil, et obtint que ce dieu s’incarnerait dans son enfant. Étasa fut, dans cette circonstance, protégé par Indra.
  290. C’est le même nombre de milliers que celui qui a été mentionné plus haut, au vers 9 de l’hymne 7. C’est aussi le nombre des torrents formés par la pluie, lecture II, hymne 13, vers 1.
  291. Famille issue du sage Bhrigou, et qui a beaucoup d’importance dans l’antique histoire de l’Inde.
  292. Allusion aux sept offrandes ou libations qui ont lieu à raison des sept rayons que l’on reconnaît au feu, et que l’on appelle ses sept langues ; comme il y a aussi sept espèces de chants qu’on lui adresse.
  293. On conçoit que les offrandes et les mets du sacrifice entretiennent et nourrissent le feu.
  294. Nom d’Agni, qui signifie ami de tous les hommes.
  295. Voy. page 61, col. 2, note 2.
  296. Nous avons déjà vu ce mot, qui est un des noms allégoriques du nuage.
  297. Famille issue du sage Bharadwâdja : un des membres de cette famille monta sur le trône de la dynastie solaire.
  298. Ce fils de Satavân est sans doute celui qui offre le sacrifice.
  299. Voy. page 59, col. 1, note 2.
  300. Bhrigou est ici le nom d’un sacrificateur antique, qui allume le feu sacré, et l’excite avec le souffle du vent.
  301. Autre sage, dont les enfants ont formé une famille sacerdotale.
  302. Voy. page 48, col. 1, note 5.
  303. Voy. page 48. col. 2, note 4.
  304. Ce sont là les trois mondes, dit le commentateur.
  305. Voy. page 65, col. 1, note 2.
  306. Voy. page 76, col. 1, note 7.
  307. Voy. page 41, col. 2, note 1.
  308. Voy. page 44, col. 1, note 7.
  309. Voy. ibid. Saramâ est la prière ; et son nourrisson, c’est le sacrifice, c’est l’offrande.
  310. Voy. ibid.
  311. Dans ce vers se trouvent deux mots dont le sens est assez problématique : dasagwa et navagwa (voy. lecture iii, note 5). Il paraît que ce sont deux espèces de prêtres Angirasas, dont les uns faisaient des sacrifices pendant neuf mois, et les autres pendant dix mois. Une autre explication, que j’ai préférée, distingue ces Angirasas en deux classes, dont l’une chante sur des mesures de neuf syllabes, les autres sur des mesures de dix syllabes. (Les mètres Vrihatî et Pankti ont quatre padas, composés, dans le Vrihatî de neuf, dans le Pankti de dix syllabes.) Ces prêtres, dans l’exercice de leurs fonctions, seraient au nombre de sept, nombre sacré, comme nous l’avons déjà vu (voy. lecture iv, note 69, et alib.). Peut-être aussi ces sept prêtres ne sont-ils qu’une personnification des sept espèces de mètres ou tchhandas sur lesquels se composent les hymnes.
  312. C’est le Gange et les autres, dit simplement le commentateur. C’est l’explication qu’il donnait aussi lorsqu’il était question des sept rivières (voy. page 61, col. 1, note 3). Nous ne pouvons dire s’il est ici question de quatre fleuves principaux de l’Inde, ou de ces quatre fleuves qu’une mythologie plus moderne fait sortir du Mânasarowara.
  313. Un des noms du soleil.
  314. Allusion aux nuages qui grossissent peu à peu et se chargent d’une pluie bienfaisante.
  315. Je pense qu’il est question dans cette strophe des prières et des invocations qui forment l’ensemble du culte adressé à Indra : on sait que les prières sont considérées comme les épouses des dieux, et précisément cette strophe fait allusion à cette opinion. Le vers suivant semble devoir confirmer ce sens.
  316. Voy. page 62, col. 2, note 2.
  317. Prince, fils de Mândhâtri, de la dynastie solaire.
  318. Voy. page 71, col. 1, note 1.
  319. Nom d’un Asoura, suivant le commentateur.
  320. Ils sont appelés Asouras.
  321. Ces mauvais génies portent le nom de Satwânas. Ils appartiennent à la classe des Bhoûtas.
  322. J’ai pensé que l’auteur désignait ici l’offrande personnifiée, épouse d’Agni. Les vents semblent attendre que le sacrificateur les appelle à venir prendre part aux libations. Ce sont eux qui excitent le feu. C’est Mâtariswan qui l’apporte à Manou.
  323. Le poëte désigne ainsi ces nuages rougeâtres qui annoncent le vent.
  324. Je ferai remarquer que le mot prichati signifie à la fois daim et goutte de pluie.
  325. Le commentaire dit que le dieu se cache dans l’Aswattha (aswatthagouhâ), bois dont est formé l’aranî.
  326. Le mot pada contenu dans ce vers est amphibologique ; il s’explique par pied dans ses deux significations, membre du corps humain et membre de vers.
  327. C’est-à-dire les libations.
  328. Je crois que c’est une allusion au bruit que fait le feu recevant les libations.
  329. Dieu de la libation.
  330. Il y a ici deux mots, tcharath et vasatî, qui, suivant le commentaire, sont des invocations faites aux crépuscules. Je suppose que vasatî est celle du soir, quand on va rentrer à la maison, et tcharath celle du matin, quand on se lève pour marcher et mettre les troupeaux en mouvement.
  331. Srouchti me semble être le père de famille qui dispose le sacrifice, et qu’il faut distinguer du prêtre qui dirige les cérémonies. Voy. page 53, col. 1, note 1.
  332. Le texte emploie le mot gouhâ, pour désigner la retraite d’Agni au sein de l’aranî. Voy. page 82, col. 2, note 1.
  333. J’ai pris adja dans le sens de voyageur.
  334. Avec les branches d’arbre qui forment le bûcher, le feu est nourri, et le poëte appelle ces branches les mères d’Agni. Cependant le mot prasoûh, traduit par l’idée de mère, peut ne signifier que branches.
  335. Traduction du mot damoûnas, épithète d’Agni.
  336. Agni est produit par les prêtres, et il devient pour eux un protecteur paternel.
  337. Suivant le commentateur, le mot visah a un sens plus étendu, et se rapporte au peuple des prières appelées au sacrifice.
  338. Ce sens est peut-être hasardé, je le crois juste : les choses mobiles et immobiles.
  339. Je suppose que l’auteur fait ici allusion à la coutume où l’on pouvait être de faire les sacrifices sur une colline.
  340. Soir et matin, c’est-à-dire aux moments où la nuit commence et finit, le sacrifice a lieu. C’est dans cette circonstance que j’ai cherché le sens de kchapâvân, nocte prœditus.
  341. Il paraît que cet hymne n’est pas achevé : il manque un vers.
  342. Il est ici question des Prières, peut-être de ces Ritchas, filles d’Angiras. Ces Ritchas doivent être les prières composées par Angiras, et, par conséquent, le poëte pourrait les appeler les sœurs des descendants de ce même Angiras.
  343. Voy. page 44, col. 1, note 7.
  344. Les sœurs, dont cette strophe fait mention, me semblent représenter les diverses espèces d’offrandes. J’avoue que le sens de ce vers, considéré matériellement, pourrait se rapporter aux parentes du père de famille, chargées de pourvoir aux besoins du sacrifice.
  345. Voy. page 78, col. 2, note 6.
  346. Ces mots sont la traduction de l’épithète dwibarhâh, qui s’entend d’une chose placée entre deux objets, utrimque stipatus. On l’emploie de même pour Indra ou pour l’air, placés entre le ciel et la terre.
  347. Voy. page 51, col. 1, note 3.
  348. Le lecteur a compris que ce prince, né de la semence d’Agni, c’est le soleil.
  349. Le soleil, dit-on, en un demi-clin d’œil, parcourt 2,202 yodjanas (page 72, col. 1, note 4.)
  350. C’est-à-dire aux beaux rayons.
  351. Hors du sacrifice, Agni est caché dans l’aranî.
  352. Sans doute les Angirasas.
  353. Le sacrifice est comparé à un char que construisent les prêtres en l’honneur d’un dieu. Il semble donc, avant que le feu ait été allumé, que les sacrificateurs soient à pied, padavyah : car tel est le mot du texte. On peut supposer aussi que les prêtres sont ainsi appelés, des padas ou pieds qui composent les hymnes.
  354. J’ai cru remarquer que le mot sarad devait quelquefois signifier libation : la libation, en effet, a un point de comparaison avec la pluie d’automne.
  355. Il m’a semblé que ces Dévas, Angirasas ou autres, étaient des personnifications des pratiques et des cérémonies qui accompagnent le sacrifice. Nous les voyons rechercher Agni, le trouver au sein de l’aranî, le placer sur le foyer, et l’arroser de libations. Donnez un corps à ces rites divers, et vous verrez, suivant l’imagination du poëte, agir des personnages que vous appellerez Dévas, Angirasas, s’ils allument le feu, et Marouts, s’ils le soufflent.
  356. Ce sont les invocations qui accompagnent chacune des cérémonies.
  357. Ce nombre est mystérieux (voy. lecture iv, note 2, col. 1, page 78) ; c’est trois fois la quantité de rayons attribués au feu ; on compose aussi de vingt et une bûches le foyer du sacrifice. Voy. lecture ii, note 2, col. 2, page 51.
  358. Voy. page 61, col. 1, note 3. Les sources de ces fleuves sont au ciel.
  359. Voy. page 44, col. 1, note 7.
  360. Voy. page 54, col. 1, note 3, et page 55, col. 1, note 4.
  361. Voy. page 41, col. 2, note 1 ; page 50, col. 2, note 3.
  362. Le poëte fait allusion à la légende d’Angiras.
  363. Voy. page 79, col. 1, note 1.
  364. Je pense que ce mot Rahoûgana est le même que Raghougana. Raghougana est présenté par le commentateur comme le père de Gotama, auteur de cet hymne ; ce Gotama était le pourohita des rois Gourou et Srindjaya.
  365. Cet hymne, en partie, célèbre Agni, surnommé Vêdyouta, c’est-à-dire cette forme du dieu répandue dans l’air, allumant la foudre et l’éclair, et pénétrant dans toute la nature et dans nos corps même, pour y porter la chaleur vitale. C’est peut-être le même que Twachtri, le dieu qui modèle les formes et les anime.
  366. Ahi est la personnification du nuage, et surtout du nuage orageux.
  367. Il faut savoir que les prêtres, après avoir établi Agni dans son foyer terrestre, travaillent ensuite à le transporter dans le soleil, qui va briller à l’horizon.
  368. Le poëte donne à Agni l’épithète de Sahasrâkcha (millioculus), que les Pourânas prodiguent pour Indra. Les yeux d’Agni, dit le commentateur, ce sont ses flammes.
  369. Le texte porte le mot Syéna, qui est le nom de l’épervier, et en même temps le nom d’un mètre poétique. Le commentaire indique ce sens en représentant le soma comme porté sur les ailes de la Gâyatrî. Sans cette indication du commentateur, j’aurais entendu que le soma est porté vers Indra par Agni, qui a la rapidité de l’épervier.
  370. Allusion aux formes variées et légères que prennent les nuages apportés par le vent.
  371. Nombre indéfini ; ailleurs c’est 99. Voy. p. 61, col. 1, note 4.
  372. Le commentateur dit que ces vingt personnes sont les seize ministres du sacrifice, le maître de maison et sa femme, le Sadasya ou maître des cérémonies, et le Samitri, chargé de l’aranî.
  373. Voy. p. 48, col. 1, note 5.
  374. Nom d’un Richi, auquel on a attribué un quatrième Véda. Le mot Manou, employé ici, est dans le sens d’humanité.
  375. Ce sage est sans doute celui qu’on nomme aussi Dadhîtcha ou Dadhîtchi. La forme pure de ce mot est Dadhyantch, le nominatif Dadhyan, le génitif Dadhîtchas. Les os de ce Richi servirent d’armes contre Vritra. Ce passage nous met sur la voie de l’explication à donner à la légende de Dadhyantch. Ces armes formées de ses os, ce sont les prières, Ouktâni, employées dans les sacrifices pour obtenir la pluie, ou, suivant le langage mythologique, la victoire sur Vritra. Il est à remarquer que le mot asthi, qui signifie os, a pour racine le mot asa, qui signifie lancer, et peut, par conséquent, être synonyme du mot trait. Le commentaire dit que Dadhyantch était fils d’Atharvan ; il l’appelle Atharvana. Nous retrouverons ce mot dans la lecture suivante.
  376. Voy. p. 61, col. 2, note 2.
  377. Ce sont les prières.
  378. Le commentateur explique ce mot par dhânâmisrita.
  379. Cette strophe représente les prières et les rites sacrés remplissant leurs fonctions. Le dieu qu’ils honorent est Agni.
  380. Voy. p. 44, col. 1, note 7. Ce troupeau céleste, ce sont les nuages qui fertilisent la terre, et qui sont amenés au ciel par les prières des Angiras.
  381. Atharvan (voy. p. 90, col. 1, note 1) me paraît avoir institué les sacrifices du matin, dans lesquels on demande aux dieux la pluie que les Asouras retiennent prisonnière.
  382. Ce fils de Cavi, cet Ousanas, est le même que Soucra (voy. p. 73, col. 2, note 2). Ousanas, régent de la planète de Vénus, est aussi le précepteur des Asouras ou génies des ténèbres, qu’il semble diriger le matin et le soir. Il soutient la cause de ses élèves chéris. Les Dévas ont pour défenseur et pour maître Vrihaspati, c’est-à-dire Agni. Ce nom de Vrihaspati a été donné à la planète de Jupiter : quand on le rencontre dans ces hymnes, il me semble ne désigner que le dieu Agni. Pour le nom de Cavi, je renvoie à la préface qui précède le deuxième volume du Bhâgavata-Pourâna de M. Eug. Burnouf. Quant à moi, au lieu de reconnaître un personnage de Cavi, peut-être imaginaire, je traduirais volontiers le mot Câvya, qui est dans le texte, par ceux-ci : digne d’être chanté par le poëte (stoutyah).
  383. Dadhyantch (voy. p. 90, col. 1, note 2), fils d’Atharvan, régla, comme lui, le culte des dieux, et fit des hymnes que l’on appela asthi ou plutôt asthan, et avec lesquels on soutint une guerre toute spirituelle contre les mauvais génies. La légende a embelli ou dénaturé ce simple récit ; elle a, suivant l’usage, abusé des mots, personnifiant et allégorisant les choses au gré de son imagination. Dadhyantch, pendant sa vie, avait vaincu les Asouras, qui fuyaient seulement à le voir. Il mourut, et les Asouras remplirent la terre. Indra ne pouvait leur résister. Il se mit à la recherche du saint Richi, et apprit qu’il était mort, mais que ses os avaient contre les Asouras le pouvoir de la foudre. Ce Dadhyantch avait été une espèce de centaure à tête de cheval. Au milieu des montagnes, dans le lac Saryanâvân, on trouva sa tête, dont les os furent employés contre les ennemis d’Indra. Une autre légende dit que Dadhyantch avait appris le Cavatcha-vidyâ, et il devait perdre la tête, si jamais il le révélait. En faveur des Aswinî-Coumâras, il manqua à sa promesse, et la menace eut son effet. Ceux-ci remplacèrent sa tête par une tête de cheval. Indra eut besoin plus tard, contre les Rakchasas, des os de cette tête : Dadhyantch consentit à mourir pour les lui fournir. Ces légendes me paraissent un voile bizarre, mais transparent ; le mot que nous rendons ici par os n’est pas asthi, comme cela devrait être, mais asthan. Or, on entend par sthâna une division, un chapitre de livre. Il paraîtrait que les prières composées par Dadhyantch étaient détachées et sans suite : c’étaient en quelque sorte des mélanges, asthan. Ce mot, confondu avec asthi, a donné naissance aux légendes. Un disciple peut-être de Dadhyantch, nommé Aswasiras ou Tête de cheval, avait le dépôt de ces prières ; son nom aura donné lieu à un surcroît d’embellissement. (On cite le nom d’Aswalâyana, comme celui d’un Richi qui a travaillé au Rig-Véda.) Au reste, ces licences d’imagination sont communes dans les traditions anciennes : voyez, pour exemple, la fable des Têttirîyas. Il est encore possible que les prières de Dadhyantch aient commencé par le mot Aswasiras, ou bien qu’elles fussent consacrées aux Aswins. Voy. lecture viii, hymne 4, vers 12 ; et hymne 5, vers 22.
  384. Voy. p. 61, col. 1, note 4 ; et p. 89, col. 2, note 2.
  385. Dans le pays de Couroukchétra.
  386. Tchandramas, c’est la lune, dont les rayons sont regardés comme glacés.
  387. Voy. p. 53, col. 1, note 5. Dans le vers suivant, on les appelle Go-mâtaruh, mot que le commentateur entend par Fils de la terre.
  388. Ce pourrait être aussi Enfants du sacrifice.
  389. Une des formes du Soleil.
  390. Dans le style poétique, ce miracle est tout simple : les Marouts ont soulevé dans l’air et ensuite ouvert une montagne d’eau, c’est-à-dire un nuage. Mais cela ne suffisait pas aux légendaires. Ils disent donc que le Richi Gotama ayant soif, demanda de l’eau aux Marouts. À quelque distance était un étang ; les Marouts enlevèrent l’eau, et vinrent la verser dans une auge qu’ils creusèrent à côté du saint. On raconte autrement qu’ils enlevèrent un puits, et le transportérent dans l’ermitage de Gotama, et qu’au milieu de leur route, contrariés par une montagne, ils la fendirent. Ce Gotama est plus ancien que le Gotama auteur de cet hymne. Voy. p. 79, col. 1, note 1.
  391. C’est-à-dire les biens qui viennent de la terre, du ciel et de l’air. Voy. p. 63, col. 1, note 2 ; p. 51, col. 2, note 2 et p. 56, col. 2, note 4.
  392. Il désigne ou Rahoûgana son père, ou l’ancien Gotama.
  393. Mâroutam dhâman.
  394. Voy. page 93, col. 1, note 2.
  395. Les mots Bhaga, Mitra, Aryaman, Varouna, nous sont déjà connus pour être des noms du Soleil. Aditi est la Terre, ou plutôt la Nature. Dakcha doit être un nom du sacrifice personnifié, peut-être la donation. Ce fut dans la suite le nom d’un Pradjâpati et d’un saint Mouni. Le mot Asridh est considéré par le commentateur comme synonyme de Marout, dieu des vents. Soma, c’est le dieu de la libation. Nous n’avons plus rien à dire sur les deux Aswins et Saraswatî.
  396. Sans doute Indra.
  397. Nom d’un Aditya.
  398. Arichtanémi est un personnage mythologique que le commentateur semble confondre avec Garouda. Le Harivansa le représente comme fils de Casyapa et de Vinatâ, tandis que le Vichnou-Pourâna le confond avec Casyapa lui-même : telle serait aussi l’opinion de l’auteur du Mahâbhârata. Voy. Vichnou-Pourâna, p. 123, note 23. Târkcha ou Trikcha est un nom de Casyapa, et l’épithète Târkchya signifie fils de Târkcha ou Trikcha.
  399. Vrihaspati est un des noms d’Agni.
  400. Adjectif remarquable dans le texte : car c’est le pluriel de Manou Manavah.
  401. Il faut se rappeler la fonction d’Agni, qui reçoit les offrandes destinées aux dieux.
  402. Littéralement : quand nos fils seront devenus nos pères. Peut-être plus simplement : quand nos fils seront devenus pères.
  403. Voy. p. 45, col. 1, note 1. Ce passage sur Aditi me rappelle ce vers d’Orphée :

    Πάντων μὲν σὺ πατὴρ, τροφὸς ἠδὲ τιθηνὸς.

    Le nom même d’Aditi ne se retrouve-t-il pas dans cet autre vers :

    Μητέρα τ’ ἀθανάτων, Ἄττιν, ϰαὶ μῆνα ϰιϰλήσκω.

  404. Le texte donne l’épithète Evayâvah, que le commentateur rapporte au dieu du vent.
  405. Épithète du dieu Agni. Voy. p. 48, col. 1, note 1.
  406. Sans doute les vaches célestes ou les nuages.
  407. Nous avons vu, p. 42, col. 1, note 3, ce que c’étaient que Mitra et Varouna. Mitra préside au jour, et Varouna à la nuit ; autrement, l’un est le soleil de jour, l’autre le soleil de nuit, couvert de voiles noirs. Quant à Aryaman, le commentateur le regarde comme le jour astronomique, Ahorâtram.
  408. Voy. p. 52, col. 2, notes 7 et 9.
  409. Je ne pense pas que cet hymne soit consacré à la Lune ; il est destiné à célébrer le dieu de la libation, appelé Soma et Indou, noms qui ont été aussi donnés à la Lune. La puissance du Soma est celle du sacrifice lui-même.
  410. Ce mot signifie liqueur.
  411. Nom donné à Agni, et que le poëte emploie ici pour Soma. Voy. p. 48, col. 1, note 6.
  412. Ce sont les lueurs de l’aurore, colorant les nuages légers du matin.
  413. Ces deux divinités sont unies sous le nom d’Agnichoma, qui résume ainsi l’idée des deux principes humide et igné. La libation et le feu, ce sont là les deux éléments du sacrifice.
  414. Voy. p. 44, col. 1, note 7.
  415. Le commentateur fait venir le mot Brisaya de brisi, qui, suivant lui, signifie vêtement. Ce serait le même sens que celui qu’on donne au mot Vritra.
  416. Le sacrifice amène la pluie, et rend au ciel sa sérénité ; c’est le sacrifice qui, le matin, allume les feux d’Agni sur la terre, et les feux du Soleil au ciel.
  417. Les pluies obtenues par la vertu des sacrifices rendent aux rivières les eaux dont elles étaient privées par une espèce de fatalité. Cette idée n’est pas assez simple pour le légendaire, qui dira qu’Indra, en donnant la mort à Vritra, qui est un fils de Brahmane, a encouru l’imprécation lancée contre quiconque commet un crime pareil ; il impute sa faute à toute la nature, qui a besoin d’être purifiée par Agni et Soma, c’est-à-dire par le sacrifice.
  418. Le vent excite le feu, et semble l’apporter avec lui.
  419. Au milieu des chants du sacrifice, le Soma passe du mortier dans les coupes. Voy. page 89, col. 1, note 2.
  420. Les parwans sont certaines époques du mois lunaire, comme la nouvelle lune, la pleine lune, le 8 et le 14 de chaque demi-mois.
  421. Ces enfants d’Agni, ce sont les rayons du feu.
  422. Littéralement : les bipèdes et les quadrupèdes.
  423. Il me semble que, pour expliquer ce passage, il faut croire que ces deux mères de couleurs diverses, ce sont la nuit et l’aurore. Quand la nuit va finir, on allume le feu du sacrifice, qui paraît naître de la nuit même. Bientôt apparaît l’aurore, suivie du soleil : on dirait qu’elle vient de l’enfanter. Ces naissances et généalogies poétiques sont indépendantes de celles que l’imagination des poëtes peut facilement produire ailleurs.
  424. Ce mot offre plusieurs significations ; je le traduis ordinairement par azuré.
  425. Ce mot signifie brillant.
  426. Ces dix ministres, ce sont les dix doigts, qui travaillent à extraire le feu de l’arani.
  427. Twachtri n’est pas ici le nom particulier d’Agni Vêdyouta. (Voy. p. 48, col. 5, note 1 ; et p. 88, col. 2, note 2.) L’acception de ce mot est plus générale pour désigner le dieu Agni, quoiqu’une grande partie des strophes se rapporte à Twachtri.
  428. Nous aurons l’occasion de parler encore de ces trois manières de considérer Agni comme feu du sacrifice, feu solaire, feu aérien. Je prie le lecteur de ne pas oublier ces trois naissances d’Agni.
  429. Cette strophe ne peut se comprendre que par une explication sur les effets du sacrifice. Le feu, né au milieu des libations, est transporté au ciel dans le soleil et dans l’air : il y forme l’eau des nuages, et ainsi l’onde l’a produit, et il produit l’onde. Le commentateur dit : « Du soleil naît la pluie, et de la pluie naît la matière des libations. » De ces libations renaîtra le feu, et cette suite de générations d’un dieu triple est pour l’esprit du poëte une source de pensées ingénieuses, mais passablement obscures et futiles.
  430. C’est-à-dire Agni, tonnant et brillant dans les nuages. Au lieu du ciel et de la terre, ne seraient-ce pas plutôt deux nuages au sein desquels s’enferme Agni Vêdyouta ? J’avais un moment adopté ce sens.
  431. Les prêtres, tournant autour du feu sacré, prennent la droite. Il y a aussi un foyer que l’on place du côté du midi, et qui s’appelle dakchinâgni, feu de droite, parce que le midi, pour le prêtre tourné vers l’orient, est du côté droit.
  432. C’est-à-dire ses feux, ses rayons qui pompent l’eau.
  433. Le costume indien se compose de deux pièces : le vêtement supérieur et le vêtement inférieur. Pour Agni, ce double vêtement, ce sont, selon le commentateur, le ciel et la terre ; on comprendrait encore que ce sont les deux parties du nuage au sein duquel il est renfermé.
  434. Ayou, petit-fils de Manou et fils de Pouroûravas. Ce passage indique bien, je pense, qu’à l’époque où Coutsa composait cet hymne, on n’avait pas encore inventé la fable qui fait descendre les Indiens du Soleil et de la lune. Agni est bien une forme du soleil : il y a même ici le mot vivaswân, qui est devenu une épithète du Soleil, père de Manou Vêvaswata. Mais il me semble qu’Agni, honoré d’un culte particulier, propage, comme protecteur, la race de Manou, mais ne l’engendre pas, comme père. Le mot âyou quelquefois s’emploie pour le mot homme.
  435. Cette idée s’explique par la première strophe de l’hymne précédent, à l’exception que plus haut la Nuit et l’Aurore avaient chacune un nourrisson, et qu’ici elles ont toutes deux le même.
  436. Nom d’Agni, signifiant convenable à tous les hommes.
  437. Voy. p. 41, col. 2, note 1 ; p. 59, col. 2, note 3 ; p. 74, col. 1, note 1.
  438. On donne aux Vents ou Marouts le nom de Roudras.
  439. Voy. p. 45, col. 1, note 1.
  440. Nom d’un Râdjarchi. Voy. plus bas, p. 114, col. 2, note 7.
  441. Voy. p. 59, col. 2, note 3.
  442. Râdjarchi, père des cinq princes qui vont être nommés, et auxquels cet hymne est attribué.
  443. Voy. p. 73, col. 2, note 7.
  444. Le mot Crichna signifie noir : c’est le nom d’un Asoura. Cette allégorie nous représente les nuages, gros et noirs de tempêtes, et percés par la foudre d’Indra.
  445. Noms d’Asouras.
  446. Voy. p. 44, col. 1, note 7.
  447. Voy. p. 61, col. 2, note 3.
  448. Voy. plus haut, p. 99, col. 1, note 6.
  449. Nom d’un Asoura.
  450. Voy. p. 61, col. 1, note 2.
  451. C’est-à-dire Vritra.
  452. Au moment de l’orage, les nuages amoncelés semblent stationnaires : un coup de foudre vient décider la pluie.
  453. C’est-à-dire les prières, comme nous l’avons vu.
  454. Les Marouts légers comme des oiseaux.
  455. Tous ces noms sont des noms d’Asouras, c’est-à-dire des désignations des formes diverses que prennent les nuages. Ces mots ont des sens qui, probablement, indiquent ces formes plus ou moins variées.
  456. L’imagination du chantre sacré nous dépeint l’Asoura comme placé entre deux nues qui sont ses épouses.
  457. C’est le nom d’une rivière : ce mot pourrait bien être un nom commun.
  458. C’est-à-dire de l’homme.
  459. Noms de trois rivières.
  460. Voy. p. 90, col. 2, note 1.
  461. Le commentateur suppose que cet hymne est de Coutsa, ou plutôt d’un certain Richi appelé Trita, fils des Eaux : l’hymne fut composé, dit-il, dans un moment où ce dernier, précipité dans un puits, ne pouvait apercevoir les rayons de la lune. Nous avons déjà vu (voy. p. 74, col. 1, note 4) une légende sur la naissance du personnage connu sous le nom de Trita. Ici, l’on raconte que trois Richis, Ecata, Dwita et Trita, voyageaient ensemble dans une forêt ; ils arrivèrent à un puits. Après s’être rafraîchis, les compagnons de Trita le jetèrent dans ce puits, et s’emparèrent de ses effets. Une autre légende considère Ecata, Dwita et Trita comme un seul et même personnage qui renaît jusqu’à trois fois. Le sens de cet hymne peut être allégorique, car Trita, c’est le soma personnifié ; il est dans le puits, c’est-à-dire dans le bassin qui contient la libation ; il aspire à en sortir, et adresse ses plaintes à tous les dieux. Il me semble même, d’après son nom, que Trita doit être spécialement la troisième libation, ou celle du soir. Après avoir été Ecata ou première libation, Dwita ou deuxième libation, ce personnage aspire à devenir Trita. J’ai entendu dans ce sens les détails de cet hymne du soir. Telle est la position des choses dans la première strophe : la nuit arrive, et la lune brille au ciel. On n’aperçoit plus les rayons du soleil. Le Richi ou plutôt Trita prend la parole.
  462. Le texte est plus expressif. Je pense que cette strophe fait allusion au rapprochement des deux pièces de l’aranî, d’où naît le feu.
  463. Le commentateur dit que ce sont les côtés du puits qui déchirent les chairs de Trita.
  464. Comparaison triviale, sur laquelle le commentateur n’est pas d’accord avec lui-même ; car il doute si le mot sisnâni signifie queue, ou appât ou même nichée.
  465. Trita, étant le soma personnifié, habite le lieu du sacrifice, où brille Agni aux sept rayons.
  466. Trita est fils des Eaux, puisqu’il est la libation elle-même. Il veut être délivré, c’est-à-dire tiré du bassin qui le renferme, pour être jeté dans le foyer.
  467. Les cinq personnages sont : Agni sur la terre, Vâyou dans l’atmosphère, Aditya dans le ciel, Tchandramas dans la région des constellations, et Vidyout (dieu de la foudre) dans les eaux du nuage.
  468. Le texte porte le mot vrica, qui, rendu quelquefois par brigand et ravisseur, signifie aussi loup. Le commentateur, incertain, présente deux sens. Il suppose d’abord que Trita, au fond du puits, a peur que quelque loup ne vienne pour le dévorer, et que le Richi prie les rayons du Jour d’éloigner cet animal affamé. Il donne ensuite un sens trouvé par Yâsca. Le loup, c’est Tchandramas, la lune, car vrica doit se dire d’un astre quelconque soumis à une marche périodique ; les grandes ondes, ce sont les vagues célestes, c’est l’air ; et dans cette hypothèse, Trita dit que les rayons ont la propriété de faire disparaître la lune.
  469. Agni, le maître du sacrifice.
  470. Nous avons vu, p. 105, c. 2, note 3, quel est le sens de ce mot loup. En lisant ce passage, on se rappelle involontairement les vers d’Horace :

    Namque me sylva lupus in Sabina,
    Dum meam canto Lalagen, et ultra
    Terminum curis vagor expeditus,

    Fugit inermem, etc.

    Tel est aussi le premier sens que donne le commentateur ; mais il revient ensuite à l’explication d’Yâsca, qui, dans le vrica, trouve la lune, laquelle, en voyant Trita sorti du puits, poursuit tranquillement son cours.

  471. Coutsa est l’auteur de cet hymne : cependant, comme il fait parler Trita, il est possible qu’on l’ait identifié avec ce personnage. Voy. v. 6.
  472. Ce sont, dit le commentateur, les Pitris Agnichwâttas, ancêtres des dieux, et honorés par des sacrifices spéciaux. Voy. Lois de Manou, liv. III, v. 195.
  473. Le ciel et la terre.
  474. Voy. pag.48, col. 1, note 1.
  475. Nom d’Agni.
  476. Voy. pag. 106, col. 1, note 3.
  477. Savitri ou le soleil.
  478. Traduction du mot Asoura.
  479. Ce n’est pas ici une distinction de caste ; c’est la distinction de deux professions sociales, brahman (l’homme de Dieu), et râdjan (le prince) ; absolument comme, chez les anciens Grecs, le mantis et le basileus, et dans les mêmes rapports.
  480. Noms des princes anciens, fils, tous les cinq, d’Yayâti, cinquième roi de la race lunaire.
  481. C’est-à-dire : la terre, l’air et le ciel.
  482. Le poëte donne ici à Indra et à Agni le surnom d’Aswins, qui appartient à deux autres divinités.
  483. Voy. page 51, col. 1, note 1.
  484. Les Ribhous ont été élevés à la qualité de dieux, et ont eu dans les sacrifices leur part d’offrandes et d’invocations. On les a identifiés avec les rayons du soleil. C’est avec cette idée qu’il faut entendre cette strophe. Nous avons vu que les poètes du Rig-Véda ont divinisé, sous la dénomination de Déva, les diverses parties du sacrifice et les formules de prières. Les Ribhous ne seraient-ils pas les rites employés pour faire passer les clartés d’Agni dans le soleil ? Ne seraient-ils pas ces ayons du sacrifice partant pour aller illuminer le disque solaire ? On peut concevoir comment les auteurs de cette partie du rituel ont dû laisser leur nom à ces cérémonies, et par quelle confusion d’idées on a dit que des hommes ont reçu le titre de dieux.
  485. Asoura employé ici pour un nom du soleil.
  486. Voy. page 51, col. 1, note 1.
  487. Voy. p. 51. c. 1, note 1. La légende raconte que la vache d’un Richi vint à mourir, et qu’en voyant le veau privé de sa mère, le saint homme s’adressa aux Ribhous. Ceux-ci firent une autre vache, qu’ils couvrirent de la peau de celle qui était morte.
  488. Voy. page 51, col. 1, note 1.
  489. Voy. p. 51, c. 1, note 1, et hymne 1 de cette lecture.
  490. Ordinairement on compte trois Ribhous : Ribhou, Vibhwan et Vâdja. Ici, l’auteur semble faire deux classes de ces personnages, appelés les uns les Ribhous, les autres les Vâdjas. Ce dernier mot, qui signifie offrande, semble confirmer les remarques de la page 108, col. 1, note 2.
  491. C’est ici que le commentateur dit que le ciel et la terre sont une même chose que les Aswins.
  492. Miracle opéré en faveur de Samyou. Voy. page 63, col. 1, note 4.
  493. J’entends ce passage comme relatif à Agni, qui passe pour avoir deux mères (voy. p. 59, col. 1, note 2, et p. 99, col. 1, note 1), et dont le Soleil semble devoir être le fils. Le commentateur applique cette idée au dieu du vent, à Vâyou : Ce dieu, dit-il, mesure, parcourt deux mondes ; et il explique ainsi le mot dwimâtri. Il donne encore une autre solution de la difficulté qui résulte d’une double maternité. Les Vents sont fils de la Terre (Prisni) ; mais ils naissent aussi par la vertu du sacrifice, et par conséquent du feu sacré. De là provient cette singulière généalogie : Agni, feu du sacrifice, fait naître le Vent, et le Vent, à son tour, fait naître aussi le Feu par le moyen de son souffle.
  494. Ce sage est Cakchîvân. Voy. p. 50, col. 1, note 2.
  495. Noms de deux Richis jetés dans un puits par les Asouras.
  496. Voy. page 48, col. 2, note 1 ; et page 65, col. 2, note 2.
  497. Râdjarchi submergé par les Asouras.
  498. Bhoudjyou, fils de Tougra, sauvé d’un naufrage.
  499. Carcandhou et Vayya, noms de princes. La famille de Vayya est déjà nommée. Voy. p. 78, col. 2, note 3.
  500. Nom de prince.
  501. Voy. p. 73, col. 1, note 2.
  502. Noms de princes. Le dernier est déjà cité. Voy. p. 81, col. 2, note 1.
  503. Nom d’un Richi. Le commentateur intercale le nom de Ridjrâswa, et dit que celui-ci était aveugle, et Parâvridj, boiteux.
  504. Ce passereau est femelle, et il est dévoré par un loup, vrica. Yâsca (voy. page 105, col. 2, note 3, et page 106, col. 1, note 2) pense que ce loup, c’est la lune, et que le passereau, c’est le jour ou plutôt le crépuscule (pratidivasa) dévoré par cet astre, et délivré par les Aswins.
  505. Sindhou.
  506. Nom d’un Richi.
  507. Voy. p. 62, col. 2, note 2; p. 106. col. 1, note 3. Il est évident qu’il est ici question d’un Coutsa plus ancien que l’auteur de cet hymne.
  508. Noms de Richis. Narya a été nommé plus haut, p. 76, col. 1, note 3.
  509. Vispalâ, femme de Khéla, perdit un pied dans un combat. Par les prières d’Agastya, pourohita de son mari, elle en obtint un autre de fer.
  510. Deux noms de princes.
  511. Le commentaire dit que Dîrghasravas est un fils de Dîrghatamas et d’Ousidj ; que, dans un temps de sécheresse, il se fit marchand pour vivre, et obtint, par la protection des Aswins, une pluie abondante.
  512. Voy. page 50, col. 1, note 2.
  513. Nom de rivière.
  514. Nom d’un Richi.
  515. Prince de la race solaire.
  516. Richi nourri par les Aswins. Il y a une légende qui fait nourrir Bharadwâdja par une alouette. Voyez page 78, col. 2, note, 3.
  517. Voy. page 73, col. 1, note 12.
  518. Le nom de ce prince est fort connu dans les Pourânas. Il y est roi de Câsî, qui est Bénarès.
  519. Traduction incertaine du mot Casodjou, qui a quelque analogie avec le mot Câsi, nom de la capitale du roi Divodâsa.
  520. Trasadyou est fils de Pouroucoutsa, prince de la dynastie lunaire.
  521. Richi cité déjà. Voy. page 73, col. 2, note 1.
  522. Nom d’un Richi.
  523. Le commentateur confond Prithi avec Prithou, fils de Véna.
  524. Sayou est un Richi.
  525. Voy. p. 73, col. 1, note 2.
  526. Nom d’un Richi.
  527. Râdjarchi de ce nom. Un des fils de Manou porte le nom de Vicoukchi, qui présente la même idée que le portrait qu’on fait ici de Parthvan.
  528. Un descendant de Manou, par Saryâti. Voy. p. 73, col. 2, note 3.
  529. Voy. p. 44, col. 1, note 7.
  530. Voy. p. 73, col. 1, note 3. On donne ici à Vimada plusieurs épouses.
  531. Voy. page 71, col. 1, note 1. Il avait épousé une fille de Pouroumitra.
  532. Deux Richis ; le premier est cité p. 109, c. 2, n. 3.
  533. Nom d’une femme.
  534. Nom de prince
  535. Suivant le commentaire, ce jeune prince est Pouroucoutsa.
  536. J’ai pensé que ce mot était un nom propre.
  537. Le poëte donne à ces dieux l’épithète de Satacratou, affectée ordinairement à Indra.
  538. Voy., pour le nom de Coutsa, p. 62, c. 2, note 2 ; page 106, col. 1, note 3, et page 109, col. 2, note 12. Le commentateur dit que le mot Ardjouna est un nom d’Indra.
  539. Voy. p. 65, c. 1, note 2.
  540. Nom de Richi.
  541. Nom de Richi.
  542. Nom de Richi.
  543. La nuit, qui vient après le Jour, en est considérée comme la fille. Le jour, c’est le soleil, Savitri.
  544. L’aurore, précédant le soleil, est regardée ici comme sa mère ou sa nourrice.
  545. Le silence de la nuit cesse avec l’aurore, et la prière du sacrifice commence.
  546. On pourrait dire, la fille du sacrifice.
  547. Elle est la mère des dieux, dans ce sens qu’avec elle tous les dieux recommencent à agir, chacun dans le domaine qui lui est propre. Elle semble, chaque jour, les enfanter de nouveau.
  548. Le texte porte le mot Aditi ; c’est le nom sous lequel est personnifiée toute la nature.
  549. Roudra est le personnage mythologique qui, plus tard, a été mieux connu sous le nom euphémique de Siva ; car le mot Roudra, dont le commentateur donne au moins dix explications, implique l’idée de pleurs et de cris. De même qu’Indra représente l’élément âcâsa ou éther, Roudra est la personnification de l’air, souffle de vie et de mort pour les êtres animés, et souvent agité par les vents. Voilà pourquoi Roudra est regardé comme leur père et leur chef.
  550. Cette épithète capardin est devenue un des noms de Siva. Roudra l’avait reçue des poëtes, qui voulaient ainsi dépeindre l’état de l’air couvert de nuages légers, qui semblent lui former une espèce de chevelure.
  551. Cette idée est employée pour tous les êtres qui ont une marche circulaire et périodique. Roudra, autrement dit l’air, semble suivre la même marche que le ciel et le soleil.
  552. Ce mot rappelle le nom d’un des avatares de Vichnou. Roudra est ainsi nommé à cause de la violence des vents, ou de la couleur noire des nuages.
  553. C’est-à-dire Roudra, en tant qu’il est le dieu de l’air ; car c’est plus tard que fut inventé le conte pouranique de la naissance des vents au sein de Diti. Coupés en quarante-huit parties par la foudre d’Indra, ils criaient. Siva (c’est le même que Roudra) et sa femme les entendirent : celle-ci souhaita d’avoir une semblable progéniture, et les Marouts devinrent fils de Siva et de Parvatî, c’est-à-dire de l’air et de la terre.
  554. Traduction du mot dwibarhâh. Voy. page 85, col. 2, note 1.
  555. Le lit composé de cousa.
  556. Voy. p. 73, c. 1, note 3; et p. 110, c. 2, note 6.
  557. Dieu de la mort. Les Aswins, dans leurs révolutions journalières, voient s’éteindre les générations.
  558. Voy. p. 109, c. 2, note 3. Le Râdjarchi Tougra, poursuivi dans une île par ses ennemis, voulut leur enlever du moins une partie de leur proie ; il fit avec un corps de troupes embarquer son fils Bhoudjyou. Le vaisseau qui les portait périt dans des parages éloignés. La protection des Aswins fut utile au jeune Bhoudjyou, qui, suivant la légende, se sauva par la route de l’air avec ses compagnons, et, au bout de trois jours et trois nuits, fut rendu à son père. Mon opinion personnelle est que la plupart de ces légendes ne sont que des contes allégoriques. Je crois que Bhoudjyou doit être le soleil, peut-être le soleil pendant la nuit.
  559. Les Aswins sont portés tantôt sur un char, tantôt sur un vaisseau. Voy. p. 70, c. 2, note 1. Nous avons déjà expliqué (p. 62, c. 2, note 4) l’emploi du nombre trois, quand il est question des Aswins. Deux nombres nouveaux sont mentionnés ici : le nombre six, qui rappelle les six ritous ou saisons, et le nombre cent, pour lequel je n’ai aucune explication. C’est peut-être un nombre indéfini, exprimant une grande quantité. Ainsi Indra est le dieu aux cent prouesses (Satacratou) ; sa foudre a cent tranchants (Satadhâra). Vichnou, plus tard, a reçu les épithètes de Satadhâman, de Satânanda, de Satâvarttin. Ce dernier mot se rapproche de l’idée contenue dans ce passage où cent roues sont données au char des Aswins ; car Satâvarttin signifie qui a des centaines de révolutions. J’ose à peine dire que le nombre cent, répété trois fois, peut représenter les jours de l’année en nombre rond.
  560. Un favori des Aswins, Pédou, reçut d’eux un cheval blanc qui le rendit victorieux dans les combats.
  561. Voy. p. 73, c. 2, note 6. Les Padjras étaient des descendants d’Angiras. Il faut croire que le père de Cakchîvân était de cette famille. Il faut distinguer deux Cakchîvân : l’un, moderne, fils de Padjra ; l’autre, ancien, fils d’Ousidj. Voy. p. 50, c. 1, note 2. Cakchîvân aveugle pria les Aswins, et obtint la sagesse.
  562. Ces vases s’appellent coumbha. Le filtre, cârotara, est, suivant le commentaire, un panier d’osier revêtu de peau, où l’on verse la liqueur (sourâ).
  563. Voy. page 73, col. 1, note 2. Il me semble que la légende d’Atri représente la saison des pluies venant succéder à la saison des chaleurs. Les saisons sont au nombre de six, et quelquefois on n’en compte que trois, en les accouplant deux à deux. Les poëtes, comptant les jours de l’année en nombre rond, n’en admettent que trois cents, dont le tiers est cent pour deux saisons ; c’est le nombre des portes de cette maison de peine où les Asouras renferment Atri. Les six saisons sont : le Vâsanta et le Grêchma, le Vârchica et le Sârada, l’Hêmantica et le Sêsira, correspondant, les deux premières, aux mois védiques, Madhou, Mâdhava, Soucra et Soutchi ; les deux secondes, aux mois Nabhar, Nabhasya, Icha et Oûrdja ; et les deux dernières, aux mois Sahas, Sahasya, Tapas et Tapasya.
  564. Ce miracle est attribué aux Marouts, lecture vi, hymne 5, et plus bas hymne 8. Pour Gotama, voy. p. 79), col. 1, note 1 ; et page 93, col. 1, note 2.
  565. Tchyavâna est un Richi qui épousa la fille d’un prince nommé Sâryâta. Le passage présent donne à ce Richi plusieurs épouses. Peu importe ; car Tchyavâna ne me paraît pas un personnage historique. C’est le soleil tombant, le vieux soleil, rajeunissant pour épouser l’année suivante ou la journée du lendemain.
  566. Voy. p. 109, c. 1, note 5. Le Richi Bandana fut, dans une forêt déserte, jeté par les Asouras au fond d’un puits, et sauvé par les Aswins. C’est encore, je crois, une personnification de la libation.
  567. Voy. p. 90, c. 1, note 2 ; et p. 92, c. 1, note 1. Ce passage ne confirme-t-il pas l’explication que j’ai donnée de la légende de Dadhyantch ?
  568. Ce mot Pourandhi m’a paru être le nom propre d’une fille de Râdjarchi. Cette légende me semble encore allégorique : le mot Hiranyahasta signifie au bras ou au rayon d’or, épithète d’Agni ou du soleil.
  569. Voy. p. 105, c. 2, note 3 ; et p. 106, c. 1, note 2.
  570. C’est Cakchîvân, cité au vers 4 de l’hymne 18 de la VIIe lecture ; ou Parâvridj, cité au vers 8 du même hymne ; ou Canwa, comme nous le verrons au vers 8 de l’hymne suivant.
  571. Voyez la mention de ce fait, p. 109, c. 2, note 14.
  572. Ridjrâswa, déjà nommé (voy. p. 102, c. 1, note 2), est un Râdjarchi, fils de Vrichâgiri ; il immolait cent brebis pour les donner à une louve, qui n’était qu’une métamorphose de l’âne des Aswins. Son père le maudit et le priva de la vue, que les Aswins lui rendirent.
  573. La fille du Soleil ou du Jour (voy. lecture viii, hymne i, vers i), c’est la Nuit. Le commentateur raconte que la fille du Soleil, qu’il nomme Soûryâ, était destinée par lui à Soma. Les autres dieux la demandèrent aussi en mariage. Ils convinrent qu’elle serait le prix d’une course qui aurait pour but le soleil ; les Aswins furent les vainqueurs, et firent monter Soûryâ sur leur char. Le passage que nous expliquons a l’air d’indiquer que la fille même du Soleil, comme une autre Hippodamie, courut la chance du combat, et fut victorieuse avec l’aide du cheval des Aswins.
  574. Voy. p. 110, col. 1, note 9. J’ai pensé que le mot Bharadwâdja était patronymique. L’Agnipourâna et le Harivansa font descendre Divodâsa de Vitatha, fils de Bharadwâdja.
  575. Singulière association, qui désigne peut-être la richesse du roi de Câsi, provenant de l’agriculture et de la navigation.
  576. Djahnou est un ancien Râdjarchi de la race lunaire. Le nom de Djâhnavi, ou fille de Djahnou, est donné à la rivière du Gange.
  577. Nom de Richi. Cette légende doit être allégorique.
  578. Voy, page 109, col. 2, note 15.
  579. Prince, descendant d’Yadou, de la race lunaire.
  580. Noms de Richis.
  581. Voy. p. 110, col. 1, note 15. Je crois qu’il y a confusion entre le nom de Samyou et celui de Sayou. Voyez page 63, col. 1, note 4 ; et page 109, col. 1, note 2.
  582. Cette strophe renferme trois noms de Richis.
  583. Voy. p. 109, col. 1, note 5. Rébha fut jeté une fois dans un puits par les Asouras, et sauvé plus tard par les Aswins.
  584. C’est Agni, le dieu du feu.
  585. Traduction du mot pântchadjanya. Voy. page 45, col. 1, note 1.
  586. Voy. page 73, col. 1, note 2 ; page 114, col. 1, note 4.
  587. Voy. p. 109, c. 1, note 5 ; et p. 115, c. 2, note 2.
  588. Voy. p. 54, col. 2, note 4; et p. 66, col. 2, note 1.
  589. Voy. p. 109, c. 1, note 5 ; et p. 114, c. 2, note 1.
  590. Ce Cakchîvân, auteur de l’hymne, est plus moderne que le saint dont il a été question p. 50, c. 1, note 2, et p. 114, col. 1, note 2.
  591. Voir plus haut, hymne 4, vers 7.
  592. Ces trois noms propres se retrouvent plus haut, hymne 4, vers 23.
  593. Ghochâ était une sainte femme, fille du Richi Cakchîvân. Son père l’avait mariée ; mais comme elle était attaquée de la lèpre, elle fut laissée par son mari dans la maison paternelle. Les Aswins la guérirent, et elle retrouva son époux.
  594. Le Richi Syâva était lépreux ; il fut guéri, et il épousa une femme que j’ai cru pouvoir nommer Rousatî. Cette légende est allégorique. Voy. plus bas, vers 24.
  595. Voy. p. 48, col. 2, note 1 ; et p. 65, col. 2, note 2.
  596. Nom de prince.
  597. Voy. page 114, col. 1, note 1.
  598. Autrement des Angiras. Voyez page 59, col. 2, note 3.
  599. C’est le commentaire qui donne ici ce nom de Bharadwâdja. Voy. page 110, col. 1, note 7.
  600. Voy. p. 109, c. 2, note 14.
  601. Voy. page 115, col. 1, note 9.
  602. On donne le nom Câvya ou fils de Cavi à Ousanas, autrement Soucra. Voy. p. 73, col. 2, note 2. Je pense que le mot Câvya peut s’appliquer à différents descendants de Bhrigou.
  603. Voy. page 115, col. 2, note 2.
  604. Voy. page 114, col. 1, note 6.
  605. Voy. page 115, col. 1, note 1.
  606. Voy. p. 109, col. 2. note 3 ; et p. 113, col. 2, note 1.
  607. Nous savons déjà, par les remarques insérées aux notes p. 105, c. 2, n. 3, et p. 106, c. 1, n. 2, ce que nous devons penser de ce passereau et de ce loup. Voici l’explication que le commentaire donne de la présente strophe : Le passereau, c’est donc le crépuscule du matin, ou l’aurore ; le loup, ici, c’est le soleil. L’aurore va être dévorée par le soleil : elle demande le secours des Aswins, qui la prennent sur leur char, et l’emportent jusque sur le haut de la montagne céleste, c’est-à-dire du nuage ; cependant les lueurs nées du soleil s’éteignent au sein des vapeurs du matin. Emportée et sauvée par les Aswins, l’aurore reparaît le lendemain.
  608. Voy. p. 102, col. 1, note 2 ; p. 114, col. 2, note 7.
  609. Voy. p. 114, c. 2, note 3. Cependant ici ce mot (Pourandhi) peut signifier prière.
  610. Voy. p. 115, col. 1, note 9.
  611. Voy. page 73, col. 1, note 3.
  612. Ces derniers mots sont la traduction du mot apicakchyam. (Voy. p. 90, c. 1, note 2 ; p. 92, c. 1, note 1 ; et p. 114, c. 2, note 2.) Ce passage confirme encore l’explication que nous avons donnée de la légende de Dadhyantch. Il est clair que dans cette histoire il s’agit de chants et de sacrifices. Twachtri est un nom d’Agni qui devait être, avec les Aswins, l’objet des chants de Dadhyantch ; et les hymnes consacrés aux Aswins, placés en tête, étaient probablement une espèce d’introduction, de lien, de sous-ventrière, de rêne (apicâkchyam, sandhânabhoûtam), avec laquelle on amenait, on dirigeait le char du sacrifice.
  613. Voy. page 114, col. 2, note 3.
  614. Voy. page 116, col. 1, note 6.
  615. On peut traduire encore, rapide comme l’épervier. J’ai repris le sens expliqué page 89, col. 1, note 2, et page 98, col. 1, note 2.
  616. Voy. page 63, col. 2, note 2.
  617. Observation de la page 117, col. 1, note 7.
  618. Voy. page 113, col. 1, note 1.
  619. Voy. p. 109, c. 1, note 5 ; p. 114, c. 2, note 1.
  620. Voy. p. 109, col. 1, note 5 ; p. 113, col. 2, note 1.
  621. Voy. p. 109, col. 2, note 3 ; p. 113, col. 2, note 4.
  622. Voy. p. 114, col. 1, note 6.
  623. Voy. p. 73, col. 1, note 2.
  624. Voy. p. 48, col. 2, note 1 ; p. 63, col. 2, note 2.
  625. Voy. p. 110. col. 1, note 15 ; p. 115, col. 1, note 9.
  626. Voy. p. 116, col. 2, note 6.
  627. Voy. p. 109, col. 2, note 14.
  628. Voy. p. 114, col. 1, note 1.
  629. On peut traduire autrement : avec la vive impétuosité de l’épervier, venez vers nous. Voy. page 117, col. 1, note 7.
  630. Oûrdjânî est le nom de cette fille du Soleil qui, p. 115, col. 1, note 1, est appelée Soûryâ. Au moment de son départ, suivant le commentaire, on lui a dit : Oûrdjaiti (bon courage ) !
  631. Voy. p. 109, c. 2, note 3 ; p. 113, c. 2, note 1.
  632. Voy. p. 110, c. 1, note 9 ; p. 115, c. 1, note 2.
  633. Voy. p. 115, c. 1, note 1.
  634. Voy. p. 109, c. 1, note 5 ; p. 115, c. 2, note 2.
  635. Voy. p. 73, c. 1, note 2 ; p. 114, c. 1, note 4.
  636. Voy. p. 110, c. 1, note 15 ; p. 115, c. 1, note 9.
  637. Voy. p. 109, c. 1, note 5 ; p. 114, c. 2, note 1.
  638. Le commentateur croit qu’il est ici question de Bhoudjyou. Voy. page 109, col. 2, note 3 ; p. 113, col. 2, note 4.
  639. Le poëte se désigne lui-même : c’est le nouveau Cakchîvân, descendant de l’ancien fils d’Ousidj.
  640. Voy. p. 90, c. 1, note 2 ; p. 92. c. 1, note 1.
  641. Voy. p. 114, c. 1, note 1.
  642. Voy. p. 78, c. 2, note 6. Le commentaire introduit ici un fils de Ghochâ, pour traduire le mot Ghoché.
  643. Cakchivân, l’auteur de cet hymne, est de la famille des Padjras, et sans doute aussi descendant de l’ancien Cakchivân, fils d’Ousidj. Voy. page 118, col. 2, note 5.
  644. Cet homme, suivant le commentaire, c’est Ridjrâswa. Je répète ici l’observation que j’ai faite ailleurs : il me semble que cet aveuglement dont se trouvent communément frappés les Richis et les poëtes, ce n’est point une cécité réelle : c’est la privation de la lumière que leur enlève la nuit, et que leur restitue le sacrifice du matin.
  645. Le poëte veut-il dire que les Aswins ont dételé leurs chevaux pour s’arrêter à son sacrifice ?
  646. Cette énigme a besoin d’explications. La vache, nous le savons, c’est le nuage. Or, ce nuage est enfanté par une vapeur aqueuse qui s’élève et marche avec la rapidité du cheval. Indra embrasse cette vapeur, et en fait son épouse ; il la soutient sur son sein, et la féconde pour le bonheur de la terre. Cette épouse d’Indra porte le nom de Ménâ : ce même mot est le nom qu’une légende donne à Indra lui-même, devenu femme. Voyez lecture iv, hymne 5, vers 13.
  647. Voy. page 44, col. 1, note 7.
  648. Allusion aux trois mondes, où règne Indra.
  649. Le commentateur fait rapporter ce passage au Ciel et à la Terre.
  650. Le soleil pompe l’eau pour en former les nuages.
  651. Voy. p. 62, c. 2, note 2 ; p. 106, c. 1, n. 3. Les Ribhous ont fabriqué l’arme d’Indra. Voy. p. 51, c. 1, note 1.
  652. Voy. p. 73, c. 2, note 2 ; p. 91, c. 1, note 4. Il est étonnant qu’Ousanas, précepteur des Asouras, favorise Indra contre ses élèves. Il y a sans doute là une allusion, que j’ignore, à quelque phénomène astronomique ou météorologique.
  653. Voy. p. 76, col. 1, note 7.
  654. Ce nombre est ordinairement de 99. Voy. page 61, col. 1, note 4.
  655. Traduction du mot Roudra, épithète qui désigne Marout, le dieu du vent.
  656. Ce vers est difficile à comprendre. Je ne pense pas que le mot Asoura désigne un ennemi des dieux : c’est un être qui donne, qui apporte la vie, épithète de Marout.
  657. Traduction de Paridjman, épithète d’Agni.
  658. Agni se manifeste sous différentes formes, et en particulier sous celle du Trétâgni : de là le sens du mot Vasarhâs.
  659. Parvata est dérivé du verbe parva, qui signifie remplir, ou de parvan, nœud, comme qui dirait rempli de nœuds. Cette dernière explication rappelle la forme du nuage, dont les différentes parties paraissent comme nouées ensemble. Parvata est donc ici le nuage personnifié et invoqué avec Indra. Cependant on attribue aussi cette épithète au vent qui gonfle et remplit le nuage.
  660. Cakchîvân. Page 50, col. 1, note 2 ; page 114, col. 1, note 2. Le poëte doit être un de ses descendants.
  661. Agni, comme né des libations.
  662. Il est naturel de donner le nom de mères aux eaux qui fécondent et nourrissent la nature.
  663. Ce mot, analogue aux mots Manou, Poûrou, Nahouch, signifie en cet endroit homme.
  664. Voy. page 116, col. 1, note 5.
  665. Il faut supposer que le foyer est entouré d’adorateurs qui répètent des invocations.
  666. C’est l’Océan, ou l’élément humide. Ce peut être encore le soma.
  667. Le commentateur regarde le mot Padjra comme un nom de Cakchîvân. Je distingue ces deux noms : l’un est celui d’un chef de tribu ; l’autre est celui du poëte, qui devait appartenir à la tribu des Padjras. Voyez page 73, col. 2, note 6 ; page 114, col. 1, note 2.
  668. Le poëte emploie ici et plus bas encore le mot Nahouch, que j’explique comme le mot âyou, note 2, plus haut.
  669. Souri, formé de la racine chou, signifie donateur. Il s’entend du chef qui fait les frais du sacrifice ; quelquefois aussi du prêtre qui l’offre. Voy. page 114, col. 1, note 2 ; page 73, col. 2, note 6.
  670. Le mot ainsi rendu est Dasataya. C’est, dit le commentaire, le soma offert dans dix vases, ou des mets qui réjouissent dix organes ; ou bien enfin une offrande présentée sous dix formes différentes. Un autre sens est donné dans le vers suivant. J’ajouterais encore une autre explication : le soma extrait avec les dix doigts.
  671. Ari, le père de famille.
  672. C’est-à-dire le prêtre et le chef de tribu.
  673. Suivant le commentateur, le poëte désigne par ce mot ou les nuages, ou les choses nécessaires au sacrifice, et provenant de la vache.
  674. Le char attelé en l’honneur d’un dieu, c’est le sacrifice : les dieux ou dévas immortels ici mentionnés pourraient bien être les prêtres eux-mêmes.
  675. Damoûnas est un nom d’Agni ; ce mot signifie domptant tout, ou qui aime la demeure du sacrifice. Le commentateur l’explique par Danamanâs, qui aime à donner. Savitri et Bhaga, que nous trouvons plus loin, sont des noms du soleil.
  676. L’yodjana est une mesure trop incertaine pour que nous puissions tirer de ce passage quelque parti. L’aurore précède le soleil de trente yodjanas : quand elle est au premier méridien, à Lancà, le soleil en est éloigné de cette distance.
  677. C’est-à-dire Agni. Cependant le mot Déva pourrait s’entendre du chef lui-même, ou du prêtre qui assiste au sacrifice.
  678. Poëte dont il est question section 1, lecture V, hymne I, vers 13.
  679. Ce sont les rayons ou les nuages qui couvrent l’orient au point du jour.
  680. C’est la nuit, qui précède le jour, suivant les idées cosmogoniques de l’Inde.
  681. C’est-à-dire, la flamme du sacrifice.
  682. C’est avec quelque répugnance que j’ai suivi le sens donné à cette pièce par le commentateur, qui la regarde comme une action de grâces en l’honneur d’un prince ; je n’y voyais qu’un hymne en l’honneur d’Indra. Mais la liaison qui semble exister entre cette pièce et la suivante, m’a fait rejeter mon idée. Le commentateur dit que Cakchîvân, après ses études, se met en voyage pour retourner chez son père, et s’endort sur la route ; Swanaya, fils de Bhâvayavya, le rencontrant, le fait monter sur son char, lui donne sa fille en mariage, et le ramène chez son père, comblé d’honneurs et de présents. Le commentateur trouve, dans les vers des deux hymnes, qui se suivent, les divers détails que je viens de rapporter, et se voit obligé de mettre successivement la parole dans la bouche de divers personnages.
  683. Le commentateur trouve dans ce vers une allusion au nom de Cakchîvan, qui reçut de Swanaya une ceinture militaire.
  684. Ces mots pourraient aussi s’entendre du soma ; la plante dont on l’extrait est cherchée avec sollicitude, et ce breuvage peut bien être appelé par le poëte l’enfant du désir ou du sacrifice, ichteh poutra.
  685. J’ai compris que les mots prinan et papouri correspondaient avec les mots îdjâna et yakchyamâna.
  686. Même nom que Bhâvayavya.
  687. Sindhou est sans doute le nom général des provinces qui bordent le fleuve appelé Sindhou, ou la mer appelée aussi du même nom.
  688. Le Nichka est une mesure de poids appliquée à des quantités différentes. Voy. Wilson, Dictionnaire, à ce mot, et Prinsep (Useful tables).
  689. Le commentateur entend que le don s’est fait au milieu du jour.
  690. Cakchîvân s’adresse ici à Dîrghatamas, son père, et à sa famille.
  691. Ce mot signifie brebis. Le Gandhâra, que l’on identifie avec le Candahar, était fameux par ses troupeaux.
  692. Cet hymne, outre le mètre atyachtî, en offre d’autres, tels que le dhriti, l’outcriti, l’aticriti, le sancriti, le vicriti, le pracriti, le criti, c’est-à-dire des mètres de 4 padas, et quelques-uns de plus de 100 syllabes. Voy. Grammaire de Wilson, page 424 et suivantes.
  693. J’ai vu dans ce passage l’action du sacrificateur qui prépare les bois formant l’aranî, et qui en fait jaillir le feu.
  694. Le mot dwitâ peut offrir différents sens. Le commentaire le rapporte à deux espèces de feux, âhavanîyâdî.
  695. Asyê m’a paru indiquer que le sacrifice pour lequel cet hymne avait été composé, était commandé par une femme. Le commentaire croit que le poëte fait ici allusion à la terre.
  696. Manou est ici un nom général qui désigne l’humanité. Agni, dans le foyer domestique, est l’ami, l’hôte, le compagnon de l’homme ; il a, en cette qualité, quelque chose d’humain.
  697. Ousidj est le nom de la mère de Cakchîvân. Les Ousidjs forment la famille de ce Richi. Voy. page 50, col. 1, note 2.
  698. Le mot swa se prête à deux sens : qui lui appartient, ou qui nous appartient, qui est dans notre nature.
  699. Mâtariswan est le dieu du vent, qui, le matin, soufflant de l’horizon, excite le feu qu’on allume pour le sacrifice. Il semble l’apporter à l’homme, autrement à Manou, instituteur des cérémonies sacrées.
  700. Cette phrase me paraît offrir un sens métaphorique, et indiquer une espèce de mariage mystérieux entre le feu et son foyer.
  701. Le mot Védhas me semble devoir signifier celui qui contient une partie de l’intelligence divine. On le rend par pradjgna, sage, intelligent. Ce nom se donne à tous les dieux.
  702. Varouna est le soleil nocturne, et, sous ce rapport, il est, dit le commentateur, considéré comme pâpadevatâ, divinité du mal.
  703. Cette épithète est ajoutée pour indiquer la signification restreinte du mot déva, qui ne s’emploie ici que comme désignant les prêtres et les personnes nobles, qu’ailleurs, au contraire, on appelle amrita (immortels).
  704. Le sacrifice, nous l’avons déjà vu, est comparé à un char que l’on prépare à l’usage d’un dieu.
  705. Anénas et Poûrou sont d’anciens rois. Le nom de Poûrou est pris quelquefois pour le nom d’homme en général.
  706. Le mot indou, que j’ai rendu ici par soma (libation), est quelquefois aussi un des noms de la lune, comme le mot soma lui-même.
  707. Le texte porte djanitâ, que le commentaire explique par âdicartri, paraméwara. Tous ces dieux, en effet, sont créés ; il y a quelque chose au-dessus d’eux et ce quelque chose, inconnu, n’a point de culte.
  708. C’est-à-dire, les hommes.
  709. Il s’agit de ces villes célestes, qui sont les nuages. Il a déjà été fait mention des personnes ici citées. On dit que Poûrou et Divodâsa sont le même personnage.
  710. Je m’explique cette épithète de danseur, de sauteur, par l’apparence que présente la foudre aux yeux de l’observateur.
  711. On raconte que sur l’Ansoumatî, Indra, envoyé par Vrihaspati et accompagné par les Marouts, tua Crichna (le noir Asoura) avec ses dix mille compagnons, qui donnaient la mort à tous les êtres vivants.
  712. La légende dit que certains Asouras s’opposèrent à la marche d’Indra, forts du privilége qu’ils avaient de ne pouvoir être tués par lui. Il prit la forme du soleil, prononçant en même temps le mot djahi, c’est-à-dire, tue. Je cherche vainement la clef de ce conte allégorique.
  713. Voy. page 73, col. 2, note 2 ; page 91, col. 1, note 4 ; p. 120, col. 1, note 3. Ousanas prend ici le parti des Asouras ses élèves.
  714. Ce mot s’entend ici du soleil.
  715. Le poëte désigne le père et la mère de famille qui ont commandé le sacrifice, ou bien le père de famille qui le commande, et le prêtre qui le présente aux dieux.
  716. Ce mot signifie venant vers les rayons.
  717. Voy. plus haut, p. 120, col. 2, note 5.
  718. Je ne me rends pas compte de ce nombre.
  719. Je me figure le nuage, dont la partie inférieure est déchirée par la foudre.
  720. Les vents sont au nombre de 21.
  721. D’une peau de vache, percée de quelques trous, on formait un filtre pour la liqueur du soma.
  722. Ou le sacrifice se fait près d’un Aswattha, ou plutôt le bois de cet arbre sert à faire une des pièces de l’aranî.
  723. Le feu sacré traduit le mot rita, qui signifie et le feu du sacrifice et le feu solaire.
  724. C’est-à-dire le disque du soleil. Bhaga est, comme on sait, un nom du soleil, ainsi que Mitra, Aryaman et Varouna.
  725. La libation personnifiée.
  726. Nous rappelons au lecteur que c’est une manière de désigner le sacrifice. Le mot navyasî, que j’ai rendu par nouveau, peut aussi signifier hymne et louange.
  727. Dans ce passage, le mot vache doit s’entendre des offrandes et des effets du sacrifice. Je suppose aussi que le mot déva peut ici désigner les personnes riches et recommandables qui font les frais du sacrifice, et donnent aux Angiras, c’est-à-dire aux prêtres, tout ce qui est nécessaire pour l’accomplir. En pareil cas, le lait de la vache, c’est-à-dire, l’offrande destinée à Aryaman ou à tout autre dieu, est déposée dans le feu, qui la dévore et est censé la transmettre à qui de droit. Voici maintenant la légende faite sur cette circonstance. On dit que les dieux, touchés des prières d’Angiras, lui avaient envoyé des vaches qui s’approchaient de lui pour lui donner leur lait. Mais comme il ne pouvait les traire lui-même, il invoqua Aryaman, et il obtint, par la vertu de son holocauste, de pouvoir jouir de ce lait désiré.
  728. Le texte dit Vrihaspatî.
  729. Cette énonciation générale de 33 dieux est bien régulière. Il n’est pas aussi facile de nommer ces dieux avec les distinctions ici tracées. Dans l’Oupnékhat, tome I, page 207, les 33 dieux sont les 12 Adityas, les 8 Vasous, les 11 Roudras, puis Indra et Pradjâpati, c’est-à-dire Brahmâ.
  730. Ce lieu saint, c’est le védi, c’est-à-dire, l’espace réservé pour le sacrifice.
  731. Il y a une espèce de correspondance entre le feu du sacrifice et le feu du soleil. Ces deux feux sont le même, et le soleil, pour s’allumer, semble attendre que le sacrifice soit commencé. Ce sont les libations qui nourrissent sa lumière ; le culte rendu au feu qui réside dans le foyer terrestre augmente l’ardeur du feu qui réside dans le disque céleste. Agni naît donc le matin doublement sur la terre et dans le ciel ; il brille pour brûler au sacrifice et pour éclairer le monde.
  732. Cette triple nourriture donnée au feu, ce sont les libations qui ont lieu trois fois par jour.
  733. Ce sont les deux pièces de bois qui forment l’aranî, et tirées du Sami et de l’Aswattha.
  734. C’est-à-dire, sa flamme. Le foyer est tourné du côté de l’orient.
  735. Le père d’Agni, c’est le maître du sacrifice.
  736. Littéralement, quand il veut se conduire en Manou. Manou, c’est l’homme en général ; mais en particulier c’est l’homme religieux, fondateur des rites pieux, et principalement instituteur du culte du feu.
  737. Du ciel et de la terre.
  738. Voy. page 122, col. 1, note 1.
  739. Nous savons qu’Agni est nommé l’enfant de la force, à raison des efforts que l’on a faits pour l’extraire de l’aranî.
  740. Nous rappelons au lecteur qu’Agni est quelquefois considéré sous trois rapports : comme feu du sacrifice, comme feu éthéré, védyouta, comme feu solaire.
  741. Ces sept mères, suivant le commentaire, ce sont les sept vents qui amènent les nuages, où réside le feu éthéré, le feu de l’éclair et de la foudre.
  742. On compte dix points de l’horizon ; et le soleil, en parcourant le ciel, règne sur ces dix régions.
  743. Nous avons vu tout à l’heure comment le soleil était l’enfant du sacrifice, et, par conséquent, le nourrisson des prêtres.
  744. Le texte porte seulement le mot de mères. Le commentateur l’entend des dix régions célestes ; il semble comprendre que le feu s’étend dans l’air, et entre en possession de l’atmosphère, ainsi, plus haut, on disait que le soleil était le maître des dix régions, c’est-à-dire du ciel entier. Je n’ai pas cru pouvoir adopter ce sens ; je n’ai pas vu dans cette phrase les régions de l’est et de l’ouest ; j’y ai vu les branches supérieures et inférieures qui composent le bûcher, et que gagne successivement le feu.
  745. Voyez, pour ce mot et pour l’hymne entier, la section 1, lecture i, hymne 13.
  746. L’épithète sousamiddha remplace, dans la section I, celle de samiddha qui signifie enflammé.
  747. Surnom d’Agni, que l’on explique de diverses manières : destructeur de son corps, parce qu’il dévore le bois, et semble consumer sa substance ; ou bien enfant de son corps, parce que ce même bois nourrit et entretient le feu. Voy. ce même mot, page 47, col. 2, note 3.
  748. C’est-à-dire, loué par les hommes.
  749. Le matin, à midi, et le soir, aux heures des trois savanas.
  750. J’emploie le mot Déva quand on peut douter s’il est question des dieux ou des sacrificateurs.
  751. C’est-à-dire, chanté, célébré.
  752. Voyez la note ci-dessus (note 4).
  753. Ces portes sont celles de l’enceinte destinée au sacrifice. Elles reçoivent une espèce de consécration qui les élève à la dignité des dieux : elles sont appelées dévi.
  754. Le sacrifice se fait au moment des deux crépuscules, qui semblent, selon les idées indiennes, lui donner naissance.
  755. Voir page 48, col. 1, note 3. Ces deux divinités sont peut-être les Aswins. Cependant, en voyant que l’auteur leur donne le nom de sacrificateurs, et les décrit de la même manière qu’il décrit Agni, on peut croire, avec le commentateur, que ce sont deux formes de ce dieu. Ne seraient-ce pas les deux sacrifices du matin et du soir ?
  756. L’offrande personnifiée.
  757. Voy. page 43, col. 1, note 1.
  758. Pour expliquer ce passage, il me semble qu’il faut distinguer, parmi les ministres du sacrifice, des officiers appelés les uns Dévas, les autres Marouts et chargés de fonctions différentes. Les premiers (le mot déva signifiait brillant) auraient entretenu le feu ; les seconds, dont le nom rappelle la légèreté du vent, auraient eu, dans leurs fonctions, tout ce qui concerne l’action déclamatoire, et peut-être la danse sacrée. Dans beaucoup d’endroits le mot Marout ne peut s’expliquer que par l’idée de prêtre, ministre du sacrifice ; et ce sens une fois adopté nous donne l’interprétation de plusieurs légendes où les Marouts figurent avec les Angiras. Les Marouts alors ne sont pas les vents bruyants ; c’est une espèce de prêtres qui font entendre les bourdonnements de la prière.
  759. Twachtri, comme nous l’avons vu, est Agni créateur des formes plastiques ; c’est le feu artiste.
  760. Agni, considéré par rapport au bois du bûcher : maître du bois. Le commentaire veut que ce soit le bois des poteaux : youpâgni.
  761. Exclamation prononcée au moment de l’offrande. Le poëte l’a personnifiée.
  762. Mesure particulière de vers employée dans les hymnes.
  763. J’avais pensé que ces mots fils ou enfant de la force pouvaient se traduire par l’idée de très-fort, très-robuste. Cependant je suis forcé de les faire rapporter à l’action du prêtre qui, avec force, extrait le feu des bois qui composent l’aranî. Le feu, ainsi produit, est dit fils de la force.
  764. Ces ondes sont les liquides employés dans les sacrifices ; ce sont les libations, surtout celles de beurre, qui font croître et entretiennent le feu. L’enfant des ondes, c’est Agni. Ce même mot ondes semble quelquefois désigner les nuages, les eaux célestes.
  765. Nom du vent, qui va aussi servir à entretenir le feu.
  766. L’expression de l’auteur est plus pittoresque : elle signifie osculantur.
  767. C’est-à-dire, des libations.
  768. Le commentaire se perd ici dans une explication où il est question du feu brillant dans le ciel, et entouré des nuages. Je crois mon interprétation moins recherchée et plus vraie.
  769. Nous savons que ce char des dieux, c’est le sacrifice.
  770. C’est-à-dire, les deux pièces de bois qui forment l’aranî.
  771. Autrement, le matin et le soir, époques du sacrifice. Le commentateur entend ce passage, comme s’il était question du père et de la mère de famille qui offrent le sacrifice.
  772. Les dix ouvriers sont les dix doigts du prêtre qui extrait le feu de l’aranî.
  773. Ce sont des étincelles du feu.
  774. Ce sont, suivant le commentaire, le ciel et la terre, ou peut-être le matin et le soir, autrement les Aswins.
  775. Le commentaire donne au mot arvatîh le sens de stoutayah.
  776. On distingue trois espèces de feux : ce sont les trois têtes d’Agni. Le commentaire explique encore cette idée en disant qu’Agni brille dans les trois mondes, ou bien qu’on l’allume à trois époques de la journée.
  777. On décompose la flamme en sept rayons ; suivant le commentateur, ces sept rayons seraient les sept espèces de mètres (tchhandas) sur lesquels se composent les hymnes.
  778. C’est-à-dire, entre le ciel et la terre.
  779. C’est l’aranî ; ou bien ce sont ces deux vaches dont il va être question. Le commentaire entend ce passage d’une manière toute différente, en le rapportant au ciel et à la terre, produits par Agni.
  780. Ces deux vaches, qui nourrissent Agni, ce sont les deux espèces d’offrandes, l’une liquide, l’autre solide, les boissons et les mets. Je ne pense pas qu’il soit ici question de deux sacrificateurs, ni du père et de la mère de famille.
  781. Ce distique fait allusion à ce que l’on appelle la seconde naissance d’Agni ; par la vertu du sacrifice et par les directions du sacrificateur, il naît dans le soleil. C’est là sa forme, qu’on appelle Sanskâraroûpam.
  782. Ces deux filles du sacrifice, ce sont l’offrande (ich), et la louange sacrée (stouti). Suivant une autre explication, ce seraient la vie et l’abondance, annâyouchî.
  783. Le sâman est un recueil d’hymnes chantés dans les sacrifices. Plus tard, un des Védas prit ce nom.
  784. Espèces d’offrandes, quelquefois personnifiées.
  785. C’est-à-dire, le feu qui est dans le foyer.
  786. Il est singulier que presque tous ces vieux sages soient considérés comme ayant été aveugles. Je croirais assez qu’il ne faut pas entendre par ce mot une cécité réelle, mais les ténèbres de la nuit, dont Agni est venu les délivrer. Ici le commentaire raconte une petite légende, assez obscène, sur Dîrghatamas, qui avait été aveugle dans le sein de sa mère, et qui, par la protection d’Agni, avait été guéri. Au reste, je remarque que toutes ces légendes, en général, sont faites sur des passages qu’elles prétendent expliquer, et qui s’expliqueraient fort naturellement sans cela.
  787. Nous l’avons vu, Mâtariswan est le vent, qui souffle pour exciter le feu.
  788. Ce distique n’est pas suffisamment clair, il serait possible que Dîrghatamas y fît encore allusion à sa cécité. Je comprends qu’Agni, caché au sein de l’aranî, n’a pu être détruit par ses ennemis qui pouvaient le croire éteint pour toujours, et que, par conséquent, ces aveugles adversaires ne peuvent jamais espérer de l’atteindre. Les prêtres veillent pour perpétuer sa vie.
  789. Nous avons traduit ailleurs ce mot de dwidjanman par né sous deux formes ; ce qui nous a paru présenter la même idée que né deux fois : né une fois comme sorti de l’aranî, né une seconde fois comme transporté dans le soleil par les invocations des prêtres. Le commentateur incertain entend le mot dwidjanman comme signifiant né de deux parents : ces deux parents seraient les deux pièces de l’aranî, ou bien le ciel et la terre.
  790. Agni est mortel, dans ce sens qu’il est le commensal des mortels, et qu’il meurt au sein du foyer du sacrifice, pour renaître plus tard.
  791. Ici le commentateur entre dans des détails sur la manière dont l’homme pieux arrive dans le monde de la lune, porté sur les rayons du soleil. Le mot tchandra, contenu dans ce vers, et, suivant moi, mal interprété par lui, l’a entraîné dans cette description.
  792. Ce mot est entendu autrement par le commentateur, qui ne voit pas ici les libations, mais les ondes des nuages, les eaux qui enveloppent Agni vêdyouta.
  793. Ces dieux, dans leur révolution, amènent le jour, qui révèle le ciel et la terre : le poëte leur en attribue la naissance.
  794. Le poëte les appelle du nom d’Asoura.
  795. Ces vaches sont les flammes, les rayons d’Agni.
  796. L’expression de l’auteur est singulière. Elle se traduit ainsi littéralement : triangularem occidit quadrangularis.
  797. Il est ici question de l’aurore : rapide et légère, elle est arrêtée par le soleil ; elle disparaît dans ses rayons, suivant le poëte indien, elle perd son pied. La mythologie postérieure, en substituant à l’aurore le personnage d’Arouna, l’a privé de pieds : on trouve ici l’explication de ce mythe.
  798. Mitra et Varouna, dit le commentaire, c’est le Jour et la Nuit (ahorâtrô). Dans l’intervalle du jour et de la nuit naît le soleil, qui semble sortir de leur sein et devient leur fruit, leur enfant, garbha. Le soleil amène la lumière et repousse les ténèbres, et se montre de cette manière l’ami du bien et l’ennemi du mal.
  799. Ce passage peut tout aussi bien s’entendre du sage sacrificateur.
  800. Le commentaire semble reconnaître ici le nom d’un prince qu’il nomme Râtahavya.
  801. Je n’ai pas besoin de faire remarquer que le mot vache, ici et ailleurs, peut être pris au propre ou au figuré, et, dans ce dernier cas, signifier le sacrifice, la libation ou les rayons d’Agni.
  802. Les trois pas de Vichnou, ne l’oublions pas, sont les trois stations du soleil, à son lever, à midi, à son coucher.
  803. Ces trois choses, suivant le commentaire, seraient ou les trois mondes (locatrayam), ou les trois temps (câlatrayam), ou les trois qualités (gounatrayam).
  804. Ces mondes (bhouvanâni), au nombre de sept, composent un espace intermédiaire entre le ciel et la terre. Des mondes connus sous le nom de loca, on peut en compter tantôt trois, tantôt quatorze.
  805. Cette demeure est le ciel ou peut-être le soleil, où les Indiens pensaient qu’ils devaient être transportés après la mort.
  806. Le mot bandhoû est plus fort : il signifie parent, attaché par le lien de la famille.
  807. C’est-à-dire, pour le père et la mère de famille, pour les deux familles offrant le sacrifice.
  808. Ces vaches sont les nuages, ou, suivant le commentateur, les rayons du soleil.
  809. Agni porte sur ses flammes, qui sont ses flèches, les vœux des mortels adressés aux dieux, ou bien il lance ces mêmes flammes contre leurs ennemis.
  810. Le commentaire entend cette phrase de Vichnou, qui fait apparaître le Ciel et la Terre, grands parents de la Nature.
  811. Ce passage m’a paru difficile. Voici comme je le comprends. Agni doit être considéré sous trois rapports : comme fils de l’aranî, comme père du ciel et de la terre, et enfin comme Vichnou illuminant le ciel. Il serait absurde de trouver ici la moindre allusion au dogme d’une trinité quelconque.
  812. Voici les noms et les nombres de ces 94 périodes : 1 an, 2 ayanas ou demi-années, 5 ritous ou saisons, 12 mois, 24 pakchas ou demi-mois, 30 jours, 8 yâmâs ou heures, 12 lagnas ou divisions de l’équateur. Dans ce calcul je trouve 5 saisons ; je serais porté à n’en compter que 4, et à ajouter aux 12 mois le mois supplémentaire.
  813. Ces deux mots traduisent les mots Vasou et Roudra, que le poëte attribue ici aux Aswins, et qui appartiennent à deux classes particulières de dieux.
  814. Outchathya était le père de Dîrghatamas.
  815. Un roi, fils de Tougra, vaincu et pris par ses ennemis, fut lié et jeté dans la mer. Il invoqua les Aswins, qui le soulevèrent sur leur char. Voy. page 109, col. 2, note 3 ; page 113, col. 2, note 4.
  816. Je suppose que ces deux êtres sont le jour et la nuit, représentés peut-être par les Aswins.
  817. Tout ce passage est d’une grande obscurité. Il semble qu’il contient des allusions à la vie particulière de Dîrghatamas, fils d’Outchathya, alors centenaire. Accablé d’infirmités, il craint d’être brûlé par le feu du sacrifice, ou submergé par les libations. Ce feu, ces libations peuvent être l’image de la chaleur ou du froid, dont le vieillard redoute l’influence. Il est même possible que le mot dasali, signifiant à la fois dix offrandes et dixième dizaine, soit une allusion à son âge. Le commentaire, suivant son usage, fait une histoire de Dîrghatamas, où il est sauvé du feu et de l’eau. Je me suis vu réduit à deviner.
  818. J’ai conservé fidèlement cette expression, que le commentaire explique par l’impossibilité de marcher. Gantoumasaktah : celui qui ne peut marcher, est dit manger la terre.
  819. Je suppose que ce personnage est le dieu Agni : je rapproche le mot Trêtana de Trita, un des noms portés par cette divinité, qui guérit la tête de Dîrghatamas et attaque sa poitrine. Le mot que j’ai rendu par rayon, peut aussi signifier jus du soma.
  820. Littéralement, dans son dixième youga.
  821. Les dévas terrestres, c’est-à-dire les rites personnifiés, ou les prêtres, par le sacrifice, ont donné naissance à Agni et au soleil, qui ont eux-mêmes enfanté, c’est-à-dire révélé par la lumière, le ciel et la terre. Le commentaire comprend que les prêtres aiment le ciel et la terre comme on aime un enfant.
  822. La suite des idées est, dans cet hymne, difficile à saisir, surtout à cause de l’équivoque de certains mots. Par exemple le mot soûmou peut signifier fils et homme faisant des libations. En adoptant le premier sens, les dévas, qui, dans le premier distique, sont les pères du ciel et de la terre, en seraient ici les enfants.
  823. Les deux pièces de l’aranî sont de bois, quoiqu’elles ne soient pas d’une même essence. Le commentaire rapporte ces mots au ciel et à la terre. Au reste, je ne serais pas étonné qu’il existât quelque rapport mystique entre le ciel et la terre, et ces deux pièces de l’aranî, l’une supérieure, l’autre inférieure.
  824. En d’autres termes, la terre et le ciel vivifiés par les rayons du soleil.
  825. Les Ribhous sont des dieux qui représentent, dit-on, les rayons du soleil, et dont le culte est moins ancien que celui des autres divinités. Il semblerait qu’avant d’être reconnus comme dieux, ils furent hommes sur la terre. Leur légende, comme on peut le voir dans cet hymne même, paraîtrait indiquer qu’ils inventèrent plusieurs cérémonies, et fondèrent une espèce de culte nouveau. Voy. p. 51, col. 1, note 1. Les détails de cette légende peuvent se rapporter à une espèce de révolution religieuse ; mais ils sont assez obscurs pour qu’il soit difficile d’exprimer sur cet objet une opinion définitive.
  826. Agni, chargé de porter les holocaustes adressés aux dieux, est naturellement leur messager auprès des Ribhous, qui ont la prétention d’arriver à ce rang élevé. Ils veulent avoir aussi les honneurs du vase des libations, réservés à Agni seul. Ils sont trois, et les dieux consentent à ce qu’il soit fait quatre vases de celui qu’avait fait Twachtri, leur artiste.
  827. Cette expression est connue ; elle fait allusion aux apprêts du sacrifice.
  828. Le sacrifice des Ribhous est interrompu ; en d’autres termes, leur vache est morte ; car la vache, c’est le sacrifice. Il s’agit de la faire revivre.
  829. Quels sont ces deux vieillards, père et mère des Ribhous, sinon le ciel et la terre, que les rayons du soleil doivent faire renaître ?
  830. Par le sacrifice les dieux reçoivent un char, c’est-à-dire les honneurs et les présents qui l’accompagnent. Vrihaspati est une forme d’Agni, et ses vaches sont des sacrifices de diverses espèces.
  831. Le moundja est une plante dont la tige pouvait servir à remuer les boissons, ou bien à enlever les impuretés qui s’y trouvaient mêlées. Une autre explication reconnaît une montagne Moundjana, qui produit la plante du soma.
  832. Autrement, le troisième savana, celui du soir.
  833. Ce dieu est Agni, ou le soleil.
  834. Traduction incertaine : car ces deux personnages peuvent être aussi le Ciel et la Terre, aïeuls du monde, et assistant partout les Ribhous.
  835. Les bras de cette espèce de dieux, ce sont leurs rayons. Arrêter leur bras, c’est peut-être aussi gêner leur sacrifice.
  836. Le chien qui rompt le silence de la nuit, c’est le vent, suivant le commentaire. Mais il faut se rappeler qu’il y a une chienne nommée Saramâ, et qui n’est autre chose que la prière, dont la voix éveille, le matin, tous les êtres pour le sacrifice.
  837. Agni est un quatrième Ribhou ; et réciproquement les Ribhous doivent être des formes d’Agni, lequel est, comme on sait, enfant de la force.
  838. Ces trois noms sont ceux de trois Âdityas : nous savons que Mitra est l’âditya du jour, et Varouna celui de la nuit. Nous avons vu tout à l’heure que ce dernier habitait les eaux et les mers, parce que la nuit engendre les vapeurs et l’humidité. Pour Aryaman, le commentaire dit ici que c’est l’âditya de la mort, antacâlâbhimanî.
  839. Le texte porte âyou, que l’on explique par l’idée du vent qui va toujours.
  840. C’est ordinairement une épithète d’Indra : cependant, comme le mot signifie séjour des Ribhoux, ce pourrait bien être le soleil.
  841. Ce sont les dévas, c’est-à-dire les prêtres, qui le choisissent pour le sacrifice.
  842. Ainsi le col et le front doivent être blancs. Voyez, dans le Dabistan de M. Troyer, (tome II, page 79), des détails curieux sur cette espèce de sacrifice.
  843. Vitaprichtha : le commentaire l’explique par homâvânita ou paryagnicrita.
  844. Littéralement, un bon parent, soubandhou.
  845. Le Vritapâca est le moment du sacrifice où la chair de la victime est bouillie.
  846. On l’appelle Twachtri.
  847. Ce sont le cœur, la langue, la poitrine.
  848. Boulettes de riz et de beurre.
  849. Le cheval du sacrifice devient un cheval céleste ; il est le soleil lui-même appelé déjà aswa, cheval, à cause de sa rapidité. Cet hymne est donc proprement un hymne au soleil.
  850. Le texte porte simplement samoudra, mer. Le sens de ce mot n’est pas celui qu’en français nous pouvons lui donner, quand nous disons que le soleil sort de la mer. Cette mer dont parle l’auteur, c’est ou cet amas de vapeurs célestes d’où se dégage le soleil, ou plutôt ces libations du sacrifice qui donnent naissance à l’astre divin, suivant la doctrine des poëtes de cette époque. Selon cette idée, le cheval, qui va devenir le soleil, sort du foyer d’Agni, où son corps a été jeté comme offrande ; il sort aussi de ce corps terrestre et corruptible.
  851. C’est-à-dire, tes rayons.
  852. Yama est le dieu de la mort ; la victime a été remise par lui au feu du sacrifice.
  853. Ce feu du sacrifice, c’est Trita, autrement Agni. C’est lui qui, comme on sait, attelle le char des dieux ; expression que nous n’avons plus besoin d’expliquer.
  854. Le commentaire suppose que Gandharva, c’est le soma. Le soma est représenté par les poëtes comme brillant, et reflétant quelquefois les rayons du soleil, et, en termes poétiques, rênes et rayons sont synonymes. Gandharva signifie aussi cheval. C’est un nom du soleil ou d’Agni.
  855. Ce ne sont pas neuf stations différentes, ce sont trois mêmes stations vues à travers un milieu différent, que forment trois états du ciel : le ciel brillant, le ciel nuageux, le ciel nébuleux. Ce sont des couches diverses de l’air, que les Indiens appellent mondes, où le soleil semble se tenir, suivant l’apparence du temps. Le commentaire invente, à ce sujet, des triades singulières, telles que le nuage, l’éclair et le tonnerre, ou bien la nourriture, la plante, la semence : j’ai pensé que tout cela n’avait aucun rapport avec la phrase présente, qui exprimait, d’une manière plus complexe, une idée que nous connaissons depuis longtemps, les trois positions du soleil au levant, à midi, au couchant.
  856. Varouna est le soleil considéré comme retournant, caché pendant la nuit, à son poste du matin.
  857. C’est-à-dire tes rayons.
  858. Je pense que monter le cheval ou préparer le char d’un dieu, ce sont deux expressions qui ont le même sens. Cependant on a dit tout à l’heure qu’Indra avait le premier monté sur le char du cheval céleste ; cette phrase pourrait donc signifier : les dieux se sont réunis pour l’holocauste offert à celui qui, etc.
  859. Que sont ces coursiers ? les jours peut-être, ou les rayons.
  860. Ce sont les rayons du soleil.
  861. Ce frère d’Agni est le feu céleste, le feu de la foudre, Vêdyouta, qui siége surtout dans les nuages et dans l’air : c’est pour cela que le commentaire semble le confondre avec Vâyou. Nous respirons aussi ce feu, c’est pour nous le souffle de vie.
  862. Ces trois frères me semblent être le feu du sacrifice, le feu céleste et le feu solaire.
  863. Le nombre sept s’applique à plusieurs espèces de choses : sept rayons, sept flammes, et par conséquent sept chevaux du soleil, sept mondes inférieurs, sept mondes supérieurs, sept mères, ondes ou genres de soma, sept mers ou lacs, sept genres de mètres, sept prêtres officiant dans un sacrifice.
  864. Le commentaire veut que ces trois moyeux représentent trois saisons, ou les trois temps. La roue, dit-il, c’est l’année, ou plutôt le disque solaire.
  865. Ces personnages, suivant le commentaire, sont l’Ayana (semestre), le Ritou (saison), le Mâsa (mois), le Pakcha (demi-mois), le Divasa (jour), la Râtri (nuit), et le Mouhoûrtta (heure).
  866. Que sont ces sœurs ? Le commentateur pense que ce sont les six saisons, auxquelles il faut ajouter, pour compléter le nombre sept, le treizième mois complémentaire.
  867. Ces sept vaches sont les sept mâtris ou espèces d’ondes.
  868. Les sept espèces de mètres sur lesquels se composent les hymnes.
  869. Ce sont les rayons ou les nuages.
  870. Ce père et cette mère, suivant moi, ce sont les deux pièces de l’aranî. Jusqu’à présent nous avons vu qu’elles étaient appelées les deux mères : ici, il m’a semblé que la pensée de l’auteur était de supposer un mariage entre ces deux pièces, dont l’une (outtarâ), pour produire le feu, est introduite dans l’ouverture que présente la seconde (outlânâ). Le commentateur rapporte ce passage au ciel et à la terre, et se trouve forcé de faire violence aux mots et même à la grammaire. Voy. page 57, col. 1, note 4.
  871. C’est la libation qui nourrit et augmente le feu.
  872. Voy. page 146, col. 2, note 3.
  873. Le feu, étant triple, est considéré comme naissant trois fois, et comme devant ces naissances à des parents différents. Je n’ose dire jusqu’à quel point le commentateur est ici embarrassé, parlant des trois mondes et de leurs gardiens, des trois temps, etc. Je crois avoir été plus heureux que lui.
  874. Agni est le messager du sacrifice, et porte aux dieux les offrandes et les prières.
  875. Ce sont les jours et les nuits ; 360, nombre rond répété deux fois.
  876. Pourichin est l’ayana du midi : ce mot est traduit par aqueux.
  877. Ce sont les mois, le demi-mois, le jour, la nuit, et l’heure.
  878. Je suppose que ce sont douze pakchas ou demi-mois.
  879. C’est-à-dire, élevé. C’est l’ayana du nord.
  880. Voy. page 147, col. 1, note 1. Les roues sont ici ce que tout à l’heure il appelait pieds, ce que dans le vers suivant il va nommer rayons.
  881. Les rayons sont les six ritous ou saisons.
  882. Voy. page 147, col. 2, note 6.
  883. Je suppose que ce sont les dix points cardinaux.
  884. Ce frère unique est le treizième mois, ou mois intercalaire. Les mois ainsi disposés par couples peuvent prendre le nom des six ritous.
  885. L’enfant savant est en quelque sorte le père de son père. Voy. dans les Lois de Manou, la même pensée exprimée à l’occasion des Angiras, livre iii, sl. 153.
  886. Cette image représente la libation tombant sur le feu : le pied de la vache, c’est la flamme qui reçoit la libation, et qui, par des mouvements alternatifs, éclate ou s’affaisse. Cette flamme pourrait encore être considérée comme brûlant ici dans le sacrifice : c’est le pied inférieur ; et comme brûlant dans le soleil, c’est le pied supérieur.
  887. Manas lôkicam.
  888. Ces deux esprits (le texte dit souparnas, êtres ailés) n’en font qu’un (êkâtmyam) et sont l’esprit suprême (paramâtmâ) et l’esprit de vie (djîvâtmâ). C’est ainsi que Plotin fait l’âme du monde sœur de l’âme humaine. Héracléon dit que l’âme pneumatique a son autre moitié dans la région des intelligences supérieures, moitié avec laquelle elle doit s’unir un jour. Il y a de l’Indien dans toutes ces doctrines.
  889. Sous l’allégorie d’un arbre, les poëtes font souvent allusion ou au monde, ou au corps humain. Voyez Oupnékat, tome I, pag. 320. En m’abstenant de toute réflexion, je ferai remarquer qu’il y a ici un reflet du commencement de la Genèse. Le pippala est l’arbre appelé Ficus religiosa.
  890. Le commentaire dit que ce seigneur est le djîvâtmâ, ainsi identifié avec Agni, ou le père du monde.
  891. Les esprits dans cet état sont appelés kchétradjnâh : ils connaissent l’enveloppe corporelle.
  892. Ces trois espèces de mètres, suivant le commentaire, étaient consacrées aux trois savanas, qui en avaient pris leurs noms, et qui se trouvaient eux-mêmes sous la dédicace de trois divinités particulières. En effet, le distique 25 indiquerait que la Gâyatri est réservée à Agni ; le Trichtoubh, au Soleil ; la Djagati, au dieu de l’air.
  893. L’arca est un hymne, une pièce artchanasâdhanam.
  894. Le saman est un recueil d’hymnes chantés.
  895. Le vaca est une réunion d’hymnes appelés soûktas, et qui me sembleraient avoir été parlés.
  896. J’ai imaginé qu’il devait y avoir deux espèces de vacas, pour que l’un puisse se composer de l’autre. Voilà pourquoi j’ai employé le nom d’anouvâca.
  897. Un akckara est une lettre ou une syllabe. Mais ici ce mot me semble avoir un autre sens : il signifie vers, lequel est composé de deux ou quatre padas, c’est-à-dire fragments de vers, hémistiches. Le mot pada a encore un autre sens (vers 23 et 43) ; il veut dire le sujet chanté dans le vers. Il est un autre mot que je veux aussi expliquer ici : c’est le mot vyoman (vers 34, 33, 39). Il m’a paru avoir quelque rapport avec le pranava. C’est le titre de l’hymne ; c’est le personnage sous le nom duquel on met cet hymne, en quelque sorte le patron qui le couvre.
  898. Le commentateur et M. Wilson disent que c’est le saman. Je croirais assez que c’est une épithète du Trichtoubh, plus rapide que la Djagatî.
  899. J’entends que la Gâyatrî est employée pour dépeindre les vertus d’Agni et de ses trois feux. Je présume que la destination de ces trois mètres n’est pas d’une observation rigoureuse, car cette règle me paraît subir plus d’une exception.
  900. Il me semble que la vache est la libation qui doit augmenter la force du feu, devenu son nourrisson, et communiquer ensuite les rayons au soleil.
  901. C’est-à-dire, la libation est jetée sur le feu qu’elle alimente, et frémit en y tombant.
  902. Je pense que le lecteur s’explique bien toute cette allégorie, en la rapportant à la libation. Le commentaire pense que la vache, c’est le nuage ; que son veau, c’est la terre ; que la tête de ce veau, ce sont les montagnes.
  903. Le mal est appelé ici nirriti.
  904. Je suppose que l’auteur désigne le pôle du nord, outtânâyoh tchamwôh, dans l’endroit septentrional où les deux surfaces se touchent. L’étoile polaire se nomme outtânapada. C’est le point qui a été plus tard le sommet du mont Mérou, partie la plus élevée de la terre, et partie centrale du ciel.
  905. Le mot douhitri peut ne pas signifier fille : il marque l’état de celle qui se nourrit de lait.
  906. Vichnou est un des noms du soleil, dont les rayons se décomposent en sept parties.
  907. La vache dont il va être question maintenant, c’est la parole sainte, que l’on a aussi divinisée sous le nom de Saraswatî, déesse de la parole, vâgdévî.
  908. Dans la supposition que cette vache est la parole, et par conséquent la poésie sacrée, on se rend bien compte de la multiplicité de ses pieds ; ses mamelles, ce sont les akcharas, ou les vers qu’ils composent. (Le mot akchara signifie aussi onde : j’ai cru pouvoir modifier la traduction.) Le commentateur, adoptant une autre idée, et voulant que cette vache soit le nuage, dépense beaucoup d’esprit pour expliquer les diverses épithètes qui ont rapport aux pieds que l’auteur donne à sa vache. Ses efforts ont contribué à me faire persister dans le sens que j’ai suivi. Ces ondes dont il est question sont ou celles des libations qui accompagnent la prière du sacrifice, ou les ondes du ciel que fait tomber la prière.
  909. Ce sont les trois feux dont nous avons parlé au commencement de cet hymne : le feu solaire, le feu du sacrifice, et le feu céleste, qui est aussi le feu vital.
  910. Le mot brâhmana se trouve ici pour la première fois. Il signifie fils de brahman ou de prêtre. Je ne pense pas qu’alors il fût usité comme distinction de caste.
  911. Le mot gouhâ, employé ici, me représente cette grande voûte formée par le ciel, et qui, sans les trois Agnis, ressemblerait à une caverne ténébreuse.
  912. C’est-à-dire, quatrième. Ainsi s’appelle l’âme suprême non mêlée à la matière : le paramâtmâ ou adhyâtmâ, distingué du bhoûtâtmâ qui est appelé aussi djîvâtma et déhâtmâ, noms de l’âme universelle unie aux éléments matériels.
  913. C’est-à-dire, les rayons.
  914. Ce mot traduit sankou, que le commentateur explique par oupatchara. Je remarque que ce même mot signifie l’aiguille du gnomon.
  915. Les Sâdhyas sont, comme le dit le mot, des hommes devenus parfaits, et formant, après leur mort, une classe de demi-dieux célestes.
  916. Autrement, de l’homme.
  917. Allusion à la légende qui raconte que, dans la recherche des vaches enlevées par les enfants de Bala, les Marouts et les Angiras agirent de concert, et marchèrent avec Indra. Voy. page 44, col. 1, note 7.
  918. Voy. page 144, col. 2, note 3.
  919. Ce mot, qui signifie brillant, s’applique tantôt à la Terre, tantôt au Ciel, quelquefois à Aditi. Le commentaire dit ici : Prithivî nânâvarnâ, terra multicolor. Quoique les vents se jouent dans l’air, il semble qu’on les a faits de préférence enfants de la terre. Voyez page 53, col. 1, note 5 ; page 66, col. 1, note 1.
  920. Agastya est frère d’Indra par l’amitié que le dieu lui porte.
  921. C’est-à-dire, les rayons.
  922. C’est ou le nom d’un homme, ou plutôt une épithète du nuage, dont les eaux coulent sur le gazon.
  923. L’offrande composée de mets, et l’offrande formée de boissons.
  924. Je crois que le mot sarad s’emploie pour signifier libation.
  925. C’est-à-dire, le feu du sacrifice résonne.
  926. Cette vache, c’est la prière.
  927. Traduction du mot asoura.
  928. Ce nombre sept correspond sans doute au nombre des torrents qu’ailleurs on voit s’ouvrir sous les coups de la foudre d’Indra.
  929. Voyez pour cette légende, page 81, col. 2, note 1.
  930. L’air a vu naître et a porté ces nuages, considérés comme ennemis d’Indra, et personnifiés sous le nom des Asouras ; que ces nuages périssent dans l’air où ils sont nés.
  931. Personnage dont il a été souvent question. Voyez page 62, col. 2, note 2 ; page 106, col. 1, note 3. Coutsa était ami d’Indra, qui le prit sur son char dans sa guerre contre Souchna. Des deux roues du soleil, Indra en prit une pour lui, et donna l’autre à Coutsa. Il est à croire que, dans cette légende, il faut voir un conte sur la foudre d’Indra.
  932. Nous avons vu qu’Aryaman est un des noms du soleil, considéré comme destructeur.
  933. Douryona est, dit-on, le nom d’un prince, et Couyavâtch celui d’un Asoura.
  934. On trouve dans ce passage deux mots : nabhas et sahas, qui sont les noms de deux mois de l’ancienne année indienne, assez éloignés l’un de l’autre. Je n’ai pu supposer qu’il fallût reconnaître ici ces deux mois. J’ai vu dans sahas, la force ; et dans nabhas, la puissance de nuire.
  935. Voy., pour Tourvasa et Yadou, page 65, col. 1, note 2 ; et page 107, col. 1, note 3.
  936. Voy. page 45, col. 1, note 1.
  937. Lopâmoudrâ est l’épouse d’Agastya. Cet hymne est une invitation faite à Agastya par Lopâmoudrâ pour le sacrifice. Il me semble renfermer certaines allusions hardies que repousse la pudeur française : c’est un dialogue allégorique entre la prière et la libation. Le mot vrichan, que je traduis par mari, représente le breuvage sacré ; et son épouse, c’est la prière, à laquelle il doit s’associer. Au moment des sacrifices, les femmes étaient chargées de préparer les libations, et d’aller sur la montagne rechercher la plante qui servait à faire le soma. Voilà pourquoi Lopâmoudrâ débute par se plaindre de sa fatigue.
  938. Saradah, rendu encore ici par libation.
  939. C’est-à-dire, il fit des prières et des libations. Le commentaire entend qu’il se livra à l’amour et à la pénitence.
  940. L’aurore.
  941. Nous savons ce que signifie ce miracle, qui consiste à rendre le lait à la vache. Voy. l’histoire des Ribhous, page 51, col. 1, note 1.
  942. Voy. page 73, col. 1, note 2 ; page 114, col. 1, note 4.
  943. Voy. page 109, col. 2, note 3 ; page 113, col. 2, note 4 ; et page 142, col. 1, note 2. Il s’appelait Bhoudjyou.
  944. Le soleil et la lune. Dans les deux distiques qui suivent, il est question d’abord du soleil, qui éclaire le monde ; ensuite de la lune, qui semble avoir une influence sur l’élément humide.
  945. Voy. page 109, col. 2, note 14.
  946. Voy. page 158, col. 2, note 1.
  947. Le commentaire, qui donne ce sens, dit que ces métaux sont l’or, l’argent, et le cuivre. Je donnerais au mot tridhâtou un tout autre sens ; j’y verrais plutôt une allusion aux trois stations du soleil.
  948. Nom de Richis, ou saints personnages présents.
  949. Voy. page 71, col. 1, note 1. Il avait épousé une fille de Pouroumitra.
  950. Voy. page 115, col. 1, note 1.
  951. Voy. page 54, col. 1, not. 3 ; et page 55, col. 1, note 4.
  952. On traduit aussi : Que les Dévas traitent comme leurs enfants.
  953. Nom d’Agni.
  954. Le poëte emploie le mot Itâ au pluriel.
  955. Nom du nuage, ou d’Indra lui-même, qui a ce nuage pour base de son séjour. Ahi, comme nous l’avons vu, est un nom de ces Asouras qui habitent les nuages. Le mot boudhna signifie racine, partie inférieure.
  956. C’est-à-dire, Agni, né des libations. Des libations du sacrifice se forme le nuage, qu’Indra doit faire fondre sur la terre. Dans ce même sens, on peut appeler aussi le soleil fils des ondes ou des libations, puisqu’il naît du sacrifice.
  957. Nom d’Indra.
  958. Anna devatâ, appelé aussi Pitou.
  959. Voy. page 74, col. 1, note 4 ; et page 104, col. 2, note 3.
  960. Démarche naturelle à ceux qui respirent une odeur dans l’air.
  961. Vâtâpi est le nuage que le vent pousse, et dont il augmente le volume. Les Pourânas contiennent une légende de Vâtâpi et d’Agastya. Le commentaire donne Vâtâpi pour une forme de Pitou, dieu des offrandes.
  962. Le dieu de la libation, que le commentateur veut distinguer de Pilou.
  963. Le poëte désigne la somalatâ, qui est la sarcostema viminalis, ou l’asclepias acida, et, sans doute aussi, les autres végétaux qui peuvent être employés à former la matière des offrandes.
  964. Le nom de ces gâteaux est carambha ; ils sont faits de fleur de farine et de caillé. Il me semble que la forme de ces gâteaux est celle que doit présenter le nuage que les vapeurs des offrandes contribuent à former.
  965. Je rappellerai au lecteur que, par le mot déva, j’entends les ministres du sacrifice, ou bien ces êtres divinisés qui représentent les rites et les hymnes.
  966. Nom d’Agni. Voy. page 47, col. 2, note 3.
  967. Je renvoie pour ce passage aux notes qui se trouvent page 48, col. 1, note 3 ; et page 135, col. 1, note 9.
  968. Voy. page 43, col. 1, note 1. Le commentateur dit que ces trois déesses sont des formes différentes de l’essence d’Aditya, appartenant, Bhâratî au ciel, Ilâ à la terre, Saraswatî à l’air.
  969. Voy. page 48, col. 1, note 5. Twachtri est le feu vital, et l’on voit comment il peut contribuer à l’accroissement des formes.
  970. Vanaspati, nom d’Agni.
  971. Nom d’une offrande faite en prononçant ce mot.
  972. C’est-à-dire, ceux qui font les frais du sacrifice et ceux qui en surveillent les cérémonies, en quelque sorte les laïques et les clercs.
  973. Ce sont les enfants de Cakchîvân.
  974. Nom d’Agni.
  975. Voy., pour le mot âpri, page 47, col. 2, note 1. L’explication de ce mot doit être ici modifiée ; le soleil tient la place d’Agni.
  976. Je suppose que le poëte désigne ici Agni et le soleil, le feu du sacrifice et le feu solaire. L’hymne représente l’état du ciel avant que le sacrifice commence.
  977. Ce que j’appelle ténèbres, par une espèce d’hypallage, est appelé dans le texte les invisibles.
  978. Voici les noms de ces plantes : sara, saccharum sara, vulg. saraharî ; cousara, espèce de mauvais sara, creux ; darbha, autrement cousa, poa cynosuroïdes ; sênya, ou sêrya, barleria cristata, autrement aswabâla, saccharum spontaneum ; moundja (saccharum munja) ; virana (andropogon muricatum).
  979. Il y a ici une antithèse que je ne reproduis pas : les invisibles ont été vus.
  980. Ces ténèbres sont formées par des vapeurs semblables à celles que le poëte suppose ailleurs issues de l’offrande du soma. Je ne pense pas, avec le commentaire, que le Soma soit ici la lune, séjour des vapeurs ténébreuses de la nuit : il semble même que ce séjour soit plutôt le soleil.
  981. Ces génies s’appellent yâtoudhânas.
  982. Le mot rendu par cette périphrase est souravan. Le soleil doit envoyer en pluie les vapeurs qui s’élèvent vers lui ; il les recueille, et ressemble à ces hommes qui distribuent, sous une tente qui met les buveurs à l’abri des chaleurs du jour, des boissons spiritueuses (soura).
  983. Cette liqueur est la pluie elle-même, qui prolonge la vie de l’homme en donnant à la terre une heureuse fécondité. Le dieu qui la forme, c’est Indra.
  984. Nous avons vu que ce nombre vingt et un était formé de trois fois les sept langues ou rayons d’Agni. Si le nombre trois n’est pas formé par celui des savanas, il l’est peut-être par celui des trois couleurs qui composent la teinte des rayons, savoir, le rouge, le noir et le blanc.
  985. Voy. page 61, col. 1, note 4.
  986. La note 6, p. 164, c. 2, rend compte des vingt et une flammes ; la note 3, p. 61, c. 1, nous apprend ce que l’on entend par les sept rivières. Les rayons du soleil, d’un côté, pompent les vapeurs ; ces vapeurs retombent en pluie, et sont, d’un autre côté, reçues par les rivières : tel est, ce me semble, le sens de ce passage.
  987. Quel est ce personnage de Couchoumbhaca ? Je suppose que c’est Indra, le dieu qui met l’ordre dans le monde, et dont la foudre doit séparer les nuages pour en extraire l’eau, comme il est dit dans ce vers. Le commentateur semblerait croire que c’est un Asoura, chef présumé des ténèbres. On peut encore penser que ce personnage est ici joué par le poëte Agastya, agissant en vertu du sacrifice, et détruisant les maléfices par une espèce de viâya ou de charme, pour former une pluie bienfaisante ; de sorte que le Couchoumbhaca serait le nom donné au prêtre qui fait une conjuration dont le résultat doit être salutaire. Ma première explication me paraît plus naturelle. Couchoumbhaca et Harichthas, suivant moi, sont une même personne. Dans le cas où l’on admettrait la fonction du Couchoumbhaca, au lieu de la foudre il faudrait mettre la coupe du sacrifice.
  988. Métaphore qui indique que les vapeurs de la nuit sont devenues une onde bienfaisante. Je me suis observé dans la traduction de cet hymne, pour n’employer aucune expression qui pût rappeler des légendes que je crois plus modernes que le Rig-Véda, et qui en sont comme le commentaire poétique. Ainsi, j’ai évité de rendre le mot vicham par poison, parce que je serais entré dans l’esprit de ces auteurs qui représentent les vapeurs comme le poison des serpents de la nuit. Or, ces serpents, ce sont les nuages qui serpentent sur le ciel. Le soleil, comparé à un oiseau, devient Garouda, et fait la guerre à ces serpents. L’hymne que je viens de traduire ne m’a point paru présenter de semblables idées : c’est ce qui doit faire rejeter, avec encore plus de confiance, une pièce ici intercalée, où il est question de cette race de serpents célestes. Le premier mandala (voy. page 41, col. 1, note i) finit en cet endroit ; il paraît que le copiste a l’habitude de clore ainsi chaque mandala par une pièce de son invention, dont il n’est point question dans le commentaire, et qui d’ailleurs se trahit elle-même par son style moderne. Le second mandala porte le nom de Gritsamada. Le premier était celui des cent Richis.
  989. Le poëte dit Asoura.
  990. Nom d’Agni, qui donne des richesses.
  991. Il me semble qu’il existe un autre Gritsamada, fils de Sounaca, de la famille de Bhrigou.
  992. Dans le texte se trouve le mot Prisni, qui s’emploie pour la terre. Cependant il peut aussi signifier air (antarikcha).
  993. Ayou et Manou sont employés, dans cette phrase, d’une manière générale pour dire l’homme.
  994. Voy. page 45, col. 1, note 1.
  995. Cet hymne a des rapports avec le treizième de la lecture i, section I, et le sixième de la lecture ii de la section II. Je renvoie aux notes de ces deux hymnes pour les renseignements relatifs aux épithètes.
  996. Il faut rappeler que Twachtri est le feu vital, qui anime les formes auxquelles il vient s’allier.
  997. Les enfants d’Ousidj sont les descendants de Cakchîvân, ou bien le mot Ousidj doit s’entendre comme synonyme de prêtre.
  998. C’est-à-dire que les reflets du feu se répandent sur les officiers du sacrifice.
  999. Le sacrifice du Soir.
  1000. Hotri. Le poëte, dans cet hymne, emploie sept expressions différentes, affectées aux diverses fonctions du prêtre. Je tâche de les traduire par une périphrase qui en explique la racine.
  1001. Les prêtres viennent de produire le feu : ils sont ses pères, et lui, en les protégeant, se montrera leur père.
  1002. Guides aurait dû être mis au féminin : car rasmi signifie à la fois rênes et rayons. Or, ces sept guides ou rayons, ce sont les sept officiants qui prennent part au sacrifice (hotraeas).
  1003. Potri.
  1004. Agni, dans le sacrifice, naît et meurt ; il est considéré comme un Manou, comme un mortel.
  1005. Dadhanou : ce mot m’a semblé un des sept noms affectés aux ministres du sacrifice.
  1006. Prasastri.
  1007. Nechtri.
  1008. Ces trois sœurs sont les flammes des trois feux garhapatya, ahavanîya dakchina. Voy. page 47, col. 1, note 4.
  1009. Je rends ainsi le mot masculin matri, vase qui mesure, qui renferme la libation. Ce mot signifie aussi l’homme, le père de famille qui mesure, qui compose le sacrifice. Le commentaire voit ici un nom féminin, et le rapporte à l’enceinte du sacrifice (védi). Cette sœur, dont il est ici question, est la cuiller (djouhou) qui sert aux libations. On peut bien encore donner le nom de matri (mère) au réservoir des ondes du sacrifice.
  1010. Adwaryou.
  1011. Ritwig.
  1012. Il naît comme feu du sacrifice et comme feu solaire : de là son nom de divimâtri.
  1013. Cette épithète est remarquable, Bhârata. Le commentaire donne ce mot comme étant un nom affecté aux prêtres.
  1014. Le texte porte les vaches, les taureaux et les octopodes. J’ai pensé que, par le mot vaches, il fallait entendre, comme nous l’avons vu souvent, les flammes du foyer ; par le mot taureaux (oukchan), les libations ; et par le mot octopodes, les invocations divisées en huit padas. Il y a aussi un mètre appelé achtî. Le commentateur dit que le mot achtâpadi se rapporte à la vache quand elle est pleine, parce que ses pieds et ceux de son veau forment le nombre de huit. Le mot achtâpadi peut aussi désigner le plat des offrandes, divisé en huit compartiments. Voy. Dictionnaire de Wilson, achtângârghya. Le sacrifice dans lequel est offert le beurre sacré dans huit vases, est appelé achtâcapâla.
  1015. L’auteur fait allusion aux deux naissances d’Agni, dans le feu du sacrifice et dans le feu solaire.
  1016. Allusion aux foyers des trois espèces de feux.
  1017. Nous savons que de l’aranî on tirait, pour le sacrifice, le feu qui semble y dormir. Le poëte représente l’aranî comme un personnage qui s’éveille ou qui dort.
  1018. Voy. page 60, col. 2, note 3.
  1019. Voy. page 61, col. 2, note 2.
  1020. Ce personnage est allégorique, et représente la libation. Voy. page 74, col. 1, note 4 ; page 104, col. 2, note 3.
  1021. Je suppose que ce monstre est le nuage orageux où se trouvent accumulés les feux de Twachtri. Le commentaire regarde le mot Twâchtra comme le nom d’un Asoura.
  1022. Nom d’un Asoura.
  1023. Ce sens me paraît clair. Le mot tchacra, qui veut dire roue, a donné lieu à une légende que j’ai déjà indiquée. On raconte qu’autrefois le char du soleil avait deux roues ; qu’Indra en prit une pour s’en servir comme de sa foudre, et la fit rouler dans l’air.
  1024. Pour rendre raison de la composition de cet hymne, qui vraiment n’avait pas besoin de cette explication, le commentaire suppose que, dans un sacrifice où se trouvaient Indra et Gritsamada, les Asouras arrivent avec des intentions hostiles contre Indra, lequel sort de l’enceinte sacrée sous la forme de Gritsamada, et laissait la sienne au Richi. Les Asouras saisissent Gritsamada, le prenant pour Indra ; Gritsamada se défend, et leur apprend ce que c’est qu’Indra.
  1025. Le mot parvata signifie montagne et image. Les Pourânas racontent qu’autrefois les montagnes avaient des ailes, et se transportaient d’elles-mêmes à travers les airs. La foudre d’Indra leur trancha ces ailes, et depuis ce temps elles sont immobiles. Ce conte n’est qu’un abus de mots, et le commentateur le rappelle à l’occasion de ce vers.
  1026. Voy. page 61, col. 1, note 3.
  1027. Voy. page 44, col. 1, note 7.
  1028. C’est-à-dire Twachtri, feu de la foudre.
  1029. Cette caverne, c’est le ciel nocturne, c’est la nuit elle-même et les ténèbres.
  1030. Dans ce passage, où le commentateur introduit le ciel et la terre, j’ai cru retrouver l’idée que j’ai déjà exprimée section I, lecture vii, vers 5 et 6 ; je veux dire la peinture de deux nuages orageux, dont l’un est placé au-dessus de l’autre, et qui s’avancent en même temps.
  1031. Le commentateur dit : dans la quarantième année, et littéralement, le quarantième automne. Je ne comprends pas que le dieu attende si longtemps pour exaucer ses serviteurs ; je me suis cru autorisé à rendre encore ici le mot sarad par libation, comme je l’ai déjà fait plusieurs fois. Autrement, je ne verrais tout au plus dans sarad qu’un jour d’automne.
  1032. Nom d’un Asoura.
  1033. Ce qui donne cet accroissement à la plante, c’est le sacrifice, ou bien c’est Indra, qui a envoyé la pluie.
  1034. Ce vase s’appelle Samoudra : il est comme une mer vers laquelle se rendent ces rivières de libations.
  1035. Dans ce passage, qui est une peinture du sacrifice, j’ai vu trois personnes distinctes, et non une seule, quoique le mot éka soit répété trois fois.
  1036. Nom d’un Asoura.
  1037. Voy. page 111, col. 1, note 4.
  1038. Voy. page 45, col. 1, note 1
  1039. Je crois que c’est le nom d’un Asoura.
  1040. Voy. page 76, col. 1, note 6 ; page 65, col. 1, note 2.
  1041. Voy. page 76, col. 1, note 6 ; page 109, col. 2, note 4.
  1042. Voy. page 109, col. 2, note 8.
  1043. Nom d’un Asoura.
  1044. Nom d’un Asoura.
  1045. Autre nom d’Asoura.
  1046. Tous ces noms sont des noms d’Asouras.
  1047. Nom d’un Asoura.
  1048. Voy. pag. 62, col. 2, note 2 ; pag.106, col. 1, note 3 ; pag. 109, col. 2, note 12 ; pag. 111, col. 1, note 2, pag. 120, col. 1, note 2 ; page 162, col. 2, note 2.
  1049. Voy. page 75, col. 2, note 11.
  1050. Voy. page 73, col. 1, note 12.
  1051. Voy. page 60, col. 2, note 3.
  1052. Râdjarchi pris et emmené par les Asouras. Voy. page 111, col. 1, note 4.
  1053. C’est le fait mentionné plus haut, hymne v, vers. 12.
  1054. Voy. page 109, col. 2, note 8. C’est un conte allégorique sur le soleil revenant du bout de l’horizon : boiteux et aveugle pendant la nuit, il marche et il voit pendant le jour.
  1055. Noms de deux Asouras.
  1056. Voy. plus haut, note 1.
  1057. Mesure itinéraire.
  1058. Le commentaire les nomme Adhwaryou et Pratiprasthri.
  1059. Le commentateur trouve dans ce vers l’histoire d’Indra coupant les ailes aux montagnes volantes.
  1060. Nom d’un Asoura.
  1061. Ce char, c’est le sacrifice préparé pour Indra.
  1062. Ces quatre jougs sont peut-être les quatre côtés de l’enceinte du sacrifice. Le commentateur incertain ne sait s’il faut voir ici quatre espèces de vases, ou de prêtres, ou de cérémonies, ou d’offrandes. Ne serait-ce pas la prière en prose, l’hymne, l’offrande liquide, l’offrande solide ?
  1063. Ces trois fouets sont les trois tons de la voix ; peut-être les trois savanas.
  1064. Les sept guides sont les sept espèces de mètres sur lesquels les hymnes sont composés.
  1065. Les dix roues me semblent être, suivant le commentaire, dix offrandes contenues dans le vase du sacrifice (tchamasa). On compte aussi dix serviteurs du sacrifice, qui sont les dix doigts.
  1066. Le poëte désigne les trois savanas, ou sacrifices du matin, du midi et du soir.
  1067. C’est-à-dire, de l’homme.
  1068. Ces coursiers représentent le nombre d’akcharas ou de syllabes que contiennent les vers des invocations. Voy. page 148, col. 2, note 8.
  1069. Voy. page 76, col. 1, note 7.
  1070. Voy. page 174, col. 1, note 2.
  1071. Noms d’Asouras.
  1072. Voy. page 110, col. 1, note 10 ; page. 115, col. 1, note 2 ; page 110, col. 1, note 9.
  1073. Nom d’un Asoura.
  1074. Nous disons que le ciel est d’airain, lorsque la sécheresse dure longtemps.
  1075. Voy. page 60. col. 2, note 3.
  1076. Le texte dit Arya.
  1077. Pour exprimer cette idée, le poëte emploie le mot Twachtri.
  1078. Nom d’Agni. Voy. page 41, col. 2, note 1.
  1079. C’est un nom d’Agni, qui, dans cet hymne, quelquefois, se trouve confondu avec Indra.
  1080. Le commentaire pense qu’il est ici question des rayons du soleil. Je serais assez porté à considérer le mot swardris comme signifiant une portion de l’atmosphère.
  1081. Voy. page 44, col. 1, note 7.
  1082. Ces mots sont la paraphrase de l’épithète carnayoni, à laquelle on peut trouver un autre sens. D’après ce sens, la prière repose dans l’oreille du dieu.
  1083. Les Adityas sont au nombre de douze. Dakcha n’est pas ordinairement dans ce nombre.
  1084. Ces trois mondes (le texte dit : les trois terres) sont la terre, l’air et le ciel.
  1085. Le texte emploie le mot dyou, auquel le commentaire donne plusieurs sens. Ces trois dyous sont sans doute les trois régions de l’air qu’on nomme en anglais heaven, sky, ether ; ou bien ce sont les mondes que les Indiens appellent maharloka, swarloka, pitriloca. Voy. page 64, col. 1, note 2. Le mot dyou signifie brillant, et le commentaire propose encore de voir dans les trois dyous, Agni, Vâyou et le Soleil.
  1086. Ce sont les trois savanas ; ou ce sont trois rites, nommés rasâdâna, dhârana et virsadjana.
  1087. Asoura.
  1088. C’est l’heure du sacrifice du matin.
  1089. J’entends, par ces deux demeures, la demeure terrestre et la demeure céleste, obtenues l’une par ses armes, l’autre par sa piété.
  1090. Le commentateur entend tout ce passage des eaux de la pluie que Varouna envoie du ciel. Ce dieu qui tourne autour de la terre, c’est Agni (Parigman). C’est aussi une épithète de l’air, et l’on pourrait dire que les libations s’élèvent dans l’air, sous la forme de vapeurs : car, au lieu de ces mots comme pour le nourrir, on peut dire aussi comme un oiseau. Le commentateur, dans son système, veut que parigman s’entende de la terre.
  1091. C’est-à-dire, le sacrifice.
  1092. Voy. page 168, col. 1, note 1.
  1093. Voy. page 161, col. 2, note 1.
  1094. Nom d’Indra ou du soleil, non natus.
  1095. Nom d’Indra ou du soleil, quasi unipes. Les mots Adja et Ecapâd ont été réunis pour former un nom de Roudra.
  1096. Nom d’Agni. Voy, page 74, col. 1, note 4 ; page 104, col. 2, note 3.
  1097. Nom d’Indra.
  1098. C’est-à-dire, Agni.
  1099. C’est la pleine lune : la nouvelle lune s’appelle Couhoû ; le jour qui la précède, Sinîvâlî.
  1100. Voy. la note précédente.
  1101. Le commentateur dit que c’est le même personnage que Couhoû.
  1102. Épouse d’Indra.
  1103. Épouse de Varouna.
  1104. Prisni (voy. page 53, col. 1, note 5 ; page 66, col. 1, note 1 ; page 153, col. 2, note 1) est un nom que l’on donne à la terre, et même à l’air. Mais il me semble ici que ce mot, qui signifie multicolor, doit se rapporter au nuage. C’est au sein du nuage que Roudra, c’est-à-dire l’air, enfante les vents. Deux mots de cette phrase, vrichan, qui signifie taureau, et oudhan, qui veut dire mamelle, ont donné lieu à une légende. On suppose que Roudra, changé en taureau, a eu les Marouts de la Terre, changée en vache.
  1105. C’est-à-dire, du nuage, comme l’indique la note précédente, page 185, col. 2.
  1106. Nous avons vu, page 74. col. 1, note 4 ; page 104, col. 2, note 3, que Trita est la libation personnifiée. Outrager Trita est donc le fait de l’impie.
  1107. Le texte porte le mot dasagwa. Voy. page 80, col. 1, note 6. Le commentaire suppose que les Marouts, après des pratiques de dix mois, ont pris la forme des Angiras, et offert eux-mêmes le sacrifice. Il raconte une querelle survenue entre les Angiras et les Adityas ; querelle dans laquelle les Angiras obtinrent l’avantage par le moyen du sacrifice. Il serait fâcheux que, pour expliquer ce passage, on fût obligé de recourir à ce conte, inventé pour donner raison de ce vers. Nous avons vu ailleurs que les Angiras et les Marouts sont des agents du sacrifice. Les feux d’Agni doivent précéder et même engendrer les feux du soleil. Il est donc naturel que les Adityas soient vaincus par les Angiras.
  1108. Dans le système du commentateur, ces mots seraient les paroles des Marouts offrant le sacrifice, et disant aux Adityas : « Que les Adityas ne viennent à nous qu’avec l’aurore. »
  1109. Ces cinq sacrificateurs sont, à ce qu’il paraît, les cinq prânas, ou les cinq esprits vitaux (pantchaprânas).
  1110. C’est-à-dire, Agni, né des libations, apâm napât. Le commentaire, traduisant ces mots plus littéralement, aquarum nepos, forme cette généalogie d’Agni. L’eau du ciel fait naître le bois, le bois donne la vie au feu ; le feu est ainsi le petit-fils des eaux.
  1111. Agni est considéré comme Vêdyouta ou feu des nuages, et il habite alors au milieu des eaux. Il est encore considéré comme feu du sacrifice, et il est, sous cette forme, honoré par les eaux des libations qui viennent le trouver. Le feu nommé Oûrva est le feu des volcans sous-marins.
  1112. Ilâ, Saraswatî et Bhârati.
  1113. Ce sens n’est pas celui du commentaire ; cependant il m’avait paru qu’il était assez dans l’esprit de l’auteur d’établir une antithèse entre la fonction de nourrice et l’état de fille, et de dire que le dieu était nourri par ses filles. Agni est le fils nourricier de ces ondes qu’il a enfantées en sa qualité de Vêdyouta.
  1114. La phrase contient le mot aswa (equus) ; et le commentaire croit y voir une mention du fameux cheval Outtchésravas, qu’il donne comme étant le soleil.
  1115. Plus haut la coupe s’appelait hotra ; ici le vase se nomme potra. Un autre nom est nechtra.
  1116. Il est question des Aswins, ou bien de Mitra et Varouna.
  1117. J’ai tout à l’heure mentionné les trois noms qu’on donne au vase du sacrifice, hotra, potra et nechtra. J’ignore la différence qui existe entre ces trois vases ; je n’en puis établir d’autre que celle qui résulte de la signification des noms, d’où ces mots sont dérivés. Hotri est le prêtre qui offre l’holocauste, potri le prêtre qui purifie, nechtri le prêtre qui dirige le sacrifice.
  1118. Dieux des saisons. Voyez section I, lecture i, l’hymne 15, qui a des rapports avec cet hymne.
  1119. Cette coupe (potra) est présentée à Agni, invoqué quatre fois sous le nom de Dravinodâs (riche et libéral). Ce passage nous rappelle le vers 10 de l’hymne 13, de la section I, lecture i.
  1120. Savitri, c’est le soleil ; et le vers même indique l’étymologie de ce mot, qui vient de sava, création.
  1121. C’est-à-dire, du nuage qui rafraîchit la terre.
  1122. C’est-à-dire, l’aurore, qui précède le soleil et semble être sa mère.
  1123. C’est-à-dire, le soleil voilé, le soleil de nuit.
  1124. Les mètres (tchhandas) sur lesquels sont composés les hymnes sont appelés les épouses du dieu que ces hymnes célèbrent.
  1125. Le tchacravâka est une oie rouge (anas casarca, brahmany goose).
  1126. Ces sept roues, suivant le commentateur, sont les six ritous ou saisons, et le mois complémentaire.
  1127. Le commentaire renouvelle ici l’explication donnée pour les sept roues du char. Mais on ne peut l’admettre, puisque le nombre des ritous est trop grand. Ne serait-ce pas une allusion aux cinq éléments ?
  1128. Poûchan est le soleil qui brille dans le ciel ; Soma est la libation qui existe d’abord dans la plante, et ensuite dans l’air où s’élèvent ses exhalaisons. Le commentaire, tenant compte de la double signification du mot soma, établit le dieu Soma d’abord dans la plante où il naît, et ensuite dans la lune (tchandra). Nous n’avons pas encore vu que Soma fût, dans ces hymnes, identifié avec la lune.
  1129. Soma, par la vertu du sacrifice, est le créateur des mondes : Soma est une forme d’Agni.
  1130. Le poëte leur donne l’épithète de roudra.
  1131. C’est le nom du père de Gritsamada.
  1132. Voyez page 43, col. 1, note 1. J’entends le mot naditamé dans le sens de sonantium rerum optima. Je ne puis me résoudre à voir ici la rivière de Saraswatî.
  1133. Le nom de Capindjala se donne à un oiseau qui est le francolin. Il paraît qu’on l’emploie aussi pour le Tchâtaca (cuculus melano-leucus). Ce petit oiseau est supposé ne boire que l’eau du nuage, qu’il appelle par son cri. Le poëte compare au tchâtaca qui annonce la pluie, Indra qui, comme l’oiseau, vit dans l’air, et par le bruit de son tonnerre annonce la pluie.
  1134. C’est de ce côté que doit venir pour l’Indien le nuage.
  1135. Il faut supposer que ce foyer, comme dans le sacrifice, est tourné du côté du levant, de sorte que la droite est nécessairement le midi.
  1136. J’ignore si le tchâtaca a deux cris. Le lecteur reconnaîtra-t-il deux tons dans le bruit du tonnerre ?
  1137. Brâhmana : c’est la seconde fois que ce mot est employé. Voy. page 150, col. 1, note 2. Le commentaire traduit ce mot par brahmapoutra.
  1138. Le dictionnaire dit que carcarî est a water jar with a spout. Le commentaire explique carcarî par vâdyavisécha. Il semblerait donc que le carcarî serait un instrument, comme un tambour.
  1139. Ici finit le second mandala, terminé, comme le premier, par une petite pièce de vers qui me semble de la composition du copiste. (Voy. page 163, col. 1, note 4 ; et p. 41, col. 1, note 1.) Le troisième mandala porte le nom de Viswamitra.
  1140. Ce n’est plus le même poëte qui a composé cet hymne ; et ces libations, que quelques-uns appelaient les mères d’Agni, celui-ci peut les appeler ses sœurs. Agni et les libations n’ont-ils pas pour pères les dévas ?
  1141. Sans doute ce ne sont pas les sept rivières mentionnées à la page 61, col. 1, note 3. Ce sont les sept mères ou espèces de libations. Voy. page 146, col. 2, note 6.
  1142. Les vases des libations.
  1143. Ce sont les deux pièces de l’aranî, qui a donné naissance au feu. Le commentaire veut qu’il soit ici question du ciel et de la terre.
  1144. Tout ce passage m’a paru difficile : je n’ai pas cru devoir adopter la pensée du commentateur, lequel croit que ce père c’est l’air, qui, je ne sais comment, se trouve le père d’Agni. Je pense qu’il est ici question du soleil, père du monde, et, par la force de ses rayons, formant le nuage qui est comme la mamelle de la terre. Agni, en sa qualité de vêdyouta, existe dans le nuage que la foudre divise et fond dans les airs.
  1145. C’est-à-dire, le ciel et la terre.
  1146. Traduction du mot damoûnas. Voy. p. 122, col. 1, note 1.
  1147. Ces plantes servent, soit à alimenter le feu, soit à composer les libations.
  1148. Oûrva, volcan sous-marin.
  1149. Je croirais assez que le mot ilâ, au lieu de signifier terre, devrait se rendre par hymne.
  1150. Les deux pièces de l’aranî.
  1151. Les ousijds sont ordinairement les enfants de Cakchivân ; mais ce mot est synonyme de dévas. Dans cette phrase les ousidjs ou dévas sont évidemment les rites et cérémonies qui, dans le sacrifice, changent Agni terrestre en Agni vêdyouta et en Agni solaire.
  1152. C’est-à-dire, dans l’air.
  1153. Le germe d’Agni est dans l’aranî.
  1154. Vêswânara.
  1155. Mâtariswan est le vent, qui habite l’air ainsi qu’Agni vêdyouta : il anime le feu du foyer, et semble ainsi y avoir apporté le dieu. Il doit le reprendre, et le transporter dans le ciel.
  1156. Ces trois strophes sont ainsi consacrées à chanter les trois formes d’Agni, pârthiva (terrestre), vêdyouta (céleste), soûryaroûpa (solaire).
  1157. Traduisez autrement : bien disposé pour l’humanité.
  1158. Asoura.
  1159. Ousidj.
  1160. Ousidj.
  1161. Voy. page 47, col. 2, note 3.
  1162. Le texte donne ici un pronom qui est au duel. Le commentaire dit que les deux choses désignées sont Agni et le cousa. Je ne me rends pas compte de cette explication. Je pense que les deux personnes ainsi désignées sont les deux époux qui offrent le sacrifice.
  1163. Sapta hotrâni.
  1164. Il est question ici des rites personnifiés.
  1165. Voy. page 48, col. 1, note 3 ; et page 133, col. 1, note 9.
  1166. Voy. page 41, col. 2, note 3.
  1167. Voy. page 43, col. 1, note 1. Les Sâraswatas sont les mantras personnifiés, comme les dévas sont les chants aussi déifiés. Quant aux Bhâratis, je suppose que ce sont les gestes, les détails de l’action extérieure du sacrifice, personnifiés comme enfants de Bhârati.
  1168. Les Marouts, habitants de l’air, forment sept divisions, composées chacune de sept individus, total quarante-neuf Marouts. Le dieu de l’air est, par cette raison, appelé le dieu aux sept têtes.
  1169. De l’aranî. Il n’est point question ici du ciel et de la terre, comme le croit le commentateur.
  1170. C’est ici le ciel et la terre.
  1171. Ce mot n’existe pas dans le texte : sroutch. Il est donné par le commentaire. Je pense que le mot Ghritâtchi doit être considéré comme substantif, avec la signification de libation.
  1172. Ces dieux ne peuvent être que les rayons d’Agni.
  1173. J’ai compris de cette manière le mot oûma. Le commentaire y a vu une classe de Pitris.
  1174. Voy. page 133, col. 1, note 1.
  1175. Ce sont les sept rayons ou les sept langues d’Agni.
  1176. Il est singulier que le même mot, siti, signifie noir et blanc. Le dos d’Agni est la partie du bûcher noircie par la fumée, et sur laquelle s’élève la flamme blanche. Dans ma traduction j’ai cherché à concilier les deux sens contradictoires de l’épithète sitiprichtha.
  1177. C’est-à-dire le ciel et la terre. On pourrait aussi entendre le mot mâtarô comme désignant les deux pièces de l’Aranî.
  1178. Nous savons maintenant que les vaches, comme les coursiers d’Agni, ce sont les flammes.
  1179. Le mot voix est ici représenté par le mot go, qui signifie la vache ; et le texte dit que la vache chemine autour d’Agni. Voy. page 44, col. 1, note 7.
  1180. Je pense que le poëte personnifie les sept oblations, ou plutôt les sept mètres poétiques, et les cinq coupes du sacrifice. Il en fait autant des Richis, qui, au nombre de douze, représentent les ministres des Rites sacrés. Voy. page 53, col. 2, note 3 ; page 80, col. 1, note 6 ; page 86, col. 1, note 3.
  1181. Voy. page 133, col. 1, note 9.
  1182. Voy page 41, col. 2, note 3.
  1183. Ce mot Ilâ pourrait tout aussi bien signifier l’hymne du sacrifice. Ilâ me semble le nom d’un pays. Voyez plus bas, page 204, col. 1, note 1.
  1184. Les bois qui servent au sacrifice et les poteaux sont personnifiés par le poëte sous le nom de Vanaspati. C’est Agni, existant dans le bûcher et les pièces de bois de diverse nature employées pour le service sacré.
  1185. Je pense que ce mot désigne l’Arani ; ou bien, il faut supposer que l’auteur, considérant Vanaspati comme le bois des poteaux sacrés, le regarde tantôt comme planté en terre, tantôt comme couché sur le sol.
  1186. Sans doute le poteau (yoûpa) placé du côté de l’orient, où est le foyer Ahavanîya.
  1187. Il serait naturel de faire rapporter ce passage au dieu Agni, naissant dans le foyer. Et cependant je crois qu’il faut l’entendre de Vanaspati, amené, sous la forme des poteaux, au milieu de l’enceinte sacrée.
  1188. Littéralement ils sont Dévas.
  1189. Je rends ainsi le mot Prithivi.
  1190. Je suppose que par ce mot se trouvent désignés les prêtres, ou plutôt les Rites personnifiés.
  1191. Les poteaux ont été érigés du côté de l’orient, et par le fait de la consécration érigés à la dignité de Dévas ; ils s’élèvent dans l’air, séjour des êtres de leur nature.
  1192. Les Ondes sont les libations du sacrifice, qui nourrissent et entretiennent le feu. Voy. hymne XII, section II, lect. VI.
  1193. En ce moment Agni est dans l’Aranî, invisible et présent.
  1194. Le commentateur dit qu’il y a seize personnes occupées des soins du sacrifice, douze Adwaryous, qui marchent et agissent, et quatre Oudgatris, qui chantent les hymnes et restent assis.
  1195. C’est-à-dire les Rites personnifiés.
  1196. Les prêtres ont agité l’Aranî pour en extraire le feu, que le vent a excité de son souffle.
  1197. C’est-à-dire né par le secours des hommes, vivant au milieu des hommes et pour leur avantage.
  1198. Nous avons vu, page 63, col. 2, note 3, qu’il y avait trente-trois dieux, savoir les douze Adityas, les huit Vasous, les onze Roudras et les deux Aswins ; le commentateur, à la place des deux Aswins, met Indra et Pradjâpati. Ailleurs ces trente-trois dieux étaient considérés comme appartenant par tiers au ciel, à l’air et à la terre. Ici le nombre en est singulièrement augmenté, et le commentaire ne donne à ce sujet aucune explication. Je ne puis voir dans cette énumération que le résultat d’une addition dont les éléments, dans je ne sais quelle intention mystérieuse, auraient été disposés de cette manière.

    33
    303
    3003

    Le nombre de ces dieux pourrait encore être exprimé ainsi :

    303039

  1199. Page 89, il est question des quatre-vingt dix fleuves dont la foudre d’Indra ouvre la source. Ailleurs ce nombre est porté à 99. Voy. ibid., page 61.
  1200. Le commentaire traduit par le mot air, antarikcham.
  1201. Les vents par leur souffle augmentent l’ardeur du feu.
  1202. On peut donner deux sens à ces mots. Qu’Agni soit comme Manou, qui jadis dirigeait les sacrifices, ou bien qu’Agni dirigeant les sacrifices soit comme Manou, comme un homme parmi les hommes.
  1203. Le commentaire nous apprend que ces trois aliments sont les trois genres de libations, le beurre (âdjya), les plantes (ochadî) et le soma. Ces trois nourritures sont appelées les mères d’Agni.
  1204. Ouchasas, suivant le commentaire, est un nominatif pluriel. Je n’ai pas compris ce que pouvaient être ces trois aurores mères d’Agni. J’ai traduit comme si ouchasas était au génitif.
  1205. Je pense que l’auteur fait ici allusion au trichavana, ou aux trois sacrifices de la journée. Cependant, il pourrait bien aussi parler du trivédi, de la réunion des trois foyers où siége Agni.
  1206. La cérémonie sacrée s’accomplit en faisant le tour du feu de gauche à droite. Lois de Manou, liv. III, sl. 214.
  1207. Ce mot signifie un dieu qui vient vers le caillé, et doit ici s’entendre du soleil. Ailleurs ce peut être Agni.
  1208. Voy. page 201, col. 2, note 2.
  1209. Ce sont les trois coundas des feux Ahavanîya, Dakchina et Gârhapatya. Le commentaire croit que ce sont les trois mondes.
  1210. On appelle langue la flamme d’Agni, qui brille sur le triple foyer.
  1211. Le commentaire donne à ces corps les noms de Pavamâna, Pâvaca et Soutchi. Voy. page 203, col. 2, note 1 ; et page 205, col. 1, note 6.
  1212. C’est-à-dire toutes ces lueurs qui brillent dans les nuages.
  1213. Nom du soleil.
  1214. Le commentaire dit qu’Agni au ciel, c’est le feu du soleil et des astres ; sur la terre, c’est le feu Ahvanîya et les autres ; dans les plantes, c’est le feu dans l’Aranî et dans les bois du foyer ; dans les Ondes, que le commentateur prend pour les ondes des nuages, c’est le feu de la foudre, Vêdyouta.
  1215. Le commentaire dit que c’est par le moyen de la fumée.
  1216. Les dix doigts du prêtre.
  1217. Les pièces de bois qui composent l’Aranî.
  1218. On a vu, page 59, col. 2, note 3, que la fille de Manou se nommait Ilâ. On sait aussi (voy. ibid. et page 43, col. 1, note 1) que le mot Ilâ s’emploie pour désigner l’hymne et la déesse de la prière. De plus, la mythologie raconte que la terre, nommée Prithivî, fut changée en vache : or, Ilâ est encore un des noms de la terre et de la vache. Avec ces diverses acceptions données à un même mot, il est difficile de se déterminer pour le sens de cette phrase. J’ai entendu qu’il s’agissait ici du counda dans lequel est allumé le feu du sacrifice ; mais je ne serais pas étonné que le poëte, fidèle au goût de sa nation, qui aime assez les jeux de mots, eût en même temps voulu indiquer un point géographique, la terre d’Ilâ. Parmi les neuf varchas ou divisions du Djambou-Dwîpa se trouve une contrée appelée Ilâvrita. Le vers suivant complète quelques notions sur la position de cette région, également décrite dans le deuxième livre des Lois de Manou, sl. 17 et suivants, où elle est nommée Bramâvartta.
  1219. La Drichadwatî est le Caggar, et la Saraswatî, la Sarsoutî. Je ne sais quelle est la rivière qui portait le nom d’Apayâ.
  1220. Le mot Ilâ est encore employé ici pour signifier terre : le commentaire le rend par Outtarâvédî.
  1221. Il faut se rappeler qu’Agni est considéré comme brillant au ciel et sur la terre, soit comme Aditya et Vêdyouta, soit comme Ahvanîya.
  1222. Le commentateur pense que le séjour des Ondes, c’est l’air, Antarikcha. Je crois qu’il est ici question des ondes du sacrifice, des libations.
  1223. Voy. page 46, col. 2, note 1. Viswâmitra est un fils de Gâdhi ; ses enfants par conséquent descendent de Cousica.
  1224. Ce mot signifie ami de tous les hommes.
  1225. Ce mot désigne ordinairement le vent, et se traduit par cette idée : s’agrandissant au sein de l’air. Ce sens convient également à Agni, surtout à Agni Vêdyouta, et je pense que c’est à lui qu’il faut l’appliquer ici.
  1226. Vrihaspati est un nom d’Agni, et signifie maître du sacrifice étendu, comme s’il y avait Vrihatas pati.
  1227. Nom générique pour signifier l’homme.
  1228. Prichati ; c’est le daim porcin. Ce mot signifie aussi goutte d’eau.
  1229. C’est-à-dire que les nuages, qui sont leurs formes, se colorent des flammes d’Agni.
  1230. Ces daims, ces montures des Marouts, il est bien entendu que ce sont les nuages.
  1231. Voy. page 69, col. 1, note 1.
  1232. Le beurre jeté sur le foyer excite la flamme : c’est là l’œil d’Agni.
  1233. Agni brille dans le foyer comme Tryagni dans le soleil comme Aditya dans le nuage comme Vêdyouta ou comme Vâyou. (Voy. page 204, col. 2, note 4.) De là le nom composé qu’on lui donne Agnivâyousoûrya.
  1234. Agni par ses feux développe et semble créer le monde, qui au milieu des ténèbres a l’air de ne pas exister.
  1235. Le texte est plus métaphorique. Il se sert du mot pavitra, qui est le vase où se met la libation. Ces trois vases doivent être le foyer sur la terre, le soleil dans le ciel, les nuages dans l’air.
  1236. Agni semble jouir à la vue du ciel et de la terre. Le mot pitroh employé ici pourrait encore s’appliquer aux bois de l’Aranî, qui ont produit le feu, et qui sont placés non loin du foyer.
  1237. Dakcha est un personnage que nous avons déjà vu deux fois pages 94, col. 2, note 2, et 181, col. 1, note 1. Il semble y être présenté comme un Aditya, autrement dit comme une forme du Soleil ou d’Agni. J’ai dit que je regardais Dakcha comme une personnification du sacrifice, ou plutôt d’une partie du sacrifice ; je pensais que c’était la donation, à cause du mot dakchinâ, qui signifie présent. Mais, réflexion faite, je crois que Dakcha est la force industrielle, l’adresse, l’art employé dans le sacrifice. L’art s’occupe à former de terre le foyer dans lequel Agni doit naître et grandir. Ce foyer, appelé Ilâ ou la terre, est considéré comme enfant de Dakcha. Ce Dakcha, suivant les mythologues postérieurs, est né du pouce de Brahmâ : ces mythologues, en adoptant les idées allégoriques des Védas, les ont continuées sur un autre plan. Brahmâ, dans l’origine, était Agni ou le sacrifice ; un être né de son pouce semble devoir être l’adresse intelligente personnifiée. Dakcha est devenu un personnage important dans le Sivaïsme : sa fille y est la femme de Siva, Satî, et ensuite Pârvati. Il sera sans doute fort curieux d’étudier ces deux mythes, et de suivre leur transformation. Il y a quelques différences d’attributions, que les changements de croyance et de rites ont amenées. Le personnage de Dakcha indique dans l’histoire des religions indiennes une époque importante.
  1238. Ce mot doit ici signifier terre. Voy. page 204, col. 1, note 1.
  1239. Le mot sanscrit est napât, qui veut dire petit-fils ; et à ce sujet le commentaire donne au dieu Agni une généalogie singulière. De la nourriture sacrée (Annam) naît l’oblation (Ahouti) ; de l’oblation, Aditya ; d’Aditya, Agni. Il est d’autres généalogies différemment présentées, mais tout aussi arbitrairement.
  1240. Ce vers renferme le mot vrichan répété trois fois. C’est un ornement de style dans cette langue.
  1241. Cette espèce de sacrifice porte le nom de Savana. Il y en a trois, le matin, à midi et le soir.
  1242. Vispati. Agni s’appelle aussi Vispani, protecteur du peuple. L’Aranî, sa mère, peut bien porter le même nom. Voyez page 47, col. 1, note 2 ; page 57, col. 1, note 4 ; et page 147, col. 1, note 7.
  1243. C’est-à-dire de la terre, dont se compose le foyer, Agni, siégeant sur ce foyer, est appelé enfant de la terre. Voy. page 204, col. 1, notes 1 et 3.
  1244. Ilâpadé, ou Ilâyâhpadé. Le commentaire donne, comme synonyme de ce mot, Gopadé, qui littéralement se traduirait par pied de vache. Ilâ (terre) prendrait le même sens du mot go (vache) : car nous avons vu (page 44, col. 1, note 7) que ce mot go s’emploie pour tout ce qui donne un avantage, pour la chose qui fournit une espèce de lait. La terre est donc une vache, et, avec cette explication, le mot go peut remplacer le mot Ilâ. Mais l’imagination du commentateur, dans l’union des mots go et pada, perd de vue le côté métaphorique, et ne trouve ici que le sens matériel, en sorte que le mot Ilâpadé, il le traduit par cette idée, ayant la forme d’un pied de vache (Gopadaroûpé). Je ne sais pas si l’Outtaravêdi, qui recevait le feu du sacrifice, avait réellement quelque rapport avec le pied de la vache. Je pense que le mot pada doit être ramené au sens de place, station, établissement, ou, si pada doit conserver le sens de pied, je serais porté à traduire nâbhô ilâpadé par le foyer au pied de terre. Cependant j’ai cru aussi que le poëte avait voulu personnifier la terre sous le nom d’Ilâ ; et c’est ce qui m’a déterminé dans la traduction que j’ai donnée. À cette occasion j’exprimerai timidement une idée qui m’est particulière : il me semble avoir reconnu dans quelques parties du mythe d’Agni celui de Bacchus. Dans la circonstance présente, Agni au sein d’Ilâ, n’est-ce pas Bacchus dans les bras de Proserpine ?
  1245. Le texte dit : la matrice (yoni). C’est un nom de foyer. Le commentaire croit que c’est l’Aranî.
  1246. Garbha âsoura. Il paraît que l’Aranî porte le nom d’Asoura, parce qu’elle lance des rayons, asyati rasmîn.
  1247. Voy. page 47, col. 2, note 3.
  1248. Voy. page 48, col. 1, note 1.
  1249. Voy. page 204, col. 2, note 4.
  1250. Ce sont les dix doigts qui ont concouru à le tirer de l’Aranî, et qui travaillent encore à l’arroser de libations. Le texte se servant d’un mot féminin, a mis dix sœurs au lieu de dix frères.
  1251. Le commentaire explique le mot mâtouh par Prithivyah. Ce mot peut quelquefois s’entendre de la personne qui a préparé, mesuré, le sacrifice.
  1252. Asourasya djtharât. Le commentateur entend ces mots de l’Aranî, et pense que l’on désigne ainsi le bois dont elle est formée, câchtham Aranîroûpam. Voy. même page, col. 1, note 2.
  1253. Je n’ai pu adopter le sens du commentateur, qui suppose que les Cousicas étaient les premiers-nés de Brahmâ. J’ai pensé que brahmanah était un génitif qui signifiait science sacrée.
  1254. Je disais, page 45, col. 2, note 1, quel était le sens de Sousipra. Je dois ajouter que le commentateur donne à ce mot un nouveau sens, expliqué par sirostrânopéta, orné d’un casque.
  1255. Nom d’un Asoura, c’est-à-dire du nuage orageux. Ce mot veut dire retentissant.
  1256. Voy. page 61, col. 1, note 1, et page 62, col. 1, note 1.
  1257. Traduction de l’épithète alâtrinah, expliquée par alamâtardanah. Voy. l’histoire de Bala, page 44, col. 1, note 7.
  1258. Traduction de l’épithète haryaswa.
  1259. Nous avons dit, page 44, col. 1, note 7, tout ce que l’on pouvait entendre par le mot vache. Je suppose que l’auteur désigne le nuage. Cependant ce pourrait être la lumière ou le sacrifice.
  1260. Le mot bhaga, quand il signifie part, est du neutre. J’ai dû penser que par le masculin Bhaga le poëte désignait l’Aditya, auteur du bonheur pour les hommes.
  1261. Oûrva est le nom que l’on donne au volcan sous-marin Badavânala. Voyez à ce sujet ce qui est raconté, Harivansa, tome I, page 211. On fait aussi d’Oûrva un Asoura. Voy. plus bas page 211, ligne 5.
  1262. Le sacrificateur, qui dans le texte est appelé Pitâ (père), reçoit dans le commentaire le nom de Manou. Je crois que c’est une qualification générale ; il n’est pas moins vrai, selon moi, que l’idée contenue dans ce vers a donné naissance à la fable développée dans tous les Pourânas à l’occasion de Manou et de sa fille Ilâ : une idée analogue a également fait imaginer la fable de Brahmâ et de Saraswatî.
  1263. C’est-à-dire, les libations jetées sur le foyer ont développé le feu du sacrifice.
  1264. Le texte porte le mot mâtarah, qui est au pluriel, lorsqu’il devrait être au duel. Le père, c’est-à-dire le maître du sacrifice, enfante Agni en le tirant de l’Aranî et en le déposant sur le foyer : Ilâ, c’est-à-dire le foyer, le reçoit, le produit, le nourrit des libations, et forme ses rayons.
  1265. Ainsi sont désignées les flammes.
  1266. Voir pour le nombre 7, page 78, col. 1, note 2. Pour toute cette histoire je renvoie à la page 44, col. 1, note 7.
  1267. Saramâ est appelée Soupadi (qui est douée d’un bon pied), soit qu’on fasse allusion aux pieds dont se composent les vers des hymnes, soit qu’on rappelle le pada ou pied, sur lequel est établi le foyer, ilâpada.
  1268. Agni en sa qualité de sacrificateur.
  1269. Les Angiras sont les prêtres, ou les Rites personnifiés : les vaches sont ici les rayons de la lumière céleste.
  1270. Le commentateur croit que le sacrifice se fait non pour Indra, mais pour le Déva qui l’offre.
  1271. Soûri, celui qui fait les frais du sacrifice. Voyez page 121, col. 1, note 8.
  1272. Ce nom se donne ordinairement à Agni. Voyez page 122, col. 1, note 1.
  1273. Ces trois divinités sont Agni, Vâyou et Soûrya ou le Soleil. Voy. page 205, col. 1, note 6.
  1274. L’épithète manthin semble indiquer que le mélange a dû être battu. M. Wilson, au mot mantha, fait mention d’un plat composé de farine d’orge, de beurre et d’eau, a sort of gruel or porridge.
  1275. Le texte est bien difficile à traduire : altera nate terram operis. Image bizarre ! Le nuage s’intercale entre les deux parties sphériques du corps d’Indra, dont l’une est au ciel et l’autre sur la terre.
  1276. Je rends ainsi le mot oubhayé, que le commentateur traduit par ces mots obscurs : gens appartenant à deux familles, oubhayacoulavarttino djanah.
  1277. Voir page 202, col. 2, note 1.
  1278. Le texte porte Vipât : la Vipâsâ est une rivière du Penjab, nommée aujourd’hui Beyâh.
  1279. La Soutoudrî est appelée aussi Satadrou. C’est aujourd’hui le Setledj, qui va s’unir au Beyâh, pour former l’Hyphasis des Grecs.
  1280. Pour expliquer le sujet de cet hymne, on raconte que Viswâmitra, prêtre du roi Soudas, fils de Pidjavada, est renvoyé chez lui par ce prince avec de nombreux présents, et qu’arrivé au confluent de la Vipâsâ et de la Soutoudrî il est arrêté par la crue des eaux. Là il fait un sacrifice à Indra, pour obtenir de pouvoir passer à l’autre rivage. Je ne serais pas étonné que cette pièce n’eût été conçue que comme une allégorie, où sont représentées, sous la forme de rivières, les deux espèces de libations.
  1281. Ce mot signifie encore rivières.
  1282. Les Bharatas étaient une famille appartenant à la race lunaire : Viswâmitra était de la même race.
  1283. Je ne sais pourquoi le commentateur veut que le mot dhiyah soit traduit par le mot aurores.
  1284. C’est-à-dire le sacrifice, ou le nuage.
  1285. L’auteur se sert du mot varna, qui signifie couleur. Nous avons vu ailleurs que les Dasyous ou Asouras, esprits de ténèbres, sont d’une couleur noire, crichna.
  1286. Le commentateur entend cela des arbres qui servent au sacrifice, tels que le Khadira, le Pâlasa.
  1287. La Swadhâ est une espèce d’offrande. On peut croire aussi que le poëte compare les présents d’Indra à ceux que les hommes peuvent lui faire, et traduire par cette idée : Apporte-nous notre Swadhâ. Le mot Swadhâ signifie vivres, nourriture.
  1288. Dhânâh ; ce sont des pâtes d’orge frites.
  1289. C’est-à-dire le dieu traîné par des chevaux azurés.
  1290. Bhaga est une des formes d’Aditya, considérée comme l’auteur de tout bien. Le commentaire regarde ce mot comme un adjectif, bhadjanîya.
  1291. Ce mot, auquel on a donné plus tard la signification de dieu ayant fait cent sacrifices, semble avoir signifié d’abord, dieu capable de cent prouesses (bahoucarman). Voy. page 43, col. 2, note 1.
  1292. Voir page 45, col. 1, note 1.
  1293. Le poëte fait allusion aux anciens Richis, ou bien à ces Rites personnifiés sous le nom d’Angiras, et autres. Ces Rites, qui vont s’accomplir, semblent en quelque sorte revivre avec leur antique puissance.
  1294. Ce mot, pris ici en bonne part, désigne l’être qui donne la vie, c’est-à-dire le Soleil. Indra est à la fois l’Aditya du jour et l’Aditya de nuit, autrement Indra et Varouna. Plus loin le poëte appelle Indra et Varouna fils du Ciel (divo naptri), parce qu’en leur qualité d’âditya ils parcourent l’air le jour et la nuit.
  1295. Ces flammes reçoivent le nom de Gandharva.
  1296. Asouryam.
  1297. Indra prend le nom de Savitri (créateur), qui appartient ordinairement au Soleil.
  1298. L’expression sanscrite est pittoresque (gopâdjihwa). Quand la vache est rassurée, elle lèche son maître, à qui, dans cette circonstance, conviendrait parfaitement l’épithète latine blandus.
  1299. Ces jumeaux sont les Aswins.
  1300. L’auteur désigne les Angiras.
  1301. Voy. page 80, col. 1, note 6, les différents sens que l’on peut donner à ce passage. Il y a deux classes d’Angiras, les uns, à ce qu’il paraît (sect. I, lect. V, hym. I, vers 4), au nombre de sept, et les autres au nombre de dix, comme il résulte du passage présent. Le commentateur cite, parmi les Angiras, Médhâtithi, et ne voit dans ces Richis que deux classes de pénitents.
  1302. Ces expressions, qui se présentent souvent, me semblent avoir besoin d’être expliquées. Indra se trouve loin (parâvatas) lorsqu’il fait encore nuit, et que le soleil est sous l’horizon. Il est près lorsque le jour luit, et que le dieu est présent, soit à l’orient, soit à l’occident, et semble plus rapproché des hommes. Voy. page 63, col. 1, note 6.
  1303. Voy. page 61, col. 2, note 2.
  1304. Voy. page 89, col. 1, note 2. Le commentaire explique le mot syéna de cette manière : tchhandoroûpah, souparnah.
  1305. Hari.
  1306. Il faut entendre par ces chevaux d’Indra les rayons lumineux de l’atmosphère, lesquels brillent au ciel et sur la terre. Quand ces chevaux sont spécialement désignés comme n’étant que deux, alors c’est le ciel même et la terre apparaissant à la faveur de la lumière éthérée.
  1307. Somalatâ. Voy. page 162, col. 2, note 2.
  1308. Indra, qui est un des éléments, a pour mère Aditi, qui est l’ensemble même de la nature. On donne pour époux à Aditi le grand Casyapa. Telle est l’explication du commentaire. Nous n’avons pas encore eu l’occasion de rencontrer dans les hymnes du Rig-Véda la mention de ce personnage de Casyapa : ce qui me fait douter de l’explication du commentateur. Je croirais assez qu’ici la mère d’Indra, c’est la vache du sacrifice, ou plutôt la flamme, épouse d’Agni, lequel on peut appeler avec quelque raison Mahâ pitri.
  1309. Twachtri est Agni Vêdyouta, ou le feu des nuages. Le commentateur regarde Twachtri comme un Asoura.
  1310. Voy. page 73, col. 2, note 3.
  1311. Les Ritous et les Vâdjas sont deux classes de dieux. Voy. page 49, col. 1, note 1, et page 108, col. 2, note 4.
  1312. Voy. page 120, col. 2, note 5.
  1313. Nous savons que Satchî est l’épouse d’Indra. Ce mot Satchî est quelquefois regardé comme synonyme de Sakti, et dans ce cas il exprimerait l’idée de puissance. Cependant il a pour racine le mot satch, qui signifie parler : et dans ce cas Satchi serait une divinité du sacrifice qui devient l’épouse d’Indra. C’est la sainte Raison s’unissant au Pouvoir souverain. Voy. page 57, col. 2, note 7.
  1314. Pour entendre ce passage, j’ai pensé qu’il était elliptique. L’explication du commentaire n’est pas claire, et je la crois fort éloignée du sens que je donne.
  1315. Oubhayatra. Le commentaire dit que d’un côté est l’épouse, de l’autre le soma.
  1316. Les Bhodjas, dit le commentateur, sont les enfants de Soudâs. Il pense que les Angiras, de formes différentes, sont des Richis de races différentes, tels que Médhâtithi et autres. Je crois que les personnages désignés dans ce passage sont les Rites personnifiés, ou les Dévas du sacrifice. Au sujet des Angiras, voyez plus haut, page 215, col. 2, note 3.
  1317. Je suppose que ce sont les dieux appelés Adityas.
  1318. Ce sont les Marouts. Roudra reçoit le nom d’Asoura, c’est-à-dire celui qui donne la vie. Voy. page 120, col. 2, note 2.
  1319. Voy. page 211, col. 2, note 4.
  1320. Roi, fils de Pidjavana. Le cheval, dont il est ici question, est ou l’emblème du sacrifice, ou le coursier destiné à l’Aswamédha.
  1321. Voy. page 212, col. 1, note 2.
  1322. C’est un peuple impie (nâstica) non Arya, (anârya). Les Kicatas sont placés dans le Béhar.
  1323. Le Nîtchâ est l’homme appartenant aux classes dégradées, ou bien aux tribus étrangères et méprisées. Le sens de cette phrase peut aussi bien s’appliquer à Vritra, à ce vil brigand, qui accapare les eaux du nuage, et qui ne les donne que lorsqu’il y est forcé par Indra.
  1324. Djamadagni est un saint Richi, père du fameux Parasou-Râma. Viswâmitra était son oncle, et devait être du même âge que lui, si l’on en croit l’anecdote racontée à l’occasion de sa naissance. Voy. Harivansa, tome I, page 121.
  1325. La Prière vient le matin en même temps que le Soleil. C’est pour cela que le poëte l’appelle sa fille : il lui donne ici le nom de Sasarparih. J’avoue cependant que ce passage pourrait tout aussi bien se rapporter à l’Aurore. Le mot Pakchyâ convient mieux à un être représenté comme ailé.
  1326. Voy. page 45, col. 1, note 1.
  1327. Le commentateur suppose que Viswâmitra, en sortant du sacrifice de Soudas, fait l’éloge du char sur lequel il va monter. Je pense que le poëte emploie ici la métaphore habituelle par laquelle le sacrifice est comparé à un char. Il souhaite que toutes les parties de ce char, par la grâce d’Indra, soient en bon état. Si ce n’est pas le char du sacrifice, c’est du moins le char de la vie.
  1328. Mimosa Catechu, ou Khayar. Le bois de cet arbre est employé dans les sacrifices.
  1329. Dalbergia Sisu. Lisez dans le texte Sinsapâ.
  1330. Le texte porte : Que ce Vanaspati, etc. Ce mot Vanaspati signifie maître du bois. Il s’emploie pour désigner un arbre grand et fort ; c’est aussi un nom d’Agni, comme présidant aux bois qui s’emploient dans le sacrifice.
  1331. Le commentateur veut que cette strophe soit une imprécation de Viswâmitra contre Vasichtha, qui avait offensé le roi Soudas.
  1332. Le commentaire dit que c’est le même que le Sâlmali (Bombex heptaphyllon).
  1333. Cette strophe me semble contenir des métaphores, dont l’application est générale. Le commentateur raconte que Vasichtha est pris, enchaîné et amené par les gens de son ennemi. Il traduit donc ainsi : « Il n’a point de souci du trait (de la malédiction). Les gens entraînent le chasseur, le prenant pour un vil animal. » Viswâmitra est pour la suite censé se comparer avec Vasichtha ; il est le cheval, et Vasichtha est l’âne.
  1334. Le commentaire pense qu’il est ici question du Soleil.
  1335. Voy. page 52, col. 1, note 2.
  1336. C’est un des Adityas, dont le nom est synonyme de Bonheur : le dieu de la Prospérité.
  1337. Le commentateur croit que le mot Parvata doit ici s’entendre des Marouts. Il faut en effet se rappeler que le nuage n’est que la forme du vent.
  1338. Cette vache, suivant le commentaire, serait le nuage ; par conséquent le lieu où naît l’être lumineux serait ou la mer ou l’air. Je ne saurais accepter ce sens : l’être lumineux que le poëte désigne ici, c’est Agni dans le sacrifice.
  1339. Le mot sanscrit est asouratwam, c’est-à-dire la qualité de ce qui donne la vie, de l’Asoura.
  1340. C’est-à-dire pour les hommes et les dieux, habitant les uns la terre, les autres le ciel.
  1341. Voy. page 41, col. 2, note 3, et section ii, lect. viii, hymne XI, stance 7.
  1342. Nous avons vu ailleurs (page 109, col. 1, note 3) les explications différentes que l’on donne de l’épithète Dwimâtri, attribuée à Agni. Je crois que l’application de ce surnom varie suivant l’esprit du poëte, qui envisage le dieu dans des positions différentes. Les deux mères d’Agni sont tantôt les deux pièces de l’Aranî, dont il est extrait, tantôt les deux libations qui le nourrissent, tantôt, et ici même suivant le commentaire, le Ciel et la Terre. Nous avons vu plus haut dans cette section, lecture i, hymne xxiii, strophe 3, que le dieu Agni est appelé aussi le fils d’Ilâ, c’est-à-dire du foyer qui le soutient. Je pense que dans le passage présent les deux mères que le poëte donne à Agni sont le Foyer et la Libation que l’on verse sur le feu. Le verbe kcheti indique que la Libation repose sur le feu en le recouvrant d’une couche liquide.
  1343. Le poëte désigne ici Agni devenu Soleil.
  1344. Ce séjour de Rita, c’est le lieu du sacrifice ; les deux vaches, c’est le foyer (Ilâ) et la flamme (Djwâlâ), qui semblent ne pouvoir exister l’un sans l’autre. L’incertitude du commentaire sur ce passage est fort grande. Dans ces deux vaches il voit le Ciel et la Terre ; il explique le mot douhitâ, qu’il attribue au ciel, par ceux-ci doûré hitâ, (placée loin).
  1345. C’est-à-dire du sacrifice. Le commentateur veut que la vache de ce passage soit le ciel ; son mugissement, c’est le tonnerre ; sa mamelle, c’est le nuage ; la pluie, c’est la langue dont il lèche le nourrisson de la terre. Rita, suivant lui, c’est Aditya, le Soleil, qui a produit le nuage.
  1346. Le mot Padyâ, de pada (pied), signifie la louange, l’hymne. Dans le système du poëte, la poésie doit être représentée comme une des vaches qui contribuent à la nourriture et à l’éducation d’Agni. Le commentaire voit encore ici la Terre couverte de toute espèce d’êtres ; il y reconnaît surtout le Foyer. Suivant moi, ce dernier sens arrive trop tard.
  1347. Le commentaire entend ce passage des vaches célestes, ou des nuages.
  1348. Littéralement il est Bhaga, Aditya qui brille pendant le jour.
  1349. Les chevaux d’Indra, ce sont les sacrifices célébrés en son honneur. Il y a six Ritous, ou saisons, qui ramènent les époques de ces sacrifices, et probablement les principaux sont au nombre de dix (dasataya). Je n’ose pas dire que ce nombre de dix a quelques rapports avec les dix points cardinaux ou disas. Voy. page 53, col. 2, note 1 ; page 121, col. 2, note 1.
  1350. Les trois mondes sont le ciel, l’air et la terre. La terre seule par sa nature est visible. Le commentateur pense que le poëte a eu l’intention de célébrer dans cet hymne Samvalsara, c’est-à-dire l’année.
  1351. Le poëte fait allusion aux trois savanas.
  1352. C’est-à-dire les libations.
  1353. Le dieu célébré dans les strophes est Agni, considéré comme existant tantôt dans le foyer, tantôt dans le ciel sous la forme du Soleil. Le Soleil, comme on sait, a trois stations comme aussi Agni a trois foyers, comme il y a trois sacrifices par jour. Voilà l’explication de ce nombre trois, répété plusieurs fois avec une application évidemment différente.
  1354. Trimâtri. Voy. page 109, col. 1, note 3 ; une explication analogue a été donnée au mot dwimâtri.
  1355. C’est-à-dire Ilâ, Saraswatî et Bhâratî. Voy. page 43, col. 1, note 1, et page 47, col. 2, note 1.
  1356. Cette triple opulence, dit le commentaire, consiste en troupeaux, en or, en pierres précieuses.
  1357. Suivant le commentateur, l’air, autarikcham.
  1358. Le mot Asoura est ici pris en bonne part, et désigne Agni ou le Soleil. Les trois êtres qu’on appelle ses hommes (vîrâs) sont les trois feux des trois savanas. Le commentaire, qui a pensé que cet hymne s’adressait à Samvatsara, trouve dans les trois êtres indiqués Agni, Vâyou, Soûrya.
  1359. Le commentateur voit dans ce passage une personnification des plantes qui servent aux libations, ou bien des rayons du soleil. J’ai mieux aimé y reconnaître les Prières, qui, ainsi qu’il a été dit ailleurs, sont quelquefois regardées comme les épouses des Dieux. Les épouses d’Agni contribuent à l’enfantement de la Lumière.
  1360. C’est-à-dire pour l’homme.
  1361. C’est-à-dire ample, étendue, allant au loin.
  1362. Le poëte désigne par ces mots l’Aurore qui naît au moment du sacrifice. Ce pourrait être aussi bien la Prière du matin.
  1363. C’est-à-dire le soleil.
  1364. La fable donne pour fille au roi Djahnou la rivière du Gange. Voy. Harivansa, tome I, pages 120 et 147.
  1365. Le commentaire croit que le mot ilâ est ici synonyme de nourriture sacrée.
  1366. Voy. page 45, col. 1, note 1.
  1367. Le texte les désigne par le mot Ousidj.
  1368. Voy. page 51, col. 1, note 1.
  1369. C’est-à-dire nés de la race humaine. Soudhanwan, leur père, était fils d’Angiras, lequel, suivant la mythologie, devait le jour à Brahmâ. Il y a un rapprochement probable entre le nom de Soudhanwan et le verbe dhanwati.
  1370. Je hasarde ce sens. Satchî, épouse d’Indra, est l’œuvre sainte, qui doit faire le bonheur de ce céleste époux, surnommé Satchîpati.
  1371. Je suis bien éloigné du sens que le commentaire donne à Swasarâni. Il traduit ce mot par jours, ahâni.
  1372. C’est-à-dire des mortels, dont Manou est le père.
  1373. Ces coursiers, ce sont les rayons du matin, Kéta, ou les sacrifices. Voyez page 225, col. 1, note 4.
  1374. Rita est Agni, dieu du sacrifice. Ce passage fait allusion au foyer qui vient d’être allumé, ou à l’Orient qui s’illumine.
  1375. C’est-à-dire les Prières, qui portent le nom de Varoutrî. Voy. page 52, col. 2, note 3.
  1376. Voy. page 52, col. 2, note 1.
  1377. Voy. page 43, col. 1, note 1.
  1378. La libation personnifiée.
  1379. Ici finit le troisième Mandala, qui porte le nom de Viswâmitra, et commence le quatrième, qui est appelé le Mandala de Vâmadéva.
  1380. Le commentaire rappelle ici la triade d’Agni, de Vâyou et du Soleil, considérés comme le même personnage. N’est-ce pas une répétition de la distinction que l’on fait quand on voit dans Agni le feu du sacrifice, le feu de la foudre et le feu du soleil ? Agni, comme nous l’avons vu, naît aussi sur la terre, dans l’air et dans le ciel ; trois fois aussi, chaque jour, il naît pour le sacrifice.
  1381. L’auteur se sert du mot Arya.
  1382. Il semble que cette strophe ait rapport à l’Aditya, c’est-à dire à Agni devenu le Soleil, fils du Ciel. Cependant j’ai préféré donner au mot Dyôh un sens que j’ai déjà rencontré, et que le commentateur représente par le mot slotri (laudator).
  1383. Les pieds et la tête d’Agni, ce sont ses rayons et sa flamme. Le feu de la foudre se cache et n’apparaît que par l’éclair.
  1384. Le commentaire dit que ce sont les ministres chargés des sept libations, sapta hotracas. Voy. page 78, col. 1, note 2.
  1385. Voy. page 44, col. 1, note 7. Les ancêtres ici désignés, ce sont les Angiras.
  1386. Le même mot mâtri signifie mère et mesureur. Les mesures auxquelles il est fait allusion sont les tchhandas appropriés aux hymnes des sacrifices.
  1387. Aditi est la mère des dieux. Il y a dans ces vers une espèce d’antithèse entre les mots Aditi et Atithis.
  1388. Vrichanah. Ce mot doit s’entendre des libations, qui fécondent le sacrifice ; à moins que l’auteur n’ait voulu ainsi désigner les dieux eux-mêmes, qui répandent l’abondance.
  1389. Je suppose que le poëte fait allusion au Ciel et à la Terre, que le sacrifice du matin semble produire, et qui commencent en ce moment leur course rapide.
  1390. Je traduis ainsi le mot Arya.
  1391. Cette strophe me semble être une apostrophe adressée par Vâmadéva aux prêtres assistants, et formant avec lui le nombre de sept : ce sont les sept hotracas. Il leur dit de se considérer comme les antiques Angiras, chargés des sacrifices du matin, comme des enfants du Ciel ou du Soleil (divas poutrâh), c’est-à-dire comme des serviteurs disposés à montrer une obéissance toute filiale. Dans l’Orient, le mot poutrâh entraîne l’idée de la subordination que doit le serviteur.
  1392. Le mot sanscrit est Sarou, commenté par le mot Samvatsara. C’est le temps, représenté aussi par Nirriti, déesse du mal.
  1393. N’oublions pas que Rita est le sacrifice personnifié.
  1394. La vache du sacrifice, c’est la flamme.
  1395. Voy. page 41, col. 2, note 1.
  1396. Voy. page 122, col. 1, note 1.
  1397. Le personnage dont il est ici question est Dîrghatamas, fils d’Outchathya et de Mamatâ (section II, lecture iii, hymne 1). La légende raconte que Vrihaspati, son frère, le maudit lorsqu’il était encore dans le sein de sa mère, et que Dîrghatamas, par suite de cette malédiction, devint aveugle. Agni fut invoqué, et lui donna l’usage de la lumière. Voy. page 142, col. 1, note 4, l’histoire de Dîrghatamas, qui me semblait difficile à expliquer. Ce personnage me paraît allégorique. Je suppose que c’est Agni caché au milieu des ténèbres.
  1398. Voy. page 78, col. 1, note 4.
  1399. Dwibarhas. Voy. page 85, col. 2, note 1.
  1400. Il me semble que je traduis littéralement. Le commentaire trouve qu’il est ici question de l’enfer, Naracastânan. Ceux qui n’allument pas les feux d’Agni laissent le lieu du sacrifice dans une obscurité coupable.
  1401. Le commentateur donne à toute cette phrase un autre sens. Il suppose que le poëte prie Agni de lui accorder de grandes et larges richesses, qui le rendent victorieux et lui apportent l’abondance, richesses composées de sept espèces de biens. Il explique alors qu’il y a sept animaux domestiques, sept animaux des bois, etc. J’ai peut-être forcé le sens ; mais j’ai adopté une idée déjà connue. Voy. page 78, col. 1, note 2.
  1402. Je ne crois pas que par le mot agré l’auteur désigne l’Orient, où se lève le Soleil, mais le foyer qu’on allume du côté de l’orient. Au reste, j’ai fait mon expression assez vague pour qu’elle puisse présenter l’un et l’autre sens.
  1403. Je suppose que cette vache, c’est la prière, ou c’est le sacrifice lui-même.
  1404. Le commentaire donne à ce mot le sens de privés d’offrandes.
  1405. Le mot Kchiti ne signifierait-il pas plutôt palais, habitation royale ? Il a ordinairement le sens de terre, et la terre est la source de toute richesse. J’ai suivi le commentaire.
  1406. Allusion aux trois foyers, ou bien aux trois Savanas.
  1407. Ce sont les dix doigts qui travaillent à extraire Agni de l’Aranî.
  1408. Nom de l’homme.
  1409. Le mot Apnavânah est considéré par le commentaire comme le nom d’un Richi. Je l’ai regardé comme une épithète de la même nature que le mot Bhrigavâna, qui est dans la quatrième stance.
  1410. Le commentaire explique le mot cratou par cartri, oupacartri. Ne serait-il pas mieux de laisser à ce mot son sens ordinaire ? Agni est bon comme le sacrifice.
  1411. Ce vers renferme le mot Kchatriya, qui ne me semble pas ici emporter l’idée de caste, mais qui signifie le possesseur du Kchatra, c’est-à-dire de la force, d’un domaine qui donne la puissance. Le commentateur rend ce mot par bala.
  1412. Ce vers présente le mot aditeh, que le commentaire traduit par bhoûmeh, que je ne comprends pas. Je suppose qu’aditeh est un ablatif qui sert d’adverbe, et qui signifie entièrement, sine reliquo, ou un génitif du subtantif aditih, absence de partage. Dans ce dernier cas je traduirais ainsi : Rends-nous innocents de ne t’avoir pas donné ta part dans le sacrifice.
  1413. Je n’ai pas su jusqu’à présent ce que l’on entendait précisément par cette classe de divinités appelées Vasous. Le mot Vasou, expliqué dans le commentaire par Vâsayitri, Vâsitri, et Vâsata, comporte l’idée d’un protecteur qui établit et consolide la position de son protégé. Il peut donc s’appliquer à tous les dieux ; mais il s’emploie particulièrement pour Agni. Le commentateur donne ici à ce mot le sens d’Aynayah. Les Vasous seraient donc les feux du sacrifice, qui délivrent et lâchent la vache, c’est-à-dire la flamme attachée au foyer par sa partie inférieure. Pour quel motif a-t-on, plus tard sans doute, compté huit Vasous ? Je n’en connais pas la raison, à moins que l’on n’ait vu quelque analogie entre les Vasous et les Achtadikpâlas, ou les huit gardiens du ciel.
  1414. Les Pourânas citent plusieurs Srindjayas ; aucun n’a pour père Dévavâta. Voy. note 3 ci-dessous.
  1415. Un Aditya ; le Soleil.
  1416. Le Vichnou-Pourâna signale un Somaca, fils de Sahadéva, Traduction de M. Wilson, p. 433. Il cite aussi un Sahadéva, fils de Srindjaya, p. 354. Voy. Harivansa, tome I, page 149, où Somaca descend à la cinquième génération d’un Srindjaya, fils de Mitrayou, et petit-fils de Divodâsa.
  1417. Je traduis ainsi le mot Vrichan, que le commentateur semble appliquer à Indra. Si je devais le faire
  1418. On se rappelle que le feu est censé avoir sept rayons ; de là vient qu’Agni a les épithètes de Saptadjihwa, Saptadjwâla, Saptadidhiti, Saptârtchis, dieu aux sept langues, aux sept flammes, aux sept rayons. Le nombre sept pourrait encore s’entendre des sept genres de mètres sur lesquels se composent les hymnes, et qui concourent à la formation de la lumière.
  1419. Cette idée est exprimée par le mot asman, qui signifie pierre. Le mot caverne, que j’ai choisi, a une double signification, que je prie le lecteur de vouloir bien adopter suivant la circonstance. Tantôt ce mot caverne représente le nuage qui renferme en son sein l’onde salutaire ; tantôt ce même mot se rapporte à l’enveloppe ténébreuse de la nuit, d’où apparaissent les rayons du jour.
  1420. Voy. page 44, col. 1, note 7.
  1421. Le commentateur entend ce passage d’une manière toute différente. Il suppose qu’il se rapporte au Coutsa, dont il sera question dans la strophe suivante ; il dit donc : Ô maghavan, tu es venu combler de tes bienfaits le poëte qui te chantait. Tu t’es placé près de lui pour le secourir. Il demandait ta protection, et Dasyou, magicien impie, est tombé sous tes coups. Je n’ai pas adopté ce sens, parce que la strophe suivante commence par un impératif, yâhi.
  1422. Couyava est un Asoura. Voy. page 104. Quant à Coutsa, voy. page 62, col. 2, note 2 ; page 106, col. 1, note 3 ; page 156, col. 1, note 2. Coutsa, dit la légende, est un râdjarchi, fils de Rourou ; sa mère est Adjounî. Incapable de lutter contre ses ennemis, il appela Indra à son secours. Indra se rendit à sa maison, et, tua ses ennemis en prenant sa figure. Coutsa était ainsi devenu l’ami d’Indra, qui se trouvait son commensal. Satchî, l’épouse d’Indra, vint pour visiter son époux, et en voyant deux formes semblables, elle se trompa, et prit Coutsa pour Indra. Je ne sais pas bien l’explication que l’on peut donner de cette légende. Coutsa quelquefois signifie la foudre ; coutsya veut dire l’arme de Coutsa. Coutsa pourrait bien être l’éclaircie personnifiée ; quand le ciel se découvre partiellement, on peut prendre l’éclaircie pour Indra lui-même.
  1423. Ridjiswan est un prince dont il a été question page 73, 75 et surtout 102.
  1424. Quand le poëte à chaque instant nous représente le Ciel comme engendré par Indra, je ne pouvais pas ici dire que le Ciel (dyôh) est le père d’Indra. J’ai donc regardé dyôh comme ayant la signification de prêtre, de ministre éclatant du culte ; signification que je lui ai déjà donnée. Voy. page 230, col. 1, note 2.
  1425. C’est-à-dire du Ciel et de la Terre.
  1426. Voy. page 76, col. 1, note 7 ; section I, lecture iv, hymne xv, st. 13, et même section, lecture viii, hymne ix, st. 13. Je restitue de cette manière la légende d’Étasa, que, surtout page 120, je crois avoir défigurée. Swaswa avait obtenu que le Soleil (Soùrya) s’incarnât et devînt son fils. Le Richi Étasa eut un démêlé avec Soûrya, et il pria Indra de le secourir. Dans un combat Étasa, devenu prisonnier, se trouvait emporté sur le char de Soûrya : Indra brisa une roue de ce char, et arrêta ainsi le ravisseur d’Étasa. Le deuxième vers de cette strophe semble indiquer le sens de cette légende. Étasa serait le nuage que le Soleil paraît emporter dans sa course. Indra brise la roue ou le disque du Soleil, c’est-à-dire obscurcit ses rayons ; le nuage s’arrête, se condense et arrose la terre.
  1427. Il y a une cérémonie que l’on nomme askinî, et qui semble devoir être une libation. Elle a lieu le matin quand la nuit règne encore, ou le soir quand la nuit commence : car le mot askinî signifie noire. Le vers ici traduit est ce qu’on appelle écapadi. Il n’a qu’un pada, ou le quart d’une stance.
  1428. Je suis loin d’être d’accord avec le commentateur sur tous les détails de cet hymne. Il serait très-long de m’expliquer sur ce dissentiment. Je ne citerai qu’un seul exemple, qui fera sentir la profonde différence qui existe dans nos deux manières de voir. Il pense que par le mot mère il faut entendre ici Aditi, la mère des dieux. Je crois que la mère dont parle le poëte, c’est la vache du sacrifice, la flamme, qui risque de s’éteindre sous les libations multipliées. Il y a dans ce passage un mot qui n’est pas rendu exactement, et sur lequel je vais m’expliquer. Ce mot est amouyâ, pronom féminin au troisième cas. Voici comme je conçois l’esprit de cette strophe : le sacrifice du matin, qui est la matrice où naissent les dieux, se poursuit. La flamme est allumée, mais il est à craindre qu’elle ne soit étouffée par la libation qui sort de la cuiller sacrée, djouhoû. C’est ce mot djouhoû qui me semble sous-entendu, et qui est désigné par le pronom amouyâ. Mâ mâtaram amouya pattavé cah ; ne fais pas tomber la mère avec cette cuiller, c’est-à-dire n’abats point la flamme avec la libation.
  1429. On se souvient que c’est par la force que le feu est extrait de l’Aranî. Le poëte va maintenant employer la prière avec Indra.
  1430. Twachtri est Agni : sa demeure, c’est le lieu du sacrifice.
  1431. C’est, dit le commentaire, une Rakchasî. Je crois que par ce mot on désigne la terre sèche et altérée.
  1432. Nom d’un Rakchasa.
  1433. Ainsi, dans la mythologie grecque, Jupiter combattant les Titans est abandonné des autres dieux, excepté d’Hercule (Hari) ou de Bacchus (Bhagavan). Vichnou est le Soleil, qui seconde Indra dans sa lutte contre les ténèbres.
  1434. Le commentaire dit que c’est le père même d’Indra qui est frappé et tué par son fils. Ce sens m’a paru hasardé. Je ne connais pas la légende qui pourrait y donner lieu. Cependant si ce sens était préféré, il faudrait modifier ainsi la traduction du commencement de la strophe : « Qui a (comme toi) rendu sa mère veuve ? »
  1435. Voy. plus bas, page 247, col. 2, note 2.
  1436. Le texte porte aparwan, que le commentateur rend par pôrnamâsi, oubliant que le jour de la pleine lune est précisément un parwan. J’ai pensé que ce mot représentait la fissure du nuage, au moment où la foudre le déchire : c’est un endroit où il n’y a point de nœud de jointure.
  1437. Voy. page. 76, col. 1, note 6.
  1438. C’est le nuage, qui, considéré comme rivière, porte le nom d’Agroû, et sera personnifié plus bas. J’ai cru pouvoir rendre l’adjectif nabhanou par céleste, malgré le commentaire.
  1439. Agroû est le nuage personnifié. L’eau du nuage est aussi personnifiée, et considérée comme l’enfant d’Agroû ; elle est Ahi, nommé aussi Parâvrikta. Ahi signifie par lui-même serpent ; et caché au sein de la nue, il se trouve naturellement comparé à ce reptile. Une méthode employée pour faire sortir les serpents de leurs trous consiste à les remplir de fourmis. C’est cette méthode qu’emploie Indra pour obtenir l’eau du nuage.
  1440. Osidja, comme qui dirait descendant d’Ousidj, enfant de dévot.
  1441. Je pense, malgré le commentaire, qu’il est ici question d’Agni.
  1442. Suivant le commentateur, ce mot est une épithète d’Indra, considéré comme fils de Pradjâpati Bharwara. Il traduit cette expression par djagadbhartri (soutien du monde). Ce pourrait être aussi bien une épithéte d’Agni.
  1443. Gôramriga.
  1444. Bos gavœus, gavaya.
  1445. C’est-à-dire à l’homme.
  1446. Le poëte appelle la foudre tchalourasri, c’est-à-dire quadrangulaire ; je ne sais pour quel motif.
  1447. Nœud se dit parwan ; de là vient que la montagne ou le nuage s’appelle parwata (nodosus).
  1448. Déesse du mal, appelée Nirriti ; c’est ici la déesse des ténèbres, c’est l’Obscurité surnommée Anindra.
  1449. Je suppose que ce sont les rayons d’Agni.
  1450. Ce passage fait allusion à la Terre et au Ciel. Les deux vaches pourraient être aussi la Nuit et le Jour, ou plutôt le Matin et le Soir, qui amènent l’heure du sacrifice.
  1451. Le commentateur, qui entend tout ce passage autrement, pense, entre autres choses, que le mot patni (épouse) doit se rapporter à l’épouse d’Indra.
  1452. Manou est, comme on sait, le père de la race humaine, et Soûrya est le Soleil. Indra se présente dans cet hymne comme étant tout. Kritsnamapyahamévâsmi, mâm sarwâtmacam pasyata (omne quidem ego certe sum ; me omnia animantem videte). Je pense qu’il est possible, en examinant les légendes de Cakchîvân et d’Ousanas, de les rapporter au personnage d’Indra.
  1453. Voy. page 50, col. 1, note 2.
  1454. Voy. page 239, col. 2, note 1. Le commentateur m’apprend ici que la mère de Coutsa se nomme Ardjouni. Modifier dans ce sens la note 2, page 111, col. 1.
  1455. Voy. page 73, col. 2, note 2.
  1456. Voy. page 61, col. 2, note 2.
  1457. Voy. section I, lecture ii, hymne xiii, st. 14.
  1458. Voy. page 73, col. 1, note 12.
  1459. Voy. page 110, col. 1, note 9. Voir plus bas page 249, col. 2, note 5.
  1460. On donne ici à Indra, dieu de l’éther, le nom de Marouta. Marouta, dieu du Vent, est représenté comme doué d’ailes. Jusqu’à présent ce mot vih, toutes les fois qu’il se rapportait à Indra, je l’ai traduit par le mot voyageur ; j’ajoute ici le mot ailé, pour entrer dans toute la pensée de l’auteur. C’est un oiseau céleste, c’est un épervier, Syéna, qui parcourt l’espace éthéré.
  1461. Sous le nom de Syéna (voy. page 89, col. 1, note 2) on semble désigner Indra, par allusion à l’extrême rapidité de sa course. Cependant nous savons que ce mot a un autre sens, et qu’il s’emploie pour signifier un des mètres poétiques employés dans l’hymne du sacrifice. Avec cette explication Syéna pourrait être Indra célébré par le mètre Syénî, ou bien la personnification de ce mètre, qui semble emporter l’holocauste pour le présenter aux dieux. La Swadhâ n’a point de char ; c’est-à-dire qu’à ce moment le Soleil ne montre pas encore son disque : elle est donc atchacrâ. Le monde est dans l’obscurité.
  1462. Le commentaire dit que la crainte qu’éprouve l’oiseau ravisseur du soma est causée par les gardiens de la libation (somapâlaca).
  1463. Voy. notes 1 et 2 ci-dessus.
  1464. J’ai laissé de côté toutes les explications mystiques dans lesquelles le commentateur me semble ici perdu. Je donne la parole, non à Vâmadéva, mais au dieu Indra. Ce dieu, au moment du sacrifice du matin, n’est pas encore né ; mais il existe et observe la succession des rites qui concourent à sa naissance. Ces rites, comme nous l’avons vu, se personnifient sous le nom de Dévas, et naissent en même temps que les besoins du sacrifice. Cependant Indra est enfermé sous la masse des vapeurs ténébreuses de la nuit ; il s’en débarrasse sous la forme de l’épervier (Syéna), c’est-à-dire un oiseau porté sur les ailes de la Syénî.
  1465. Suivant le commentateur, c’est un gardien du soma (somapâla). Je pense que c’est Agni, qui porte le nom de Crisânou, et dont les rayons partent comme des flèches vers le ciel.
  1466. Voy. page 109, col. 2, note 3.
  1467. Voy. page 241, col. 1, note 1.
  1468. Voy. page 242, col. 1, note 3.
  1469. J’ai distingué deux légendes, que le poëte confondait peut-être dans cette strophe, celle d’Étasa et celle de Coutsa. Voy. page 239, col. 2, note 1, et page 241, col. 1, note 1.
  1470. C’est-à-dire Vritra. Voy. page 43, col. 2, note 2.
  1471. Indra par son apparition au ciel a mis fin à l’existence de l’Aurore.
  1472. Rivière du Pendjab, aujourd’hui le Beyah ; chez les anciens l’Hyphase, et Bibase.
  1473. Ce mot rappelle la Vitastâ, qui est le Jhelum, anciennement l’Hydaspes. Le commentaire, qui regarde ce mot comme un adjectif, ne se rend pas compte de la raison qui fait que cet adjectif est au féminin. Le féminin est ordinairement le genre des noms propres de rivières. Le mot Vitasthânâ a pour appositif le mot Sindhou, qui peut être aussi un nom propre, mais que je regarde ici comme un nom commun. Cependant, le texte portant Vitasthânâm, il pourrait se faire que ce mot fût un génitif pluriel, et je serais obligé alors de traduire ainsi : le fleuve des Vitasthas, ce qui me semblerait rentrer dans mon sens. Remarquez toutefois que l’on écrit le nom de la rivière Vitastâ et non Vitasthâ.
  1474. Asoura. Voy. page 174, col. 1, note 1.
  1475. Voy. page 243, col. 1, note 2. Ce personnage de Parâvrikta ne serait-il pas le même que celui qui est appelé Parâvridj, pages 109, 173 et 174, aveugle et boiteux ? Parâvridj n’est-il pas bien l’emblème de l’onde enfermée dans le noir nuage ?
  1476. Voy. pages 76, 107 et 156. Ces deux princes, maudits par leur père Yayâti, ne pouvaient se faire sacrer. Indra leur donna les moyens de passer la Sarayou (aujourd’hui le Sarjou) et d’arriver à temps.
  1477. Noms de deux rois.
  1478. Ce Divodâsa est bien connu, et ces villes dont il est ici question sont les nuages. Voy. page 110, col. 1, note 9. Ce passage doit servir sans doute à expliquer celui qui est plus haut, hymne VIII.
  1479. Voy. pages 111, 173 et 174.
  1480. Ce mot, que le commentaire donne comme un nom féminin, et qu’un texte écrit Couroûlati, doit être une épithète appliquée probablement à l’un des Adityas. Cette épithète est expliquée par le synonyme Critadatta ou critamdatta (facti dator, qui agit et qui donne).
  1481. Nous traduisons Satchîpali par époux de Satchî, croyant bien que le lecteur se rend compte de cette épithète, et qu’il l’explique, ainsi que le commentaire, par cette idée, gardien de l’œuvre sainte, carmânâm pâlaca.
  1482. Voy. page 51, col. 1, note 1.
  1483. Je suppose que cette vache est la flamme du sacrifice, qui devient aussi la flamme du Soleil.
  1484. Les Ribhous, en leur qualité de rayons du Soleil, y restent cachés douze jours ; c’est le temps des pluies, et ils semblent alors travailler à la fécondité de la terre. Voy. section II, lecture iii, hymne iv.
  1485. Par ce mot le poëte désigne le sacrifice avec ses formes variées et son efficacité.
  1486. Il est probable que le personnage de Ribhoukchas est le même que celui de Ribhou. Le mot Ribhouckhas est aussi une épithète d’Indra.
  1487. Nous avons vu ailleurs (page 120, col. 2, note 5) que Parwata était le nuage personnifié. Le commentaire identifie ce mot avec Parwan, et dit que l’auteur désigne ici les époques du mois auxquelles on donne ce nom.
  1488. Allusion aux trois stations du Soleil.
  1489. Je n’ai pas cru pouvoir sous-entendre le mot tchamasa (coupe) ou ratha (char), comme le fait le commentaire.
  1490. Le mot Ribhoukchas est ici au pluriel, Ribhoukchanas.
  1491. Je ne pense pas que le poëte désigne ici le pouvoir surnaturel de traverser les régions célestes. Ce serait là une traduction littérale, mais que rien ne semble justifier.
  1492. C’est-à-dire les Aswins, appelés Nâsatyas.
  1493. Dadhicrâs est Agni ou plutôt le Soleil représenté sous la forme d’un cheval. C’est une épithète qui s’explique ainsi : venant vers le caillé du sacrifice.
  1494. L’hymne qui suit fait voir qu’il faut sous-entendre Mitra et Varouna. Le commentaire suppose que c’est le Ciel et la Terre.
  1495. Voy. page 110, col. 1, note 11.
  1496. Un des fils d’Yayâti ; son nom s’emploie pour désigner la race humaine.
  1497. Le commentaire donne au mot ghana le sens d’arme. J’ai pensé que ce vers se rapportait à Dadhicrâs.
  1498. Le commentateur rend le mot gochou par dikchou (régions célestes).
  1499. Comme Poûrou, Ayou est un nom général de la race humaine.
  1500. Voy. page 45, col. 1, note 1.
  1501. Aditi est la mère des Adityas. Dans cet hymne le commentaire rend le mot Marout par stotri (laudator).
  1502. Vrihaspati est une forme d’Agni ; c’est le feu du sacrifice, et il est naturel qu’on le regarde comme un fils d’Angiras, qui est le sacrificateur.
  1503. Hansa signifie cygne : c’est le nom par lequel certains philosophes désignent le premier être immatériel, le Paramâtmâ. Il semble ici être une épithète d’Agni.
  1504. C’est-à-dire des libations.
  1505. Trasadasyou est le Richi de cet hymne, c’est-à-dire celui qui parle et qui agit dans cette espèce de petit drame ; mais il ne saurait en être l’auteur, qui est probablement Vâmadéva.
  1506. Le commentateur dit que la parole est à Trasadasyou. Le lecteur jugera si j’ai pu adopter cette idée. Trasadasyou est bien un héros demi-dieu : on le confond avec Mandhâtri, avatare d’Indra. Mais est-il possible de lui faire tenir le langage que l’on va entendre ?
  1507. Ce mot signifie possesseur d’un Kchatra, d’un fief, et par conséquent guerrier. C’est une épithète qui convient à Indra, au dieu qui combat et qui est roi.
  1508. Trasadasyou est fils de Pouroucoutsa, et petit-fils de Dourgaha. Après la mort de son père, il eut pour tuteurs sept Richis, que le commentaire semble indiquer comme étant ceux que l’on appelle Saptarchis.
  1509. Nom de l’épouse de Pouroucoutsa. Par le conseil des Richis, elle a honoré Indra et Varouna, qui lui ont donné Trasadasyou.
  1510. Voy. page 115, col. 1, note 1.
  1511. Appelée Sakti.
  1512. Ce n’est point le char des Aswins que le poëte désigne ici ; c’est le char du sacrifice, attelé par le prêtre en l’honneur de ces divinités, et qui a pour carrière le foyer où brûle Agni. Le commentateur n’est pas de mon avis. Dyou est pour lui Aditya.
  1513. Ces trois offrandes sont celles qui se font aux trois époques de la journée. La quatrième me semble celle dont il a été question dans les hymnes aux Ribhous, quand on y dit que la coupe du sacrifice a été divisée en quatre parties.
  1514. Les offrandes jetées sur le feu augmentent son activité ; elles font briller ses rayons, qui se répandent sur tout le monde.
  1515. J’entends que ce sont les rayons du sacrifice dont il est question dans la note précédente.
  1516. C’est un nombre attribué ailleurs aux torrents célestes. Voy. page 61.
  1517. Cette idée est obscure. Je crois que le poëte fait allusion au soin que doit avoir le sacrificateur d’orienter ses foyers : Tastambha djmâ antân.
  1518. J’ai rendu de cette manière le mot sripra, qui littéralement signifie serpent. Il m’est venu l’idée que cette épithète pourrait bien représenter la forme même du foyer, dont Stevenson donne la description dans la préface de sa traduction du Sâma-Véda.
  1519. Vrihaspati est Agni sacrificateur ; ses sept bouches sont les sept Tchhandas ou mètres poétiques.
  1520. C’est le nom ou de la Terre ou de la déesse du sacrifice.
  1521. La phrase pourrait se traduire de manière à faire croire à un antagonisme déjà existant entre le prêtre et le roi. J’ai cru devoir restreindre le sens, et le réduire à une comparaison naturelle entre un dieu et un prince. La théocratie de cette époque me paraît douteuse. Cependant le rapprochement, dans cette strophe et la suivante, entre Brahman et Râdjan, est formel, et les brahmanes des âges suivants, en forçant le sens, ont pu s’en prévaloir.
  1522. Les Angiras sont les prêtres chargés des sacrifices, ou plutôt les Rites personnifiés. Dans l’hymne qui termine la lecture précédente, Vrihaspati est doué de sept bouches, comme ici les Angiras, à cause des sept mètres poétiques sur lesquels les hymnes sont composés, tchhandoyouktamoukhah. Pour les épithètes Dasagwa et Navagwa, voy. page 80, col. 1, note 6.
  1523. Ces vaches, ce sont les rayons du jour.
  1524. Asoura.
  1525. Le mot aktou signifie nuit ; mais il signifie aussi jour, éclat. Ce qui nous prouve que ces divers sens ne sont que restrictifs, et que le mot aktou doit avoir une signification en elle-même assez compréhensive. En effet, aktou peut se traduire par le mot unguentum : c’est proprement la substance onctueuse qui s’étend et qui recouvre un objet. Par métaphore, la nuit oint le monde de ses noires vapeurs ; le jour oint le ciel de ses rayons, et le mot aktou peut se prêter facilement à ces deux sens opposés de nuit et de jour. Je trouve un passage où le commentateur explique ainsi aktou : Andjanasâdhanam ghritam. Ce même mot prend aussi le sens de torrent ; et j’expliquerai ce sens en comprenant que le torrent recouvre la terre. Mais il est un endroit où aktou signifie trait, âyoudham. Je ne puis me rendre compte de ce sens qu’en remontant à la racine andj, qui a aussi la signification d’aller, se mouvoir.
  1526. Nous savons que les bras du soleil, ce sont ses rayons.
  1527. On compte ordinairement trois mondes : le ciel, l’air et la terre. Le poëte semble ici subdiviser ces trois mondes, chacun en trois autres. L’air se partage en mondes de Vâyou, de Vidyout, de Varouna, ou de Vâyou, d’Agni, d’Aditya. Ces mondes portent le nom général de radjas, de rotchanam. Les trois cieux sont ceux d’Agnîdhra, de Pradjâpati, et le Satya. Le commentateur ne nomme pas les trois mondes terrestres : il a l’air de penser que le mot terres s’emploie pour désigner le ciel, l’air et la terre. L’œuvre triple consiste dans la formation de la chaleur, de la plaie et du froid.
  1528. La bénédiction du prêtre personnifiée.
  1529. Pâtpati ; Varouna est le soleil de nuit, et comme tel il est considéré comme présidant au mal.
  1530. Voy. page 161, col. 2, note 1.
  1531. Je pense que les vents sont désignés par ces mots (Ichtâh).
  1532. Avansa.
  1533. Je traduis ainsi l’adjectif sadjochâs, que le commentateur fait rapporter au ciel et à la terre en l’expliquant par ces mots : Parasparam samgate.
  1534. Les épouses des dieux sont les Prières et Invocations. J’ai rendu par cette idée l’épithète patnîvat. Au lieu de traduire varoûtha par le sein de griha, j’ai choisi celui de dhana.
  1535. Kchétrapati : c’est sans doute un nom de Roudra. Quelques-uns attribuent cette épithète à Agni.
  1536. Ritapati : épithète du Vent.
  1537. Souna, nom d’Indra ; Sira, nom de Vâyou ou d’Aditya.
  1538. Sîtâ, signifie sillon.
  1539. Ce vase porte le nom de samoudra.
  1540. Le poëte personnifie le Ghrita, qui devient un Déva, un Amrita, un Immortel, une forme d’Agni. Or, l’Amrita est ou le prêtre chargé des libations telles que le soma ou le ghrita, ou bien la libation elle-même personnifiée.
  1541. Brahman. Cet hymne nous explique l’histoire de ce Brahmâ aux quatre têtes, dont la mythologie a fait un personnage différent d’Agni.
  1542. Gôra. Agni est sans doute comparé à cet animal, à cause de la couleur blanche de la flamme qui s’allume.
  1543. Je pense que ces quatre cornes ou ces quatre têtes sont une allusion aux quatre côtés du foyer. Vous voyez, en effet, plus haut, page 259, col. 1, note 2, que le foyer oriental est carré. Le commentateur croit qu’il est fait allusion par ces mots aux quatre Védas, oubliant que, lors de la composition de cet hymne, les hymnes se faisaient, et ne pouvaient pas encore former un quadruple corps. Tchatouranana, Tchatourmoukha, Tchatourvaktra et Tchatouhsringa me paraissent synonymes de Tchatourasra. Les quatre cornes sont les quatre coins du foyer.
  1544. Le poëte désigne les trois foyers ; peut-être les trois Savanas.
  1545. Les deux cols sont les deux espèces d’offrandes : l’offrande liquide, soma, et l’offrande solide, ichti.
  1546. Les sept bras sont les sept Tchhandas ou les sept Hotracas.
  1547. Le sacrifice se compose de prières (Mantra), d’actes (Yaga), d’hymnes (Stouti) ; il semble que ce soient là les trois liens par lesquels on amène le dieu.
  1548. La libation appelée ghrita se compose de kchira, lait, de dadhi, caillé, et d’âdjya, beurre.
  1549. Ce sont les Asouras qui avaient enlevé les vaches célestes. Voy. page 44, col. 1, note 7.
  1550. Vâyou est désigné par l’épithète de véna (ami), comme plus haut les vents par celle d’ichtâh. Voyez page 262, col. 1, note 4.
  1551. Vétasa est un surnom d’Agni. Ce mot signifie une espèce de roseau. Il semble qu’Agni, au milieu des libations, soit comme un roseau au milieu des eaux.
  1552. Cette idée s’explique en pensant que la libation coule rapidement du vase qui la contient pour tomber dans le foyer.
  1553. Ce passage pourrait aussi s’entendre d’une invitation aux hommes qui font le sacrifice.
  1554. Le Ghrita, le beurre vivifiant d’Agni, circule dans toute la nature. Il n’est pas seulement dans le sacrifice, il est dans le cœur de l’homme en qualité de Sarwaprâna, dans les nuages comme Vêdyoutâgni, dans le soleil comme Sôryâgni. Le commentaire, qui donne à samadrou le sens de mer, pense que Ghrita, au sein de la mer, est Badavagni.
  1555. Ici se termine le quatrième Mandala, qui porte le nom de Vâmadéva. Le cinquième va commencer, avec le nom d’Atri.
  1556. Cette même idée se trouve plus haut, lecture IV, hymne VIII, stance 6.
  1557. Allusion aux sacrifices du matin et du soir. Le texte porte les deux Aurores (Ouchasâ).
  1558. Agni qui brille pendant le jour. Dans l’hymne précédent on le comparait à un cerf blanc.
  1559. Le foyer portant le nom d’Ilâ.
  1560. Voy. page 122, col. 1, note 1.
  1561. Je ferai grâce au lecteur d’une légende, inventée après coup, pour expliquer cet hymne, et relative au prince Coumâra, écrasé par la faute du Pourohita Vrisa, et ensuite rappelé à la vie. Agni est caché au sein de l’Aranî : il y est comme mort. Le poëte gourmande cette mère, qui semble refuser son fils au sacrificateur, lequel est le père du sacrifice. Cet enfant est appelé Coumâra : c’est le nom qu’on donne au jeune héritier du trône. Or, Agni est destiné à être roi, et peut justement porter ce titre de Coumâra. S’il est roi, sa mère peut être reine, Mahichi.
  1562. Le texte renferme le mot sarad, que je me suis cru déjà plusieurs fois autorisé à rendre par libation. Cependant je l’ai traduit par automne plus haut, section III, lecture v, hymne xiv, stance 4.
  1563. Nous savons que ces vaches d’Agni, ce sont ses rayons lumineux.
  1564. Atri est le père des poëtes auxquels l’hymne est attribué.
  1565. Sounahsépa est un Richi qui, vendu par son père pour être victime dans un sacrifice, fut délivré. Voyez section I, lecture ii, hymne v, et M. Wilson, Vichnou-Paurâna, p. 404.
  1566. Autrement les Amritas.
  1567. C’est-à-dire l’homme.
  1568. Ces deux époux, c’est Agni lui-même, c’est Vanaspati et la flamme (Djwâtâ).
  1569. Voir page 259, col. 1, note 2.
  1570. Ilâ est le foyer ; ce pourrait être aussi l’hymne sacré.
  1571. Agni Vêdyouta perce le nuage, qui répand une eau fécondante ; de là naîtront les plantes et les herbes qui engraisseront la vache ou qui seront employées directement dans le sacrifice.
  1572. Voy. page 69, col. 1, note 1.
  1573. Voy. page 47, col. 2, note 2.
  1574. Voy. page 48, col. 1, note 1.
  1575. Voy. page 48, col. 1, note 1.
  1576. Voy. page 48, col. 1, note 3 ; et page 135, col. 1, note 9. Le commentateur dit ici que ces deux divinités sont Agni et Aditya.
  1577. Voy. Section I, lecture I, hymne XIII, vers 9.
  1578. Voy. page 48, col. 1, note 6.
  1579. Voy. page 48, col. 1, note 7. Le lecteur aura remarqué les rapports qu’il y a entre cet hymne et ceux qui se trouvent page 47 et 134.
  1580. Ces vaches, ces chevaux, ce sont les libations, les flammes, les rayons, cortége naturel d’Agni.
  1581. Il y a des feux de différentes espèces ; il y en a qu’on appelle vêdicas, d’autres lôkicas, d’autres dhichnyas.
  1582. Pour entendre ce passage il faut se rappeler que les rayons sont comparés à des coursiers, et les libations à des vaches. La libation augmente l’activité des rayons, qui doivent la désirer.
  1583. Je pense que le poëte fait allusion aux deux libations du matin et du soir.
  1584. Le commentaire donne un autre sens. Il représente les prêtres comme un père qui prend son fils sur son dos. Je n’ai pas saisi la raison de cette explication.
  1585. Atri est le nom d’un Richi ; mais c’est aussi un surnom d’Agni, venant de la racine ad qui signifie manger.
  1586. Il est ici question de l’Aranî.
  1587. Nom d’Agni. Voy. page 41, col. 2, note 1. Le commentaire explique ici ce mot par sarwatra gantri.