Rien ; Quelque chose ; Le Diamant de l’herbe
L’idée de jeter à la mer des livres en disparition ce Rien n’a pas manqué de nous séduire. Il y a, en effet, bien du dérisoire à vouloir faire balbutier cette collection par « si rien et tellement » en une quantité de pages si raccourcies. La valeur de ce Rien est à ce titre double, manifeste pour les édition si l’on peut dire, qui se proposent d’aller déterrer dans les bassins de l’oubli les textes qui alimenteront cette collection et découverte de la puissance d’écriture de Xavier Forneret dont André Breton pouvait écrire : « Le style de Forneret est de ceux qui font pressentir Lautréamont comme son répertoire d’images audacieuses et toutes neuves annoncent déjà Saint-Pol-Roux. »
Voici venir une nuit sombre, avec un roulement infernal précédé d’éclairs, tantôt bleuâtres, tantôt sanglants.
Rien qu’un bruit affreux, rien qu’un feu brûlant l’air, rien qu’une pluie fouettante, rien qu’une obscurité profonde sinon les éclairs.
Pas un nuage blanc, pas une étoile, pas un rayon de lune.
Alors dans une grande salle que les hommes en chairs venaient de quitter, il y eut fête. Les lustres pendaient du ciel par éclats, le tambour battait sans cesse aussi au ciel, et il y avait sur la terre comme un fifre sous les doigts du vent.
Ces lustres, ce tambour, ce fifre, entrèrent dans les yeux et les oreilles de tous ces grands hommes debout sur les planches, — fixes sous leurs habits de cuir, ou de papier, ou de carton ; au point qu’ils tressaillirent, se remuèrent, se changèrent, et leurs soupirs commençaient à parcourir l’espace de la grande salle voûtée.
Ils n’osaient point encore parler…
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