Revue des Romans/Mme d’Hozier

Revue des romans.
Recueil d’analyses raisonnées des productions remarquables des plus célèbres romanciers français et étrangers.
Contenant 1100 analyses raisonnées, faisant connaître avec assez d’étendue pour en donner une idée exacte, le sujet, les personnages, l’intrigue et le dénoûment de chaque roman.
1839
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HOZIER (Mme d’).


*AMOUR ET SCRUPULE, 4 vol. in-12, 1808. — Ce roman se fait lire avec un intérêt qui ne fait que croître à chaque page. L’action commence aux premières époques de la révolution. Le marquis de Rosanne, militaire distingué, propriétaire d’une immense fortune, recommandable par toutes les vertus et toutes les qualités qui peuvent inspirer l’estime et l’attachement, a eu le malheur d’unir sa fille Clémence au comte de Blangy, l’un de ces êtres dégradés par le vice, dont la société n’offre que trop souvent le honteux modèle, et dont les inclinations lâches et perverses le rendent insensible au bonheur de posséder une femme charmante et fidèle. Un enfant est né de ce mariage si mal assorti ; il fait les délices et la consolation de sa mère et de son aïeul. C’est au milieu de cette famille qu’est accueilli un jeune étranger voyageant en France, sir Charles Lorimer, fils du contre-amiral Lorimer, pair écossais. Il devient bientôt l’adorateur de Clémence ; mais, aussi respectueux que passionné, c’est par des actes d’héroïsme, c’est en sauvant la vie au jeune Blangy et à sa mère elle-même, qu’il lui donne des preuves de son amour. Malgré l’attachement affectueux que le marquis de Rosanne ne cesse de lui témoigner, il s’impose un douloureux exil au moment où il va devenir coupable en cédant à des sentiments qui deviennent chaque jour trop séduisants et trop impétueux. Au bout d’une assez longue absence, sir Charles est rappelé par le marquis de Rosanne, qu’il retrouve environné par les satellites révolutionnaires et mourant de douleur, après avoir échappé au massacre du 10 août. Clémence est en deuil de son mari, qui est mort en pays étranger peu de temps après son émigration. Avant de fermer les yeux, le marquis de Rosanne fait promettre à Clémence de s’unir à sir Charles. Cet ordre sacré d’un père est fidèlement exécuté. C’est à Boulogne que les deux amants reçoivent la bénédiction nuptiale d’un prêtre catholique. Sir Charles emmène en Angleterre Clémence et le jeune Paul de Blangy, dont il devient le protecteur et le père adoptif. Il éprouve quelque difficulté à faire agréer à sa famille, et surtout à sir Robert, son père, son mariage avec une Française, dont la naissance et la religion contrarient ses principes. Lady Arabelle, épouse en secondes noces de sir Robert, femme hautaine, ambitieuse et cupide, soutenue dans ses projets haineux par un misérable nommé Redmond, artisan ingénieux de crimes et de vengeances, n’est pas le moins redoutable ennemi de sir Charles et de sa vertueuse compagne. Cependant les obstacles paraissent s’aplanir. Sir Robert est subjugué par les charmes, par les vertus de Clémence. Il approuve le choix de sir Charles ; il accorde sa bénédiction paternelle aux deux époux, qui partent bientôt pour habiter l’Écosse, où sir Charles possède l’héritage de sa mère. C’est là qu’après quelques moments d’un bonheur qui réunit le charme et les plaisirs de tous les sentiments, de toutes les jouissances, c’est là que ce couple si aimable, si intéressant, est frappé du coup le plus terrible qui puisse troubler leur innocente sécurité. On vient annoncer à Clémence que son premier époux, le comte de Blangy, n’est point mort comme on l’a cru. On lui montre même des lettres de Blangy, qui attestent son existence et sa misère. Le cœur de Clémence est déchiré de remords. Sir Charles se livre au plus effrayant désespoir. Après les combats les plus terribles, il faut se résoudre à une séparation cruelle. Clémence court ensevelir sa douleur dans un couvent catholique en Irlande. Sir Charles, désolé, furieux, se livre à tous les excès d’une douleur qui met ses jours en danger. Cependant l’attachement qu’il a voué au jeune Blangy, sa tendresse pour sa propre fille, dont Clémence vient de le rendre père, un reste d’espérance le rattachent à la vie. Il doute encore, et tout son courage n’est point encore abattu. Enfin le ciel ne veut point qu’un amour si pur, si vrai, si ardent, succombe à une telle épreuve ; les preuves authentiques de la mort de Blangy se retrouvent. Sa prétendue existence est une imposture du traître Redmond. Les lettres ont été supposées par ce faussaire, qui meurt de honte ainsi que sa complice, lady Arabelle ; et Clémence retrouve dans les bras de sir Charles tous les délices d’un chaste amour, auquel elle peut désormais s’abandonner sans scrupule.