Revue Musicale de Lyon 1904-03-09/Nouvelles diverses
Nouvelles Diverses
Le privilège de M. Albert Carré, comme directeur de l’Opéra-comique, vient d’être renouvelé pour sept ans.
Depuis la création du théâtre de Bayreuth, aucun artiste français n’a été admis à chanter dans le temple élevé à la mémoire de Wagner ; il n’en sera pas de même cette année, et c’est Mlle Louise Grandjean, de l’Opéra, qui aura l’honneur de représenter le chant français, en interprétant le rôle de Vénus, de Tannhæuser, en allemand.
La troisième symphonie de M. Gustave Mahler, directeur de l’Opéra de Vienne, vient d’être jouée avec succès à Munich. Ce n’est pas une œuvre nouvelle ; elle remonte à 1894, mais elle présente d’assez curieuses particularités pour mériter notre attention. Son auteur est, avec Richard Strauss, le représentant le plus en vue de l’art symphonique contemporain en Allemagne. Son ouvrage comprend deux parties : la première sans subdivision de morceaux, la deuxième en comportant cinq. La partition est écrite pour quatre flûtes grandes ou petites, quatre hautbois ou cor anglais, trois clarinettes en si ♭, la troisième jouant parfois sur la clarinette basse, deux clarinettes en mi bémol, quatre bassons ou contre-basson, huit cor en fa, quatre trompette en fa ou si bémol, quatre trombones et basse-tuba, trois timbales, deux jeux de cloches, tambourin, tam-tam, triangle, cymbales, tambour, grosse caisse avec cymbales adhérentes, baguettes pour frapper sur le bois de la grosse caisse, deux harpes, instruments à cordes très nombreux. Il faut, en outre, une interprète femme pour chanter une partie de contralto-solo, un chœur de femmes, et, placés assez loin, un cor de chasse en si bémol avec plusieurs petits tambours, puis encore, installés assez haut : quatre cloches donnant des notes musicales, et un chœur d’enfants. Une longue pause doit séparer les deux parties de la symphonie. À l’origine, l’œuvre avait un programme que nous indiquons sommairement : Songe d’une matinée d’été : i. Arrivée de Pan, symbole de fécondité. ii. 1o Ce que disent les fleurs de la prairie ; 2o Ce que disent les animaux de la forêt ; 3o Ce que me dit l’homme (contralto-solo sur les paroles de Nietzche : Ô homme, prends garde ! Que disent les ténèbres dans les profondeurs de minuit ? ) 4o Ce que me disent les anges (chœurs de femmes et d’enfants sur la chanson populaire : Trois anges passaient en chantant…) ; 5o Ce que me dit l’amour. Aujourd’hui, M. Mahler ne reconnaît plus ce programme. Sa symphonie, dont l’exécution exige la mise en œuvre de moyens si compliqués, a obtenu un grand succès. La mélodie est en général simple et claire ; le style ne manque pas de distinction et l’impression qui se dégage de l’ensemble est celle d’une vitalité non dépourvue de grâce, mais puissante, exprimée par des phrases musicales largement dessinées. (Le Ménestrel).
On annonce pour la saison prochaine, au théâtre Antoine : la Faute de l’abbé Mouret, d’après le roman d’Émile Zola, avec une grande partition symphonique de M. Alfred Bruneau.
On annonce la mort d’un artiste fort distingué, le chanteur Edmond Vergnet, que le public parisien avait en grande estime et qui vient de succomber, à Nice, à une courte maladie. Né en 1850, Vergnet avait commencé par jouer du violon et par être musicien d’orchestre, au concert même de la Pépinière, comme et avant son camarade Alvarez. S’étant découvert une fort jolie voix il la travailla, entra au Conservatoire, où il obtint de grands succès d’école, après quoi il fut engagé à l’Opéra, puis à la Monnaie de Bruxelles. Après quelques années passées ensuite en Italie, il appartint tour à tour à l’Opéra-Comique, où il créa l’Attaque du moulin, et de nouveau à l’Opéra, où il créa le Mage et Samson et Dalila. Il y a six ou sept ans il était nommé professeur de chant au Conservatoire, qui faisait en lui une acquisition excellente, car Vergnet était un chanteur d’étude et de style. Malheureusement, il donna sa démission au bout de trois ans environ. Depuis ce temps il n’avait plus fait parler de lui.
Les autorités municipales de Berne viennent de décider que, deux fois par semaine, toutes les places du Théâtre de la ville seront au prix uniforme de cinquante centimes.
Comme les frais de pareilles représentations musicales et dramatiques dépasseront la recette obtenue, un fonds de réserve a été créé, ainsi qu’une caisse de dons volontaires. Ces jours-ci cette dernière a reçu la somme de 20.000 francs, don d’un généreux anonyme.
Le Ménestrel cite, à titre de curiosité, le nom et les indications de première page d’un quadrille qui a été publié en Allemagne il a nombre d’années : À Mademoiselle Alma Bors. Humoristique quadrille sur les motifs de Benvenuto Cellini, de Hector Berlioz, pour le piano forte, transcrit par Hans de Bulow. — Berlin, Schlesinger.
La première figure du quadrille est faite sur l’air d’Ascanio, troisième acte : Mais qu’ai-je donc…, la seconde met en œuvre le Saltarello : Venez, peuple de Rome, repris dans l’ouverture du Carnaval romain. Le reste est à l’avenant et ne manque pas de gaîté.
L’Annuaire des Artistes (18e année), est une publication d’un puissant intérêt pour tous ceux qui s’intéressent au théâtre et à la musique, car il donne le répertoire de chaque théâtre, toutes les premières représentations avec la distribution des rôles, les noms de tous ceux qui composent l’administration théâtrale, les noms de tous les artistes lyriques et dramatiques.
L’Annuaire des Artistes (18e année) est, en outre, d’une utilité de premier ordre pour tous les commerçants dont l’industrie se rattache au théâtre ou à la musique, car il donne la liste des abonnés de l’Opéra et de la Comédie-Française ; la liste et les adresses des compositeurs, chefs d’orchestre, organistes, maîtres de chapelle, professeurs de chant, d’instruments par genre de professorat, auteurs, artistes lyriques et dramatiques, des chefs de musiques militaires et civiles, des amateurs artistes, des sociétés chorales, harmonies, fanfares, etc., etc., et cela, non seulement de Paris, mais de la province et de l’étranger.