Recueil général et complet des fabliaux des 13e et 14e siècles/TomeIII/Texte entier
FABLIAUX
LV
DU MANTEL MAUTAILLIÉ
837, fol. 27 ro à 31 ro, 1593, fol. 111 vo à 115 vo,
et Bibl. de Berne, Mss. 354, fol. 93 vo à 100 vo.
’une aventure[1] qui avint
A la[2] cort au bon Roi qui tint
Bretaingne et Engleterre quite,
Por ce que n’ert[3] pas à droit dite,
Vous vueil dire[4] la verité.
A la[5] Pentecouste en esté
Tint li Roi Artus cort pleniere.
Onques rois en nule maniere
Nule plus[6] riche cort ne tint.
De maint lontain pais i vint[7]
Maint roi et maint duc et maint conte,[8]
Si com l’estoire le[9] raconte.
LVI
DE GRONGNET ET DE PETIT
et Bibl. nat., Mss. fr. 25545, fol. 19 vo à 20 ro.
ou siecle qui peu est[10] courtois
Nous faist Girbers[11] .I. serventois,
Car il[12] se complaint en ces vers
Dou siècle qui tant est dyvers,
Avers, envieus[13] et repoins.
Nequedent jadis fu[14] .I. poins
Qu’il[15] valoit miex que ors ne fait
En diz, em paroles[16], em fait :
Ce tesmoignent li ancien.
Neporquant c’est[17] il plus de bien
Qu’il ne fu onques à nul tans,
Mais chascuns est mais[18] si doutans
Que, c’il a le bien en sa trappe,[19]
Poor a qu’il[20] ne li eschappe
Et que richesse[21] ne li faille ;
Touz est muez li grains[22] em paille ;
On lait la ronce por l’ortie ;[23]
Toute largesse est resortie ;[24]
Qui l’avarice o[25] soi aquieut,
La rose lait, l’ortie quieut ;
Ausi[26] tost prent Mors à sa mace
Celui qui grant avoir amasse
Com celui qui bien[27] le despent ;
Li avers tantost[28] se repent
Qu’il[29] festoie gent ne honneure.
A paines[30] puis venir nule heure
En l’ostel nul[31] homme tant riche
Que dui serjant aver et chiche
Ne me soient à rencontrer,
Tantost[32] qu’en l’ostel doi entrer.
Se je ruis c’on[33] l’ostel me prest,
Groignet truis je tout avant[34] prest ;
C’est uns servans de male frume ;[35]
Groignet m’asiet au feu qui fume ;
Groignet ferme l’uis et la porte ;
Groignet laide nappe m’aporte ;
Groing sont touz jors mi premier mès ;[36]
Ja n’iere en cel lieu n’en sel[37] mès
Que Groingnès ne me soit devant.
Dont vient l’autre serjans avant
Touz[38] emflés et touz aatis ;
C’est li compains Groignet Petis ;
Petiz est kex[39] et seneschaus
Et boutilliers et mareschaus ;
Petis est de molt[40] mal affaire,
Par son conseil Petis fait[41] faire
Petis hanas et petis pos ;
Petis n’a omques nul repos ;
Petis, si com li plait et siet,[42]
Partout ses mès met et assiet ;
Petis est de molt male vaine ;
Petis est au livrer l’avaine ;
Petis a trestout en sa garde.
Se je ruis[43], Groignès me regarde ;
S’on me donne, c’est par Petit ;
Groignès voussit bien le respit.[44]
Groignès et Petis soit destruis,
Car em plusors osteus les truis ;
Pour ce ne sai mais où torner.
Groignès si fait tout trestorner
Les biens et Petis les retrait.
Qui tex serjans à lui atrait
Ne puet mie gramment valoir
Por tant qu’il facent lor voloir,
Et ci sont par tout si creüs
Que li riche sont recreüs
De onnor[45] faire et de largesse.
Touz biens et toute gentillesse
Sont mis arierre par ses deus ;
Certes c’est damages et deus
Qant .II. mauvais vices lor tolent ;
Largece et honor nous retolent ;
Avarice ont mis à cheval ;
Honte est ou mont, honours ou val,
Tant par Groingnet et par Petit ;
Onques Diex tiex serjans[46] n’aïst !
La male mort les tust et fiere !
Mais une gent les ont[47] tant chiere
En lor bailliée qui les garde
Qu’il[48] n’ont omques de nului garde,
De roi, de prince, ne de conte.
Groignès les met touz[49] en son conte
Et Petis emporte la taille
Qui largesse et honor retaille ;
Et ci sont partout si antis,[50]
Enracinés sont et repris
Si c’om ne les[51] puet essarter
Ne par biau[52] dire deserrer.
Biautez[53] ne vaut mais une melle
Que[54] Mauvestiez par tout revelle.
Neporquant sai bien[55] la mecine
Par qoi om porroit la racine
Esraigier[56] et faire sechier,
Se[57] riches hom s’eiist tant chier
Que il voussist devenir teus
Que il fust larges[58] et piteus
Et biaus parliers à toute gent,
Et qu’il donnast de son argent[59]
Selonc ce que il porroit faire :
Si porroit[60] honir et deffaire
Le pooir Petit et Groingnet,
Qu’il se deduissist bel[61] et net
Et fust de cuer et nés et cointes[62]
Et à la bonne gent acointes,
Et qu’il amast les Menestreus
Et qu’il se[63] deduissist entr’eus
Sans ramposner, sans coppoier.[64]
Ainsi se porroit appoier
Riches hom par dis et par fais ;[65]
Si seroit li siecles refais
Et Largesse, qui iert vaincue[66]
Et Honors seroit revestue,
Et Gerbers entrer[67] oseroit
Partout[68] et escoutez seroit,
Et si diroit aucun biau mot ;
Ce poise moi quant on ne m’ot
Plus volentiers[69] à mon pourfist ;
Mais Menestreus sont descomfist[70]
Par Avarice la cuiverte,
Qui trueve adès la porte ouverte
Et Largesse la trueve close.
Se nous dist Gerbers[71] en sa glose
Que cil qui de cest siecle part[72]
Emporte molt petite part
De son avoir, ainçois la[73] laisse.
Ici fenist Gerbers[74] sa laisse.
- ↑ LV. — Du Mantel mautaillié, p. 1.
A. — Paris, Bibl. nat., Mss. fr. 353, fol. 42 ro à 44 ro.
B. — » » » 837, fol. 27 ro à 31 ro.
C. — » » » 1593, fol. 111 vo à 115 vo.
D. — Bibl. de Berne, Mss. 354, fol. 93 vo à 100 vo.
Nous empruntons les variantes du ms. de Berne à la copie de la Bibliothèque nationale (coll. Moreau, 1720, Mouchet, 46).
Publié par M. F. Michel dans le vol. de F. Wolf, Ueber die Lais, 342-877, d’après B, avec les variantes de C et D, et traduit dans Legrand d’Aussy, éd. Renouard, I, 126-149.
Ce fabliau porte le titre de « Cort Mantel » dans A, C et D.
Vers 1 — D, Une aventure. — Le commencement de ce conte nous montre tout de suite que nous avons affaire à une histoire de la Table ronde, et les héros de cette épopée vont paraître chacun à leur tour dans le cours du récit.
- ↑ 2 — A, D, En la. — au bon roi. C, le roi.
- ↑ 4 — est, lisez ert. — A, D, Si con je l’ai trové escrite. C, Si con l’estoire nous devise.
- ↑ 5 — A, Vous en dirai. D, Vos conterai.
- ↑ 6 — « la » manque à D, ce qui fausse le vers.
- ↑ 9 — plus. A, C, si. — D, Nule si trés riches ne tint.
- ↑ 10 — vint. A, vindrent.
- ↑ 11 — D, Maint duc et maint prince et maint conte.
- ↑ 12 — le. A, vous. C, D, nous.
- ↑ LVI. — De Grongnet et de Petit, p. 30.
A. — Paris, Bibl. de l’Arsen., Mss. B. L. F. 60, fol. 6 vo à 7 ro.
B. — » Bibl. nat., Mss. fr. 25545, fol. 19 vo à 20 ro.
Le ms. de l’Arsenal porte dans la nouvelle numérotation le no 3114.
Publié par M. Fr. Michel à la suite du Roman de la Violette, 321-327.
Vers 1 — peu est. B, n’est pas.
- ↑ 2 — Girbers. B, .I. clers. — M. Fr. Michel voit dans ce Girbert, dont le nom n’apparaît que dans un ms., Gibert de Montreuil, l’auteur du Roman de la Violette. Cette identification, sans être impossible, ne repose sur aucune preuve (Cf. Histoire littéraire, XVIII, 769 et XXIII, 92.)
- ↑ 3 — Car il. B, Et mout.
- ↑ 5 — B, Envieus, faillis.
- ↑ 6 — B, Nonpourquant ja fu li.
- ↑ 7 — Qu’il. B, Qui. — que ors. B, c’ores.
- ↑ 8 — B, En paroles, en diz.
- ↑ 10 — c’est. B, est.
- ↑ 12 — chascuns est mais. B, li siecles est.
- ↑ 13 — B, Dou bien si le tien et acrape.
- ↑ 14 — qu’il. B, qui.
- ↑ 15 — richesse. B, largesce.
- ↑ 16 — muez li grains em. B, li grains devenus.
- ↑ 17 — B, On lait la rose et queut l’ortie. — Le mot rose doit évidemment être mis à la place de « ronce », comme l’indique le vers 20.
- ↑ 18 — Ce vers, dans B, est placé avant le précédent.
- ↑ 19 — B, avarice à li.
- ↑ 21 — Ausi. B, Ensis. — sa mace. B, la nasse.
- ↑ 23 — bien. B, biau.
- ↑ 24 — tantost. B, tos tens.
- ↑ 25 — Qu’il. B, Qui. — ne. B, et.
- ↑ 26 — B, Pour ce ne.
- ↑ 27 — nul. B, à.
- ↑ 30 — Tantost. B, Si tost.
- ↑ 31 — B, Et je quier qui.
- ↑ 32 — je tout avant. B, tout premerain.
- ↑ 33 — B, .I. sergent qui fait laide frume.
- ↑ 37 — B, Groingnès est mes premerains mès.
- ↑ 38 — n’en sel. B, n’autre.
- ↑ 41 — Touz. B, Mout. — touz. B, mout.
- ↑ 43 — keus. B, cuens.
- ↑ 45 — molt. B, trop.
- ↑ 46 — B, Par le conseil Petit font.
- ↑ 49-52 — Ces vers manquent dans B.
- ↑ 54 — ruis. B, ris. — Après ce vers, B ajoute :
Petis est plains de mavaise ire,
Petis la cuisine nos livre. - ↑ 56-75 — Ces vers manquent dans B.
- ↑ 67 — Le ms. A porte D’onnor : il faut corriger non pas « De onnor », mais Et d’onnor.
- ↑ 76 — tieus serjans. B, tel sergent.
- ↑ 78 — une gent les ont. B, ils ont .I. gent.
- ↑ 80 — Qu’il. B, Qui.
- ↑ 82 — met touz. B, a mis.
- ↑ 85-86 — Ces vers manquent dans B.
- ↑ 87 — les. B, le.
- ↑ 88 — biaus. A, biau. — deserrer. B, despiter.
- ↑ 89 — Biautez. B, Biaus dis.
- ↑ 90 — Que. B, Car. — revelle. B, se melle.
- ↑ 91 — bien. B, ge.
- ↑ 93 — Esraigier. B, Essarter.
- ↑ 94 — Se. B, S’uns. — s’eüst. B, s’avoit.
- ↑ 96 — large, lisez larges. — B, Qu’il fu et.
- ↑ 98 — B, Et donnast à la povregent.
- ↑ 100 — B, Occire porroit.
- ↑ 102 — B, Et se tenist jolis.
- ↑ 103-105 — Ces vers manquent dans B.
- ↑ 106 — Et qu’il se. B, Et se. — Ce vers, dans B, est suivi de celui-ci :
Sachiez se il devenoit teus.
- ↑ 107-108 — Ces vers manquent dans B.
- ↑ 109 — B, En paroles, en dis, en fais.
- ↑ 111-112 — B :
Et Honors seroit ravescue,
El Largece qui est perdue.Après ce vers B ajoute :
Et Charitez s’en est alée,
Envis iert jamais recouvrée,
Et Loiautés s’en est fouie,
Ne sai où ele est apouie,
Mais s’eles estient revenues,
Par aus serient ancor tenues
Maintes beles plenieres cors ;
A eux venroit chascuns le cors. - ↑ 113 — B, Lors .I. clers partout.
- ↑ 114 — Partout. B, Entrer.
- ↑ 117 — B, Mout plus souvant.
- ↑ 118 — Après ce vers, B ajoute :
Qu’Avarice les a cuvers,
.I. pechiez qui tant est pervers,
Qui tout le mont a perverti
Et à son vouloir converti. - ↑ 122 — B, Por ce dist. .I. clers.
- ↑ 123 — B, dou monde depart.
- ↑ 125 — ainçois la. B, car tout le.
- ↑ 126 — Gerbers. B, .I. clers.
LVII
DU CHEVALIER
et 1593, fol. 149 ro à 150 vo.
n la conté de Dant Martin[1]
Avint entor la saint Martin
Le boillant, que gibiers aproche,[2]
Uns chevaliers qui sans reproche
Vesqui ou païs[3] son aage.
Molt le tenoient cil à sage
Qui de lui estoient acointe.
Une dame mingnote et cointe,
Fame à .I. riche vavassor,
Proia cil et requist d’amor,
Et tant qu’ele devint s’amie.
Entor .II. liues et demie
Avoit[4] entre lor .II. osteus.
Li amis à la dame ert teus
Qu’il erroit[5] par toute la terre,
Por honor et por pris conquerre,
Tant que tuit le tindrent à preu.
Et[6] li vavassors por son preu
Entendoit à[7] autre maniere,
Qu’il avoit la langue maniere
LVIII
DE LA CROTE
et 1593, fol. 177.
cui que il soit lait ne bel,
Commencier vous vueil un fablel,
Force qu’il m’est conté et dit
Que li fablel cort et petit
Anuient mains que li trop lonc.
Or escoutez ci après donc
Que il avint à un vilain.
Sor un coussin tout plain d’estrain
Se degratoit delez son feu,
Et sa fame sist[8] en son leu
De l’autre part sor une nate,
Et li vilains, qui se degrate,
Apoingne[9] sa coille et son vit ;
Sa fame apele que il vit :
« Suer », fet il, « foi que moi devez,[10]
Or devinez, se vous savez,
Que c’est[11] que je tieng en mon poing ? »
Et cele, qui ne fu pas loing,
Li respont, qui n’ert[12] pas couarde :
« Li maleois feus le vous arde :
Je cuit que ce est[13] vostre andoille.
— Par mon chief, ainçois est ma coille »,
Fait li vilains, « qui gist souvine ;
Vous n’estes pas bone devine. »
La dame trestout[14] coiement
Taste à son cul isnelement,
Si i a trové une crote[15]
Qui resamble une machelote
Qui estoit[16] plus grosse d’un pois ;
A soi le tire[17] demanois.
Atout le poil à soi le[18] tire,
A son seignor commence à dire :
« Sire », dist[19] ele, « or gageroie
A vous, se gagier m’i devoie[20].
Qu’a .III. moz ne devinerois
Que c’est que je tieng en mes dois.[21]
— Et g’i met denrée de vin »,
Fait li vilains, « par saint Martin. »
Issi[22] fu fete la fermaille.
Et cele la crote li baille.
Li vilains la prent puis le[23] taste :
« Par le cuer bieu », fet il, « c’est paste.[24]
Que où que soit avez trovée.
— Par foi, c’est mençonge provée, »
Fait la dame molt hatement ;
« Vous mentez au commencement ;
Or n’avez que .II. motz à dire.
— Par le cuer bieu », fet il, « c’est cire »,
Por ce qu’il la sent .I. poi mole.[25]
— Par foi, ce est[26] fausse parole, »
Fet cele qui le tient por sot ;
« Or n’avez à dire c’un mot. »
Et cil en sa bouche[27] dedenz
La met et masche[28] entre ses denz,
Que paor a que il ne perde.
« Par le cuer bieu[29] », fet-il, « c’est merde ;
Je m’en puis bien apercevoir.
— Par mon chief, vous avez dit voir, »
Fet la dame tout[30] à estrous,
« Jamès ne gagerai à vous.
Deable vous ont fet devin ;
J’ai perdue[31] denrée de vin. »
- ↑ LVII. — Du Chevalier a la robe vermeille, p. 35.
A. — Paris, Bibl. nat., Mss. fr. 837, fol. 128 ro à 129 vo.
B. — » » » 1593, fol. 149 ro à 150 vo.
Ce fabliau se retrouve aussi dans le ms. de la Bibliothèque de Pavie (13o E 5, fol. 85 vo à 87 vo), que M. A. Mussafia a analysé dans les Sitzungsberichte der k. Akademie der Wissenschaften (de Vienne), Phil.-Hist. Classe, LXIV, 545-618 ; mais, d’après M. Mussafia, le texte en est tellement corrompu qu’il est presque inutile d’en relever les variantes (p. 616).
Publié par Barbazan, II, 168 ; par Méon, III, 272-282 ; et traduit par Legrand d’Aussy, II, 328-334, sous le titre de « La robe d’escarlate ».
XVe siècle, Antoine de Chabannes, avait été apporté en dot à son mari par Marguerite de Nanteuil.
Vers 1 — Le comté de Dammartin en Brie, dont le comte le plus célèbre fut, au - ↑ 3-4 — B :
Une merveillouse aventure
C’uns chevaliers qui sanz laidure. - ↑ 5 — ou païs. B, en peis tot.
- ↑ 13 — Avoir, lisez Avoit. — B, Pou avoit entre .II.
- ↑ 15 — erroit. B, aloit.
- ↑ 18 — Et. B, Mès.
- ↑ 19 — à. B, en.
- ↑ LVIII. — De la Crote, p. 46.
A. — Paris, Bibl. nat., Mss. fr. 837, fol. 332 vo à 333 ro.
B. — » » » 1593, fol. 177.
Publié par Barbazan, I, 5 ; et par Méon, III, 35-37, sous le titre de « Li Fabliaus de la merde », qui ne se trouve que dans B.
Vers 10 — sist. B, fu.
- ↑ 13 — Apoingne. B, Empoingne.
- ↑ 15 — B, Dame, foi que vous me.
- ↑ 17 — B, Qu’est ce.
- ↑ 19 — ert. B, est.
- ↑ 21 — est. B, sot.
- ↑ 25 — B, Et la dame tot.
- ↑ 27-28 — Remplacés dans B :
Semblant fait qu’ele se desfrote.
S’a trové une masserote. - ↑ 29 — estoit. B, ert. — d’un. B, que .I.
- ↑ 30 — le tire. B, la sache.
- ↑ 31 — soi le. B, li la.
- ↑ 33 — dist. B, fet.
- ↑ 34 — devoie. B, osoie.
- ↑ 36 — B, Que je tieng entre.
- ↑ 39 — Issi. B, Ainsi.
- ↑ 41 — puis le. B, et si.
- ↑ 42 — B, Par foi, » fet il, « je cuit. — Les vers qui viennent après sont déplacés dans B et se suivent dans cet ordre : 42, 49-50, 45-48, 43-44, 51.
- ↑ 49 — B, Por ce qu’ele est .I. petit.
- ↑ 50 — B, Par mon chief, c’est. — Fermer les guillemets après ce vers, et les rouvrir au commencement du vers 52.
- ↑ 53 — bouche. B, gole.
- ↑ 54 — B, La masche et mete.
- ↑ 56 — B, Par le sanc Dé.
- ↑ 59 — B, C’est merde de tot.
- ↑ 62 — B, Je vos doi.
LIX
DE GAUTERON ET DE MARION[1]
uant Gauterori se maria,
Marion prist, qui dit li a
Que l’aime molt et est pucele.
La nuit jurent et cil et cele ;
Son vit au con li apoucha
Et Marion un pou guicha,
Et si roidement l’assailli
C’un grant pet du cul li sailli.
Quant il oï le pet qui saut :
« Dame », dist il, « se Dex me saut,
Je sai bien et si ai senti
Que de covent m’avez menti ;
Car pucelle n’estiez pas. »
El li respont enelepas :
« Jel fui, mès je nel sui or mie,
Et vos fetes grant vilenie
Et si me dites grant outrage.
N’oïtes vos le pucelage
Qui s’enfoï quant vos boutastes ?
Moit vilainement l’enchaçastes. »
Quant Gauteron l’a entendu :
« Par le cuer Deu », fet il, « i put ;
Ce poise moi que il se mut ;
Miex fust el com à une part,
Car j’en eüse asséz du cart.
Pour ce maudi ge que de Deu
Soit la pucele confondue
Qui tant le garde que il pue. »
- ↑ LIX. — De Gauteron et de Marion, p. 49.
Publié par Barbazan, III, 126 ; par Méon, III, 489-440 ; et traduit par Legrand d’Aussy, I, 287.
Ce fabliau se trouve cité dans la pièce des Taboureurs, publiée par Ach. Jubinal (Jongleurs et Trouvères, 164).
LX
DE L’ANEL
fol. 207 vo à 208 ro.
aiseaus redit c’uns bons estoit
Un merveilleus anel avoit ;
Tant com il avoit en son doit,
Adès son membre li croissoit.
Un jor chevauchoit une plaigne
Tant qu’il trova une fonteine ;
Descenduz est quant il la vit,
Et lés la fonteine s’asist ;
Si lava ses meins et son vis,
Et son anel qu’il a hors mis.
Quant il li plut, si s’en leva.
Mès l’anel seur l’erbe oublia.
Un evesque par là passoit ;
Si tost com la fonteine voit,
Il descent et trova l’anel ;
Por ce que il le vit si bel,
En son doi l’a mis sanz atendre ;
Le membre li commence à tendre,
Quant il li ot un poi esté.
Et vos l’evesque remonté ;
A molt très grant mesese estoit
Du membre qui si li tendoit,
Ne n’aloit pas sans plus tendant,
Ençois aloit tozjors croissant.
Tant crut et va tant aloignant,
Que ses braies vont derompant.
Li evesques honteusement
Montre s’aventure à sa gent ;
Mès nul n’i ot qui s’avertist
Que ce li anel li feïst.
Tant crut que li traîne à terre :
Par conseil comanda à querre
Home ou fame qui li aidast,
Et qui à point le ramenast.
Cil qui l’anel avoit perdu,
Geste merveille a entendu.
A l’evesque est venuz tot droit ;
Si demanda qui li donroit
Du sien si le poeit garir.
Cil, qui avoit trop à soufrir,
Li dist : « Tot à vostre talent.
— J’aurai dont », fait il, « par covent.
Vos .II. aneaus tout au premiers[1],
Et cent livres de vos deniers. »
Quant les aneaus furent fors très,
Li membres est tantost retrès ;
Ainz que cil eüst ses cent livres,
Fu li evesques tot delivres.
Et cil marchié fu bien seanz,
Comme chascun en fu joianz.
- ↑ LX. — De l’Anel, p. 51.
Publié par Barbazan, III, 123, et par Méon, III, 437-438.
Vers 43 — * premiers ; ms., premier.
Ce fabliau, dont Legrand d’Aussy parle (IV, 309) sans en donner ni analyse ni extrait, a été imité par Vergier (Contes, I, 229), sous le nom d’« Anneau de Merlin ». (Cf. Fauchet, Œuvres, 1610, fol. 584.) Nous le retrouvons aussi, mais beaucoup allongé, dans le recueil (Conte 32e, p. 51) intitulé : « Rousskia zavietnia skazki » (Contes secrets russes), qui, croyons-nous, n’a pas encore été signalé. Ce recueil forme un petit volume in-8o de vii-199 pages, imprimé sans lieu (Valaam ?) ni date (sans doute en Allemagne, dans ces dernières années. Nous en avons eu connaissance grâce à M. Aug. Teste, qui l’a traduit et qui se propose de le publier, si toutefois la crudité des expressions n’y met obstacle.
Nous avons retrouvé dans ces Contes plusieurs histoires parures dans nos deux premiers volumes, et dont nous donnons ici la liste avec renvois aux pages de notre édition et du recueil. C’est d’abord la Borgoise d’Orliens (I, 117 ; II, 291), que nous revoyons dans le Conte 77e (p. 198) ; Brunain, la vache au prestre (I, 132 ; II, 293), n’est autre que le Conte 49e (p. 109) ; et le Debat du C. et du C. (II, 133, 322) est un peu écourté dans le Conte 9e (p. 10). Nous signalerons désormais, en les rencontrant, les ressemblances des contes russes et de nos fabliaux.
LXI
DU PRESTRE KI ABEVETE
fol. 240 ro à 240 vo.
chi après vous voel conter,
Se vous me volés escouter,
.I. flablel courtois et petit,
Si com Garis le conte et dit
D’un vilain qui ot femme prise
Sage, courtoise et bien aprise ;
Biele ert et de grant parenté.
Mout le tenoit en grant certé
Li vilains et bien le servoit,
Et icele[1] le prestre aimoit ;
Vers lui avoit tout son cuer mis.
Li prestres ert de li souspris
Tant que .I. jour se pourpensa
Que à li parler en ira.
Vers le maison s’est esmeüs.
Mais ains qu’il i fust parvenus,
Fu li vilains, ce m’est avis,
Au digner o sa femme asis.
Andoi furent tant seulement,
Et li prestres plus n’i atent,
Ains vint à l’uis tous abrievés,
Mais il estoit clos et fremés ;
Quant il i[2] vint, si s’aresta
Près de l’uis et si esgarda.
Par .I. pertruis garde et si voit
Que li vilains menguë et boit,
Et sa femme delés lui sist ;
Au prestre volentiers desist
Quel vie ses maris li mainne
Que nul deduit de femme n’aimme.
Et, quant il ot tout esgardé,
Esraumment .I. mot a sonné :
« Que faites vous là, bone gent ? »
Li vilains respondi briefment :
« Par ma foi, sire, nous mengons ;
Venés ens, si vous en dourons.
— Mengiés, faites ? vous i mentés,
Il m’est avis que vous foutes.
— Taisiés, sire, nous faisons voir :
Nous mengons, ce poés veoir. »
Dist li prestres : « Je n’en dout rien,
Vous foutes, car je le voi bien,
Bien me volés ore avuler.
O moi venés cha fors ester.
Et je m’en irai là seoir ;
Lors porrés bien[3] appercevoir
Se j’ai voir dit u j’ai menti. »
Li vilains tantost sus sali,
A l’uis vint, si le desfrema,
Et li prestres dedens entra,
Si frema l’uis à le keville ;
Adont ne le prise une bille.
Jusqu’à la dame ne s’areste,
Maintenant le prent par le teste,
Si Ta desous lui enversée,
La roube li a souslevée ;
Si li a fait icele cose
Que femme aimme sor toute cose.
Puis a tant feru et heurté
Que cele ne pot contresté[4]
Que il fist che que il queroit.
Et li vilains abeuvuetoit
A l’huis et vit tout en apert
Le cul sa femme descouvert
Et le prestres si[5] par desseure ;
Et quist chou : « Se Dix vous sequeure »,
Fait li vilains, « est che à gas ? »
Et li prestres en eslepas
Respont : « Que vous en est avis ?
Ne veés vous ? je sui assis
Pour mengier chi à ceste table.
— Par le cuer Dieu, ce samble fable ».
Dist li vilains, « ja nel creïse,
S’anchois dire nel vous oïsce,
Que vous ne foutissiés ma femme.
— Non fach, sire, taisiés ; par m’ame,
Autrestel sambloit ore à moi. »
Dist li vilains : « Bien vous en croi. »
Ensi fu li vilains gabés
Et decheus et encantés
Explicit. Amen.
- ↑ LXI. — Du Prestre ki abevete, p. 54.
10 — * icele ; ms., ce.
- ↑ 23 — « i » manqué dans le ms.
- ↑ 46 — « bien » manque dans le ms.
- ↑ 60 — La syntaxe demanderait contrester. Ne peut-on lire le vers ainsi :
Que ne pot estre contresté ?
- ↑ 65 — « si » manque dans le ms.
- ↑ 81 — « Et » manque dans le ms.
- ↑ 82 — * ahans ; ms., hans.
- ↑ 84 — * encor ; ms., encore.
Nous retrouvons ce fabliau, jusqu’ici inédit, dans Boccace (Journ. VII, nouv. 9), et c’est là que La Fontaine l’a pris pour en faire la seconde histoire de sa Gageure des Trois Commères, le Poirier enchanté (Cf. Romania, III, 314). Dans la Germania (XXI, 385-399), M. Liebrecht a étudié ce conte dans toutes ses versions sans mentionner celle de La Fontaine.
LXII
DU PRESTRE ET DES .II. RIBAUS
fol. 235 ro à 236 ro.
ui biaus mos set conter et dire,
Il ne les doit pas escondire
Entre bone gent ne repondre,
Ainz les doit volentiers despondre
Des meillors et des plus massis
Quant il voit qu’il sont bien assis
Et que chascuns volentiers l’ot,
Si qu’en la fin du tout se lot.
Or fetes pais, si m’entendez.
Puisque du tout vous atendez
A moi d’oïr aucun biau dit,
Il ne vous est pas escondit :
Si vous dirai de .II. ribaus
Dont li uns ot à non Thibaus
Et l’autre apeloit on Renier ;
Onques ne gaaigna denier
Que li dez ne li retousist,
Et ses compains ne revousist
Onques nule autre chose fere.
D’une manière et d’un afere
Estoient li dui compaignon,
Quar, s’il eussent .I. paignon,
Si le vendissent il ainçois
.I. alemant ou .I. françois,
S’en mi lor chemin l’encontraissent,
Por metre au geu qu’il en goustaissent.
De lor aferes dire doi.
.I. jor s’en alerent andoi
Tout lor chemin grant et plenier,
Thibaus en apela Renier
Et li dist : « Tu ne sez, compaing,
Que je fis ersoir biau gaaing
A Briset, le frere Chapel ?
Onques ne li remest drapel
Que tout ne perdist sanz recul
Comme les braies de son cul.
— Non, por saint Jaque de Galisce.
— Si fet il molt plus de malisce
Que ribaus que je veïsse onques.
— Et[1] comment le cunchias tu donques ? »
Fet Reniers ; « il est si repoins.
— J’ai », fet Thibaus, « uns dez mespoins.
Qui tuit sont de .II. et de troies,
Que j’aportai l’autrier de Troies[2],
Dont j’ai mon ribaut desgagié.
— Ne doivent pas estre engagié »,
Fet Reniers, « quant il sont si fet.
— Non certes, plus de bien m’ont fet
Qu’en aient trestuit mi parant,
Quar il me voient mal parant,
Et povre et à poi de drapaille ;
Si n’ont cure de tel frapaille
Ne ne vont pas ce souhaidant. »
Si comme il aloient plaidant
Li uns à l’autre tout à plain,
S’encontrerent .I. chapelain
Seur .I. bai palefroi ambiant,
Apert et de haitié samblant ;
Ainçois qu’il les puist saluer,
L’ont il aati de juer,
Quar d’autre chose ne lor est.
« Trop auroie petit conquest
A jouer à vous, ce me samble,
Quar andui n’avez mie ensamble
Qui vaille .X. tornois clavez.
— Certes mauvesement savez
Que nous avons », ce dist Reniers
« Encore avons nous de deniers
Plus que tel grant beubance maine
Que nous avons ceste semaine
Gaaigniez à torchier pailleus :
Encore en ai le dos pailleus ;
Si les avons nous bien gardez. »
Li prestres les a regardez,
Si vit lor chemises couées
Qui tout entor erent nouées
Devant et derriere et encoste ;
En maint leu lor paroit la coste,
Quar petit i avoit d’entir ;
Lors cuida bien tout sanz mentir
Li prestres que tout denier fussent
Qu’en lor drapiaus noez eussent,
Lors se pensse que gaaingnier
Porra bien, sanz lui mehaingnier,
Grant cop à ces .II. menestrels ;
Il ont tant de deniers entr’els
Qu’il ne les sevent ou mucier.
A Renier commence a huchier :
« Je juerai », fet il, « à ti
Puisque tu m’en as aati ;
Alons une minete querre. »
Et li prestres descent a terre,
Si empasture son cheval.
Tant ont quis amont et aval
Qu’il ont une minete eslite,
Et Thibaus primes s’i alite
Qui de jouer estoit ardant ;
Les dez ataint ains que l’argent,
Quar le geu covoite et désire.
« Quel geu[3] », fet il, « volez vous, sire ?
Est ce à la maille de refus ?
— Certes onques hardiz ne fus »,
Fet li prestres, « mès au tornois.
— Soit bien, ja por ce li tornois
Ne faudra. Vez là por le dé.
Qui lait si lait ! soit en non Dé ! »
Fet Thibaus, « j’en ai pour tout dis.
— De cheance soit .I. toz dis »,
Fet Reniers, « que Diex vous maintiegne !
— Metez donc à qoi je me tiegne »,
Fet li prestres, « ains que je get. »
Et cil, qui fu de bon aguet,
A son argent à la main mise,
Puis prent .I. neu à sa chemise,
Si en ataint .V. artisiens,
.III. tornois et .II. cambrisiens ;
Ce fu quanqu’il orent vaillant,
Mès de jue ; furent taillant,
Si les mistrent molt liement :
« Getez », fet il, « hardiement,
Ne fetes mie l’estormi,
Encore a tels .X. neus sor mi
Dont aine deniers ne fu ostez. »
Puis s’est vers le geu acostez.
Lors cuida bien le chapelain
Que tuit li neu fussent tuit plain
De deniers si comme estoit cil.
« Vez là ; c’est por l’argent », fet il ;
« Que gaaignier le me lest Diex.
— J’ai .XII. », fet Thibaiàs, « à deus.
Je ne vueil mie couchier trop,
Je le tendrai cest premier cop.
— Et je .VII., voiz comme or l’ai bone ;
Ce m’est avis que Diex me done
La pior qu’il i puet eslire.
— Mauvesement seüs eslire »,
Fet Thibaus, qui fu deslavez ;
« Vez là .XII., perdu l’avez,
.IIII. devez, hasart encore.
— Va », fet il, « male mort t’acore,
Hoche le dé, ne laisse[4] mie.
— Certes, sire, n’en sai demie,
Quar onques de ce riens n’apris. »
Les dez ainz que l’argent a pris,
Si les estrique, puis li change ;
Le geu croist toz dis et engrange.
« Hasart, Diex ! » fet il, « j’ai là sis.
— Va, si te pent, tu l’as assis,
Je ne t’en paierai ja point,
Je cuit que ce sont dé mespoint,
Dont tu ici quingné le m’as.
— Non sont, sire, par saint Thomas. »
Si l’en remoustre une autre pere,
Et li chapelains les apere,
Si les trueve quarrez et droiz.
« Par le cul Dieu », fet il, « c’est droiz ;
Je l’ai perdu, ce m’est avis ;
Or est toz mès argenz ravis
Que plus n’en ai petit ne grande.
Encore l’oi je orains d’offrande :
Si ne l’aurai de qoi secorre
S’au geu ne faz mon cheval corre ;
Mès certes ainçois li metra je
Que je mon argent ne ratra je.
Getez aval, .XII. en i voist ! »
Et cil, qui bien les dez connoist,
Tient tout, ne va rien refusant.
Que vous iroie je plus contant ?
Si bien fu esforciez li jus
Que li prestres a tout mis jus :
Tant exploita li bons vassaus
Que sor le cheval ot .C. saus.
« Ho ! » dist Reniers, « c’est à plentez.
— Certes, ribaus, vous i mentez »,
Fet li prestres, « il vaut .VII. livres.
— Vous en estes molt bien delivres »,
Ce dit Thibaus, » se Diex me saut ! »
Et li prestres a fet .I. saut.
Si cuide son cheval ataindre,
De mautalent commence à taindre.
Et dist qu’il[5] ne l’en menront mie.
Là veïssiez grant estormie ;
Au cheval sont venu tuit troi.
Et dist Reniers : « Pas ne l’otroi,
Vous ne monterez jamès sus. »
A force l’ont bouté en sus,
Tant l’ont ledengié et foulé
A poi qu’il ne l’ont afolé.
Puis prenent le cheval atant.
A poi ne se vont combatant
De monter chascuns premerains :
Tant l’ont sachié par les lorains
Que bien l’ont estendu .VII. paus.
« Certes », fet Thibaus, « ors crapaus,
Je monterai premierement. »
Reniers se resqueut fierement,
Et dist que non fera, s’il puet.
« Puisqu’ainsi est, il nous estuet
Geter à plus poins liquels monte.
Vez là, commencie. — Or les conte »,
Fet Thibaus, « j’en ai .IX., je cuit.
— Et je n’en aï tout par tout c’uit »,
Fet Reniers ; « que maus feus les arde ! »
Lors saut Thibaus, plus ne se tarde,
Si est montez sor le destrier,
Mès trop li sont cort li estrier,
Quar il ot une longue jambe
Plus noire que forniaus de chambe ;
Plas piez avoit et agalis,
Grans estoit, haingres et alis,
Et deschirez de chief en chief,
Et li huvès c’ot en son chief
Sambloit miex de cuir que de toile ;
Dès la cuisse jusqu’en l’ortoile
N’ot fil de drap, ce vous tesmoing,
Ne dès le coute jusqu’au poing.
Molt ot en lui biau soudoier
For aler en guerre ostoier.
Le cheval hurte des talons
Qu’il avoit durs et gros et lons,
Tant qu’il le mist du pas en l’amble,
Et li ribaus chancelé et tramble,
Quar n’avoit chevauchié, ce croi je,
Onques mes se ne fu en loge,
Mès ne fu mie sor tel beste.
Et li chevaus contre l’areste
D’un fossé vint de tele esclate,
Que li ribaus a terre flate
Si qu’à poi qu’il ne se tua,
Mès ce qu’il pot s’esvertua
Quar il se tint si fort aus ongles
Qu’il en fist desrompre les cengles
Et le frain si fort empoingna
Que du musel li descoingna.
Thibaus cheï en mi la place,
Et dist Reniers : « Ja Dieu ne place
Que sor tel beste monter puisse,
Quar tost m’auroit brisié la cuisse
Ou la teste par aventure ;
Ja n’aie je bone aventure,
Se g’i monte mes au jor d’ui ! »
Au cheval sont venu andui,
Se li Guident le frain remetre,
Mès ne s’en sorent entremetre,
Quar paor ont qu’il ne les morde
Ou qu’à force ne lor estorde.
Au chapelain sont revenu
Cui forment est mesavenu ;
Penssis le truevent, si ont dit :
« Venez avant, » Thibaus a dit,
« Remetez nous cest frain bien tos[6],
Ou vous aurez batu vo dos. »
Quant il les vit, s’ot grant peür,
Quar il n’estoit mie asseür :
« Seignor, » dist il, « trop se desguise
Li chevaus : il est de tel guise
Qu’il ne feroit riens por nului ;
Li frains, s’on ne monte sor lui,
Ne li puet estre ou chief boutez. »
Et dist Reniers : « Dont i montez,
Quar ainçois ne seroit remis :
Si m’aït Diex et sainz Remis,
En cest an que je plus i mont. »
Li prestres est montez amont,
Atout le frain si le ratache,
Des esperons le cheval daque,
Puis lor escrie à haute vois :
« Adieu, seignor, quar je m’en vois,
Li chevaus n’est hui mes voz ostes,
Quar tost eüst maigres les costes
S’il fust auques en vo baillie ;
Sa provende li fust baillie
Plus sovent de cops que d’avaine,
Quar sovent feïst l’etrivaine. »
Atant s’en va, si les degane,
Li prestres ainsi les engane,
Atant s’en va, si les esbuffe ;
Par son malice et par sa buffe
Rot son cheval, si l’ala prendre,
Et por ce fet il bon aprendre
Guile et barat, ce est la somme,
Quar mestier ont eu maint homme.
- ↑ LXII. — Du Prestre et des .II. Ribaus, p. 58.[Lisez fol. 235 ro à 236 ro.]
Analysé par Legrand d’Aussy, III, 137-140.
Vers 40 — « Et » manque dans le ms.
- ↑ 44 — Troyes était le lieu de foires bien connues au moyen âge. C’est là que se passe une partie de l’action de Pleine Bourse de Sens (p. 89).
- ↑ 100 — Ce fabliau, ainsi que celui de S. Pierc et du Jougleor (Méon, III, 282-296), nous donne quelques détails sur le jeu de dés, dont la vogue fut si grande au moyen âge.
- ↑ 141 — * laisse ; ms., lassie.
- ↑ 181 — qu’ïl, lisez qu’il.
- ↑ 251 — L’orthographe de « tos », rimant à « dos », prouve qu’à l’époque du fabliau ce mot se prononçait comme aujourd’hui, sans faire sentir l’s.
LXIII
DU
PESCHEOR DE PONT SEUR SAINE
fol. 184 ro à 185 ro.
’oï conter l’autre semaine
C’uns peschieres[1] de Pont seur Saine
Espousa fame[2] baudement :
Assez i prist vin et forment
Et .V. vaches et .X. brebis.[3]
La meschinete et ses maris
S’entr’amoient de bone amor.
Li vallès aloit chascun jor
Peschier en Saine en son[4] batel,
Et si fesoit[5] argent novel
Toutes les foiz que il peschoit ;
Assez en vendoit et menjoit[6]
Et s’en pessoit mout bien sa fame.
Il estoit sire et ele dame
De lui et de quanqu’il avoit,
Comme preudom se[7] maintenoit,
Et la foutoit au miex qu’il pot.
Qui ce ne fet, l’amor se tolt
De jone fame quant il l’a,
Ja bone[8] joie n’en aura,
LXIV
DES .III. MESCHINES
fol. 196 ro à 197 ro.[9]
r escoutez une aventure
Et puis si en dites droiture.
A Brilli[10] ot ja .III. meschines,
Ne sai comme eles erent fines,
Ne sai s’erent sages ou foies,
Mès mout hantoient ces caroles,
Et volentiers se cointissoient
A lor pooir et s’acesmoient.
L’une ert Brunatin apelée,
L’autre Agace, l’autre Suerée.
.I. jor tindrent lor parlement
D’atruper lor acesmement
Por une grant place aramie
Qui fu criée et aatie
De Boudet et de Jovincel,[11]
En ces chans vers Buesemoncel[12].
« Certes, » dit Suerée à Agace,
« Tel poudre sai, qui en sa face
L’auroit mise .I. poi destrempée,
Que tantost seroit colorée :
Si lo que nous querre Talon,
Quar, se le sanc ert el talon,
Sel feroit ele amont venir,
Et le vis vermeil devenir ;
Si l’a à Roem .I. mercier.
— Mès atant poons bien marchier,
Qu’il n’a el monde si très fine, »
Dist Brunatin, l’autre meschine,
« Et j’ai .III. sous à vous prester :
Si vous alez tost aprester
Et metez errant à la voie. »
Suerete a prise la monoie,
Si s’est vers Roem esmeüe.
Atout la poudre est revenue
A ses .II. compaingnes qu’el trueve.
Si commencierent la bone oevre,
Le jor que la place dut estre,
A la luor de la fenestre
D’une chambrete où els s’assistrent,
Dedenz .I. test la poudre mistrent.
Dist Suerée : « Diex nous i vaille !
Mès sachiez, il covient sanz faille
Que o pissat soit destrempée.
Je ne sui mie reposée,
Si me dueil de l’errer encore :
Si me covient reposer ore,
Mès fetes, et j’esgarderai. »
Dist Agace : « Et je pisserai
Ou test et ferai mon orine. »
Dist Brunatin : « Bele cousine,
Et je tendrai bien atiriez
Le test quanque vous pisserez. »
Lors li tint desouz et i garde
Et i prist au plus que pot garde.
Por miex esgarder el se plie,
Mès Agace ne pissast mie
Se l’en la deüst escorcier,
N’i pissast el sanz esforcier,
Mès ele i a mise sa force ;
En ce que Agace s’esforce,
Et .I. trés grant pet li eschape,
Por neent deüst taillier chape :
Pet fist du cul et poudre vole.
« Qu’est ce deable, pute fole ? »
Dist Brunatin, « que as tu fet ?
Certes vez ci vilain mesfet :
Toute a nostre poudre souflée,
Ele m’est dusqu’es iex volée,
Si m’a enfumée trestoute.
Que passion et male goute
Te puisse ore en tes iex descendre !
Ça, mes .III. sous, tu les dois rendre,
Jes aurai par sainte Marie. »
— Dist Agace : « Je nel di mie
Que je les vous rende par droit.
Que ne tenistes pas à droit
Le test que tenir deviiez
En droit le con, et l’aviiez
En droit le cul, si mesfeïtes
Que la poudre nous en tolistes :
Et quant ele est par vous cheüe,
Je di qu’ele est vostre perdue :
Si covient que vous la rendez. »
Dist Brunatin : « Or entendez,
Vostre cul est si près du con
Que il n’est sages ne bricon
Qui i veïst à paine marche,
Ce samble le cop d’une hache
Qui à .I. roont trou s’aboute,
Et vez ci ma reson trestoute :
Comment que je le test tenisse,
Jamès la poudre ne perdisse
Se ne fust vostre souflerie,
Et quant vous l’avez hors jalie,
Je di que vous la devez rendre.
— S’en oserai bien droit atendre
Et en romanz et en latin.
— Bien puet estre, » dist Brunatin,
« Mès quant vous ice saviiez
Que vous au pissier[13] poirriiez.
Que doit que vous ne le deïstes ?
Si fussiez du domage quites.
S’eüssiez dit vostre maniere
J’eüsse tret le test arriere,
Mès vous nous avez deceües
Et toutes nos colors perdues.
Et vilainement hors souflées :
S’en devez rendre les denrées.
— Cest contens n’est ne bon ne gent :
Metons nous en sus bone gent. »
Dist Brunatin : « Jel lo bien certes,
Et qui devra rendre les pertes. »
Ainsi ont la chose atirée.
« Damoisele, » ce dist Suerée,
« Que Diex vous doinst male semaine !
Laquele me rendra ma paine
Des colors que j’ai aportées
Que vous avez au cul souflées ?
— Qui perdra, rende les domages, »
Font eles, « et prenez bons gages
De chascune, c’est bien reson,
Tant que cest afere apelon. »
Si firent comme oï avez.
Seignors et dames qui savez.
De droit jugiez sanz delaier
Qui doit ceste poudre paier,
Cele qui tint le test en l’uevre,
Ou cele qui soufla deseure.
Mout est de gent, qoi que nus die,
Qui bien ne pisseroient mie
En nul leu que il ne peïssent ;
Et puis après ice si pissent,
Si ra grant force en test tenir
En droit le con sanz avenir
En droit le cul, ce n’est pas fable :
Or en dites droit couvenable.
- ↑ LXIII. — Du Pescheor de Pont seur Saine, p. 68.
Il faut joindre au ms. de la Bibl. nat., que nous avons cité, le ms. 179 bis de la Bibl. de Genève, qui nous offre un long fragment (fol. 4 ro à 7 vo) de ce fabliau, dont nous devons la collation à l’obligeance de M. Ritter. Nous désignons ce ms. par B et celui de la Bibl. nat. par A.
Publié par Barbazan, III, 183 ; par Méon, III, 471-478, et donné en extrait par Legrand d’Aussy, IV, 312-314.
Vers 2 — B, D’on pecheour. — seur. B, sus. — « Pont seur Saine », aujourd’hui Pont-le-Roi, dans l’Aube.
- ↑ 3 — B, Qui esposa.
- ↑ 5 — B, Catre vaches et nuef berbis.
- ↑ 9 — son. B, sus.
- ↑ 10 — B, Ensy faysoit.
- ↑ 12-15 — Ces vers manquent à B.
- ↑ 16 — se. B, la.
- ↑ 20 — bone. B, longue.
- ↑ LXIV. — Des .III. Meschines, p. 76.
Publié par Barbazan, III, 142, et par Méon, III, 446-451.
- ↑ Vers 3 — « Brilli », que nous n’avons pu identifier, est certainement tout près de Rouen, comme le prouve la facilité avec laquelle une des meschines se rend à la grande ville et en revient.
- ↑ 15 — Ces noms de trouvères nous sont inconnus.
- ↑ 16 — « Buesemoncel ». Nous ne pouvons identifier ce nom de lieu, non plus que Brilli.
- ↑ 100 — * pissier ; ms., pissiez.
LXV
DE LA DAMOISELE
et 1593, fol. 182 ro à 182 vo.[1]
eignor, oiez .I. noviau conte
Que mon fablel dit et raconte,
Que jadis estoit un baron
Qui mout estoit de grant renon.
Une fille avoit merveilleuse
Et tant par estoit desdaingneuse
Que[2] ne pooit oïr parler
De foutre ne de culeter,
Ne de rien qui à ce tornast.
Que maintenant ne se pasmast.
Mout en fu granz la renommée :
.I. vallet ot en la contrée
Qui a oies les noveles,
A merveille les tint à beles
Et jure Dieu, à qoi qu’il tort,
Ne lera qu’il ne voist à cort
Por soi déduire et deporter.
Alez i est sans demorer,
Et, quant ce vint après souper,
Si commencierent à border
Et contoient[3] de lor aviaus
Lor aventures, lor fabliaus,
Tant que li[4] uns foutre nomma,
Et la pucele se pasma.
Quant li vallès la vit pasmée
Tout maintenant goule baée,
Se lest cheoir comme pasmez,
Et quant il se fu relevez
Et la pucele fu levée,
Mout en fu grande la risée,
Et dient tuit par la meson
Cor a la pucele baron,
Car ele meïsme jura
Que ja mari ne per n’aura
S’ele n’a celui qui se pasme,
Quar ele cuide bien et asme
Qu’il soit auques de sa maniere ;
A son pere en a fet[5] proiere :
« Donez le moi, biaus pere chiers.
— Fille, » dist il[6], « mout volentiers. »
Que vous feroie lonc sermon ?
L’endemain le prist à baron.
Granz noces i ot et grant feste,
Assez i ot chanté[7] de geste.
Et, quant ce vint à la vesprée
Qu’il ont[8] lor joie demenée,
Si les a l’en couchiez ensamble.
La damoisele, ce[9] me samble,
Li mist la main droit sor le pis :
« Ice que est, » fetele, « amis ?
— Douce, par sainte patrenostre,
Quanqu’il i a ce est[10] tout vostre. »
Puis lest aval sa main glacier,
Si a trové un vit si fier
Que cil avoit entre .II. aines.
Mout bien fresté à .XIII.[11] vaines
Comme baston à champion ;
Gros ert en mi et gros en son.
« Sire, por Dieu le roi celestre,
Dites moi que ce puet ci estre ?
— Bele, » fet il, « c’est mes poulains.
Qui mout par est de grant bien plains. »
Puis taste avant, si a sentues
Unes grandes coilles velues :
« Et qu’est ceci, por sainte Elaine ?
— Douce, c’est li sas à l’avaine :
Ne vueil mie estre desgarnis.
— Sire, mout estes bien apris. »
Tout maintenant que cil l’oï,
Si le besa et conjoï,
Sa main li mist sor la mamele
Que ele avoit dureté et bele.
« Amie, » fet il, « qu’est ceci. ?
— Sire, c’est fruis vostre merci
Que je porte adès en[12] mon sain. »
Puis lest aval couler sa main,
Si la[13] mist droit sor le poinil :
« Amie, qu’est ceci ? » fet il ;
« Par Dieu qui fist et mer et onde,
C’est li plus biaus praiaus du monde.
— Praiaus, voire por Dieu, c’est mon. »
Lors li met la main sor[14] le con :
« Et qu’est ceci, amie bele ?
— Sire, c’est une fontenele
Qui siet ci en mi mon praiel :
Si i fet mout bon et mout bel
Qu’ele est assise en .I. recoi. »
Puis taste avant del plus lonc[15] doi,
Si comme avint par aventure,
Si trueve une autre haveüre[16].
Maintenant a sa main retrete :
« Ne doutez, sire, c’est la guete
Qui la fontaine et le pré garde,
Mès ja por ce mar aurez garde
Que n’i puissiez bien amener
Vo poulain pestre et abevrer.
— Bele, que dira donc la gaite
Qui la fontaine et le pré gaite ?
— Sire[17], se le trovez si sot,
Qu’il en parolt .I. tout seul mot,
Si le ferez en mi les denz
Du sachet ou l’avaine est enz. »
Quant cil[18] l’oï, s’en ot grant joie,
Maintenant le[19] prent, si la ploie,
En la fontaine mist sa beste
Trestout jusques outre la teste.
Quant la guete s’est perceüz
Qu’il est honiz et deceüz,
Maintenant a .II. cris getez :
« Oez, douce, » dit il, « oez,
Oiez, » dit il, « du trahitor.
— Sire, por Dieu le creator,
Ferez, batez, hurtez, boutez[20].
Batez le tant que l’ociez,
Si que l’estordissiez trestout
Que ne se face si estout. »
Que vous feroie longue fable ?
Par Dieu le pere esperitable.
Tant le bati, tant le frapa,
Que onques puis mot ne sona ;
Tant le bati, le las dolant,
Qu’il li fist l’alaine puant.
- ↑ LXV. — De la Damoisele qui ne pooit oïr parler de foutre, p. 81.
A. — Paris, Bibl. nat., Mss. fr. 837, fol. 182 vo à 183 ro.
B. — » » » 1593, fol. 182 ro à 182 vo.
Publié par Barbazan, III, 160, et par Méon, III, 458-462.
- ↑ Vers 7 — Qui, lisez Que.
- ↑ 21 — B, Et conterent.
- ↑ 23 — « li » manque à B, ce qui fausse le vers.
- ↑ 38 — fait, lisez fet.
- ↑ 40 — dist il. B, fet il.
- ↑ 44 — chanté. B, parlé.
- ↑ 46 — B, Si ont.
- ↑ 48 — ce. B, ge.
- ↑ 52 — ce est. B, c’est, qui fausse le vers.
- ↑ 56 — B, froté à .XII.
- ↑ 75 — adès en. B, dedenz.
- ↑ 77 — la. B, li.
- ↑ 82 — sor. B, sas.
- ↑ 88 — B, plus lonc .I. poi.
- ↑ 90 — haveüre. B, navreüre.
- ↑ 99 — B, Si[re].
- ↑ 103 — cil. B, il.
- ↑ 104 — le. B, la.
- ↑ 113 — B, botez, hortez.
L’idée principale de ce fabliau est la même que celle de la Dame qui aveine demandoit pour Morel, publiée dans notre premier volume, p. 318-329 (Cf. II, 308), de la Pucele qui abevra le polain, et du Porcelet, que nous publierons plus tard. Une autre version toute différente existe dans le ms. 354 de Berne, fol. 58 ro à 59 vo ; nous la donnerons prochainement. Les Contes secrets russes (voy. p. 334-335) nous offrent aussi la même idée dans le 15e conte, p. 22 ; dans le 36e, p. 65, et dans le 40e, p. 73. L’extrait donné par Legrand d’Aussy, IV, 315-317, est imité du ms. de Berne.
LXVI
DU FAUCON LANIER
fol. 256 ro.[1]
u biau faucon lanier mauvès
Resamble maint homme de fès,
Si vous en dirai la reson :
Quant les perdris sont en seson
Et on le gete por voler,
Sachiez que il ne veut aler :
A la terre s’assiet tantost
Jusqu’atant qu’il trueve qui l’ost,
Son mengier veut avoir por nient
Par la mauvestié qui le tient,
Et volast bien se il vousist,
Mès onques tant de bien ne fist
Qu’il ne face ore le contre re,
Si que l’en a de lui que fere.
Ausinques est il d’aucun hom
Qui mestier set et bel et bon
Por gaaignier se il vousist,
Mès mauvestié si le saisist
Dont il ne se veut remuer
Qu’il li estuet trestout trover
Et a vestir et à chaucier,
Et honis soit le sien mestier,
Quar il iroit par le sien pris
De toz biens et nus et despris,
Et quant il est desatiriez
Et d’aucune cbose arririez,
Si dist : « Se j’estoie à barnas
Et je eusse uns linges dras »
Ou tel chose que il n’a mie,
« Foi que je doi sainte Marie
Encor iroie gaaingnier
Et seroie hors de dangier. »
Et quant on l’a remis arriere
Ou point et à droite maniere
Pour gaaignier aucune chose.
Tant fet qu’il est à la desclose,
Et quant ert cel gaaing veü,
Quant erent trestuit revenu
Li deable de rasteler,
Tel gent ne doit on pas amer,
Ainz le doit on mout desprisier
Qu’il resamble de son mestier
Au faucon lanier, ce m’est vis,
Qui par sa perece est honis.
- ↑ LXVI. — Du Faucon lanier, p. 86.
Cette pièce, inédite jusqu’ici, nous donne le sens primitif du mot lanier, tout d’abord appliqué seulement aux faucons.
LXVII
DE PLEINE BOURSE DE SENS
et 1593, fol. 125 vo à 128 ro ; Bibl. de Pavie,
Mss. 130 E 5, fol. 15 ro à 18 ro.[1]
ehans li Galois nous raconte
Qu’il ot en la terre le conte
De Nevers .I. riche borgois
Qui mout ert sages et cortois.[2]
Li[3] borgois estoit marcheanz,
Et de foires mout bien cheanz ;
Sages estoit et bien apris,[4]
Et avoit[5] fame de haut pris,
La plus bele que l’en[6] seüst
Ou païs, ne que[7] l’en peüst
Trover, tant seüst l’en cerchier.
La dame ot mout son seignor[8] chier,
Et il li, mes que tant i ot
Que li borjois une amie[9] ot
Qu’il ama et vesti de robes,
Et cele le servoit[10] de lobes ;
Car mout[11] le savoit bien deçoivre.
La dame[12] s’en prist à perçoivre,
Qui l’i vit[13] aler et venir,
Ne se pot mie de[14] tenir
LXVIII
LE PET AU VILAIN
à 72 ro, et 1635, fol. 63 ro à 63 vo.[15]
n Paradis l’esperitable
Ont grant part la gent cheritable,
Mès cil qu’en aus n’ont charité[16],
Ne bien, ne pais[17], ne loiauté,
Si ont failli à cele joie.
Ne ne cuit que ja nus en joie,
S’il n’a en li pitié humaine.
Ce di je por la gent vilaine,
C’onques n’amerent clerc ne prestre,
Si ne cuit[18] pas que Diex lor preste
En Paradis ne leu ne place.
Onques à Jhesu Crist ne place
Que vilainz ait herbergerie
Avec le Fil sainte Marie ;
Car il n’est raison ne droiture,
Ce trovons nous en Escriture ;
Paradis ne pueent avoir
Por deniers ne por autre avoir ;
Et à Enfer ront il failli,
Dont li maufé sont maubailli ;
Si orrez par quel mesprison
Il perdirent celle prison.
Jadis fu uns vilains enfers ;
Appareillez estoit Enfers
Por l’ame au vilain recevoir ;
Ice vous di je bien por voir[19],
Uns deables i ert[20] venuz,
Par cui li drois ert[21] maintenuz.
Un sac de cuir au cul li pent,[22]
Maintenant que leanz descent,
Que[23] li maufez cuide sans faille
Que l’ame par le cul en[24] saille.
Mais li vilains por garison
Avoit ce soir prise poison,
Tant ot mengié bon buef as aus,
Et dou gras humé qui fu[25] chaus
Que la[26] pance n’estoit pas mole,
Ainz li tent com corde à[27] citole,
N’a mès doute qu’en[28] soit periz,
Car, si[29] puet poirre, il est gariz.
A cest esfort forment s’esforce,
A cest esfort met il sa force ;
Tant s’efforce, tant s’esvertue,
Tant se torne, tant se remue,
C’uns pet en saut qui se desroie,
Li saz emplist, et cil le loie[30],
Quar[31] li maufés par penitance
Li ot aus piez foulé la pance ;
Et en dit bien en[32] reprovier
Que Trop estraindre fait chier.
Tant ala cil qu’il[33] vint à porte,
Atout le pet qu’en sac aporte[34] ;
En Enfer jete sac et tout,
Et li pez en sailli à bout.
Estes vous chascun des maufez
Mautalentiz et eschaufez,
Et maudient l’ame au vilain[35] ;
Chapitre tindrent l’endemain,
Et s’accordent à cel[36] acort
Que jamais nus ame n’aport
Qui de vilain sera issue ;
Ne puet estre qu’ele ne pue.
Ainsin[37] s’acorderent jadis
Qu’en Enfer, ne en Paradis,
Ne puet vilains entrer[38] sans doute.
Oï avez la raison toute.
Rutebuez ne set entremetre
Où l’en[39] puisse ame à vilain metre,
Qu’ele a failli à ces .II. regnes ;
Or voist chanter avec les raines,
Que c’est li mieudres qu’il i voie,
Ou el tiegne droite la[40] voie,
Por sa pénitence alegier,
En la terre au pere Audigier[41] ;
C’est en la terre de Cocusse,
Où Audigiers chie en s’aumusse.
- ↑ LXVII. — De Pleine Bourse de sens, p. 88.
A. — Paris, Bibl. nat., Mss. fr. 887, fol. 68 vo à 70 vo.
B. — » » » 1593, fol. 125 vo à 128 ro.
C. — Bibl. de Pavie, Mss. 130 E 5, fol. 15 ro à 18 ro.
Nous empruntons les variantes du ms. C (Bibl. de Pavie) à M. A. Mussafia, Sitzungsberichte der k. Akademie der Wissenschaften (de Vienne), Phil.-Hist. Classe, LXIV, 555-557.
Publié par Barbazan, I, 61 ; par Méon, III, 38-53 ; par M. Al. Assier, dans la Bibliothèque de l’Amateur champenois, sous le titre de Ce qu’on apprenait aux foires de Troyes et de la Champagne au XIIIe siècle, 2e éd., 12-29 ; et traduit par Legrand d’Aussy, IV, 1-6.
- ↑ Vers 4 — Ce vers manque à B.
- ↑ 5 — Li. C, Cil.
- ↑ 7 — B, C, Qu’il ert sages.
- ↑ 8 — avoit. B, si ot. C, s’avoit.
- ↑ 9 — que l’en. A, que on.
- ↑ 10 — B, « que » manque.
- ↑ 12 — seignor. C, mari.
- ↑ 14 — une amie. B, bele amie.
- ↑ 16 — B, C, Et ele le servi.
- ↑ 17 — A, Qui mout. C, Que mout. — le savoit. B, se vauït.
- ↑ 18 — dame. B, fame. — perçoivre. B, aperçoivre.
- ↑ 19 — vit. B, voit.
- ↑ 20 — de. C, plus. — B, Si ne se pot mie tenir.
- ↑ LXVIII. — Le Pet au Vilain, p. 103.
A. — Paris, Bibl. nat., Mss. fr. 837, fol. 315 ro.
B. — » » » 1593, fol. 71 vo à 72 ro.
C. — » » » 1635, fol. 63 ro à 63 vo.
Publié par Barbazan, I, 108 ; par Méon, III, 67-69 ; par Ach. Jubinal, Œuvres complètes de Rutebeuf, 2e éd., II, 86-90, et donné en extrait très-court par Legrand d’Aussy, II, 352-333, sous le titre de : l’Indigestion du vilain.
- ↑ Vers 3 — charité. B, verité.
- ↑ 4 — pais. C, foi. — loiauté. B, charité. — A, Ne sens ne bien ne verité.
- ↑ 10 — cuit. B, croi.
- ↑ 26 — por voir. A, de voir.
- ↑ 27 — ert. B, C, est.
- ↑ 28 — ert. B, est.
- ↑ 29 — Ce vers et le suivant sont intervertis dans A.
- ↑ 31 — Que. C, Car.
- ↑ 32 — en. A, C, s’en.
- ↑ 36 — fus, lisez fu.
- ↑ 37 — la. C, sa.
- ↑ 38 — à. B, de, qui fausse le vers.
- ↑ 39 — en. A, C, il.
- ↑ 40 — Car si. A, C, S’or. — il est. A, si est. C, il iert.
- ↑ 46 — B, l’esloie.
- ↑ 47 — B, Que. — par. A, C, por.
- ↑ 49 — en. B, l’en.
- ↑ 51 — qu’il. B, qui.
- ↑ 52 — A, enporte.
- ↑ 57 — A, C, à vilain.
- ↑ 59 — B, à tel.
- ↑ 63 — A, C, A ce.
- ↑ 65 — B, entrer vilains.
- ↑ 68 — l’en. C, hom.
- ↑ 72 — la. B, sa.
- ↑ 74 — Le conte d’Audigier (Méon, IV, 217-233), parodie des chansons de gestes, était célèbre au moyen âge. Nous le voyons cité dans l’Aiol (vers 953 et 992, éd. J. Normand et G. Raynaud) et dans le Jeu de Marion et Robin (Adam de la Halle, éd. Coussemaker, 409-410).
Nous retrouvons à peu près l’idée de ce fabliau dans le 16e conte, p. 25, des Contes secrets russes (voy. p. 334-335)
LXIX
LI DIS DE
LE VESCIE A PRESTRE
n lieu de fable vos dirai
Un voir, ensi k’oï dire ai,
D’un prestre ki astoit manans
Deleis Anwiers[2] ; li remanans
Estoit mut biaus de son avoir,
Car plains estoit de grant savoir.
Si n’avoit pas tot despendut,
A amasser[3] avoit tendut,
S’estoit riches bons et moblés ;
Buez et vaches, brebis et bleiz
Avoit tant c’on n’en savoit conte,
Mais li Mors, qui roi, duc ne conte
N’espargne, l’ot par son message
Somont al naturel passage :
Eutropikes ert devenus ;
De nul home n’estoit tenus
LXX
DE CELLE QUI SE FIST
et 1593, fol. 183 vo à 184 vo ;
Bibl. de Berne, Mss. 354, fol. 59 vo à 60 ro.[4]
u tens que[5] volentez me vient,
De fable[6] dire me covient ;
Dirai en leu de fable voir[7] :
Un hon qui de petit[8] d’avoir
Ert en grant richece embatuz,
Si con ses termes ert[9] venuz,
Le[10] prist Mors en Flandres jadis.
Mout fu et[11] par fais et par dis
Sa fame de sa mort irie ;
Quar fame est mout tost aïrie[12]
A plorer et à[13] grant duel faire,
Quant ele a .I. poi de contraire,
Et tost ra[14] grant duel oublié.
Quant la dame vit devié
Son seignor qui tant l’ot[15] amée,
Sovent s’est chaitive clamée,
De grant dolor mener se paine ;[16]
Mout i emploie bien sa paine[17]
Qu’ele en a le molle trové.[18]
Si a mout bien son preu prové,
Ce semble, a toz vers son seignor,
Ainz fame ne feist tel dolor,
Et quant ce vint à l’enterrer,
Dont oïssiez fame crier
Et veïssiez mout grant duel faire,
Et poins de tordre et cheveus trere,
Et si s’escrie de seur touz :
« Prodon, bon hon, où irez vos ?
Or vos met l’en en cele fosse ;
Sire, je remaing de vos grosse ;
Qui garira l’enfant et moi ?
Mieus voil que morissons andoi. »
Quant li cors fu en terre mis,
Dont s’escria à mout hauz cris,
Si se decire et pleure et brait,
A la terre cheïr se lait.
Si parent la reconfortoient,
A l’ostel mener l’en voloient,
Mès ele dit qu’ele n’iroit
Ne jamès ne s’en partiroit
De la fosse, morte ne vive.
Tant s’en escombat et estrive
Qu’il l’ont leissie par anui ;
Avec li ne remaint nului ;
Seule remest et sanz compaigne.
Esvos .I. chevalier estraigne ;
Lui et son escuier venoit.
Son chemin à l’autre tenoit ;
La dame vit illuec seoir
Qui à trestot le sien pooir
Destruit et essille son cors
Por son seignor qui estoit mors
« Voiz tu, » dit il à l’escuier,
« Cele dame là essillier
Son cors ? N’a mie son cuer lié.
Certes mout en ai grant pitié.
— Pitié au deable vos tient,
Quant il li de pitié vos vient :
Je gagerai, se vos volez,
Par si que de ci vos tornez,
Que ja à mout petit de plet,
Si dolente comme el se fait,
La foutrai, mès que vos traiez
En tel lieu que ne nos voiez.
— Qu’as tu dit, escommeniez ?
Je croi que pas crestiens n’ies,
Ainz as ou cors le vif deable
Quant contrové as or tel fable.
— Est ce fable ? Je gageroie
Vers vos, se gagier m’i osoie.
— Or i parra que tu feras ;
Ja par moi veüs n’i seras.
Repondre m’irai soubz cel pin. »
Cil descent jus de son roncin
A la terre et fet chiere morne ;
Vers la dame sa voie atorne ;
Si dit en bas, non pas en haut :
« Chère suer, » dit il, « Deus vos saut !
— Saut ? » fet ele, « mès doinst la mort,
Que je sui vive à mout grant tort,
Que mes sire est mors, mes mariz,
Par cui mes cuers est si marris,
Qui me gita de povreté
Et me tenoit en grant chierté,
Et m’amoit plus que lui meïsme.
— Suer, je sui plus dolenz la disme.
— Coment plus ? — Jel te dirai, suer.
Je avoie mis tout mon cuer
En une dame que j’avoie.
Et assez plus de moi l’amoie,
Qui ert bele, cortoise et sage ;
Ocise l’ai par mon outrage.
— Ocise l’as ? Coment, pechierre ?
— En foutant, voir, ma dame chiere,
Ne je ne voudroie plus vivre.
— Gentilz bon, vien ça, si délivre
Cest siècle de moi, si me tue ;
Or t’en esforce et esvertue,
Et si me fai, se tu pues, pis
Que tu ta fame ne feïs ;
Tu dis qu’ele fu morte à foutre. »
Lors s’est lessie cheoir outre,
Aussi com s’ele fust pasmée.
Cil a la robe sus levée,
Si li embat el con le vit,
Si que ses sires bien le vit
Qui se pasmoit de gieus en aize :
« Me cuides tu dont tuer d’aize, »
Fet la dame, « qui si me fous ?
Ainz t’i desromperoies touz
Que tu m’eüsses ainsi morte. »
Ainsi la dame se conforte,
Qui ore demenoit tel dol.
Por ce tieng je celui à fol
Qui trop met en fame sa cure ;
Fame est de trop foible nature,
De noient rit, de noient pleure,
Fame aime et het en trop poi d’eure ;
Tost est ses talenz remuez :
Qui fame croit, si est desvés.
LXXI
DES .III. CHEVALIERS
ar bon semblant et par bel dire
Sevent acun felon plain d’ire
Autrui soprendre et dechivoir,
Et cant ilh sevent de ce voir
Dont ilh sont de savoir en grant,
Mais n’aront bien, s’aront en grant
Anui[20] et en grant deshonur
Mis ches[21] cui offroient honur.
Por ce ne seit on mais cui croire,
Ke li faus ne vuelent recroire
De lor traïson porchachier ;
Les loiaus font si deschachier,
Ains k’il soient de riens creü,
Ke teil travalh lor sont creü
K’il n’ont repos, ne jor ne eure.
De pener à ce k’al deseure
Puise lor loialté monter,
Si con fist chil dont velh conter.
Ilh avint c’une gentis dame
N’avoit plus bele en un roiame,
LXXII
DES .III. CHANOINESSES
à 88 ro.[22]
l n’a homme de si à Sens,
S’adès vouloit parler de sens,
C’on n’en prisast mains son savoir
Qu’on[23] fait sotie et sens savoir.
Qui set aucunes truffes dire,
Ou parlé n’ait de duel ne d’ire,
Puis que de mesdit n’i a point,
Maintes foiz vient aussi à point
A l’oïr que fait uns sarmons.
Il a chanoinesses à Mons,[24]
Au Moustier seur Sambre, à Nivele,
Et à Andaine mainte[25] bele
Et trop plus assez à Maubeuge,
Mais ore droit conter vous veul ge,
Sanz ajouster[26] mot de mençoingne.
De .III. de celes de Couloingne
Et dire .I. poi de reverie
Par covent que chascuns en rie
S’il y a mot qui bien le vaille.
De longue rime ne me chaille,
Mais briément, sanz prologue faire,
Vous veul dire et conter l’afaire
De ces .III. dames Chanoinesses.[27]
D’amor aprises et maistresses,
L’art sorent tout et le mestier
De quanqu’en amer a mestier ;
Tant l’avoient lonc temps usé
C’en tenoit ja pour refusé
Leur cors et leur[28] biautez usées,
S’erent ainssi que refusées.
Et non pourquant mout[29] erent cointes
Et jolies, et biaus acointes
Orent racointiez de nouvel ;
Ce les tenoit en grant revel
Et faisoit en amour penser.
Or vous voudrai avant passer
Et dire toute l’aventure
D’eles et la verité pure,
Selonc ma vraie entencion.
Vigille iert d’une Assencion
Que chascuns doit joie mener,
Et Dieus, qui me volt amener
A droit port, si bien m’asena
Qu’à l’eglyse droit m’amena.
Si fui à bonne destinée
Tant que grant messe fu finée
Et touz li mestiers Dieu finez.
Je, qui pas n’estoie avinez
Au matin ne beü n’avoie,
Par mi le Cuer tornai ma voie
Pour moi vers l’ostel ravoier,
Et Eürs me volt convoier,
Qui si trés bien me convoia
Qu’entre ces dames m’avoia,
Où il fesoit[30] si trés bel estre
C’iert uns fins paradis terrestre,
Plains[31] d’anges, de sains et d’ymages ;
Tant y avoit de biaus visages
Et de douz qu’il me fu avis
Qu’en regardant fusse ravis.
Onques n’oi si grant melodie,
Et si n’oi pas chiere esbahie.
Quant je fus[32] à moi revenuz,
Balades et Rondiaus menuz
Leur dis et autres Dis d’amours,
De Complaintes et de Clamours,
Que mout trés volontiers oïrent.
Et en l’oiant me conjoïrent
Et dirent iere bons compains :
« Habandonnez te soit nos pains.
Nos chars, nos vins et nos ostez :
Jamais ne te sera ostez ;
Hons es pour soulacier malades.
Qui tant ses Rondiaus et Balades ;
De toi ne doit estre se non
Nus princes. Or nous di ton non
Tant que bien t’aions cogneü.
T’avons nous autre foiz veü ?
Seroies tu nient Raniquès[33] ?
— Non voir, dame, mais Watriquès
Sui nommez jusqu’en Areblois[34],
Menestrel au Conte de Blois[35]
Et si à monseignor Gauchier[36]
De Chastillon. — Tant t’ai plus chier, »
Dist li une ; « par saint Niquaise,
Avec moi disneras tout aise,
Car toutes aprestées sommes
De servir ceuls dont tu te nommes ;
Si t’en verrai plus volentiers.
Mes ostieus est tiens touz entiers
Et quanque j’ai, de ce me vant.
Or me sui et g’irai devant :
Nous n’i serons qu’entre[37] nous trois
Compaignes ; li lieus est estrois :
En secré nous voulon[38] baignier ;
Plus n’en i voil acompaignier ;
Là nous diras de tes bons mos.
Vien i, si voir que parler m’os,
Tu seras aise à volenté :
On m’a dès ersoir présenté
.II. chisnes cras et .III. chapons. »
Et je, sanz[39] faire autre respons,
Volentiers et de clere vois
Dis : « Dame, granz merciz. G’i[40] vois ;
Je ne m’en doi faire prier ;
Je vous sivrai sanz detrier. »
Atant entrai dans la maison
Où ja iert du mengier saison ;
S’erent .II. des dames venues,
Chascune en son baing toutes nues,
Et la[41] tierce, sans nul desdaing,
Se despoille et entre en son baing,
C’onques pour moi n’i fist dangier.
Lors commenchames à mengier.
Ma table estoit assez près d’eles ;
Si les vi vermeilles et bêles
Et esprises de grant chaleur,
Que[42] leur fesoit avoir couleur
Li bains chauz et li bons vins frois,
Dont assez burent sanz effrois.
Là fumes aise de touz poins,
Et, quant il fu du parler poins,
Je commençai D’amer l’escole[43]
Qui l’amant à amer escole,
Car eles le voudrent oïr.
Pour vie amoreuse esjoïr
Et ceuls qui aiment de cuer fin.
Et, quant mes dis fu trais à fin
Que chascune ot bien escouté.
En a l’une[44] l’autre bouté
Et distrent que c’iert trés bien dit.
Puis me firent .I. autre Dit
Commencier par commandement[45],
Qui parlast plus parfondement
De paroles crasses et doilles,
« Si que de risées nous moilles »,
Dist l’une des mieus emparlées ;
« Nous sommes compaignes quarrées :
Di hardiment de quanqu’il touche
A …[46], s’il te vient à la bouche ;
Ja n’en seras de nous repris.
Ne voulons pas choses de pris,
Mais ce qui mieus rire nous face. »
Atant leur redreçai ma face ;
Si leur dis le Dit, à briez mos,
Des .III.…… des…… mos,[47]
Comment l’un l’autre rampona,
Dont li Cons jugement donna
Qu’ainz n’en fu bleciez ni quassez.
De ce ristrent eles assez
Et d’autres bons mos que je di.
Atant au bien boire entendi ;
Mes parlers lors fu acoisiez
Tant que fui de touz poins aisiez,
Et chascune à son droit aisie.
Lors parla la plus envoisie,
Et dit que celle[48] ait mal dehait
Qui ne fera aucun souhait
Tel qui as dames ne desplaise :
« Nous sommes ci à pais et aise ;
Li disons gogues et risées ;
Nous n’en poons estre accusées.
Car nous sommes en lieu secré. »
Lors dist cele au cuer plus letré.
« Honnie soit à cui il poise,
Or faites abaissier la noise
Tant que je aie souhaidié,
Car Dieus proprement m’a aidié
A mon souhait à aviser ;
Or vous le voudrai deviser.
Je souhaide q......,[49]
Fust aumosne aussi con pechiés,
Et c’on en aquerist pardon
De touz meffais et guerredon.
Que ja Dieus ne s’en courouçast ;
Mais certes, qui qui en grouchast,
Je vous jur et ai en couvent
............[50]
S’ensi estoit que je devise.
— Or est il temps que je m’avise, »
Dist la seconde, « à souhaidier
Chose qui mieus nous puist aidier.
Je souhaide à nostre Seignour
Que ce fust aussi grant honor.... »[51]
« Laquelle set mieus souhaidier ?
Juges, si Dieus te puist aidier,
Ouquel puet plus de bien avoir.
— Dames, je ne le puis savoir »,
Dist Watriquès, « sanz les plus sages.
Si serai du porter messages,
Tant que Ton en aura jugié. »
Ainssi pris d’eles mon congié ;
Si mis tout cest affaire en rime,
Où il n’a ne honte ne crime[52].
Ni chose qui grieve à nului.
Qui que le voille traire à lui,
Huimais n’en puet estre autre chose,
N’ai deservi que nus m’en chose ;
A moi ne s’en doit nus conbatre ;
Ce sont risées, pour esbatre
Les roys, les princes et les contes.
Ci faut des .III. dames li contes.
- ↑ LXIX. — De le Vescie a Prestre, p. 106.
Notre texte est établi d’après la copie de la Bibliothèque nationale (coll. Moreau, 1727 ; Mouchet, 52). Nous désignons par M cette copie, dans laquelle, comme aussi dans celle du fabliau no LXXI, nous avons essayé de régulariser certaines notations orthographiques (mut pour molt, eis pour ez, ki pour qui, etc.).
Publié par Méon, Nouveau Recueil, I, 80-90 ; par Renouard dans Legrand d’Aussy, IV, app. 18-21, et par M. Aug. Scheler dans les Trouvères belges, 214-224 ; analysé par Legrand d’Aussy, IV, 177-184.
- ↑ Vers 4 — La présence dans ce fabliau de la ville d’Anvers nous prouve bien que le tiois auquel il est emprunté est simplement du néerlandais. Du reste, les formes dialectales de cette pièce appartiennent bien à la région française du nord.
- ↑ 8 — * amasser. M, amassier.
- ↑ LXX. — De Celle qui se fist f…, p. 118.
A. — Paris, Bibl. nat., Mss. fr. 837, fol. 166 ro à 166 vo.
B. — » » » 1593, fol. 183 vo à 184 vo.
C. — » » » 2173, fol. 95 ro à 96 ro.
D. — Bibl. de Berne, Mss. 354, fol. 59 vo à 60 ro.
Nous empruntons les variantes du ms. de Berne à la copie de la Bibliothèque nationale (coll. Moreau, 1720 ; Mouchet, 46).
Publié par Barbazan, III, 167 ; par Méon, III, 462-466, et donné en extrait par Legrand d’Aussy, II, 328-329.
Le ms. A a pour titre : « De la dolente qui fu f… », et le ms. D : « De la dame qui fu f… sor la fosse de son mari ».
- ↑ Vers 1 — A, Entrues que. C, Puisque la. D, Tandis con.
- ↑ 2 — A, De fables. D, De fabliaus. — A, D, et il me tient. C, et il m’en tient.
- ↑ 3 — C, D, un voir.
- ↑ 4 — petit. C, D, mout pou. — d’avoir. B, savoir.
- ↑ 6 — ert. C, fu.
- ↑ 7 — Le. A, B, Li. — Ce vers et les trois suivants se lisent ainsi dans C :
Mourut, faire li couvenoit,
Et sa fame qui mout l’amoit
En fu, de sa mort, mout iriée ;
Mès fame s’est lues atiriée… - ↑ 8 — fu et. B, par fu. — et par fais. D, par sanblant.
- ↑ 10 — A, s’est tost atirie. D, est tantost atiriée.
- ↑ 11 — a, lisez à.
- ↑ 13 — ra. B, D, a.
- ↑ 15 — C, tant l’a. D, l’ot tant.
- ↑ 17 — C, D, De grant duel demener.
- ↑ 18 — B, Et sovent chetive se claime.
- ↑ 19-20 — Ces vers manquent à C ; 19-22 manquent à D.
- ↑ LXXI. — Des .III. Chevaliers et del Chainse, p. 123.
Notre texte est établi d’après la copie de la Bibliothèque nationale (coll. Moreau, 1727 ; Mouchet, 52), que nous désignons par M (Cf. notes du fabliau LXIX).
Publié par Méon, Nouveau Recueil, I, 91-103, et par M. Aug. Scheler dans les Trouvères belges, 162-174 ; traduit par Sainte-Palaye, Mémoires sur l’ancienne chevalerie, III, 138, et par Legrand d’Aussy, I, 235-242.
- ↑ Vers 7 — * Anui. M, Anuit.
- ↑ 8 — * ches. M, chis.
- ↑ LXXII. — Des .III. Chanoinesses de Couloingne, p. 137.
Le ms. de l’Arsenal porte dans la nouvelle numérotation le no 3525.
Publié par M. Aug. Scheler, Dits de Watriquet de Couvin, 373-379.
- ↑ Vers 4 — * Qu’on ; ms., Von.
- ↑ 10-3 — Ces noms connus de villes du Hainaut servent assez à prouver la nationalité de l’auteur du fabliau, qui est de Couvin (évéché de Liége).
- ↑ 12 — riante, lisez mainte.
- ↑ 15 — Sans ajouter, lisez Sanz ajouster.
- ↑ 23 — M. Scheler, tout en constatant qu’à Cologne il a existé un canonicat de dames, ne veut voir ici qu’une fiction du poëte.
- ↑ 29 — leurs, lisez leur.
- ↑ 31 — * mout ; ms., mont.
- ↑ 55 — faisoit, lisez fesoit.
- ↑ 57 — * plains ; ms., plain.
- ↑ 63 — fu, lisez fui.
- ↑ 79 — Il faut voir dans le nom Raniquet une confusion de prononciation : les chanoinesses croient connaître le poëte, et ne se rappellent que confusément son nom, qu’elles estropient ; elles font ainsi Raniquet de Watriquet.
- ↑ 81 — Ne s’agit-il pas ici du château d’Arabloy, près de Gien, dont M. Pillon a écrit l’histoire dans les Mémoires de la Société archéologique de l’Orléanais, IV, 199-204 ?
- ↑ 82 — Ce comte de Blois est Gui de Blois.
- ↑ 83 — Dans le ms., ce vers est ainsi écrit : Et monseignor mesire Gauchier. Il s’agit du connétable.
- ↑ 93 — * qu’entre ; ms., que tre.
- ↑ 95 — voulons, lisez voulon.
- ↑ 102 — sans, lisez sanz.
- ↑ 104 — J’i, lisez G’i.
- ↑ 111 — le, lisez la.
- ↑ 118 — * Que ; ms., Ce.
- ↑ 123-4 — Le titre et le commencement de la chanson, que nous avons ici, ne se retrouvent nulle autre part.
- ↑ 130 — * En a l’une ; ms., L’une en a.
- ↑ 133 — comandement, lisez commandement.
- ↑ 140 — Supprimez l’s placée après les points.
- ↑ 146 — Supprimez « et ». — Le fabliau dont il est parlé ici ne nous est pas parvenu. Ce n’est certainement pas le Jugement des C… (Méon, III, 466-471).
- ↑ 157 — cele, lisez celle.
- ↑ 171 — La fin du vers est ici grattée, ainsi que les quelques mots des vers précédents que nous avons remplacés par des points.
- ↑ 178 — Vers gratté.
- ↑ 184 — Il manque ici tout un feuillet, à peu près 56 vers.
- ↑ 194 — rime, lisez crime.
Ce fabliau est précédé, dans le ms (fol. 84 vo), d’une grande miniature fond quadrillé rouge, bleu et or, avec une fleur de lis d’argent sur les carreaux bleus et rouges. Les trois chanoinesses, nues, sont dans trois tonneaux surmontés d’une sorte de dais à rideaux. Le poëte est assis ; il tient une coupe en forme de calice de la main droite, et un pilon de volaille ou un os de jambon de la gauche. Ce qu’il y a de singulier, c’est que la table, qui est couverte d’une nappe, et où l’on voit entre autres choses un couteau et un vase à deux anses, est une tabula au sens strict ; elle n’a pas de pieds et est posée sur les genoux du trouvère, dont la robe presque monacale est mi-partie à dextre de vert, et à senestre d’une couleur brun jaunâtre très-claire (Cf. la miniature de présentation et celle du fol. 144 vo).
LXXIII
DES .III. DAMES DE PARIS
à 94 ro.[1]
adis souloient les merveilles
Conter, as festes et as veilles,
Colins, Hauvis, Jetrus, Hersens ;[2]
Or sont à Paris, de touz sens,
Les maisons plaines et les rues
De grans merveilles avenues
A .III. fames nouvelement,
Si com vous l’orrez ja briément,
Se de vous puis estre escoutez.
Haus jours iert et sollempnitez[3]
Con dit des .III. Rois de Couloigne ;
Conter ne vous i veul mençoigne
Fors que droite vérité pure.
Mais onques si faite aventure
En pays du monde n’avint.
L’an c’on dit M. CCC. et vint,
.I. matin, devant la grant messe,
Que la fame Adam de Gonnesse[4]
Et sa niece Maroie Clippe
Distrent que chascune à la trippe
Iroient .II. deniers despendre,
S’en alerent, sanz[5] plus atendre,
Entre elles .II. à la taverne,
En la maison Perrin du Terne,
Qui nouviaus taverniers estoit.
Si com l’une l’autre hastoit
Qu’elles vouloient ens entrer,
Lors revint, droit à l’encontrer.
Dame Tifaigne, la coifiere.
Qui dist : « Je sai vin de rivière
Si bon qu’ainz tieus ne fu plantez.
Qui en boit, c’est droite santez,
Car c’est uns vins clers, fremians,
Fors, fins, frès, sus langue frians,
Douz et plaisanz à l’avaler ;
A celui nous convient aler.
Autre vin goust ne nous ara,
Ne ja bons ne nous i sara
Pour demorer .III. jours entiers.
Et si nous croira volentiers
Li ostes chascune .X. sous.
— Ses cors soit benis et absouls[6]
De celle qui si bien parla »,
Dist Margue ; « alons celle part là ;
Il i fait bon, et Dieus m’avoie. »
Atant se metent à la voie
Vers la taverne des Maillez[7].
Là vint li[8] filz Druins Baillez,
Uns variés qui vint avec eles,
Par cui sai toutes leur nouveles.
Cis les servi à leur mengier
Et leur aporta sanz dangier
Quanc’on pot de bon recouvrer.
Là veïssiez des denz ouvrer
Et henas emplir et vuidier :
En petit d’eure, à mon cuidier,
Orent .XV. sous despendu.
« Riens ne m’ara savour rendu
A cest mengier », dist Margue Clouve,
« Se nous n’avons d’une crasse oue
Et des aus plaine une escuele. »
Lors court Druins par la ruelle
En l’ostel où on lescuisoit ;
.II. en prist, et après puisoit
Des aus tout plain .I. grant platel,
Et à chascune .I. chaut gastel
Aporta quanqu’il pot haster.
Qui veïst chascune taster
Ces fors aus et celle oue crasse,
Mengié l’orent en mains d’espasse
Assez c’on ne mist au tuer.
Lors commença Margue à suer
Et boire à grandes henapées ;
En poi d’eure erent eschapées
.III. chopines par mi sa gorge :
« Dame, foi que je doi saint Jorge, »
Dist Maroclippe sa commere ;
« Cis vins me fait la bouche amere ;
Je veul avoir de la garnache :
Se vendre devoie ma vache.
S’en aurai ja au mains plain pot. »
Druin hucha quanqu’elle pot
Et li dist : « Va nous aporter
Pour nos testes reconforter
De la garnache .III. chopines,
Et de tost revenir ne fines.
S’aporte gauffres et oublées,
Fromage et amandes pelées,
Poires, espices et des nois,
Tant, pour florins et gros tornois,
Que nous en aions à plenté. »
Cilz i court, et elle a chanté
Par mignotise .I. chant nouvel :
Commere, menons bon revel ;[9]
Tiens vilains l’escot paiera,
Qui ja du vin n’ensaiera. »
Ainssi chascune se déporte.
Et Druins le fort vin aporte,
Qui fu par les henas versez.
« Commere, or en bevons assez, »
Dist Maroie à[10] dame Fresens,
« Car c’est vins, pour garder le sens,
Mieudres assez que li françois. »
Lors but chascune, mais, ançois
C’on eüst tornées ses mains,
C’une plus que li autres mains,
Fu tous lapez et engloutis.
« Cis pochonnez est[11] trop petis »,
Dist Maroie, « par saint Vincent ;
Pour boire le quartier d’un cent
Ne nous en convient esmaier,
Je ne l’ai fait el qu’essaier ;
Tant est bons[12] que j’en veul encore.
Or va donc, se Dieus te secore,
Druins, raportes en .III. quartes,
Car, avant que de ci departes,
Seront butes. » Et cis i court,
Qui tost revint, à terme court,
Puis dona son pot à chascune.
« Compains bien veignant », dist li une,
« Manjue[13] .I. morsel, puis si bois ;
Cilz vins[14] est mieudres que d’Ervois
Ne que vins de Saint Melion.[15]
— Voire assez, » ce dist Marion,
« Je le boif trop plus volentiers ;
Se mes pos iert plainz touz entiers,
N’en y ara assez tost goute.
— Hé, que tu as la gorge gloute »,
Dist Maroclippe, « bele niece ;
Je n’aurai encor en grant piece
But tout le mien, mais tout à trait
Le buverai à petit trait,
Pour plus sur la langue croupir ;
Entre .II. boires .I. soupir
I doit on faire seulement :
Si en dure plus longuement
La douceur en bouche et la force. »
En tel point chascune s’efforce
De garnache engloutre et tant boire
Qu’il n’est nus hons qui peüst croire
Comment chascune s’atourna.
Du matin que il ajourna
Furent là jusqu’à mie nuit,
Et menerent si bon deduit
Qu’adès orent le henap plain.
« Je veul aler là hors au plam, »
Dist Margue Clippe, « en mi la voie
Treschier si que nus ne nous voie ;
Si en vaudra trop mieus la feste.
Chascune aura nue la teste,
Et s’irons empurés les cors.
— Dont lairés ci vos vardecors »,
Dist Druins, « de gage à l’escot ;
S’averez, en guise d’Escot,[16]
Escourchie pelice et cote,
Et chemise qu’elle ne crote :
S’irons treschier par mi la rue. »
Atant chascune à terre rue
Son corset[17] et son chaperon ;
Escourchie furent li geron
Des cotes desus la pelice,
Et Druins hors de l’uis les glice,
Chantant chascune à haute vois:
Amours, au vireli m’en vois.[18]
Mout parloient de leur[19] amis ;
Ainssi son cors chascune a mis
Dehors[20] à la bise et au vent ;
Si tresbuchoient plus souvent
C’on ne peüst sa main tourner.
A .II. lieues près d’ajourner
Les a Druins en tel point mises
Que cotes, pliçons et chemises,
Chaucemente, bourse et corroie,
Leur toli tout. Je, qu’en diroie ?
Ainssi les lessa toutes nues,
Gisanz au fuer des bestes mues,
Vilment et en divers couvine,
L’une adenz et l’autre souvine,
Trebuschies en .II. monciaus,
Plus emboées que pourciaus.
Tout en tel point Druins les lait
Ou boier plus grant et plus lait
Qui fu en toute la cité.
Là jurent à mout grant vilté,
L’une sus l’autre comme mortes,
Tant que partout guichez et portes
De la cité furent ouvertes
C’on vit les merveilles apertes.
Chascuns y acourt pour veoir.
Car n’avoient sens ne pooir
D’eles tant ne quant remuer ;
Qui ja les vousist partner,
Pour mortes les tenoient toutes.
Testes et mains avoient routes
Et touz sanglenscors et visages.
Tous disoient, et folz et sages,
C’on les avoit la nuit murdries ;
S’en erent la gent abaubies
Du lait point où il les veoient ;
Et leur chetif baron[21] cuidoient
Qu’il fussent em[22] pelerinage,
Quant uns preudons de leur visnage
Vint là, qui bien les reconut
Au cors que chascune ot tout nut.
Si le corut leur barons dire
Qui pasmerent de duel et d’ire
Quant il ont leur fames trouvées
Gisant, nues et desrobées,
Comme merdes en mi la voie.
N’est bons, s’il veult, qui ne les voie
Par tout, et en coste, et en mi ;
Lors crierent : « Hareu, ain mi »,
Et mout tendrement vont plorant.
Ainssi qu’il vindrent là corant,
Leur .III. fames ont reconutes.
Qui tant ne quant ne se sont mutes,
Gisans nues à tel diffame ;
Les cueurs de courouz leur enflame,
Car eus et teste[23] leur paroit.
Nus bons raconter ne saroit
Queles erent à grant meschief ;
N’onques ne murent pié ne chief.
Si furent au moustier portées
Des Innocens, et enterrées,
L’une sus l’autre, toutes vives ;
Hors leur sailloit par les gencives
Li vins et par tous les conduis.
Ainçois fu plus de mie nuis
Que se peüssent resveillier,
Et mout les convint travaillier
Ainçois qu’elles fussent issues
Hors de la terre, et des issues
Et des portes des Innocens.
Elles n’odorent[24] point encens :
Mout erent ordes et puans.
Si con gens povres ou truans
Qui se couchent par ces ruelles,
S’en raloient ces .III. entr’elles
Qu’à paines pooient parler ;
Ne ne[25] poissent mie aler
.II. pas ou .III. sanz trebuschier ;
Souvent les oïssiez huchier :
« Druin, Druin, où es alez ?
Aporte .III. harens salez
Et .I. pot de vin, du plus fort,
Pour faire à nos testes confort,
Et penses de tost revenir
Pour nous compagnie tenir,
Et si clorras la grant fenestre. »
Ainssi qu’elles cuidoient estre
En la taverne toutes trois,
Les aqueult uns vens si destrois
Et si frois, qu’il les fîst pasmer
Et toutes pour mortes clamer.
Et jus trebuchier en la place.
N’orent bouche[26], oil, ne nés, ne face
Qui ne fust de boe couvers.
Et toutes chargies de vers,
N’onques ne murent pies ne main
Deci au jour à l’endemain
Que li aube esclarcist et point,
C’on les retrouva en tel point
Comme ot fait le jour de devant,
Droit ainssi qu’à soleil levant.
Chascuns qui mieus mieus y acourt,
Mais assez en brief terme et court.
Si bien la chose ala et vint
Que cil meïsmes i sourvint
Qui le soir les out[27] enterrées.
Et, quant ilec les a trouvées.
De grans merveilles s’en seigna.
Et dist : « Dyables les engigna
Qui les a raportées ci.
Oiés, seigneur, pour Dieu merci,
Comment sont eles revenues.
En terre les mis[28] toutes nues
L’une seur l’autre en une fosse ;
Foi que je doi au cors saint Josse,
Elles ont lesdeables es cors.
Voiés les, à chascun des cors,
Comme elles sont de vers chargies,
Enterrées et demengies,
Les cors noirs et delapidés :
C’est d’eles veoir grans pitez ;
Touz li cuers du ventre m’en tremble. »
Ainsi qu’il parloient ensemble
De l’aventure desguisée,
S’est dame Tifaigne escriée,
Qui revint .I. poi en memoire[29] :
« Druin, raportez nous à boire.
— Et moi aussi », dist Maroclipe ;
« Je veut de la nouvele tripe. »
Ainssi sont relevées toutes
Dessivres, feles et estoutes ;
S’en va chascune à son refuit,
Et chascuns de paour s’en fuit,
Qui cuident ce soient Mauffez ;
Car les cuers orent eschauffez
De corrouz quant sont aperçutes
Qu’ai nssi orent esté deçutes
Et menées par reverie.
Or pri à chascun qu’il en die
Verité, s’onques aventure
Oï mais tele en escripture,
Et, tantost c’on le m’ara dit.
J’en finerai atant mon Dit.
- ↑ LXXIII. — Des .III. Dames de Paris, p. 145.
Le ms. de l’Arsenal porte dans la nouvelle numérotation le no 3525.
Publié par M. Aug. Scheler, Dits de Watriquet de Couvin, 381-390.
- ↑ Vers 3 — Les noms de ces trouvères ne nous sont pas autrement connus.
- ↑ 10-11 — Le jour de l’Épiphanie. — La légende raconte que les rois mages vinrent à Cologne. La cathédrale possède encore une chapelle qui leur est consacrée.
- ↑ 18 — Tous les noms de ce fabliau, qui s’appliquaient sans doute à des personnages de l’époque, ne nous disent rien aujourd’hui. La date (1320) est à remarquer.
- ↑ 22 — sans, lisez sanz.
- ↑ 42 — absous, lisez absouls.
- ↑ 47 — L’enseigne de taverne « des Maillez », que nous rencontrons ici, est à noter.
- ↑ 48 — * li ; ms., le.
- ↑ 94-96 — Ces trois vers sont le commencement d’une chanson qui ne nous est pas connue.
- ↑ 101 — * à ; ms., et.
- ↑ 108 — * est ; ms., sont.
- ↑ 113 — bon, lisez bons.
- ↑ 121 — Supprimez la virgule après « Manjue ».
- ↑ 122 — vous, lisez vins. — Le vin « d’Ervois » est sans doute le vin d’Arbois, cru bien connu du Jura.
- ↑ 123 — Vin de Saint-Émilion, aussi estimé au moyen âge que de nos jours (Cf. Méon, I, 153).
- ↑ 154 — De nos jours encore, les Highlanders portent la cotte courte.
- ↑ 159 — Sa chemise, lisez Son corset.
- ↑ 164 — Refrain que nous ne connaissons pas.
- ↑ 165 — leurs, lisez leur.
- ↑ 167 — * Dehors ; ms., Hors.
- ↑ 200 — * chetif baron ; ms., chetis barons.
- ↑ 201 — en, lisez em.
- ↑ 219 — * teste ; ms., testes.
- ↑ 234 — * odorent ; ms., odoient.
- ↑ 240 — Le ms. n’a pas « ne ».
- ↑ 256 — buche, lisez bouche.
- ↑ 269 — * out ; ms., ont.
- ↑ 276 — * mis ; ms., mist.
- ↑ 289 — * memoire ; ms., mimoire.
La miniature de ce fabliau (fol. 88 vo), à fond quadrillé, représente une table bien servie, et derrière, les trois dames debout et buvant. Elles ont de longues robes flottantes et de curieux bonnets à la phrygienne, dont la longue pointe dressée est recourbée en avant, et dont la queue étroite recouvre le cou et tombe sur le haut de la robe.
LXXIV
DU VILAIN MIRE
et Bibl. de Berne, Mss. 354, fol. 49 vo à 52 ro.[1]
adis estoit uns vilains[2] riches,
Qui mout estoit avers et chiches ;[3]
Une charrue adès avoit,
Tos tens par lui la maintenoit
D’une jument et d’un roncin[4] ;
Assez ot char et pain et vin[5]
Et quanques mestier li estoit,
Mès por fame que pas n’avoit[6]
Le blasmoient mout si ami[7]
Et toute la gent autressi[8] :
Il dist volentiers en[9] prendroit
Une bonne, se la trovoit[10] ;
Et cil dient qu’il li querront
La mellor que il troveront.
El païs ot .I. chevalier,
Viez hom estoit[11] et sanz moillier,
S’avoit une fille[12] mout bele
Et mout cortoise damoisele,
Mès por ce qu’avoirs li failloit,[13]
Li chevaliers pas ne trovoit
Qui sa fille li demandast,
Que volentiers la mariast
Por ce que ele estoit d’aage
Et en point d’avoir mariage.
Li ami au vilain alerent[14]
Au chevalier, et demanderent
Sa fille por[15] le païsant
Qui tant avoit or et argent,[16]
Plenté forment et planté dras.
Il leur dona isnel le pas
Et otroia cest[17] mariage.
La pucele qui mout fu[18] sage,
N’osa contredire son pere,[19]
Quar orfeline estoit de mere,
Si otroia ce qui li plot,
Et fi vilains plus tost qu’il pot
Fist ses noces et[20] espousa
Celi[21] cui forment en pesa,
S’ele[22] autre chose en osast fere.
Quant trespassé ot cel afere
Et des noces[23] et d’autre chose,
Ne demora mie[24] grant pose
Quant[25] li vilains se porpenssa
Que malement esploitié a :
N’aferist mie[26] à son mestier
D’avoir fille de chevalier ;
Quant il ira à la[27] charrue
Li vassaus ira lez[28] la rue
A cui toz les jors ot foiriez.[29]
Et quant il sera esloingniez
De sa meson, li chapelain
Vendra tant et hui[30] et demain
Que sa fame li foutera,
Ne jamès jor[31] ne l’amera
Ne ne le prisera .II. pains :[32]
« Las ! moi chetiz, » fet[33] li vilains,
« Or ne me sai je conseillier,
Quar repentir n’i a mestier. »
Lors se commence[34] à porpensser
Comment de ce la puist[35] garder :
« Dieus ! » fet il, « se[36] je la batoie
Au matin quant je leveroie[37] :
Ele plorroit au lonc du jor,[38]
Je m’en iroie en mon labor.
Bien sai, tant con ele plorroit,[39]
Que nus ne la donoieroit[40].
Au vespre quant je revendrai,[41]
Por Dieu merci la prierai,
Je la ferai au soir haitie
Mès au matin ert courroucie.
Je prendrai ja à li[42] congié,
Se je avoie[43] un poi mengié. »
Li vilains demande à disner :
La dame li cort[44] aporter ;
N’orent pas saumon ne pertris :
Pain et vin orent, et oes fris,
Et du fromage à grant[45] plenté
Que li vilains ot amassé.
Et quant la table fut ostée,
De la paume qu’ot[46] grant et lée,
Fiert si sa fame lez[47] la face
Que des doiz i parut la trace,
Puis l’a prise par les cheveus[48]
Li vilains qui mout estoit feus,
Si l’a batue tout ausi[49]
Con s’ele l’eüst[50] deservi ;
Puis vait aus chans isnelement,[51]
Et sa fame remest plorant.
« Lasse, » fet ele, « que ferai ?
Et comment me conseillerai ?
Or ne sai je mès que je die,
Or m’a mon pere bien trahie
Qui m’a donné à cel vilain.
Cuidoie je morir de fain ?
Certes bien oi au cuer la rage
Quant j’otroiai tel mariage :
Dieus ! porqoi fu ma mere morte !
Si durement se desconforte,
Toutes les gens qui i venoient
Por li veoir s’en retornoient.
Ainsi a dolor demené
Tant que soleil fut esconssé
Que li vilains est reperiez.
A sa fame cheï aus piez,
Et li pria por Dieu merci :
« Sachiez ce me fist Anemi
Qui me fist fere tel desroi ;
Tenez, je vous plevis ma foi
Que jamès ne vous toucherai :
De tant con batue vous ai
Sui je courouciez et dolenz. »
Tant li dist li vilains pulens
Que la dame lors li pardone.
Et à mengier tantost li done
De ce qu’ele ot apareillié ;
Quant il orent assez mengié,
Si alerent couchier en pais.
Au matin li vilains pusnais
Ra sa fame si estordie
Por poi qu’il ne l’a mehaingnie,
Puis s’en revait aus[52] chans arer.
La dame commence[53] à plorer :
« Lasse, » dist[54] ele, « que ferai ?
Et comment me conseillerai ?
Bien sai que mal m’est avenu :
Fu onques[55] mon mari batu ?
Nennil, il ne set que cops sont :[56]
S’il le seüst, por tout le mont,
Il ne m’en donast pas itant. »[57]
Que qu’ainsi s’aloit[58] dementant,
Esvos .II. messagiers le roi,[59]
Chascun sor un blanc[60] palefroi ;
Envers la dame esperonerent,[61]
De par le roi la saluerent,
Puis demanderent à mengier
Que il en orent bien mestier.
Volentiers leur en a doné ;
Et puis si leur a demandé :
« Dont estes vous et où alez ?
Et dites moi que vous querez. »
Li uns respont : « Dame, par foi,[62]
Nous sommes messagiers le roi ;
Si nous envoie .I. mire[63] querre,
Passer devons en Engleterre.
— Por quoi fere ?[64] — Damoiselle Ade,
La fille le roi, est[65] malade ;
Il a passé .VIII. jors entiers[66]
Que ne pot[67] boivre ne mengier,
Quar[68] une areste de poisson
Li aresta el gavion :
Or est li rois si corouciez ;[69]
S’il la pert ne sera mès liez. »[70]
Et dist la dame : « Vous n’irez[71]
Pas si loing comme vous penssez,
Quar mon mari est, je vous di,
Bons mires, je le vous afi ;
Certes il set plus de mecines[72]
Et de vrais jugemens d’orines[73]
Que onques ne sot Ypocras.
— Dame, dites le vous[74] à gas ?
— De gaber, » dist ele[75], « n’ai cure,
Mès il est de tele[76] nature
Qu’il ne feroit por nului[77] rien,
S’ainçois ne le batoit on bien. »[78]
Et cil dient[79] : « Or i parra,
Ja por batre ne remaindra ;
Dame, où le porrons nous trover[80] ?
— Aus chans le porrez encontrer :[81]
Quant vous istrez de ceste cort,
Tout ainsi con cil ruissiaus cort[82]
Par defors cele gaste[83] rue,
Toute la premiere charrue
Que vous troverez, c’est[84] la nostre.
Alez ; à saint Pere l’apostre, »
Fet la dame, « je[85] vous commant. »
Et cil s’en vont esperonant,
Tant qu’il[86] ont le vilain trové.
De par le roi l’ont salué,
Puis li dient sanz demorer :
« Venez en tost au roi[87] parler.
— A que fere ? » dist li vilains.
— Por le sens dont vous estes plains ;
Il n’a tel mire en ceste[88] terre :
De loing vous sommes venu querre. »
Quant li vilains s’ot[89] clamer mire,
Trestoz li sans li prent à frire ;[90]
Dist qu’il n’en set ne tant ne quant.
« Et qu’alons[91] nous ore atendant ? »
Ce dist li autres[92] ; « bien sez tu
Qu’il veut avant estre batu
Que il face nul bien ne die ? »[93]
Li uns le fiert delez[94] l’oïe
Et li autres[95] par mi le dos
D’un baston qu’il ot grant[96] et gros ;
Il li ont fet honte à plenté,[97]
Et puis si l’ont au roi mené.
Si le montent à reculons
La teste devers les talons.
Li rois les avoit encontré ;
Si lor dist : « Avez rien trové ?
— Sire, oïl, » distrent il ensamble.
Et li vilains de paor tramble.
Li uns d’aus li dist premerains
Les teches qu’avoit li vilains,
Et comme ert plains de felonie,
Quar de chose que on li prie
Ne feroit il por nului rien,
S’ançois ne le batoit on bien.
Et dist li rois[98] : « Mal mire a ci,
Ainc mais d’itel[99] parler n’oï.
— Bien soit batus puisqu’ainsi est[100], »
Dist un serjans, « je sui tout prest ;[101]
Ja si tost nel commanderois,
Que je li paierai[102] ses drois. »
Li rois le vilain apela :
« Mestre, » fet il, « entendez ça[103],
Je ferai[104] ma fille venir,
Quar[105] grant mestier a de garir. »
Li vilains li cria merci :[106]
« Sire, por Dieu qui ne menti,
Si m’aït Dieus[107], je vous di bien,
De fisique ne sai je rien :
Onques de fisique ne soi. »[108]
Et dist li rois[98] : « Merveilles oi :
Batez le moi. » Et cil saillirent
Qui assez volentiers le firent.
Quant li vilains senti les cops,
Adonques se tint il por fols :[109]
« Merci, » commença à crier,
« Je la garrai sanz delaier. »
La pucele fu en la sale
Qui mout estoit et[110] tainte et pale,
Et li vilains se porpenssa
En quel maniere il la garra ;[111]
Quar il[112] set bien que à garir
Li covient il ou à morir.[113]
Lors se commence à porpensser,[114]
Se garir la veut et sauver,
Chose li covient fere et dire
Par qoi la puisse fere rire
Tant que l’areste saille hors,
Quar el n’est pas dedenz le cors.
Lors dist au roi : « Fetes .I. feu
En cele chambre en privé leu ;
Vous verrez bien[115] que je ferai,
Et se Dieu plest, je[116] la garrai. »
Li rois a fet le feu plenier ;[117]
Vallet saillent et escuier,
Si ont le feu[118] tost alumé
Là où li rois l’ot[119] commandé.
Et la pucele[120] au feu s’assist
Seur .I. siege[121] que l’en li mist ;
Et li vilains se despoilla
Toz nuz, et ses braies osta,[122]
Et s’est travers le feu[123] couchiez,
Si[124] s’est gratez et estrilliez :
Ongles ot grans et le cuir dur,
Il n’a homme[125] dusqu’à Samur
Là on louast grateeur point[126]
Que cil ne fust mout bien à point.
Et la pucele qui ce voit,[127]
A tout le mal qu’ele sentoit,[128]
Vout rire, si s’en esforça
Que de la[129] bouche li vola
L’areste hors enz el brasier[130].
Et li vilains sanz delaier
Revest ses dras et prent[131] l’areste,
De la chambre ist[132] fesant grant feste ;
Où voit le roi, en haut li crie :[133]
« Sire, vostre fille est garie,
Vez ci l’areste, Dieu merci. »
Et li rois mout s’en esjoï,[134]
Et dist li rois : « Or sachiez bien[135]
Que je vous aim seur toute rien.[136]
Or aurez vous robes[137] et dras.
— Merci, sire, je nel vueil pas,[138]
Ne ne vuei[139]l o vous demorer :
A mon ostel[140] m’estuet aler. »
Et dist li rois : « Tu non feras,[141]
Mon mestre et mon ami seras[142].
— Merci, sire, por saint Germain[143],
A mon ostel[144] n’a point de pain :
Quant je m’en parti ier matin,[145]
L’en devoit carchier[146] au molin. »
Li rois .II. garçons[147] apela :
« Batez le moi, si demorra[148]. »
Et cil saillent sanz delaier.[149]
Et vont le vilain ledengier.
Quant li vilains senti les cops
Es braz, es jambes et ou dos,
Merci lor commence[150] à crier :
« Je demorrai[151], lessiez me ester. »
Li vilains est à cort[152] remez,
Et si l’a on tondu[153] et rez,
Et si ot robe d’escarlate ;
Fors cuida estre de barate[154]
Quant les[155] malades du païs,
Plus de .IIIIxx., ce n’est vis,[156]
Vindrent au roi à cele feste.
Chascuns li a conté son estre ;
Li rois le vilain apela :
« Mestre, » dist il, « entendez ça,
De ceste gent prenez conroi,
Fetes tost, garissiez les moi.
— Merci, sire, » li vilains dit,[157]
« Trop en i a, se Dieus m’aït,
Je n’en porroie à chief venir :
Si nes porroie toz garir. »
Li rois .II. garçons[158] en apele,
Et chascuns a pris[159] une estele,
Quar chascuns d’aus mout bien savoit[160]
Porqoi li rois les apeloit.
Quant li vilains les vit venir,[161]
Li sans li commence à fremir :
« Merci, » lor commence à crier,
« Je les garrai sanz arrester. »
Li vilains a demandé laingne,
Assez en ot comment qu’il praingne :
En la sale fu fez li feus[162],
Et il meïsmes en fu keus.[163]
Les malades i aüna,[164]
Et puis après au roi pria :
« Sire, vous en irez à val,
Et[165] testuit cil qui n’ont nul mal. »
Li rois s’en part[166] mout bonement,
De la sale ist, lui[167] et sa gent.
Li vilains aus malades dist :
« Seignor, par cel Dieu[168] qui me fist,
Mout a grant chose à[169] vous garir,
Je n’en porroie à chief venir :
Le plus malade en eslirai,[170]
Et en cel feu le meterai ;
Si l’arderai en icel feu,[171]
Et tuit li autre en auront preu,
Quar cil qui la poudre bevront,
Tout maintenant gari seront. »
Li uns a[172] l’autre regardé,
Ainz n’i ot boçu ne[173] enflé
Qui otriast por Normendie
Qu’eüst la graindre[174] maladie.
Li vilains a dit au premier :
« Je te voi mout afebloier ;
Tu es des autres li plus vains.[175]
— Merci, sire[176], je sui toz sains
Plus que je ne fui onques mais :[177]
Alegiez sui de mout grief fais
Que j’ai eü mout longuement ;
Sachiez que de rien ne vous ment.
— Va donc à val ; qu’as tu ci quis ? »
Et cil a l’uis maintenant pris.[178]
Li rois demande : « Es tu gari ?
— Oïl, sire, la Dieu merci ;
Je sui plus sain que une pomme :
Mout a ou mestre bon preudomme. »[179]
Que vous iroie je contant[180] ?
Onques n’i ot petit ne grant
Qui por tout le[181] mont otriast
Que l’en en cel feu[182] le boutast,
Ainçois s’en vont[183] tout autressi
Con se il[184] fussent tuit gari.
Et quant li rois les a veüz[185],
De joie fu toz esperduz,
Puis a dit au vilain[186] : « Biaus mestre,
Je me merveil que ce puet estre[187]
Que si toz gariz les avez.
— Merci, sire[188], jes ai charmez :
Je sai .I. charme qui mieus vaut
Que gingembre ne citovaut[189]. »
Et dist li rois : « Or en irez[190]
A vostre ostel quant vous voudrez,
Et si aurez de mes deniers[191]
Et palefroiz et bons destriers[192] ;
Et quant je vous remanderai,[193]
Vous ferez ce que je voudrai :
Si serez mes bons amis chiers,
Et en serez tenus plus chiers
De toute la gent du païs.
Or ne soiez plus esbahis,
Ne[194] ne vous fetes plus ledir,
Quar ontes est de vous ferir.[195]
Merci, sire, » dist le vilain ;
« Je sui vostre hom et soir et main[196],
Et serai tant con je vivrai[197]
Ne ja ne m’en repentirai. »
Du roi se parti, congié prent,
A son ostel vint liement ;
Riches mananz ainz ne fu plus :
A son ostel en est venus,
Ne plus n’ala à la charrue,[198]
Ne onques plus ne fu batue[199]
Sa fame, ainz l’ama et chieri.
Ainsi ala con[200] je vous di :
Par sa fame et par sa voisdie
Fu bons mires et[201] sanz clergie.
- ↑ LXXIV. — Du Vilain Mire, p. 156.
A. — Paris, Bibl. nat., Mss. fr. 837, fol. 139 ro à 141 ro.
B. — Bibl. de Berne, Mss. 354, fol. 49 vo à 52 ro.
Nous empruntons les variantes du ms. de Berne à la copie de la Bibliothèque nationale (coll. Moreau, 1720, Mouchet, 46), qui a pour titre : « Do Mire de Brai. »
Publié par Barbazan, I, 1 ; par Méon, III, 1-13 ; par Renouard dans Legrand d’Aussy, III, app. 1-5 ; analysé par Legrand d’Aussy, III, 1-11.
- ↑ Vers 1 — B, ert .I. vilains mout.
- ↑ 2-4 — B :
Qui trop avoit, mès mout fu chiches ;
.II. charrues ot et .VIII. bues
Qui totes erent à son hues. - ↑ 5 — B, Et .II. jumenz et .II. roncins.
- ↑ 6 — B, et blez et vins.
- ↑ 8 — B, qu’il ne prenoit.
- ↑ 9 — B, ses amis.
- ↑ 10 — B, do pais.
- ↑ 11 — B, Tant qu’il lor dit qu’il.
- ↑ 12 — B, s’il la savoit.
- ↑ 16 — B, Qui estait viauz.
- ↑ 17 — B, Qui une fille avoit.
- ↑ 19-24 — Ces vers manquent à B.
- ↑ 25 — B, parlerent.
- ↑ 27 — por. B, à oes.
- ↑ 28-30 — Ces vers se lisent ainsi dans B :
Qui mout estoit riche et puissant :
Assez avoit or et argent.
Que vos diroie [je] en present ? - ↑ 31 — B, Fu acordé lo.
- ↑ 32 — fu. B, ert.
- ↑ 33-36 — Ces vers sont remplacés dans B :
Ainz quanque li plot otroia,
Et li vilains moût se hasta. - ↑ 37 — B, A l’ainz que il pot.
- ↑ 38 — B, Cele.
- ↑ 39 — « ele » manque à B.
- ↑ 41 — B, Con des noces.
- ↑ 42 — mie. B, une.
- ↑ 43 — B, Que.
- ↑ 45 — mie. B, pas.
- ↑ 47 — il ira à la. B, or ira à sa.
- ↑ 48 — B, Li prestres iert en mi.
- ↑ 49 — B, A cui il est toz jors foiriez.
- ↑ 52 — B, I ira tant hui.
- ↑ 54 — B, Si que jamès.
- ↑ 54 — B, Si que jamès.
- ↑ 56 — B, « Halas ! chaitiz, » dist.
- ↑ 59 — B, Forment se prist.
- ↑ 60 — B, il s’en porra.
- ↑ 61 — si, lisez se.
- ↑ 62 — B, Chascun matin, quant je movroie.
- ↑ 63-64 — B :
Pour aler fere mon labor,
El plorroit tot le lonc del jor. - ↑ 65 — B, Et tant, cuit bien que qu’el plorroit.
- ↑ 66 — A, desvoieroit.
- ↑ 67 — B, Et au soir, quant je revendroie.
- ↑ 71 — à li. B, de li.
- ↑ 72 — B, Mès ainz auré.
- ↑ 74 — B, Et ele li va.
- ↑ 77 — B, Et fromache à mout.
- ↑ 80 — B, De la main qu’il ot.
- ↑ 81 — lez. B, en [mi].
- ↑ 83-84 — B, chevous et fous.
- ↑ 85 — B, L’a batue tot autresi.
- ↑ 86 — B, s’el l’eüst bien.
- ↑ 87-120 — Ces vers manquent à B.
- ↑ 121 — B, Puis si s’en va les.
- ↑ 122 — B, Et cele remest.
- ↑ 123 — dist. B, fet.
- ↑ 126 — B, Dieus ! fu ainz.
- ↑ 127 — B, Je cuit qu’il ne set que ce sont.
- ↑ 129 — B, Ne m’en donast il mie tant.
- ↑ 130 — B, Que qu’ele s’aloit.
- ↑ 131 — B, Estes vos .II. serjanz lo roi.
- ↑ 132 — blanc. B, bel.
- ↑ 133-140 — B :
Qui dedanz la meson entrerent
Et à disner li demanderent ;
Et el lor dona volentiers.
Puis lor a dit : « Biaus amis chiers,
Or me dites, se vos volez,
Don vos iestes, et que querez. » - ↑ 141 — B, dist : « Dame, par ma foi.
- ↑ 143 — B, Qui nos envoie mirre.
- ↑ 145 — B, A que fere ?
- ↑ 146 — B, au roi, est si.
- ↑ 147 — Ce vers dans B est placé après 148 et ainsi écrit :
Il a passé .VIII. jors dès ier.
- ↑ 148 — B, Qu’el ne puet.
- ↑ 149 — B, Que.
- ↑ 151 — B, Li rois en est forment iriez.
- ↑ 152 — B, Se il la pert, jamès n’iert liez.
- ↑ 153-156 — B:
Saignor, ja ne vos esmaiez ;
Mès loin n’irez, ja ne quidiez ;
Je vos di bien que mon mari
Est bons mires, je vos afi. - ↑ 157 — mecines. B, fisique.
- ↑ 158 — B, Et de mecine[s] et d’orine.
- ↑ 160 — vous. B, nos.
- ↑ 161 — B, De vos gaber, » fet el.
- ↑ 162 — B, Fors tant qu’il est de tel.
- ↑ 163 — B, Qu’il ne vialt dire nule.
- ↑ 164 — B, S’il n’est batuz avant mout bien.
- ↑ 165 — B, Cil responnent.
- ↑ 167 — B, et le troverons nos.
- ↑ 168 — B, Vos lou verroiz tot à estros.
- ↑ 170 — B, A un(s) ruissel qui laissus cort.
- ↑ 171 — B, Dejoste celle vieille.
- ↑ 173 — c’est. B, est.
- ↑ 175 — B, Fet ele, « ou je (faux).
- ↑ 177 — qu’ils, lisez qu’il. — B, que lou vilain ont.
- ↑ 180 — B, Qu’il viegne tost à lui.
- ↑ 183 — ceste. B, nule.
- ↑ 185 — B, s’ot li vilains.
- ↑ 186 — B, Par mautalant conmence à rire.
- ↑ 188 — B, Q’aluns. — ore. B, or ci.
- ↑ 189 — B, Dist l’uns à l’autre.
- ↑ 191 — B, Qu’il die ne bien ne voidie.
- ↑ 192 — delez. B, joste.
- ↑ 193 — B, Del poing l’autre.
- ↑ 194 — grant. B, cort.
- ↑ 195-208 — Ces vers sont remplacés dans B par les suivants :
L’ont à terre jus abatu.
Li vilains a bien conneü
Que lou plus bel n’est mie suen :
« Saignor, » fait il, « n’est mie boen ;
Por Dieu merci, laissiez m’ester.
— Or n’i a donc que del monter, »
Font il, « si en venez au roi. »
N’i quistrent autre palefroi,
Ainz monterent tot esranment
Lo vilain sor une jument.
Et quant venu furent à cort,
Li rois à l’encontre lo cort,
Qui desirranz ert durement
De la santé à son enfant ;
Demande lor qu’il ont trové.
L’uns des serjanz li a conté
Totes les teches au vilain ;
De quel folie il estoit plain. - ↑ a et b 209 et 224 — B, Li rois respont.
- ↑ 210 — d’itel. B, de tel.
- ↑ 211 — B, dès qu’issi est.
- ↑ 212 — B, Dist li serjanz, « vez moi tot prest.
- ↑ 214 — B, Con l’en li paiera.
- ↑ 216 — B, traiez vos ça.
- ↑ 217 — B, Si faites.
- ↑ 218 — Quar. B, Qui.
- ↑ 219-220 — Ces vers manquent à B.
- ↑ 221 — B, Certes, sire.
- ↑ 223 — B, Ne en maniere rien n’en soi.
- ↑ 228-230 — Ces vers sont remplacés dans B :
Sor les espaules, sor le dos,
Au roi a dit : « Sire, merci ;
Bon mire sui, jel vos afi. »
Li rois lor dit : « Or lou lessiez,
Mar i sera huimès tochiez. » - ↑ 232 — B, Qui forment fu et.
- ↑ 234 — B, Conment garir il la porra.
- ↑ 235 — B, Car on. — que à. B, '’que.
- ↑ 236 — B, Li convendra il o morir.
- ↑ 237-244 — B :
« Las, » fet il, « se ele rioit,
O l’esfors que ele i metroit,
L’areste li voleroit fors,
Car el n’est pas dedenz lo cors.
Tel chose m’estuet fere et dire
Que je la puisse fere rire. »
Au roi a dit : « Sire, merci,
Faites nos estre en privé liu,
Et si n’i ait ja nule gent
Fors moi et li tant seulement. - ↑ 245 — B, Puis si veroiz.
- ↑ 246 — B, Car se Dieu plest, bien.
- ↑ 247 — B, Li rois respont : « Mout volentiers. »
- ↑ 249 — B, Errant ont lou feu.
- ↑ 250 — l’ot. B, ot. — Après ce vers, B ajoute :
En la sale sont, ce me sanble,
Li mire et la meschine ensanble. - ↑ 251 — B, La damoisele.
- ↑ 252 — siege. B, seoir. — mist. B, fist.
- ↑ 254 — B, Onques ses braies li laissa.
- ↑ 255 — B, Puis si s’est lés lou feu.
- ↑ 256 — B, Bien. — B, et [a]aisié.
- ↑ 258 — B, Et li sachiez.
- ↑ 259-260 — B :
Ne trovissiez .I. grateor
Que cist ne fu [il] mout mellor. - ↑ 261 — B, Et quant la pucele lo voit.
- ↑ 262 — B, O lo grant mal que ele avoit.
- ↑ 264 — la. B, sa.
- ↑ 265 — B, delez lo foier.
- ↑ 267 — B, Se vest, et puis a pris.
- ↑ 268 — B, De la sale ist.
- ↑ 269 — B, Et voit lou roi, si li escrie.
- ↑ 272 — B, Li rois forment s’en (est) esjoï.
- ↑ 273 — B, « Certes, maistres, je vos di bien.
- ↑ 274 — Après ce vers, B ajoute :
Vos m’avez ma fille rendue :
Beneoiz soit vostre venue. - ↑ 275 — B, Assez aurois joiaus.
- ↑ 276 — B, Li vilains dist eneslou pas.
- ↑ 277 — B, Je ne puis.
- ↑ 278 — B, En mon pais.
- ↑ 279 — B, Par Dieu, » dist li rois, « non ferez.
- ↑ 280 — B, et mon saignor serez.
- ↑ 281 — B, dist lo vilain.
- ↑ 282 — B, En ma meson.
- ↑ 283 — B, Car quant j’en parti au matin.
- ↑ 284 — B, Devoit en aler.
- ↑ 285 — B, ses serjanz.
- ↑ 286 — B, remaindra.
- ↑ 287-290 — Ces vers sont remplacés dans B :
Cil saillirent tot erranment,
Sel battirent si durement. - ↑ 291 — B, Que li vilains prist.
- ↑ 292 — B, Je remanrai.
- ↑ 293 — à cort. B, del tot.
- ↑ 294 — B, Estancié l’ont del tot.
- ↑ 296 — B, Estre cuidoit fors de la trape.
- ↑ 297 — B, Ezvos.
- ↑ 298-302 — Remplacés dans B :
Dont il i ot, ce m’est avis,
.IIIIcx. o plus, ce me sanble.
Au roi vindrent trestot ensanble.
Chascun dist au vilain son estre ;
Li rois dist au vilain : « Bel mestre. - ↑ 305-308 — Remplacés dans B :
Li vilains dist : « Por Dieu merci.
Trop en i a, jel vos afi. - ↑ 309 — B, Us .II. serjanz.
- ↑ 310 — B, Chascuns d’aus saisi.
- ↑ 311 — B, mout trés bien s[av]ot.
- ↑ 313-316 — Remplacés dans B :
Quant li vilains venir les vit,
Grant paor et, au roi a dit :
« Sire, merci, je les garrai.
— Or tost, » dist li rois, « jel verrai. - ↑ 319 — B, aluma un feu.
- ↑ 320 — B, Il meïsmes fu mestre keu.
- ↑ 321-323 — Remplacés dans B :
Les malades fist arengier ;
Au roi dist : « Je vos voil proier
Que vos descendez là à val. - ↑ 324 — « Et » manque à B.
- ↑ 325 — B, Il l’otroia.
- ↑ 326 — lui. B, il.
- ↑ 328 — B, Di, va, par lou Dieu.
- ↑ 329 — B, Il a grant poinne en.
- ↑ 331 — Ce vers dans B est placé après le vers 332, qui se lit ainsi :
Fors qu’issi con je vos diré.
- ↑ 333-336 — B :
Et l’ardré trestot en .I. feu ;
Vos autres, i auroiz grant preu,
Car tuit de la podre bevrez.
Et erranment garis serez. - ↑ 337 — B, Lors a l’uns.
- ↑ 338 — B, N’i ot si contret ne.
- ↑ 340 — B, Qu’il eüst graignor.
- ↑ 343 — B, De toz cels ies tu li plus vain.
- ↑ 344 — B, Mestre, merci.
- ↑ 345-348 — Ces vers manquent à B.
- ↑ 350 — B, Cil sailli sus, si a l’uis pris.
- ↑ 354 — B, Trop a el mestre jantil ome.
- ↑ 355 — B, disant.
- ↑ 357 — B, por nule rien.
- ↑ 358 — B, Que li mire [au] feu.
- ↑ 359 — B, Ainz s’en alerent.
- ↑ 360 — se il. B, s’il. — tuit. B, trestuit.
- ↑ 361 — B, a ce veü.
- ↑ 363 — B, En la sale entre, et dit.
- ↑ 364 — B, mout de cest estre.
- ↑ 366 — B, « Sire, » fait il.
- ↑ 368 — B, ne citoalt.
- ↑ 369 — B, « Mestres, » dist li rois, « or irez.
- ↑ 371 — B, Assez auroiz dras et deniers.
- ↑ 372 — B, et biaus somiers.
- ↑ 373-378 — Ces vers manquent à B.
- ↑ 379 — Ne. B, Et. — ledir. B, ferir.
- ↑ 380 — B, Que grant honte est de vos laidir.
- ↑ 382 — B, hom (à adopter) de mes .II. mains.
- ↑ 383-388 — Remplacés dans B :
Tot à vostre conmandement. »
De la sale ist, il et sa gent,
Puis est à son ostel venu,
Riche et manant ainz plus ne fu. - ↑ 389 — B, N’onques plus n’ala à charue.
- ↑ 390 — B, Ne puis ne fu par lui.
- ↑ 392 — con. B, o.
- ↑ 394 — A, Fu bons mestres et. B, Fu il bons mire.
Ce fabliau, dont Molière dans son Médecin malgré lui a imité la première partie, qu’il avait sans doute empruntée à une farce italienne, Arlecchino medico volante, se retrouve dans la 10e et la 30e serée de Bouchet. La première partie existe dans la littérature populaire de la Russie, sans doute venant de notre fabliau (Cf. Hist. litt., XXIII, 197), et tout dernièrement le journal le Figaro (27 mai 1877) rééditait une version de ce pays. Le Pogge, dans ses Facéties, a fait revivre la seconde partie de l’histoire, celle où le médecin guérit les malades par la peur.
LXXV
LA PLANTEZ
ïde Deus qui tot governe !
Il avint en une taverne
L’autre an, si con Acre fu prise,[2]
Bien en ai la matire aprise,
C’uns bachelers de Normandie,
Dont[3] maint gentil ome mandie,
Se voloit disner par matin ;
Mais n’ot geline ne pocin
Ne à[4] mangier qui gaires vaille,
Fors un sol panet de maaille[5].
En sa main tenoit un denier ;
Si commanda au tavernier
Que danrée de vin li traie ;
Et cil de noiant ne delaie,
Qui mout ert fiers et orgoillos[6]
Cointes, vasaus et otragos :
Au tonel vint grant aleüre,
Trestote[7] plaine la mesure
Prant un henap : trestot de plain
Au Normant lo mist en la main :
« Tien, va » fait il, « isnelemant ! »
Lors li versa si roidemant
El hanap que cil li tandi
Que demi lo vin espandi
Par son orgoil et par s’otrage.
Quant li Normanz[8] vit son domage,
Lors n’ot en lui que aïrier.
Qu’il ne li remaint[9] c’un denier ;
Al[10] tavernier escrie haut :
« Sire vasaus, se Deus me saut,
De ton orgoil mestier n’avoie ! »
Et cil li[11] respont : « Va ta voie,
Fous musarz, espoir, se Dé vient,
Ce est gaaigne qui te vient.
Car à celui qui vin espant
Vient, ce dit l’an, gaaigne grant ;
Cist domages te doit mout plaire
Li vins est près, si an fai traire ;
Ne me parler de tel lasté[12] ;
Maint hanap en ai or gasté,
Ainz n’en[13] fis chiere ne sanblant :
D’un mui n’en parleroie tant
Con tu feroies de demie. »
Li Normanz l’ot ; ne li[11] sist mie
Que li taverniers[14] lo ranpone ;
Ainz voldroit mielz estre à Espone[15]
Qu’il nel corost, commant qu’il aille.
De sa borse oste une maaille ;
Si li dit que li aut boen erre
Demie de fromache querre :
« Bau ça, » fait il ; lors s’an torna,
Les degrez do celier monta,
Si en va mout tost et isnel.
Et li Normanz vint au tonel
Commant que il praigne ne chiée,
Si a la broche hors sachiée,
Si fait lo vin aler par terre.
Cil qui lo fromache ala querre
N’a mie grantmant atandu ;
Quant il vit son vin espandu,
Mout ot au cuer et duel et ire.
Ançois que il volsist mot dire
Au Normant, ne à lui tochier,
Ala lo tonel estanchier.
Quant il ot la broche remise,
Au Normant vient, si li devise
Que vilainement a mespris
Par lo pan do sercot l’a pris :
Tot li covient lo vin à randre,
O maintenant lo fera pandre.
Li Normanz dit : « Laissiez m’an pais :
Ainz plus fol de toi ne vi mais,
Ne sez tu que tu me deïs
D’un po de vin que m’espandis,
Je gaaigneroie à planté ?
Or saches bien de verité
Que .C. dobles doiz gaaignier[16],
Que en ton vin te puez baignier
Qui par ce celier cort à ruit ;
Par tans porras mener grant bruit
Del gaaing qui te pant as iauz[17],
Laisse m’ester, et si di miauz,
Que mout te vient bien ta besoigne,
Si con ta parole tesmoigne ;
Icest san m’as tu or apris. »
Adonc l’a li taverniers pris,
Si lo saisist par grant esforz ;
Mais li Normanz fu granz et forz :
Contre un tonel l’a si hurté
A po ne l’a escervelé ;
Li chantés torne, c’est pechiez,
Et li toniaus s’est eslochiez
Que .III. des cercles en ronpirent,
Et les mesures jus chaïrent ;
Tuit sont brisié li mazerin,
Baignier vos poissiez en vin
Par lo celier en plusor leus :
Or ont fait d’un domage deus ;
Cil s’antretiennent duremant,
Mais li Normanz mout justemant
L’a entre .II. fonz aenglé :
Ja l’aüst mort et estranglé,
Quant li voisin i sont venu.
Lo tavernier ont secorru,
Et lo Normani[18] botent en sus ;
Mais onques ne lo tocha nus ;
Mais tant li ont fait de desroi
Qui l’ont mené devant lo roi,
Qui que s’an lot ne qui s’an plaigne :
C’ert[19] li cuens Hanris de Champaigne,
Qui tenoit la terre et l’anor.
Quant devant li vint la clamor,
Li taverniers tot li reconte
Con li Normanz[8] li ot fait honte ;
Tote sa perde li demande.
Et li rois au Normant commande
Et conjure que voir li die.
« Je n’an mantirai, » fait il « mie. »
Lors li a conté maintenant,
Si, con oï avez devant,
C’onques mot n’en daigna noier.
Li rois demande au tavernier
Si ce est[20] voirs que il a dit ?
« Oïl, sire, sanz contredit.
C’onques n’i a manti de mot. »
Et quant la gent lo roi ce ot.
Si batent lor paumes et rient[21],
Au roi Hanri trestuit et dient
Que mais si haute lecherie
Ne fut[22] devant haut ome oïe ;
Por ce que il en ristent tant,
Se tindrent devers lo Normant,
Et li rois si a respondu :
« Qui a[23] perdu, si ait perdu. »
- ↑ LXXV. — La Plantez, p. 170.
Notre texte est établi d’après la copie de la Bibliothèque nationale (coll. Moreau, 1720, Mouchet, 46), que nous désignons par M.
Publié par Méon, Nouveau Recueil, I, 338-342 ; par Renouard dans Legrand d’Aussy, I, app. 28-30 ; et par M. Paul Meyer, Recueil d’anciens textes, 350-352 ; traduit par Legrand d’Aussy, I, 337-339, sous le titre de « Le Bachelier normand ».
- ↑ Vers 3 — Nous avons à choisir entre deux dates pour la prise d’Acre, 1191 par les chrétiens, et 1291 par les musulmans.
- ↑ 6 — * Dont. M, Don.
- ↑ 9 — * Ne à. M, N’a.
- ↑ 10 — * maaille. M, maille.
- ↑ 15 — * orgoillos. M, orgoilleus.
- ↑ 18 — * Trestote. M, Trestot.
- ↑ a et b 26 et 114 — * Normanz. M, Normant.
- ↑ 28 — * remaint. M, remenoit.
- ↑ 29 — * Al. M, A.
- ↑ a et b 32 et 44 — « li » manque à la copie.
- ↑ 39 — * lasté. M, lastel.
- ↑ 41 — * n’en. M, ne.
- ↑ 45 — * taverniers. M, tavernier.
- ↑ 46 — * « Espone », Épone, S.-et-O., arr. de Mantes.
- ↑ 77 — gaaigner, lisez gaaignier.
- ↑ 81 — iaux, lisez iauz.
- ↑ 105 — Normanz, lisez Normani.
- ↑ 110 — * C’ert. M, C’est. — Nous ne saurions identifier cet Henri, à la fois duc de Normandie, comte de Champagne et roi, en 1191 ou 1291.
- ↑ 123 — * Si ce est. M, Si c’est.
- ↑ 127 — * rient. M, dient.
- ↑ 130 — * fut. M, fu.
- ↑ 134 — * Qui a. M, Qui ait.
Imbert a remis ce conte en vers.
LXXVI
DES PUTAINS ET DES LECHEORS
uant Dieus ot estoré lo monde
Si con il est à la reonde,
Et quanque il convit[2] dedanz,
Trois ordres establi de genz,
Et fist el siecle demoranz,
Chevaliers, clers et laboranz.[3]
Les chevaliers toz asena
As terres, et as clers dona
Les aumosnes et les dimages ;
Puis asena les laborages
As laboranz, por laborer.
Quant ce ot fet, sanz demorer
D’iluec parti et[4] s’en ala.
Quant il s’en partoit, veü a
Une torbe de tricheors,
Si con putains et lecheors ;
Poi ot alé, quant l’aprochierent,
A crier entr’aus commencierent :
« Estez, sire, parlez à nos,
Ne nos lessiez, o alez vos ?
De rien ne[5] somes asené,
Si avez as autres doné. »
Nostre sire ses esgarda ;
Quant les oï, si demanda
[6], qui o lui estoit,
De cele gent qui là estoit :
« C’est une gent, » fet il, « sorfete,
Que vos avez autresi fete,
Con caus qui de vos mout se fient,
Si hucent[7] après vos et crient
Que lor faciez asenement. »
Nostre sires, isnelement,
Ançois que riens lor respondist,
As chevaliers vint, si lor dist :
« Vos, cui les terres abandoin[8],
Les lecheors vos bail et doin,
Que vos d’aus grant cure preigniez
Et qu’entor vos les retaigniez,
Que il n’aient de vos soufraite,
Ne ma parole ne soit fraite,
Mès donez lor à lor demant.
Et à vos, saignor clerc, commant
Les putains mout bien à garder,
Issi le vos voil commander. »
Selonc cestui commandement
Ne font il nul trespassement ;
Car il les tienent totes chieres,
Si les tienent à beles chieres
Del miaus qu’il ont, et del plus bel.
Selonc lou sens de mon fablel,
Se vos l’avez bien entendu,
Sont tuit li chevalier perdu
Qui les lecheors tienent vis,
Et d’aus les font sovent eschis,
Mès putains ont peliçons chauz
Dobles mantiaus, dobles sorcoz.
Petit truevent de tiels escoz
Li lecheor as chevaliers ;
Et si sont il mout bons parliers,
Ne lor donent fors[9] viez drapiaus ;
Et petit de lor bons morsiaus,
En gitant, con as chiens, lor ruent.
Mès putains sovent robes muent,
Avec les clercs cochent et lievent
Et sor lor depanses enbrievent.
Li clerc lo font por aus salver,
Mès li chevalier sont aver
As lecheors ; si se traïssent
Quant del commandement Dieu issent,
Mès ce ne font li clerc noiant,
Il sont large et obediant
As putains, l’oevre lo tesmoingne,
Et despendent lor patremoinne,
Et les biens au crucefié,
En tel gent sont il emploie
Des rentes, des dismes lo bien.
A cest conte font li clerc bien
Desor toz les autres que font.
Si mes fabliaus dit voir, donc sont
Par cest commant li clerc sauvé
Et li chevalier sont dampné.
- ↑ LXXVI. — Des Putains et des Lecheors, p. 175.
Notre texte est établi d’après la copie de la Bibliothèque nationale (coll. Moreau, 1720, Mouchet 46), que nous désignons par M.
Publié par Th. Wright, Anecdota literaria, 64-65, et traduit par Legrand d’Aussy, II, 357, sous le titre « des Catins et des Ménétriers ».
- ↑ Vers 3 — * quanque il convit. M, quanqu’il convint.
- ↑ 6 — M, Clers et chevaliers laboranz.
- ↑ 13 — « et » manque à M.
- ↑ 21 — * De rien ne. M, Darrien que.
- ↑ 25 — La copie n’a pas les mots « Saint Piere, » mais seulement S.
- ↑ 30 — * hucent. M, huient.
- ↑ 35 — * abandoin. M, abandoi.
- ↑ 61 — * fors. M, for.
LXXVII
DE L’EVESQUE
ns evesques jadis estoit,
Qui mout volantiers s’acointoit
De dames et de damoiseles ;
Qu’il en trovoit asez de beles,
Et il lor donoit largemant.
Por ce faisoient son commant,
Car totes béent mais au prendre,
Et cil qui ne lor a que tandre,
N’en aura jamais bon servise :
Ceste costume ont bien[2] aprise.
Près de la cité de Baiues[3],
Ice m’est avis à .II. Hues,
Ot li evesques un repaire :
Riche maison i ot fait faire,
Je ne sai la vile nomer[4] ;
Sovant s’i aloit deporter
Li evesques, quant il voloit
Por ce que loin de vile estoit.
Uns prestes estut en la vile
Qui mout sot d’angin et de guile,
Sa fame avoque[5] lui avoit
Li prestes, que il mout amoit,
Et mout estoit preuz et cortoise,
Et à l’evesque mout en poise ;
Si li a par mainte foiz dit
Et deveé et contredit
Que il l’ostast de sa maison :
Li prestes par bele raison
Li dist que sofrir ne s’an puet.
« Par nos ordres faire l’estuet, »
Dit li evesques araumant,
« Ou autremant je vos deffant
Que vos ne bevez ja de vin.
— Sire, foi que doi saint Martin, »
Fait li prestes, « ainz m’an tandrai
De vin, si que n’en buverai[6]. »
Atant repaire en sa maison
Li prestes, et met à raison
La prestresse que il a trovée :[7]
« Par Deu, » fait il, « dame Auberée,
Or m’est il trop mal avenu,
Que l’evesques m’a deffandu
A boivre vin et deveé.
— Voire, sire, par les sainz Dé,
Ja en bevez vos volantiers ;
Or est il trop vostre guerriers,
Qui vin à boivre vos deffant ;
Biau sire, son commandemant
Covient tenir, ja n’en bevroiz,
Mais, par foi, vos lo humeroiz :
Quant li boivres vos est veez,
Li humers vos est commandez
De par moi, si le vos enseing. »
Li prestes n’ot mie en desdaing
Ce que la dame commanda,
Li boivre laissa, si huima
Quant lui plot, et mestier en ot,
Tant que li evesques lo sot,
Je ne sai qui l’an encuza.
Lo provoire tantost manda ;
Si li deffant que il gardast
Que jamais d’oie ne manjast
Tant con sa famé aûst o lui.
« Sire, » fait il, « à grant enui
Me torne ce et à contrere,
Que vos me commandez à faire ;
Mais tot ce ne vos vaut noiant,
Je ne m’an irai pas riant. »
Li prestes plus n’i demora,
A sa fame tot reconta
Con il a les oes perdues,
L’evesques li a deffandues :
« Dame, » fait il, « juré li ai
Jamais d’oe ne mangerai.
— Voire, » fait ele, « est il ensi ?
Mout vos a ore maubailli, »
Fait ele, « li vilains escharz ;
Par foi, vos manjeroiz des jarz
A planté, qui que s’an repante,
Car vos en avez plus de trante.
— E non Deu, » fait il, « jel creant. »
Ensinc lo refist longuemant,
Tant qu’a l’evesque[8] refu dit,
Et cil li refait contredit
Que jamais ne gise sor coute.
« Par foi, ci a parole estote, »
Fait li prestes, « que vos me dites,
Je ne sui reclus ne hermites ;
Mais dès qu’il vos vient à plaisir,
Par quoi n’i[9] doie je gesir ?
— Ensinc lo t’estuet il à faire. »
Atant se rest mis au repaire,
A sa fame se rest clamé ;
Et cele dit : « Oïr poez
Grant rage et grant forsenerie ;
Bien sai que ne vos aime mie
Li evesques ne n’a point chier ;
Mais tot ce ne li a mestier,
Ne ne monte .II. engevins[10] :
Un lit vos ferai de cousins,
Bien le ferai soëf et mol.
— Dame, foi que je doi saint Pol, »
Fait li prestes, « vos dites bien,
Or né lo dot je mais de rien,
Puisqu’ainsinc m’avez conseillié. »
Après ce n’a gaires targié
Li evesques, que il ala
En la vile, si demora
Une semaine tote entiere,
Ainz que il retornast arriere.
Une borjoise en la vile ot
Que li evesques mout amot,
Qu’à chascune nuit, sanz faillir,
Aloit avoque li gesir
Qu’el ne voloit à lui aler
Ou por[11] promece ou por doner,
Tant estoit fiere et orgoillose,
Envers l’evesque desdaignose,
Tant c’une nuit, si con moi sanble,
Durent endui gesir ensanble ;
Ensinc l’avoient porposé.
Mais trestote la verité
En sot li prestes auramant,
Qui mout avoit lo cuer dolant
De ce que l’evesques li dist
Que fame avoc li ne tenist ;
Si l’an remanbre encore bien,
Et dit que[12] ne l’aura por rien
C’a la borjoise n’aut parler
Maintenant, sanz plus arester ;
S’an va à li, si li a dit :
« Dame, se li cors Dieu m’ait,
Grant mestier ai de vostre aïe,
Gardez que ne me[13] failliez mie,
Que jamais ne vos ameroie.
— Sire, » fait[14] ele, « sel savoie
Chose dont il vos fust mestiers[15],
Jel feroie mout volantiers ;
Or me dites vostre plaisir.
— Dame, ne lo vos quier taisir, »
Fait li prestes, « ne vos anuit ;
Li evesques qui doit anuit
O vos gesir en vostre lit
Et de vos faire son delit,
Que l’an lo[16] m’a dit et conté,
Si me faites tant de bonté,
Comme m’amie et ma voisine,
Que vos darriere la cortine
Me laissiez repondre[17] et tapir ;
Bien lo vos cuit encor merir,
Se tant volez faire por moi.
— Par foi, » fait ele, « je l’otroi,
Ce ferai je mout liéemant,
Alez donques delivremant :
Si vos muciez et reponez
Volantiers quant vos lo volez. »
Lors se muce et se ratapine[18]
Et caiche darrier la cortine
Tant que li jorz s’an fu alez.
Adonc ne s’est pas obliez
Li evesques qui venir dut :
Atot .IIII. serjanz s’esmut,
A la borjoise vint tot droit,
Qui privéemant l’atandoit,
Ni ot que li et sa baiasse.
Ne sai que plus vos en contasse,
Mais que li liz fu atornez
Qui bien estoit encortinez :
Dui cerge mout cler i ardoient
Qui mout grande[19] clarté gitoient.
La dame se coucha avant,
Et li evesques auraumant
Se[20] recoucha sanz plus atandre,
Et li viz li commance à tandre
Quant il santi la dame nue :
Si volt monter sanz plus[21] atandre,
Mais cele li contredit bien,
Et dit que il n’an fera rien :
« Sire, » fait ele, « ne vos hastez :
Se vos volez voz volantez
Faire de moi ne de mon con,
I covient que beneïçon
Li doigniez, et si lo seigniez
Ençoiz que vos i adesiez[22],
Qu’il ne fu onques ordonez :
La destre main en haut levez,
Sel[23] beneïsiez maintenant
Tot autresi hastivemant
Comme vos feriez demain
La teste au fil à un vilain,
Se vos li fasiez corone. »
L’evesques ot qu’el li sarmone,
Que ja à li n’aura tochié
Tant qu’ençois ait son con seignié.
Si dist : « Dame, foi que vos doi,
Quanque vos dites, je l’otroi,
Vos lo volez, et jo voil bien,
Por ce n’i perdrai je ja rien. »
Li evesques lo con seigna,
Et puis a dit per omnia ;
Quanqu’il fait la beneïçon,
Dit secula seculorum ;
Et li prestes, qui l’antandi,
Maintenant amen[24] respondi.
Et li evesques, quant il l’ot,
Sachiez que grant peor en ot
Quant a lo prevoire escoté,
Puis a un po en haut parlé :
« Qui es tu, qui respondu as ?
— Sire, » fait il, « je suis li lax,
Cui tu viaus sa fame tolir,
Si con il te vient à plaisir,
Et si m’as lo vin deffandu,
Jamais par moi n’en ert beü.
Dès hui matin oï retraire
Que tu voloies ordres faire :
Si i voloie estre, biau sire. »
Li evesques commance à rire,
Et dit : « Or m’as tu espié,
Et bien sorpris et engignié :
Or te doin[25] je congié de boivre,
Et de mangier poucins au poivre[26],
Et oes quant tu en voudrax,
Et avoc toi ta fame auras ;
Si garde que mais ne te voie ! »
Lors s’an tome cil à grant joie.
- ↑ LXXVII. — De l’Evesque qui beneï lo con, p. 178.
Notre texte est établi d’après la copie de la Bibliothèque nationale (coll. Moreau, 1720, Mouchet, 46), que nous désignons par M.
Publié par Th. Wright, Anecdota literaria, 68-73, et analysé par Legrand d’Aussy, III, 126-131, sous le titre de l’« Évesque qui bénit sa maîtresse. »
- ↑ Vers 10 — « bien » manque à la copie.
- ↑ 11 — « Baiues », que le ms. lit Baies, est sans doute Bayeux en Normandie, bien que la rime ne concorde guère avec liues.
- ↑ 15 — M ajoute vo avant « nomer ».
- ↑ 21 — * avoque. M, avoc.
- ↑ 36 — * buverai. M, buvrai.
- ↑ 39 — M, Li prestes que il l’a trovée.
- ↑ 83 — * à l’evesque. M, à l’evesques.
- ↑ 90 — M ajoute je avant « n’i ».
- ↑ 99 — angevins, lisez engevins.
- ↑ 116 — * Ou por. M, Par. 128 — * que. M, qui. 134 — * ne me. M, vos ne me. 136 — fet, lisez fait. 137 — * dont… mestiers. M, don… mestier.
- ↑ 128 — * que. M, qui.
- ↑ 134 — * ne me. M, vos ne me.
- ↑ 136 — fet, lisez fait.
- ↑ 137 — * dont… mestiers. M, don… mestier.
- ↑ 145 — l’o, lisez lo.
- ↑ 149 — respondre, lisez repondre.
- ↑ 157 — * et se ratapine. M, et atapine.
- ↑ 170 — * grande. M, grant.
- ↑ 173 — * Se. M, Si.
- ↑ 176 — « plus » manque à la copie.
- ↑ 184 — * adesiez. M, adessez.
- ↑ 187 — * Sel. M, Ses.
- ↑ 204 — * amen. M, aman.
- ↑ 221 — * doin. M, doi.
- ↑ 222 — * poivre. M, povre.
Bonaventure des Periers (nouv. 36) nous présente une nouvelle analogue à ce fabliau. Voyez aussi dans le Novellino (Romania, III, 175) et dans les Cento Novelle antiche (nov. 54). Imbert a imité ce conte, où les prescriptions du troisième concile de Latran sont loin d’être observées.
LXXVIII
DU
VALLET AUS .XII. FAMES
1593, fol. 183 vo à 184 ro, et 25545,
fol. 75 ro à 76 ro.[1]
eignor, volez que je vous die
Que il avint en Normandie ?
Se dist cil de cui je l’apris,
C’uns damoisiaus de mout haut pris
Se vout ou pais marier.
Mès il dit et veut affier[2]
Que ja n’aura[3] fame en sa vie
S’il n’en a .XII. en sa baillie.
« Filz, » dist li peres, « que dis tu ?
Une m’en a si confondu[4]
Que je ne puis ne ho[5] ne jo.
Je deïsse volentiers ho,
S’a tant m’en peüsse passer ;
Mès une m’a fet si[6] lasser
Que je[7] ne me puis mes aidier.
Filz, quar prenez une moillier,
Si essaiez que ce[8] sera,
Tant que cis[9] anz passez sera :
Se[10] ne vous sert à vo voloir,
Je vous en ferai .II. avoir,
Ou .III., ou .IV., ou .V., ou sis,
Ou .VII., ou .VIII., ou .IX., ou dis,
Ou tant con vous onques voudrez :
Jamar de ce en[11] douterez.
— Père, » dist li fils, « n’est[12] pas bien,
Une seule ne feroit rien.[13]
Et que vaut ce ? » Tant ont parlé[14]
Si parent[15], et tant l’ont mené,
Qu’il li donent[16] une pucele,
Qui mout ert avenanz et bele.
La damoisele oï sovent
Du bacheler[17] le ventement
Que ja jour fame ne prendroit,[18]
Se .X. ou .XII. n’en avoit ;
Mès ele dist en son requoi
Qu’ains un an le fera si quoi,
S’ele le tient entre ses braz[19],
Qu’ele[20] le fera clamer laz ;
Metre le cuide en tele trape,[21]
S’il le tient, ains qu’il li eschape,
Qu’il voldroit estre à Pempelune,
Se n’en eüst ne .II. ne une.
Quant li vallès espousé l’eut[22],
Et sa fame le vous aqueut,
De bel servir mout se pena ;[23]
Et cilz qui veintre la cuida,
La requiert aussi vivement ;
Et nuit et jor assaut li rent.
Tant qu’il en fu en grant ahan.
Ains que passast le demi an,
En fu il si trés empiriez
Qu’il ne pot estre sus ses piez,
Que le cors li amenuisa,
Et le col li aggrellia
Qui souloit estre gros et plains ;
Et or est de si lait pelains
Qu’il sambloit qu’il eüst langui.
Et sa fame le racuilli[24]
Et nuit et jor à dosnoier,
A acoler et à besier.
« Sire, » dist[25] ele, « qu’avez vous ?
Vous soliiez estre si prous.
Si aspres, et si remuanz, *
Et si vigrous[26] et si ardans,
Que ne me lessiiez dormir :
Et or vous voi si quoi tenir[27]
Que je croi bien en moie foi
Que vous amez autrui que moi.
— Ha ! laz, » dist[28] il, « Dieus n’i soit mie
A foi en ceste jalousie[29],
Mout ai or d’amer grant besoing,[30]
Et mout vous en est pris grant soing.
— C’est mon[31], sire, se Dieus m’ait,
Que mès[32] ne me fetes delit.
— Non voir, » dist il, « quar je me muir[33],
Je n’ai fors les os et le cuir[34] ;
Por amor Dieu lessiez me ester,[35]
Volez vos adès[36] rioter ?
A mal chief viengne tel riote.
— Ci a, » dist[37] ele, « bele note :
Or me dites que[38] feïssiez,
Se .XII. fames eussiez ?
Se l’une[39] eüst de vous son buen,
L’autre[40] vousist avoir le suen :
Si i[41] eüst mout grant estor,
Chascune vousist à son tor
Avoir sa joie et son solaz ;
Et vous estes por moi si laz,
Que ne poez les rains movoir.[42]
Or puis je bien apercevoir
Que vous fussiez mout empiriez,
Se .XII. fames eussiez. »
Ainsi furent une seson.
Li pere au valet fu preudon,
Un jor en vint parler à lui :
« Filz, » dist[43] il, « il vous convient hui
Espouser fame de par Dieu,
Et demain l’autre : or querez lieu
Où vous puissiez voz noces[44] fere ;
J’ai mout bien[45] porquis vostre afere.
Une en avez, je en ai onze[46].
Il vous en convient avoir douze.[47]
— .XII., » dist[43] il, « deable i soient[48],
.C.[49] homme nés assouviroient.
Trop en ai ge, ge vous affi,[50]
Laissiez m’en pais, pour Dieu merci. »
Ainsi demora[51] longuement,
Tant qu’il avint, ne sai coment,
Et par ne sai[52] quele aventure,
Con prist .I. leu en la pasture,
Dedenz la vile où cil[53] manoit,
Qui grant domage lor fesoit.
Li uns le juge à escorcier,[54]
Li autres[55] le juge à noier,
Et li tiers à ardoir en cendre[56],
Et li quars si le juge à pendre[57],
Tant que cil[58] vint à daerrains,
Qui tant par ert maigres[59] et tains,
Por les maus qui li courent seure :[60]
Il parla quant il en ot heure
Li mariez, dont dit vous ai.
Qui tant seut avoir le cuer gai.[61]
Il parla quant tuit orent dit[62].
Que doné l’en fu le respit :[63]
« Donez li fame, je vous pri,
Soit[64] aussi con je sui boni,
Que mieus nel pourrez vous occire.[65]
Ne son cors livrer à martire ;
Ne ne li povez faire pis
Qu’estre en[66] si maie prison mis,
Dont jamès n’ert liez en sa vie :
Ainsi li toudrez vous la vie. »
Quant cil[67] l’oent, chascuns s’en rist.
Ez vous sa fame qui lor[68] dist :
« Seignors, tenez vous en à lui.
Que nus n’est mieus[69] bonis de lui. »
Tuit tinrent bon cest jugement :[70]
Fame li livrent maintenent,
Mais ne l’a pas .I. mois tenue
Que sa piaus, qui si iert velue,
Li est partout aussi[71] plumée
Con s’ele li fust decirée ;
Que tele vie li mena
Que li louz si en arraga,
Tant qu’il l’en esconvint mourir
Et de cest siecle defenir.
Einsi[72] furent du louf vengié
Dou consoil au fol marié.
Par cest conte veil chastier
Les venteors fous mariez,
Qu’autrefois ne se ventent pas,
Et qu’orgueus nés abassent pas
D’une seule fame aient cure,
Car à .C. hommes par mesure
Livreroit une fame estat,
Et lor diroit en l’aingle mat.
- ↑ LXXVIII. — Du Vallet aus .XII. fames, p. 186.
A. — Paris, Bibl. nat., Mss. fr. 837, fol. 185 ro à 186 ro.
B. — » » » 1593, fol. 183 vo à 184 ro.
C. — » » » 25545, fol. 75 ro à 76 ro.
Publié par Barbazan, I, 233 ; par Méon, III, 148-153, et imité par Legrand d’Aussy, III, 333-336.
- ↑ Vers 6 — A, bien et vout jurer. B, bien et veut jurer.
- ↑ 7 — C, Qu’il n’aura ja.
- ↑ 10 — C, cort tenu.
- ↑ 12 — C, Trop volentiers deïsse ho.
- ↑ 14 — B, Que mainte foiz m’a fet. C, Mais ele m’a fet tant.
- ↑ 15 — B, Si que.
- ↑ 17 — B, ce que.
- ↑ 18 — cis. B, li. C, cest.
- ↑ 19 — B, S’el.
- ↑ 24 — en. A, vous.
- ↑ 25 — C, fait cil, « je l’otroi.
- ↑ 26 — C, Mais une ne m’en fera rien.
- ↑ 27 — B et C intervertissent la fin de ce vers, « ont parlé », et celle du vers suivant, « l’ont mené ».
- ↑ 28 — parent. C, ami.
- ↑ 29 — C, Donné li ont.
- ↑ 32 — B, C, Du damoisel. — A, B, le couvenant.
- ↑ 33 — A, B, Qui dit que ja fame n’auroit.
- ↑ 37 — C, dedenz ses las.
- ↑ 38 — C, Qu’el. — C, tout laz.
- ↑ 39-42 — Ces vers manquent dans A et B.
- ↑ 43 — l’eut. C, eut.
- ↑ 45-58 — Ces vers manquent dans A et B.
- ↑ 58 — racuili, lisez racuilli.
- ↑ 61 — dist. C, fait. — qu’avez-vous, lisez qu’avez vous.
- ↑ 64 — A, B, Si viguereus.
- ↑ 66 — C, contenir.
- ↑ 69 — dist. C, fait.
- ↑ 70 — C, compagnie.
- ↑ 71-72 — Ces vers manquent à C.
- ↑ 73 — B, Car mon. C, Sait mon.
- ↑ 74 — C, Qu’ains. — A, B, ne fetes vo.
- ↑ 75 — me muir. B, ne puis. — C, Boyn, par les sains Dé(x), je ne puis.
- ↑ 76 — C, les cuirs.
- ↑ 77 — C, Je n’en puis mais laissier m’ester.
- ↑ 78 — adès. A, huimès.
- ↑ 80 — dist. C, fait. — Ce vers et le précédent sont intervertis dans C.
- ↑ 81 — B, C, Dites moi dont.
- ↑ 83 — C, Quant l’une.
- ↑ 84 — C, L’autre an.
- ↑ 85 — C, Lors i.
- ↑ 89 — B, Que ne vos poez removoir.
- ↑ a et b 96 et 103 — dist. C, fait.
- ↑ 99 — voz noces. C, vostre honnor.
- ↑ 100 — C, Car j’ai si.
- ↑ 101 — B, j’en ai quis. C, et j’en ai.
- ↑ 102 — Ce vers manque à B.
- ↑ 103 — C, soit.
- ↑ 104 — C, .LX. — C, maintendroit.
- ↑ 105-106 — Ces vers manquent dans A et B.
- ↑ 107 — demora. C, furent mout.
- ↑ 109 — C, ne sai par.
- ↑ 111 — C, Droit en la vile où il.
- ↑ 113 — C, Les un(s) le jugent à noier.
- ↑ 114 — B, Et l’autre. — C, Et li autre[s] à escorchier.
- ↑ 115 — C, le juja à pendre.
- ↑ 116 — C, à ardoir en cendre.
- ↑ 117 — B, C, Adonc vint cil.
- ↑ 118 — B, Qui tot estoit pales. C, Qui si estoit megres.
- ↑ 119-120 — Ces vers manquent dans A et B.
- ↑ 122 — B, C, Qui sot avoir le cuer si gai.
- ↑ 123 — A, B, et leur dit einsi.
- ↑ 124 — Ce vers manque dans A et B.
- ↑ 126 — A, B, S’ert. — B, einsi. — suis, lisez sui. — A, B, honiz.
- ↑ 127-129 — Ces trois vers manquent dans A et B.
- ↑ 130 — A, B, Et en.
- ↑ 133 — cil. B, il.
- ↑ 134 — C, Neis la fame, aussis si.
- ↑ 136 — mieus. B, plus.
- ↑ 137-156 — Ces vers manquent dans A et B.
- ↑ 141 — * aussi. C, aussis.
- ↑ 147 — * Einsi. C, Einsis.
LXXIX
DE LA DAME
1593, fol. 61 vo à 62 vo,
et 1635, fol. 14 vo à 15 vo.[1]
ui fame vorroit[2] decevoir,
Je li fais bien apercevoir
Qu’avant decevroit l’Anemi,
Le deable[3], à champ arrami,
Cil qui fame viaut justisier.
Chascun jor la puet combrisier
Et l’endemain rest tote saine
Por resoufrir autretel paine[4] ;
Mès quant fame a fol debonere
Et ele a riens de lui afere,
Ele li dist tant de bellues
De trufes et de fanfelues[5]
Qu’ele li fet à force entendre
Que li cieus sera demain cendre.
Ainsi[6] gaaigne la querele.
Jel di por une damoisele
Qui ert fame à un escuier,
Ne sai Chartain ou Berruier.
La damoisele, c’est la voire,
Estoit amie à un provoire :
Mout l’amoit cil et ele[7] lui,
Et si ne lessast por nului
Qu’ele ne feïst son voloir,
Cui qu’en deüst le cuer doloir.
.I. jor au partir de l’eglise
Ot li prestres fet son[8] servise ;
Ses vestemenz lest à ploier,
Et si vint[9] la dame proier
Que le soir en un boschet viengne :
Parler li veut d’une besoingne,
Où je cuit[10] que pou conquerroie,
Se la besoingne vous nommoie.
La dame respondi au preste[11] :
« Sire, vez me ci toute preste,
Cor est[12] il et poins et seson,
Ausi n’est pas[13] cil en meson. »
Or avoit en ceste[14] aventure,
Sanz plus itant de mespresure,
Que les mesons n’estoient pas
L’une lez l’autre à .IIII. pas ;
Ainz[15] i avoit, dont mout lor poise,
Li[16] tiers d’une liue Françoise ;
Chascune ert en un espinois
Con ces mesons de Gastinois.
Mès li boschès que je vous nomme,
Estoit à ce vaillant preudomme
Qu’à[17] Saint Ernoul doit la chandoile.
Le soir qu’il ot ja mainte estoile
Parant el ciel, si con moi samble,
Li prestres de sa meson s’amble,
Et s’en vint el[18] boschet seoir,
Por ce c’on nel[19] puisse veoir.
Mès à la dame mesavint
Que sire Ernous ses mariz vint
Toz emplus[20] et toz engelez,
Ne sai dont où il ert alez :
Por ce remanoir là covint[21].
De son provoire li sovint[22],
Si se haste d’aparellier,
Ne le vout pas fere veillier ;
Por ce n’i ot .III.[23] mès ne quatre :
Après mengier petit esbatre
Le lessa, bien le vous[24] puis dire ;
Sovent li a dit : « Biaus douz sire,
Alez gesir, si ferez bien :
Veillier grieve sor toute rien
A homme quant il est lassez ;
Hui avez[25] chevauchié assez. »
L’aler gesir tant li reprouche,
Par pou, le morsel en la bouche,
Ne fet celui aler gesir.
Tant a d’eschaper grant desir.
Li bons escuiers i ala,
Qui sa[26] damoisele apela,
Por ce que mout la prise et aime.
« Sire, » fet ele, « il me faut traime
A une toile que je fais,
Et si m’en faut encor grant fais
Dont je ne me sai garde prendre,
Et je n’en truis nes point à vendre :
Par Dieu si ne sai que j’en[27] face.
— Au deable soit tel filace, »
Dist li escuiers, « con[28] la vostre !
Foi que je doi saint Pol l’apostre,
Je voudroie que[29] fust en Saine. »
Atant se couche, si se saine,
Et cele se part de la chambre.
Petit sejornerent si membre,
Tant qu’el vint là où cil l’atent.
Li uns les[30] bras à l’autre tent :
Iluec furent à grant deduit,
Tant qu’il[31] fu près de mienuit.
Dou[32] premier somme cil s’esveille,
Mès mout li vient[33] à grant merveille,
Quant il ne sent lez lui sa fame :
« Chamberiere, où est vostre[34] dame ?
— Ele est[35] là fors en cele vile
Chiés sa commere où ele file. »
Quant cil[36] oï que là fors iere,
Voirs est qu’il fîst mout laide chiere ;
Son sorcot vest, si se leva,
Sa damoisele querre va.
Chiés sa commere la demande,
Ne trueve qui reson l’en rande,
Qu’ele n’i avoit esté mie ;
Es vous celui en frenesie.
Par delez cels qu’el boschet furent,
Ala et vint : cil ne se murent ;
Et quant il fu outre passez :
« Sire, » fet ele, « or est assez,
Or covient il que je m’en aille.
— Vous aurez ja noise et bataille, »
Fet li prestres ; « ice me tue
Que vous serez ja trop batue.
— Onques de moi ne vous soviengne,
Dant prestres, de vous vous coviengne, »
Dist la damoisele en riant.
Que vous iroie controuvant[37] ?
Chascuns s’en vint à son repere ;
Cil qui se jut, ne se pot tere :
« Dame, orde vilz pute[38] provée,
Vous soiez or la mal trovée, »
Dist li escuiers. « Dont[39] venez ?
Bien pert que pour fol me tenez. »
Cele se tut et cil s’esfroie :
« Voiz pour le sanc, et[40] pour le foie,
Por la froissure et[41] por la teste,
Ele vient[42] d’avoec nostre preste. »
Issi[43] dit voir, et si nel sot,
Cele se tut, si[44] ne dist mot.
Quant cil ot qu’el[45] ne se desfent,
Par .I. petit d’iror ne fent,
Qu’il cuide bien en aventure
Avoir dit la verité pure.
Mautalenz l’argue et atise,
Sa fame a par les treces prise ;
Por le trenchier son coutel tret :[46]
« Sire, » fet[47] el, « por Dieu atret,
Or covient il que je[48] vous die.
Or orrez ja trop grant voisdie[49],
J’amaisse mieus estre en la fosse :
Voire est que je sui de vous grosse,
Si m’enseigna l’en[50] à aler
Entor le moustier, sanz parler,
.III. tors, dire .III. patrenostres
En l’onor Dieu et ses apostres ;
Une fosse au talon feïsse,
Et par .III. jors i revenisse :
S’au tiers jorz ouvert le trovoie,
C’estoit un fils qu’avoir devoie[51],
Et s’il estoit clos, c’estoit fille.
Or ne revaut tout une bille, »
Fet[52] la dame, « quanques j’ai fet ;
Mès, par saint Jaque, il ert refet,
Se vos tuer m’en deviiez. »
Atant s’est cil desavoiez
De la voie où avoiez iere ;
Si parla en autre maniere :
« Dame, » dist il, « je, que savoie
Du voiage ne de la voie ?
Se je seüsse ceste[53] chose,
Dont je à tort vous blasme et chose,
Je sui cil qui mot n’en deïsse
Se je anuit de cest soir isse. »
Atant se turent, si font pès.
Que cil n’en doit parler jamès,
De chose que sa fame face.
Ne n’orra noise ne menace.
Rutebues[54] dist en cest fablel :
Quant fame a fol, s’a son avel.
- ↑ LXXIX. — De la Dame qui fit .III. tors entor le moustier, p. 192.
A. — Paris, Bibl. nat., Mss. fr. 837, fol. 305 vo à 306 vo.
B. — » » » 1593, fol. 61 vo à 62 vo.
C. — » » » 1635, fol. 14 vo à 15 vo.
Publié par Barbazan, I, 48 ; par Méon, III, 30-35 ; par Ach. Jubinal, Œuvres complètes de Rutebeuf, 2e éd., II, 105-112, et traduit par Legrand d’Aussy, II, 315-321.
- ↑ Vers 1 — B, vorroit fame.
- ↑ 4 — A, C, Au deable.
- ↑ 8 — B, poine.
- ↑ 12 — B, fafelues.
- ↑ 15 — A, Issi.
- ↑ 21 — ele. A, cele.
- ↑ 26 — son. B, le.
- ↑ 28 — vint. B, vet. C, va.
- ↑ 31 — cuit. B, croi.
- ↑ 33 — * preste. A, B, C, prestre.
- ↑ 35 — B, Or est.
- ↑ 36 — C, Sire, n’est mi[e].
- ↑ 37 — ceste. A, cele.
- ↑ 41 — C, Bien. — B, d’ou.
- ↑ 42 — A, C, Le.
- ↑ 47 — B, Que. C, Qui.
- ↑ 51 — el. C, au.
- ↑ 52 — B, C, Que nus ne le.
- ↑ 55 — emplus. A, C, moilliez.
- ↑ 57 — B, le covient.
- ↑ 58 — B, sovient.
- ↑ 61 — .III. A, .V.
- ↑ 63 — « vous » manque à B.
- ↑ 68 — A, C, Vous avez.
- ↑ 74 — sa. B, la.
- ↑ 81 — « j’en » manque à B.
- ↑ 83 — A, Fet li vallès, « comme.
- ↑ 85 — que. A, qu’il. C, qu’el.
- ↑ 90 — les. B, ses.
- ↑ 92 — qu’il. B, que.
- ↑ 93 — C, Au.
- ↑ 94 — vient. C, vint. — B, Se li vint à mout.
- ↑ 96 — vostre. B, C, ta.
- ↑ 97 — « est » manque à B.
- ↑ 99 — cil. C, il. — B, a oï que fors.
- ↑ 118 — controuveant, lisez controuvant. B, je contant.
- ↑ 121 — C, putainz.
- ↑ 123 — B, D’où.
- ↑ 126 — et. B, ne.
- ↑ 127 — « et » manque à B.
- ↑ 128 — « vient » manque à B. — d’avoec. C, d’enchiez.
- ↑ 129 — C, Ensi.
- ↑ 130 — si. B, et.
- ↑ 131 — qu’el. B, que.
- ↑ 137 — Ce vers est le dernier de la page ; il ne peut donc pas porter le no 138, indiqué à côté du titre courant. La même erreur a eu lieu à la page suivante, ce qui fait que ce fabliau doit compter 170 et non 172 vers.
- ↑ 138 — fet. B, dit.
- ↑ 139 — « je » manque à B.
- ↑ 140 — B, boisdie.
- ↑ 143 — l’en. C, on.
- ↑ 150 — B, devroie.
- ↑ 153 — A, C, Dist.
- ↑ 161 — B, cest[e].
- ↑ 169 — A, B, Rutebuef.
Ce fabliau, imité par Imbert, se retrouve dans les Cent Nouvelles nouvelles.
LXXX
DU VILAIN AU BUFFET
1553, fol. 505 ro à 506 ro,
et 1593, fol. 118 vo à 120 vo.[1]
ui biau set[2] dire et rimoier,
Bien doit sa science avoier[3]
A fere[4] chose où l’en aprenge,
Et dire que l’en[5] n’i mesprenge.
Et cil[6] ne fet mie folie
Qui d’autrui mesfet se chastie.
Li cortois cuers et li gentiz
Est bien à apenre[7] ententiz ;
Mès li mauvais, fel et cuvers[8]
Est à mal aprandre aouvers ;
Li faus bons avers et traïtes[9]
Si est toz jorz embrons et tristes,[10]
Quant il ot le bien[11] recorder,
Quar il ne s’i puet acorder.
Quant il ot aucun conteor,[12]
Si dist : « Oiez[13] quel menteor !
Cist en tuera ja tels vint.
Dont ainz nus à estor n’en vint,[14]
N’onques ne furent né de mere. »
Mout par li est au cuer amere
LXXXI
DU VILAIN
et 19152, fol. 47 ro à 47 vo ;
Bibl. de Berne, Mss. 354, fol. 143 vo à 145 ro.[15]
os trovomes en escriture
Une merveilleuse aventure !
Qui jadis avint un[16] vilain.
Mors fu par .I. venredi main ;
Tel[17] aventure li avint
Qu’angles[18] ne deables n’i vint ;
A cele ore que il fu morz
Et l’ame li parti[19] du cors,
Ne troeve qui riens li demant
Ne nule chose li[20] coumant.
Sachiez que mout fu[21] eüreuse
L’ame, qui mout fu pooreuse[22] ;
Garda à destre vers[23] le ciel,
Et vit l’archangle[24] seint Michiel
Qui portoit une ame à[25] grant joie ;
Enprès[26] l’angle tint cil sa voie.
Tant sivi l’angle, ce m’est vis,[27]
Que il entra en paradis.
Seinz Pierres, qui gardoit la porte,[28]
Reçut l’ame que l’angle porte ;
Et, quant l'ame reseüe a,
Vers la porte s'en retorna.
L'ame trouva qui seule estoit,
Demanda qui la conduisoit :
« Çaienz n'a nus herbergement,
Se il ne l'a par jugement :
Ensorquetot, par seint Alain,
Nos n'avons cure de vilain,
Quar vilains ne vient en cest estre.
Plus vilains de vos n'i puet estre,
Çà, » dit l'ame, « beau sire Pierre ;
Toz jorz fustes plus durs que pierre.
Fous fu, par seinte paternostre,
Dieus, quant de vos fist son apostre ;
Que petit i aura d'onnor,
Quant renoias Nostre Seignor ;
Mout fu petite vostre foiz,
Quant le renoiastes .III. foiz;
Si estes de sa compaignie,
Paradis ne vos affiert mie.
Alez fors, or tost, desloiaus,
Quar ge sui preudons et loiaus ;
Si doi bien estre par droit conte. »
Seins Pierres ot estrange honte ;
Si s'en torna isnel le pas
Et a encontré seint Thomas ;
Puis li conta tot à droiture
Trestote sa mesanventure,
Et son contraire et son anui.
Dit seinz Thomas : « G'irai à lui,
N'i remanra, ja Dieu ne place! »
Au vilain s'en vient en la place :
« Vilains, » ce li dist li apostres,
« Cist manoirs est toz quites nostres,
Et as martirs et as confès;
En quel leu as tu les biens fais
Que tu quides çaienz menoir?
Tu n'i puez mie remanoir,
Que c'est li osteus as loiaus.
Thomas, Thomas, trop es isneaus
De respondre comme legistres;
Donc n'estes vos cil qui deïstes
As apostres, bien est seü,
Quant il avoient Dieu veü
Enprès le resuscitement ?
Vos feïstes vo sei rement
Que vos ja ne le querriez
Se ses plaies ne sentiez;
Faus i fustes et mescreanz. »
Seinz Thomas fut lors recreanz
De tencier, si baissa le col;
Puis s'en est venuz à seint Pol,
Si li a conté le meschief.
Dit seinz Pols : « G'irai, par mon chief,
Savoir se il vorra respondre. »
L'ame n'ot pas poor de fondre,
Aval paradis se deduit :
« Ame, » fait il, « qui te conduit ?
Où as tu faite la deserte
Por quoi la porte fu ouverte ?
Vuide paradis, vilains faus !
Qu’est ce ? » dit il, « danz Pols li chaus,
Estes vos or si acoranz
Qui fustes orribles tiranz ?
Jamais si cruels ne sera ;
Seinz Etienes le compara,
Que vos feïstes lapider.
Bien sai vo vie raconter ;
Par vos furent mort maint preudome.
Dieus vos dona en son le some
Une buffe de main enflée.
Du marchié ne de la paumée
N’avon nos pas beü le vin ?
Haï, quel seint et quel devin !
Cuidiez que ge ne vos connoisse ? »
Seinz Pols en ot mout grant angoisse.
Tornez s’en est isnel le pas,
Si a encontré seint Thomas
Qui à seint Pierre se conseille ;
Si li a conté en l’oreille
Du vilain qui si l’a masté :
« En droit moi a il conquesté
Paradis, et ge li otroi. »
A Dieu s’en vont clamer tuit troi.
Seinz Pierres bonement li conte
Du vilein qui li a dit honte :
« Par paroles nos a conclus ;
Ge meïsmes sui si confus
Que jamais jor n’en parlerai. »
Dit Nostre Sire : « Ge irai,
Quar oïr vueil ceste novele. »
A l’ame vient et si l’apele,
Et li demande con avint
Que là dedenz sanz congié vint :
« Çaiens n’entra oncques mès ame
Sanz congié, ou d’ome ou de feme ;
Mes apostres as blastengiez
Et avilliez et ledengiez,
Et tu quides ci remanoir !
Sire, ainsi bien i doi menoir
Con il font, se jugement ai,
Qui onques ne vos renoiai,
Ne ne mescreï vostre cors,
Ne par moi ne fu oncques mors ;
Mais tout ce firent il jadis,
Et si sont or en paradis.
Tant con mes cors vesqui el monde,
Neste vie mena et monde ;
As povres donai de mon pain ;
Ses herbergai et soir et main,
Ses ai à mon feu eschaufez ;
Dusqu’à la mort les ai gardez,
Et les portai à seinte yglise ;
Ne de braie ne de chemise
Ne lor laissai soffrete avoir ;
Ne sai or se ge fis savoir ;
Et si fui confès vraiement,
Et reçui ton cors dignement :
Qui ainsi muert, l’en nos sermone
Que Dieus ses pechiez li pardone.
Vos savez bien se g’ai voir dit :
Çaienz entrai sanz contredit ;
Quant g’i sui, por quoi m’en iroie ?
Vostre parole desdiroie,
Quar otroié avez sanz faille
Qui çaienz entre ne s’en aille ;
Quar voz ne mentirez par moi.
Vilein, » dist Dieus. « et ge l’otroi ;
Paradis a si desresnié
Que par pledier l’as gaaingnié ;
Tu as esté à bone escole,
Tu sez bien conter ta parole ;
Bien sez avant metre ton verbe. »
Li vileins dit en son proverbe
Que mains hom a le tort requis
Qui par plaidier aura conquis ;
Engiens a fuxée droiture,
Fauxers a veincue nature ;
Tors vait avant et droiz aorce :
Mielz valt engiens que ne fait force.
LXXXII
LE TESTAMENT DE L’ASNE
ui vuet au siecle à honeur vivre
Et la vie de seux[30] ensuyvre
Qui béent à avoir chevance,
Mout trueve au siecle de nuisance
Qu’il at mesdizans davantage,
Qui de ligier li font damage,
Et si est touz plains d’envieux.
Ja n’iert tant biaux ne gracieux,
Se dix en sunt chiez lui assis,
Des mesdizans i aura sis
Et d’envieux i aura nuef ;
Par derrier nel[31] prisent .I. oef
Et par devant li font teil feste
Chacuns l’encline de la teste.
Coument n’auront de lui envie
Cil qui n’amandent de sa vie,
Quant cil l’ont qui sont de sa table
Qui ne li sont ferm ne estable[32] ?
Ce ne puet estre, c’est la voire.
Je le vos di por .I. prouvoire
Qui avoit une bone esglise ;
Si ot toute s’entente mise
A lui chevir et faire avoir ;
A ce ot tornei son savoir.
Asseiz ot robes et deniers,
Et de bleif toz plains ces greniers,
Que li prestres savoit bien vendre
Et pour bien[33] la vendue atendre
De Paques à la saint Remi,
Et si n’eüst si boen ami
Qui en peüst riens née traire,
S’om ne li fait à force faire.
Un asne avait en sa maison,
Mais teil asne ne vit mais hom,
Qui vint ans entiers le servi ;
Mais ne sai s’onques teil serf vi.
Li asnes morut de viellesce,
Qui mout aida à la richesce.
Tant tint li prestres son cors chier
C’onques nou laissat acorchier,
Et l’enfoy ou semetiere ;
Ici lairai ceste matiere.
L’evesques ert d’autre maniere,
Que covoiteux ne eschars n’iere,
Mais cortois et bien afaitiez,
Que, c’il fust jai bien deshaitiez
Et veïst preudome venir,
Nuns nel peûst el lit tenir ;
Compeignie de boens crestiens
Estoit ces droiz fisiciens ;
Touz jors estoit plainne sa sale.
Sa maignie n’estoit pas male,
Mais, quanque li sires voloit,
Nuns de ces sers ne s’en doloit.
Cil ot mueble, ce fut de dete,
Car qui trop despent, il s’endete.
Un jour grant compaignie avoit
Li preudons, qui toz biens savoit ;
Si parla l’en de ces clers riches,
Et des prestres avers et chiches,
Qui ne font bontei ne honour
A evesque ne à seignour.
Cil prestres i fut emputeiz,
Qui tant fut riches et monteiz ;
Ausi bien fut sa vie dite
Con c’il la veïssent escrite.
Et li dona l’en plus d’avoir
Que troi n’em peüssent avoir,
Car hom dit trop plus de la choze
Que on n’i trueve à la parcloze :
« Ancor at il teil choze faite,
Dont granz monoie seroit traite,
S’estoit qui la meïst avant, »
Fait cil qui vuet servir devant,
« Et c’en devroit grant guerredon.
— Et qu’a il fait, » dit li preudom ?
— Il at pis fait c’un Beduyn[34],
Qu’il at son asne Bauduyn[35]
Mis en la terre beneoite.
— Sa vie soit la maleoite ! »
Fait l’esvesque ; « se ce est voirs,
Honiz soit il et ces avoirs.
Gautier, faites le nos semondre,
Si orrons le prestre respondre
A ce que Robers li mest seure ;
Et je di, se Deus me secueure[36],
Se c’est voirs, j’en aurai l’amende.
— Je vos otroi que l’en me pande
Se ce n’est voirs que j’ai contei,
Si ne vos fist onques bontei. »
Il fut semons, li prestres vient,
Venuz est, respondre couvient
A son evesque de cest quas
Dont li prestres doit estre quas :
« Faux, desleaux, Deu anemis.
Où aveiz vos vostre asne mis ? »
Dist l’esvesques. « Mout aveiz fait
A sainte Esglise grant meffait ;
Onques mais nuns si grant n’oy,
Qui aveiz vostre asne enfoy
Là où on met gent crestienne.
Par Marie l’Egyptienne,
Cil puet estre choze provée
Ne par la bone gent trovée.
Je vos ferai metre en prison,
C’onques n’oy teil mesprison. »
Dit li prestres : « Biaus trés dolz sire,
Toute parole se lait dire ;
Mais je demant jor de conseil,
Qu’il est droiz que je me conseil
De ceste choze, c’il vos plait,
Non pas que je i bée en plait.
— Je vuel bien le conseil aiez,
Mais ne me tieng paz apaiez
De ceste choze, c’ele est voire.
— Sire, ce ne fait pas à croire. »
Lors se part li vesques dou prestre,
Qui ne tient pas le fait à feste ;
Li prestres ne s’esmaie mie,
Qu’il seit bien qu’il at bone amie,
C’est sa borce, qui ne li faut,
Por amende ne por defaut.
Queque foz dort et termes vient,
Li termes vint, et cil revient.
.XX. livres en une corroie,
Touz sès et de bone monoié,
Aporta li prestres o soi ;
N’a garde qu’il ait fain ne soi.
Quant l’esvesque le voit venir,
De parleir ne se pot tenir :
« Prestres, consoil aveiz eü :
Qu’i aveiz votre senz beü ?
— Sires, consoil oi ge cens faille,
Mais à consoil n’afiert bataille,
Ne vos en devez mervillier
Qu’à consoil doit on concillier ;
Dire vos vueul ma conscience,
Et, c’il i afiert penitance,
Ou soit d’avoir, ou soit de cors,
Adons si me corrigiez lors. »
L’evesques si de li s’aprouche
Que parleir i pout bouche à bouche,
Et li prestres lieve la chiere,
Qui lors n’out pas monoie chiere ;
Desoz sa chape tint l’argent,
Ne l’ozat montreir pour la gent ;
En conciliant conta son conte :
« Sire, ci n’afîert plus lonc conte,
Mes asnes at lonc tans vescu,
Mout avoie en li boen escu ;
Il m’at servi et volentiers
Mout loiaument .XX. ans entiers ;
Se je soie de Dieu assoux,
Chacun an gaiaingnoit .XX. soux
Tant qu’il ot espairgnié .XX. livres.
Pour ce qu’il soit d’enfer delivres
Les vos laisse en son testament. »
Et dist l’esvesques : « Dieus l’ament,
Et si li pardoint ces meffais
Et toz les pechiez qu’il a fais. »
Ensi con vos aveiz oy,
Dou riche prestre s’esjoy
L’evesques ; por ce qu’il mesprit
A bontei faire li aprist.
Rutebues nos dist et enseigne,
Qui denier porte à sa besoingne
Ne doit douteir mauvais lyens ;
Li asnes remest crestiens.
Atant la rime vos en lais
Qu’il paiat bien et bel son lais.
- ↑ LXXX. — Du Vilain au buffet, p. 199.
A. — Paris, Bibl. nat., Mss. fr. 837, fol. 275 vo à 277 ro.
B. — » » » 1553, fol. 505 ro à 506 ro.
C. — » » » 1593, fol. 118 vo à 120 vo.
Publié par Barbazan, II, 155 ; par Méon, III, 264-272, et imité par Legrand d’Aussy, II, 358-362.
- ↑ Vers 1 — B, De biaus dis.
- ↑ 2 — * avoier. A, amoier. — C, avoie. — B, Me vaurai mout bien amoier.
- ↑ 3 — B, Et dire. — l’en. B, C, on.
- ↑ 4 — B, Et tant faire c’on.
- ↑ 5 — B, Car cil.
- ↑ 8 — A, B, Est au bien entendre.
- ↑ 9-10 — Ces vers manquent dans A et B.
- ↑ 11 — A, Et li fel envieus trahitres. B, Et li mauvais fel et traïtres.
- ↑ 12 — B, Est tout adiès dolans et tristres.
- ↑ 13 — le bien. C, les biens. — B, Dou bien quant il ot.
- ↑ 15-26 — Ces vers manquent à B.
- ↑ 16 — Oiez. C, Ha, Dieus !
- ↑ 18 — C, Dont .I. seul à estout ne vint.
- ↑ LXXXI. — Du Vilain qui conquist paradis par plait, p. 209.
A. — Paris, Bibl. nat., Mss. fr. 837, fol. 228 vo à 229 ro.
B. — » » » 19152, fol. 47 ro à 47 vo.
C. — Bibl. de Berne, Mss. 354, fol. 143 vo à 145 ro.
Nous empruntons les variantes du ms. de Berne à la copie de la Bibliothèque nationale (coll. Moreau, 1720 ; Moreau, 46).
Publié par Méon, IV, 114-119, et avec traduction par Eug. Crépet, Poëtes français, I, 239-247 ; traduit par Legrand d’Aussy, II, 238-242.
- ↑ Vers 3 — A, C, d’un.
- ↑ 5 — A, C, Tele.
- ↑ 6 — A, « Qu[e] » manque.
- ↑ 8 — A, Quant li parti l’ame. C, Que l’ame se parti.
- ↑ 10 — A, Ne qui rien nule.
- ↑ 11 — « fu » manque à B. — C, est pooreuse.
- ↑ 12 — C, estait doteuse.
- ↑ 13 — A, Regarde à destre. C, Garde sor destre.
- ↑ 14 — A, C, S’a veü l’angle.
- ↑ 15 — A, Qui une ame porte.
- ↑ 16 — A, Cele part. C, Après lui. — A, C, a tenu sa voie.
- ↑ 17 — C, Tant seust l’ange, ce m’est avis. — Les vers 17-22 sont remplacés dans A :
Sains Pieres, qui gardoit l’entrée,
Avoit la porte desfermée ;
Et prist l’ame que l’angles porte.
Puis s’en retorne vers la porte. - ↑ 19-22 — Ces vers sont remplacés dans C :
L’ame est après leanz entrée;
Saint Peres, qui gardoit l’entrée,
Reçut l’ame que range[s] (a)porte :
Après retorna vers la porte. - ↑ LXXXII. — Le Testament de l’Asne, p. 215.
Publié par Barbazan, I, 113 ; par Méon, III, 70-75 ; par Ach. Jubinal, Œuvres complètes de Rutebeuf, 2e éd., II, 78-85, et traduit par Legrand d’Aussy, III, 105-107.
- ↑ Vers 2 — Il est à remarquer que dans ce fabliau, ainsi que dans le suivant, provenant du même ms., la notation de c pour s est assez fréquente.
- ↑ 12 — * nel ; ms., ne. — * oef ; ms., oes.
- ↑ 18 — * estable ; ms., metable.
- ↑ 28 — « bien » manque au ms.
- ↑ 77 — Le mot « Bédouin », employé à l’époque de ce fabliau, nous prouve qu’alors il avait déjà le sens extensif que le peuple lui donne aujourd’hui.
- ↑ 78 — « Baudoin » est le nom donné par tout le moyen âge au baudet. Chaque animal avait son surnom : l’ours s’appelait Bernart (de nos jours Martin), le moineau Drouineau, le goupil Renart (qui est resté), etc.
- ↑ 86 — * secueure; ms., secoure.
Ce récit, un des plus répandus dans la littérature populaire, doit certainement venir d’Orient, d’où Le Sage l’a fait passer dans son Gil Blas (liv. V, ch. I). Dans ce cas, il s’agit non d’un âne et d’un prêtre, mais d’un chien et d’un cadi. Quant à l’histoire des Mille et une Nuits dont parle Legrand d’Aussy, nous ne la connaissons pas. Les Contes secrets russes (voy. p. 334-335) nous offrent deux versions de ce conte (p. 104, conte 48e) : dans l’une, il s’agit d’un chien, et dans l’autre d’un bouc. Les autres imitations sont du reste nombreuses : Malespini (nov. 59), le Pogge et d’autres encore (Cf. Legrand d’Aussy, III, 107).
LXXXIII
DE CHARLOT LE JUIF
ui menestreil vuet engignier,
Mout en porroit mieulz bargignier ;
Car mout soventes fois avient
Que cil por engignié se tient
Qui menestreil engignier cuide,
Et s’en trueve sa bource vuide ;
Ne voi nelui cui bien en chiée.
Por ce devroit estre estanchiée
La vilonie c’om lor fait,
Garson et escuier forfait,
Et teil qui ne valent deux tiennes.
Por ce le di, qu’à Aviceinnes[2]
Avint, n’a pas .I. an entier,
A Guillaume[3] le Penetier.
Cil Guillaumes, dont je vos conte,
Qui est à monseigneur le conte
De Poitiers, chassoit, l’autre jour,
.I. lievre qu’il ert à sejour.
Li lievres, qui les chiens douta,
Mout durement se desrouta ;
Asseiz foï et longuement,
Et cil le chassa durement ;
Asseiz corut, asseiz ala,
Asseiz guenchi et sà et là ;
Mais en la fin vos di ge bien
Qu’à force le prirent li chien.
Pris fu sire Coars, li lievres ;
Mais li roncins en ot les fievres,
Et sachiez que mais ne les tremble ;
Escorchiez en fu, ce me semble.
Or pot cil son roncin ploreir,
Et metre la pel essoreir ;
La pel, se Dieus me doint salu,
Couta plus qu’ele ne valu.
Or laisserons esteir la pel,
Qu’il la garda et bien et bel
Jusqu’à ce tens que vos orroiz,
Dont de l’oïr vos esjorroiz.
Par tout est bien choze commune,
Ce seit chacuns, ce seit chacune,
Quant .I. hom fait noces ou feste,
Où il a genz de bone geste,
Li menestreil, quant il l’entendent,
Qui autre choze ne demandent,
Vont là, soit amont, soit aval.
L’un à pié, l’autres à cheval.
Li couzins Guillaume en fit unes
Des noces, qui furent communes,
Où asseiz ot de bele gent,
Dont mout li fut et bel et gent.
Se ne sai ge combien i furent ;
Asseiz mangerent, asseiz burent,
Asseiz firent et feste et joie ;
Je meïsmes, qui i estoie,
Ne vi piesa si bele faire
Ne qui autant me peüst plaire,
Se Dieus de ces biens me reparte.
N’est si grans cors qui ne departe ;
La bone gent c’est departie,
Chacuns s’en va vers sa partie ;
Li menestreil, trestuit huezei,
S’en vindrent droit à Pespouzei ;
Nuns n’i fu de parleir laniers :
« Doneiz nos maitres ou deniers, »
Font il, « qu’il est drois et raisons ;
S’ira chacuns en sa maison. »
Que vos iroie je dizant,
Ne mes paroles esloignant ?
Chacuns ot maitre, nès Challoz[4]
Qui n’estoit pas mout biauz valloz.
Challoz ot à maitre celui
Cui[5] li lievres fist teil anui ;
Ces lettres li furent escrites,
Bien saellées et bien dites ;
Ne cuidiez pas que je vos boiz.
Challoz en est venuz au bois,
A Guillaume ces lettres baille ;
Guillaumes les resut cens faille,
Guillaumes les commance à lire,
Guillaumes li a pris à dire :
« Challot, Challot, biauz dolz amis,
Vos estes ci à moi tramis
Des noces mon couzin germain ;
Mais je croi bien, par saint Germain,
Que vos cuit teil choze doneir,
Que que en doie gronsonneir.
Qui m’a coutei plus de .C. souz,
Se je soie de Dieu assouz. »
Lors a apelei sa maignie,
Qui fu sage et bien enseign ie ;
La pel d’un lievre rova querre,
Por cui il fist maint pas de terre ;
Cil l’aportent grant aleüre,
Et Guillaumes derechief jure :
« Charlot, se Dieus me doint sa grace,
Ne se Dieux plus grant bien me face,
Tant me cousta com je te di.
— Hom n’en auroit pas samedi, »
Fait Charlos, « autant au marchié,
Et s’en aveiz mainz pas marchié.
Or voi ge bien que marcheant
Ne sont pas toz jors bien cheant. »
La pel prent qui cil li tendi,
Onques graces ne l’en rendi,
Car bien saveiz, n’i ot de quoi ;
Pencis le veïssiez et quoi,
Pencis s’en est issus là fuer,
Et si pence dedens son cuer,
Se il puet, qu’il li vodra vendre,
Et il li vendi bien au rendre.
Porpenceiz c’est que il fera,
Et comment il li rendera.
Por li rendre la felonie,
Fist en la pel la vilonie,
Vos savez bien ce que vuet dire.
Arier vint, et li dist : « Biau sire,
Se ci a riens, si le preneiz.
— Or, as tu dit que bien seneiz.
Oïl, foi que doi Notre Dame,
Je cuit c’est la coiffe ma famé.
Ou sa toaille, ou son chapel ;
Je ne t’ai donei que la pel. »
Lors a boutei sa main dedens ;
Eiz vos l’escuier qui ot gans,
Qui furent punais et puerri,
Et de l’ouvrage maistre Horri[6].
Ensi fu .II. fois conciliez ;
Dou menestreil fu espiez,
Et dou lievre fu mal bailliz
Que ces chevaus l’en fu failliz.
Rutebuez dit, bien m’en souvient :
Qui harat quiert, baraz li vient.
- ↑ LXXXIII. — De Charlot le Juif, p. 222.
Publié par Barbazan, I, 140 ; par Méon, III, 87-91 ; par Ach. Jubinal, Œuvres complètes de Rutebeuf, 2e éd., II, 98-104, et donné en extrait par Legrand d’Aussy, III, 90-92.
- ↑ Vers 12 — « Aviceinnes », sans doute Vincennes, demeure d’Alphonse de Poitiers (Cf. v. 17-18). — Peut-être faut-il lire que à Vincennes.
- ↑ 14 — Ce Guillaume, grand panetier d’Alphonse, était dans doute un des ennemis de Rutebeuf.
- ↑ 69 — Le Charlot dont il est ici question, et que Rutebeuf a mis en scène une autre fois encore (Desputoison de Challot et du Barbier, Œuvres…, II, 8-14), devait être un trouvère rival de l’auteur, qui ne trouve pas de meilleure insulte que de le traiter de juif (Cf. II, 12).
- ↑ 72 — * Cui ; ms., Qui.
- ↑ 126 — « Maistre Horri », auquel Rutebeuf fait encore allusion dans sa Complainte, est sans doute ce
qu’Ach. Jubinal en a fait (I, 19). Les fosses d’aisance, et par suite les vidanges, étaient choses connues au moyen âge (Cf. A. Giry, Histoire de Saint-Omer, 262).
Nous retrouvons quelques ressemblances avec ce fabliau dans le conte 75e (p. 192) des Contes secrets russes (voy. p. 334-335). Il s’agit d’une mésaventure dans le genre de celle qui arrive à Guillaume.
LXXXIV
DU BOUCHIER D’ABEVILE
et 2168, fol. 209 vo à 213 vo ;
Bibl. de Pavie, Mss. 130 E 5, fol. 50 ro à 53 vo.
eignor, oiez[1] une merveille,
C’onques n’oïstes sa pareille[2],
Que je vous vueil dire et conter[3] ;
Or metez cuer à l’escouter.
Parole qui n’est entendue,
Sachiez de voir, ele[4] est perdue.
A Abevile ot .I. bouchier.
Que si voisin orent mout chier ;
N’estoit pas fel ne mesdisanz[5],
Mès sages, cortois[6] et vaillanz
Et loiaus hom de son mestier,
Et s’avoit sovent grant mestier
Ses povres voisins soufraiteus ;
N’estoit avers ne covoiteus.
Entor feste Toz Sains avint
Qu’à Oisemont[7] au marchié vint
Li bouchiers bestes achater,
Mès ne[8] fist fors voie gaster ;
Trop i trova[9] chieres les bestes,
Les cochons felons et rubestes,
Vilains et[10] de mauves afere ;
Ne pot à els nul marchié fere ;
Povrement sa voie emploia,
Onques denier n’i emploia ;
Après espars marchié s’en torne,
De tost aler[11] mout bien s’atorne ;
Son sorcot[12] porte sor s’espée,
Quar près[13] estoit de la vesprée.
Oiez comment il esploita :
Droit à Bailluel[14] li anuita ;
En mi voie[15] de son manoir,
Quar tart estoit[16], si fist mout noir,
Penssa[17] c’ui mais avant n’ira.
En la vile herbregera[18] ;
Forment[19] doute la male gent
Que ne li[20] toillent son argent.
Dont il avoit à grant foison.
A l’entrée[21] d’une meson
Trueve[22] une povre fame estant.
Il la salue et[23] dist itant :
« A il en ceste vile à vendre
Riens nule où l’en peüst[24] despendre
Le sien, por son cors aaisier.
C’onques[25] n’amai autrui dangier ? »
La bone fame li respont :
« Sire, par Dieu qui fit le mont.[26]
Ce dist mes barons[27], sire Mile,
De vin n’a point en ceste vile.
Fors noz prestres sire Gautiers ;
A .II. toniaus sor ses chantiers[28]
Qui li vindrent[29] de Nojentel ;
Toz jors[30] a il vin en tonel ;
Alez à lui por ostel[31] prendre.
— Dame, g’i vois[32] sanz plus atendre, »
Dist li bouchiers[33], « et Dieus vous saut.
— A foi, sire, Dieus vous[34] consaut ! »
Atant s’en part, n’i vout plus estre ;[35]
Venuz est au manoir le prestre ;
Li doiens seoit sor son sueil.
Qui mout fu plains de grant orgueil.[36]
Cil[37] le salue, et puis li dist :
« Biaus sire, que[38] Dieus vous ait !
Herbregiez moi par charité.
Si ferez honor et bonté.
— Preudom, « fet il, « Dieus vous Herbert !
Quar, foi que doi à saint[39] Herbert,
Lais hom ceenz nuit[40] ne girra.
Bien ert qui[41] vos herbregera
En cele vile là aval ;
Querez tant à mont et à val[42]
Que vous puissiez ostel avoir,[43]
Quar je vous faz bien asavoir[44]
Ja ne girrez en cest[45] porpris.
Autre gent i ont[46] ostel pris,
Ne ce[47] n’est pas coustume à prestre
Que vilains hom gise en son estre.
— Vilains ! sire, qu’avez vous dit ?
Tenez vous lai homme en despit ?
— Oïl, » dist il[48], « si ai reson.
Alez en sus[49] de ma meson ;
Il m’est avis[50] ce soit ramposne.
— Non est, sire, ainz seroit aumosne,[51]
S’anuit mès[52] me prestiez l’ostel,
Que je n’en[53] puis trover nul tel.
Je sai mout bien[54] le mien despendre ;
Se rien nule[55] me volez vendre,
Mout volontiers l’achaterai,[56]
Et mout bon gré vous en saurai,[57]
Quar je ne vous vueil rien couster[58].
— Ausi bien te vendroit hurter[59]
Ta teste[60] à cele dure pierre, »
Ce dist li doiens ; « par saint Piere,
Ja ne girras[61] en mon manoir.
— Deable i puissent remanoir, »
Dist li[62] bouchiers, « fols chapelains ;
Pautoniers estes et vilains. «
Atant s’en part, ne[63] volt plus dire ;
Plains fu de grant[64] courouz et d’ire.
Oiez comment il li avint :[65]
Quant il fors[66] de la vile vint
Devant une gaste meson
Dont cheü furent[67] li chevron,
Encontre .I. grant tropé[68] d’oeilles.
Por Dieu, or escoutez merveilles.
Il demanda[69] au pastorel,
Qui mainte vache et maint torel
Avoit gardé en sa jonece :
« Paistres, que Dieus[70] te doint leece !
Cui cist avoirs ? — Sire le[71] prestre.
— De par Dieu, » fet il[72], « puist ce estre ? »
Or oiez[73] que li bouchiers fîst :
Si[74] coiement .I. mouton prist
Que[75] li paistres ne s’en perçut ;
Bien l’a engingnié et deçut.[76]
Maintenant à son col le rue ;
Par mi une foraine rue
Revient à l’uis le prestre arriere,[77]
Qui mout fu fel[78] de grant maniere,
Si comme il dut clorre la porte,[79]
Et cil, qui le mouton aporte,
Li dist : « Sire, cil Dieus vous saut.
Qui sor toz hommes puet et vaut ! »
Li doiens son salu li rent ;
Puis li demande isnelement[80] :
« Dont es tu ? — D’Abevile sui ;
A Oisemont au marchié fui ;
N’i achetai que cest[81] mouton.
Mès il[82] a mout cras le crepon ;
Se anuit[83] mès me herbregiez.
Que bien en estes aaisiez,[84]
Je ne[85] sui avers ne eschars ;
Anuit ert mengie[86] la chars
De cest mouton, por[87] qu’il vous plaise,
Quar aporté l’ai à malaise. »[88]
Li doiens pensse qu’il dit voir,
Qui mout goulouse[89] autrui avoir ;
Mieus aime .I. mort que .IIII. vis ;
Dist ainsi, comme il m’est[90] avis :
« Oïl[91] certes, mout volentiers ;
Se vous estiez ore vous tiers,[92]
S’auriez[93] vous ostel à talent ;
Ainz[94] nus hom ne me trova lent
De cortoisie et d’onor fere.
Vous me samblez mout debonere[95] ;
Dites moi comment avez non ?
— Sire, par Dieu et par son non,
J’ai non David en droit baptesme,
Quant je reçui et huile et cresme.
Traveilliez sui en ceste voie ;
Ja Dame Dieus celui ne voie,[96]
A foi, cui[97] ceste beste fu ;
Tans est huimès[98] d’aler au fu. »
Atant s’en vont[99] en la meson
Où le feu[100] estoit de seson.
Lors a sa beste mise jus,
Puis a regardé sus et[101] jus ;
Une coingnie a demandée.
Et on li a tost[102] aportée.
Sa beste tue[103] et puis l’escorce ;
Sor .I. banc[104] en geta l’escorce,
Puis le pendi[105], lor ieus voiant :
« Sire, por Dieu[106], venez avant ;
Por amor Dieu, or esgardez
Com cis moutons est amendez[107] ;
Veez comme est[108] cras et refais,
Mès mout m’en a pesé li fais,
Que de mout loing[109] l’ai aporté.
Or en fetes vo volonté ;
Cuisiez les espaules en rost ;[110]
S’en fetes metre plain un pot
En essau[111] avoec la mesnie,
Je ne di mie vilonie,
Ainz[112] mès plus bele char ne fu,
Metez le cuire[113] sor le fu ;
Veez comme est tendre et refete :[114]
Ainçois que la saveur[115] soit fete
Ert ele cuite voirement[116].
— Biaus ostes, fetes[117] vo talent ;
Sor vous ne m’en sai entremetre.
— Fetes donques[118] la table metre.
— C’est prest ; n’i a fors de laver[119]
Et des chandoiles alumer. »
Seignor, ne vous mentirai mie ;
Li doiens avoit une amie
Dont il si fort[120] jalous estoit,
Toutes les nuiz[121] qu’ostes avoit,
La fesoit en sa chambre entrer.
Mès cele nuit la fist souper
Avoec son oste liement.[122]
Servi furent mout richement
De bone char et de bon vin.
De blans dras, qui erent de lin,
Fist on fere au bouchier .I. lit ;
Mout ot leenz de son delit.
Li doiens sa meschine apele :
« Je te commant, » fet il, « suer bele,
Que noz ostes soit bien et aise[123].
Si qu’il[124] n’ait rien qui li desplaise. »
Atant se vont[125] couchier ensamble
Il et la dame, ce me samble,
Et li bouchiers remest au fu.
Ainz mès si aaisiez ne fu[126] ;
Bon[127] ostel ot et biau samblant :
« Bele suer[128], » fet il, « vien avant ;
Trai te en ça, si parole à moi[129],
Et si fai ton ami de moi[130] :
Bien i porras[131] avoir grant preu.
— Ostes, tesiez, ne dites preu[132] ;
Ja[133] n’apris onques tel afere.
— Par Dieu, or le te[134] covient fere
Par tel couvent que je dirai.[135]
— Dites le donc[136], et je l’orrai.
— Se tu veus fere mon plesir[137]
Et tout mon bon[138] et mon désir,
Par Dieu, que de vrai cuer apel.
De mon mouton auras la pel.
— Biaus ostes[139], jamès ce ne dites ;
Vous n’estes[140] mie droiz hermites,
Qui tel chose me requérez.
Mout estes de mal[141] apenssez ;
Dieu merci, com vous estes sos[142] ;
Vo bon feïsse, mès je n’os ;
Vous le diriez demain ma dame[143].
— Suer, se ja Dieus ait part en m’ame.
En ma vie[144] ne le dirai
Ne ja ne t’en encuserai[145]. »
Dont li a cele creanté[146]
Qu’ele fera sa volenté[147]
Toute la nuit, tant que jors fu.
Dont se leva et fist son fu.[148]
Son harnois, et puis[149] trest ses bestes.
Lors primes[150] s’est levez li prestres ;
Il et son clerc vont au moustier
Chanter et fere[151] lor mestier,
Et la dame remest dormant.[152]
Et ses ostes[153] tout maintenant
Se vest et chauce sanz demeure,
Quar bien en fu et tans[154] et eure.
En la chambre[155], sanz plus atendre,
Vint à la dame[156] congié prendre ;
La clique sache[157], l’uis ouvri ;
Et la dame[158] si s’esperi.
Ses ieus ouvri, son oste voit
Devant s’esponde trestout droit[159].
Lors li demande[160] dont il vient
Et de quel chose il li sovient :
« Dame, » fet il, « graces vous rent ;
Herbregié m’avez à talent
Et mout[161] m’avez biau samblant fait. »
Atant vers le[162] chevès se trait ;
Sa main mist sor[163] le chaveçuel
Et[164] tret arriere le linçuel ;
Si voit la[165] gorge blanche et bele,
Et la poitrine et la mamele[166] :
« E ! Dieus, » dist il[167], « je voi miracles ;
Sainte Marie, sainz[168] Romacles,
Comme est li doiens bien venuz
Qui o tel dame[169] gist toz nuz !
Que si[170] m’ait sainz Onorez,
Uns rois en fust[171] toz honorez.
Se j’avoie tant de loisir
Que g’i peüsse .I. poi[172] gesir,
Refez seroie et respassez.
— Biaus ostes, ce n’est mie[173] assez
Que vous dites ; par saint Germain,
Alez en sus[174], ostez vo main.
Mesires aura ja chanté ;[175]
Trop[176] se tendroit à engané
Se[177] en sa chambre vous trovoit ;
Jamès nul jor ne m’ameroit ;
Si m’auriez mal baillie et[178] morte. »
Et cil mout bel la reconforte :
« Dame, » fet il, « por Dieu merci,
James ne mouverai[179] de ci
Por nul homme vivant qui soit.
Nés se li doiens i venoit,
Por qu’il deïst une parole
Qui fust outrageuse ne[180] foie,
Je l’ocirroie[181] maintenant.
Mès or otroiez mon commant[182]
Et[183] fetes ce que je voudrai,
Ma piau lanue[184] vous donrai
Et grant plenté[185] de mon argent.
— Sire, je n’en ferai noient,[186]
Que je vous sent si à estout[187]
Que[188] demain le diriez partout.
— Dame, » dist il[189], « ma foi tenez
Tant com je soie vis[190] ne nez,
Ne le dirai fame ne homme,
Par toz les sainz qui sont à[191] Romme. »
Tant li dist et tant[192] li promet
La dame en sa merci se met,
Et li bouchiers bien s’en refet.
Et, quant il en ot son bon fet,[193]
D’iluec se part[194], n’i volt plus estre,
Ainz vint au moustier[195] où li prestre
Ot commencié une[196] leçon
Entre lui et .I. sien clerçon[197] ;
Si com il[198] dist : Jube, Domne,
Ez le vous el moustier entré :
« Sire, » fet il, « graces vous rent[199] ;
Ostel ai eu à talent,[200]
Mout me lo de vo[201] beau samblant,
Mès une chose vous demant
Et vous pri que vous le faciez,[202]
Que vous ma pel[203] achatissiez ;
Si m’auriez[204] delivré de paine ;
Bien il a .III. livres[205] de laine ;
Mout est[206] bone, si m’aït Dieus ;
.III. sols vaut ; vous l’aurez por deus[207],
Et mout bon gré vous en saurai.
— Biaus ostes, et je le ferai
Por l’amor de vous volentiers ;[208]
Bons compains estes et entiers ;
Revenez moi veoir sovent. »
Sa pel meïsme cil li vent ;
Congié demande, si s’en va.[209]
Et la dame lors[210] se leva,
Qui mout ert[211] jolie et mingnote ;
Si se vest d’une verde[212] cote
Mout bien[213] faudée à plois rampanz.
La dame ot escorcié ses[214] panz
A sa çainture par orgueil :
Cler et[215] riant furent si oeil ;
Bele, plaisans ert à devise,[216]
En le caiere s’est assise.
Et la baissele, sanz atendre,[217]
Vint[218] à la pel ; si la vout prendre,
Quant la dame li desfendi :
« Di va, » fet ele, « et quar[219] me di ;
Qu’as tu de cele pel à fere ?
— Dame, j’en ferai mon afere[220] ;
Je la vueil au soleil porter
Por le cuirien fere essuer[221].
— Non feras ; lai le toute coie,
Ele pendroit trop sor la voie,[222]
Mès fai[223] ce que tu as à fere.
— Dame, » dist el[224], « je n’ai que fere ;
Je levai plus matin de vous[225],
Al foi[226], maugré en aiez vous,
Vous en deüssiez bien parler.
— Trai te en sus ; lai la pel ester ;
Garde que plus la main[227] n’i metes
Ne que plus ne t’en entremetes.
— En non Dieu, dame[228], si ferai ;
Toute m’en entremeterai ;[229]
J’en ferai comme[230] de la moie.
— Dis tu donques que ele est toie ?[231]
— Oïl, je le di[232] voirement.
— Met jus la pel, va, si te pent,
Ou tu ailles en la[233] longaingne.
Mout me torne ore à grant[234] engaingne
Quant tu[235] deviens si orguilleuse ;
Pute, ribaude, pooilleuse,
Va tost[236], si vuide ma meson.
— Dame, vous dites[237] desreson,
Qui[238] por le mien me ledengiez :
Se vous seur[239] sainz juré l’aviez.
S’est ele moie[240]. — Toutevoie
Vuide l’ostel, va, si te[241] noie ;
Je n’ai cure[242] de ton service,
Que trop[243] es pautoniere et nice :
Se mesires juré l’avoit,
Ceenz ne te garantiroit ;
Si t’ai je ore[244] cueilli en hé.
— Par mi le col[245] ait mal dehé
Qui jamès jor vous servira.
J’atendrai tant que[246] il vendra,
Et puis après[247] si m’en irai ;
De vous à lui me clamerai.
— Clameras, pute, viens buinarde,[248]
Pullente, ribaude, bastarde !
— Bastarde ! dame, or dites mal[249] ;
Li vostre enfant sont mout loial.
Que vous avez du prestre eus[250] ?
— Par la passion Dieu, met[251] jus
La pel[252], ou tu le comparras.
— Mieus vous vendroit estre à Arras,
Par les sainz Dieu[253], voire à Coloingne. »
Et la dame prent[254] sa queloingne ;
.I. cop l’en done, et ele[255] crie :
« Par la vertu sainte Marie,
Mar m’i avez à tort[256] batue ;
La pel vous ert mout chier[257] vendue
Ainçois que je muire de mort. »
Lors pleure et fet .I. duel si fort[258].
A la noise et à la tençon
Entra li prestres[259] en meson :
« Qu’est ce, » dist il ? « Qui t’a ce[260] fet ?
— Ma dame, sire, sanz mesfet[261].
— Sans mesfet, voir, ne fu ce mie[262]
Qu’ele t’a fet tel vilonie.[263]
— Par Dieu, sire[264], por la pel fu
Qui là pent encoste ce fu ;[265]
Biaus sire, vous[266] me commandastes
Ersoir, quant vous couchier alastes,
Que nos[267] ostes sire Davis
Fust aaisiez[268] à son devis ;
Et je fis vo commandement,
Et il me dona vraiement[269]
La pel ; sor sainz le juerrai[270],
Que mout bien deservie l’ai[271]. »
Li doiens ot et aperçoit,
Aus paroles qu’ele disoit,
L’avoit ses ostes culonée[272] ;
Por ce li ot sa[273] pel donée ;
S’en fu[274] corouciez et plains d’ire,
Mès son pensser n’en osa[275] dire.
« Dame, » fet il, « se Dieus me saut,
Vous avez fet trop vilain saut ;
Petit me prisiez et doutez,
Qui ma mesnie me batez.
— Ba ! qu’ele veut ma[276] pel avoir.
Sire, se vos[277] saviez le voir
De la honte qu’ele m’a dite,
Vous l’en renderiez[278] la merite,
Qui[279] voz enfanz m’a reprovez.
Mauvesement vous en[280] provez,
Qui[281] soufrez qu’ele me ledange
Et honist toute par sa jangle.[282]
Je ne sai qu’il en avendra,[283]
Ja[284] ma pel ne li remaindra :[285]
Je di qu’ele n’est mie soie.
— Qui est ce donques ? — Par foi, moie.
— Vostre, voire[286] ! par quel reson ?
— Nostre[287] ostes jut en no meson
Sor ma coute, sor mes linceus ;[288]
Que[289] mau gré en ait sainz Aceus
Si volez ore tout savoir.
— Bele dame[290], or me dites voir ;
Par cele foi que me plevistes,[291]
Quant vous primes[292] ceenz venistes,
Cele pel doit ele estre vostre ?
— Oïl, par sainte patrenostre[293]. »
Et la baissele[294] dist adonques :
« Biaus sire[295], ne le creez onques ;
Ele me fu ainçois[296] donée.
— Ha ! pute, mal fusses tu[297] née !
On vous dona la passion.
Alez tost hors de ma[298] meson ;
Que male honte vous aviegne !
— Par le saint Signe de Compiegne[299],
Dame, » fet il[300], « vous avez tort.
— Non ai, quar je la haz[301] de mort,
Por ce qu’ele est[302] si menterresse.
Cele ribaude larronnesse.
— Dame, que vous ai je emblé ?
— Ribaude, mon orge[303] et mon blé.
Mes pois, mon lart, mon pain fetiz[304] ;
Certes, vous estes trop[305] chetiz
Qui ceenz l’avez tant soufferte[306] ;
Sire, paiez li sa deserte ;
Por Dieu, si vous en delivrez[307].
— Dame, » fet il, « or m’entendez[308] ;
Par saint Denis je veuil savoir
Laquele doit la pel avoir.
Cele pel, qui la vous dona[309] ?
— Nostre ostes[310], quant il s’en ala.
— Voir[311], por les costez saint Martin,
Il s’en ala dès hui[312] matin
Ainz que fust levez[313] li solaus.
Dieus ! com vous estes[314] desloiaus
Qui jurez si estoutement.[315]
— Ainz prist congié[316] mout bonement
Avant qu’il en deüst aler[317].
— Fu il donques à vo lever ?
— Nenil ; adonc[318] je me gisoie ;
De lui garde ne me donoie ;
Quant je le vi devant m’esponde…
Il estuet[319] que je vous desponde…
— Et que dist il au congié prendre ?
— Sire, trop me volez sorprendre[320]…
Il dist : « A Jhesu vous[321] commant. »
Adonc s’en parti à itant ;[322]
Ainz plus ne parla ne ne dist,[323]
Ne nule rien[324] ne me requist
Qui vous tornast à vilonie,
Mès vous i chaciez boiserie ;[325]
Onques ne fui de vous creüe,[326]
Et si n’avez en moi veüe,
Grace Dieu, se mout grant bien non,[327]
Mès vos i chaciez trahison.
Si m’avez en tel prison mise[328]
Dont ma char est tainte et remise ;[329]
De vostre ostel ne me remue ;[330]
Mise m’avez muer en mue ;
Trop ai esté en vo dangier
Por vo boivre, por vo mengier.
— Ahi ! » fet il, « foie mauvaise ;
Je t’ai norrie trop aaise ;
Près va que ne te bat et tue.[331]
Je sai de voir[332] qu’il t’a foutue ;
Di moi[333] por quoi ne crias tu ?
Il t’estuet rompre le festu ;
Va, si vuide tost[334] mon ostel,
Et je irai à[335] mon autel ;
Maintenant deseur[336] jurerai
Jamès en ton lit ne girrai. »[337]
Par mout grant ire s’est assis,[338]
Corouciez, tristes et penssis.[339]
Quant la dame aïré le voit,
Forment li poise qu’ele[340] avoit
Tencié ne estrivé à lui ;
Mout[341] crient que ne li face anui ;
En sa chambre s’en va atant,[342]
Et li paistres vient acourant[343],
Qui ses moutons avoit contez.
Ersoir l’en fu li uns emblez ;
Il ne set[344] qu’il est devenuz.
Grant aleüre en est venuz,
Frotant[345] ses hines, en meson.
Li prestres ert sor sa leson[346]
Mout[347] corouciez et eschaufez :
« Qu’est ce ? mal soies tu trovez,[348]
Mauves ribaus[349] ; dont reviens tu ?
Qu’est ce c’on fet ? Samblant fez tu,
Filz à putain, vilain rubestes ;
Or deüsses[350] garder tes bestes ;
Près va ne te[351] fier d’un baston.
— Sire, n’ai mie d’un[352] mouton.
Tout le meillor de[353] no tropé ;
Je ne sai qui le m’a emblé[354].
— As tu donques mouton perdu ?
On te deüst avoir pendu ;
Mauvesement les as gardez.
— Sire, » fet il[355], « or m’entendez :
Ersoir, quant en la vile entrai,[356]
.I. estrange homme i[357] encontrai
Que onques mès veü n’avoie
En champ, n’en vile, ne en voie.[358]
Qui mout mes bestes esgarda,[359]
Et mout m’enquist et demanda
Qui cis biaus avoirs pooit estre,
Et je li dis : « Sire no prestre ; »
Cil le[360] m’embla, ce m’est avis.
— Par les sainz Dieu[361], ce fu Davis,
Noz ostes, qui ceenz a jut ;
Bien m’a engingnié et deçut
Qui ma mesnie[362] m’a foutue ;
Ma pel meïsme m’a vendue ;[363]
De ma mance m’a ters mon nés ;[364]
En mal eure[365] fuisse jou nés.
Quant je ne m’en seuch[366] garde prendre !
On puet cascun jor mout aprendre :
De ma paste m’a fet[367] tortel.
En connoistroies tu[368] la pel ?
— Oïl, sire, foi que vous doi,[369]
Bien la connoistrai, se la voi ;[370]
Je l’ai eü .VII. anz en garde. »[371]
Cil prent la pel ; si la regarde ;
Aus oreilles et à la teste
Connut bien la pel de sa beste[372] :
« Haroul las, » dist[373] li pasturiaus ;
« Par Dieu, sire[374], c’est Cornuiaus,
La beste que je plus[375] amoie ;
En mon[376] tropé n’avoit si coie ;
Foi que je doi à saint Vincent,[377]
N’avoit si cras mouton en cent ;
Mieudres de lui ne pooit estre.
— Venez ça, dame[378], » dist le prestre,
« Et tu, baissele[379], vien avant ;
Parole à moi[380], je te commant ;
Respont à moi[381] quant je t’apel,
Que claimes tu en ceste pel[382] ?
— Sire, trestoute la pel cleim, »
Dist la meschine[383] au chapelain.
— Et vous, que dites, bele dame ?
— Sire, se Dieus ait part en m’ame[384],
Ele doit estre par droit[385] moie.
— Ele n’ert ne vostre, ne soie.
Je l’acatai de mon avoir ;[386]
Ele me doit bien remanoir.
Il m’en vint priier au moustier,
Là ù ge lisoie men sautier.
Par saint Pierre, le vrai apostre,
Ele n’iert ne soie ne vostre.
Se par jugement ne l’avés. »
Seignor, vous qui les biens savez,[387]
Huistaces[388] d’Amiens vous demande,
Et prie par amors, et mande[389]
Que vous faciez cest jugement[390].
Bien et à droit et leaument,[391]
Chascuns en die son voloir
Liquels doit mieus la pel avoir,
Ou li prestres, ou la prestresse,
Ou la meschine piprenesse.[392]
- ↑ LXXXIV. — Du Bouchier d’Abevile, p. 227.
A. — Paris, Bibl. nat., Mss. fr. 837, fol. 158 vo à 161 ro.
B. — » » » 2168, fol. 209 vo à 213 vo.
C. — Bibl. de Pavie, Mss. 130 E 5, fol. 50 ro à 53 vo.
Nous empruntons les variantes du ms. C (Bibl. de Pavie) à M. A. Mussafia, Sitzungsberichte der k. Akademie der Wissenschaften (de Vienne), Phil.-Hist. Classe, LXIV, 571-575.
Publié par Méon, IV, 1-19, et donné en extrait par Legrand d’Aussy, III, 288-291.
Vers 1 — C, Or entendez.
- ↑ 2 — C, Une mès.
- ↑ 3 — C, ci raconter.
- ↑ 6 — ele. C, qu’elle. — B, Sachiés qu’ele est enfin.
- ↑ 9-14 — Ces vers manquent à C.
- ↑ 10 — B, Mais cortois, sages.
- ↑ 16 — « Oisemont », Picardie, près d’Amiens.
- ↑ 18 — ne. B, n’i.
- ↑ 19 — C, Car trop trouva.
- ↑ 21 — B, Felons et. — C, Et cuvers et de pute.
- ↑ 26 — B, De to(r)st errer. — C, De bien errer sa voie atourne.
- ↑ 27 — B, C, Se cape. — sor. C, sus.
- ↑ 28 — B, C, Et près.
- ↑ 30 — « Bailleul » dans la Flandre française est souvent cité par les trouvères de cette région. Nous avons un fabliau qui porte le titre de « Vilain de Bailleul ».
- ↑ 31 — A, voies.
- ↑ 32 — B, C, il vespre fu. — C, et mout fist noir.
- ↑ 33 — C, Pense. — c’ui mais. A, soi plus.
- ↑ 34 — B, C, Mais… remanra.
- ↑ 35 — B, Molt. C, Qu’il. — B, C, redoute.
- ↑ 36 — C, Qu’il ne. — B, C’on ne li toille.
- ↑ 38 — B, En l’entrée.
- ↑ 39 — B, Vit. C, Ot.
- ↑ 40 — B, Si li demanda et. C, Il li demande et li. — B, C, dist tant.
- ↑ 42 — B, Nule riens où on puist. C, Riens nulle c’on puisse.
- ↑ 44 — C, Onques.
- ↑ 46 — B, C, Sire, par tous les sains du mont.
- ↑ 47 — A, mon baron. C, mes maris.
- ↑ 50 — B, .II. touniaus en a tous entiers.
- ↑ 51 — B, Qu’il amena de. C, Qu’il acheta à. — « Nogentel », en Brie.
- ↑ 52 — C, Touz temps.
- ↑ 53 — B, Alés avec lui ostel. C, Alez avec li l’ostel.
- ↑ 54 — B, C, g’irai.
- ↑ 55 — B, C, Fait li bouchiers. — C, Dieus vous consaut.
- ↑ 56 — B, C, et il vous. — B, consaut. C, [con]saut.
- ↑ 57-58 — Ces vers manquent à B et C.
- ↑ 60 — B, C, Qui molt avoit en li d’orguel.
- ↑ 61 — Cil. C, Il. — puis. B, se. C, si.
- ↑ 62 — que. B, se. — C, Sire, Dieus vous doint bone nuit.
- ↑ 66 — B, C, Foi que jou doi à saint. — B, Hebert. C, Lambert.
- ↑ 67 — nuit. A, ja.
- ↑ 68 — C, Querez qui.
- ↑ 70 — C, Querez à mont, querez à val.
- ↑ 71-74 — Ces vers manquent à C.
- ↑ 72 — B, Et sachiés vraiement por voir.
- ↑ 73 — cest. B, mon.
- ↑ 74 — i ont. B, ont cest.
- ↑ 75 — C, Que ce. — B, n’est [pas] droiture à prestre.
- ↑ 79 — B, Oie voir et. C, Oïl, sire.
- ↑ 80 — C, Alés vous ent.
- ↑ 81 — B, Ce m’est avis. — C, que c’est. — B, ramprosne.
- ↑ 82 — C, A ! sire, ainz seroit grant.
- ↑ 83 — B, Se huimais. C, S[e] umès.
- ↑ 84 — B, Car je n’en.
- ↑ 85 — B, Que je sai bien. C, Car je sai bien.
- ↑ 86 — B, C, Se de vo vin.
- ↑ 87 — B, C, Grasses et grés vos en saroie.
- ↑ 88 — B, Et volentiers l’acateroie. C, Et volentiers le poieré.
- ↑ 89 — B, Ausi bien vous venroit hurler. C, Rienz nule ne vous voeil couster.
- ↑ 90 — B, Dist li diens, « par saint Omer.
- ↑ 91 — B, Vo teste. — dure. B, C, bise.
- ↑ 93 — B, Ja ne gerrés.
- ↑ 95 — B, Fait li.
- ↑ 97 — ne. B, n’i.
- ↑ 98 — de grant. C, et de.
- ↑ 99 — B, Or oiés comment li avint.
- ↑ 100 — B, Si com hors.
- ↑ 102 — B, furent keü. C, cheü erent.
- ↑ 103 — C, tropel.
- ↑ 105 — B, Il salue le.
- ↑ 108 — B, C, se Dius.
- ↑ 109 — le. B, no. — C, Cui est cis avoirs ? — A no prestre.
- ↑ 110 — B, A foi de par Dieu. C, De par Damedieu.
- ↑ 111 — B, Or orrés.
- ↑ 112 — B, Tout.
- ↑ 113 — B, K’ains. — C, ne l’aperçut.
- ↑ 114 — Après ce vers, B ajoute :
Qui ne le vit ne mot n’en seut ;
Li bouchiers au plus tost qu’il peut.Et C :
Ains ne le vit ne ne le sot,
Et le boucher plus tost qu’il pot. - ↑ 117 — B, Au més le prestre en vient. C, S’en vet chiés le doien(s).
- ↑ 118 — fu fel. B, C, ert fiers.
- ↑ 119 — B intervertit à tort les mots « clorre » et « la porte ».
- ↑ 124 — B, demanda erranment.
- ↑ 127 — que cest. B, c’un seul.
- ↑ 128 — il. B, chieus.
- ↑ 129 — B, C, Sire, anuit.
- ↑ 130 — B, Car bien [en] voel estre.
- ↑ 131 — ne, B, ni.
- ↑ 132 — C, en soit mengié.
- ↑ 133 — por. B, mais.
- ↑ 134 — B, Caporté l’ai à grant. C, Aporté l’ai à grant.
- ↑ 136 — goulouse. C, couvoite.
- ↑ 138 — B, Ensi con moi en est. — « Dist » manque à C.
- ↑ 139 — Oïl. B, Oie. — C, « Certes, » fet il.
- ↑ 140 — C, Mès que vous y fussiez vous tiers.
- ↑ 141 — B, Si ariés. — C remplace ce vers et le suivant par quatre autres :
Vous herbergeré voirement :
S’aurez ostel à vo talent. »
Aine nus homs mieus ne se prova
Com li doiens celui fet a. - ↑ 142 — B, C’ainz.
- ↑ 144 — B, C, de bon afaire.
- ↑ 150 — B, Ja Dieus de ses sains ieus. C, Que ja Dieus de ses ieus.
- ↑ 151 — B, C, Celui cui.
- ↑ 152 — B, C, Huimais. — B, seroie près du fu. C, se treront vers le fu.
- ↑ 153 — B, C, entrent.
- ↑ 154 — B, Là u li fus (faux).
- ↑ 156 — C, Regardé a et sus.
- ↑ 158 — tost. C, lues. — B, On li a tantost.
- ↑ 159 — tue. B, asome. C, escorce.
- ↑ 160 — C, Sus le banc a geté. — B, A .I. bauch ki fu là d’encoste.
- ↑ 161 — B, Pendi le pel. C, Puis prist la char.
- ↑ 162 — B, « Sire, » dist il. C, Puis dist : « Sire.
- ↑ 164 — C, est bien prouvez.
- ↑ 165 — C, Vez comme il est.
- ↑ 167 — B, Si loins. C, trop loing.
- ↑ 169-170 — C :
Metés l’espaule toute en rost,
Et s’en faites cuire plain pot. - ↑ 171 — B, essiau.
- ↑ 173 — B, C, C’onques.
- ↑ 174 — cuire. B, rostir.
- ↑ 175 — C, Vez comme elle est crasse.
- ↑ 176 — saveur. C, sausse.
- ↑ 177 — B, vraiement.
- ↑ 178 — fetes. C, à vo.
- ↑ 180 — B, Donc faites tost. C, Or faites donc.
- ↑ 181 — C, n’i a que du laver.
- ↑ 185 — si fort. B, si fais. — C, jalous forment estoit.
- ↑ 186 — nuiz. B, fois.
- ↑ 189-194 — Il manque certainement un vers dans le ms. B, qui s’exprime ainsi :
A la table avoec le bouchier…
Quant il ont mengié à delit,
La dame fist parer .I. lit
Avec son oste bon et bel
De blans dras bué[s] de novel.On lit dans C :
Avec son oste bien et bel
Et menja de maint bon morsel
Celle nuit avec le bouchier.
Et fet samblant que mout l’ait chier.
Quant orent mengié par delit,
La dame li fist fere .I. lit
De blans dras lavez de nouvel ;
Si li fist et tost et isnel. - ↑ 197 — C, à ese. — Ce vers et le suivant sont remplacés dans B :
Que nos estes sire Davis
Soit aaisiés à son devis,
Si qu’il n’ait riens qui li desplaise,
Par lui avons esté bien aaise. - ↑ 198 — C, Et qu’il.
- ↑ 199 — B, s’en vont.
- ↑ 202 — B, plus à aise ne fu.
- ↑ 203 — Bon. C, Bel. — biau. C, bon.
- ↑ 204 — B, Baissele.
- ↑ 205 — B, toi en cha, parole à mi.
- ↑ 206 — B, de moi ton ami.
- ↑ 207 — B, Tu i porras.
- ↑ 208 — B, Taisiés, que le(s) ne dites preu. — B ajoute ces deux vers :
Dieus ! com cist home sont vilain !
Laissieme em pais, est en vo main.C remplace les vers 208-210 par les suivants :
Se tu veus souffrir de mon gieu.
— Taisiez vous, je n’en ai que faire.
— Par Dieu, il le convenra faire. - ↑ 209 — Ja. B, Je.
- ↑ 210 — B, Par foi, il le te.
- ↑ 211 — B, Par covent ke je te dirai.
- ↑ 212 — B, Dites donques. C, Or dites donc.
- ↑ 213 — B, C, avec moi gesir.
- ↑ 214 — B, C, Faire mon bon. — C, plesir.
- ↑ 217 — B, C, Taisiés, onques. — B, mais ce me. C, ce ne me.
- ↑ 218 — B, C, Par Dieu, vos n’estes. — B, mie erites. C, pas herites.
- ↑ 220 — C, Dieus ! comme estes mal.
- ↑ 221 — B, com vos santés sos. — Ce vers et le suivant se lisent ainsi dans C :
Certes trop estes riotous :
Se no bon fesons, moi et vous. - ↑ 223 — C, diriez à ma dame.
- ↑ 225 — C, Ja à nulli.
- ↑ 226 — B, C, ne vous encuserai.
- ↑ 227 — C, elle agréanté.
- ↑ 228 — Après ce vers, C ajoute :
Et tantost s’en ala couchier
La meschine avec le bouchier. - ↑ 230 — B, Puis se leva, si fist le fu. C, Au matin aluma le fu.
- ↑ 231 — B, Son harnas fait et. C, Son pot a pris, si.
- ↑ 232 — C, Adonques.
- ↑ 234 — B, dire. C, lire. — B, C, leur sautier.
- ↑ 235-238 — Remplacés dans C :
Et li bouchiers si s’est levez,
Si s’est vestuz et atornez. - ↑ 236 — B, Et li bouchiers de.
- ↑ 238 — B, saisons et.
- ↑ 239 — C, Et est venuz.
- ↑ 240 — B, Vint à s’ostesse. C, Droit à la dame.
- ↑ 241 — C, Le loquet hauce.
- ↑ 242 — B, Le bele dame.
- ↑ 244 — B, estoit tout droit. — C, Devant son lit où il estoit.
- ↑ 245 — B, Lors s’esmerveille. C, Mout se mervelle.
- ↑ 249 — C, Et si.
- ↑ 250 — C, près du.
- ↑ 251 — B, Son chief mist seur. C, Met sa main sus.
- ↑ 252 — B, Puis.
- ↑ 253 — B, Si vit le. C, Et voit sa.
- ↑ 254 — B, Et se p. et se m. C, Et sa boutine et sa m.
- ↑ 255 — dist il. B, fait il.
- ↑ 256 — Saint Berthelemi et.
- ↑ 258 — C, Qu’avec tel fame.
- ↑ 259 — B, Ausi. — C, Si m’aït bien.
- ↑ 260 — C, en seroit.
- ↑ 262 — B, Que peüsse une nuit. C, Que peüsse avec vous.
- ↑ 264 — C, n’est pas.
- ↑ 266 — en sus. B, la hors.
- ↑ 267-268 — C :
Faites tost, alez hors, pour Dé :
Messire avera ja chanté. - ↑ 268 — B, Molt.
- ↑ 269 — C, S’il.
- ↑ 271 — C, auriez honnie et.
- ↑ 274 — C, mouverai. C, me mouvré.
- ↑ 278 — B, orguellouse ne. C, ennuieuse ne.
- ↑ 279 — C, Ne l’ocesisse.
- ↑ 280 — B, Se de riens nule aloit grouchant. C, Mès ore oez mon convenant.
- ↑ 281 — Et. B, Mais.
- ↑ 282 — B, Me pel, amie. C, Ma pel, dame.
- ↑ 283 — plenté. C, foison.
- ↑ 284 — B, Je n’oseroie pour le gent.
- ↑ 285 — B, asi estout.
- ↑ 286 — C, « Que » manque.
- ↑ 287 — dist il. B, fait il.
- ↑ 288 — C, com soie ne vis.
- ↑ 290 — à. B, en.
- ↑ 291 — C, li a dit, tant.
- ↑ 294 — B, C, Tant qu’il en eut tout.
- ↑ 295 — B, Atant s’em part.
- ↑ 296 — C, Au moutier s’en vet.
- ↑ 297 — B, commenchie sa. — Ce vers et le suivant se lisent dans C :
Ot ja commencé son sermon
En une ne sai quel leçon. - ↑ 298 — B, Ainques n’i fusi arestison.
- ↑ 299 — B, « il » manque. — Domne. B, Domine.
- ↑ 301 — B, grés vous en rent. — On lit pour ce vers et le suivant dans C :
Sire, » dist il, « noméement
De vostre ostel grâces vous rent. - ↑ 302 — B, Herbergiet m’avés à talent.
- ↑ 303 — B, Et mout m’avez fait. — Ce vers et les deux suivants dans C :
Je me lo de vostre semblant ;
Si vous vœil dire maintenant
Et vous pri tant pour moi fachiez. - ↑ 305 — B, Et proi que vos me fesissiés.
- ↑ 306 — C, Sire, me pel.
- ↑ 307 — C, Si m’avez.
- ↑ 308 — C, .X. livres.
- ↑ 309 — B, Ele est.
- ↑ 310 — C, prenez la por deus.
- ↑ 313 — C, Dist li prestres, « mout volentiers.
- ↑ 317 — B, Puis prist congié, si s’en ala.
- ↑ 318 — B, Li fame au prestre. C, La b[one] dame.
- ↑ 319 — ert. B, fu.
- ↑ 320 — B, Si se vesti d’une vert. C, Vestue ot une verde.
- ↑ 321 — C, Bien est. — B, [Mout] bien ploïe.
- ↑ 322 — B, Et si eut escorchiés ses. C, Escorchié ot mout bien les.
- ↑ 324 — B, Vair et.
- ↑ 325-326 — Ces vers manquent dans A et C.
- ↑ 327 — B, Li baissele sans plus. C, Et la meschine senz.
- ↑ 328 — C, Va.
- ↑ 330 — B, baissele, car.
- ↑ 332 — C, qu’en avés vous à fere.
- ↑ 334 — B, à escaufer.
- ↑ 336 — B, Quele pent chi hors de le voie. C, Ele seroit trop en la voie.
- ↑ 337 — B, C, Si fat.
- ↑ 338 — dist el. B, C, j’ai fait.
- ↑ 339 — C, que vous.
- ↑ 340 — C, Par foi.
- ↑ 343 — B, te main plus.
- ↑ 345 — C, Par Dieu, dame, que.
- ↑ 346 — C, Trestoute m’en entremetrai.
- ↑ 347 — C, Si en ferai com de.
- ↑ 348 — B, As tu dit que le pel est toie.
- ↑ 349 — B, je l’ai dit.
- ↑ 351 — B, Ou te noie en une. C, Ou voises en une.
- ↑ 352 — A, Certes, or ai je grant. C, Mout ai ore trés grant.
- ↑ 353 — C, Que tu.
- ↑ 355 — C, Va t’en. — B, Va, si aroie te maison.
- ↑ 356 — C, Dame, or dites vous.
- ↑ 357 — B, Quant.
- ↑ 358 — « seur » manque à C.
- ↑ 359 — B, S’iert ele mieue. — C, Si sera la piau toute moie.
- ↑ 360 — B, mon ostel, va te.
- ↑ 361 — C, N’ai plus.
- ↑ 362 — B, Car trop. — C, Car tu es trop foie et trop.
- ↑ 365 — B, Tant t’ai forment. C, Si t’ai je encueilli.
- ↑ 366 — C, Que par le col.
- ↑ 368 — C, J’atenderai que.
- ↑ 369 — B, Mesire, et puis. C, Et puis certes. — Ce vers et le suivant sont intervertis dans C.
- ↑ 371 — B, Vous clamerés, pute boufarde.
- ↑ 373 — B, dame, (vous) dites. C, voir, vous dites.
- ↑ 375 — B, du prestre(s) avés.
- ↑ 376 — B, passion, met le.
- ↑ 377 — B, Me pel.
- ↑ 379 — B, Par les nons Dieu. C, Par le cuer Dieu.
- ↑ 380 — C, La dame a prise. — A, quenoille.
- ↑ 381 — B, l’en fiert et cele.
- ↑ 383 — B, m’avés ore à tort.
- ↑ 384 — B, mout bien.
- ↑ 386 — B, C, mout fort.
- ↑ 388 — A, le prestre[s]. C, prestre en la.
- ↑ 389 — C, fet il, « Qui a ce. — Lisez ce ? » dist il.
- ↑ 390 — mesfet. C, forfet. — B, Sire, ma dame.
- ↑ 391 — B, Par Dieu, por noient ne fu mie. C, Certes pour noient n’est ce mie.
- ↑ 392 — B, Di me voir, si ne me ment mie. C, Di m’en le voir ne me ment mie.
- ↑ 393 — B, C, Certes, sire.
- ↑ 394 — C, Qui pendoit là dessus le fu.
- ↑ 395 — A, C, Sachiez que vous.
- ↑ 397 — nos. C, vos.
- ↑ 398 — C, Eüst ostel.
- ↑ 400 — B, C, voirement.
- ↑ 401 — B, jurée l’ai. C, jurer porai.
- ↑ 402 — C, gaaignie l’ai.
- ↑ 405 — culonée. A, enganée. — B, Que ses ostes l’ot enganée.
- ↑ 406 — sa. B, la. — C, Pour la pel qu’il li ot.
- ↑ 407 — C, Il fu.
- ↑ 408 — B, n’en ose. C, n’a osé.
- ↑ 413 — ma. B, no.
- ↑ 414 — « vos » manque à C.
- ↑ 416 — C, rendriez (trois syllabes).
- ↑ 417 — B, C, Que.
- ↑ 418 — B, voir vos.
- ↑ 419 — B, Quant.
- ↑ 420 — B, Et hounist li orde puslente.
- ↑ 421 — B, Ne je ne se qu’il avendra.
- ↑ 422 — Ja. B, Mais. — C, Mès que la pel moie sera.
- ↑ 423-424 — Ces vers manquent dans A et C.
- ↑ 425 — C, Elle est vostre ?
- ↑ 426 — Nostre. B, Nos. C, Vos. — no. C, ma.
- ↑ 427 — B, Sor no kuite et sor nos. C, Seur ma couite et sur mes.
- ↑ 428 — B, Et. — C, Maugré en ait sainte Richeus.
- ↑ 430 — B, C, Bele suer.
- ↑ 431 — C, Par la foy que me promeïstes.
- ↑ 432 — primes. B, premiers. — C, en cest hostel venistes.
- ↑ 434 — B, par saint Pierre l’apostre.
- ↑ 435 — C, Et la meschine.
- ↑ 436 — B, Ha ! sire. — C, Hé ! sire, ne l’en.
- ↑ 437 — ainçois. C, avant.
- ↑ 438 — B, C, fussiés vous.
- ↑ 440 — B, Alés ent hors de ma. C, Alez hors de nostre.
- ↑ 442 — Le scribe du ms. C, qui n’a certainement pas su que le « saint signe de Compiegne » était le suaire du Christ conservé à Compiègne, a introduit la leçon suivante : le saint seigneur.
- ↑ 443 — B, Dist li prestres. C, Dist li doiens.
- ↑ 444 — C, Bien voi que le haés.
- ↑ 445 — C, C’est pour ce qu’ele est.
- ↑ 448 — B, M’avainne et mon orge. C, M’avene, mon forment.
- ↑ 449 — C, et mon lart me prenés.
- ↑ 450 — B, Sire, com vous estes. — C, Certes, mout estes forssenés.
- ↑ 451 — B, Qui tant l’avés chaiens.
- ↑ 453 — C, Et fetes que à li contés.
- ↑ 454 — C, or escoutés.
- ↑ 457 — B, C, Dites moi ki.
- ↑ 458 — B, Nos otes. C, Mes ostes.
- ↑ 459 — Voir. A, Vois. — B, Et pour les boiaus. C, Oez pour le cors.
- ↑ 460 — B, jehui.
- ↑ 461 — C, Ançois que parust.
- ↑ 462 — C, com par estes.
- ↑ 463 — B, Qui si jurés escortement. C, Qui jurez si trés cruelment.
- ↑ 464 — B, C, Il prist congié. — B, mout belement. C, si doucement.
- ↑ 465 — B, C, A moi quant il s’en dut aler.
- ↑ 467 — adonc. C, sire. — B, Nenil. — Quant donc ? — Je me gisoie.
- ↑ 470 — B, Or convient. C, Il couvient. — C, esponde.
- ↑ 472 — B, sousprendre.
- ↑ 473 — B, Dame, à Dieu vous.
- ↑ 474 — C, Et s’en ala tout maintenant.
- ↑ 475 — B, C’ainc plus n’i fut ne plus n’i dist. C, Plus ne parla ne plus ne dist.
- ↑ 476 — B, Ne riens autre. C, N’autre chose.
- ↑ 478 — B, Mais vos i entechiés folie. C, Mès vos i pensés la folie.
- ↑ 479-488 — Ces vers manquent à B.
- ↑ 481 — C, La merci Dieu se tout bien non.
- ↑ 483 — Répété dans C.
- ↑ 484 — Ce vers manque à C.
- ↑ 485 — Ce vers, qui dans C est placé après le v. 486, se lit ainsi :
Que nule fois ne me remue.
- ↑ 491 — B, A peu ke ne te fier ou tue.
- ↑ 492 — B, Vraiement sai.
- ↑ 493 — B, Di va.
- ↑ 495 — B, C, Va t’ent, si vuide.
- ↑ 496 — B, Je juerrai sur. C, Je m’en iré à.
- ↑ 497 — deseur. C, sur sains. — On lit dans B, mais après le v. 498 :
Orendroit ce fournierai.
- ↑ 498 — C, Que jamès ne te maintenrai.
- ↑ 499 — B, Par ire s’est li prestre assis.
- ↑ 500 — B, Dolans et tristres et pensis. C, Touz corouciez et touz marris.
- ↑ 502 — B, Se li poise que ele.
- ↑ 504 — Mout. B, Si.
- ↑ 505 — B, En le cambre entre maintenant. C, En la chambre s’en entre atant.
- ↑ 506 — vient acourant. A, tout maintenant. C, de maintenant.
- ↑ 509 — B, Si ne. — Ce vers et le suivant se lisent dans C :
Grant aleüre est revenuz,
Touz courrouciez et esperdus. - ↑ 511 — B, Gratant. — C, ses ongles.
- ↑ 512 — C, disoit s’oroison. — B, Li diens siet seur sen leson.
- ↑ 513 — B, Tous. — Ce vers et le suivant manquent à C.
- ↑ 514 — B, K’esçou, el non de vis maufés ?
- ↑ 515 — B, Ribaus mauvais. — Ce vers et le suivant se lisent dans C :
Atant entre li pastre en l’us :
« Qu’est ce ? mal soies tu venus ! - ↑ 518 — B, C, Tu deüsses.
- ↑ 519 — B, A peu ne te.
- ↑ 520 — C, j’ai perdu un.
- ↑ 521 — B, C, le plus bel de. — C, mon tropé.
- ↑ 522 — B, l’a atrapé. — C, Di va, où as tu donc esté ?
- ↑ 526 — C, Sire, pour Dieu. 527 — B, quant jou chaiens entrai.
- ↑ 527 — B, quant jou chaiens entrai.
- ↑ 528 — « i » manque à C.
- ↑ 530 — ni en chemin n’en voie. C, en chemin ne en voie.
- ↑ 531-534 — Ces vers manquent dans A et C.
- ↑ 535 — B, Si le. C, Qui le.
- ↑ 536 — B, Par le cuer bleu.
- ↑ 539 — B, Et qui m’amie.
- ↑ 540 — C, Et ma pel meïsme vendue.
- ↑ 541-544 — Ces vers manquent dans A.
- ↑ 542 — C, Qu’à bone eure.
- ↑ 543 — C, Onques ne m’en soi. — Ce vers et le suivant sont intervertis dans C.
- ↑ 545 — B, me fait.
- ↑ 546 — B, C, Counisteroies tu.
- ↑ 547 — B, Que dites vos, biau sire, avoi. C, Que dites vous, biau sire, à moi.
- ↑ 548 — B, Oïe si bien, se je le voi. C, Oïl mout bien, se je ta voi.
- ↑ 549-550 — C :
Il prent ........
Et la repince et la retaste. - ↑ 552 — C, li paistres sa beste.
- ↑ 553 — B, « Ha la ! » ce dist. C, « Harou ! » ce dist.
- ↑ 554 — C, Par les yeus bleu.
- ↑ 555 — plus. C, mieus. — B, Le beste ou mont que plus.
- ↑ 556 — mon. B, no.
- ↑ 557-558 — Ces deux vers manquent dans A et C.
- ↑ 560 — B, Cha venés, dame.
- ↑ 561 — baissele. C, baiasse.
- ↑ 562 — B, Parlés à moi. — Ce vers et le précédent sont intervertis dans B.
- ↑ 563 — B, C, Parole à moi.
- ↑ 564 — B, sour cele. C, sur ceste.
- ↑ 566 — meschine. C, baiasse. — Ce vers manque à B, où il est remplacé par le suivant, placé avant le vers 563 :
Foi que doi vous que je molt aim.
- ↑ 568 — B, C, de m’ame.
- ↑ 569 — B, par droit estre.
- ↑ 571-576 — Ces vers manquent dans A et C.
- ↑ 578 — C, Vous qui cest conte oï avez.
- ↑ 579 — B, Vuistasses.
- ↑ 580 — B, Par amors et prie et commande. C, Et vous [en] prie et vous comande.
- ↑ 581 — C, le jugement.
- ↑ 582 — C, Chascuns en die son talent.
- ↑ 586 — C, Ou la baiasse pinprenesse.
Ce fabliau, qui offre une certaine analogie avec le conte de La Fontaine : A femme avare galant escroc, se retrouve dans un conte de Chaucer ; c’est aussi, à peu de chose près, le sujet de l’Anser venalis du Pogge, de la nouvelle XVIIIe des Cent Nouvelles nouvelles et d’une histoire de Boccace (journ. VIII, nouv. I) ; d’autres imitations existent encore.
LXXXV
LE SENTIER BATU
fol. 132 vo à 133 ro.[1]
olie est d’autrui ramprosner,
Ne gens de chose araisouner
Dont il ont anuy et vergoigne ;
On porroit de ceste besoigne
Souvent moustrer prueve en maint quas.
Mauvès fet juer de voir gas,
Car on dist, et c’est chose vraie,
Que bonne atent qui bonne paie ;
Cui on ramposne et on ledenge,
Quant il en voit lieu, il s’en venge,
Et tel d’autrui moquier s’atourne
Que sus lui meïsme retourne.
Un example vous en dirai.
Si vrai que ja n’en mentirai.
Ainsi c’on me conta pour voir.
Il devoit .I. tornoi avoir
Droit entre Perronne et Aties[2],
Et chevaliers en ces parties
Sejournoient pour le tournoi.
Une fois ierent en dosnoi
Entre dames et damoiseles ;
De cointes y ot et de beles ;
De pluiseurs deduis s’entremistrent,
Et tant c’une royne fistrent
Pour jouer au roy qui ne ment[3].
Ele s’en savoit finement
Entremetre de commander,
Et de demandes demander,
Qu’ele iert bien parlant et faitice :
De maniere estoit bele et rice.
Pluiseurs demandes demanda,
Et sa volenté commanda,
Tant que vint à .I. chevalier.
Assez courtois et biau parlier.
Qui l’ot amée, et qui l’eüst
Pris à fame, s’il li pleüst ;
Mès bien tailliez ne sambloit mie
Pour fere ce que plest amie
Quant on la tient en ses bras nue.
Car n’ot pas la barbe cremue ;
Poi de barbe ot ; s’en est eschieus
En tant qu’as fames en maint lieus :
« Sire, » ce li dist la royne,
« Dites moi tant de vo couvine,
S’onques eüstes nul enfant.
— Dame, » dist il, « point ne m’en vant,
Car onques n’en oi nul, ge croy.
— Sire, point ne vous en mescroy
Et si croy que ne sui pas seule,
Car il pert assez à l’esteule
Que bons n’est mie li espis. »
Après n’en fu point pris respis,
Tantost à .I. autre rala
Et d’autre matiere parla.
Li pluiseur qui ce escouterent
En sourriant les mos notèrent ;
Le chevalier qui ce oy
De ces mos point ne s’esjoy,
Esbahis fu, et ne dit mot ;
Et, quant le geu tant duré ot,
Que demandé ot tout entour,
La royne chascun autour
Li redemanda, c’est usages ;
Son cuer estoit soultis et sages.
Chascuns respondi sagement
Son pensser, sans atargement.
Quant le tour au chevalier vint,
De la ramprosne li souvint :
Volenté ot de revengier,
Si li a dit sans atargier :
« Dame, respondez moi sanz guile ;
A point de poil à vo poinille ?
— Par foi, » ce dist la damoisiele,
« Vez ci une demande bele
Et qui est bien assise à point !
Sachiez qu’il n’en y a point. »
Cil li dist de vouloir entier :
« Bien vous en croy, quar en sentier
Qui est batus ne croist point d’erbe. »
Cilz qui oïrent cest proverbe,
Commencierent si grant risée,
Pour la demande desguisée,
Que cele en fu forment honteuse,
Qui devant estoit couvoiteuse
De chose demander et dire
De quoi les autres feïst rire.
Or fu son cuer si esperdus
Que tout son deduit fu perdus,
Et li fu sa joie faillie,
Car devant estoit baude et lie,
Et mout plaine d’envoisement.
Ne se sot plus courtoisement
Le chevalier de li vengier ;
Ne la volt mie ledengier,
Mès grossement la rencontra,
Et sa penssée li moustra,
Si com à lui ot fet la sienne,
Car il n’est femme terriienne
Qui ja peüst .I. homme amer,
Mès qu’ele l’oïst diffamer
D’estre mauves ouvrier en lit
De fere l’amoureus delit,
Et sus ce point fu ramposnez ;
Bien savez le coc chaponnez
Est as gelines mal venus :
Aussi homme qui est tenus
A mal ouvrier est dechaciez
Entre fames, bien le saciez,
Ce seront nonnains ou begines,
Si com chapons entre gelines.
Le chevalier, qui bien savoit,
Que le cri de tel chose avoit,
Pour la ramposne ot cuer dolent ;
Si ot de soi vengier talent.
Il counoissoit, ce puet bien estre,
De cele la maniere et l’estre,
Ou aucune mescreandise
Couru en la marcheandise,
Qu’i voult fere du mariage ;
Si li descouvri son courage
Et, se cele se fust teüe,
Ja ne li fust ramenteüe
Ceste chose. Vous qui oez
Cestui conte, entendre poez
Que li voir gas ne valent rien.
Poi en voit on avenir bien ;
Aventure est quant bien en chiet :
On voit souvent qu’il en meschiet ;
Du bien cheoir sai poi nouvele.
Rimé ai de rime nouvele
L’aventure que j’ai contée ;
Dieus gart ceulz qui l’ont escoutée !
Amen. Ci prent mon conte fin.
Dieus nous doint à tous bonne fin !
- ↑ LXXXV. — Le Sentier batu, p. 247.
Le ms. de l’Arsenal porte dans la nouvelle numérotation le no 3524.
Publié par Barbazan, à la suite de l’Ordene de Chevalerie, 168-177 ; par Méon, I, 100-105 ; par M. Aug. Scheler, Dits et Contes de Baudoin et de Jean de Condé, III, 299-303, et traduit par Legrand d’Aussy, III, 16-18.
- ↑ Vers 17 — Athies est une petite ville du Vermandois, tout près de Péronne.
- ↑ 25 — Cf., sur le jeu du roy qui ne ment, Th. Wright, Anecdota literaria, 74. Il semble que ce soit un jeu dans le genre du jeu actuel des Proverbes.
Cette histoire a été remise en vers par Imbert, et nous ne connaissons pas d’imitation qui en ait été faite dans les littératures étrangères.
LXXXVI
DE BERANGIER AU LONC CUL
et Bibl. de Berne, Mss. 354, fol. 146 vo à 149 vo.[1]
ant ai dit contes et fableaus
Que j’ai trouvé[2], viez et noveaus,
Ne finai passez sont dui[3] an,
Foi que ge doi à seint[4] Johan,
Ne cuit que g’en[5] face mais nul
Fors de Berengier au lonc cul ;
N’avez vos mie oï[6] encore.
Mais, par mon chief, g’en dirai ore ;
Ne cuit que ge targe mais[7] gaire.
Oiez que Guerins velt[8] retraire
Que il[9] avint en Lonbardie,
Où la gent n’est gaires hardie,
D’un chevalier qui ot pris fame,
Ce m’est vis, une gentil dame,
Fille d’un riche chastelain,
Et cil estoit filz d’un vilein,
D’un usurier riche et conblé,
Et assez avoit[10] vin et blé ;
Brebis et vaches, et deniers
Ot à mines[11] et à setiers,
LXXXVII
DE FRERE DENISE
et 1635, fol. 60 ro à 62 ro.
i abis ne fait pas l’ermite ;
S’uns hom en hermitage habite,
C’il est de povres draz vestus[12],
Je ne pris mie .II. festus
Son habit ne sa vesteüre,
C’il ne mainne vie ausi pure
Coume ces habiz nos demoustre.
Mais mainte gens font bele monstre,
Et mervilleuz semblant qu’il vaillent ;
Il semblent les aubres qui faillent,
Qui furent trop bel au florir :
Bien devroient teil gent morir
Vilainnement et à grant honte[13].
.I. proverbes dit et raconte
Que tout n’est pas ors c’on voit luire,
Por ce m’estuet, ainz que je muire,
Faire un flabel[14] d’une aventure
De la plus bele criature
Que[15] hom puisse troveir ne querre
De Paris juqu’en Aingleterre :
Vous dirai coument il avint.
Grans gentiz homes plus de vint
L’avoient à fame requise ;
Mais ne voloit en nule guise
Avoir ordre de mariage,
Ainz ot fait[16] de son pucelage
Veu à Deu et à Notre Dame.
La pucele fu gentilz fame ;
Chevaliers ot estei ces peire[17] ;
Meire avoit, mais n’ot suer ne frere.
Mout s’entr’amoient[18], ce me semble,
La pucele et sa[19] mere encemble ;
Frere meneur laianz[20] hantoient,
Tuit cil qui par illec passoient.
Or avint c’uns en i hanta,
Qui la damoizele enchanta ;
Si vos dirai en queil manière.
La pucele li fist proiere
Que il sa mere requeïst
Qu’en religion la meïst ;
Et il li dist : « Ma douce amie.
Se meneir voliez la vie
Saint Fransois, si com nos[21] faison,
Vos ne porriez par raison
Faillir que vos ne fussiez[22] sainte. »
Et cele qui fu ja atainte
Et conquise et mate et vaincue,
Si tost com ele ot entendue
La raison dou Frere meneur,
Si dist : « Ce Dieux me doint honeur,
Si grant joie avoir ne porroie
De nule riens coume j’auroie,
Ce de votre ordre pooie estre :
A bone[23] heure me fist Dieux neitre,
Se g’i pooie estre rendue. »
Quant li Freres ot entendue
La parole[24] à la damoizele,
Si li at dit : « Gentilz pucele,
Si me doint Dieux s’amour avoir,
Se de voir pooie savoir
Qu’en nostre ordre entrer vosissiez,
Et que senz fauceir peüssiez
Gardeir votre virginitei,
Sachiez de fine veritei,
Qu’en nostre bienfait[25] vos metroie. »
Et la pucele li otroie
Qu’el gardera son pucelage
Trestoz les jors de son eage,
Et cil maintenant[26] la resut,
Par sa guile cele desut,
Qui à barat n’i entendi.
Desus s’arme li deffendi
Que[27] riens son conseil ne deïst,
Mais si celéement feïst
Copeir ces beles treces blondes,
Que ja ne le seüst li mondes,
Et feïst faire estanceüre[28],
Et preïst teile vesteüre.
Com à jone[29] home couvandroit,
Et qu’en teil guise venist droit
En un leu dont il ert custodes.
Cil qui estoit plus fel[30] qu’Erodes,
S’en part atant, et li mist[31] terme,
Et cele a plorei mainte larme,
Quant de li departir le voit.
Cil qui la glose li devoit
Faire entendre de sa[32] leson,
La mist en maie soupeson.
Maie mort le preigne et ocie !
Cele tint[33] tout à prophecie
Quanque cil li a sermonei,
Cele a son cuer à Dieu donei ;
Cil ra fait[34] dou sien à teil don,
Qui bien l’en rendra guerredon.
Mout par est contrare sa pence
Au boen pensei où cele[35] pence ;
Mout est lor pencée contraire,
Car cele pence à li retraire.
Et osteir de l’orgueil dou monde :
Et cil qui[36] en pechié soronde.
Qui toz art dou feu de luxure,
A mis sa pencée et sa cure
En la[37] pucele acompaignier
Au baig où il ce vuet baignier.
Où il s’ardra, ce Dieux n’en pence,
Que ja ne li fera deffence.
Ne ne li saura contredire
Choze que il li vueille dire.
A ce va li Freres pensant ;
Et ces compains en trespassant,
Qui c’esbahit qu’il ne parole,
Li a dite ceste parole.
« Où penceiz vos, frere Symon ?
— Je pens, » fait il, « à .I. sermon,
Au meilleur où je[38] pensasse onques. »
Et cil a dit[39] : « Or penceiz donques. »
Frere Symons ne puet deffence
Troveir[40] en son cuer, qu’il ne pence
A la pucele qui demeure ;
Et cele desirre mout l’eure
Qu’ele soit ceinte de la corde :
Sa leson en son cuer recorde
Que li Freres li ot[41] donée.
Dedens tiers[42] jor s’en est emblée
De la mere qui la porta,
Qui forment s’en desconforta.
Mout fu à mal aise la mere
Qui ne savoit où sa fille ere ;
Grant doleur en son cuer demainne
Trestoz les jors de la semainne,
En plorant regrete sa fille,
Mais cele n’i[43] done une bille,
Ains pence de li esloignier.
Ces biaus crins a[44] fait reoignier,
Comme valiez fu estanciée[45],
Et fu de boens houziaus chauciée,
Et de robe à home vestue,
Qui estoit par devant fendue ;
Pointe devant, pointe derriere[46].
Et vint en icele meniere
Là où cil li ot terme mis.
Li Freres, cui li anemis
Contraint, et semont, et argue,
Oui grant joie de sa venue ;
En l’ordre la fist resouvoir,
Bien sot ces Freres desouvoir.
La robe de l’ordre li done,
Et li fist faire grant corone,
Puis la fist au moutier venir,
Bel et bien s’i[47] sot contenir,
Et en clostre et dedens moutier,
Et ele sot tot son sautier ;
Et fu bien à[48] chanteir aprise,
O les Freres[49] chante en l’esglize
Mout bel et mout cortoisement ;
Mout se contint[50] honestement.
Or out damoizele Denize
Quanqu’ele vot à sa[51] devise ;
Onques son non ne li muèrent :
Frere Denize l’apelerent.
Que vos iroie ge dizant ?[52]
Frere Symons fîst vers li tant
Qu’il fist de li touz ces aviaux,
Et li aprist ces geux noviaux,
Si que nuns nez s’en aparsut.
Par sa contenance desut
Tous ces Freres. Frere Denize
Cortoiz fu et de grant servize ;
Frere Denize mout amerent
Tuit li Frère qui laians erent ;
Mais plus l’amoit Frere Symons,
Sovent se metoit es limons,
Com cil qui n’en ert pas retraiz,
Et il c’i amoit mieulz qu’es traiz :
Mout ot en li boen limonier.
Vie menoit de pautonier,
Et ot guerpi[53] vie d’apostre,
Et cele[54] aprist sa paternostre,
Que volentiers la recevoit.[55]
Par mi le pais la menoit,
N’avoit d’autre compaignon cure,
Tant qu’il avint par aventure
Qu’il vindrent chiez .I. chevalier
Qui ot boens vins en son selier.
Et volentiers lor en dona.
Et la dame s’abandona
A regardeir Frere Denize ;
Sa chiere et son semblant avise,
Aparseüe c’est la dame
Que Frere Denise estoit fame :
Savoir vuet[56] ce c’est voirs ou fable.
Quant bon ot levée la table,[57]
La dame qui bien fu aprise,
Prist par la main Frere Denize ;
A son seigneur prist à souzrire,
En sozriant li dist : « Biau sire,
Aleiz vos là defors esbatre,
Et faisons .II. pars de nos quatre :
Frere Symon o vos meneiz,
Frere Denize est aseneiz
De ma confession oïr. »
Lors n’ont talent d’eulz esjoïr
Li cordelier ; dedens Pontoize
Vousissent estre, moût lor poize
Que la dame de ce parole :
Ne lor plot pas ceste parole,
Car paour ont de parsovance[58].
Frere Symons de li s’avance,
Puis li dit, quant de li s’apresse :
« Dame, à moi vos ferez confesse ;
Car ciz Freres n’a pas licence
De vos enjoindre penitance. »
Et la dame li dit[59] : « Biau sire,
A cestui vuel mes pechiez dire,
Et de confession parleir. »
Lors l’a fait en sa chambre aleir,
Et puis clot l’uis, et bien le ferme,
O li Frere Denize[60] enferme ;
Puis li a dit : « Ma douce amie.
Qui vos concilia teil folie,
D’entreir en teil religion ?
Si me doint Dieus confession
Quant l’arme dou cors partira,
Que ja pis ne vos en sera,
Se vos la veritei m’en[61] dites ;
Si m’aïst li sainz Esperites,
Bien vos poez fieir en moi. »
Et cele qui ot grant esmoi[62].
Au mielz[63] qu’el puet, de ce s’escuze ;
Mais la dame la fist concluze
Par les raisons qu’el li sot rendre,
Si que plus ne c’i[64] pot deffendre.
A genoillons merci li crie,
Jointes mains li requiert et prie
Qu’el[65] ne li face faire honte.
Trestot[66] de chief en chief li conte,
Com il l’a trait d’enchiez[67] sa meire.
Et puis li[68] conta qui ele ere.
Si que riens ne li a celei.
La dame a le Frere apelei,
Puis lui dist, oiant son[69] seigneur,
Si grant honte, c’onques greigneur
Ne fu mais à nul home dite :
« Fauz papelars, fauz ypocrite,
Fauce vie meneiz et orde ;
Qui vos pendroit à votre corde,
Qui est en tant de leuz noée,
Il auroit fait bone jornée.
Teil gent font bien le siecle pestre.
Qui par defors cemblent boen estrc,
Et par dedens sont tuit porri.
La norrice qui vos norri,
Fist mout mauvese norreture.
Qui si trés bele creature
Aveiz à si grant honte mise.
Iteiz ordres, par saint Denise,
N’est mie boens, ne biaux, ne genz[70] :
Vos deffendeiz aus[71] jones gens
Et les dances et les quaroles.
Violes[72], tabours et citoles,
Et toz deduiz de menestreiz.[73]
Or me dites, sire haut reiz,
Menoit[74] sainz Fransois teile vie ?
Bien aveiz honte deservie,
Comme faulz traïtres proveiz ;
Et vos aveiz mout bien trovei
Qui vos rendra votre deserte. »
Lors a une grant huche overte,
Por metre le Frere dedens ;
Et Freres Simons toz adens[75]
Leis la dame se crucefie,
Et li chevaliers s’umelie,
Qui de franchize ot le cuer tendre,
Quant celui vit en croiz estendre ;
Suz l’en leva[76] par la main destre :
« Frere, » dit il[77], « voleiz vos estre
De cest afaire toz delivres ?
Porchaciez tost .IIIIc.[78] livres
A marier la damoizele. »
Quant li Freres oit[79] la novele,
Onques n’ot teil joie en sa vie :
Lors a sa fiance plevie
Au chevalier des deniers rendre.
Bien les rendra cens gage vendre.
Auques seit où il seront pris.
Atant s’enpart, congié a pris.
La dame par sa grant franchise.
Retint damoizele Denise,
N’onques[80] de riens ne l’esfrea ;
Mais mout doucement li pria
Qu’ele fust trestoute seüre,
Que ja de nule creature
Ne sera ces secreiz seü[81],
Ne qu’ele ait à home geü,
Ainz sera mout bien[82] mariée.
Choisisse en toute la[83] contrée
Celui que mieulz avoir vodroit,
Ne mais qu’il soit[84] de son endroit.
Tant fist la dame envers Denize
Qu’ele l’a en boen penceir mise ;
Ne la servi mie[85] de lobes,
Une de ces plus beles robes
Devant son lit li aporta,
A son pooir la conforta,
Con cele qui ne s’en faint mie ;
Et li[86] at dit : « Ma douce amie,
Ceste vestirez vos demain. »
Ele meïmes de sa main
La vest[87], ansois qu’ele couchast.
Ne soffrist qu’autres[88] i touchast.
Car privéement voloit faire
Et cortoisement son afaire ;
Car sage dame et cortoize ère.
Privéement manda sa[89] mère
Denize par un sien mesage.
Mout ot grant joie en son corage,
Quant ele ot sa fille veüe
Qu’ele cuidoit avoir perdue ;
Mais la dame li fist acroire,
Et par droite veritei croire
Qu’ele ert aus[90] Filles Dieu rendue,
Et qu’à une autre l’ot tolue,
Qui laianz le soir[91] l’amena,
Que par pou ne s’en forsena.
Que vos iroie je disant[92],
Ne lor paroles devisant ?
Dou rioteir seroit noianz ;
Mais tant fu Denize laians
Que li denier furent rendu.
Après n’ont gaires atendu,
Qu’el fu à son gré assenée,
A un chevalier fu donée.
Qui l’avoit autrefois requise.
Or ot non madame Denize,
Et fu à mout plus grant honeur
Qu’en abit de Frere meneur.
- ↑ LXXXVI. — De Berangier au long cul, p. 252.
A. — Paris, Bibl. nat., Mss. fr. 19152, fol. 54 ro à 55 ro.
B. — Bibl. de Berne, Mss. 354, fol. 146 vo à 149 vo.
Nous empruntons les variantes du ms. de Berne à la copie de la Bibliothèque nationale (coll. Moreau, 1720, Mouchet, 46).
Traduit par Legrand d’Aussy, III, 207-213.
- ↑ Vers 2 — B, Que je ai fait.
- ↑ 3 — B, passé a un.
- ↑ 4 — B, doi Deu et.
- ↑ 5 — g’en. B, l’an.
- ↑ 7 — oï. B, eu.
- ↑ 9 — B, Si tost que ne tarderai.
- ↑ 10 — B, Or oiez que je voil.
- ↑ 11 — A, Que li.
- ↑ 18 — B, Qui mout avoit et.
- ↑ 20 — B, Ot à monciaus.
- ↑ LXXXVII. — De Frere Denise, p. 263.
A. — Paris, Bibl. nat., Mss. fr. 887, fol. 829 vo à 331 ro.
B. — » » » 1635, fol. 60 ro à 62 ro.
Publié par Barbazan, I, 122 ; par Méon, III, 76-86 ; par Ach. Jubinal, Œuvres complètes de Rutebeuf, 2e éd., 63-77, et donné en extrait par Legrand d’Aussy, III, 380-383.
Vers 3 — A, Et il en a les dras.
- ↑ 13 — A, A grant dolor.
- ↑ 17 — flabel. A, ditié.
- ↑ 19 — A, Que l’en.
- ↑ 26 — A, a fet.
- ↑ 29 — B, peires.
- ↑ 31 — A, s’entramerent.
- ↑ 32 — A, et la.
- ↑ 33 — laianz. A, iluec.
- ↑ 43 — A, comme nous.
- ↑ 45 — B, fussi.
- ↑ 54 — A, De bone.
- ↑ 57 — A, La reson.
- ↑ 65 — A, ordre bien.
- ↑ 69 — A, Atant li freres.
- ↑ 73 — A, Qu’à.
- ↑ 77 — B, estauceüre.
- ↑ 79 — A, à tel.
- ↑ 82 — A, plus faus.
- ↑ 83 — mist. A, met.
- ↑ 87 — A, de la.
- ↑ 90 — A, tient.
- ↑ 93 — A, refet. — A, au tel.
- ↑ 96 — A, ele.
- ↑ 100 — A, en qui.
- ↑ 103 — A, A la.
- ↑ 115 — A, que je.
- ↑ 116 — A, Et cil respont.
- ↑ 118 — A, Metre. — A, que il.
- ↑ 123 — ot. A, a.
- ↑ 124 — tiers. A, .III.
- ↑ 132 — n’i. A, ne.
- ↑ 134 — a. A, ot.
- ↑ 135 — B, estauciée.
- ↑ 139 — A, Bien sanbloit jone homme de chiere.
- ↑ 150 — s’i. A, se.
- ↑ 153 — à. A, de.
- ↑ 154 — A, O les autres.
- ↑ 156 — A, contient.
- ↑ 158 — Lisez à sa. — B lit Quanque ele.
- ↑ 161-168 — Ces vers manquent dans A.
- ↑ 177 — A, ot lessié.
- ↑ 178 — A, A cele.
- ↑ 179 — A, Qui volentiers la retenoit.
- ↑ 191 — A, vout.
- ↑ 192 — A, Quant l’en ot fet oster.
- ↑ 207 — A, d’apercevance.
- ↑ 213 — A, Et de respondi.
- ↑ 218 — A, Avoec li dant.
- ↑ 225 — m’en. A, me.
- ↑ 228 — A, esfroi.
- ↑ 229 — B, mierllz. — A, que.
- ↑ 232 — c’i. A, se.
- ↑ 235 — A, Que.
- ↑ 236 — A, Et puis.
- ↑ 237 — A, Que il la trest de chiés. — B, son peire.
- ↑ 238 — A, Et se li.
- ↑ 241 — A, devant son.
- ↑ 257 — A, ne bons ne genz.
- ↑ 258 — aus. B, au. — A, Vos desfendez aus hones genz.
- ↑ 260 — A, Vieles.
- ↑ 261 — A, Et deduis de menestrerez.
- ↑ 263 — A, Mena.
- ↑ 270 — B, adent.
- ↑ 275 — A, si le lieve.
- ↑ 276 — A, fet il.
- ↑ 278 — A, nous jusqu’à .C.
- ↑ 280 — A, ot.
- ↑ 289 — A, C’onques.
- ↑ 293 — B, seüz.
- ↑ 295 — A, Ainçois sera bien.
- ↑ 296 — A, au mieus de sa.
- ↑ 298 — A, qu’il fust.
- ↑ 301 — B, mies.
- ↑ 306 — A, El li.
- ↑ 309 — A, L’arest.
- ↑ 310 — A, pas qu’autre.
- ↑ 314 — sa. A, la.
- ↑ 321 — B, au.
- ↑ 323 — A, Qui .I. soir leenz.
- ↑ 325 — A, contant.
Les imitations de cette nouvelle sont assez nombreuses : Cent Nouvelles nouvelles (nouv. 32), Contes de la reine de Navarre (nouv. 31), La Fontaine (Les Cordeliers de Catalogne), l’Apologie pour Hérodote, etc. Legrand d’Aussy (III, 384) cite un passage du Journal de Paris sous Henri III, qui nous apprend qu’en 1577 le fait raconté par ce fabliau s’est passé en effet à Paris, et que la damoisele Denise de cette époque s’appelait alors frère Antoine.
LXXXVIII
DES BRAIES AU CORDELIER
et 19152, fol. 120 vo à 122 ro.[1]
etre vueil m’entente et ma cure
A faire .I. dit d’une[2] aventure
Qu’avint à Orliens la cité ;
Ce tesmoingne par verité
Cil qui m’en dona la matire.[3]
Il avint, si corn j’oï dire,
C’uns clers amoit une borjoise
Qui mout estoit sage et cortoise ;
Mout savoit d’enging et d’aguet :
A feme, qui tel mestier fait
Et qui veut amer par amors,
Couvient savoir guenches et tors,
Et enging por soi garantir ;
Bien covient que saiche mentir,
Tele eure est[4], por couvrir sa honte.
La borjoise dont ge vos conte
Fu bien de ce mestier aprise,
Comme cele qu’amors ot mise
Et bien[5] enlacie en ses laz.
Mout amast d’un clerc[6] le solaz,
NOTES ET VARIANTES
DU TROISIÈME VOLUME
A. — Paris, Bibl. nat., Mss. fr. 353, fol. 42 ro à 44 ro.
B. — » » » 837, fol. 27 ro à 31 ro.
C. — » » » 1593, fol. 111 vo à 115 vo.
D. — Bibl. de Berne, Mss. 354, fol. 93 vo à 100 vo.
Nous empruntons les variantes du ms. de Berne à la copie de la Bibliothèque nationale (coll. Moreau, 1720, Mouchet, 46).
Publié par M. F. Michel dans le vol. de F. Wolf, Ueber die Lais, 342-877, d’après B, avec les variantes de C et D, et traduit dans Legrand d’Aussy, éd. Renouard, I, 126-149.
Ce fabliau porte le titre de « Cort Mantel » dans A, C et D.
Vers 1 — D, Une aventure. — Le commencement de ce conte nous montre tout de suite que nous avons affaire à une histoire de la Table ronde, et les héros de cette épopée vont paraître chacun à leur tour dans le cours du récit.
2 — A, D, En la. — au bon roi. C, le roi.
4 — est, lisez ert. — A, D, Si con je l’ai trové escrite. C, Si con l’estoire nous devise.
5 — A, Vous en dirai. D, Vos conterai.
6 — « la » manque à D, ce qui fausse le vers.
9 — plus. A, C, si. — D, Nule si trés riches ne tint.
10 — vint. A, vindrent.
11 — D, Maint duc et maint prince et maint conte.
12 — le. A, vous. C, D, nous.
13 — ot. A, C, D, a.
14 — li jone. A, si errant. C, li vaillant. D, li novel.
16 — fu el. A, à son. — commandement. C, communement.
17 — auroit. A, ama. — C, Que cil qui aurait bele.
18 — A, Qu’il la maint. — C, La maint ou li par compaignie.
19 — iroie je. A, voi ge.
20 — De. C, D, Des. — vint. D, ot.
21 — A, N’en mentirai de conte dire.
22 — en fust griez. A, estoit fort. D, estoit grief. — C, Ne nus ne le porroit descrire.
23 — A, D, et la plus. — C, De plus bele ne de plus.
24 — n’en. A, C, ne. — D, La raine cui pas ne poise.
25 — A, que les a d’assemblées. C, qu’eles i sont alées.
26 — A, Sont en ses chambres menées (faux). C, D, Les a en ces chambres menées. — C ajoute :
Mout fu la reïne cortoise,
A elles joie et envoise.
27 — eles plus. A, faire plus. C, D, faire eles. Page:Montaiglon - Recueil général et complet des fabliaux des 13e et 14e siècles, tome III.djvu/301 Page:Montaiglon - Recueil général et complet des fabliaux des 13e et 14e siècles, tome III.djvu/302 Page:Montaiglon - Recueil général et complet des fabliaux des 13e et 14e siècles, tome III.djvu/303 Page:Montaiglon - Recueil général et complet des fabliaux des 13e et 14e siècles, tome III.djvu/304 Page:Montaiglon - Recueil général et complet des fabliaux des 13e et 14e siècles, tome III.djvu/305 Page:Montaiglon - Recueil général et complet des fabliaux des 13e et 14e siècles, tome III.djvu/306 Page:Montaiglon - Recueil général et complet des fabliaux des 13e et 14e siècles, tome III.djvu/307 Page:Montaiglon - Recueil général et complet des fabliaux des 13e et 14e siècles, tome III.djvu/308 Page:Montaiglon - Recueil général et complet des fabliaux des 13e et 14e siècles, tome III.djvu/309 Page:Montaiglon - Recueil général et complet des fabliaux des 13e et 14e siècles, tome III.djvu/310 Page:Montaiglon - Recueil général et complet des fabliaux des 13e et 14e siècles, tome III.djvu/311 Page:Montaiglon - Recueil général et complet des fabliaux des 13e et 14e siècles, tome III.djvu/312 Page:Montaiglon - Recueil général et complet des fabliaux des 13e et 14e siècles, tome III.djvu/313 Page:Montaiglon - Recueil général et complet des fabliaux des 13e et 14e siècles, tome III.djvu/314 Page:Montaiglon - Recueil général et complet des fabliaux des 13e et 14e siècles, tome III.djvu/315 Page:Montaiglon - Recueil général et complet des fabliaux des 13e et 14e siècles, tome III.djvu/316 Page:Montaiglon - Recueil général et complet des fabliaux des 13e et 14e siècles, tome III.djvu/317 Page:Montaiglon - Recueil général et complet des fabliaux des 13e et 14e siècles, tome III.djvu/318 Page:Montaiglon - Recueil général et complet des fabliaux des 13e et 14e siècles, tome III.djvu/319 Page:Montaiglon - Recueil général et complet des fabliaux des 13e et 14e siècles, tome III.djvu/320 Page:Montaiglon - Recueil général et complet des fabliaux des 13e et 14e siècles, tome III.djvu/321 Page:Montaiglon - Recueil général et complet des fabliaux des 13e et 14e siècles, tome III.djvu/322 Page:Montaiglon - Recueil général et complet des fabliaux des 13e et 14e siècles, tome III.djvu/323 Page:Montaiglon - Recueil général et complet des fabliaux des 13e et 14e siècles, tome III.djvu/324 Page:Montaiglon - Recueil général et complet des fabliaux des 13e et 14e siècles, tome III.djvu/325 Page:Montaiglon - Recueil général et complet des fabliaux des 13e et 14e siècles, tome III.djvu/326 Page:Montaiglon - Recueil général et complet des fabliaux des 13e et 14e siècles, tome III.djvu/327 Page:Montaiglon - Recueil général et complet des fabliaux des 13e et 14e siècles, tome III.djvu/328 Page:Montaiglon - Recueil général et complet des fabliaux des 13e et 14e siècles, tome III.djvu/329 Page:Montaiglon - Recueil général et complet des fabliaux des 13e et 14e siècles, tome III.djvu/330 Page:Montaiglon - Recueil général et complet des fabliaux des 13e et 14e siècles, tome III.djvu/331 Page:Montaiglon - Recueil général et complet des fabliaux des 13e et 14e siècles, tome III.djvu/332 Page:Montaiglon - Recueil général et complet des fabliaux des 13e et 14e siècles, tome III.djvu/333
A. — Paris, Bibl. de l’Arsen., Mss. B. L. F. 60, fol. 6 vo à 7 ro.
B. — » Bibl. nat., Mss. fr. 25545, fol. 19 vo à 20 ro.
Le ms. de l’Arsenal porte dans la nouvelle numérotation le no 3114.
Publié par M. Fr. Michel à la suite du Roman de la Violette, 321-327.
Vers 1 — peu est. B, n’est pas.
2 — Girbers. B, .I. clers. — M. Fr. Michel voit dans ce Girbert, dont le nom n’apparaît que dans un ms., Gibert de Montreuil, l’auteur du Roman de la Violette. Cette identification, sans être impossible, ne repose sur aucune preuve (Cf. Histoire littéraire, XVIII, 769 et XXIII, 92.)
3 — Car il. B, Et mout.
5 — B, Envieus, faillis.
6 — B, Nonpourquant ja fu li.
7 — Qu’il. B, Qui. — que ors. B, c’ores.
8 — B, En paroles, en diz.
10 — c’est. B, est.
12 — chascuns est mais. B, li siecles est.
13 — B, Dou bien si le tien et acrape.
14 — qu’il. B, qui.
15 — richesse. B, largesce.
16 — muez li grains em. B, li grains devenus.
17 — B, On lait la rose et queut l’ortie. — Le mot rose doit évidemment être mis à la place de « ronce », comme l’indique le vers 20.
18 — Ce vers, dans B, est placé avant le précédent.
19 — B, avarice à li.
21 — Ausi. B, Ensis. — sa mace. B, la nasse.
23 — bien. B, biau.
24 — tantost. B, tos tens.
25 — Qu’il. B, Qui. — ne. B, et.
26 — B, Pour ce ne.
27 — nul. B, à.
30 — Tantost. B, Si tost.
31 — B, Et je quier qui.
32 — je tout avant. B, tout premerain.
33 — B, .I. sergent qui fait laide frume.
37 — B, Groingnès est mes premerains mès.
38 — n’en sel. B, n’autre.
41 — Touz. B, Mout. — touz. B, mout.
43 — keus. B, cuens.
45 — molt. B, trop.
46 — B, Par le conseil Petit font.
49-52 — Ces vers manquent dans B.
54 — ruis. B, ris. — Après ce vers, B ajoute :
Petis est plains de mavaise ire,
Petis la cuisine nos livre.
56-75 — Ces vers manquent dans B.
67 — Le ms. A porte D’onnor : il faut corriger non pas « De onnor », mais Et d’onnor.
76 — tieus serjans. B, tel sergent.
78 — une gent les ont. B, ils ont .I. gent.
80 — Qu’il. B, Qui.
82 — met touz. B, a mis.
85-86 — Ces vers manquent dans B.
87 — les. B, le.
88 — biaus. A, biau. — deserrer. B, despiter.
89 — Biautez. B, Biaus dis.
90 — Que. B, Car. — revelle. B, se melle.
91 — bien. B, ge.
93 — Esraigier. B, Essarter.
94 — Se. B, S’uns. — s’eüst. B, s’avoit.
96 — large, lisez larges. — B, Qu’il fu et.
98 — B, Et donnast à la povregent.
100 — B, Occire porroit.
102 — B, Et se tenist jolis.
103-105 — Ces vers manquent dans B.
106 — Et qu’il se. B, Et se. — Ce vers, dans B, est suivi de celui-ci :
Sachiez se il devenoit teus.
107-108 — Ces vers manquent dans B.
109 — B, En paroles, en dis, en fais.
111-112 — B :
Et Honors seroit ravescue,
El Largece qui est perdue.
Après ce vers B ajoute :
Et Charitez s’en est alée,
Envis iert jamais recouvrée,
Et Loiautés s’en est fouie,
Ne sai où ele est apouie,
Mais s’eles estient revenues,
Par aus serient ancor tenues
Maintes beles plenieres cors ;
A eux venroit chascuns le cors.
113 — B, Lors .I. clers partout.
114 — Partout. B, Entrer.
117 — B, Mout plus souvant.
118 — Après ce vers, B ajoute :
Qu’Avarice les a cuvers,
.I. pechiez qui tant est pervers,
Qui tout le mont a perverti
Et à son vouloir converti.
122 — B, Por ce dist. .I. clers.
123 — B, dou monde depart.
125 — ainçois la. B, car tout le.
126 — Gerbers. B, .I. clers.
A. — Paris, Bibl. nat., Mss. fr. 837, fol. 128 ro à 129 vo.
B. — » » » 1593, fol. 149 ro à 150 vo.
Ce fabliau se retrouve aussi dans le ms. de la Bibliothèque de Pavie (13o E 5, fol. 85 vo à 87 vo), que M. A. Mussafia a analysé dans les Sitzungsberichte der k. Akademie der Wissenschaften (de Vienne), Phil.-Hist. Classe, LXIV, 545-618 ; mais, d’après M. Mussafia, le texte en est tellement corrompu qu’il est presque inutile d’en relever les variantes (p. 616).
Publié par Barbazan, II, 168 ; par Méon, III, 272-282 ; et traduit par Legrand d’Aussy, II, 328-334, sous le titre de « La robe d’escarlate ».
Vers 1 — Le comté de Dammartin en Brie, dont le comte le plus célèbre fut, au XVe siècle, Antoine de Chabannes, avait été apporté en dot à son mari par Marguerite de Nanteuil.
3-4 — B :
Une merveillouse aventure
C’uns chevaliers qui sanz laidure.
5 — ou païs. B, en peis tot.
13 — Avoir, lisez Avoit. — B, Pou avoit entre .II.
15 — erroit. B, aloit.
18 — Et. B, Mès.
19 — à. B, en. Page:Montaiglon - Recueil général et complet des fabliaux des 13e et 14e siècles, tome III.djvu/338 Page:Montaiglon - Recueil général et complet des fabliaux des 13e et 14e siècles, tome III.djvu/339 Page:Montaiglon - Recueil général et complet des fabliaux des 13e et 14e siècles, tome III.djvu/340 Page:Montaiglon - Recueil général et complet des fabliaux des 13e et 14e siècles, tome III.djvu/341 Page:Montaiglon - Recueil général et complet des fabliaux des 13e et 14e siècles, tome III.djvu/342
A. — Paris, Bibl. nat., Mss. fr. 837, fol. 332 vo à 333 ro.
B. — » » » 1593, fol. 177.
Publié par Barbazan, I, 5 ; et par Méon, III, 35-37, sous le titre de « Li Fabliaus de la merde », qui ne se trouve que dans B.
Vers 10 — sist. B, fu.
13 — Apoingne. B, Empoingne.
15 — B, Dame, foi que vous me.
17 — B, Qu’est ce.
19 — ert. B, est.
21 — est. B, sot.
25 — B, Et la dame tot.
27-28 — Remplacés dans B :
Semblant fait qu’ele se desfrote.
S’a trové une masserote.
29 — estoit. B, ert. — d’un. B, que .I.
30 — le tire. B, la sache.
31 — soi le. B, li la.
33 — dist. B, fet.
34 — devoie. B, osoie.
36 — B, Que je tieng entre.
39 — Issi. B, Ainsi.
41 — puis le. B, et si.
42 — B, Par foi, » fet il, « je cuit. — Les vers qui viennent après sont déplacés dans B et se suivent dans cet ordre : 42, 49-50, 45-48, 43-44, 51.
49 — B, Por ce qu’ele est .I. petit.
50 — B, Par mon chief, c’est. — Fermer les guillemets après ce vers, et les rouvrir au commencement du vers 52.
53 — bouche. B, gole.
54 — B, La masche et mete.
56 — B, Par le sanc Dé.
59 — B, C’est merde de tot.
62 — B, Je vos doi.
Publié par Barbazan, III, 126 ; par Méon, III, 489-440 ; et traduit par Legrand d’Aussy, I, 287.
Ce fabliau se trouve cité dans la pièce des Taboureurs, publiée par Ach. Jubinal (Jongleurs et Trouvères, 164).
Publié par Barbazan, III, 123, et par Méon, III, 437-438.
Vers 43 — * premiers ; ms., premier.
Ce fabliau, dont Legrand d’Aussy parle (IV, 309) sans en donner ni analyse ni extrait, a été imité par Vergier (Contes, I, 229), sous le nom d’« Anneau de Merlin ». (Cf. Fauchet, Œuvres, 1610, fol. 584.) Nous le retrouvons aussi, mais beaucoup allongé, dans le recueil (Conte 32e, p. 51) intitulé : « Rousskia zavietnia skazki » (Contes secrets russes), qui, croyons-nous, n’a pas encore été signalé. Ce recueil forme un petit volume in-8o de vii-199 pages, imprimé sans lieu (Valaam ?) ni date (sans doute en Allemagne, dans ces dernières années. Nous en avons eu connaissance grâce à M. Aug. Teste, qui l’a traduit et qui se propose de le publier, si toutefois la crudité des expressions n’y met obstacle.
Nous avons retrouvé dans ces Contes plusieurs histoires parures dans nos deux premiers volumes, et dont nous donnons ici la liste avec renvois aux pages de notre édition et du recueil. C’est d’abord la Borgoise d’Orliens (I, 117 ; II, 291), que nous revoyons dans le Conte 77e (p. 198) ; Brunain, la vache au prestre (I, 132 ; II, 293), n’est autre que le Conte 49e (p. 109) ; et le Debat du C. et du C. (II, 133, 322) est un peu écourté dans le Conte 9e (p. 10). Nous signalerons désormais, en les rencontrant, les ressemblances des contes russes et de nos fabliaux.
10 — * icele ; ms., ce.
23 — « i » manqué dans le ms.
46 — « bien » manque dans le ms.
60 — La syntaxe demanderait contrester. Ne peut-on lire le vers ainsi :
Que ne pot estre contresté ?
65 — « si » manque dans le ms.
81 — « Et » manque dans le ms.
82 — * ahans ; ms., hans.
84 — * encor ; ms., encore.
Nous retrouvons ce fabliau, jusqu’ici inédit, dans Boccace (Journ. VII, nouv. 9), et c’est là que La Fontaine l’a pris pour en faire la seconde histoire de sa Gageure des Trois Commères, le Poirier enchanté (Cf. Romania, III, 314). Dans la Germania (XXI, 385-399), M. Liebrecht a étudié ce conte dans toutes ses versions sans mentionner celle de La Fontaine.
Analysé par Legrand d’Aussy, III, 137-140.
Vers 40 — « Et » manque dans le ms.
44 — Troyes était le lieu de foires bien connues au moyen âge. C’est là que se passe une partie de l’action de Pleine Bourse de Sens (p. 89).
100 — Ce fabliau, ainsi que celui de S. Pierc et du Jougleor (Méon, III, 282-296), nous donne quelques détails sur le jeu de dés, dont la vogue fut si grande au moyen âge.
141 — * laisse ; ms., lassie.
181 — qu’ïl, lisez qu’il.
251 — L’orthographe de « tos », rimant à « dos », prouve qu’à l’époque du fabliau ce mot se prononçait comme aujourd’hui, sans faire sentir l’s.
Il faut joindre au ms. de la Bibl. nat., que nous avons cité, le ms. 179 bis de la Bibl. de Genève, qui nous offre un long fragment (fol. 4 ro à 7 vo) de ce fabliau, dont nous devons la collation à l’obligeance de M. Ritter. Nous désignons ce ms. par B et celui de la Bibl. nat. par A.
Publié par Barbazan, III, 183 ; par Méon, III, 471-478, et donné en extrait par Legrand d’Aussy, IV, 312-314.
Vers 2 — B, D’on pecheour. — seur. B, sus. — « Pont seur Saine », aujourd’hui Pont-le-Roi, dans l’Aube.
3 — B, Qui esposa.
5 — B, Catre vaches et nuef berbis.
9 — son. B, sus.
10 — B, Ensy faysoit.
12-15 — Ces vers manquent à B.
16 — se. B, la.
20 — bone. B, longue.
22 — B, Voudroit estre sovant.
23 — jor. B, soer.
25 — B, Qu’il avoit lon et dur et gros.
26 — B, Au poin. — l’ot. B, l’a.
27 — B, Qui ne le sant.
29 — B, Perrin.
30 — B, ne que mon pere.
31 — B, Ne que ma mere.
33 — cil. B, il.
34 — B, Con tu m’en monstres le samblant.
35 — cuit. B, croy.
37 — B, Ains vous.
38 — B, Et me.
41 — B, Belle cote et biau.
43 — B, Se autre.
45 — « te » manque à B et fausse le vers.
46 — B, Tu m’ayroyes.
49 — si bien. B, ja tant.
51 — B, le guinimart.
52 — « que » manque à B. Page:Montaiglon - Recueil général et complet des fabliaux des 13e et 14e siècles, tome III.djvu/348 Page:Montaiglon - Recueil général et complet des fabliaux des 13e et 14e siècles, tome III.djvu/349 Page:Montaiglon - Recueil général et complet des fabliaux des 13e et 14e siècles, tome III.djvu/350
194 — B, Elle l’acole et se le bayse.
195 — El. B, Puys.
197 — B, Elle s’escrie à aute.
199 — B, Messires a son vit trové. — Après ce vers s’arrête le ms. B, auquel il manque un feuillet.
208 — Gauvain, l’écuyer du roi Arthur, est ordinairement, dans les romans de la Table ronde, considéré comme le type du parfait chevalier. (Cf. le Mantel mautaillié.)
Nous retrouvons une imitation de ce conte dans l’histoire que raconte le bouffon dans le Xe chant du Mambriano de Francesco Bello, dit l’Aveugle de Ferrare. Quant à l’autre imitation que cite Legrand d’Aussy (Sedaine, Pièces fugitives, 138-141), elle n’est que bien lointaine.
Publié par Barbazan, III, 142, et par Méon, III, 446-451.
Vers 3 — « Brilli », que nous n’avons pu identifier, est certainement tout près de Rouen, comme le prouve la facilité avec laquelle une des meschines se rend à la grande ville et en revient.
15 — Ces noms de trouvères nous sont inconnus.
16 — « Buesemoncel ». Nous ne pouvons identifier ce nom de lieu, non plus que Brilli.
100 — * pissier ; ms., pissiez.
A. — Paris, Bibl. nat., Mss. fr. 837, fol. 182 vo à 183 ro.
B. — » » » 1593, fol. 182 ro à 182 vo.
Publié par Barbazan, III, 160, et par Méon, III, 458-462.
Vers 7 — Qui, lisez Que.
21 — B, Et conterent.
23 — « li » manque à B, ce qui fausse le vers.
38 — fait, lisez fet.
40 — dist il. B, fet il.
44 — chanté. B, parlé.
46 — B, Si ont.
48 — ce. B, ge.
52 — ce est. B, c’est, qui fausse le vers.
56 — B, froté à .XII.
75 — adès en. B, dedenz.
77 — la. B, li.
82 — sor. B, sas.
88 — B, plus lonc .I. poi.
90 — haveüre. B, navreüre.
99 — B, Si[re].
103 — cil. B, il.
104 — le. B, la.
113 — B, botez, hortez.
L’idée principale de ce fabliau est la même que celle de la Dame qui aveine demandoit pour Morel, publiée dans notre premier volume, p. 318-329 (Cf. II, 308), de la Pucele qui abevra le polain, et du Porcelet, que nous publierons plus tard. Une autre version toute différente existe dans le ms. 354 de Berne, fol. 58 ro à 59 vo ; nous la donnerons prochainement. Les Contes secrets russes (voy. p. 334-335) nous offrent aussi la même idée dans le 15e conte, p. 22 ; dans le 36e, p. 65, et dans le 40e, p. 73. L’extrait donné par Legrand d’Aussy, IV, 315-317, est imité du ms. de Berne.
Cette pièce, inédite jusqu’ici, nous donne le sens primitif du mot lanier, tout d’abord appliqué seulement aux faucons.
A. — Paris, Bibl. nat., Mss. fr. 887, fol. 68 vo à 70 vo.
B. — » » » 1593, fol. 125 vo à 128 ro.
C. — Bibl. de Pavie, Mss. 130 E 5, fol. 15 ro à 18 ro.
Nous empruntons les variantes du ms. C (Bibl. de Pavie) à M. A. Mussafia, Sitzungsberichte der k. Akademie der Wissenschaften (de Vienne), Phil.-Hist. Classe, LXIV, 555-557.
Publié par Barbazan, I, 61 ; par Méon, III, 38-53 ; par M. Al. Assier, dans la Bibliothèque de l’Amateur champenois, sous le titre de Ce qu’on apprenait aux foires de Troyes et de la Champagne au XIIIe siècle, 2e éd., 12-29 ; et traduit par Legrand d’Aussy, IV, 1-6.
Vers 4 — Ce vers manque à B.
5 — Li. C, Cil.
7 — B, C, Qu’il ert sages.
8 — avoit. B, si ot. C, s’avoit.
9 — que l’en. A, que on.
10 — B, « que » manque.
12 — seignor. C, mari.
14 — une amie. B, bele amie.
16 — B, C, Et ele le servi.
17 — A, Qui mout. C, Que mout. — le savoit. B, se vauït.
18 — dame. B, fame. — perçoivre. B, aperçoivre.
19 — vit. B, voit.
20 — de. C, plus. — B, Si ne se pot mie tenir.
21 — B, C, Que nou deïst. — C, « à » manque.
22 — B, « Biau sire, à mout grant. — grande. C, grant.
24-25 — Ces deux vers se lisent dans A :
Et il li dist : « Dame, por qoi ?
— Por qoi ? Or vous en prenez garde.
25 — or i. C, ne.
27 — honni. A, C, ocist.
29 — B, C, Car.
30 — A, Et chascuns dist. C, Et tout li mondes vous en het.
31 — A, Et sa vertuz et ses pooirs. C, Dieu et trestous ses pooirs.
32 — n’est. B, ne.
34 — s’en part. C, s’en va. — iriez et. B, coureciez et. C, courrouciez.
35 — Si. C, Et.
36 — B, Qui mout estoit et bon et bel. C, Qui fort estoit et noble et bel.
38 — est apelée. B, estoit apelez. — La ville de « Dysise, » aujourd’hui Decize, à quelques lieues de Page:Montaiglon - Recueil général et complet des fabliaux des 13e et 14e siècles, tome III.djvu/355 Page:Montaiglon - Recueil général et complet des fabliaux des 13e et 14e siècles, tome III.djvu/356 Page:Montaiglon - Recueil général et complet des fabliaux des 13e et 14e siècles, tome III.djvu/357 Page:Montaiglon - Recueil général et complet des fabliaux des 13e et 14e siècles, tome III.djvu/358 Page:Montaiglon - Recueil général et complet des fabliaux des 13e et 14e siècles, tome III.djvu/359 Page:Montaiglon - Recueil général et complet des fabliaux des 13e et 14e siècles, tome III.djvu/360 Page:Montaiglon - Recueil général et complet des fabliaux des 13e et 14e siècles, tome III.djvu/361 Page:Montaiglon - Recueil général et complet des fabliaux des 13e et 14e siècles, tome III.djvu/362 Page:Montaiglon - Recueil général et complet des fabliaux des 13e et 14e siècles, tome III.djvu/363 Page:Montaiglon - Recueil général et complet des fabliaux des 13e et 14e siècles, tome III.djvu/364 Page:Montaiglon - Recueil général et complet des fabliaux des 13e et 14e siècles, tome III.djvu/365 devenue une ville de Provence. — Cf. aussi le Mercure galant, octobre 1654.
A. — Paris, Bibl. nat., Mss. fr. 837, fol. 315 ro.
B. — » » » 1593, fol. 71 vo à 72 ro.
C. — » » » 1635, fol. 63 ro à 63 vo.
Publié par Barbazan, I, 108 ; par Méon, III, 67-69 ; par Ach. Jubinal, Œuvres complètes de Rutebeuf, 2e éd., II, 86-90, et donné en extrait très-court par Legrand d’Aussy, II, 352-333, sous le titre de : l’Indigestion du vilain.
Vers 3 — charité. B, verité.
4 — pais. C, foi. — loiauté. B, charité. — A, Ne sens ne bien ne verité.
10 — cuit. B, croi.
26 — por voir. A, de voir.
27 — ert. B, C, est.
28 — ert. B, est.
29 — Ce vers et le suivant sont intervertis dans A.
31 — Que. C, Car.
32 — en. A, C, s’en.
36 — fus, lisez fu.
37 — la. C, sa.
38 — à. B, de, qui fausse le vers.
39 — en. A, C, il.
40 — Car si. A, C, S’or. — il est. A, si est. C, il iert.
46 — B, l’esloie.
47 — B, Que. — par. A, C, por.
49 — en. B, l’en.
51 — qu’il. B, qui.
52 — A, enporte.
57 — A, C, à vilain.
59 — B, à tel.
63 — A, C, A ce.
65 — B, entrer vilains.
68 — l’en. C, hom.
72 — la. B, sa.
74 — Le conte d’Audigier (Méon, IV, 217-233), parodie des chansons de gestes, était célèbre au moyen âge. Nous le voyons cité dans l’Aiol (vers 953 et 992, éd. J. Normand et G. Raynaud) et dans le Jeu de Marion et Robin (Adam de la Halle, éd. Coussemaker, 409-410).
Nous retrouvons à peu près l’idée de ce fabliau dans le 16e conte, p. 25, des Contes secrets russes (voy. p. 334-335)
Notre texte est établi d’après la copie de la Bibliothèque nationale (coll. Moreau, 1727 ; Mouchet, 52). Nous désignons par M cette copie, dans laquelle, comme aussi dans celle du fabliau no LXXI, nous avons essayé de régulariser certaines notations orthographiques (mut pour molt, eis pour ez, ki pour qui, etc.).
Publié par Méon, Nouveau Recueil, I, 80-90 ; par Renouard dans Legrand d’Aussy, IV, app. 18-21, et par M. Aug. Scheler dans les Trouvères belges, 214-224 ; analysé par Legrand d’Aussy, IV, 177-184.
Vers 4 — La présence dans ce fabliau de la ville d’Anvers nous prouve bien que le tiois auquel il est emprunté est simplement du néerlandais. Du reste, les formes dialectales de cette pièce appartiennent bien à la région française du nord.
8 — * amasser. M, amassier.
25 — * estovera. M, estovra.
32 — « et » manque dans M.
41 — Les jacobins étaient au moyen âge le sujet de mille satires qu’ils ne justifiaient que trop.
43 — La rime défectueuse de ce vers pourrait être rectifiée en corrigeant : Cant aucuns desviiet ravoie.
44 — * en. M, on.
45 — * chés. M, chil.
48 — Ce vers manque dans M.
59 — * Ke ne. M, Ki ne.
97 — * vers. M, envers.
99 — * orfenines. M, orfenins.
104 — * si. M, se.
108 — * Naie, voir. M, Nai, voi.
120 — * puet. M, puet bien, qui fausse le vers.
122 — * Nos. M, No.
143 — * voroie mie. M, voroi mies.
164 — * promesse. M, premesse.
161 — * ont. M, sont.
171 — * flons. M, fions.
181 — * cors. M, cor.
188 — * serré la teste. M, ferré la reste, qui est sans aucun doute une faute de lecture (Cf. vers 178 et un exemple de cette locution dans Littré sous serrer).
207 — * dites. M, dite.
215 — * otriiet. M, orriiet.
219 — * ains ke li jors. M, ans ke li ors.
230 — * Encore. M, Encors.
237 — * vos. M, vo.
262 — « Dieus » manque dans M.
264 — * n’en. M, m’en.
266 — * malmener. M, malmené.
275 — * tieng. M, ting.
284 — * ke nus n’i amene. M, que nos ni amenes.
288 — * la voiés bien netoiie. M, vos la voiiés bien netoiiée.
319 — * Tieus. M, niex, faute de lecture du copiste.
Cette histoire, qui serait, dit-on, arrivée à Jean de Meung, le continuateur du Roman de la Rose (Hist. litt., XXIII, 158), a été imitée par l’auteur des Aventures d’Eulenspiegel ; on la retrouve aussi dans le Parangon des Nouvelles.
A. — Paris, Bibl. nat., Mss. fr. 837, fol. 166 ro à 166 vo.
B. — » » » 1593, fol. 183 vo à 184 vo.
C. — » » » 2173, fol. 95 ro à 96 ro.
D. — Bibl. de Berne, Mss. 354, fol. 59 vo à 60 ro.
Nous empruntons les variantes du ms. de Berne à la copie de la Bibliothèque nationale (coll. Moreau, 1720 ; Mouchet, 46).
Publié par Barbazan, III, 167 ; par Méon, III, 462-466, et donné en extrait par Legrand d’Aussy, II, 328-329.
Le ms. A a pour titre : « De la dolente qui fu f… », et le ms. D : « De la dame qui fu f… sor la fosse de son mari ».
Vers 1 — A, Entrues que. C, Puisque la. D, Tandis con.
2 — A, De fables. D, De fabliaus. — A, D, et il me tient. C, et il m’en tient.
3 — C, D, un voir.
4 — petit. C, D, mout pou. — d’avoir. B, savoir.
6 — ert. C, fu.
7 — Le. A, B, Li. — Ce vers et les trois suivants se lisent ainsi dans C :
Mourut, faire li couvenoit,
Et sa fame qui mout l’amoit
En fu, de sa mort, mout iriée ;
Mès fame s’est lues atiriée…
8 — fu et. B, par fu. — et par fais. D, par sanblant.
10 — A, s’est tost atirie. D, est tantost atiriée.
11 — a, lisez à.
13 — ra. B, D, a.
15 — C, tant l’a. D, l’ot tant.
17 — C, D, De grant duel demener.
18 — B, Et sovent chetive se claime.
19-20 — Ces vers manquent à C ; 19-22 manquent à D.
22 — C, Qu’ainz. — C, duel gregnor. — C et D placent ici ces deux vers :
Ses poinz detort et tous ses dras,
Et si se paume à chacun pas.
Dans D, le premier vers se lit :
Ses poinz deront et tort ses dras.
24 — D, Lors.
25 — C, Et dementer et. D, Et demener et.
26 — de tordre, lisez detordre. — C, Nus ne l’em puet arieres traire. D, Que nus ne lo porroit retraire.
27 — C, Ançois. D, Et après. — « de » manque à D. Page:Montaiglon - Recueil général et complet des fabliaux des 13e et 14e siècles, tome III.djvu/371 Page:Montaiglon - Recueil général et complet des fabliaux des 13e et 14e siècles, tome III.djvu/372 Page:Montaiglon - Recueil général et complet des fabliaux des 13e et 14e siècles, tome III.djvu/373
116 — C, Dame. — D, Que trop est de.
118 — trop poi. C, D, petit. — « trop » manque B.
119 — est ses. C, D, li est. — remuez. D, remeüz.
120 — A, si est dervès. C, il est dervés. D, s’est deceüz. — Après ce vers, D ajoute :
Que onques nus en la contrée
Ne vit nule si esprovée
Con ceste fu qui cest duel fist ;
Et après en joa et rist.
Ce fenist de la boene fame
Qui fu fotue, ce me sanble,
Sor la fosse de son mari :
Mal marier se fait ensi.
Ci vos en lairon sanz plus dire,
Des exanples est cist lo mire.
L’histoire de la Matrone d’Éphèse, d’origine sans doute milésienne, se retrouve dans toutes les littératures, depuis Pétrone jusqu’à La Fontaine. Aussi ne pouvons-nous mieux faire que de renvoyer, pour les différentes versions de ce conte, à l’article de M. d’Ancona sur les sources du Novellino (Romania, III, 175-176).
Notre texte est établi d’après la copie de la Bibliothèque nationale (coll. Moreau, 1727 ; Mouchet, 52), que nous désignons par M (Cf. notes du fabliau LXIX).
Publié par Méon, Nouveau Recueil, I, 91-103, et par M. Aug. Scheler dans les Trouvères belges, 162-174 ; traduit par Sainte-Palaye, Mémoires sur l’ancienne chevalerie, III, 138, et par Legrand d’Aussy, I, 235-242.
Vers 7 — * Anui. M, Anuit.
8 — * ches. M, chis.
34 — * icele. M, cele.
56 — * vo. M, vos. — aroie. M, aroi.
57 — * De mon. M, De moi.
58 — * si. M, se.
60 — « le » manque à M.
92 — * Fors. M, For.
118 — * Proëche. M, Pereche.
121 — * encuse. M, escuse.
143 — * chevalier. M, chevaliers.
149 — * nule. M, nul.
167 — * amur. M, amors.
168 — La copie a meure, qui est préférable à « neure », correction de M. Scheler.
172 — * coz tez. M, toz tez.
181 — * couste. M, coute.
190 — * S’en. M, Si en.
195 — * ke s’ensi. M, qu’ensi.
197 — * li seroit. M, ne li seroit.
205 — * son. M, à son.
218 — * à l’armer. M, alarmes.
219 — * chauces. M, chauce.
229 — * d’achier. M, d’achiet.
232 — * ja. M, et ja.
235 — * s’esmaie. M, s’enmaie.
244 — * mengier. M, mengiers.
259 et 334 — * Par. M, Por.
280 — * contralhiés. M, contalhiés. — Ce vers et le précédent ne riment pas, mais assonent.
301 — * sor tot, M, por tot.
310 — * Encor. M, Encors.
320 — * bachelers. M, bacheler.
336 — * Tant. M, Cant.
346 — * roial. M, loial.
353 — * Lors. M, Lor.
374 — La rime taisir prouve que l’r finale ne se prononçait pas. Peut-être faut-il lire, comme le propose M. Scheler : Ne mains parlier ne mains taisieu.
375 — * bacheliers. M, chevaliers.
Le ms. de l’Arsenal porte dans la nouvelle numérotation le no 3525.
Publié par M. Aug. Scheler, Dits de Watriquet de Couvin, 373-379.
Vers 4 — * Qu’on ; ms., Von.
10-3 — Ces noms connus de villes du Hainaut servent assez à prouver la nationalité de l’auteur du fabliau, qui est de Couvin (évéché de Liége).
12 — riante, lisez mainte.
15 — Sans ajouter, lisez Sanz ajouster.
23 — M. Scheler, tout en constatant qu’à Cologne il a existé un canonicat de dames, ne veut voir ici qu’une fiction du poëte.
29 — leurs, lisez leur.
31 — * mout ; ms., mont.
55 — faisoit, lisez fesoit.
57 — * plains ; ms., plain.
63 — fu, lisez fui.
79 — Il faut voir dans le nom Raniquet une confusion de prononciation : les chanoinesses croient connaître le poëte, et ne se rappellent que confusément son nom, qu’elles estropient ; elles font ainsi Raniquet de Watriquet.
81 — Ne s’agit-il pas ici du château d’Arabloy, près de Gien, dont M. Pillon a écrit l’histoire dans les Mémoires de la Société archéologique de l’Orléanais, IV, 199-204 ?
82 — Ce comte de Blois est Gui de Blois.
83 — Dans le ms., ce vers est ainsi écrit : Et monseignor mesire Gauchier. Il s’agit du connétable.
93 — * qu’entre ; ms., que tre.
95 — voulons, lisez voulon.
102 — sans, lisez sanz.
104 — J’i, lisez G’i.
111 — le, lisez la.
118 — * Que ; ms., Ce.
123-4 — Le titre et le commencement de la chanson, que nous avons ici, ne se retrouvent nulle autre part.
130 — * En a l’une ; ms., L’une en a.
133 — comandement, lisez commandement.
140 — Supprimez l’s placée après les points.
146 — Supprimez « et ». — Le fabliau dont il est parlé ici ne nous est pas parvenu. Ce n’est certainement pas le Jugement des C… (Méon, III, 466-471).
157 — cele, lisez celle.
171 — La fin du vers est ici grattée, ainsi que les quelques mots des vers précédents que nous avons remplacés par des points.
178 — Vers gratté.
184 — Il manque ici tout un feuillet, à peu près 56 vers.
194 — rime, lisez crime.
Ce fabliau est précédé, dans le ms (fol. 84 vo), d’une grande miniature fond quadrillé rouge, bleu et or, avec une fleur de lis d’argent sur les carreaux bleus et rouges. Les trois chanoinesses, nues, sont dans trois tonneaux surmontés d’une sorte de dais à rideaux. Le poëte est assis ; il tient une coupe en forme de calice de la main droite, et un pilon de volaille ou un os de jambon de la gauche. Ce qu’il y a de singulier, c’est que la table, qui est couverte d’une nappe, et où l’on voit entre autres choses un couteau et un vase à deux anses, est une tabula au sens strict ; elle n’a pas de pieds et est posée sur les genoux du trouvère, dont la robe presque monacale est mi-partie à dextre de vert, et à senestre d’une couleur brun jaunâtre très-claire (Cf. la miniature de présentation et celle du fol. 144 vo).
Le ms. de l’Arsenal porte dans la nouvelle numérotation le no 3525.
Publié par M. Aug. Scheler, Dits de Watriquet de Couvin, 381-390.
Vers 3 — Les noms de ces trouvères ne nous sont pas autrement connus.
10-11 — Le jour de l’Épiphanie. — La légende raconte que les rois mages vinrent à Cologne. La cathédrale possède encore une chapelle qui leur est consacrée.
18 — Tous les noms de ce fabliau, qui s’appliquaient sans doute à des personnages de l’époque, ne nous disent rien aujourd’hui. La date (1320) est à remarquer.
22 — sans, lisez sanz.
42 — absous, lisez absouls.
47 — L’enseigne de taverne « des Maillez », que nous rencontrons ici, est à noter.
48 — * li ; ms., le.
94-96 — Ces trois vers sont le commencement d’une chanson qui ne nous est pas connue.
101 — * à ; ms., et.
108 — * est ; ms., sont.
113 — bon, lisez bons.
121 — Supprimez la virgule après « Manjue ».
122 — vous, lisez vins. — Le vin « d’Ervois » est sans doute le vin d’Arbois, cru bien connu du Jura.
123 — Vin de Saint-Émilion, aussi estimé au moyen âge que de nos jours (Cf. Méon, I, 153).
154 — De nos jours encore, les Highlanders portent la cotte courte.
159 — Sa chemise, lisez Son corset.
164 — Refrain que nous ne connaissons pas.
165 — leurs, lisez leur.
167 — * Dehors ; ms., Hors.
200 — * chetif baron ; ms., chetis barons.
201 — en, lisez em.
219 — * teste ; ms., testes.
234 — * odorent ; ms., odoient.
240 — Le ms. n’a pas « ne ».
256 — buche, lisez bouche.
269 — * out ; ms., ont.
276 — * mis ; ms., mist.
289 — * memoire ; ms., mimoire.
La miniature de ce fabliau (fol. 88 vo), à fond quadrillé, représente une table bien servie, et derrière, les trois dames debout et buvant. Elles ont de longues robes flottantes et de curieux bonnets à la phrygienne, dont la longue pointe dressée est recourbée en avant, et dont la queue étroite recouvre le cou et tombe sur le haut de la robe.
A. — Paris, Bibl. nat., Mss. fr. 837, fol. 139 ro à 141 ro.
B. — Bibl. de Berne, Mss. 354, fol. 49 vo à 52 ro.
Nous empruntons les variantes du ms. de Berne à la copie de la Bibliothèque nationale (coll. Moreau, 1720, Mouchet, 46), qui a pour titre : « Do Mire de Brai. »
Publié par Barbazan, I, 1 ; par Méon, III, 1-13 ; par Renouard dans Legrand d’Aussy, III, app. 1-5 ; analysé par Legrand d’Aussy, III, 1-11.
Vers 1 — B, ert .I. vilains mout.
2-4 — B :
Qui trop avoit, mès mout fu chiches ;
.II. charrues ot et .VIII. bues
Qui totes erent à son hues.
5 — B, Et .II. jumenz et .II. roncins.
6 — B, et blez et vins.
8 — B, qu’il ne prenoit.
9 — B, ses amis.
10 — B, do pais.
11 — B, Tant qu’il lor dit qu’il.
12 — B, s’il la savoit.
16 — B, Qui estait viauz.
17 — B, Qui une fille avoit.
19-24 — Ces vers manquent à B.
25 — B, parlerent.
26 — B, Et au chevalier.
27 — por. B, à oes.
28-30 — Ces vers se lisent ainsi dans B :
Qui mout estoit riche et puissant :
Assez avoit or et argent.
Que vos diroie [je] en present ?
31 — B, Fu acordé lo.
32 — fu. B, ert.
33-36 — Ces vers sont remplacés dans B :
Ainz quanque li plot otroia,
Et li vilains moût se hasta.
37 — B, A l’ainz que il pot.
38 — B, Cele.
39 — « ele » manque à B.
41 — B, Con des noces.
42 — mie. B, une.
43 — B, Que.
45 — mie. B, pas.
47 — il ira à la. B, or ira à sa.
48 — B, Li prestres iert en mi.
49 — B, A cui il est toz jors foiriez.
52 — B, I ira tant hui.
54 — B, Si que jamès.
55 — B, N’elle lou prisera un pain.
56 — B, « Halas ! chaitiz, » dist.
59 — B, Forment se prist.
60 — B, il s’en porra.
61 — si, lisez se.
62 — B, Chascun matin, quant je movroie.
63-64 — B :
Pour aler fere mon labor,
El plorroit tot le lonc del jor.
65 — B, Et tant, cuit bien que qu’el plorroit.
66 — A, desvoieroit.
67 — B, Et au soir, quant je revendroie.
71 — à li. B, de li.
72 — B, Mès ainz auré.
74 — B, Et ele li va.
77 — B, Et fromache à mout.
80 — B, De la main qu’il ot.
81 — lez. B, en [mi].
83-84 — B, chevous et fous.
85 — B, L’a batue tot autresi.
86 — B, s’el l’eüst bien.
87-120 — Ces vers manquent à B.
121 — B, Puis si s’en va les.
122 — B, Et cele remest.
123 — dist. B, fet.
126 — B, Dieus ! fu ainz.
127 — B, Je cuit qu’il ne set que ce sont.
129 — B, Ne m’en donast il mie tant.
130 — B, Que qu’ele s’aloit.
131 — B, Estes vos .II. serjanz lo roi.
132 — blanc. B, bel.
133-140 — B :
Qui dedanz la meson entrerent
Et à disner li demanderent ;
Et el lor dona volentiers.
Puis lor a dit : « Biaus amis chiers,
Or me dites, se vos volez,
Don vos iestes, et que querez. »
141 — B, dist : « Dame, par ma foi.
143 — B, Qui nos envoie mirre.
145 — B, A que fere ?
146 — B, au roi, est si.
147 — Ce vers dans B est placé après 148 et ainsi écrit :
Il a passé .VIII. jors dès ier.
148 — B, Qu’el ne puet.
149 — B, Que.
151 — B, Li rois en est forment iriez.
152 — B, Se il la pert, jamès n’iert liez.
153-156 — B:
Saignor, ja ne vos esmaiez ;
Mès loin n’irez, ja ne quidiez ;
Je vos di bien que mon mari
Est bons mires, je vos afi.
157 — mecines. B, fisique.
158 — B, Et de mecine[s] et d’orine.
160 — vous. B, nos.
161 — B, De vos gaber, » fet el.
162 — B, Fors tant qu’il est de tel.
163 — B, Qu’il ne vialt dire nule.
164 — B, S’il n’est batuz avant mout bien.
165 — B, Cil responnent.
167 — B, et le troverons nos.
168 — B, Vos lou verroiz tot à estros.
170 — B, A un(s) ruissel qui laissus cort.
171 — B, Dejoste celle vieille.
173 — c’est. B, est.
175 — B, Fet ele, « ou je (faux).
177 — qu’ils, lisez qu’il. — B, que lou vilain ont.
180 — B, Qu’il viegne tost à lui.
183 — ceste. B, nule.
185 — B, s’ot li vilains.
186 — B, Par mautalant conmence à rire.
188 — B, Q’aluns. — ore. B, or ci.
189 — B, Dist l’uns à l’autre.
191 — B, Qu’il die ne bien ne voidie.
192 — delez. B, joste.
193 — B, Del poing l’autre.
194 — grant. B, cort.
195-208 — Ces vers sont remplacés dans B par les suivants :
L’ont à terre jus abatu.
Li vilains a bien conneü
Que lou plus bel n’est mie suen :
« Saignor, » fait il, « n’est mie boen ;
Por Dieu merci, laissiez m’ester.
— Or n’i a donc que del monter, »
Font il, « si en venez au roi. »
N’i quistrent autre palefroi,
Ainz monterent tot esranment
Lo vilain sor une jument.
Et quant venu furent à cort,
Li rois à l’encontre lo cort,
Qui desirranz ert durement
De la santé à son enfant ;
Demande lor qu’il ont trové.
L’uns des serjanz li a conté
Totes les teches au vilain ;
De quel folie il estoit plain.
209 et 224 — B, Li rois respont.
210 — d’itel. B, de tel.
211 — B, dès qu’issi est.
212 — B, Dist li serjanz, « vez moi tot prest.
214 — B, Con l’en li paiera.
216 — B, traiez vos ça.
217 — B, Si faites.
218 — Quar. B, Qui.
219-220 — Ces vers manquent à B.
221 — B, Certes, sire.
223 — B, Ne en maniere rien n’en soi.
228-230 — Ces vers sont remplacés dans B :
Sor les espaules, sor le dos,
Au roi a dit : « Sire, merci ;
Bon mire sui, jel vos afi. »
Li rois lor dit : « Or lou lessiez,
Mar i sera huimès tochiez. »
232 — B, Qui forment fu et.
234 — B, Conment garir il la porra.
235 — B, Car on. — que à. B, '’que.
236 — B, Li convendra il o morir.
237-244 — B :
« Las, » fet il, « se ele rioit,
O l’esfors que ele i metroit,
L’areste li voleroit fors,
Car el n’est pas dedenz lo cors.
Tel chose m’estuet fere et dire
Que je la puisse fere rire. »
Au roi a dit : « Sire, merci,
Faites nos estre en privé liu,
Et si n’i ait ja nule gent
Fors moi et li tant seulement.
245 — B, Puis si veroiz.
246 — B, Car se Dieu plest, bien.
247 — B, Li rois respont : « Mout volentiers. »
249 — B, Errant ont lou feu.
250 — l’ot. B, ot. — Après ce vers, B ajoute :
En la sale sont, ce me sanble,
Li mire et la meschine ensanble.
251 — B, La damoisele.
252 — siege. B, seoir. — mist. B, fist.
254 — B, Onques ses braies li laissa.
255 — B, Puis si s’est lés lou feu.
256 — B, Bien. — B, et [a]aisié.
258 — B, Et li sachiez.
259-260 — B :
Ne trovissiez .I. grateor
Que cist ne fu [il] mout mellor.
261 — B, Et quant la pucele lo voit.
262 — B, O lo grant mal que ele avoit.
264 — la. B, sa.
265 — B, delez lo foier.
267 — B, Se vest, et puis a pris.
268 — B, De la sale ist.
269 — B, Et voit lou roi, si li escrie.
272 — B, Li rois forment s’en (est) esjoï.
273 — B, « Certes, maistres, je vos di bien.
274 — Après ce vers, B ajoute :
Vos m’avez ma fille rendue :
Beneoiz soit vostre venue.
275 — B, Assez aurois joiaus.
276 — B, Li vilains dist eneslou pas.
277 — B, Je ne puis.
278 — B, En mon pais.
279 — B, Par Dieu, » dist li rois, « non ferez.
280 — B, et mon saignor serez.
281 — B, dist lo vilain.
282 — B, En ma meson.
283 — B, Car quant j’en parti au matin.
284 — B, Devoit en aler.
285 — B, ses serjanz.
286 — B, remaindra.
287-290 — Ces vers sont remplacés dans B :
Cil saillirent tot erranment,
Sel battirent si durement.
291 — B, Que li vilains prist.
292 — B, Je remanrai.
293 — à cort. B, del tot.
294 — B, Estancié l’ont del tot.
296 — B, Estre cuidoit fors de la trape.
297 — B, Ezvos.
298-302 — Remplacés dans B :
Dont il i ot, ce m’est avis,
.IIIIcx. o plus, ce me sanble.
Au roi vindrent trestot ensanble.
Chascun dist au vilain son estre ;
Li rois dist au vilain : « Bel mestre.
305-308 — Remplacés dans B :
Li vilains dist : « Por Dieu merci.
Trop en i a, jel vos afi.
309 — B, Us .II. serjanz.
310 — B, Chascuns d’aus saisi.
311 — B, mout trés bien s[av]ot.
313-316 — Remplacés dans B :
Quant li vilains venir les vit,
Grant paor et, au roi a dit :
« Sire, merci, je les garrai.
— Or tost, » dist li rois, « jel verrai.
319 — B, aluma un feu.
320 — B, Il meïsmes fu mestre keu.
321-323 — Remplacés dans B :
Les malades fist arengier ;
Au roi dist : « Je vos voil proier
Que vos descendez là à val.
324 — « Et » manque à B.
325 — B, Il l’otroia.
326 — lui. B, il.
328 — B, Di, va, par lou Dieu.
329 — B, Il a grant poinne en.
331 — Ce vers dans B est placé après le vers 332, qui se lit ainsi :
Fors qu’issi con je vos diré.
333-336 — B :
Et l’ardré trestot en .I. feu ;
Vos autres, i auroiz grant preu,
Car tuit de la podre bevrez.
Et erranment garis serez.
337 — B, Lors a l’uns.
338 — B, N’i ot si contret ne.
340 — B, Qu’il eüst graignor.
343 — B, De toz cels ies tu li plus vain.
344 — B, Mestre, merci.
345-348 — Ces vers manquent à B.
350 — B, Cil sailli sus, si a l’uis pris.
354 — B, Trop a el mestre jantil ome.
355 — B, disant.
357 — B, por nule rien.
358 — B, Que li mire [au] feu.
359 — B, Ainz s’en alerent.
360 — se il. B, s’il. — tuit. B, trestuit.
361 — B, a ce veü.
363 — B, En la sale entre, et dit.
364 — B, mout de cest estre.
366 — B, « Sire, » fait il.
368 — B, ne citoalt.
369 — B, « Mestres, » dist li rois, « or irez.
371 — B, Assez auroiz dras et deniers.
372 — B, et biaus somiers.
373-378 — Ces vers manquent à B.
379 — Ne. B, Et. — ledir. B, ferir.
380 — B, Que grant honte est de vos laidir.
382 — B, hom (à adopter) de mes .II. mains.
383-388 — Remplacés dans B :
Tot à vostre conmandement. »
De la sale ist, il et sa gent,
Puis est à son ostel venu,
Riche et manant ainz plus ne fu.
389 — B, N’onques plus n’ala à charue.
390 — B, Ne puis ne fu par lui.
392 — con. B, o.
394 — A, Fu bons mestres et. B, Fu il bons mire.
Ce fabliau, dont Molière dans son Médecin malgré lui a imité la première partie, qu’il avait sans doute empruntée à une farce italienne, Arlecchino medico volante, se retrouve dans la 10e et la 30e serée de Bouchet. La première partie existe dans la littérature populaire de la Russie, sans doute venant de notre fabliau (Cf. Hist. litt., XXIII, 197), et tout dernièrement le journal le Figaro (27 mai 1877) rééditait une version de ce pays. Le Pogge, dans ses Facéties, a fait revivre la seconde partie de l’histoire, celle où le médecin guérit les malades par la peur.
Notre texte est établi d’après la copie de la Bibliothèque nationale (coll. Moreau, 1720, Mouchet, 46), que nous désignons par M.
Publié par Méon, Nouveau Recueil, I, 338-342 ; par Renouard dans Legrand d’Aussy, I, app. 28-30 ; et par M. Paul Meyer, Recueil d’anciens textes, 350-352 ; traduit par Legrand d’Aussy, I, 337-339, sous le titre de « Le Bachelier normand ».
Vers 3 — Nous avons à choisir entre deux dates pour la prise d’Acre, 1191 par les chrétiens, et 1291 par les musulmans.
6 — * Dont. M, Don.
9 — * Ne à. M, N’a.
10 — * maaille. M, maille.
15 — * orgoillos. M, orgoilleus.
18 — * Trestote. M, Trestot.
26 et 114 — * Normanz. M, Normant.
28 — * remaint. M, remenoit.
29 — * Al. M, A.
32 et 44 — « li » manque à la copie.
39 — * lasté. M, lastel.
41 — * n’en. M, ne.
45 — * taverniers. M, tavernier.
46 — * « Espone », Épone, S.-et-O., arr. de Mantes.
77 — gaaigner, lisez gaaignier.
81 — iaux, lisez iauz.
105 — Normanz, lisez Normani.
110 — * C’ert. M, C’est. — Nous ne saurions identifier cet Henri, à la fois duc de Normandie, comte de Champagne et roi, en 1191 ou 1291.
123 — * Si ce est. M, Si c’est.
127 — * rient. M, dient.
130 — * fut. M, fu.
134 — * Qui a. M, Qui ait.
Imbert a remis ce conte en vers.
Notre texte est établi d’après la copie de la Bibliothèque nationale (coll. Moreau, 1720, Mouchet 46), que nous désignons par M.
Publié par Th. Wright, Anecdota literaria, 64-65, et traduit par Legrand d’Aussy, II, 357, sous le titre « des Catins et des Ménétriers ».
Vers 3 — * quanque il convit. M, quanqu’il convint.
6 — M, Clers et chevaliers laboranz.
13 — « et » manque à M.
21 — * De rien ne. M, Darrien que.
25 — La copie n’a pas les mots « Saint Piere, » mais seulement S.
30 — * hucent. M, huient.
35 — * abandoin. M, abandoi.
61 — * fors. M, for.
Ce conte a été souvent mis en vers, entre autres par Imbert et Gudin, II, 96-98.
Notre texte est établi d’après la copie de la Bibliothèque nationale (coll. Moreau, 1720, Mouchet, 46), que nous désignons par M.
Publié par Th. Wright, Anecdota literaria, 68-73, et analysé par Legrand d’Aussy, III, 126-131, sous le titre de l’« Évesque qui bénit sa maîtresse. »
Vers 10 — « bien » manque à la copie.
11 — « Baiues », que le ms. lit Baies, est sans doute Bayeux en Normandie, bien que la rime ne concorde guère avec liues.
15 — M ajoute vo avant « nomer ».
21 — * avoque. M, avoc.
36 — * buverai. M, buvrai.
39 — M, Li prestes que il l’a trovée.
83 — * à l’evesque. M, à l’evesques.
90 — M ajoute je avant « n’i ».
99 — angevins, lisez engevins.
116 — * Ou por. M, Par.
128 — * que. M, qui.
134 — * ne me. M, vos ne me.
136 — fet, lisez fait.
137 — * dont… mestiers. M, don… mestier.
145 — l’o, lisez lo.
149 — respondre, lisez repondre.
157 — * et se ratapine. M, et atapine.
170 — * grande. M, grant.
173 — * Se. M, Si.
176 — « plus » manque à la copie.
184 — * adesiez. M, adessez.
187 — * Sel. M, Ses.
204 — * amen. M, aman.
221 — * doin. M, doi.
222 — * poivre. M, povre.
Bonaventure des Periers (nouv. 36) nous présente une nouvelle analogue à ce fabliau. Voyez aussi dans le Novellino (Romania, III, 175) et dans les Cento Novelle antiche (nov. 54). Imbert a imité ce conte, où les prescriptions du troisième concile de Latran sont loin d’être observées.
A. — Paris, Bibl. nat., Mss. fr. 837, fol. 185 ro à 186 ro.
B. — » » » 1593, fol. 183 vo à 184 ro.
C. — » » » 25545, fol. 75 ro à 76 ro.
Publié par Barbazan, I, 233 ; par Méon, III, 148-153, et imité par Legrand d’Aussy, III, 333-336.
Vers 6 — A, bien et vout jurer. B, bien et veut jurer.
7 — C, Qu’il n’aura ja.
10 — C, cort tenu.
12 — C, Trop volentiers deïsse ho.
14 — B, Que mainte foiz m’a fet. C, Mais ele m’a fet tant.
15 — B, Si que.
17 — B, ce que.
18 — cis. B, li. C, cest.
19 — B, S’el.
24 — en. A, vous.
25 — C, fait cil, « je l’otroi.
26 — C, Mais une ne m’en fera rien.
27 — B et C intervertissent la fin de ce vers, « ont parlé », et celle du vers suivant, « l’ont mené ».
28 — parent. C, ami.
29 — C, Donné li ont.
32 — B, C, Du damoisel. — A, B, le couvenant.
33 — A, B, Qui dit que ja fame n’auroit.
37 — C, dedenz ses las.
38 — C, Qu’el. — C, tout laz.
39-42 — Ces vers manquent dans A et B.
43 — l’eut. C, eut.
45-58 — Ces vers manquent dans A et B.
58 — racuili, lisez racuilli.
61 — dist. C, fait. — qu’avez-vous, lisez qu’avez vous.
64 — A, B, Si viguereus.
66 — C, contenir.
69 — dist. C, fait.
70 — C, compagnie.
71-72 — Ces vers manquent à C.
73 — B, Car mon. C, Sait mon.
74 — C, Qu’ains. — A, B, ne fetes vo.
75 — me muir. B, ne puis. — C, Boyn, par les sains Dé(x), je ne puis.
76 — C, les cuirs.
77 — C, Je n’en puis mais laissier m’ester.
78 — adès. A, huimès.
80 — dist. C, fait. — Ce vers et le précédent sont intervertis dans C.
81 — B, C, Dites moi dont.
83 — C, Quant l’une.
84 — C, L’autre an.
85 — C, Lors i.
89 — B, Que ne vos poez removoir.
96 et 103 — dist. C, fait.
99 — voz noces. C, vostre honnor.
100 — C, Car j’ai si.
101 — B, j’en ai quis. C, et j’en ai.
102 — Ce vers manque à B.
103 — C, soit.
104 — C, .LX. — C, maintendroit.
105-106 — Ces vers manquent dans A et B.
107 — demora. C, furent mout.
109 — C, ne sai par.
111 — C, Droit en la vile où il.
113 — C, Les un(s) le jugent à noier.
114 — B, Et l’autre. — C, Et li autre[s] à escorchier.
115 — C, le juja à pendre.
116 — C, à ardoir en cendre.
117 — B, C, Adonc vint cil.
118 — B, Qui tot estoit pales. C, Qui si estoit megres.
119-120 — Ces vers manquent dans A et B.
122 — B, C, Qui sot avoir le cuer si gai.
123 — A, B, et leur dit einsi.
124 — Ce vers manque dans A et B.
126 — A, B, S’ert. — B, einsi. — suis, lisez sui. — A, B, honiz.
127-129 — Ces trois vers manquent dans A et B.
130 — A, B, Et en.
133 — cil. B, il.
134 — C, Neis la fame, aussis si.
136 — mieus. B, plus.
137-156 — Ces vers manquent dans A et B.
141 — * aussi. C, aussis.
147 — * Einsi. C, Einsis.
Cette histoire, qui peut servir de contre-partie à celle de la Dame qui servait .C. chevaliers (I, 294-300), se retrouve dans Eustache Deschamps et dans les Facéties de Bebel ; elle est du reste très-populaire, et elle existe dans un grand nombre de recueils de contes provinciaux, où elle passe pour spéciale à telle ou telle localité. L’archiprêtre de Hita, au XIVe siècle, a connu ce fabliau et l’a admis dans ses poésies sous le titre de : Ensiemplo del Garzon que queria casar con tres mugeres.
A. — Paris, Bibl. nat., Mss. fr. 837, fol. 305 vo à 306 vo.
B. — » » » 1593, fol. 61 vo à 62 vo.
C. — » » » 1635, fol. 14 vo à 15 vo.
Publié par Barbazan, I, 48 ; par Méon, III, 30-35 ; par Ach. Jubinal, Œuvres complètes de Rutebeuf, 2e éd., II, 105-112, et traduit par Legrand d’Aussy, II, 315-321.
Vers 1 — B, vorroit fame.
4 — A, C, Au deable.
8 — B, poine.
12 — B, fafelues.
15 — A, Issi.
21 — ele. A, cele.
26 — son. B, le.
28 — vint. B, vet. C, va.
31 — cuit. B, croi.
33 — * preste. A, B, C, prestre.
35 — B, Or est.
36 — C, Sire, n’est mi[e].
37 — ceste. A, cele.
41 — C, Bien. — B, d’ou.
42 — A, C, Le.
47 — B, Que. C, Qui.
51 — el. C, au.
52 — B, C, Que nus ne le.
55 — emplus. A, C, moilliez.
57 — B, le covient.
58 — B, sovient.
61 — .III. A, .V.
63 — « vous » manque à B.
68 — A, C, Vous avez.
74 — sa. B, la.
81 — « j’en » manque à B.
83 — A, Fet li vallès, « comme.
85 — que. A, qu’il. C, qu’el.
90 — les. B, ses.
92 — qu’il. B, que.
93 — C, Au.
94 — vient. C, vint. — B, Se li vint à mout.
96 — vostre. B, C, ta.
97 — « est » manque à B.
99 — cil. C, il. — B, a oï que fors.
118 — controuveant, lisez controuvant. B, je contant.
121 — C, putainz.
123 — B, D’où.
126 — et. B, ne.
127 — « et » manque à B.
128 — « vient » manque à B. — d’avoec. C, d’enchiez.
129 — C, Ensi.
130 — si. B, et.
131 — qu’el. B, que.
137 — Ce vers est le dernier de la page ; il ne peut donc pas porter le no 138, indiqué à côté du titre courant. La même erreur a eu lieu à la page suivante, ce qui fait que ce fabliau doit compter 170 et non 172 vers.
138 — fet. B, dit.
139 — « je » manque à B.
140 — B, boisdie.
143 — l’en. C, on.
150 — B, devroie.
153 — A, C, Dist.
161 — B, cest[e].
169 — A, B, Rutebuef.
Ce fabliau, imité par Imbert, se retrouve dans les Cent Nouvelles nouvelles.
A. — Paris, Bibl. nat., Mss. fr. 837, fol. 275 vo à 277 ro.
B. — » » » 1553, fol. 505 ro à 506 ro.
C. — » » » 1593, fol. 118 vo à 120 vo.
Publié par Barbazan, II, 155 ; par Méon, III, 264-272, et imité par Legrand d’Aussy, II, 358-362.
Vers 1 — B, De biaus dis.
2 — * avoier. A, amoier. — C, avoie. — B, Me vaurai mout bien amoier.
3 — B, Et dire. — l’en. B, C, on.
4 — B, Et tant faire c’on.
5 — B, Car cil.
8 — A, B, Est au bien entendre.
9-10 — Ces vers manquent dans A et B.
11 — A, Et li fel envieus trahitres. B, Et li mauvais fel et traïtres.
12 — B, Est tout adiès dolans et tristres.
13 — le bien. C, les biens. — B, Dou bien quant il ot.
15-26 — Ces vers manquent à B.
16 — Oiez. C, Ha, Dieus !
18 — C, Dont .I. seul à estout ne vint.
22 — C, Qu[e] il art tot de duel.
24 — C, set conter.
26 — C, aprent (faux).
27 — fabliaus. B, romans.
28 — B, Qui. — A, en la meson d’un.
30 — A, Vilain. — B, et cuivert.
31 — maus vices. B, mais vises. C, malices.
32 — B, Je cuit qui ne fust. C, Et sachiez qu’il n’est.
34 — B, S’uns grans.
35 — B, molt estoit de put. — C, Tant estait plains.
37 — « bien » manque à C. — B, molt li pesoit.
38 — Et por .I. poi qu’il n’en ragoit.
39 — Ce vers manque à B.
40 — B, qui molt estoit preudon. — Ce vers et les huit suivants (40-48) sont placés dans B après le v. 54.
42 — se. B, C, s’an.
44 — Quar. B, Il. — voit. A, set.
45 — A, Qui reperier. — B, Qui laiens venist osteler.
46 — A, avoit .I. los tel. B, a un los itel.
47 — C, Car. — A, Que toz li mondes.
48 — C, dire oioit.
49 — B, C, Mès.
50 — et plains. B, dedens. — B, C, ses boiaus.
51 — de. B, le. C, du. Page:Montaiglon - Recueil général et complet des fabliaux des 13e et 14e siècles, tome III.djvu/399 Page:Montaiglon - Recueil général et complet des fabliaux des 13e et 14e siècles, tome III.djvu/400 Page:Montaiglon - Recueil général et complet des fabliaux des 13e et 14e siècles, tome III.djvu/401 Page:Montaiglon - Recueil général et complet des fabliaux des 13e et 14e siècles, tome III.djvu/402 Page:Montaiglon - Recueil général et complet des fabliaux des 13e et 14e siècles, tome III.djvu/403 Page:Montaiglon - Recueil général et complet des fabliaux des 13e et 14e siècles, tome III.djvu/404
A. — Paris, Bibl. nat., Mss. fr. 837, fol. 228 vo à 229 ro.
B. — » » » 19152, fol. 47 ro à 47 vo.
C. — Bibl. de Berne, Mss. 354, fol. 143 vo à 145 ro.
Nous empruntons les variantes du ms. de Berne à la copie de la Bibliothèque nationale (coll. Moreau, 1720 ; Moreau, 46).
Publié par Méon, IV, 114-119, et avec traduction par Eug. Crépet, Poëtes français, I, 239-247 ; traduit par Legrand d’Aussy, II, 238-242.
Vers 3 — A, C, d’un.
5 — A, C, Tele.
6 — A, « Qu[e] » manque.
8 — A, Quant li parti l’ame. C, Que l’ame se parti.
10 — A, Ne qui rien nule.
11 — « fu » manque à B. — C, est pooreuse.
12 — C, estait doteuse.
13 — A, Regarde à destre. C, Garde sor destre.
14 — A, C, S’a veü l’angle.
15 — A, Qui une ame porte.
16 — A, Cele part. C, Après lui. — A, C, a tenu sa voie.
17 — C, Tant seust l’ange, ce m’est avis. — Les vers 17-22 sont remplacés dans A :
Sains Pieres, qui gardoit l’entrée,
Avoit la porte desfermée ;
Et prist l’ame que l’angles porte.
Puis s’en retorne vers la porte.
19-22 — Ces vers sont remplacés dans C :
L’ame est après leanz entrée;
Saint Peres, qui gardoit l’entrée,
Reçut l’ame que range[s] (a)porte :
Après retorna vers la porte.
23 — A, Et vit l’ame. C, Si vit l’ame.
24 — C, li quel.
27 — A, saint Guilain. C, saint Germain.
29 — A, Ne vilains n’a riens. — C, Vilains ne doit pas ceianz estre.
31 — A, Dist li vilains. C, Fait li ame.
32 — A, C, Toz tans. — A, fustes vous durs que pierre.
33 — C, par saint Tomas l’apostre.
34 — C, Deus qui. — A, Qui vous establi par apostre.
35 — A, C, Petit i conquesta.
36 — A, Quant on trahi. C, Car tu traïs.
38 — A, Vous le. — C, Vos renoiastes par. — Ce vers est placé avant le v. 37 dans le ms. A.
39-40 — Ces vers sont remplacés dans A :
Et s’estiiez de sa compaingne,
Ceste maisons ne vous adaingne,
Ainz liet vous et vostre manoir :
N’en devez pas les clez avoir.
Dans C :
Que n’estoiez de sa conpeigne,
Ceste maisons ne vos adaigne,
Ainz est nus (sic) et notre menoir :
Vos ne devez les clés avoir.
41 — A, Alez hors o les desloiaus. C, Alez hors, alez, desloiaux.
42 — A, Mès. C, Que. Page:Montaiglon - Recueil général et complet des fabliaux des 13e et 14e siècles, tome III.djvu/407 Page:Montaiglon - Recueil général et complet des fabliaux des 13e et 14e siècles, tome III.djvu/408 Page:Montaiglon - Recueil général et complet des fabliaux des 13e et 14e siècles, tome III.djvu/409 Page:Montaiglon - Recueil général et complet des fabliaux des 13e et 14e siècles, tome III.djvu/410 Page:Montaiglon - Recueil général et complet des fabliaux des 13e et 14e siècles, tome III.djvu/411
159 — A, Tort droit. — B, Droiz vaint avant et torz aorce.
160 — B, engien.
Ce fabliau, qui n’est pas un conte dévot, bien qu’il mette en jeu Dieu et les apôtres, fait sans doute allusion par le vers 146 à la parabole de Lazare et du mauvais riche (Luc, XVI). Il a été remis en vers par Imbert et par Gudin.
Publié par Barbazan, I, 113 ; par Méon, III, 70-75 ; par Ach. Jubinal, Œuvres complètes de Rutebeuf, 2e éd., II, 78-85, et traduit par Legrand d’Aussy, III, 105-107.
Vers 2 — Il est à remarquer que dans ce fabliau, ainsi que dans le suivant, provenant du même ms., la notation de c pour s est assez fréquente.
12 — * nel ; ms., ne. — * oef ; ms., oes.
18 — * estable ; ms., metable.
28 — « bien » manque au ms.
77 — Le mot « Bédouin », employé à l’époque de ce fabliau, nous prouve qu’alors il avait déjà le sens extensif que le peuple lui donne aujourd’hui.
78 — « Baudoin » est le nom donné par tout le moyen âge au baudet. Chaque animal avait son surnom : l’ours s’appelait Bernart (de nos jours Martin), le moineau Drouineau, le goupil Renart (qui est resté), etc.
86 — * secueure; ms., secoure.
Ce récit, un des plus répandus dans la littérature populaire, doit certainement venir d’Orient, d’où Le Sage l’a fait passer dans son Gil Blas (liv. V, ch. I). Dans ce cas, il s’agit non d’un âne et d’un prêtre, mais d’un chien et d’un cadi. Quant à l’histoire des Mille et une Nuits dont parle Legrand d’Aussy, nous ne la connaissons pas. Les Contes secrets russes (voy. p. 334-335) nous offrent deux versions de ce conte (p. 104, conte 48e) : dans l’une, il s’agit d’un chien, et dans l’autre d’un bouc. Les autres imitations sont du reste nombreuses : Malespini (nov. 59), le Pogge et d’autres encore (Cf. Legrand d’Aussy, III, 107).
Publié par Barbazan, I, 140 ; par Méon, III, 87-91 ; par Ach. Jubinal, Œuvres complètes de Rutebeuf, 2e éd., II, 98-104, et donné en extrait par Legrand d’Aussy, III, 90-92.
Vers 12 — « Aviceinnes », sans doute Vincennes, demeure d’Alphonse de Poitiers (Cf. v. 17-18). — Peut-être faut-il lire que à Vincennes.
14 — Ce Guillaume, grand panetier d’Alphonse, était dans doute un des ennemis de Rutebeuf.
69 — Le Charlot dont il est ici question, et que Rutebeuf a mis en scène une autre fois encore (Desputoison de Challot et du Barbier, Œuvres…, II, 8-14), devait être un trouvère rival de l’auteur, qui ne trouve pas de meilleure insulte que de le traiter de juif (Cf. II, 12).
72 — * Cui ; ms., Qui.
126 — « Maistre Horri », auquel Rutebeuf fait encore allusion dans sa Complainte, est sans doute ce qu’Ach. Jubinal en a fait (I, 19). Les fosses d’aisance, et par suite les vidanges, étaient choses connues au moyen âge (Cf. A. Giry, Histoire de Saint-Omer, 262).
Nous retrouvons quelques ressemblances avec ce fabliau dans le conte 75e (p. 192) des Contes secrets russes (voy. p. 334-335). Il s’agit d’une mésaventure dans le genre de celle qui arrive à Guillaume.
A. — Paris, Bibl. nat., Mss. fr. 837, fol. 158 vo à 161 ro.
B. — » » » 2168, fol. 209 vo à 213 vo.
C. — Bibl. de Pavie, Mss. 130 E 5, fol. 50 ro à 53 vo.
Nous empruntons les variantes du ms. C (Bibl. de Pavie) à M. A. Mussafia, Sitzungsberichte der k. Akademie der Wissenschaften (de Vienne), Phil.-Hist. Classe, LXIV, 571-575.
Publié par Méon, IV, 1-19, et donné en extrait par Legrand d’Aussy, III, 288-291.
Vers 1 — C, Or entendez.
2 — C, Une mès.
3 — C, ci raconter.
6 — ele. C, qu’elle. — B, Sachiés qu’ele est enfin.
9-14 — Ces vers manquent à C.
10 — B, Mais cortois, sages.
16 — « Oisemont », Picardie, près d’Amiens.
18 — ne. B, n’i.
19 — C, Car trop trouva.
21 — B, Felons et. — C, Et cuvers et de pute.
26 — B, De to(r)st errer. — C, De bien errer sa voie atourne.
27 — B, C, Se cape. — sor. C, sus.
28 — B, C, Et près.
30 — « Bailleul » dans la Flandre française est souvent cité par les trouvères de cette région. Nous avons un fabliau qui porte le titre de « Vilain de Bailleul ».
31 — A, voies.
32 — B, C, il vespre fu. — C, et mout fist noir.
33 — C, Pense. — c’ui mais. A, soi plus.
34 — B, C, Mais… remanra.
35 — B, Molt. C, Qu’il. — B, C, redoute.
36 — C, Qu’il ne. — B, C’on ne li toille.
38 — B, En l’entrée.
39 — B, Vit. C, Ot.
40 — B, Si li demanda et. C, Il li demande et li. — B, C, dist tant.
42 — B, Nule riens où on puist. C, Riens nulle c’on puisse.
44 — C, Onques.
46 — B, C, Sire, par tous les sains du mont.
47 — A, mon baron. C, mes maris.
50 — B, .II. touniaus en a tous entiers.
51 — B, Qu’il amena de. C, Qu’il acheta à. — « Nogentel », en Brie.
52 — C, Touz temps.
53 — B, Alés avec lui ostel. C, Alez avec li l’ostel.
54 — B, C, g’irai.
55 — B, C, Fait li bouchiers. — C, Dieus vous consaut.
56 — B, C, et il vous. — B, consaut. C, [con]saut.
57-58 — Ces vers manquent à B et C.
60 — B, C, Qui molt avoit en li d’orguel.
61 — Cil. C, Il. — puis. B, se. C, si.
62 — que. B, se. — C, Sire, Dieus vous doint bone nuit.
66 — B, C, Foi que jou doi à saint. — B, Hebert. C, Lambert.
67 — nuit. A, ja.
68 — C, Querez qui.
70 — C, Querez à mont, querez à val.
71-74 — Ces vers manquent à C.
72 — B, Et sachiés vraiement por voir.
73 — cest. B, mon.
74 — i ont. B, ont cest.
75 — C, Que ce. — B, n’est [pas] droiture à prestre.
79 — B, Oie voir et. C, Oïl, sire.
80 — C, Alés vous ent.
81 — B, Ce m’est avis. — C, que c’est. — B, ramprosne.
82 — C, A ! sire, ainz seroit grant.
83 — B, Se huimais. C, S[e] umès.
84 — B, Car je n’en.
85 — B, Que je sai bien. C, Car je sai bien.
86 — B, C, Se de vo vin.
87 — B, C, Grasses et grés vos en saroie.
88 — B, Et volentiers l’acateroie. C, Et volentiers le poieré.
89 — B, Ausi bien vous venroit hurler. C, Rienz nule ne vous voeil couster.
90 — B, Dist li diens, « par saint Omer.
91 — B, Vo teste. — dure. B, C, bise.
93 — B, Ja ne gerrés.
95 — B, Fait li.
97 — ne. B, n’i.
98 — de grant. C, et de.
99 — B, Or oiés comment li avint.
100 — B, Si com hors.
102 — B, furent keü. C, cheü erent.
103 — C, tropel.
105 — B, Il salue le.
108 — B, C, se Dius.
109 — le. B, no. — C, Cui est cis avoirs ? — A no prestre.
110 — B, A foi de par Dieu. C, De par Damedieu.
111 — B, Or orrés.
112 — B, Tout.
113 — B, K’ains. — C, ne l’aperçut.
114 — Après ce vers, B ajoute :
Qui ne le vit ne mot n’en seut ;
Li bouchiers au plus tost qu’il peut.
Et C :
Ains ne le vit ne ne le sot,
Et le boucher plus tost qu’il pot.
117 — B, Au més le prestre en vient. C, S’en vet chiés le doien(s).
118 — fu fel. B, C, ert fiers.
119 — B intervertit à tort les mots « clorre » et « la porte ».
124 — B, demanda erranment.
127 — que cest. B, c’un seul.
128 — il. B, chieus.
129 — B, C, Sire, anuit.
130 — B, Car bien [en] voel estre.
131 — ne, B, ni.
132 — C, en soit mengié.
133 — por. B, mais.
134 — B, Caporté l’ai à grant. C, Aporté l’ai à grant.
136 — goulouse. C, couvoite.
138 — B, Ensi con moi en est. — « Dist » manque à C.
139 — Oïl. B, Oie. — C, « Certes, » fet il.
140 — C, Mès que vous y fussiez vous tiers.
141 — B, Si ariés. — C remplace ce vers et le suivant par quatre autres :
Vous herbergeré voirement :
S’aurez ostel à vo talent. »
Aine nus homs mieus ne se prova
Com li doiens celui fet a.
142 — B, C’ainz.
144 — B, C, de bon afaire.
150 — B, Ja Dieus de ses sains ieus. C, Que ja Dieus de ses ieus.
151 — B, C, Celui cui.
152 — B, C, Huimais. — B, seroie près du fu. C, se treront vers le fu.
153 — B, C, entrent.
154 — B, Là u li fus (faux).
156 — C, Regardé a et sus.
158 — tost. C, lues. — B, On li a tantost.
159 — tue. B, asome. C, escorce.
160 — C, Sus le banc a geté. — B, A .I. bauch ki fu là d’encoste.
161 — B, Pendi le pel. C, Puis prist la char.
162 — B, « Sire, » dist il. C, Puis dist : « Sire.
164 — C, est bien prouvez.
165 — C, Vez comme il est.
167 — B, Si loins. C, trop loing.
169-170 — C :
Metés l’espaule toute en rost,
Et s’en faites cuire plain pot.
171 — B, essiau.
173 — B, C, C’onques.
174 — cuire. B, rostir.
175 — C, Vez comme elle est crasse.
176 — saveur. C, sausse.
177 — B, vraiement.
178 — fetes. C, à vo.
180 — B, Donc faites tost. C, Or faites donc.
181 — C, n’i a que du laver.
185 — si fort. B, si fais. — C, jalous forment estoit.
186 — nuiz. B, fois.
189-194 — Il manque certainement un vers dans le ms. B, qui s’exprime ainsi :
A la table avoec le bouchier…
Quant il ont mengié à delit,
La dame fist parer .I. lit
Avec son oste bon et bel
De blans dras bué[s] de novel.
On lit dans C :
Avec son oste bien et bel
Et menja de maint bon morsel
Celle nuit avec le bouchier.
Et fet samblant que mout l’ait chier.
Quant orent mengié par delit,
La dame li fist fere .I. lit
De blans dras lavez de nouvel ;
Si li fist et tost et isnel.
197 — C, à ese. — Ce vers et le suivant sont remplacés dans B :
Que nos estes sire Davis
Soit aaisiés à son devis,
Si qu’il n’ait riens qui li desplaise,
Par lui avons esté bien aaise.
198 — C, Et qu’il.
199 — B, s’en vont.
202 — B, plus à aise ne fu.
203 — Bon. C, Bel. — biau. C, bon.
204 — B, Baissele.
205 — B, toi en cha, parole à mi.
206 — B, de moi ton ami.
207 — B, Tu i porras.
208 — B, Taisiés, que le(s) ne dites preu. — B ajoute ces deux vers :
Dieus ! com cist home sont vilain !
Laissieme em pais, est en vo main.
C remplace les vers 208-210 par les suivants :
Se tu veus souffrir de mon gieu.
— Taisiez vous, je n’en ai que faire.
— Par Dieu, il le convenra faire.
209 — Ja. B, Je.
210 — B, Par foi, il le te.
211 — B, Par covent ke je te dirai.
212 — B, Dites donques. C, Or dites donc.
213 — B, C, avec moi gesir.
214 — B, C, Faire mon bon. — C, plesir.
217 — B, C, Taisiés, onques. — B, mais ce me. C, ce ne me.
218 — B, C, Par Dieu, vos n’estes. — B, mie erites. C, pas herites.
220 — C, Dieus ! comme estes mal.
221 — B, com vos santés sos. — Ce vers et le suivant se lisent ainsi dans C :
Certes trop estes riotous :
Se no bon fesons, moi et vous.
223 — C, diriez à ma dame.
224 — B, C, se Dius ait pitié de m’ame.
225 — C, Ja à nulli.
226 — B, C, ne vous encuserai.
227 — C, elle agréanté.
228 — Après ce vers, C ajoute :
Et tantost s’en ala couchier
La meschine avec le bouchier.
230 — B, Puis se leva, si fist le fu. C, Au matin aluma le fu.
231 — B, Son harnas fait et. C, Son pot a pris, si.
232 — C, Adonques.
234 — B, dire. C, lire. — B, C, leur sautier.
235-238 — Remplacés dans C :
Et li bouchiers si s’est levez,
Si s’est vestuz et atornez.
236 — B, Et li bouchiers de.
238 — B, saisons et.
239 — C, Et est venuz.
240 — B, Vint à s’ostesse. C, Droit à la dame.
241 — C, Le loquet hauce.
242 — B, Le bele dame.
244 — B, estoit tout droit. — C, Devant son lit où il estoit.
245 — B, Lors s’esmerveille. C, Mout se mervelle.
249 — C, Et si.
250 — C, près du.
251 — B, Son chief mist seur. C, Met sa main sus.
252 — B, Puis.
253 — B, Si vit le. C, Et voit sa.
254 — B, Et se p. et se m. C, Et sa boutine et sa m.
255 — dist il. B, fait il.
256 — Saint Berthelemi et.
258 — C, Qu’avec tel fame.
259 — B, Ausi. — C, Si m’aït bien.
260 — C, en seroit.
262 — B, Que peüsse une nuit. C, Que peüsse avec vous.
264 — C, n’est pas.
266 — en sus. B, la hors.
267-268 — C :
Faites tost, alez hors, pour Dé :
Messire avera ja chanté.
268 — B, Molt.
269 — C, S’il.
271 — C, auriez honnie et.
274 — C, mouverai. C, me mouvré.
278 — B, orguellouse ne. C, ennuieuse ne.
279 — C, Ne l’ocesisse.
280 — B, Se de riens nule aloit grouchant. C, Mès ore oez mon convenant.
281 — Et. B, Mais.
282 — B, Me pel, amie. C, Ma pel, dame.
283 — plenté. C, foison.
284 — B, Je n’oseroie pour le gent.
285 — B, asi estout.
286 — C, « Que » manque.
287 — dist il. B, fait il.
288 — C, com soie ne vis.
290 — à. B, en.
291 — C, li a dit, tant.
294 — B, C, Tant qu’il en eut tout.
295 — B, Atant s’em part.
296 — C, Au moutier s’en vet.
297 — B, commenchie sa. — Ce vers et le suivant se lisent dans C :
Ot ja commencé son sermon
En une ne sai quel leçon.
298 — B, Ainques n’i fusi arestison.
299 — B, « il » manque. — Domne. B, Domine.
301 — B, grés vous en rent. — On lit pour ce vers et le suivant dans C :
Sire, » dist il, « noméement
De vostre ostel grâces vous rent.
302 — B, Herbergiet m’avés à talent.
303 — B, Et mout m’avez fait. — Ce vers et les deux suivants dans C :
Je me lo de vostre semblant ;
Si vous vœil dire maintenant
Et vous pri tant pour moi fachiez.
305 — B, Et proi que vos me fesissiés.
306 — C, Sire, me pel.
307 — C, Si m’avez.
308 — C, .X. livres.
309 — B, Ele est.
310 — C, prenez la por deus.
313 — C, Dist li prestres, « mout volentiers.
317 — B, Puis prist congié, si s’en ala.
318 — B, Li fame au prestre. C, La b[one] dame.
319 — ert. B, fu.
320 — B, Si se vesti d’une vert. C, Vestue ot une verde.
321 — C, Bien est. — B, [Mout] bien ploïe.
322 — B, Et si eut escorchiés ses. C, Escorchié ot mout bien les.
324 — B, Vair et.
325-326 — Ces vers manquent dans A et C.
327 — B, Li baissele sans plus. C, Et la meschine senz.
328 — C, Va.
330 — B, baissele, car.
332 — C, qu’en avés vous à fere.
334 — B, à escaufer.
336 — B, Quele pent chi hors de le voie. C, Ele seroit trop en la voie.
337 — B, C, Si fat.
338 — dist el. B, C, j’ai fait.
339 — C, que vous.
340 — C, Par foi.
343 — B, te main plus.
345 — C, Par Dieu, dame, que.
346 — C, Trestoute m’en entremetrai.
347 — C, Si en ferai com de.
348 — B, As tu dit que le pel est toie.
349 — B, je l’ai dit.
351 — B, Ou te noie en une. C, Ou voises en une.
352 — A, Certes, or ai je grant. C, Mout ai ore trés grant.
353 — C, Que tu.
355 — C, Va t’en. — B, Va, si aroie te maison.
356 — C, Dame, or dites vous.
357 — B, Quant.
358 — « seur » manque à C.
359 — B, S’iert ele mieue. — C, Si sera la piau toute moie.
360 — B, mon ostel, va te.
361 — C, N’ai plus.
362 — B, Car trop. — C, Car tu es trop foie et trop.
365 — B, Tant t’ai forment. C, Si t’ai je encueilli.
366 — C, Que par le col.
368 — C, J’atenderai que.
369 — B, Mesire, et puis. C, Et puis certes. — Ce vers et le suivant sont intervertis dans C.
371 — B, Vous clamerés, pute boufarde.
373 — B, dame, (vous) dites. C, voir, vous dites.
375 — B, du prestre(s) avés.
376 — B, passion, met le.
377 — B, Me pel.
379 — B, Par les nons Dieu. C, Par le cuer Dieu.
380 — C, La dame a prise. — A, quenoille.
381 — B, l’en fiert et cele.
383 — B, m’avés ore à tort.
384 — B, mout bien.
386 — B, C, mout fort.
388 — A, le prestre[s]. C, prestre en la.
389 — C, fet il, « Qui a ce. — Lisez ce ? » dist il.
390 — mesfet. C, forfet. — B, Sire, ma dame.
391 — B, Par Dieu, por noient ne fu mie. C, Certes pour noient n’est ce mie.
392 — B, Di me voir, si ne me ment mie. C, Di m’en le voir ne me ment mie.
393 — B, C, Certes, sire.
394 — C, Qui pendoit là dessus le fu.
395 — A, C, Sachiez que vous.
397 — nos. C, vos.
398 — C, Eüst ostel.
400 — B, C, voirement.
401 — B, jurée l’ai. C, jurer porai.
402 — C, gaaignie l’ai.
405 — culonée. A, enganée. — B, Que ses ostes l’ot enganée.
406 — sa. B, la. — C, Pour la pel qu’il li ot.
407 — C, Il fu.
408 — B, n’en ose. C, n’a osé.
413 — ma. B, no.
414 — « vos » manque à C.
416 — C, rendriez (trois syllabes).
417 — B, C, Que.
418 — B, voir vos.
419 — B, Quant.
420 — B, Et hounist li orde puslente.
421 — B, Ne je ne se qu’il avendra.
422 — Ja. B, Mais. — C, Mès que la pel moie sera.
423-424 — Ces vers manquent dans A et C.
425 — C, Elle est vostre ?
426 — Nostre. B, Nos. C, Vos. — no. C, ma.
427 — B, Sor no kuite et sor nos. C, Seur ma couite et sur mes.
428 — B, Et. — C, Maugré en ait sainte Richeus.
430 — B, C, Bele suer.
431 — C, Par la foy que me promeïstes.
432 — primes. B, premiers. — C, en cest hostel venistes.
434 — B, par saint Pierre l’apostre.
435 — C, Et la meschine.
436 — B, Ha ! sire. — C, Hé ! sire, ne l’en.
437 — ainçois. C, avant.
438 — B, C, fussiés vous.
440 — B, Alés ent hors de ma. C, Alez hors de nostre.
442 — Le scribe du ms. C, qui n’a certainement pas su que le « saint signe de Compiegne » était le suaire du Christ conservé à Compiègne, a introduit la leçon suivante : le saint seigneur.
443 — B, Dist li prestres. C, Dist li doiens.
444 — C, Bien voi que le haés.
445 — C, C’est pour ce qu’ele est.
448 — B, M’avainne et mon orge. C, M’avene, mon forment.
449 — C, et mon lart me prenés.
450 — B, Sire, com vous estes. — C, Certes, mout estes forssenés.
451 — B, Qui tant l’avés chaiens.
453 — C, Et fetes que à li contés.
454 — C, or escoutés.
457 — B, C, Dites moi ki.
458 — B, Nos otes. C, Mes ostes.
459 — Voir. A, Vois. — B, Et pour les boiaus. C, Oez pour le cors.
460 — B, jehui.
461 — C, Ançois que parust.
462 — C, com par estes.
463 — B, Qui si jurés escortement. C, Qui jurez si trés cruelment.
464 — B, C, Il prist congié. — B, mout belement. C, si doucement.
465 — B, C, A moi quant il s’en dut aler.
467 — adonc. C, sire. — B, Nenil. — Quant donc ? — Je me gisoie.
470 — B, Or convient. C, Il couvient. — C, esponde.
472 — B, sousprendre.
473 — B, Dame, à Dieu vous.
474 — C, Et s’en ala tout maintenant.
475 — B, C’ainc plus n’i fut ne plus n’i dist. C, Plus ne parla ne plus ne dist.
476 — B, Ne riens autre. C, N’autre chose.
478 — B, Mais vos i entechiés folie. C, Mès vos i pensés la folie.
479-488 — Ces vers manquent à B.
481 — C, La merci Dieu se tout bien non.
483 — Répété dans C.
484 — Ce vers manque à C.
485 — Ce vers, qui dans C est placé après le v. 486, se lit ainsi :
Que nule fois ne me remue.
491 — B, A peu ke ne te fier ou tue.
492 — B, Vraiement sai.
493 — B, Di va.
495 — B, C, Va t’ent, si vuide.
496 — B, Je juerrai sur. C, Je m’en iré à.
497 — deseur. C, sur sains. — On lit dans B, mais après le v. 498 :
Orendroit ce fournierai.
498 — C, Que jamès ne te maintenrai.
499 — B, Par ire s’est li prestre assis.
500 — B, Dolans et tristres et pensis. C, Touz corouciez et touz marris.
502 — B, Se li poise que ele.
504 — Mout. B, Si.
505 — B, En le cambre entre maintenant. C, En la chambre s’en entre atant.
506 — vient acourant. A, tout maintenant. C, de maintenant.
509 — B, Si ne. — Ce vers et le suivant se lisent dans C :
Grant aleüre est revenuz,
Touz courrouciez et esperdus.
511 — B, Gratant. — C, ses ongles.
512 — C, disoit s’oroison. — B, Li diens siet seur sen leson.
513 — B, Tous. — Ce vers et le suivant manquent à C.
514 — B, K’esçou, el non de vis maufés ?
515 — B, Ribaus mauvais. — Ce vers et le suivant se lisent dans C :
Atant entre li pastre en l’us :
« Qu’est ce ? mal soies tu venus !
518 — B, C, Tu deüsses.
519 — B, A peu ne te.
520 — C, j’ai perdu un.
521 — B, C, le plus bel de. — C, mon tropé.
522 — B, l’a atrapé. — C, Di va, où as tu donc esté ?
526 — C, Sire, pour Dieu.
527 — B, quant jou chaiens entrai.
528 — « i » manque à C.
530 — ni en chemin n’en voie. C, en chemin ne en voie.
531-534 — Ces vers manquent dans A et C.
535 — B, Si le. C, Qui le.
536 — B, Par le cuer bleu.
539 — B, Et qui m’amie.
540 — C, Et ma pel meïsme vendue.
541-544 — Ces vers manquent dans A.
542 — C, Qu’à bone eure.
543 — C, Onques ne m’en soi. — Ce vers et le suivant sont intervertis dans C.
545 — B, me fait.
546 — B, C, Counisteroies tu.
547 — B, Que dites vos, biau sire, avoi. C, Que dites vous, biau sire, à moi.
548 — B, Oïe si bien, se je le voi. C, Oïl mout bien, se je ta voi.
549-550 — C :
Il prent ........
Et la repince et la retaste.
552 — C, li paistres sa beste.
553 — B, « Ha la ! » ce dist. C, « Harou ! » ce dist.
554 — C, Par les yeus bleu.
555 — plus. C, mieus. — B, Le beste ou mont que plus.
556 — mon. B, no.
557-558 — Ces deux vers manquent dans A et C.
560 — B, Cha venés, dame.
561 — baissele. C, baiasse.
562 — B, Parlés à moi. — Ce vers et le précédent sont intervertis dans B.
563 — B, C, Parole à moi.
564 — B, sour cele. C, sur ceste.
566 — meschine. C, baiasse. — Ce vers manque à B, où il est remplacé par le suivant, placé avant le vers 563 :
Foi que doi vous que je molt aim.
568 — B, C, de m’ame.
569 — B, par droit estre.
571-576 — Ces vers manquent dans A et C.
578 — C, Vous qui cest conte oï avez.
579 — B, Vuistasses.
580 — B, Par amors et prie et commande. C, Et vous [en] prie et vous comande.
581 — C, le jugement.
582 — C, Chascuns en die son talent.
586 — C, Ou la baiasse pinprenesse.
Ce fabliau, qui offre une certaine analogie avec le conte de La Fontaine : A femme avare galant escroc, se retrouve dans un conte de Chaucer ; c’est aussi, à peu de chose près, le sujet de l’Anser venalis du Pogge, de la nouvelle XVIIIe des Cent Nouvelles nouvelles et d’une histoire de Boccace (journ. VIII, nouv. I) ; d’autres imitations existent encore.
Le ms. de l’Arsenal porte dans la nouvelle numérotation le no 3524.
Publié par Barbazan, à la suite de l’Ordene de Chevalerie, 168-177 ; par Méon, I, 100-105 ; par M. Aug. Scheler, Dits et Contes de Baudoin et de Jean de Condé, III, 299-303, et traduit par Legrand d’Aussy, III, 16-18.
Vers 17 — Athies est une petite ville du Vermandois, tout près de Péronne.
25 — Cf., sur le jeu du roy qui ne ment, Th. Wright, Anecdota literaria, 74. Il semble que ce soit un jeu dans le genre du jeu actuel des Proverbes.
Cette histoire a été remise en vers par Imbert, et nous ne connaissons pas d’imitation qui en ait été faite dans les littératures étrangères.
A. — Paris, Bibl. nat., Mss. fr. 19152, fol. 54 ro à 55 ro.
B. — Bibl. de Berne, Mss. 354, fol. 146 vo à 149 vo.
Nous empruntons les variantes du ms. de Berne à la copie de la Bibliothèque nationale (coll. Moreau, 1720, Mouchet, 46).
Traduit par Legrand d’Aussy, III, 207-213.
Vers 2 — B, Que je ai fait.
3 — B, passé a un.
4 — B, doi Deu et.
5 — g’en. B, l’an.
7 — oï. B, eu.
9 — B, Si tost que ne tarderai.
10 — B, Or oiez que je voil.
11 — A, Que li.
18 — B, Qui mout avoit et.
20 — B, Ot à monciaus.
24 — B, lo bon lignage.
25 — B, Que li. — Ce vers dans B est placé après le vers 26, qui se lit ainsi :
Et dechiet tot, et va à honte.
290 — B, Ce est.
291 — B, feroit.
292 — B, cil ot.
293 — B, grant duel et.
294 — B, ne li osa dire.
La version de ce fabliau, ci-dessus imprimée, dont l’auteur est Guérin, était jusqu’ici inédite, bien qu’elle ait inspiré la traduction de Legrand d’Aussy. Nous réimprimerons, dans le prochain volume l’autre version, déjà éditée par Méon. Outre quelques imitations lointaines de cette histoire au moyen âge, nous trouvons dans les Contes secrets russes (voy. p. 334-335) la mention d’un moujik paresseux et battu par sa femme déguisée en soldat. Imbert a remis ce conte en vers.
A. — Paris, Bibl. nat., Mss. fr. 887, fol. 829 vo à 331 ro.
B. — » » » 1635, fol. 60 ro à 62 ro.
Publié par Barbazan, I, 122 ; par Méon, III, 76-86 ; par Ach. Jubinal, Œuvres complètes de Rutebeuf, 2e éd., 63-77, et donné en extrait par Legrand d’Aussy, III, 380-383.
Vers 3 — A, Et il en a les dras.
13 — A, A grant dolor.
17 — flabel. A, ditié.
19 — A, Que l’en.
26 — A, a fet.
29 — B, peires.
31 — A, s’entramerent.
32 — A, et la.
33 — laianz. A, iluec.
43 — A, comme nous.
45 — B, fussi.
54 — A, De bone.
57 — A, La reson.
65 — A, ordre bien.
69 — A, Atant li freres.
73 — A, Qu’à.
77 — B, estauceüre.
79 — A, à tel.
82 — A, plus faus.
83 — mist. A, met.
87 — A, de la.
90 — A, tient.
93 — A, refet. — A, au tel.
96 — A, ele.
100 — A, en qui.
103 — A, A la.
115 — A, que je.
116 — A, Et cil respont.
118 — A, Metre. — A, que il.
123 — ot. A, a.
124 — tiers. A, .III.
132 — n’i. A, ne.
134 — a. A, ot.
135 — B, estauciée.
139 — A, Bien sanbloit jone homme de chiere.
150 — s’i. A, se.
153 — à. A, de.
154 — A, O les autres.
156 — A, contient.
158 — Lisez à sa. — B lit Quanque ele.
161-168 — Ces vers manquent dans A.
177 — A, ot lessié.
178 — A, A cele.
179 — A, Qui volentiers la retenoit.
191 — A, vout.
192 — A, Quant l’en ot fet oster.
207 — A, d’apercevance.
213 — A, Et de respondi.
218 — A, Avoec li dant.
225 — m’en. A, me.
228 — A, esfroi.
229 — B, mierllz. — A, que.
232 — c’i. A, se.
235 — A, Que.
236 — A, Et puis.
237 — A, Que il la trest de chiés. — B, son peire.
238 — A, Et se li.
241 — A, devant son.
257 — A, ne bons ne genz.
258 — aus. B, au. — A, Vos desfendez aus hones genz.
260 — A, Vieles.
261 — A, Et deduis de menestrerez.
263 — A, Mena.
270 — B, adent.
275 — A, si le lieve.
276 — A, fet il.
278 — A, nous jusqu’à .C.
280 — A, ot.
289 — A, C’onques.
293 — B, seüz.
295 — A, Ainçois sera bien.
296 — A, au mieus de sa.
298 — A, qu’il fust.
301 — B, mies.
306 — A, El li.
309 — A, L’arest.
310 — A, pas qu’autre.
314 — sa. A, la.
321 — B, au.
323 — A, Qui .I. soir leenz.
325 — A, contant.
Les imitations de cette nouvelle sont assez nombreuses : Cent Nouvelles nouvelles (nouv. 32), Contes de la reine de Navarre (nouv. 31), La Fontaine (Les Cordeliers de Catalogne), l’Apologie pour Hérodote, etc. Legrand d’Aussy (III, 384) cite un passage du Journal de Paris sous Henri III, qui nous apprend qu’en 1577 le fait raconté par ce fabliau s’est passé en effet à Paris, et que la damoisele Denise de cette époque s’appelait alors frère Antoine.
A. — Paris, Bibl. nat., Mss. fr. 837, fol. 154 vo à 156 ro.
B. — » » » 19152, fol. 120 vo à 122 ro.
Publié par Barbazan, II, 14, et par Méon, III, 169-180 ; traduit par Legrand d’Aussy, I, 343-349.
Vers 2 — B, A raconter une.
5 — A, Si con je truis en la matire. — Ce vers et le suivant sont intervertis dans A.
15 — « est » manque à B.
19 — A, Et mout.
20 — B, du clerc.
21 — A, bien et li.
23 — B, Cele se jut.
27 — B, Li dist .I. jor. Page:Montaiglon - Recueil général et complet des fabliaux des 13e et 14e siècles, tome III.djvu/441 Page:Montaiglon - Recueil général et complet des fabliaux des 13e et 14e siècles, tome III.djvu/442 Page:Montaiglon - Recueil général et complet des fabliaux des 13e et 14e siècles, tome III.djvu/443 Page:Montaiglon - Recueil général et complet des fabliaux des 13e et 14e siècles, tome III.djvu/444
TABLE DES FABLIAUX
- ↑ LXXXVIII. — Des Braies au Cordelier, p. 275.
A. — Paris, Bibl. nat., Mss. fr. 837, fol. 154 vo à 156 ro.
B. — » » » 19152, fol. 120 vo à 122 ro.
Publié par Barbazan, II, 14, et par Méon, III, 169-180 ; traduit par Legrand d’Aussy, I, 343-349.
- ↑ Vers 2 — B, A raconter une.
- ↑ 5 — A, Si con je truis en la matire. — Ce vers et le suivant sont intervertis dans A.
- ↑ 15 — « est » manque à B.
- ↑ 19 — A, Et mout.
- ↑ 20 — B, du clerc.