Recueil des lettres missives de Henri IV/1573/26 juin ― À monsieur de Serinhac



1573. — 26 juin.

Orig. – Arch. de famille de M. le baron de Scorbiac, à Montauban. Communication de M. Gustave de Clausade, correspondant du ministère de l’instruction publique, à Rabastens.


À MONSR DE SERINHAC[1].

Monsr de Serignac, Les affaires du Roy mon seigneur et frere en ceste armée ont prins tel succes, que nous avons faict et arresté une paciffication generalle par tout son Royaume, soubs toutesfois le bon plaisir de Sa Majesté, à laquelle ont esté envoyez les articles de la dicte paciffication[2]. De quoy je vous ay bien voullu advertir, afin que de vostre part vous cessez et faictes cesser tous actes et effectz contraires au beneffice d’une paix, repos et tranquillité d’une bonne pacification. Comme aussy, de mon costé, je donneray ordre qu’il n’y sera [en] aucune chose innové, ainsi que sur ce vous pourrez entendre plus amplement des sieurs de Beauregard[3] et de Moulins[4] ; qui gardera que, me remectant sur eux, je ne vous feray la presente plus longue : priant Dieu vous avoir, Monsr de Serignac, en sa saincte et digne garde. Escript au camp devant la Rochelle, le xxvje jour de juing 1573.

Vostre bon amy,
HENRY.


  1. Peyre ou Pierre de Terride, seigneur de Serignac ou Serinhac, général des églises calvinistes du côté de Montauban et de la province de Toulouse. (Voir les preuves de l’Histoire de Languedoc, de D. Vaissète, t. V, col. 229.) Nous ignorons comment le nom de Serignac passa de Géraud de Lomagne à Pierre de Terride ; mais il est certain que Géraud, seigneur de Serignac, ne portait plus ce nom de fief en 1573, puisque la Popelinière, parlant de lui sous l’année 1572, s’exprime de cette manière : Terride, autrefois dit Serignac. Au reste, ce ne sont pas seulement les transmissions de fiefs qui rendent les méprises très-faciles sur plusieurs membres de cette ancienne famille ; à cette première difficulté se joignent encore la confusion qui résulte de noms de fiefs fort semblables, telle que Serignac et Saint-Sevignac, et enfin les causes d’erreur résultant de ce que dans deux des branches de cette famille furent contractées des alliances avec les maisons de Cardaillac et de Lévis. Voir la lettre de janvier 1580, IIIme, note 2.
  2. La résistance de la Rochelle, où commandait la Noue, et la nouvelle que reçut alors le duc d’Anjou de son élection au trône de Pologne, déterminèrent un accommodement avec la ville protestante. Cette lettre fixe l’envoi des articles à la ratification du Roi, à deux jours plus tôt que les Mémoires de l’Estat de France. L’édit de pacification du mois de juillet 1573 suivit peu après ; édit qui du reste ne dura guère, « pour être court, captieux et contraire au dernier édit de pacification si solemnellement establi. » (Mémoires de l’Estat de France sous Charles neufiesme.)
    Cette lettre du roi de Navarre à M. de Serignac a pour objet de lui faire suspendre les actes d’hostilité qu’il exerçait contre les troupes catholiques du Languedoc, par suite de la ligue qu’il avait jurée au commencement du mois de mai précédent, avec les vicomtes de Paulin, de Gourdon, de Panat, les sieurs de la Bastide, Regniès, Moulins, etc. L’année précédente il avait empêché la ville de Montauban de se soumettre à Henri III, en faisant former à cette ville une confédération avec la Rochelle ; et il avait été chargé du commandement des forces protestantes dans le Rouergue, par décision d’une assemblée des religionnaires du Bas-Querci et du Lauraguais tenue à Saint-Antonin.
  3. Jean de Montberon, seigneur de Beauregard et de Meung en partie, second fils de Jacques de Montberon et de Michelle Gehamd, mort vers 1595.
  4. Louis de Moulins, chevalier, seigneur de Rochefort et de Villouet, gentilhomme du duc d’Anjou, conseiller au conseil privé, etc. fils aîné de Jacques de Moulins, notaire et secrétaire du roi. Il était mort en 1610. (B. R. cabinet généalogique, art. Moulins.)