Recueil des lettres missives de Henri IV/1572/19 novembre ― À mon oncle, monsieur le duc de Montpensier



1572. — 19 novembre. – Ire.

Orig. – B. R. Fonds Béthune, Ms. 8847, fol. 1 recto.

Cop. – B. R. Suppl. fr. no 1009-4.

Imprimé. – Vie de Louis de Bourbon, surnommé le Bon, etc. par du Bouchet, édition de Rouen, 1642, in-4o, p. 194.


À MON ONCLE, MONSR LE DUC DE MONTPENSIER[1].

Mon Oncle, Je suis bien marry que la lettre que vous m’avez escripte, du xiiije[2] de ce moys, m’a tellement pris au pied levé, estant sur le point de sortir de ma chambre pour m’en aller trouver le Roy, qui s’en va monter à cheval où je l’accompaigne, que je n’ay eu autant d’opportunité de bien deliberer sur l’honneur que je pourroys faire à la mémoire de feu ma cousine, madame de Nevers, vostre fille[3], comme la proximité de sang et d’alliance qui est entre nous, et la conjonction de religion m’y oblige ; vous asseurant que sans ceste occasion et la brefveté du temps auquel vous en avez assigné les obsecques, je me feusse essayé de luy rendre en ce dernier office, par quelqu’ung de mes plus proches que j’y eusse expres envoyé, tout ce que j’eusse peu de tesmoignaige de ceste mienne devotion et amitié. Mais m’ayant esté faicte cest ouverture, que les srs de la Tour-Reniez ou de Bois-Bonnard, qui sont portez pres de vous et tous deux chevaliers de l’ordre du Roy et gentilshommes de fort bon nom et reputation, prendront à honneur de tenir mon lieu et me representer en acte sy honorable et solennel, j’en escrips deux lettres pour l’un des deux que vous cognoistrez, qui le pourra faire plus à propos, vous priant, mon Oncle, vous contanter autant de ceste bonne volonté que si je l’executois en presence. Et je supplieray Dieu, après m’estre bien affectueusement et humblement recommandé à vostre bonne grace, qu’il vous donne, mon Oncle, en parfaite santé, très longue et bonne vie. Escript à Paris, le xixe jour de novembre 1572.

Vostre humble et obeissant nepveu,
HENRY.


  1. Louis, duc de Montpensier, prince de la Roche-sur-Yon, dauphin d’Auvergne, etc. fils de Louis de Bourbon, prince de la Roche-sur-Yon, et de Louise de Bourbon, comtesse de Montpensier, sœur du connétable de Bourbon, était né à Moulins le 10 juin 1513, et mourut le 23 septembre 1582. Il était gouverneur de Touraine, d’Anjou, du Maine, du Dauphiné et de Bretagne. Son père, chef de cette seconde branche de Bourbon-Montpensier, était le second fils de Jean II de Bourbon, comte de Vendôme, et le grand-oncle d’Antoine de Bourbon, roi de Navarre. Ce dernier prince était ainsi le neveu, à la mode de Bretagne, de Louis II, duc de Montpensier, qui avait deux degrés sur Henri fils d’Antoine. Cette branche se termine à Marie de Bourbon, femme de Gaston de France et mère de la célèbre mademoiselle de Montpensier.
  2. On a imprimé à tort dans la Vie de Louis de Bourbon, « le xixme. »
  3. Anne de Bourbon, fille de ce duc de Montpensier et de Jacqueline de Longwy, sa première femme, mariée, par contrat du 6 septembre 1561, à François II de Clèves, duc de Nevers, et morte sans postérité en cette année 1572.