Collectif
Imprimerie impériale (1p. v-viii).


AVIS DE L’ÉDITEUR.


J’ai cru faire une chose utile en publiant une traduction des Recherches Asiatiques, la plus riche collection de faits qui existe sur l’Inde, ce pays qui attire les premiers regards de ceux qui veulent étudier l’histoire des hommes.

Ces Mémoires sont l’ouvrage de quelques Anglois réunis, depuis 1784, à Calcutta, sous le titre de Société établie au Bengale pour faire des recherches sur l’histoire et les antiquités, les arts, les sciences et la littérature de l’Asie. Cette Société a déjà publié sept volumes in-4.°, imprimés à Calcutta.

Il est impossible de parcourir ces Mémoires sans reconnoître que jusqu’ici l’on n’avoit eu généralement sur l’Inde que des notions fausses ou imparfaites.

Ce qu’on trouve sur cette contrée dans ces grands recueils qui honorent la France, et qui sont de vrais monumens nationaux, les Mémoires de notre utile et laborieuse Académie des inscriptions, les Mémoires concernant l’histoire, les sciences et les arts des Chinois, &c. ; tout cela, il faut en convenir, est bien loin de la collection de Calcutta. Des hommes familiarisés avec les usages, les opinions et les préjugés des naturels, par un long séjour dans le pays et par une grande connoissance de la langue ou plutôt des langues qu’on y parle, ont, pour s’instruire, des moyens qui manquoient à ceux qui les ont précédés ; et quand ces moyens sont encore fortifiés de ceux que donnent la puissance et la richesse, de ceux qu’on ne tient que du temps, on peut croire que ces hommes ont vu plus, ont vu mieux que les autres.

Cette collection a inspiré en Angleterre un tel intérêt, qu’il est à-peu-près impossible de se procurer aujourd’hui un exemplaire de l’édition originale de Calcutta, et qu’il en a été fait à Londres trois éditions, qui sont presque entièrement épuisées : cependant elles sont fort incorrectes et remplies de fautes importantes ; les gravures sont peu soignées, et ressemblent mal à celles de l’original.

Le texte de cet ouvrage présente par lui-même bien des difficultés pour ceux qui ne sont pas familiarisés avec les langues orientales : on éprouve, en le lisant, le besoin fréquent de notions que peu de lecteurs sont à portée de se procurer. Il n’appartenoit, je crois, à personne de les réunir toutes ; et le concours de plusieurs hommes profondément versés dans chacune des parties que renferme ce recueil, étoit nécessaire, soit pour en donner une traduction bien fidèle, soit pour la compléter de manière qu’il ne restât rien à desirer à ceux qui veulent s’instruire.

M.  Langlès a revu toute la traduction ; il a rectifié les termes orientaux. Il a ajouté aux mémoires géographiques, philologiques et historiques, des notes qui pour la plupart contiennent des extraits d’ouvrages orientaux inédits de la Bibliothèque impériale ; dépôt immense, dont peut-être nous ne connoissons pas assez les richesses.

M.  Delambre a revu tous les mémoires d’astronomie et de physique ; il y a ajouté des notes.

MM.  Cuvier, Lamarck, Olivier, ont bien voulu faire le même travail sur les mémoires d’histoire naturelle.

Chacun d’eux a désigné par la lettre initiale de son nom les notes qui lui appartiennent.

Les gravures sont copiées, avec autant de fidélité que de talent, par les soins de M.  Arcieri, sur celles de l’édition originale.

M.  Duboy-Laverne avoit donné une grande attention à l’impression et à la correction du texte, et principalement à la révision des innombrables passages en arabe, en persan, en sanskrit, en tatâr-mantchou, dont cet ouvrage est rempli.

Son successeur dans la direction de l’Imprimerie impériale, M.  Marcel, y a apporté les mêmes soins et non moins de lumières. On doit à son zèle, et à son désir de donner à cette édition toute la perfection dont elle est susceptible, la gravure de deux corps de caractères bengalis qu’il a fait exécuter exprès. Ces caractères, gravés sous la direction de M. Langlès, sont les premiers de cette langue qui aient été employés en France ; ils surpassent, par leur élégance et la précision de leur fonte, ce que les Anglois ont fait de mieux dans le même genre.

En publiant cet ouvrage, j’ai cru faire une chose utile pour les sciences, honorable pour mon pays.

Un Français peut-il être étranger à la gloire et à la prospérité de sa patrie ? ne lui doit-il pas toutes ses facultés, tous ses moyens ? et ce devoir n’est-il pas plus pressant encore, quand le PRINCE donne l’exemple, quand ses regards encouragent et récompensent ?

Paris, ce 30 Vendémiaire an XIV [22 Octobre 1805].
Ad. D-y.


P. S. Une grande partie de cet ouvrage ayant été imprimée avant le 1.er Vendémiaire an 13, on ne doit pas être surpris d’y trouver plusieurs expressions qui depuis cette époque ne sont plus en usage.