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VI


On a dit que Rabelais est « un de ces auteurs susceptibles d’avoir un commentaire plus ample que le texte ». Sans être tout à fait de cet avis, je reconnais que de nombreux passages ont besoin d’être éclaircis, bien des mots demandent à être expliqués. MM. Burgaud des Marets et Rathery ont placé leur commentaire au bas des pages. C’est un travail très-recommandable. M. Jannet, M. Marty-Laveaux et M. de Montaiglon promettent, entre autres choses, chacun un glossaire. Un glossaire de Rabelais sera chose fort utile, et ces messieurs sont tous en état de le bien faire. Attendons, et résumons-nous :

Jusqu’à présent il n’avait pas été fait d’édition exacte et complète de Rabelais.

Celle de MM. Burgaud des Marets et Rathery, très-commode pour le plus grand nombre des lecteurs, n’est pas suffisante pour le public lettré.

Celle de M. Marty-Laveaux n’est ni assez servilement fidèle pour les érudits, ni assez émondée de difficultés pour un public plus nombreux. Elle est d’ailleurs imprimée en caractères trop menus et fort disgracieux, qu’on nous donne bien à tort pour des caractères gravés au seizième siècle.

Celle de MM. de Montaiglon et Lacour est vraiment belle et bien imprimée.

L’édition de M. Jannet est aussi lisible au moins que celle de MM. Burgaud des Marets et Rathery, aussi exacte que celle de M. Marty-Laveaux, aussi bien exécutée que celle de MM. de Montaiglon et Lacour.

L’éditeur disait dans son avertissement qu’elle serait « pour quelque temps du moins, non-seulement la plus exacte et la plus complète, mais encore la plus commode et la plus jolie ». Le temps où elle cessera de réunir tous ces avantages n’est pas encore venu.

En somme, M. Jannet, le savant fondateur de la Bibliothèque elzevirienne, l’auteur si justement célèbre de la nouvelle Collection Jannet, publiée par M. E. Picard, a fait un travail sérieux, consciencieux, d’érudition, de distinction grande tout à la fois, et qui, suivant nous, devra primer toutes les récentes éditions de Rabelais.

H. Émile Chevalier.