Seul bien que j’envie,
Amour ! douce erreur !
Viens, ma triste vie
S’éteint de langueur.
Ô coupe d’ivresse,
Pourquoi te tarir ?
Ô fleur de jeunesse,
Pourquoi te flétrir ?
Une fièvre ardente
Consume mes os :
Chacun se tourmente
Pour changer de maux,
On suit sa chimère
On fait des projets…
Et bientôt la terre
Les couvre à jamais.
Comme un flot se brise
Aux rochers du bord
Ma vigueur s’épuise
À vaincre le sort.
Mal qui me possèdes,
Abrège ton cours !
Combien tu m’obsèdes,
Ô fardeau des jours !
Seul parmi la foule
Je m’en vais rêvant,
Et sans but je roule
Au pouvoir du vent.
J’offre, en ma détresse,
J’offre à tous la main,
Mais nul ne la presse ;
Ils vont leur chemin…
Ô mélancolie
Qui partout me suit
Vois, mon âme se plie
Aux faix des ennuis !
Chaque doux prestige
A fui devant toi :
Monde où tout m’afflige
Que veux-tu de moi ?
La joie est donnée
À nos jeunes ans.
La vie et l’année
N’ont qu’un seul printemps.
Malheur à qui chasse
Les tendres plaisirs ;
L’hiver bientôt glace
Et fleurs et désirs…
Je vis une rose
Au déclin du jour ;
Que ma main t’arrose,
Dis-je, ô fleur d’amour !
Pour qu’elle te cueille
Demain sans retard ;
Je vins… mais sa feuille
Volait au hasard.
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