Réflexions préliminaires des vrais principes politiques/Des préjugés politiques

X.

Des préjugés politiques.

Le préjugé est un attachement obstiné et irrationnel d’une fausse opinion. Quel n’est pas son empire ! il repousse la raison pour en prendre la place.

Les mauvais gouvernemens se sont toujours imposé l’affreux devoir de nourrir les préjugés les plus grossiers qui leur étaient avantageux. Les véritables connaissances et les préjugés ne peuvent s’allier ensemble.

Elle serait incroyable, si les faits ne venaient l’attester, l’influence honteuse que les préjugés ont exercé sur le genre humain en dégradant la raison. Nous ne ferons que mentionner quelques faits.

Alexandre et César mirent le monde sens dessus dessous pour satisfaire leur ambition personnelle ; ils usurpèrent tous les pouvoirs ; ils pavèrent leurs carrières à la domination avec des cadavres ; ils furent les oppresseurs et les bouchers de la race humaine ; quels titres de gloire ! néanmoins ils sont cités avec applaudissement, et ils reçoivent les noms de grands.

Les préjugés de la royauté, qui ont entouré les trônes, et qui les entourent encore dans de certaines contrées, font considérer comme grands durant leur vie, les potentats qui y sont assis, quelque abjects et méprisables qu’ils soient d’ailleurs par les vices honteux et les crimes qui les déshonorent.

En de certains pays, de ces majestés ou en a fait des demi-dieux.

Les préjugés qui se rattachent à la naissance, à l’hommage rendu, non à la vertu, mais à la noblesse d’hommes, qui n’ont souvent de noble que de nom, sont autant irrationnels que ridicules.