Qui prend trop vite femme

La Chanson française du XVe au XXe siècle, Texte établi par Jean GillequinLa Renaissance du livre (p. 134-135).


QUI PREND TROP VITE FEMME


Qui prend trop vite femme
Peste après dans son âme.
    La nuit et le jour,
    Vive la jeunesse,
Qui ne vit que d’amour.


N’en prenez point de brune,
Car elle est trop commune.

N’en prenez point de blonde
Elle aime tout le monde.

N’en prenez point de rousse,
Car trop elle trémousse.
 
N’en prenez point de grande,
Car elle est trop friande.

Évitez la petite,
Trop grand est son mérite.

N’en prenez point de grosse,
Ce n’est qu’un vrai colosse.

N’en prenez point de maigre,
Elle a le cœur trop aigre.

N’en prenez point de grasse,
On trouve trop de crasse.

Évitez la menue,
Car trop elle remue.

Fuyez la babillarde,
Car trop elle hasarde.

Évitez la sournoise
Qui cherche toujours noise.


Fuyez la fainéante,
Qui n’est jamais contente.

Évitez la coquette
Qui cherche un tête-à-tête.

Fuyez la précieuse,
Car elle est trop quinteuse.

Évitez la bigotte
Qui sans cesse ragotte.

Ne prenez point de prude,
Elle a l’esprit trop rude.

Évitez l’ivrognesse ;
Elle a trop d’hardiesse.

Ne prenez point d’avare,
Son intérêt l’égare.

Évitez l’étourdie,
Elle ferait folie.

Fuyez une joueuse,
Elle est toujours tricheuse.

Fuyez une prodigue,
Elle aime trop l’intrigue.

Fuyez une savante,
Elle est trop méprisante.

Prenez de ces brunettes,
Elles sont joliettes.

(Les rondes et chansons à danser, 1724.)