Quelques pages avant le livre

Alphonse Lemerre, éditeur (p. 3-78).

ALBERT MÉRAT, Quelques Pages avant le Livre

POUR LES LETTRES — AUTRES VERS OUBLIÉS ÉPIGRAMMES

PARIS ALPHONSE LEMERRE, ÉDITEUR 23-31, PASSAGE CIIOISEUL, 23-31 MDCCCCIV


POUR LES LETTRES
INTERMÈDE

Pour changer l’air un peu des lieux où je respire,
Je n’ouvrirai pas Dante ou Hugo, ni Shakspeare ;
J’ouvrirai ma fenêtre et je regarderai
Les platanes, les fleurs qui peuvent à mon gré
Faire l’ennui moins lourd et l’heure plus clémente.
Même dans les jardins la nature est charmante ;
C’est la feuille toujours ainsi que dans les bois,
Et la lumière met aux choses que je vois,
La lumière d’ici, fine, discrète et tendre,
Des musiques que j’aime et que je sais entendre.


TROIS PAYSAGES DU LUXEMBOURG
I
LES CYGNES.
A mon ami Alphonse Saladin.

Tu ne vaincras pas par ce signe
D’avoir du ciel dans les regards,
Ou, dans une mare à canards,
D’être l’apparence d’un cygne.

Un cygne se voit dans le soir,
C’est plus blanc que les tourterelles ;
— Ne chante pas, cache tes ailes,
Que l’on ne puisse pas les voir.

C’était joli, ces ailes blanches
Sur l’eau dormante du bassin…
Tu n’avais pas d’autre dessein,
Forme de grâce qui te penches


Ou te redresses, puis encor
Te courbes en de belles lignes,
Comme on fait des strophes insignes
Avec des mots de pourpre et d’or,

Devant les princesses de France,
Que d’être noble et d’embellir
Ce jardin où l’on vient cueillir,
Quand on est jeune, l’espérance.

II
LES LAURIERS ROSES.
A mon ami Jacques Murray.

Nos jolis climats moroses
N’ont qu’un été raccourci ;
Hélas ! ce n’est pas ici
Le pays des lauriers roses.

Quand le soleil, aux bourgeons
Plus indulgent, les desserre,
On répare dans la serre
La caisse aux verts badigeons ;

Et c’est plus tard, quand leurs branches
Vêtissent les marronniers,
Que de vagues jardiniers
Portent entre quatre planches,

Pour leur faire prendre un peu
L’air, ainsi qu’à des phtisiques,
Les lauriers près des musiques
Militaires de ce lieu ;

TROIS PAYSAGES DU LUXEMBOURG. 11


Eux qui, dans le ciel qui brûle,
Tendent le baiser vermeil
De leurs lèvres au soleil
Du Pinde ou du Janicule.

III
NUIT D’ÉTÉ.
A Madame René Samuel.

Sur le vieux parc et sur la nuit,
Je laisse ouverte ma fenêtre ;
L’été me berce et me pénètre,
Calmant la peine qui me suit.

L’ombre est claire, presque lactée :
La fontaine de Médicis
Se perd en contours indécis ;
Et je ne vois plus Galatée.

La lune monte lentement ;
Au ciel un peu de bleu persiste ;
Et l’astre, divin coloriste,
Teint de perle le firmament.

Pas une feuille ne remue
Dans les hauts platanes, qui font
Au groupe de marbre un plafond
Dont l’ombre grandit l’avenue.

TROIS PAYSAGES DU LUXEMBOURG. 13


Dans cet immobile tableau
Luit, doux et fait de paix profonde,
Pour que la terre au ciel réponde,
Un reflet de lune sur l’eau.

L’ÉCROULEMENT DU CAMPANILE.
A mon ami Paul de Frick.

Parler de mon écroulement
Quand l’adorable Campanile
De Saint-Marc croule en ce moment
Serait vanité juvénile.
O mon écroulement, tais-toi
Devant cette chute bien pire :
Une merveille, plus que moi,
Vaut l’intérêt que je m’inspire.

Le vieil autrefois radieux,
La lumière des marbres roses,
Regret et gloire de mes yeux,
O mon âme, revois ces choses !

Revois dans la blancheur du soir,
Sur les coupoles de Saint-Georges,
Quand mon rêve venait s’asseoir,
La neige vivante des gorges


Des dédicates Corillas,
Blondes comme des friandises,
Que Guardi met en falbalas
Dans les fêtes de ses Venises.

A Madame Charles Simon.

Le cœur gros de leur trahison
(On a le cœur gros à tout âge),
Je n’ai pas voulu davantage
Demeurer dans cette prison.

Je me suis évadé. La route
Est délicieuse d’ici
Au tertre à peine de Passy,
Le long de la ville en déroute,

Qui fuit derrière le bateau,
Boisée et belle, blanche et bleue,
Et dont commence la banlieue
Bien au delà de ce coteau.

L’eau par le ciel illuminée
Reflète le déclin du jour…
Chaque pont recule à son tour :
Voici la route terminée.

Billancourt semble denteler
De feuilles les arches de pierre :
Je ferme à demi la paupière
Et je regarde l’eau couler.


Toute passion est la chaîne
Qui nous tient pâles et rivés,
Fronts bas ou vers le ciel levés :
Je n’ai pas de goût pour la haine.

Je ne puis pas haïr longtemps :
Aimer est beaucoup plus facile.
C’est un sentiment qu’on exile,
Mais qu’ont encor les braves gens.

A mon ami Théodore Maurer.

Comme tout bon faiseur de vers,
Cette page blanche m’excite,
Et, pour aujourd’hui, me suscite
D’aller parler aux arbres verts,

Au silence de la futaie,
Aux plaines blondes près des bois,
Aux saisons dont j’entends la voix,
Aux petites fleurs de la haie ;

Aux mille faces de l’été :
Sourire du matin, sourire
Du soir qui vit et qui respire,
A tout ce qui fait la beauté ;

Ne plus souffrir de la hantise
Du faux, du laid et du méchant,
Et les oublier dans le chant
De la nature qui me grise !

A THÉODORE DE BANVILLE.

Banville, que je vois d’ici,
Viens, bon maître des vers lyriques,
M’aider à mettre mon souci
Au rang des choses chimériques ;
Dis-moi qu’il n’est que d’allier
L’or et l’émail aux pierreries.
Laisse-moi, parfait joaillier,
Voir tes pures orfèvreries.

Les facettes de ton esprit,
Que les dieux firent, sont bien celles
De ce joyau qui me sourit
Et qui jette des étincelles.
Dans l’eau belle des diamants,
Comme par miracle enchâssée,
Je vois, sous des prismes charmants,
La lumière de ta pensée ;

Et tu souris, en polissant
Avec la poudre de tes pierres
Un beau collier éblouissant,
Qui met du ciel sous tes paupières.

POUR FINIR.21

POUR FINIR.
I

Vas-tu compter les jours qui te furent mauvais,
Vieux lutteur entêté qui t’obstines à vivre :
Pourquoi ? Parce qu’un peu de lumière t’enivre
Et que l’air était bleu du temps que tu rêvais.

Mais il n’est plus, le temps de tes rêves ; la vie
De stigmates précis a sillonné ton front ;
Ton âme reste haute et n’est pas asservie,
Ta robuste fierté te venge d’un affront.

Cependant, pour avoir pendant bien des années
Marché d’un pied tenace en traçant ton sillon,
Tu n’as pas eu le prix des gerbes moissonnées.
— Au moins tu n’as pas fait de ta pourpre un haillon.

II

Ceux-là sont au-dessous même de ma colère,
Ils sont rampants et vils et n’ont que mon dédain.
Le mépris que j’ai d’eux ne saurait me déplaire,
Mais voici que je souffre et m’attriste soudain.

C’est que des amitiés anciennes me trahirent ;
Je porte mon orgueil outragé comme un faix,
Parce que des amis qui près de moi vieillirent,
Eurent, quand je les vis, le visage mauvais,

Ne me répondent pas et même se détournent,
Honteux de me mentir du geste et de la voix.
Ce sont ces trahisons qui dans le cœur séjournent,
Comme si l’on saignait pour la première fois.

POUR FINIR.

III
Maintenant qu’ils sont là, cloués vifs sur la porte,
Comme l’horreur qu’ils ont des Lettres le comporte,
Et que j’ai fait justice, ainsi que je le dois,
Viens, ma Muse. L’été respire dans les bois.
Écoute la chanson de la source qui chante.
Le poème que fait la lumière m’enchante.
Viens, ma Muse, sourire en me dictant des vers.
C’est le rythme divin qui règle l’Univers,
Et ce sont des accords, ce sont des harmonies
Qui suspendent au ciel les sphères infinies.

AUTRES VERS OUBLIÉS

UNE SECTION DE L’EXPOSITION DE L’ENFANCE.
SOUVENIR DE 1900.
A Madame F. Wolff.

Allez voir ces choses étranges !
Vous passerez un bon moment.
Casimir-Périer dans ses langes
Est une trouvaille vraiment.

Avant l’âge d’être potache,
Même au maillot, concevez-vous
Un monsieur Leygues sans moustache
Avec des cheveux comme nous !

Cet aigle de la République,
Ce gosse vague et vagissant,
Avait, l’avenir vous l’explique,
La République dans le sang.

Mais, malgré la peine infinie
Qu’on a prise à faire ce choix,
Aucun indice de génie
Avant quatorze ou quinze mois.


C’est très simple, c’est de l’histoire
Toute naturelle en effet ;
La chrysalide de la gloire
Précède l’insecte parfait.


DÉDICACE D’UN LIVRE.
A Madame Delorme (Jane Simon).

Ce petit livre qui sourit,
Accueillez-le par un sourire.
Tout, ou presque tout, peut se dire
Quand une oreille a de l’esprit.

POUR UN ÉVENTAIL.
A Madame Delorme (Jane Simon).

Votre nez petit qui va rire
Bat et se fronce. L’on dirait,
Dans une fête, que Lancret
L’a copié sans vous le dire.


SUR UN CARNET.
I

Nulle ligne encor n’est tracée
Sur ce vélin bientôt noirci.
Dieu me garde d’écrire ici
Ce qu’on appelle une pensée !

II
Comme on choisit à l’étalage
Parmi tant de joujoux divers,
Merci d’avoir choisi des vers
Afin d’amuser cette page.

APRÈS LA LECTURE D’UN HUMORISTE.

L’acier de ton humour est d’une bonne trempe.
Ces lances de l’esprit se tiennent par la hampe,
Non par le bout pointu qui blesserait la main.
Il ne faut pas chercher le trait jusqu’à demain.
Où la contorsion paraît le charme expire.
— Swift et Dickens se sont partagé cet empire.
L’un choisit l’amertume et l’autre la douceur :
Cet humour-ci peut dire à la grâce : « Ma sœur, »
Et, par un tour léger, malgré la différence,
C’est presque aussi joli que de l’esprit de France.

L’homme paraît et meurt ; le marbre luit et tombe.
Sur le cadavre ancien et le débris nouveau,
Avide et se gonflant du sang de chaque tombe,
La terre d’elle-même élève son niveau.

PORTRAIT.

35

PORTRAIT.
« Sa place est dans un cerisier. »
Ce vers doit rester solitaire.
Si tu veux bien l’apprécier.
« Sa place est dans un cerisier. »
Il s’entend, sans qu’on soit sorcier,
Bonne d’enfant ou militaire.
« Sa place est dans un cerisier. »
Ce vers doit rester solitaire.


SOUVENIR.

Dans un passe-temps très doux,
Volets clos et portes closes,
On peut causer avec vous
De toutes sortes de choses.

Vous parliez, je vous donnais
La réplique, je vous jure,
Et, charmé, je surprenais
Un joli mot d’aventure ;

Et les vers qui font frémir
D’épouvante la pécore,
Vous omettiez de dormir
Pour en écouter encore.

C’est horrible déjà d’être un homme vivant !
Caricature ou simple ébauche, bien souvent
Nous n’avons rien de bon, de beau ni de robuste,
Et nous sommes manqués, âme, visage et buste !
Le plus faible est de droit mangé par le plus fort,
Et ce n’est pas fameux non plus, quand on est mort !


DEUX DÉDICACES DE « LA RANCE ET LA MER »

I

La courbe blonde d’une plage,
Le sourire d’un été clair…
Heureux si l’on entend la mer
Battre le bord de cette page !

DEUX DÉDICACES DE « LA RANCE ET LA MER ». 39

II
Je n’ai pas regardé, je me suis souvenu ;
Je faisais reparaître une image effacée,
Et mon vers n’avait plus qu’à suivre ma pensée
Vers un ciel indécis qu’elle avait reconnu.

A HONORÉ DAUMIER.

On connaît dans ses traits touffus
Cette autre Comédie Humaine,
Mais le grand peintre que tu fus,
Daumier, on ne le sait qu’à peine.

Pourtant tu peins loyalement
Dans la lumière belle et chaude,
Et tes ciels sont d’un ton charmant
De lapis fin et d’émeraude.

Tu sais fixer dans leur beauté
Et l’ambiance de la vie
Des scènes de réalité
D’une touche juste et ravie.

Vous rappelez-vous l’escalier
Sur une berge de la Seine ?
La ménagère en tablier,
La fillette… Toute la scène


Est dans le mouvement du bras,
Qui montre que lourde est la charge
Du linge qu’elle vient en bas
De plonger dans l’eau lente et large.

La petite tient le battoir,
Moins pour s’amuser que par aide,
Apprentissage du lavoir,
Sur les marches à pente raide.

La file blanche des maisons
Suit le quai haut et le domine,
Et, beauté de nos horizons,
Le couchant d’or les illumine.

C’est simple, pénétrant et beau ;
Les pauvres gens hantent ton rêve ;
Tu ris d’un ministre nouveau,
Mais ton rire en pitié s’achève ;

Et le grand redresseur de torts,
Don Quichotte, forme insensée,
Fantôme défiant les forts,
Revient sans cesse à ta pensée.

Tu semblés ne te soucier
Que d’ombre et de couleur sonore ;
Et cependant le justicier,
Malgré toi, reparaît encore.


L’accent reprend son àpreté,
Ta mission n’est pas finie ;
Mais c’est quand même la bonté
Qui rayonne dans ton génie.

HIVER.

A mon ami Ernest Prévost.

L’obscur hiver de ses doigts froids
Egratigne le paysage,
Et le ciel a perdu l’usage
De la lumière en qui je crois.

Le gris a beau, presque de perle,
Faire jolis les horizons,
Le flux pâle de nos saisons
Sur mon esprit monte et déferle ;

Et le temps est si loin encor,
Le temps qui recule si vite,
Où mai, dont la voix nous invite,
Dresse ses bois comme un décor ;

Où les yeux fatigués d’écrire
Voient le ciel bleu comme des yeux
Et la terre au sein radieux,
Comme une femme, nous sourire.

ÉPIGRAMMES

Tu veux laisser quelque renom,
Combien de temps, pour combien d’hommes ?
La terre elle-même où nous sommes
Vivra-t-elle ? Tu sais que non !

J’ai perdu le respect comme on perd un peu d’or ;
J’avais pourtant gardé longtemps ce vasselage :
Ce n’est pas que cela disparaisse avec l’âge,
C’est qu’aujourd’hui peu vaut qu’on le respecte encor.

Conféer ou légiférer,
Ces ferrures me sont égales ;
J’ai d’autres bêtes & ferrer :
Je ne ferre que les cigales.

Je regarde et je vois, je vois et je puis rendre
Tant de choses, au point où j’en suis de mes jours ;
Si je veux, je remonte ou je descends le cours
Du temps qui sonne l’heure, et que je sais entendre.

A QUOI BON !

A quoi bon ! ce mot est humain :
La tâche vaine effare et navre.
Mais, si tu l’as dit, ton cadavre
A dû rester sur le chemin.

Le monde, l’infini du livre me fait peur.
J’ai lu pourtant, mais la pensée est innombrable ;
Elle fait presque un dieu de l’homme misérable,
Qu’elle soit un soupçon de lumière, ou l’erreur.

POUR LES CHIENS.

Chiens, mes frères, mes vieux complices,
Vous avez, trop souvent battus,
Plusieurs seulement de mes vices,
Vous avez toutes mes vertus.

A MON AMI THÉODORE MAURER
QUI KIT POUR MOI DEUX BALLADES.

Quand la pointe est de bon aloi,
J’accepte les estafilades…
Pourquoi ferais-je des ballades,
Puisque vous en faites pour moi !

C’est horrible : j’entends sonner
Toutes les heures de ma vie…
Le seul breuvage que j’envie,
Léthé, peux-tu me le donner ?

A LA MÉMOIRE DE CHARLES CROS.

J’ai rouvert aujourd’hui ton Coffret de Santal :
Il garde le parfum de nos jeunes années,
Radieuses, sans rien d’impur, illuminées
Par l’exacte pensée et le rêve idéal.

A MES AMIS DU PARNASSE.
I

Nous nous étions choisis et liés librement,
« Pour rien, pour le plaisir ». Nous ne flattions personne.
Aimer le beau suffit pour que le front rayonne,
Et tout autre souci de la jeunesse ment.

II

Vers les chanteurs divins dont la face est auguste,
Nous avons élevé nos voix avec ferveur
Et bâti de nos mains un temple à leur splendeur.
L’édifice est debout et la base est robuste.

Je suis vieux, mais je sais par des paroles d’or
Faire que la beauté me parle et me réponde ;
Et pour elle ma foi demeure si profonde
Que je garde le droit des caresses encor.

Garde à jamais le don glorieux d’admirer ;
Ne cherche pas querelle à la clarté des roses ;
Reflète le bonheur ou les larmes des choses :
C’est par là que tes vers méritent de durer.

II


A UN
Qui S’était Permis De M’adresser Quelques Quatrains Pour Railler.

C’est toi, le malheureux qui suas tant pour moi
A faire trois quatrains sombrement imbéciles ;
Tu vois bien que ces jeux ne sont pas difficiles,
A condition d’être autre chose que toi.


UN HOMME D’ESPRIT.

J’ai reconnu de loin la voix de ce pointu,
Et j’ai fui, redoutant à l’égal de la peste
Un sot qui croit sertir l’ïambe et l’anapeste,
Quand il a dit : « Bonjour, comment te portes-tu ? »

A CELUI QUI NE RIT PAS

Je ne sais pas pourquoi ma muse vous sourit,
Vous ne connaissez pas les femmes ni les roses.
C’est pour d’autres que vous que ces fleurs sont écloses,
Et vous n’entendez rien aux choses de l’esprit.

A UN FRONT.

Le front trop grand comme un local abandonné,
Un terrain sans gazon, comme qui dirait vague,
Un caillou blanc et sourd aux chansons de la vague.
Un espace sans borne et cependant borné.

A UN MAUVAIS AUTEUR.

Connais-tu ces fatras que l’on ne peut pas lire ?
On voudrait bien : on a beau faire, on ne peut pas.
Le pied tourne : c’est une entorse à chaque pas ;
Il est pourtant des gens qui purent les écrire !

A UN FACHEUX.

Ta laideur te va bien ; elle va bien à celle
Des visages qui sont sans doute près de toi.
Évite de venir la produire chez moi :
La main me gauchirait au vers que je cisèle.

A UN CRITIQUE.

Oh ! les mauvais vers que tu fis,
Grand pontife universitaire !
Le plus certain de tes profits
Était, critique, de les taire.

LA JUSTICE.

Justice dont on parle comme
Si l’on ne connaissait que toi,
Oh ! combien de lois pour un homme !
Combien d’hommes pour une loi !

A MOI-MEME.

Vois, et regarde hors de toi ;
Pense, efforce-toi de bien dire
Ne ris pas, tache de sourire,
Et paix aux vers de bonne toi

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TABLE

POUR LES LETTRES

INTERMEDE.

Pour changer l’air un peu des lieux où Je respire 7

Trois paysages du Luxembourg :

I. Les cygnes… 8

II. Les lauriers roses 10

III. Nuit d’été 12

L’écroulement du Campanile 14

Le cœur gros de leur trahison 16

Toute passion est la chaîne 17

Comme tout bon faiseur de vers 18

A Théodore de Banville 19

Pour finir. — 1 21

— II 22

— III 23

AUTRES VERS OUBLIÉS

Une section de l’Exposition de l’Enfance 27

Dédicace d’un livre 29

Pour un éventail, 3o

Sur un carnet. — 1 3i

— II 32

Après la lecture d’un humoriste 33

L’homme parait et meurt : le marbre luit et tombe 34

Portrait 35

Souvenir 36

C’est horrible déjà d’être un homme vivant ! S7

Deux dédicaces de « La Rance et la Mer ». — 1 38

— II 39

A Honoré Daumier 40

Hiver… 43

ÉPIGRAMMES 1

Tu veux laisser quelque renom 49

J’ai perdu le respect comme on perd un peu d’or 5o

Conférer ou légiférer 5i

Je regarde et je vois, je vois et je puis rendre 52

A quoi bon ! 53

Le monde, l’infini du livre me fait peur 54

Pour les chiens 55

A mon ami Théodore Maurer 56

C’est horrible : j’entends sonner 57

A la mémoire de Charles Cros 58

A mes amis du Parnasse. — 1 59

— II 60

Je suis vieux, mais je sais, par des paroles d’or 61

Garde à jamais le don glorieux d’admirer 62

11

A Un 65

Un homme d’esprit 66

A celui qui ne rit pas 67

A un front 68

A un mauvais auteur 63

A un fâcheux 70

A un critique 71

La Justice 72

A moi-même 73