Psyché au cinéma/Petites Plaintes sur le Passé revenu

Paradis-Vincent (p. 105-107).


PETITES PLAINTES SUR LE PASSÉ REVENU


À Psyché, irraisonnable.


Il y a des mots qu’on voudrait avoir dits et qui ne seront jamais prononcés.

Il y a des larmes de bonheur dont on ne boira pas l’enivrante ambroisie.

Il y a des inconnus qui ne seront pas pénétrés, et des flammes entières qui ne consumeront pas notre être.

Dans le possible, dorment des cris d’amour qui ne seront pas entendus de toi, pauvre Psyché !

Il y eut des soirs où tu criais ta passion et tes angoisses devant un ciel implacable.

Il y a des plaintes que tu as jetées sur le chemin, plaintes comme jamais personne n’en pourra entendre et qui auraient réjoui des cœurs féroces.

Et tu les as laissées, ces plaintes, au murmure de la nuit, tu ne les as pas reprises : gerbes éparpillées qui ne connaîtront pas le lien qui enserre, le mot qui scelle, le mot semblable à un fermoir, le mot qui enchâsse et survit. Elles sont toutes perdues, dans la nuit ; toutes, celles-là !

Il y a des mains connues de toi, Psyché, qui se sont étreintes, solitaires, dans un délire si beau que tu croyais les sentir devenir mortes d’avoir tant frémi pour l’espoir.

Il y a un être, Psyché, — (je traduis tes plaintes et tu m’agaces assez, éternelle plaigneuse, qui me force à l’impudeur), qui, replié sur lui-même, se purifiait au feu de ses artères.

Il y a l’impossible, qui serait devenu une réalité matérielle et divine, si la marche du destin voulait s’interrompre pour le délire des fronts, des lèvres et des corps.

Il y a toi, enfin, ô Psyché malade qui ne chanteras plus ou si mal et qui, à tes heures, veux tellement mourir.