Promenade dans la Grande Bretagne - 2e/La Hollande

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LA HOLLANDE.


Aussitôt après le licenciement de l’armée des Princes, en 1792, je me rendis à Maestricht. La foule qui affluait dans cette ville, des Pays-Bas, aussi bien que des Electorats de Trèves et de Mayence, où les Républicains avaient aussi fait une incursion assez vigoureuse, la remplissait tellement, que les magistrats craignirent tout de bon la disette. On donna ordre aux portes de la ville de ne laisser passer aucun étranger, à moins qu’il ne fût de Liège ou du Brabant ; il fut aussi défendu à tout bourgeois ou habitant, d’en loger sans une permission par écrit du Maire.

À peine y avait-il trois jours que j’étais à Maestricht, que le bruit du canon, souvent répété, nous apprit que les Patriotes n’étaient pas loin ; effectivement ils se rendirent le lendemain maîtres de Liège ; les Sans-culottes de cette ville, forts par l’assistance de ceux de France, ne traitaient pas beaucoup mieux leurs riches habitans. Il nous arrivait souvent des bateaux, sur lesquels ils avaient tiré à leur départ : un ou deux furent effondrés et d’autres pris. Cependant il y eut plusieurs émigrés qui osèrent rester à Liège : avec la précaution de se tenir cachés, quelques-uns réussirent à y vivre tranquilles, mais aussi sur la dénonciation de quelques habitans mal intentionés, plusieurs furent arrêtés et même guillotinés. Je ne puis oublier que certain général Eustache, commandant un grand détachement à Vezey, près Maestricht, envoya faire ses complimens au Citoyen Commandant de la ville et se prier à dîner pour le jour suivant, ce qu’il fit effectivement, escorté de huit dragons, qui restèrent à la porte de la ville.

La ville de Maestricht est grande et bien bâtie, elle est séparée en deux par la rivière : les fortifications en étaient alors assez bien entretenues ; auprès de la citadelle il y a une caverne immense, que l’on prétend aller jusqu’à Liège, on en tire des pierres pour la bâtisse. Après y avoir marché pendant deux heures, sans en trouver la fin, je crus devoir profiter, pour en sortir, d’une des ouvertures que l’éboulement des terres a faites dans bien des endroits.

La jalousie des Hollandais ne leur avait pas permis de faire une grande route de Liège à Maestricht. Ce n’est guères que par la rivière que l’on pouvait y arriver : du côté de l’Allemagne, il y avait un chemin assez bon ; celui qui passe au-dessus de la caverne est dangereux, par les crevasses fréquentes que les éboulemens y occasionnent.

Ce que Maestricht avait de plus extraordinaire, était sa situation politique : elle dépendait de l’Évêché de Liège pour le spirituel et même pour le temporel. Un prince de Liège ayant emprunté une grande somme d’argent des Hollandais, leur remit cette ville en gage. Depuis ce moment, elle a toujours été garnisonnée par la Hollande, et par les troupes du duc de Brunswick, jusqu’à l’instant où les Français s’en sont emparés en 1795. La justice y était cependant toujours administrée au nom du prince de Liège, dont le portrait et les armes étaient à l’hôtel-de-ville.

Le chagrin de me savoir si près de ces Messieurs, me fit hâter mon départ. Étant d’une province maritime de France et ayant quelques connaissances dans la Grande Bretagne, je me déterminai à y aller chercher un asile et d’attendre chez les rivaux de mon pays, que la raison éclairât enfin les Français : très-résolu, à ne plus être l’instrument aveugle de l’ambition, de l’intérêt et de la folie des puissances en guerre contre eux.

Je pris mon chemin par la Hollande, afin d’avoir une idée de ce pays singulier et dont l’existence appartient beaucoup moins à la nature, qu’à l’industrie des hommes.

Les Autrichiens étaient encore à Ruremonde, mais prêts à partir. Leurs canons étaient sur la place, et les affûts étaient chargés d’assez de fourrages pour un jour de retraite ; nous ne parvinmes à entrer à Venloo, que parce que nous étions dans la diligence, encore ne fut-ce que sur la promesse que nous partirions le lendemain.

Nimégue est une assez jolie ville, bâtie en amphithéâtre sur une petite hauteur, qui dans ce pays plat peut passer pour une montagne ; le Waal passe au pied des murs, et les deux bords sont joints par un pont volant qui va et vient continuellement. Du clocher de la principale église on a la vue des fortifications qui me semblèrent très-régulières et en bon état ; il y a un point élevé, qu’on appelle le Belvédère, et qui est entouré d’une jolie promenade plantée d’arbres ; c’est là, que les dames Niméguoises viennent étaler leurs charmes, nous en vimes un assez bon nombre, il y en avait même d’assez jolies pour des Hollandaises.

Les bateaux sur les canaux d’Hollande, sont tous de la plus grande commodité ; on en change à presque toutes les écluses. Le patron a toujours une provision de vins et de tabac, dont il fournit les voyageurs à assez bon marché ; nos compagnons Hollandais burent et fumèrent tout le temps de la route, et malgré nous pour leur rendre ce que nous recevions d’eux, nous fumes obligés de les enfumer aussi, ce dont ils parurent charmés. Il est cependant très-désagréable d’être obligé de changer de bateau à chaque écluse, à cause du transport des effets ; non-seulement les porte-faix font payer plus cher pour leur transport d’un bateau à l’autre que le voyage ne coûte, mais encore, on en trouve souvent d’égarés.

Un honnête homme dans le bateau d’Utrecht à Amsterdam, nous donna l’avis de ne point nous fier aux gens qui viendraient pour nous conduire, disaient-ils, à une bonne auberge, ou pour porter nos effets, sans quoi nous eussions peut-être été seelverkäufé.

Les Hollandais avaient alors parmi eux, un grand nombre de ces abominables vilains qu’ils nommaient Seelverkäufer (vendeurs d’ames) : ils étaient tolérés et même employés par le gouvernement, sans être protégés par lui, car si l’un d’eux était tué en s’acquittant de son office, les magistrats n’informaient pas plus contre le meurtrier, que s’il n’eût tué qu’un chien. Ces aimables messieurs attendaient les étrangers, à l’arrivée des bateaux, offraient de porter leurs effets, de les conduire à une bonne auberge, enfin tous les petits offices d’un porte-faix. Si l’étranger n’était point prévenu d’avance, et qu’il acceptât, on le conduisait dans un dépôt pour Batavia, où après avoir été bâillonné et garrotté, on le jetait à fond de cale de quelques-uns des vaisseaux pour ce pays, où il était obligé, pendant toute sa vie, qui communément n’était pas longue, de servir comme esclave, ou soldat, la très-honorable compagnie des Indes Hollandaise. Il y a fort peu d’exemple, on pourrait presque dire point, que quelques-uns de ces malheureux, soient jamais revenus dans leur pays.

On sent que dans ce moment, les émigrés courant de toutes parts sans but déterminé étaient quelque chose de fort tentant pour les Seelverkäufers. Il n’y a pas le moindre doute que plusieurs n’ayent eu le malheur de faire le voyage : à ma connaissance, je sais que deux ou trois, ne sont parvenus à se tirer d’affaire qu’en coupant quelques nez et quelques oreilles.

Comment les puissances de l’Europe souffraient qu’une poignée de marchands impudens, enlevassent ainsi, par ruse ou par force, ceux des basses classes de leurs sujets, qui venaient les visiter : c’est un problème qui ne se résoudrait pas à leur avantage. Les grandes nations maritimes, qui pourraient écraser les Barbaresques, ont d’un autre côté, par de vils motifs d’intérêt, fait une paix honteuse avec eux, et ainsi tolèrent leurs déprédations et ferment les yeux, lors même qu’ils enchaînent leurs sujets et les font servir à leurs usages : mais au moins on peut aller chez eux et les racheter, tandis que les Hollandais ne laissaient venir personne dans leurs possessions aux Indes.

Entre leurs bons alliés, les Français et les Anglais, ils ont été traités cette guerre, d’une façon amicale ! seront-ils meilleurs après tout ceci, ou les autres les imiteront-ils ? . . . . . Le dernier est malheureusement plus probable.

La grande ville d’Amsterdam offre à l’étranger qui n’a point vu Venise, dont elle est la vive image, le coup-d’œil le plus extraordinaire ; de larges canaux, bordés d’arbres, séparent toutes les rues, et le négociant peut conduire par-tout ses vaisseaux à sa porte.

La bourse est un bâtiment magnifique, aussi bien que l’hôtel-de-ville ; l’arsenal est un grand enclos près du port, où l’on pouvait voir assez de canons, d’armes et de munitions de tout genre, pour l’armée la plus considérable, aussi bien que pour la flotte la plus nombreuse. Le port pourrait contenir tous les vaisseaux de l’Europe, et forme un vaste cercle au fond du Zuyder-zée[1]. Un jour de tempête, je fus me promener le long de la mer, je regardais les vagues, battre avec fureur le pied des digues ; peu-à-peu les eaux s’élevèrent, et je ne fus pas peu étonné deux heures après, de les voir douze à quinze pieds plus hautes que la ville, qu’elles auraient submergée sans les digues. Cependant elles vinrent à un tel point qu’elles passèrent par-dessus les écluses, et inondèrent la partie la plus basse, de sorte qu’on allait en bateau dans les rues, mais ces amphibies n’en semblaient pas du tout déconcertés, et continuaient leurs affaires comme à l’ordinaire.

Nous nous embarquames sur les canaux pour Harlem, où nous arrivames le soir, après avoir passé tout le jour, le long de la mer ou lac de même nom. On sait que cette ville est fameuse par ses tulipes, ou plutôt par les fous qui les contemplent, et qui placent leur bonheur dans leur possession. On m’a assuré que souvent un oignon s’est vendu jusqu’à trois ou quatre cents louis. Je ne puis m’empêcher de penser, que si nous étions encore du temps des fées, la plus grande grâce qu’un génie charitable pourrait faire à la famille de ces bonnes gens, serait d’en changer les individus en tulipes, car alors le chef aurait beaucoup plus de soin et d’attention pour eux dans cet état, que dans leur premier.

D’Harlem nous vinmes à Leyde, qui est aussi une charmante ville, mais toujours dans le même genre, qui quoique joignant l’utile à l’agréable est cependant le même, et comme on sait, toujours perdrix, ne vaut pas le diable.

Bientôt nous joignimes la Haye, où nous fumes à la comédie française, et eumes le plaisir d’entendre chanter, « Ô Richard ! ô mon roi ! » à plusieurs reprises. Le Stadthouder y vint avec sa famille qui fut beaucoup applaudie, ce qui, vu les derniers troubles, ne nous parut pas très-extraordinaire. Dans les temps orageux, l’esprit du parti dominant cherche à se montrer avec violence : en temps de paix lorsque tout le monde est du même avis, on n’a pas besoin de se tourmenter pour le faire approuver. Je crois que cette réflexion assez simple, pourrait s’appliquer également bien aux démocrates de France. Quel est l’homme un peu sensé, qui se mettant à la place d’un royaliste en France ne sente pas, que non seulement il se tairait, mais même qu’il donnerait tout ce qu’on lui demanderait, ferait tout ce qu’on lui dirait, et cela de la meilleure grâce possible, sans se faire prier.

Puis nous embarquant encore, nous passames à Delft, jolie ville hollandaise, semblable aux autres, et bientôt nous arrivames à Rotterdam, où nous attendaient toutes les impertinences que les singes, s’ils étaient réunis en société, pourraient faire à quelques hordes étrangères, chassées par des tigres.

Les Seelverkäufers (en conséquence du grand nombre d’émigrés qui étaient venus dans cette ville, pour effectuer leur passage en Angleterre) se trouvaient par-tout ; c’était avec la plus grande difficulté qu’on se défendait de leurs importunités ; ils avaient l’air de s’appitoyer sur le sort des émigrés, s’emparaient de leurs effets, leur promettaient de les conduire dans une bonne auberge, où ils seraient traités à bon marché etc., mais nous étions prévenus, et ne répondions à toutes ces politesses qu’en menaçant de les assommer, s’ils ne nous laissaient pas tranquilles.

Le prix des auberges était triplé, et quelques maîtres voulant profiter de l’affluence, avaient l’impudence d’augmenter de prix de jour en jour ceux qui étaient chez eux, et qui avaient fait marché ; quant à ceux qui se fiaient à leur bonne foi, il est plusieurs fois arrivé, qu’ils leur ont demandé des prix fous, que souvent le magistrat obligeait de payer. Une fois cependant l’on m’a dit, qu’un maître d’auberge ayant conduit un Français chez le juge pour le forcer de payer trois louis, qu’il lui demandait pour avoir passé une nuit chez lui. Le magistrat s’étant informé du Français s’il avait fait marché avant ? sur la négative, il lui dit, qu’il était bien fâché, mais qu’il devait payer. Ayant ensuite lu quelques papiers de police ; mais vous, monsieur, dit-il, à l’aubergiste, vous n’avez pas mis le nom de monsieur sur votre état : et il le condamna à payer l’amende de quatre louis qui avait été fixée dans ce cas, sur lesquels il rendit les trois au Français, en l’exhortant à faire dorénavant un accord avant d’entrer à l’auberge.

Le cafetier, pour éloigner la foule de sa maison écrivit sur sa porte, que personne ne pouvait entrer sans faire la dépense d’un florin, et un garçon à la porte avait l’impudence de vous demander, « Que voulez-vous ? » Rien. « Passez la porte. » Ce qui plusieurs fois occasionna des scènes violentes dont le pauvre garçon se trouva mal, et engagea le magistrat à publier une belle ordonnance, où il était dit que tout étranger qui ne se retirerait pas immédiatement sur l’avis du garçon serait mis en prison.

On se saisissait des armes au bateau, et on les déposait à l’hôtel-de-ville, ce qui était peut-être désagréable pour l’individu, mais était une précaution nécessaire, étant si près des patriotes qui étaient alors à Anvers, et le pays plein de mécontens, qui auraient pu les acheter à bas prix.

On nous faisait en outre déposer deux louis sur le bureau, comme un gage de la dépense que nous pourrions faire, et afin que (disait le juge) s’il paraissait convenable de nous faire partir, nous eussions une caution. Cependant je dois dire avec vérité, que le grand nombre d’émigrés de toutes classes qui remplissait la ville, exigeait que l’on prît des précautions.

On doit sentir que dans tout ce que je viens de dire, je n’entends parler que des gens de basse classe ; car même à cette époque nous avons quelquefois reçu des marques d’intérêt des personnes bien élevées, et ce n’était que par leurs avis que nous évitions les piéges, que les autres nous tendaient.

J’imagine que dans ce moment, il pouvait bien y avoir à Rotterdam dix à douze mille émigrés, presque tous avec l’intention de s’embarquer pour l’Angleterre ; cette grande concurrence rendait les passages très-difficiles, quoique plusieurs bâtimens charbonniers fussent venus à ce dessein à Rotterdam, et que le prix fût plus que doublé. Je trouvai place cependant sur un vaisseau où nous étions 166. On y avait fait une espèce d’entrepont, où sur un peu de paille, chacun avait sa place. Le vaisseau ne devant partir que quelques jours après, j’employai ce temps à parcourir la ville, qui quoique coupée de canaux n’a pas autant l’apparence hollandaise que les autres ; elle n’est pas à beaucoup près si régulière ; les habitans aussi n’ont pas au même degré, cette large face qui distingue leurs compatriotes. Les bâtimens publics n’y sont pas très-remarquables pour leur architecture, mais ils sont vastes et commodes.

Ce fut là, que je vis pour la première fois de petits carrosses avec trois ou quatre enfans dedans, un sur le siége du cocher, un autre derrière, traînés par deux ou trois chèvres, qui sont aussi dociles que pourraient l’être des chevaux ; du côté d’Amsterdam et de la Haye, les charrettes pour les provisions que les paysans conduisent au marché, sont comme en Flandre attelées avec des chiens. Comme ces sortes de voitures ne payent rien aux barrières, on sent qu’elles leur sont d’un grand avantage, car en outre que la nourriture de ces chiens ne coûte presque rien, attendu qu’ils la portent avec eux, ils ont aussi en eux des gardiens fidèles, et peuvent en toute sûreté, laisser leur charrette chargée au milieu des places, et vaquer à leurs affaires.

Toutes ces réflexions, quoique naturelles, ne frappent point d’abord un étranger, à qui cette coutume paraît ridicule et même cruelle ; les pauvres bêtes tirent la langue d’une telle manière, et paraissent si fatiguées, qu’il est très-naturel d’accuser leurs maîtres de dureté. Cependant, peu-à-peu on s’y accoutume, et on ne le trouve pas plus extraordinaire, que de voir des chevaux attelés à une lourde charrette, obligés de marcher à coups de fouets, et mourir de fatigue sous les coups. C’est ainsi, que l’animal à deux pieds sans plumes, s’est arrogé le droit de traiter toutes les autres créatures, et cela ne doit pas paraître extraordinaire, quand on songe qu’il traite encore plus mal ceux de son espèce.

Ces pauvres bêtes offrent un spectacle bien extraordinaire, lorsque deux charrettes se rencontrent et que les maîtres n’y prennent pas garde ; les chiens s’approchent avec précaution, se grondent pendant quelques momens, puis se battent avec furie, culbuttent la charrette, et ensuite, certains de ce que leurs maîtres leur préparent, pour cette incartade, ils s’enfuient à toutes jambes, la traînant après eux.

Dans le temps que je passai à Rotterdam, une tempête accompagnée de la grande marée couvrit d’eau une partie de la ville ; on allait en bateau presque par-tout : mais ceci, qui paraîtrait un grand malheur pour d’autres peuples, n’est presque rien pour celui-ci ; quand on voit l’eau venir, chacun déménage très-froidement et porte ses effets aux seconds étages. Je me rappelle même avoir vu des servantes, qui pensant que c’était une occasion excellente pour laver leur maison, établirent la pompe au milieu de l’eau, et en lavèrent ainsi les murailles, pendant que d’autres les frottaient par les fenêtres.

Quoiqu’aucune nation de l’Europe n’aimât les Hollandais, et qu’on leur reprochât avec juste raison, l’esprit d’intérêt qui les animait, cependant cet esprit intéressé lui-même, est la cause de leur existence et du rôle qu’ils ont joué en Europe ; sans intérêt qui voudrait commercer ! C’est cet esprit qui en fait naître l’idée, et qui très-utile quand un petit nombre s’y emploie, abâtardit une nation, lorsque tous les individus qui la composent, ont toutes leurs idées tournées sur le moyen d’acquérir et d’acquérir encore, sans avoir d’autre but déterminé, que celui d’accumuler ; loin que leurs jouissances s’augmentent en raison de leurs richesses, on remarque communément que les riches marchands dans ce pays vivent très-simplement, et ne regardent l’argent qu’ils ont gagné que comme un moyen d’en gagner davantage : cette cupidité qui n’est bonne à rien pour l’individu qu’elle agite, et qui même l’avilit, est cependant une source inépuisable de richesses pour l’état[2].


  1. Lors de la prise de la Hollande par les Français en 1795, cette mer se trouva entièrement gelée, et la flotte hollandaise fut vraiment prise par un détachement de cavalerie.
  2. Pour faire connaître au lecteur, l’amitié, qu’on leur portait : voici un petit compliment d’adieu qui leur fut fait par un Écossais, après avoir demeuré quelque temps chez eux.

    Amphibious wretches, soon may be your fall,
    May men undam you, and G—d d—n you all.

    Misérables amphibies, puisse votre chûte arriver bientôt ; puissent les hommes rompre vos (dams) vos digues, et Dieu vous damner tous. C’est un jeu de mots assez original et très-colérique entre undam et damn.

    Si nous étions encore de l’humeur maudissante du bon vieux temps, on pourrait prendre cet honnête homme, pour un prophète, aussi grand que Bâlaâm.