Préfaces et Manifestes littéraires/Histoire de la Société française

G. Charpentier (p. 179-186).




HISTOIRE

DE

LA SOCIÉTÉ FRANÇAISE

PENDANT LA RÉVOLUTION [1]



HISTOIRE DE LA SOCIÉTÉ FRANÇAISE
PENDANT LE DIRECTOIRE

PRÉFACE DE LA PREMIÈRE ÉDITION
DE LA SOCIÉTÉ PENDANT LA RÉVOLUTION


Ceci n’est pas une préface. C’est un simple et court avertissement.

Pour cet essai de reconstruction d’une société si proche tout à la fois et si éloignée de nous, nous avons consulté environ quinze mille documents contemporains : journaux, livres, brochures, etc. C’est dire que derrière le plus petit fait avancé dans ces pages, derrière le moindre mot, il est un document que nous nous tenons prêts à fournir à la critique. C’est dire que cette histoire intime appartient, sinon à l’histoire grave, au moins à l’histoire sérieuse.

Si nous n’avons pas indiqué toutes nos sources, c’est qu’il eût fallu, pour ce faire, doubler notre volume. Le public n’ignore pas que le catalogue des journaux de la Révolution, dressé par Deschiens, forme seul un volume in-8 de 465 pages. La conscience de n’avoir rien pris au roman et de ne lui avoir rien donné, est notre seule excuse dans une tentative si grande.

Il nous reste à remplir un agréable devoir et à satisfaire notre reconnaissance sans nous délier d’elle. Remercions tout haut les obligeances. M. Peyrot possesseur d’une précieuse collection sur la Révolution française l’a mise toute à notre disposition, avec un empressement et une grâce de bon office qui méritent qu’on n’en soit pas oublieux. Un savant trop modeste, M. Ménétrier, nous a communiqué livres et renseignements, de la façon la plus aimable et la plus bienveillante.

Un dernier mot. Pour être complète, l’histoire de la société française pendant la Révolution, demande un autre volume l’Histoire de la société française pendant le Directoire : l’accueil que fera le public à ce premier volume décidera si nous irons jusqu’au bout de notre œuvre.

    EDMOND ET JULES DE GONCOURT.
    31 janvier 1854. 

PRÉFACE DE L’HISTOIRE DE LA SOCIÉTÉ PENDANT LE DIRECTOIRE[2]


L’histoire de LA SOCIÉTÉ FRANÇAISE PENDANT LA RÉVOLUTION, n’a qu’à se louer du public et de la critique : le public l’a lue ; la critique en a parlé.

Des reproches qui ont été faits aux auteurs dans les journaux et les revues, quelques-uns leur ont paru mériter plus particulièrement une réponse.

On a reproché aux auteurs de n’avoir point négligé l’anecdote, le détail, le coin intime des hommes et des choses. — Les auteurs répondront, pour leur défense, qu’ils ont été entraînés dans cette voie par deux anecdotiers, leurs maîtres : Plutarque et Saint-Simon.

On a reproché aux auteurs d’avoir donné un tableau du développement de la prostitution pendant les années révolutionnaires, et de n’avoir point imité la chasteté de plume de Tacite. — Les auteurs répondront que l’historien des Césars n’a pas écrit l’histoire de la société romaine, et que ceux-là qui veulent savoir les mœurs, aux temps des Néron et des Locuste, se résignent à garder dans leur bibliothèque Juvénal à côté de Tacite.

On a reproché aux auteurs d’avoir placé, en 1789, la société française à Paris, au lieu de l’avoir placée en province ; on a reproché aux auteurs « dont le nom semble révéler une vieille origine provinciale », d’avoir commis ce contresens au mépris des traditions de famille. — Les auteurs ont remonté leur famille : ils ont trouvé en 1789, leur grand-père Huot de Goncourt, non en province, mais à Paris, député du Bassigni à l’Assemblée na tionale.

On a reproché aux auteurs, ici, des opinions ; là, des indifférences politiques. — Les auteurs n’ont rien à répondre.

Le public a paru désirer la preuve de tous les documents employés. Les auteurs sont d’autant plus heureux de se rendre à ce vœu du public, que le public appréciera plus nettement ainsi ce que coûte de recherches la petite histoire.

Les auteurs veulent, au bout de ces quelques lignes, assurer de leur gratitude profonde M. François Barrière, qui, dans le JOURNAL DES DÉBATS les a payés de deux années de veilles, et qui a bien voulu donner à leur travail historique l’autorité d’une critique compétente et presque d’un témoignage contemporain.

    EDMOND ET JULES DE GONCOURT.
    31 janvier 1855. 


NOUVELLE PRÉFACE DE L’HISTOIRE DE LA SOCIÉTÉ FRANÇAISE PENDANT LA RÉVOLUTION ET PENDANT LE DIRECTOIRE[3]


L’histoire politique de la Révolution est faite et se refait tous les jours.

L’histoire sociale de la Révolution a été tentée pour la première fois dans ces études qui ont aujourd’hui l’honneur d’une nouvelle édition : l’HISTOIRE DE LA SOCIÉTÉ FRANÇAISE PENDANT LA RÉVOLUTION, que va suivre l’HISTOIRE DE LA SOCIÉTÉ PENDANT LE DIRECTOIRE, en ce moment sous presse.

Peindre la France, les mœurs, les âmes, la physionomie nationale, la couleur des choses, la vie et l’humanité de 1789 à 1800, — telle a été notre ambition.

Pour cette nouvelle histoire, i l nous a fallu découvrir les nouvelles sources du Vrai, demander nos documents aux journaux, aux brochures, à tout ce monde de papier mort et méprisé jusqu’ici, aux autographes, aux gravures, aux dessins, aux tableaux, à tous les monuments intimes qu’une époque laisse derrière elle pour être sa confession et sa résurrection.

Le public et la critique ont bien voulu nous tenir compte de notre travail : nous les en remercions.

    EDMOND ET JULES DE GONCOURT.
    Mai 1864. 
  1. E. Dentu, libraire, 1854, 1 vol. in-8.
  2. E. DENTU, libraire, 1855, 1 vol. in-8.
  3. Librairie académique, DIDIER ET Cie, libraires-éditeurs, 1865, 2 vol. in-18.