Pour cause de fin de bail/Nouveau Traitement du ver solitaire

Pour cause de fin de bailÉdition de la Revue Blanche (p. 185-188).

NOUVEAU TRAITEMENT DU VER SOLITAIRE

Au risque de passer pour un cosmopolite de bas étage, pour un sans-patrie, pour un Gannelon, je vais publier ici la lettre d’un Allemand.

En certains cas, la voix de l’humanité doit couvrir toute autre clameur, même celle de notre chère nation. N’est-ce point votre avis ?

Et puis, il s’agit de médecine, question qui, tel l’art, ne comporte point de frontières.

Voici le principal fragment de la lettre en question de mon Bavarois. (On voudra bien en excuser les légères incorrections grammaticales).

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« Je voulais vous voir à mon passage dans Paris, mais le temps manque et je vous écris ce billet pour vous faire savoir le moyen qu’un de mes amis, qui est un médecin à Anspach, vient de trouver pour débarrasser ses malades du ver solitaire, si ils l’ont.

» Mon intention avait été de l’envoyer à ma revue de médecine de Paris, si j’aurais écrit français mieux et comme un médecin ici.

» Comme on m’a dit que vous êtes très influent, peut-être vous pourriez le publier, ce serait un bon service à rendre pour l’humanité.

» Donc, Herr Professor Ruhlmann, mon ami, a chez lui un gros ver solitaire qu’il nourrit richement et qu’il est en train d’habituer.

» Si un malade en a un dans le corps, il ordonne une sévère diète pendant quatorze jours.

» Le ver du malade dépérit, il n’a plus bientôt aucune force.

» Alors H. Prof. Ruhlmann, fait avaler au malade le gros sien, la tête en avant, mais pas tout entier, car il garde la queue dans sa main.

» Le gros rencontre l’autre qui est très faible, il se bat avec lui et le mange.

» Puis, H. Prof. Ruhlmann le retire doucement en arrière et le malade est débarrassé.

» À la vérité, ce système a réussi mal au premier essai, parce que le gros s’est fixé dans l’intestin du malade et il n’a pas voulu sortir, le pauvre homme a fallu le garder complètement, de sorte que il en a deux maintenant.

» Mais c’était sans doute que le gros n’avait encore aucune habitude de ce qu’il devait faire et H. Prof. Ruhlmann fera un nouveau essai bientôt.

» Je vous ferai connaître le résultat. »

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Je ne sais pas au juste ce que pensera l’Académie de Médecine de ce bien curieux procédé, mais je crois être l’interprète de tous nos lecteurs en remerciant Herr Professor Ruhlmann (de Munich) de son intéressante communication.