Poésies inédites (Marceline Desbordes-Valmore)/À une mère qui pleure aussi

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À UNE MÈRE QUI PLEURE AUSSI.


Qui sait si votre enfant qui flotte dans vos larmes,
Dont votre cœur profond nourrit les jeunes charmes,
(Seul cœur qui de l’oubli le sauve et le défend)
N’a pas, au seuil de Dieu, rencontré mon enfant ?

Qui sait si leurs mains d’ange, un moment réunies,
N’ont pas pesé là-haut nos peines infinies,
Et, pleurant de l’amour qu’on leur garde en ce lieu,
N’ont pas compté nos pleurs pour les offrir à Dieu ?

Qui sait ! Je sais au moins qu’en vous voyant, Madame,
Une tendre nouvelle a rafraîchi mon âme,
Comme si mon enfant, puissante avec douceur,
À mon deuil éternel amenait une sœur.

Si c’est sa volonté, qu’elle soit accomplie !…
Rien ne relèvera notre destin qui plie.
Mais dans le deuil d’amour qui vient de nous lier,
Apprenons qu’il est doux de ne pas oublier !