Poésies diverses (Chateaubriand)/Charlottembourg
XVI.
CHARLOTTEMBOURG.
Sous les hauts pins qui protègent ces sources,
Gardien, dis-moi quel est ce monument nouveau ?
Un jour il deviendra le terme de tes courses :
Ô voyageur ! c’est un tombeau.
Qui repose en ces lieux ?
Un objet plein de charmes.
Qu’on aima ?
Qui fut adoré.
Ouvre-moi.
Si tu crains les larmes.
N’entre pas
J’ai souvent pleuré.
De la Grèce ou de l’Italie
On a ravi ce marbre à la pompe des morts.
Quel tombeau l’a cédé pour enchanter ces bords ?
Est-ce Antigone ou Cornélie ?
La beauté dont l’image excite tes transports
Parmi nos bois passa sa vie.
Qui pour elle à ces murs de marbre revêtus
A suspendu ces couronnes fanées ?
Les beaux enfants dont ses vertus
Ici-bas furent couronnées.
On vient.
Pour nourrir en secret un souvenir funeste.
Il a donc tout perdu ?
Non : un trône lui reste.
Un trône ne console pas.