Poésies de voyage
Revue des Deux Mondes, période initialetome 11 (p. 1137-1138).
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III.

en passant à kemper.


Le double flot coulait sonore et clair
Au confluent de l’Odet et du Ster ;

Comme un géant hurlant dans les vallées,
La cathédrale envoyait ses volées ;

Et Corentin et le roi Gralon-Maur
Sur les deux tours semblaient régner encor ;

Tous les Esprits et les Saints d’Armorique
M’apparaissaient dans la cité celtique…

Jean La Fontaine ! alors je t’arrachai
Un noir feuillet de malice entaché

« Aux flots bretons va, feuille champenoise,
« Dis-je en riant, tombe, ô feuille sournoise !

« Tout voyageur sur tes bords arrêté
« Doit ce tribut, Kemper, à ta beauté :

« C’est une fable, et qu’après un long somme
« Pourra rimer là-bas le faux bonhomme.

« Il sied vraiment de se moquer d’autrui
« Aux malheureux nés dans Château-Thierry ! »

— Et cependant sous nos vieilles murailles
Gaiement passaient les filles de Cornouailles,

Et laboureurs avec leurs longs cheveux,
Portant la braie ainsi que leurs aïeux ;

Tout verdissait sur la haute montagne ;
Tout se mêlait, la ville et la campagne

Le double flot coulait sonore et clair
Au confluent de l’Odet et du Ster.

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