Poésies choisies de André Chénier/Derocquigny, 1907/Terre, Terre chérie

II


......... Terre, terre chérie
Que la liberté sainte appelle sa patrie ;
Père du grand sénat, ô sénat de Romans,
Qui de la liberté jetas les fondements ;
Romans, berceau des lois, vous, Grenoble et Valence,
Vienne ; toutes enfin ! monts sacrés d’où la France
Vit naître le soleil avec la liberté !
Un jour le voyageur par le Rhône emporté,
Arrêtant l’aviron dans la main de son guide.
En silence, debout sur sa barque rapide,
Fixant vers l’Orient un œil religieux.
Contemplera longtemps ces sommets glorieux ;
Car son vieux père, ému de transports magnanimes.
Lui dira : « Vois, mon fils, vois ces augustes cimes. »
Du bord du Rhône, le 7 juillet 1790.