Poésies badines et facétieuses/Bethzabée

BETHZABÉE.

Autrefois sur le point du jour,
Une certaine Bethzabée,
Après sa cornette lavée,
Voulut se laver à son tour.
D’abord fut pour ôter la crasse :
Des doigts à la jambe l’on passe,
De la jambe jusqu’au genou,
Et de là je ne sais pas où ;
Tant qu’à la fin, chemise basse,
Elle s’en donna jusqu’au cou,
S’agitant de si bonne grâce,
Qu’un sage en fût devenu fou.
David, du haut de sa terrasse,
Je ne sais comment l’aperçut ;
Elle était blonde, blanche et grasse,
Le voilà tout d’un coup en rut.
Le grand veneur de telle chasse
D’abord chez la belle courut,
Croyant y trouver bonne place,
Il fit l’ambassade qu’il dut ;
Mais avec sa bonne grâce,
La belle assez mal le reçut,
Soit pour la feinte ou la grimace :
Mais à la fin elle le crut.
David la joint, David l’embrasse,
Et tant y fit qu’elle en conçut ;
La première fois ce ne fut
Qu’afin de mieux marquer la chasse.


L’enfant naquit, l’enfant mourut ;
Mais pour la seconde valut
Un trésor à l’humaine race ;
Car de là vint, comme à Dieu plut,
De main en main, notre salut.
Il faut avouer que la grâce
Fait bien des tours de passe-passe
Avant d’arriver à son but.