Poésies (Desbordes-Valmore, 1822)/Dors, ma Mère

Théophile Grandin (p. 134-135).

DORS, MA MÈRE.

Ô ma vie,
Sans envie
J’ai vu le palais du roi.
Ma chaumière,
M’est plus chère
Quand j’y suis seule avec toi.

Au village
Le jeune âge
N’est heureux que par l’Amour ;
Fuis la ville ;
Trop facile,
Tu m’oublîrais à la cour.

D’une reine
Souveraine
L’empire a-t-il plus d’appas ?
Ton image
Est l’hommage
Qui devance ou suit mes pas.

Reviens vite !
Tout m’agite.
Eh quoi ! je suis seule encor ?
Viens, mon âme,
De ma flamme
Partager le doux transport.

L’heure sonne,
Je frissonne…
Voici l’instant du retour.
Moins sévère,
Dors, ma mère !
Et laisse veiller l’Amour.