Poème de la prison/Ballade LII

Poésies complètes, Texte établi par Charles d’HéricaultErnest Flammarion (p. 69-70).

BALLADE LII.

     Me mocqués vous, Joyeux Espoir,
Par parolles trop me menez,
Pensez vous de me decevoir !
Chascun jour vous me promettés
Que briefment véoir me ferez
Ma Dame, la gente Princesse,
Qui a mon cueur entièrement ;
Pour Dieu, tenés vostre promesse,
Car trop ennuie qui attent.
     Il a long temps, pour dire voir,
Que tout mon estat congnoissés.
N’ay je fait mon loyal devoir
D’endurer, comme bien savés ?
Oüil, ce croy je, plus qu’assés.
Temps est que me donnez Liesse,
Desservie l’ay loyaument,
Pardonnez moy se je vous presse,
Car trop ennuie qui attent.
     Ne me mettez à nonchaloir,
Honte se a se me failliés,
Veu qui me fie main et soir
En tout ce que faire vouldrés.

Se mieulx faire ne me povez,
Au moins monstrez moy ma maistresse
Une fois, pour aucunement
Allegier le mal qui me blesse,
Car trop ennuie qui attent.


ENVOI

     Espoir, tousjours vous m’asseurés
Que bien mon fait ordonnerés,
Bel me parlés, je le confesse.
Mais, tant y mettez longuement
Que je languis en grant destresse,
Car trop ennuie qui attent.