Pleureuses/13
APOTHÉOSE
Mes yeux, lassés du jour qui ment,
Ô ma sainte, seule en novembre,
Vous cherchent adorablement
Dans la prière de la chambre…
Je m’arrête au seuil sans couleur.
Le grand déluge vous abîme,
Et dans quelque coin de douleur,
Vous écoutez, travail sublime.
Grise dans le soir en suspens,
Et profonde des jours sans nombre,
Votre front s’incline et s’épand,
Dans un cantique de pénombre.
Peu à peu mes regards du jour
S’habituent à votre tendresse…
Je comprends l’indistinct amour,
Et le mystère de caresse.
Sur la tempe un doigt s’attendrit,
Comme un saint et souffrant office ;
La joue un peu creuse sourit
D’un sourire de sacrifice…
Votre cou noyé, frêle à voir,
Vous soutient de douce épouvante
Perdue en musique du soir,
Infinie, à peine vivante…
Je vois votre cœur rayonnant,
Dans la candeur crépusculaire.
Je vois, docile, maintenant,
Que votre grand cœur vous éclaire…
À force de tranquillité,
Vous brillez comme auprès d’un cierge,
Dans le soir de réalité
Où vous êtes un peu la Vierge.
La nuit tombe avec ses rayons
Et sanctifie en paix immense
La gloire dont nous défaillons,
À genoux au cœur du silence.