Petit dictionnaire des grands hommes de la Révolution/Camille

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Camille Deſmoulins, l’écrivain chéri de la nation pariſienne. Chaque orateur a ſon champ de bataille & ſon auditoire. Les uns s’emparent de la tribune, les autres de la chaire, les autres du fauteuil académique ; c’eſt dans la rue que M. Deſmoulins s’eſt établi avec ſon éloquence, & il a tous les paſſans pour admirateurs. Avec troiſ mots ſavans, nation, lanterne, & ariſtocrate, il a ſu ſe mettre à la portée de l’honnête garçon boucher, de la modeſte poiſſarde, & de tous ces nouveaux lecteurs qu’a enfantés la révolution. Il faut de telles plumes pour conduire le peuple & l’accoutumer à avoir des idées. Voltaire & Rouſſeau, avec leurs ſublimes écrits, n’ont fait qu’éclairer & adoucir les hommes. Jamais ils n’auroient ſu les dégoûter du joug monarchique. Jamais, pour les civiliſer, ils ne leur auroient appris leurs forces, & jamais leur ſtyle tant vanté n’auroit oſé enſanglanter la France. Voilà juſtement ce que nos écrivains publics ont ſu faire. Sans leurs harangues périodiques, les François ſeroient encore tranquillement eſclaves. Aujourd’hui même ils ſe calmeroient, & ſe fatigueroient de ne vivre que de victimes. Mais heureuſement M. Deſmoulins entretient leur énergie avec ſes feuilles ; il tient, pour ainſi dire, leur vengeance en haleine, & il ne paroît pas un de ſes numéros, qu’il n’y ait quelque part du ſang de répandu.