Petit cours d’histoire de Belgique/p10

Maison d'édition Albert De Boeck (p. 158-160).

X. — RÉGIME HOLLANDAIS

§ 1. — Fondation du royaume des Pays-Bas.

Bienfaits du règne de Guillaume 1er.


1. Formation du royaume des Pays-Bas. — Après l’abdication de Napoléon, les délégués des grandes puissances, réunis au congrès de Vienne (1814-1815), décrétèrent l’union de la Belgique et de la Hollande, sous le sceptre de Guillaume d’Orange.

Ce royaume devait constituer une puissante barrière contre l’ambition envahissante de la France. Il renfermait d’ailleurs dans son sein tous les éléments désirables de prospérité. Le commerce maritime et la pêche, dans le nord, s’unissaient aux ressources agricoles et industrielles du midi ; et les colonies hollandaises étaient des magnifiques débouchés pour nos produits.

En 1815, Napoléon, quittant furtivement l’île d’Elbe, rentre bientôt à Paris. Il envahit immédiatement la Belgique, est vainqueur à Ligny, mais succombe enfin à la mémorable bataille de Waterloo, le 18 juin 1815. Il fut déporté à l’île Sainte-Hélène, où il mourut en 1821.

2. Bienfaits du règne de Guillaume 1er. — Guillaume d’Orange, par d’intelligents efforts, assura la prospérité du pays : une impulsion vive fut imprimée au commerce et à l’industrie, et l’enseignement fut l’objet de soins sérieux.

a) Il fit canaliser la Sambre de Charleroy à Namur, fit ouvrir les canaux si importants de Terneuzen et de Charleroy, et celui de Pommerœul à Antoing, qui permit d’éviter le territoire français.

La Société de commerce des Pays-Bas créée par lui, mit en relations suivies nos manufactures et les Indes. Signe caractéristique d’une indiscutable prospérité, le commerce anversois fut doublé en dix ans.

b) Au point de vue industriel, il y a lieu de signaler le développement de l’armurerie liégeoise ; la création, par l’Anglais John Cockerill, du splendide établissement métallurgique de Seraing ; celle des premiers hauts-fourneaux près de Charleroy et à Couvin ; l’état florissant de l’industrie drapière à Verviers, de l’industrie du lin, du coton surtout, dans la ville de Gand surnommée la Manchester belge.

c) Guillaume Ier mérita mieux encore notre reconnaissance, par une sollicitude éclairée pour l’instruction : les moindres villages eurent leur modeste école primaire, et les écoles normales de Lierre et de Luxembourg préparèrent des maîtres capables. Dans les villes s’ouvrirent des collèges nouveaux. Enfin, la création de trois universités, à Gand, à Louvain, à Liège, fut le glorieux couronnement de l’œuvre de rénovation intellectuelle de notre pays.

§ 2. — Causes de la révolution de 1830.


On ne peut assez déplorer, qu’après avoir ainsi travaillé au relèvement de la Belgique, le roi Guillaume ait rendu, par de lourdes fautes, une révolte des Belges nécessaire et légitime.

Voici les causes principales île la révolution belge de 1830 :

1. Constitution de 1815. La constitution de 1815 accordait à la Belgique et à la Hollande un nombre égal de députés aux États généraux, et cependant la population du sud était supérieure à celle du Nord.

La Belgique renfermait 3.500.000 habitants, et la Hollande 2.000.000 ; celle-ci avait un député par 37.000 habitants, et la Belgique, un député par 61.000 habitants.

L’assemblée des notables belges avait d’ailleurs, en 1815, repoussé la constitution par 796 voix contre 527. Mais 280 notables s’étant abstenus au vote, le roi considéra ces abstentions comme autant de suffrages affirmatifs, et déclara la loi admise : on qualifia le procédé d’arithmétique hollandaise.

Enfin, la constitution, en proclamant la liberté de conscience, avait soulevé les vives protestations du clergé, qui voulait le maintien exclusif du catholicisme.

2. Finances. — La dette énorme du gouvernement hollandais nous devint commune : il en résulta des impôts très lourds, notamment des taxes impopulaires sur la mouture et l’abatage .

3. Prédominance de l’élément hollandais. — La langue néerlandaise fut déclarée officielle, et les emplois furent ainsi fermés à la plupart des Belges.

Il y avait dans l’armée 2377 officiers hollandais et 444 officiers belges seulement.

4. Collège philosophique. — Enfin, Guillaume établit à Louvain un collège philosophique, où devaient étudier les jeunes gens qui se destinaient à la prêtrise.

Toute une légion de jeunes et vaillants journalistes fit une guerre ardente à ces injustices. Mais le gouvernement hollandais sévit rigoureusement contre eux. Le brillant publiciste de Potter, Plusieurs fois poursuivi, fut condamné à l’exil, en 1830. Il faut signaler aussi, parmi les plus éloquents défenseurs de nos droits, Claes, écrivain spirituel et caustique, Van de Weyer, Jean-Baptiste Nothomb, Ducpétiaux et Jottrand, rédacteur du Courrier des Pays-bas ; Lebeau, Rogier, Deraux, qui publiaient le Politique, de Liège, etc.