Panthéon égyptien, collection des personnages mythologiques de l'ancienne Égypte, d'après les monuments
Firmin Didot (p. 41-42).

SATÉ, ou SATI.

(satis, l’héra, ou la junon égyptienne.)
Planche 7

Les bas-reliefs sculptés sur les édifices religieux de l’Égypte, nous offrent assez fréquemment la représentation d’une déesse, caractérisée surtout par une grande feuille qui s’élève au-dessus de sa coiffure. Cette divinité reçoit diverses offrandes à la suite d’Amon-Cnouphis, à tête de bélier[1] ; elle est aussi figurée donnant la main au dieu Amon-Ré, sur un autel que soutient une belle statue égyptienne de la riche collection de M. Durand. Le nom hiéroglyphique de cette même déesse est toujours composé de trois caractères qui, répondant aux lettres coptes Ⲥⲧⲏ, doivent se prononcer Saté ou Sati. Il est évident que, dans les mythes égyptiens, la déesse Sati eut des rapports intimes avec Amon-Cnouphis ou Amon-Ré, le dieu suprême.

Cette déduction est changée en certitude par une inscription grecque du temps de Ptolémée Évergète II, gravée sur une stèle trouvée à Séhhélé, île située entre Éléphantine et Philæ[2]. On y lit en effet que la divinité locale, assimilée par les Grecs à leur Héra (la Junon des Latins), porta en langue égyptienne le nom de Satis, ou plutôt de Sati, en faisant abstraction de la finale grecque Σ. Dans cette même inscription, Hera-Satés, ou Junon-Satis, est nommée immédiatement après Ammon-Chnoubis. D’autre part, une inscription latine, copiée par l’infatigable Belzoni[3] dans les carrières de Syène, nous apprend que l’autel qui la porte est dédié à Jupiter-Ammon-Chnubis et à Junon-Reine, divinités protectrices de ces montagnes. Il est donc certain que Sati fut la Junon égyptienne, la compagne d’Amon-Cnouphis que les Grecs assimilèrent à leur Zeus, et les Romains à leur Jupiter.

Sur notre planche 7, cette déesse est figurée assise sur son trône, la tête couverte de la coiffure ordinaire des femmes égyptiennes, mais ceinte de bandelettes, ou plutôt du diadême. Le nu est ordinairement peint en jaune, et quelquefois aussi en vert, comme les chairs de Cnouphis ; ses mains portent l’emblême de la vie divine, et le sceptre ordinaire des déesses.

La légende, qui, sur notre planche, accompagne l’image de Sati, se lisait, Ⲥⲧⲏ ⲧⲛⲟⲩⲧⲉ ⲧϣⲉ ⲛⲣⲏ ⲧⲛⲏⲃ ⲙⲡⲉ, et signifie Saté ou Sati, déesse, fille de Ré, dame du ciel ; et, comme cette légende est habituellement la même partout où se montre la représentation de cette divinité, elle nous apprend avec certitude que Sati était fille du Soleil, dont le nom était , en langue égyptienne.

Que Saté fut l’épouse d’Amon-Cnouphis, comme l’ont supposé les Grecs, en l’assimilant à Héra, épouse de Zeus, ou qu’elle fut simplement une Parèdre ou compagne assidue du Jupiter égyptien, c’est ce que nous ne sommes point encore en état de décider.

Sati, l’Héra égyptienne, présidait à l’hémisphère inférieur du ciel[4], comme Néith à l’hémisphère supérieur ; et, il est digne de remarque sans doute, que les déesses compagnes d’Amon ou Cnouphis, le dieu suprême, soient celles qui, selon la croyance établie, occupaient et régissaient les deux grandes divisions de la sphère céleste.

La déesse Sati paraît enfin avoir rempli certaines fonctions dans le monde inférieur, l’Amenté ou enfer égyptien. Son image décore les portes des superbes tombeaux des pharaons, dans la vallée de Biban-el-Molouk, à Thèbes. Sur quelques manuscrits funéraires, cette divinité, portant la légende Sati, déesse[5], ou bien, Sati, fille du Soleil[6], reçoit, à l’entrée du tribunal de l’Amenté, l’ame du défunt, que lui présente une seconde déesse, la tête également ornée d’une feuille, mais qu’il ne faut pas confondre avec Sati, dans la plupart des manuscrits où cette dernière déesse ne paraît point.


Notes
  1. Description de l’Égypte, Antiquités, vol. I, bas-relief du portique d’Esné.
  2. Voyez Recherches pour servir à l’histoire de l’Égypte, etc. par M. Letronne, pages 341 et 480.
  3. Idem, page 361.
  4. Horapollon, liv. I, hierogl. 11.
  5. Grand manuscrit hiéroglyphique, gravé dans la Description de l’Égypte, Antiq., vol. II, pl. 72.
  6. Manuscrit hiératique, publié à Vienne, par MM. Fontana et de Hammer, 1822.

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