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266 SULLY PRUDHOMME

l'expression de nos méditations les plus hautes et il entrevoit la figure de notre destin... Le poète qui se cantonne en soi-même et qui sépare sa souffrance de celle d'autrui commence une œuvre fragile : il chante dans une solitude inféconde et lointaine, et l'homme qui passe ne se détourne plus pour écouter ces vaines chansons... Il con- vient de donner une voix aux douleurs de la terre et de l'homme. La Justice et la Pitié sont des Muses que l'humanité triste invoque, et que la poésie doit entendre si elle veut renouveler ses thèmes épuisés... Quand j'ai publié la Justice et le Bonheur, j'ai senti autour de moi de la sur- prise et de la résistance, et mon ami Gaston Paris ne m'a pas caché son inquiétude. Pourtant je crois que j'ai eu raison d'affirmer les nouveaux devoirs de la poésie. Je sais qu'une partie de la jeunesse m'accorde quelque influence sur sa direction, et mon labeur a déjà sa récompense puisqu'on a compris mon effort pour assurer , sur des idées démontrables, l'union morale des hom- mes... »

La maison qu'habitait Sully Prudhomme éclaire et ennoblit la Vallée aux Loups. En quittant le maître, j'ai erré à travers cette contrée chargée de