l'idée de loi 253
Sully Prudhomme se haussa vite à une con- ception, moins sèche de la loi. Il estima que la loi, pour demeurer inéhranlahle, ne devait pas être une invention arbitraire de l'homme, accablé par la crainte, — qu'elle devait prendre et garder une valeur objective, — qu'elle devait exprimer la vie profonde des êtres en traduisant les rapports nécessaires qui résultent de la nature même des choses. Il déclara que la loi de l'homme, c'est la justice; — que l'essence de l'homme est de prati- quer la justice; — que le devoir de l'homme est de réaliser en lui et autour de lui la justice. Le poète dépassait ainsi la conception utilitaire de la loi pour monter vers les sommets de la plus haute sagesse.
Or cette ascension ne traduisait pas l'exaltation d'un beau rêve, mais la connaissance de plus en plus élargie de la nature. Car un examen super- ficiel et unilinéaire de la vie aboutit à la doctrine de Hobbes; mais un examen approfondi de la vie découvre les vrais rapports des choses et garantit nos aspirations les plus élevées. Sans doute la nature observée analytiquement, c'est-à-dire sur